B987352101_PFP3_2012_324.pdf
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Bulletin de la Societe
des Etudes Oceaniennes
Societe
Etudes
des
Oceaniennes
Fondee LE 1 er JANVIER 1917
c/o Service des Archives de Polynesie frangaise, Tipaerui
B.P. 110,
98713 Papeete, Polynesie frangaise • Tel. 41 96 03
-
Fax 41 96 04
Facebook : Societe des Etudes Oceaniennes
•
e-mail: seo@archives.gov.pf • web : etudes-oceaniennes.com • web : seo.pf
Banque de Polynesie, compte n°12149 06744 19472002015 63
CCP Papeete, compte n°14168 00001 8348508J068 78
Composition du Conseil d'Administration 2012
President
M. Fasan Chong dit Jean Kape
Vice-President
M. Constant Guehennec
Secretaire
M. Michel Bailleul
Mme Moetu Coulon-Tonarelli
Secretaire-adjointe
Tresorier
M. Yves Babin
M. Daniel Margueron
Tresorier-adjoint
Administrateurs
M. Christian Beslu
Mme Eliane Hallais Noble-Demay
M. Robert Koenig
Membre d'Honneur
M. Raymond Vanaga Pietri
Bulletin
DE LA SOCIETE
des Etudes Oceaniennes
(POLYNESIE OR1ENTALE)
N °324
-
Janvier / Fevrier / Mars 2012
Sommaire
Les Oceaniens, explorateurs ou colonisateurs ?
La verite est entre les deux !
p.
4
Jean Guiart
Tentative de chronologie oceanienne
p. 45
Jean Guiart
Les plantes et les oiseaux de l’atoll de Temoe
Liste systematique des plantes
Liste systematique des oiseaux
p. 65
p. 72
p. 85
Jean-Frangois Butaud,
Edward K. Saul,
Graham M. Wragg,
Jean-Claude Thibault
Petite histoire du logo de la Societe des Etudes Oceaniennes
Contant Guehennec
P-107
(bulletin de la Society des. Glades Oceaniennes
Avant-propos
Chers membres, chers lecteurs,
A l’aube de cette nouvelle annee permettez-moi de vous adresser les
meilleurs de la S.E.O.
Que 2012 vous apporte la serenite, la prosperity et la reussite dans
vos actions.
L’annee passee, notre Societe a connu des petits changements, notamment par la recomposition de son Conseil d’administration, le depart en
metropole d’un administrateur et le recrutement d’une nouvelle secretaire
en la personne de Tetuanuimarurau Raufauore.
Cette annee, nous la commengons deja avec quelques changements
envisages et justifies par la redistribution des locaux de l’ancien Service
des Archives, devenu apres sa fusion avec d’autres entites du Pays, le Service du Patrimoine Archivistique et Audiovisuel. Monsieur Jean-Frangois
Cauvin, le directeur par interim de cette nouvelle entite, a en effet prevu
des travaux de reamenagement du batiment et la reaffectation des bureaux
dont celui de la Societe des etudes oceaniennes afin de pouvoir accueillir
de nouveaux agents et d’harmoniser au mieux l’accueil du pubhc aupres
de son service et de la S.E.O. Ne soyez done pas surpris de ne pas retrou4rae
cinquieme etage ; elle le quitte pour descendre au 3
etage ; e’est desormais l’unique point d’accueil du pubhc pour l’ensemble
ver la S.E.O. au
du batiment.
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N° 324
-
Janvier / Fevrier / Mars 2012
Notre assemblee generate ordinaire de l’annee se tiendra le 23 fevrier
2012 a 16 heures. Soyez done present a ce rendez-vous important de la
vie de notre Societe
-
ou donnez votre
pouvoir a un membre a jour de sa
cotisation pour voter les resolutions en votre nom.
A la suite de l’assemblee generate ordinaire, les membres se reuniront juste apres en assemblee generate extraordinaire pour debattre et
approuver les modifications statutaires proposees par votre Conseil d’administration.
Enfin, nous devons la fabrication du present numero au binome de
notre Comite de redaction, Robert Koenig et Christian Beslu ; vous trouverez pour l’essentiel un article sur l’atolI de Temoe aux Gambier de
Jean-
Francois Butaud et Jean-Claude Thibault, respectivement botaniste et
omithologue, et un autre sur le peuplement et la colonisation des lies du
Pacifique par les Oceaniens de l’ethnologue Jean Guiart.
Bonne lecture,
‘la ora na!
Le president
Fasan Chong dit Jean Rape
3
Les Oceaniens,
explorateurs ou
colonisateurs ?
La verite est entre les deux !
Regarder les realties geographiques: la carte les montre, du moins
pour une part (elles sont plus ou moins claires et pertinentes selon la projection choisie). Elies determined notre analyse, a condition d’en tenir
compte, en particular en ce qui concerne les donnees physiques: lies
hautes et lies basses, petites lies et lies de grandes ou de tres grandes
dimensions, distance entre les lies, et entre les lies et le continent asiatique, et la qualite de la navigation possible. Des mers, comme la mer de
Tasman, sont vraiment tres difficiles et dangereuses, et par consequent peu
frequences, on fait normalement le detour necessaire pour avoir des
chances de survivre : les Portugais s‘y sont aventures, ont vu de loin les
cotes occidentales de la Nouvelle-Zelande et ont juge Tabord trop dangereux. L’etendue marine entre la
Nouvelle-Guinee, la Nouvelle-Bretagne, la
Nouvelle-Irlande et les lies de l’Amiraute : les tempetes y sont tout aussi
violentes, si Ton veut traverser par le centre et non suivre les echelonnements d’lles a la circonference. Pour aller aux lies de l’Amiraute, on suit
N. B. La base de cet essai est un cours professe a l'UDP a I'automne 2010.
N°324 Janvier/Fevrier/Mars 2012
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la chaine d’iles et d’atolls qui se suivent en direction de l’ouest a partir de
la Nouvelle-Irlande.
En fin de compte, les masses continentales et les archipels dessinent
les routes suivies par les relations entre les populations et des continents
et des archipels. Quand on peut traverser un detroit de quelques milles
marins, on n’imagine pas de se lancer dans un voyage de deux ou trois
mille kilometres.
L’ensemble a considerer
L’ensemble qui doit etre considere va de Madagascar a l’ile de
Paques, ce qui fait pas loin de plus du tiers de la surface terrestre. Se limiter a la Polynesie consiste a restreindre inevitablement la portee de l’analyse et done a la fausser. La vision du regrette professeur Douglas Oliver
etait d’une unite culturelle fondamentale de l’ensemble oceanien : sous
d’autres mots, on retrouvait plus ou moins les memes institutions. J’approuve tout a fait ce point de vue. Avant l’an mille apres Jesus-Christ, Pensemble couvrant la Polynesie orientale, la Polynesie occidentale et la
Melanesie orientale relevait d’une bien plus grande unite culturelle qu’il
n’apparait aujourd’hui. Les institutions locales, tres originales chacune,
decouvertes au premier contact, dans la mesure ou on les bien a comprises, ce qui n’est pas toujours le cas, avaient moins d’un millier d’annees
d’existence, et avaient fait diverger de toutes sortes de fagons des cultures
insulaires plus proches les unes des autres auparavant.
Les races humaines ?
La notion de races humaines est a proscrire, d’une part dans le prin-
cipe. La pretendue valeur scientifique des principes qui fondent la discipline a abouti logiquement a la Shoah, parce qu’on s’est mis a hierarchiser
les races, ce qui est une idiotie, et dont la logique amene au crime.
Les apparences sont dues a des facteurs historiques secondaires et
des situations d’isolation relative, comme pour les Polynesiens en bout de
course (coupes de la Melanesie par la distance), comme les habitants des
Hebrides (les vraies) ou de l’lslande, et du jeu des lois genetiques dits effet
de fondateur et derive genetique. Ailleurs, les melanges par misgenation
5
{bulletin da Ui Jocieia dcx 6tiide,s Gcaanie/titas
sont tels que toutes les communautes humaines sont metissees d’une fagon
ou d’une autre et souvent
d’etrange maniere : avec les Huns en Bretagne,
les legionnaires remains en Suisse romande ou en Roumanie, les avantdans le sud-ouest de la France, les troupes arabo-ber-
gardes mongoles
beres dans le sud de la France jusqu’a Macon (les belles lilies aux cheveux
noirs et a la peau mate), les descendants des pirates et commergants nor-
diques au beau milieu de 1’Ukraine et de la Russie.
D’autre part les etudes d’anthropologie physique en cabinet ont porte,
traditionpour 1’essentiel, sur les restes humains voles dans les cimetieres
nels au XIXe siecle, du fait de la curiosite morbide des medecins militaires
de toutes nationality occidentales qui, devant l’incapacite de tout prendre,
choisissaient les restes osseux correspondant a des types imagines a
priori delaissant le reste, c’est-a-dire ceux qui representaient la majorite
,
de la population.
Scientifiquement, ces collections osteologiqes n’ont de ce seul fait
aucune
valeur, de meme que toutes les fausses etudes fondees sur elles.
Le plus tot ces collections seront rendues a leurs descendants pour etre
inhumees, le mieux ce sera. On ne saurait done conserver que les notions
objectives, correspondant a des caracteres generaux observes sur de
grands nombres, et qui ont tenu la route, la dolicocephalie et la brachicephalie, le prognathisme, l’arcade sourciliere plus ou moins marquee par
un bourrelet osseux des Aborigenes australiens, mais aussi d’autres insulaires, disperses un peu partout.
On notera les deformations craniennes provoquees depuis l’enfance
aussi bien dans le sud de lUe de Malekula, au Vanuatu, qu’en France dans
la region de Toulouse. Ces curiosites restent sans explication, sinon qu’il
s’agit d’une vision esthetique. Dans la volonte de remodeler l’aspect phy-
sique dont ils ont herite, ces gens sont alles plus loin que nous.
Ces caracteres sont visibles a l’ceil nu. Les tentatives de mensurations,
experience personnelle, sont d’une imprecision folle sur le vivant
et, sur le crane sec, tres relatives, les points indiques, dont la glabelle,
etant imprecis par nature (un creux). II faudrait une operation sur l’enfant
ce qui n’est pas
pour aboutir a des points satisfaisants a l’age adulte,
a mon
concevable, l’ossification n’etant pas controlable.
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N°324 Janvier/Fevrier/Mars 2012
-
Les marae un pen partout
A ce point de vue et en particulier, il existe d’autres evidences negli-
gees, comme celle qui fait comprendre que la societe et la culture maori
de Nouvelle-Zelande represented pour une part un etat de la culture et de
la societe tahitiennes au moment des migrations vers la Nouvelle-Zelande,
avant le temps des marae megalithiques construits qui sont une accretion
recede et, comme toutes les innovations culturelles dans ce monde insu-
laire, le fruit de la competition de prestige entre les grandes lignees.
Le marae maori, et done le marae polynesien ancien, est une place
recouverte d’herbe soigneusement coupee. Pas la moindre pierre visible.
Le marae, le meme nom, sur 1’ile de Tongariki au Vanuatu central, est une
meme place herbeuse, entouree de roches transports la, servant de siege
a Paine de chacun des groupes de descendance constituant le village. Sur
Pile d’Efate, il n’y a que de l’herbe, et pas de rochers, mais e’est toujours
le marae, qui est aussi, comme dans tous ces cas, le nom du village affecte
d’une place de danse. Remonter la chaine des marae austronesiens
amene pile au milieu de la Melanesie orientale.
Le seul edifice semblable aux marae tahitiens, en dehors des heiau
hawai‘iens, plateformes coheres en pierres surmontees de statues en bois
a vocation architecturales et d’edifices
religieux, est, dans l’ouest de Viti
Levu, le nanga, une enceinte constitute d’un mur de pierres comportant
des ouvertures se faisant face et au centre une pyramide de pierre a deux
Les rites qui ont lieu au nanga ont a faire avec les premices de la
etages.
recolte d’ignames.
Aucune fouille n’a eu lieu dans un nanga, tant on craint les reactions
de la population environnante. La Mission methodiste a accuse les Fijiens
de pratiquer des sacrifices humains dans le nanga, mais une enquete offi-
cielle, au siecle dernier, a conclu que l’accusation etait fausse. L’accusation
venait des chefferies dont les tenants du nanga dans la region refusaient
de reconnaitre P autorite, qui n’etait pas traditionnelle, mais reposait sur
l’alliance de ces chefferies avec la Mission methodiste, patronne ecclesiascelle des Cakobau
tique d’une royaute fijienne fabriquee de toutes pieces,
(Thakombau). Des loyalistes europeens de cette chefferie ont ecrit des
histoires a dormir debout. Un historien sans formation anthropologique
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bulletin d& la Joctete de& Gtude& Oceaniennes
specialise a cru pouvoir denier toute realite a la tradition fijienne des
chefferies nees de Tequipage de la pirogue Kaunitoni, venue de l’ouest.
Cet historien ne s’est pas adresse aux Fijiens, mais fait porter ses critiques
sur les scribes europeens de cette tradition.
Les chants et les mythes maori traitant du passe tahitien
Les chants et les mythes recueillis sous l’egide de Sir Apirana Ngata,
dans les annees d’avant-guerre, et leur commentaire interpretatif par l’erudit maori (c’est le titre dont il se reclame), Pei te Hurinui, montrent que
toute la tradition exposee se situe toujours au debut a Tahiti ou aux lies
Sous-le-Vent. Les deux langues sont mutuellement comprehensibles, j’en
ai fait T experience par l’observation, avec le petit effort intellectuel d’en-
lever ou de remettre les consonnes manquantes.
Toute etude sur le passe tahitien doit done passer par un travail com-
paratif avec la situation maorie, en tenant compte des specificites dues
aux contraintes materielles propres a la Nouvelle-Zelande. La difficulty est
que, si Ton dispose de seulement quelques centaines de pages de textes
tahitiens, on est en presence, en Nouvelle-Zelande, de milhers de pages
enregistrees en langue maori, qui attendent d’etre analysees. Il y a peu de
volontaires pakeha pour le moment, mais pas plus de candidats maori.
De VOcean Indien a VOcean Pacifique: Madagascar
Il ne s’agit pas seulement de l’ocean Pacifique a traverser. Les cotes
de l’ocean Indien ont ete de tout temps, au cours des mihenaires, le lieu
de passages maritimes dans les deux sens et qui se sont marques, en par-
ticulier, par l’arrivee de populations de langues austronesiennes a Madagascar. Comment ? Et dans quelles conditions ? On ne sait pas encore. Je
ne vois aucune donnee permettant de poser une hypothese serieuse, sinon
que les voyages ont du prendre des siecles, avant l’islamisation conquerante. et en suivant les cotes, pas en coupant tout droit et en frolant les
quai.c.iiemes rugissants. Done Titineraire devait etre connu. Depuis quand
exactemer t ? Les mouvements de populations qui marquent, pas les aventures individuelles, prennent toujours Titineraire le moins malaise : il y a
des femmes et des enfants a transporter. Les aventures unisexes au loin
8
Guiart/Apo
©
-
austronei
langues
des
Carte
m bulletin de fa Sociele des Slades Oceam'ca/icx
sont forcement sans lendemain. A moins de reussir a revenir et de repartir,
mieux armees pour une installation.
Au cours de la periode coloniale, la mode chez les specialistes blancs
etait de considerer que cette arrivee a Madagascar etait tardive, precedant
de peu les contacts avec le monde musulman, ou chinois, arrivee ainsi sortie de nulle part par rapport avec la Grande lie. On ne tenait pas compte
du temps necessaire, au moins un millenaire, pour peupler et se diversifier
culturellement sur un semi-continent. La connaissance archeologique est
encore
trop faible a Madagascar, qui entreprend seulement aujourd’hui,
avec fort peu de moyens, le travail de repousser constamment dans un
passe de plus en plus lointain les dates obtenues dans les fouilles, travail
quand meme quelque peu plus avance dans l’ensemble du Pacifique proprement dit.
Ce qui signifie une chose : le monde linguistique austronesien n’a
jamais ete isole des mouvements qui ont remue le sud et le sud-est de
l’Asie. On trouve des langues austronesiennes dans tout le sud-est asiatique
et, si Ton cherche bien, on en trouvera ailleurs. A cote de la mise sur pied
des grands Etats hindouistes dans l’interieur des terres, des allees et
village en village, dans un sens ou dans un autre, tout le long de
la cote nord de l’ocean Indien, ont trace evidemment une histoire parallele
venues de
inconnue, parce qu’on a ete obnubiie par la Grande Histoire.
On ne s’est pas pose la question de quel etait le support des voyages
de Sindbad le marin, qui est le mythe qui sous-tend une realite mal
encore
connue : on a pense,
logiquement, qu’elle refletait les voyages arabes pour
le controle des epices et qui ont provoque l’islamisation de 1’Indonesie,
ou les voyages
plus tardifs chinois qui ont atteint la Come et la cote ouest
de l’Afrique. Mais ces voyages sont trop tardifs pour y etre lies. On a cru
surtout que la constitution des Etats etait le seul facteur de
dynamisme his-
torique dans une region condamnee artificiellement a l’immobilite en
dehors de ces demiers.
C’est comme la sous-estimation de la fonction de la parente classificatoire en Oceanie, dont les auteurs europeens comprennent rarement les
potentialites. L’histoire classique n’a pas les moyens de savoir, en Asie du
moins, ce qui se passe de village de pecheurs en village de pecheurs, au
10
N°324 Janvier/Fevrier/Mars 2012
-
long d’un developpement cotier de plusieurs milliers de kilometres. On
salt ou Sindbad est passe, mais c’est tout. Les sociologies locales qui sont
le support de ces voyages nous sont inconnues.
Les langues tonales
Une autre interrogation dont les auteurs oceanistes occidentaux ne
parlent guere, c’est de l’opposition entre langues tonales et langues non
tonales.
Les envahisseurs venus du nord et du froid, si Ton peut dire, parlaient
des langues a tons, quatre dans le chinois classique, huit dans les langues thai.
Nous avons decouvert trois langues a tons, des tons parfois instables,
en Nouvede-Caledonie. II a fallu qu’Andre Haudricourt s’en mele,
apres
avoir etudie toutes les langues a tons du sud-est asiatique. Mais il nous a
fallu former un linguiste specialement pour les langues a tons, Jean-Claude
Rivierre, de fagon a pouvoir recueillir convenablement celles de NouvelleCaledonie. L’hypothese d’origine etait deja celle de Maurice Leenhard.
Curieusement, personne n’a releve ce dossier. Que venaient-edes faire la ?
Les dnguistes anglo-saxons ne se posent jamais la question.
La plus importante, la langue paaci, encore tres dynamique
aujourd’hui, appartient a un groupe tres coherent culturedement: la tradition donne son point d’arrivee en Nouvede-Caledonie, en bas de la vadee
de Kouaoua, et on peut suivre les peregrinations a l'interieur du pays; au
cours du dernier
midenaire, ce groupe a manifesto un comportement
conquerant, deplagant les populations de zones entieres pour s’instader a
leur place. Il ne s’agit done pas de ce que les Anglais appedent afluke. Le
temps couvert par ces peregrinations toume autour de deux midenaires
tout au moins.
Il y a, certainement quelque part, d’autres langues a tons en Melanesie ou en Nouvede-Guinee. On ne les a pas decouvertes parce que les dn-
guistes travaidant sur la region ne sont pas formes pour les langues a tons.
Il y a la un dossier dont on entendra certainement parler, mais quand ? Et
ou ? Comment raisonner sur les
langues de I’ensemble de la region sans
tenir compte de ce facteur-la ? Ces langues a tons sont-edes venues tout
armees du sud-est
asiatique ? Ou sont-edes nees d’une transformation sur
11
m bulletin de- hi Socieie des Studes Qceaiue/mcs
place de systemes d’accentuation devenus trop complexes et qui avaient
besoin d’une forme de rationalisation ?
Je ne saurais demontrer cette hypothese, que je caresse depuis longtemps. Mais Andre Haudricourt est mort qui aurait pu resoudre le probleme, il en avait seul les moyens intellectuels. Je ne suis pas sur que ma
solution soit la bonne. Mais le chinois classique, bien sur stabilise par
l’ecriture, a plusieurs milliers d’annees d’existence et les langues chinoises
locales, toutes a tons, sont multiples.
On peut done imaginer plusieurs milliers d’annees, moins stables
bien sur, pour la langue paaci. Mais quelle en est la signification pour
nous ? Pas de reponse
possible pour le moment.! Peut-on, ou pas, inclure
langues a tons dans la mouvance austronesienne ? La question n’a
meme pas ete posee. Les langues papoues n’ayant, pour le moment pas
ete decrites comme comportant des langues a tons, il y aurait done une
troisieme famille de langues en Oceanie, bien cachee dans les coins.
ces
Les mouvements de petits groupes
C’est la meme indifference, chez les auteurs, aux mouvements quotisuivant les cotes, dans un sens ou dans un
diens de tout
petits groupes,
autre, constamment, depuis des millenaires. Ou, devant l’encombrement
des cotes, de la mer vers l’interieur, et depuis l’interieur en redescendant
un
fleuve, puis un autre.
C’est le mouvement brownien de tout un peuple venu d’Asie, ou plutot
de peuples sans nombre, allant grosso modo dans le meme sens, qui ont
peuple l’lndonesie, puis la Nouvelle-Guinee et les archipels qui en dependent, allant dlle en lie le long de Fare melanesien, puis, partant de la, toujours par petits groupes successes, pour decouvrir et peupler les lies qui
ont constitue la Polynesie. Ce mouvement fonctionne encore en NouvelleGuinee : les peuples de la montagne avancent de haute vallee alpestre en
haute vallee alpestre, puis redescendent encore vers la cote par les lignes
de cretes. Ce mouvement qui accumule les millenaires est toujours present. Il
par envahissements successes, et meme selon des
peut proceder
modalites fort peu charitables, par massacres systematiques pour chasser
devant soi les minorites trop faibles et qui sont mises devant l’obhgation
12
N°324 Janvier / Fevrier / Mars 2012
-
de fuir. J’ai ete temoin de cette violence dans la vallee de la
Baliem, en
Nouvelle-Guinee occidentale.
Mais ses acteurs sont rattrapes en quelque sorte
aujourd’hui par la
puissance grandissante de la Chine a laquelle, cette fois, ils n’echapperont
pas, la retrouvant sur les cotes ou elle commence a s’installer, pour des
raisons d’exploitation economique des gisements miniers. Ils ont
perdu la
partie. Ils avaient fui, il y a plus de quarante millenaires, et ne savent
pas
encore que c’etait pour rien...
Les ties aux epices
La Micronesie a ete peuplee aussi bien a partir des des
Philippines:
elles etaient le point de passage oblige et ont garde des relations
constantes avec la partie occidentale de la Micronesie. La
presence espa-
gnole a Manille a protege ces ties de la venue des dows arabes. 11 faut dire,
la, qu’elles n’etaient pas classees parmi les ties aux epices.
La noix de muscade ne venait pas de la, mais de la pointe occidentale
de la Nouvelle-Guinee, faisant partie du pseudo-tribut paye par les Papous
de la region aux rajahs de Tidore et de Temate, qui les mettaient, en quelque
sorte, sur le marche international a partir de la. Deja au temps des Romains,
il y a plus de deux mille ans. Le clou de girofle venait des Moluques, ainsi
que de ces deux ties bees commercialement a la Nouvebe-Guinee.
Le mouvement des traits culturels
Le long de ces itineraries, indefiniment ramifies, il n’y a pas que les
hommes qui bougent, mais aussi ce que Ton designe dans la profession
du nom de « traits culturels ». Ils bougent eux aussi, transports par les
hommes et les femmes indefiniment, sur de petits allers et retours ou a
l’echelle de migrations acceptables, a tres faible echebe numerique et qui,
de ce fait, ne genaient personne, mais indefiniment repetees. Ces mouvements n’ont pas cesse. Ils peuvent changer de forme, mais ils continuent,
du sud-est asiatique a travers l’Indonesie, de 1‘Indonesie a la Nouvelle-Guinee, puis a travers la masse meme de la Nouvelle-Guinee. Ils transportent,
aujourd’hui, des fusils d’assaut de contrebande au centre de
la Nouvelle-Guinee. Les camions qui les transportent sont attaques le long
entre autre
13
d&u/fetiM de fa Societe- dex &adex Occam
de la route par les populations riveraines, d’ou une diffusion encore plus
large que prevue etc.
Le developpement economique colonial a induit par la suite des
migrations de main-d’oauvre (les Chinois ou les Hindous en Malaisie, les
Hindous a Fiji, les Chinois et les Japonais a Hawai'i), les evenements politiques en ont provoque d’autres plus recents (les Hindous eduques de Fiji
vers la Nouvelle-Zelande et le Canada).
Les reponses a nos interrogations sur les continents
voisins
Lorsque j’etais etudiant, on cherchait a mettre sur pied une vision
plus large qu’aujourd’hui, sachant qu’une part des interrogations trouveraient leurs reponses sur les continents voisins
qu’on connait finalement si peu. Quelles sont les methodes convenables pour assurer la
connaissance de ce qui motive et sous-tend des centaines de millions
—
d’hommes ? On ne les a pas encore vraiment trouvees, meme si Ton met
aujourd’hui sur pied plutot des raccourcis. Ce probleme de methode n’a
1’Oceanie
pas ete resolu en anthropologie, ni en Asie, ni en Afrique. Seule
nous offre la possibilite de l’etude de populations a des echelles nume-
riques scientifiquement maniables par un petit nombre de chercheurs de
toutes
specialties, a condition qu’ils se coordonnent entre eux.
Mais il est etrange que ce que nous savions, et ce que nous pressen-
dons, aient ete mis de cote par des generations plus etroitement specialises
que les notres.
Le Pacifique Nord
Nous savions deja que le Pacifique Nord avait ete, et sur terre et surtout
sur mer, un autre lieu de passage constant. Faire passer les hommes a
pied
est passe tellement. Et
par le detroit de Behring n’est pas satisfaisant. Il en
n’ont pu le faire, pour
passer a pied au moment des grandes glaciations! Ils
part, que par voie maritime, rencontrant ou passant au nord immediat
des lies Hawaii’i; celles-ci ont ete, plus tard en effet, frequentees, en demiere
une
instance, et par des navires de peche japonais a la derive, et par des navires
chinois zigzaguant lentement dans cet espace maritime (leurs autorites
14
N°324 Janvier /Fevrier/ Mars 2012
-
politiques n’etaient pas favorables a une expansion par mer), puis par des
embarcations montees par des Cosaques avancant vers Test et
qui s’etaient
heurtes a l’ocean, ou encore par des galions
espagnols passant tres au
mais
condamnes
a
se
large,
parfois
rapprocher. En plus des corsaires qui
suivaient ces demiers a la trace. Tout ce mouvement n’a
ne
toupas
pu
pas
cher les lies Hawaii. Et, s’il a existe au cours du dernier
il a fort bien pu exister avant,
demi-millenaire,
quoique differemment, pas tout a fait avec
les memes acteurs, mais sur les memes
cheminements, de Siberie orientale en Amerique du Nord. Les millions d’Amerindiens sont bien venus de
quelque part. Et Ton sait qu’ils etaient deja la au moment des grandes glaciations.
Les Hawai‘iens qui ont tue le
capitaine Cook n’avaient eu de longtemps des raisons de considerer, l’un apres l’autre, tous ces nouveaux
venus comme des dieux, la curiosite
biologique de leurs enfants et celle
de leurs femmes depouillant vite les
etrangers de pareils oripeaux. La divi-
nisation des blancs par les Oceaniens est le fruit de la vanite des
premiers,
qui se sont pris pour des surhommes, des surhommes si souvent, en realite, bourres de whisky ou de gin. Attribuer cette divinisation des blancs
justement a ceux des Oceaniens qui avaient eu le plus de contacts exterieurs et les plus varies, consiste a
remplacer la raison par Tinvention.
Leroi-Gourhan, dans
son
du
Nord
montre
tout
ce qu’il y a d’ethnoArcheologie Pacifique
qui
graphiquement commun entre la Siberie orientale, avant la russification,
et le nord-ouest de
l’Amerique. Claude Levi-Strauss a montre la parente de
Les auteurs actuels ont oublie la leqon d’Andre
,
Tart indien de la cote et des lies du Canada occidental, avec Part de la
Chine ancienne. Les apparentements formels sont demonstrates, les inter-
pretations dans chaque zone culturelle plus difficiles.
Ce qui amene a considerer comme evident que les environnements
continentaux du Pacifique Sud n’ont pas pu ne pas pousser des
pseudopodes
un peu dans toutes les directions. La
poussee principal conceme le developpement de la nation mongole et de la nation chinoise un peu plus au sud.
Avant qu’elles n’aient pris les formes politiques sophistiquees reconnues
notre science historique, nous avions des masses confuses
une issue a la
par
qui cherchaient
pression interne de leurs nombres de plus en plus grands.
15
(Atd/elin de la Jociele dex Stadex Ocean
Leur motivation etait simple a comprendre, les hivers siberiens et l’aggravation des conditions de vie pour l’homme determinees par les periodes de
glaciations. Ces nations en devenir allaient vers le soleil au zenith.
La pression vers le sud
La pression vers le sud a, par voie de consequence, pousse les populations parlant des langues austronesiennes, elles aussi encore plus loin vers le
sud. L’apparition de ceux qui deviendront les Vietnamiens, les futurs Thailandais ou les Khmers les ont pousses a leur tour vers Test, a travers l’Indonesie;
l’implantation de l’hindouisme, puis de l’lslam et la constitution d’Etats insulaires a partir des ports et des villes, les a pousses, une fois de plus, d’Indonesie en Nouvelle-Guinee, du moins au cours de la demiere periode.
II faut considerer, en effet, que ce sont les touts debuts des tres lentes
coalescences vers des systemes politiques centralises qui ont cree par voie
de consequence tous ces mouvements centrifuges, bien avant la naissance
des agricultures fondees sur les cereales. Les Oceaniens ont etabli leur
survie sur le taro et 1’igname, parce qu’ils les cultivaient deja a leur point
de depart, sous des formes archai'ques (faciliter et desherber regulierement les habitats spontanes ou transferer systematiquement des plants
spontanes sur des parcelles choisies et preparees), sur le continent asia-
tique ; ils y vivaient de peche et de cueillette et de ce debut d’agriculture,
et ils y avaient decouvert la
partialite du taro vis-a-vis de l’eau
—
s’ils
avaient connu le riz, ils l’auraient apporte avec eux, et de meme s’ils
avaient connu le metal.
Ils ont apporte d’Asie du Sud, et non de Chine, le banian, un arbre
cultive, partout, pour des raisons cultuelles, religieuses: ses racines terrestres constituent une des entrees du pays souterrain des morts. II consti-
depart de la migration vers Test a partir du
detroit de Malacca. On neglige aussi le roseau, implante partout par les
hommes aux abords des habitats, forme de protection contre une attaque
tue un marqueur du point de
et materiau utile a toutes sortes de petites choses, dont les torches pour
la peche de nuit.
De la meme fagon, la diffusion de la noix de betel dans toute la Nou-
velle-Guinee cohere et la Melanesie jusqu’aux lies Salomon, indique un
16
N°324 Janvier/Fevrier/Mars 2012
-
point de depart d’Asie plus au sud qu’au nord, ce que la theorie taiwanaise
ne satisfait pas. Celle-ci evite
soigneusement de se referer a ce qui la
a savoir la realite
geographique. La simple logique veut
que les Taiwanais austronesiens se soient diriges non pas vers 1’Indonesie
et la Nouvelle-Guinee, mais vers les lies
Philippines, plus proches. Ce qu’ils
ont fait d’ailleurs. II n’existe
pas de Melanesiens, ni de Polynesiens, qui
seraient partis de Taiwan.
Les Austronesiens ont du partir bien
plus tot, des milliers d’annees
devant
des
masses
en
tot,
plus
mouvement, masses en mouvement brownien comme eux plus tard, mais les
nombres, au depart, n’etaient pas
de leur cote. Ils pratiquaient le controle des naissances les Austronesiens avec 1’ecorce de
Barringtonia ou autres abortifs), confronts a
des peuples qui ne le pratiquaient pas les Chinois et les
Mongols a ce
contredirait
—
-
-
moment-la.
Plus ou moins tard, par une succession de petits
decrochages en
echelle du nord au sud, en nombres indefinis, et sur ce
sera
tard
qui
plus
les cotes chinoises, puis vietnamiennes, ils traverseront d’lles en lies a travers une Indonesie
beaucoup plus largement etalee qu'aujourd’hui, lais-
sant derriere eux, un peu
partout, de nombreuses communautes en
position minoritaire ; beaucoup seront, plus tard, absorbees, les plus
importantes etant les Chams du sud du Vietnam, assez nombreux pourtant
pour avoir cree un empire detruit par l’expansion vietnamienne. La montee de la mer les remettra en route, avant Tinstallation de communautes
rizicoles nouvelles disposant du metal, du buffle et de la roue, a l’interieur
desquelles d’ailleurs une partie d’entre eux se fondra, du moins ceux qui
etaient restes sur place a travers l’lndonesie.
Les acquis a partir de Vlndonesie
De Kalimantan (Borneo) jusqu’a Samoa, on utilise les feuilles de palmiers Metroxylon pour couvrir les maisons et, surtout, pour trader,
hommes et femmes reunis, la moelle au sein du tronc afin d’en tirer une
fecule ; cest la nourriture principale dans toutes les grandes zones marecageuses fluviales et, ailleurs, une alimentation de famine, dont on prepare
quantite pour passer la soudure annuelle. Mon information,
une certaine
17
bulletin de la tfociete del Guides Oceaiiieimes
recueillie sur place, est que les Samoans connaissaient la technique de
confection de la fecule du palmier sagoutier. Des auteurs recents le nient,
peut-etre parce qu’ils sont eux-memes trop recents.
Mais d’autres, moins
impermeables a la realite, nous livrent aujourd’hui des recettes
de gateaux
samoans realises a partir du sagou.
Le cocotier, le bananier, la canne a sucre et l’arbre a pain constituent,
oceaniens, et ici melaneles
apports plus particulierement
et les lies
siens; e’est, en effet, entre la cote nord de la Nouvelle-Guinee
semble-t-il,
de l'archipel Bismarck que ces plantes sont nees en tant que cultivars,
notre univers
plantes de cultures par et pour les hommes, a l’usage de
en un second temps, par les Portuactuel. Elies ont ete diffusees
partout,
toutes les autres
gais, qui ont fait des fortunes avec, bientot copies par
nations maritimes occidentales, dont les Anglais, qui se sont interesses
meme au fruit a
pain pour l’introduire aux Antilles.
L’introduction de la canne a sucre dans les pays tropicaux et subtroou le
picaux est a l’origine de plusieurs siecles d’esclavagisme europeen,
Pacifique Sud a ainsi, indirectement, une part de responsabilite theorique.
Le moyen
La date ancienne de ces mouvements de survie culturelle a l’origine
le probleme du moyen. Nous ne
laisse
de tous ces
deplacements
planer
on sait, tout au
savons pas qui, ni ou, a imagine la pirogue a balancier ;
moins, que l’aire de diffusion va, comme les langues austronesiennes,
de
exactement
Madagascar a 1’ile de Paques. Les deux phenomenes sont
commence a
parallels. Mais ce que Ton sait, e’est que les Oceaniens ont
e’est
bouger tres longtemps avant l’invention de la pirogue. Evidemment,
moins romantique. Mais la verite et le roman font deux.
L’evolution oceanienne de la pirogue a balancier est allee vers la
de la Nouvelle-Caledonie a Fiji et jusqu’a la Polynesie
pirogue double,
orientale. L’evolution asiatique de cette meme pirogue a balancier est allee
et les Phivers le trimaran, dont l’aire de diffusion comprend l’lndonesie
et la Micronesie. Le premier progres technique favole
hppines par prao
rise le volume d’emport et le nombre de passagers, le second favorise la
vitesse, dans un univers plus proche de l’Asie et plus dangereux.
,
18
N°324 Janvier /Fevrier/ Mars 2012
-
Les pirates de Nouvelle-Guinee occidentale
qui allaient, une fois par
an, dans les alentours de Waigeo et Halmahera, enlever des vivres
(ignames) et des femmes pour les rapporter chez eux, dans les lies de la
baie de Geelvink, utilisaient des trimarans. II avait d’autres
y
pirates, ailleurs, dont ceux qui ont tue Magellan. La piraterie, dans cette region,
n’etait pas l’ceuvre de mafflas, mais de communautes
entieres, hommes et
femmes reunis, et eOe etait tres ancienne, comme les
II etait souhaitable de pouvoir les
naufrageurs bretons.
gagner a la course. Les lourdes pirogues
doubles n’auraient pas fait l’affaire. Contrairement a ce
que les auteurs
anglo-saxons affirment, la pirogue a deux coques n’est pas nee aux lies Fiji
et a Tonga, mais en Nouvelle-Caledonie. Le Vanuatu n’en a
pas.
Mais, tout au debut du grand mouvement austronesien, les pirogues
a balanciers, catamarans ou trimarans n’existaient
pas encore. II faudra
attendre plusieurs millenaires.
Les radeaux doubles
Jusqu’aux lies Salomon comprises, les voyages pouvaient se faire
cependant d’lle en lie, avant l’invention des pirogues, avec des radeaux a
double epaisseur, perces d’une ouverture centrale et
manipules la a la
godille. Ces radeaux existent toujours au nord-ouest de l’Australie (lies
Melville) ainsi qu’aux Ties Loyalty; ils servent a idler en haute mer pour la
peche hauturiere aux lies Melville, et pour aller retirer les nasses posees
sur les hauts fonds lointains a Lifou.
En choisissant soigneusement le moment, ils
permettaient sans diffi-
culte le passage d’une Tie a l’autre, a condition de bien calculer
Tangle de
depart, pour profiter de la force et de la direction des courants dans les
detroits separant les lies. II fallait tenir compte de la derive provoquee par
ces courants. La distance la
plus rapprochee n’etait pas la moins difficile
de ce seul fait. Certains detroits etaient plus faciles a traverser du fait de
Texistence d’llots intermediaires.
En 1947, un jeune couple en rupture de ban avec ses families res-
pectives, opposees au mariage, partit en radeau a double epaisseur, propulse a la godille, de Wetr a Lifou, pour aboutir au village d’Ohnyotr, a la
pointe orientale d’Ouvea, peuple d’immigrants anciens de Wetr et des
19
m bulletin f/c la Society t/es &fades- 0cea/ue/i//es
families, et s’y installa. Le fait, plutot sportif, etaiit donne la force
du courant, a ete consigne dans les proces-verbaux des deux gendarmeoil j’ai
a
ries, au point de depart et au point d’arrivee. Je l’ai appris Ouvea,
rencontre ce couple. J’avais deja publie un article, redige par un chef de
Lifou qui me l’avait apporte et qui traitait justement de ce radeau.
memes
L’ere des pirogues a balancier
Mais les radeaux ne permettaient d’aller ni de Chine a Formose, ni
ni de Santa Catalina aux Santa Cruz, ni de Santa Cruz
de Formose
ailleurs,
qui est passe par Taiwan ne peut etre que plus tardif et date du temps des pirogues, epoque a laquelle le Pacifique occidental etait deja largement peuple, et les langues austronesiennes deja en
aux des Banks. Tout ce
place, jusqu’a Santa Catalina des Salomon ou les lies Santa Cruz
moins. Le Lapita etait deja en place aussi. Mais rien ne prouve que les
tout au
L’lndonesie serait
pirogues a balancier soient une invention oceanienne.
plus convenable comme lieu d’origine, a defaut du sud-est asiatique, qui
fait partie aussi de l’aire de diffusion des pirogues a balancier, et cela
jusqu’a Madagascar. Le Pacifique Sud n’est pas le centre de ce monde-la,
ou les langues
qui se situe tout aussi bien autour de la Malaisie actuelle,
austronesiennes sont en particular celles des populations de chasseurs-
cueilleurs dits Negritos de l’interieur.
Pourquoi parler des Santa Cruz ? Pour une raison qui avait echappe
Raymond Firth et que les archeologues ne citent jamais, probablement
ou Vanikoro, il
par ignorance. Des Santa Cruz, c’est-a-dire depuis Tikopia
faut trois jours de pirogue pour parvenir au milieu de Fare qui va d’Espiritu Santo jusqu’aux lies Banks les plus orientales. Deux jours pour parvenir a Vatganay, llot volcanique isole au nord-est de l’archipel des lies
a
et
Banks, ou les equipages des pirogues trouvent des taros, des bananiers
successeurs.
des cocotiers, qu’ils doivent faire Feffort d’entretenir pour les
Le jour suivant, ils changent de cap et arrivent, en un jour, aux Banks
ou sur la cote
d’Espiritu Santo. Ils viennent y chercher des vivres en
rester sur
periode de famine chez eux, des femmes pour epouser et pour
a
place ou repartir, ou encore, de maniere plus modeme, chercher Luganlies
ville, Espiritu Santo, un emploi salarie a des taux plus eleves qu’aux
20
Les pirogues les plus
sophistiquees de I'Oceanie,
constitutes de plusieurs coques associees, entre six et
douze et jusqu'a trente, ces lakatoi
en haute
partaient
mer, passaient au nord de I’Australie
vents a I'aller et au retour,
deltas a
pour capter les
apportant sur la cote des
I'ouest du golfe de Papouasie, les
poteries
qu'ils echangeaient contre les provisions de sagou (fecule du palmier sagoutier, Metroxilon
tait la soudure entre deux recoltes le
semi desertique de la
sp.)qui permetlong de la cote
Papouasie orientale Le sagou,
conservation, etait plus
dense et necessitait plus de capacite de
portance au
tres humide pour en faciliter la
retour. Les lakatoi etaient demontes et reconstruits a
deux fois plus de coques pendant
que le sagou etait
en fabrication. La fabrication du
sagou est connue depuis Kalimantan a I'ouest (Borneo) jusqu'aux Ties
Samoa induses, comme aliment de soudure
(traduction du passage des ancetres des
Polynesiens en Indonesie, en Nouvelle Guinee et dans toutes les grandes
Ties de la Melanesie.
Photo Ian Hogbin, ex: Peoples of the South West Pacific.
bulletin de la Jocieta dc& &Ludc& 0tvea/ue/ineS'
Salomon. Les archeologues anglo-saxons ignorent l’existence de Vatganay,
pourtant notee par les collaborateurs de Firth dans leur inventaire geogra-
pliique de l’Oceanie publiee au cours de la demiere guerre par l’Amiraute
britannique, et que l’on trouve maintenant mentionnee dans certains atlas
scolaires neo-zelandais.
Les Aborigenes australiens, peuples plus anciens dans la region que
les Austronesiens, avaient deja utilise ces memes radeaux pour passer
jusqu’en Nouvelle-Guinee et, de la, en Australie par les lies du detroit de
Torres (alors emerge), ou pour suivre les cotes des continents gigantesques de l’epoque (Sahul). Ils ont regu, a leur tour, les pirogues a balancier de Nouvelle-Guinee en passant aussi par les lies du detroit de Torres.
Ils avaient deja, pour la petite navigation cohere et entre autres en Nou-
velle-Guinee, regu (mais est-ce plus tard ?) l’art de naviguer au plus pres
de la cote dans des pirogues monoxyles, choisis dans des arbres de grands
diametres pour qu’elles soient plus larges et par consequent plus navigantes. Tous ces passages de temoins ne presentent pas une coherence
chronologique parfaitement claire.
Lorsqu’il a fallu partir plusieurs jours, ou plusieurs semaines, en mer,
Fiji a partir de la Melanesie orientale, les
pirogues a balancier etaient deja la, dont la coque en bois d’arbre a pain,
insubmersible (Tikopia, Vanuatu), etait une des forces. Quand a-t-on
invente les pirogues doubles, venues apparemment avec l’homme en NouveUe-Caledonie, aux lies Fiji et en Polynesie occidentale ? Ce qui est sur est
que la Nouvelle-Guinee et le Vanuatu ont prefere perfectionner la pirogue
a balancier et en creer des formes de grandes dimensions, adaptees aux
en vue d’atteindre les lies
mauvaises mers entre les lies au large de la Nouvelle-Guinee ou du
Vanuatu, mais ou les vagues sont relativement courtes et viennent de partout a la fois. La grande houle du Pacifique n’y est pas vraiment presente.
Par contre les tsunamis y sont frequents.
Nous connaissons done le moyen physique ; les radeaux pour sortir
d’Asie, en suivant les cotes et pour traverser la ligne de Wallace ; les
pirogues, apparemment, a partir des grandes lies de la Melanesie (par
exemple pour aller de la Nouvelle-Guinee aux lies de l’Amiraute, ou les
distances en haute mer depassaient les capacites des radeaux : les des de
22
N°324 Janvier / Fevrier / Mars 2012
-
l’Amiraute presentent un fort constituant originaire de Micronesie, qui
n’est pas non plus venu en radeaux, a quelle date ? Nous ne le savons pas.
II existe un peu partout la capacite technique de construire des radeaux
de plus grandes dimensions, propulses a la voile ou a la godille, ou les
deux selon le moment et l’opportunite. De cela on ne traite guere. Les
pirogues doubles caledoniennes se propulsent a la godille a l’interieur du
lagon lorsque les tetes de corail sont trop nombreuses et trop dangereuses
les
trans-
pirogues
pour aller a la voile. Nous savons, par contre, ce que
a un mariage entre Samoa et Tonga
invites
les
tard,
depuis
portaient plus
ou
Fiji perdus en Melanesie suite a une tempete, a des expeditions
d’echanges de biens rares contre des pores.
Le mouvement nord-sud
Ce que chacun oublie aussi est que le Pacifique n’est pas settlement
le temoin de mouvements ouest-est, ou le contraire, mais aussi nord-sud.
Ce dernier,
ignore aujourd’hui, alors qu’on le sait depuis un bon
trop
demi-siecle, est bien sur minoritaire, en termes de volumes et d’individus
transports, mais il n’est pas culturellement insigiiifiant. Il a surtout transla Melanesie la
porte, depuis le Japon meridional au nord et au sud vers
de
plus en contact avec la Polynesie occidentale, les elements techniques
la peche en haute mer avec des leurres, qui sont partout semblables, et
cela jusqu’en Nouvelle-Zelande ; aussi entre autres les metiers a tisser
trouves aux des Santa Cruz et l’herminette a lame taillee dans la masse
de
de traits culturels aussi types que les armes utilisant les
benitiers; en plus
epines de raies, parfois a foison.
On sait que les archipels micronesiens commergaient avec la cote
nord de la Nouvelle-Guinee. Les pirogues micronesiennes atterrissent, une
fois par generation, et le plus souvent involontairement, sur la cote occidentale de File d’Epi au Vanuatu, les courants amenant tout ce qui flotte
habitants de Tikopia
venu du nord a 1’ilot aux Chevres a proximite. Les
sont toujours en contact avec ceux des lies Banks au nord
du Vanuatu. Et
respecte que Raymond Firth, concluait que les Polynesian
outliers etaient, en realite, aussi souvent micronesiens que polynesiens.
n’ont pas tenu compte. Il existe
Jugement objectif dont bien des auteurs
un savant aussi
23
Slid/elin de la dociete dot Sf//dc.i Oceanieanea
une sorte de romantisme des
Polynesian outliers, forteresses de la poly-
sianite en pleine sauvagerie melanesienne. Les choses sont bien autrement.
Nous le verrons plus loin dans un certain detail.
J’ai ajoute a la liste classique des Polynesian outliers celles des arrivees polynesiennes,
qui sont parties dans l’interieur des grandes lies et ont
leur
:
perdu
langue les Samoans et les Wallisiens a Lifou, les Samoans
d’Ouvea et les Wallisiens partis sur la Grande Terre, les Samoans sur
Makata d’Emae, Tongariki et Tongoa au Centre Vanuatu, les
Tongiens sur
Futuna du Vanuatu. On ne peut pas ne
pas en tenir compte.
Plusieurs traits materiels, autrefois consideres comme
classiques sont
aujourd’hui totalement oublies par les archeologues: ce sont des objets
en bois, qui ne laissent
pas de traces archeologiques.
Le Pacifique Sud se definit, entre autres,
par la presence ou l'absence
de Pare ou du propulseur. Le propulseur a sagaies existe
exclusivement,
e’est-a-dire hors la presence de Fare, dans PAustralie tout entiere, dans le
nord de la Nouvelle-Guinee a Pest (vallee du fleuve
Sepik), comme a
sous forme de
l’ouest,
propulseurs rigides. La Nouvelle-Caledonie et les
lies Loyalty connaissent le propulseur souple. On retrouve le
propulseur
rigide au Perou ancien. Entre les deux, la Polynesie connait le propulseur
souple sous la forme d’un jeu d’enfant, pas toujours note par les observateurs. Le propulseur rigide ou
souple est present, ici et la, en Siberie orientale et dans la part de l’Amerique lui faisant face.
En Nouvelle-Caledonie, Parc a ete introduit, il
y a un siecle, par les
evangelistes samoans de la London Missionary Society. Il n’existe pas en
Australie, mais couvrait une grande partie de la Nouvelle-Guinee, des iles
Salomon et du Vanuatu, en plus de la Polynesie : la, il peut ne pas etre une
arme de guerre, contrairement a la Melanesie et la Nouvelle-Guinee. A noter
que les fleches empoisonnees n’avaient pas recours a des poisons vegetaux,
mais etaient trempees dans des cadavres en
decomposition. Le commodore
anglais Goodenough en a ete la victime sur Malekula au Vanuatu.
Un trait culturel encore moins connu est Pexistence, en Nouvelle-
Caledonie, de deux pieces archeologiques dissemblables, que l’on rencontre aussi dans
l’hemisphere nord des deux cotes du Pacifique et dans le
Japon ancien. Il s’agit d’une piece plate, en schiste,
24
plus ou moins bien
Le maniement d'un
propulseur, pour la peche, a
Wogeo, cote nord de la Nouvelle Guinee. Ce propulseur
rigide, en bois, permet en imprimant un mouve-
ment de vibration a la sagaie, d'obtenir plus de force
de perforation et une plus grande portes, ici a la sagaie
de peche a deux pointes. Le propulseur rigide couvre
I'Australie et la Nouvelle Guinee. Le propulseur souple
(une tresse complexe a section carree), qui permet les
memes resutats, est utilisee comme arme en Nouvelle
Caledonie et a Ouvea des Ties Loyalty, et comme jeu
d'adresse pour enfants dans toute la Polynesie. Le propulseur rigide se retrouve au Perou et sur les cotes de
I'Ocean Arctique.
Photo Ian Hogbin, ex: Peoples of the South West Pacific.
Q&uUetiii d& la Society dc& &tade& Ocea/iic/t/ies
polie surtout sur les cotes, en forme de croissant plat, portant une protuberance trouee a Finterieur de la corde de Fare de cercle et en position
centrale. De meme pour des pieces beaucoup plus jolies, des bicones a
gorge centrale en jadeite ou serpentine, que Ton retrouve dans le sol en
fragments plus ou moins importants et dans les collections melanesiennes
privees anciennes en tant qu’objets magiques ou de benedictions. Ils ont,
semble-t-il, preexiste a la hache-ostensoir actuelle.
On les trouve en Nouvelle-Caledonie, et pas aux des Loyalty, ils ont perdu
leur qualification originelle d’armes de lancer (visant le sternum et plus difficilement la tempe), avec une tresse de prehension disparue, les remontages
avec manche en bois sont des faux recents; ils sont aussi retrouves dans Far-
cheologie siberienne et dans cede des premiers habitants du Japon, eux aussi
venus de Siberie Tout cela se situe aisement dans cette relation nord-sud
qui
laisse, depuis le sud du Japon de petits groupes de pecheurs de haute mer
ici et la et bien sur une empreinte plus forte en Micronesie.
J’ai ete frappe au Japon, dans le theatre No, que les acteurs tragiques
(seulement masculins), prenaient dans les roles de femmes par moments
une tonalite de voix suraigue qui etait exactement celle de ma belle-mere
melanesienne dans son expression obligatoire de pleurs pour des raisons
a
sociales traditionnelles. Ce n’etait pas un hasard.
De meme que j’ai ete frappe, a Madagascar, en visitant les plus
anciens palais royaux malgaches, eloignes de Tananarive, de trouver des
constructions en bois dont le style et les techniques du decor faisaient pen-
japonais ancien de la construction en bois, en passant par les
portes des maisons longues de Kahmantan. On retrouve des maisons
longues sur le plateau central oriental d’Espiritu Santo au Vanuatu. Elies
existent aussi dans l’aire arrosee par le fleuve Sepik, ainsi qu’en Papouasie
occidentale, ainsi que chez les Asmat de Nouvelle-Guinee occidentale, mais
ser a Fart
«
»
on ne leur a pas donne ce nom. Le resultat de cette difference lexicale est
que les auteurs ne font pas le hen.
Le passe de Madagascar
Du passe de la Grande lie, presque tout est a decouvrir. Le maitre
colonial, e’est-a-dire la France, a fait tres peu d’efforts de ce cote, n’y
26
N°324 Janvier / Fevrier / Mars 2012
-
consacrant aucun credit. On a obtenu comparativement plus de moyens
pour le Pacifique Sud, oil 1’on ne craignait pas vraiment le nationalisme
culturel, considere comme le berceau du nationalisme politique. Ce qui
fait que nous avons devant nous le plus grand nombre de locuteurs austronesiens au monde, et que notre ignorance est ici la plus grande. Par
contre sur la langue merina, nous avons eu d’excellents specialistes, dont
des Malgaches. Mais cela apporte fort peu de connaissances quant a la
culture malgache globale, si diversihee, et dont les langues multiples restent peu connues par rapport a la
langue nationale, ecrite et publiee
depuis pres de deux siecles grace aux Missions chretiennes.
Certains missionnaires catholiques ont publie d’excellentes choses
sur la tradition malgache, de bien meilleure qualite que ce qui a pu etre
ecrit par d’autres missionnaires sur le Pacifique. On dispose de tres bons
films ethnographiques sur le si celebre retoumement des morts », un
point focal de la culture malgache. Cela cache le desert de la connaissance
serieuse, en dehors de quelques rares specialistes dont certains sont
Anglais ou enseignent a Londres. Mais ces demiers, curieusement, etant
donne le hen evident entre la Grande lie et le Pacifique, ne s’y interessent
Les pecheurs et
pas du tout. Comme si ce hen les genait aux entournures.
navigateurs cotiers ont ete mieux etudies.
Maurice Leenhardt avait tente d’etabhr une cohaborahon, qui n’a den
donne, pas plus aujourd’hui qu’hier. Personnellement j’attends que la
situation se decante et que de nouvehes donnees viennent au jour, h n’y a
rien d’autre a faire. En attendant, mieux vaudrait eviter les hypothese aventurees, si ehes sont uniquement centrees sur le Pacifique.
Et en particuher il conviendra que nous en apprenions plus sur Thistoire ancienne inconnue des rives de l’Ocean Indien. On sait beaucoup de
choses sur le hen entre Zanzibar et le royaume de Mascate. Mais il s’agit
d’une evolution historique presque modeme. Mais aussi de la reproduction de comportements plus anciens.
Un auteur et temoin du debut du XlXe siecle, le peintre de marine
«
Julien Garneray, qui avait trame ses guetres dans tous les ports de la
avait
region, est une des seules sources pour la periode ou la llotte frangaise
encore quelque importance. Il decrit bien, sans le vouloir expressement,
27
^bulletin da la Society de& &tude& 0cemuenne&
mais jour apres jour, la sorte d’univers particulier, parallele aux Etats, que
bateau
representaient les marins debarques et rembarques de bateau en
sans s’occuper outre mesure de leur nationality de cette espece de flottes
de freres de la cote et de marchands aventureux
—
et d’un courage cer-
tain, qui allaient ainsi de port en port. On pouvait trouver ces marins un
Un
jour sur un bateau de guerre, un autre jour sur un navire corsaire.
autre jour dans une prison espagnole a Manille, menaces d’etre sounds a
la garrotta, attendant d’etre rachetes, c’est-a-dire vendus.
Les interrogations sans reponse
Que se passait-il done avant, lorsque les flottes europeennes n’etaient
etaient des dows ou des prao ?
pas encore la ? Et que les seuls navires
Nous n’en savons rien. Dans quelques decennies, nous serons peut-etre
plus riches d’informations. Une des rares donnees certaines que nous
a un modele
ayons est que les fameuses poteries lapita correspondent
dont la forme, sinon le decor, se retrouve un peu partout archeologiquement dans le sud et sud-est asiatique. Le Lapita est ainsi un cas particulier,
tres largement du
par le decor seulement, d’une tendance qui deborde
Paciiique Sud. Ce n’est pas le seul cas.
II n’y a done pas de peuple du Lapita », cas particulier d’un ensemble qui depasse le seul cadre du Paciiique Sud. C’est une invention romantique d’archeologues anglo-saxons. Ces derniers sont devenus incapables
d’utiliser la richesse d’information acquise par les ethnologues et, dans
leurs publications, ne citent plus que les jugements d’autres archeologues
sur les points principaux d’une tradition orale qu’ils n’ont pourtant pas
ete formes a recueillir. Ils ne savent pas faire, mais se pretendent competents et simplifient dangereusement. L’ouvrage portant sur Tikopia de Kirch
et Yen est le seul qui detonne, ou ces derniers suivent dans le detail et verifient les donnees si completes de Raymond Firth. Ce qui aurait du etre
eleve a l’etat de modele, comme la collaboration de Jose Garanger et de
moi-meme au centre sud du Vanuatu, ainsi que de l’ethnologue Bernard
Vienne avec l’archeologue Daniel Frimigacci aux lies Walks.
L’idee qu’un peuple, toujours le meme, puisse etre defini par une
mode, meme persistante, portant sur le decor de certaines poteries, n’est
«
28
N°324 Janvier / Fevrier / Mars 2012
-
pas acceptable. C’est comme si Ton decrivait un peuple de la biere aUant
d’lslande en Allemagne du Sud, compte tenu que les Allemands de Baviere
sont passes au Moyen-Age de la consommation du vin a celle de la biere,
du fait que les brasseries preindustrielles appartenaient a leurs maitres
politiques, grands feudataires de l’Empire ou princes-eveques, qui poussaient done a la consommation de celle-ci. Les facteurs commandant les
phenomenes de modes sont parfaitement inconnus des archeologues: ils
ne laissent pas de traces. On peut seulement enregistrer les changements
de modes, modes que l’ethnologie met en evidence en divers points de la
region.
L’idee que les Lapita se soient installes dans des points cotiers ou sur
des lies au large des plus grandes est ainsi une illusion ; elle correspond
au simple fait que, pour des raisons de commodite et de confort, les
archeologues preferent les sites cotiers et ne s’interessent pas aux sites de
l’interieur des lies (excepte recemment aux Fiji); pourtant, aux Salomon,
un grand nombre de sites megalithiques leur tend les bras, mais il faudrait,
a chaque fois, une veritable expedition etant donne l’absence de reseaux
routiers. D’une certaine fagon, cette generation d’archeologues prefere le
sable chaud. Dire que le peuple du Lapita peut etre defini par ses sites
archeologiques cotiers, alors qu’on n’a meme pas tente de fouiller a Tinterieur des lies, est se moquer du monde. Lorsqu’on s’y mettra, il faudra
evidemment reviser toutes les theories actuelles.
Les sites cotiers, dont une grande partie ne temoigne pas d’une occusont attribues de ce fait a des pionniers de la decou-
pation permanente,
verte oceanienne. Ceci est en contradiction avec la realite : les sites cotiers
ne beneficient pas
toujours de terres fertiles en quantite suffisante pour
permettre les jacheres indispensables au retour de la fertilite du sol: par
consequent, certains groupes de pecheurs vivent des vies semi-nomades,
changeant de lieu de vie au bout de dix a vingt ans. Ou alors c’est qu’ils
profitent de la presence, sur les pieds-monts, d’agriculteurs de l'igname
et du taro, avec qui ils pratiquent l’echange, produits de la mer contre produits de la terre ; ces echanges taisibles, specialite des femmes de la
Grande Terre de Nouvelle-Caledonie, dans le silence absolu, leur permettent de trader avec les adversaires de leurs hommes ou entre parentes
29
(ftu/lctin de la Joccele des totudes Occa/t
interdites. On etablit des tas parallels de produits, augmentes lentement
jusqu’a satisfaction des deux parties.
La soi-disant expansion rapide du style lapita par mouvement
constant des hommes est une autre illusion. Elle s’explique
plus simple-
ment par les mariages pi loin des potieres, qui enseignaient leur art a
leurs filles et a leurs brus qui, a leur tour, en ce qui concerne les filles,
allaient se marier de nouveau au loin etc. De villages en villages potiers, a
l’interieur des terres, ou les archeologues ne vont jamais (en dehors de
Golson), les sites d’argile fine etant rares sur les cotes, la transmission de
ce qui n’etait jamais qu’une mode, les motifs lapita se sont diffuses largement sans problemes particuliers. Lorsque les femmes n’en ont plus voulu,
le Lapita a disparu.
Les ethnologues et les archeologues occidentaux presentent la mala-
die de refuser aux femmes oceaniennes la capacite de decisions culturelles
l’image de leur machisme.
Des archeologues femmes anglo-saxonnes se sont plaintes a moi du chauvinisme male de leurs coOegues hommes et de menaces pour leur carriere, si elles defendaient l’idee que les potiers lapita etaient des potieres.
La premiere conquete de 1’ethnographic, anglo-saxonne d’ailleurs, dans
la region, a ete pourtant la mise en evidence d’un partage equilibre des
et ils construisent des civilisations utopiques a
taches entre les deux sexes.
Beaucoup plus importante qu’une variation de decor de poterie, et
dont les archeologues parlent si peu, a ete cette revolution : l’abandon de
la poterie, qui correspond a une innovation vegetale en Melanesie, la mise
pied d’une variete de bananiers donnant uniquement des feuilles et pas
de fruits, rendant la cuisine par paquets de feuilles plus aisee et plus hygiesur
nique que l’utilisation difficile des poteries, pas assez solides pour supporter de grands volumes d’eau bouillante. Elle permettait aussi d’utiliser de
maniere plus rationnelle, le four aux pierres chaudes, en particulier pour
la cuisson de quantites plus grandes de plats aussi varies que sophistiques.
Revolution qui arrangeait les deux sexes, les hommes foumissant les tas de
feuilles et les femmes les remplissant. Elle permettait aussi d’utiliser des
plats monumentaux en bois, sculptes et creuses (Salomon centrales), sinon
meme des coques de pirogue (Polynesie), pour faire cuire, dans le principe
30
rape . rape feuiles ouvert Pacifc.
coco detaro en
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bulletin de /a docce/e des Sludcs Oceeuueruies
des marmites norvegiennes, de grands volumes de nourriture en rempliset en
sant la coque, ou le plat, en y inserant les pierres brulantes au centre
recouvrant le tout avec des paquets de feuilles.
En Nouvelle-Guinee, les poteries permettant la confection de l’huile
de coco et de faire cuire des beignets de taro dans cette huile bouillante,
carenee
sont tres differentes de la poterie lapita, du moins de la poterie
(voir les photos publiees par Br. Malinowski). Cette forme precise se
retrouve dans l’archeologie de la Thailande.
En Nouvelle-Caledonie, des poteries ovales, avec un bouchon de
feuilles et des trous pour faire passer la vapeur, sont posees en diagonale
de mer, persur trois pierres. Un peu d’eau au fond, qui peut etre de l’eau
met de cuire a la vapeur un repas familial a base
d’ignames. En effet,
ce soit, n’a jamais
jamais aucune poterie lapita dans la region, ou que
de l’eau
permis de faire bouillir un volume important d’eau. La pression
les
ce que
bouillante aurait fait eclater la poterie
archeologues ne rele—
vent jamais. Contrairement aux
prehistoriens europeens, les archeologues
du Pacifique ne precedent a aucune experimentation. Mais Maurice Leen«
hardt s’etait
trompe, lui aussi, en parlant de nourriture bouilhe
deja
et de nourriture grillee.
»
L’opposition Melanesie /Polynesie ?
Un dernier aspect est celui de la differentiation entre les differentes
Sud. L’Australie existe geologiquement, enviconnues du
parties
Pacifique
ronnementalement (des aires parmi les plus difficiles a vivre au monde
pour 1’homme).
La Melanesie ne presente aucune unite, malgre tout ce que l’on
a la Polynesie
raconte, en tout cas pas une unite qui puisse etre opposee
a Pinqui en decoule. Les types physiques sont melanges depuis toujours
tout
terieur meme des
parce que cette Melanesie, liee
simplement
villages,
elle a l’Asie,
sans probleme de deplacements majeurs a l’lndonesie et par
n’a pas cesse de recevoir de nouveaux arrivants, de nouveaux genes qui
loin a partir des cotes
se mettent aussitot a circuler ; certains vont assez
de la Nouvelle-Guinee occidentale, pas toujours accueillantes a l’ouest
tres
32
impaludees.
et
N°324 Janvier / Fevrier / Mars 2012
-
Les Melanesiens tendent a presenter aussi bien une grande taille
qu’une petite, des levres larges aussi bien que minces, des nez aussi bien
epates et larges que minces, sinon meme aquilins (le nez dit ’’papou”).
On pourrait descendre dans des details moins frappants, on s’apercevrait
toujours que les Melanesiens sont de tous types et qu’il est impossible d’affecter un certain type a une certaine aire geographique. Ceux de la cote
est et sud-est de la Nouvelle-Guinees sont les plus clairs de peau du Paci-
fique Sud. On a tente constamment de creer un type melanesien a la peau
foncee, sauvage peu degrossi, mais c’est une illusion. Une maniere de se
parer, oui. Les chevelures sont frisees ou ondulees, jamais crepues.
Les femmes, qui ont des seins dits en pis de chevre, les ont, a mon
experience, parce qu’elles ont ete massees par leurs meres: je les ai vues
faire a Malekula, au Vanuatu, de fagon a ce qu’elles puissent donner le
sein a leurs enfants en les amenant sur le cote, a partir de la position du
marmot en bas des reins, aujourd’hui dans une etoffe portee en baudrier,
avant dans le panier en filet caracteristique de la Nouvelle-Guinee.
Les Fijiens se distinguaient par leur chevelure en vaudrouille, de
Loyaltiens. Mais, sur les deux derniers siecles, les modes
pour la chevelure ont beaucoup change. A l’arrivee de la London Missionary Society en Melanesie orientale, au Vanuatu et aux lies Loyalty, trameme que les
vaillant a partir de Rarotonga et de Samoa, les coiffures masculines
etaient faites de tresses longues tirees en arriere et fixees ensemble en
arriere du cou, aussi bien chez les Melanesiens orientaux que chez les
Tongiens.
Les langues melanesiennes les plus proches du polynesien commun
sont, au Vanuatu central, le namakura et le nakanamanga et, aux lies
Loyalty, le drehu, la langue de Pile de Lifou. Les linguistes comparatifs
n’en tiennent pas compte. Ils preferent evoquer des langues qui n’existent
pas, niveau ou il est difficile de les contredire. Le iaai d’Ouvea est deja
plus archai'que. Ces hnguistes comparatifs n’ont souvent aucune bonne
etude en profondeur d’une langue oceanienne a leur acquit. Leurs comparaisons peuvent etre frappees au coin d’une trop grande rapidite et
d’une superficialite navrante de leurs travaux. Certains ne valent rien
comme hnguistes et produisent essentiellement du vent. Comme certains
33
bulletin de la Societe de& Slades' Ocea/ue/mcs
geographes, ils parlent de tout et de rien completement a travers. II
convient de prendre ce qu’ils afflrment avec beaucoup de paidence.
Les Polynesiens ne sont ainsi pas differents des Melanesiens, et la distinction est seulement geographique. Les demiers pretres aujourd’hui, au
Vanuatu central et a Tanna, qui portent a Maui tikitiki ou Moshtektek, les
premices de la recolte, sont des pretres melanesiens et non polynesiens.
Selon Interpretation des gens de Tanna, je suis le seul Europeen vivant a
etre alle parler face a face au dieu Maui tikitiki, au sommet du mont
Melen.
Les lies Loyalty et une partie notable de la Nouvelle-Caledonie presen-
proches les unes
des autres, mais classables dans le meme ensemble que les lies Tonga ou
tent des organisations sociales qui sont non seulement
les lies Fiji: avec des chefferies hereditaires comportant une cour, lieu
protege par une barriere monumentale (hag aux Loyaty), ou les comportements prennent des aspects formalises tres proches, les serviteurs les
plus specialises du chef assumant les memes fonctions d’un archipel a
l’autre. Le recrutement par consensus des chefferies terriennes a Samoa,
matai, maitresses du pule, ou pouvoir fancier, est presque identique a ce
qui se passe au Centre du Vanuatu. Les comportements de respect sont
identiques.
La Micronesie, par contre, est vraiment a part, liee au Japon ancien,
l’Asie, a travers les Phihppines, et recevant, elle aussi, de constants
apports nouveaux de ces deux directions; la demiere a ete ceux des Espagnols, dont la maitrise de ces lies a toujours ete difficile de par les revokes
nombreuses, que les Allemands, leurs successeurs, liquideront a coups de
ou a
canons de marine.
Quant au physique, les Polynesiens sont les descendants de petits
groupes ayant traverse la mer jusqu’a Fiji, ou plus fain ; ils n’ont emporte
avec eux qu’une fraction du pool genetique de la Melanesie. A partir de ce
moment ont joue deux lois genetiques, « l’effet de fondateur » et « la
derive genetique
»
:
elles font que les Polynesiens sont passes lentement
de la dolichocephalic melanesienne en Polynesie occidentale, a la brachy-
cephalie en Polynesie orientale, et que leur aspect physique est generalement plus coherent que celui de leurs premiers ancetres melanesiens ;
34
N°324 Janvier / Fevrier / Mars 2012
-
mais cette coherence dans l’apparence, comme toutes les coherences par-
tout, est un phenomene chronologiquement secondaire. Les Fijiens sont
plus divers, plus pres de leurs memes origines. Leur archipel a ete peuple
plus tot, par des apports plus nombreux et plus divers.
Les descendants des WaUisiens, des Futuniens, des Samoans arrives
a Ouvea des Loyalty (Uvea lalo, Uvea raro ou
rango de la tradition), avant
d’aller sur la Grande Terre et de la traverser, ou aussi d’aller peupler deux
lies, Rennell et Bellona, au sud des lies Salomon, dans les villages ou ils
sont exclusivement les habitants, presentent des visages tres contrastes:
certains peuvent etre confondus avec des Tongiens ou des Samoans (le
plus grand nombre des guerriers canaques de la grotte d’Ouvea etait issu
d’immigrants anciens venus de Samoa); d’autres ont des levres minces et
des nez aquilins, et d’autres encore presentent, comme on dit dans le jargon professionnel, des facies australoi'des: parlant une langue polynesienne avec des traits archa'fques, ils ressemblent a des aborigenes
australiens, quoiqu’en plus grands et en plus forts, et moins longilignes
(ils ne marchent pas indefiniment dans le desert).
Une caracteristique generate des Oceaniens est l’existence d’une
amorce de ph mongolique (terme propose par le dr Henri Vallois
epicantic eyefold), a la commissure interne de 1’oeil, chez absolument tous
(je l’ai verifie partout), le long de Fare melanesien, a Fiji, a Samoa et a
depuis l’lndonesie jusqu’a la Nouvelle-Guinee, la Melanesie et
Tonga
=
—
la Polynesie.
Les villes elevees en murs de pierres sur les plateaux coralliens, en
Micronesie, a Pohnpei (Ponape) et en d’autres lies (Chuuk), nous paraissent extraordinaires. Mais prenons les villages sur pilotis des cotes de la
Nouvelle-Guinee, au nord comme au sud, et remplagons le bois par de la
pierre : on obtiendra le meme resultat. Sinon que les Micronesiens utilisent d’enormes cristaux de basalte dont la forme assure une grande part
de l’originalite de ces constructions, et qu’ils ont mis au point une industrie d’extraction de ces cristaux, ce que les Polynesiens n’ont pas su, ou
pas eu l’occasion de, faire.
Les lies hautes de Micronesie ne sont pas si etendues que le bois ne
puisse s’epuiser, comme a File de Paques; la provision de pierres, elle,
35
bulletin/ c/& la Societa c/e& $f//de& Qceanu
est quasi
inepuisable, et ce qui est construit en pierres n’a pas besoin
d’etre renouvele tous les cinq ou dix ans. La ville en pierres micronesienne
a au moins un bon millenaire d’existence. Elle n’a ete abandonnee
cours de la seconde moitie du XLXe siecle. La construction sur le
qu’au
plateau
recifal, posee dessus ou sur pilotis, a aussi pour fonction d’eviter d’attribuer de la terre arable, pas toujours suffisante sur les cotes, a I’etablissement d’un habitat collectif; de plus, les plateaux recifaux ainsi urbanises
sont au vent et, par cela meme, proteges des moustiques porteurs du paludisme ou de la filariose. On n’a construit aucune ville sur une cote situee
sous le vent
(Pohnpei et Chuuk).
La realite d’une societe melanesienne pretendue eclatee
Comme toujours, ce sont les donnees physiques, biologiques, tech-
niques, qui sont le socle sur lequel tout se construit. Les groupes locaux
observes au centre Malekula se specialised dans la culture de l’igname,
celle du taro ou celle du bananier, et echangent leurs productions entre
c’est le fondement d’une economie commengant a se diversifier,
eux ;
d’echanger des ceremonies ou des rituels qui fonctionnent chacun
d’une fagon differente au plan quotidien. Les contraintes, qui expliquent
bien des choses, dont leurs choix agricoles, ne sont pas les memes et ils
n’ont pas exactement le meme calendrier, agricole en premier, puis rituel
pour la protection mythique de l’agriculture. Leurs ceremonies des preavant
mices sont a des dates differentes.
Leurs lexiques techniques ne sont pas completement identiques, et
leurs lexiques agricoles peuvent etre sensiblement differents, tout se
tenant. Ils n’ont pas besoin d’avoir des origines differentes.
On comprend tout a partir de l’observation des terres qui sont les
leurs, terres lourdes de bas-fonds trop arroses favorables a la culture irriguee, ou de drainage, du taro ; cuvettes chaudes et humides pour le bananier (et l’arbre a pain) ; terres de pentes legeres pour l’igname. Je ne
parle la que de communautes voisines installees dans des environnements
de collines ou semi-montagneux.
Les differences dans les plaines coheres sont plus nuancees ; sauf a
distinguer les cultivateurs d’ignames et de taros des piedmonts (les pentes
36
et
niveau desbesoins, constiuer TiHabgbyen.
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bulletin c/e /a tfoce'e/e c/ex Stac/ex Ocean
elles-memes peuvent etre infertiles, d’ou la necessite d’un apport en eleles
ments nutritifs par le biais de l’irrigation), et les pecheurs installes sur
faible
de
tres
n’avoir pour lot que des terres
bandes
coheres, qui peuvent
qualite. Ceux-ci sont obliges d’echanger les produits de leur peche
la montagne,
ceux de la terre plus riche des premieres approches de
en bas des
puisque le ruissellement, qui cree les alluvions accumulees
contre
pentes, lui apporte les elements utiles de son
sol au fur et a mesure. Dans
bien des cas, les uns et les autres se placent entre ces deux extremes.
Austronesiens ou Proto-Polynesiens ?
Dans un tel environnement, les variations sociales sont des plus nuan-
categories de population dans le Pacifique, une
maritime, glissant d’lle en ile vers la Polynesie, une autre, interieure, agri-
cees. II n’existe pas deux
cole et laissee sur place par des marins aventureux. C’est du roman
II n’y a aucune preuve de 1’existence de ce raccourci
pseudo-historique.
theorique, qui inspire a tort tant de bons auteurs.
pour
II s’agit la du dernier avatar de la volonte de faire passer les Polynesiens
un
superieur par rapport au reste de l’Oceanie, et en particulier
peuple
aux barbares a la peau foncee de Melanesie. C’est une forme
de racisme
intellectuel, qui a deja eu de nombreuses autres formes et pres de deux
cles d’existence, creant une pyramide sociale coloniale pour l’ensemble de
sie-
Pacifique, les blancs au sommet bien sur, les Polynesiens immediatement
dessous, et les Melanesiens et les aborigenes australiens tout en bas.
en
Ce que Ton sait de sur, c’est que tous les Oceaniens se divisent en
les Polynesiens, groupes qui
groupes de specialites, comme d’ailleurs
les hommes
echangent entre eux des services: potieres (et non potiers,
la techconnaissant
leurs femmes quoique
malaxent la terre
glaise pour
de deux generanique et etant capables de la transmettre entre femmes
ou de
dons s’il manque l’intermediaire normale); fabricants de monnaies
colliers de perles de coquillages (aux Salomon centrales, ce sont les
femmes qui jouent ce role) ; constructeurs de grandes maisons rondes
de
(en Nouvelle-Caledonie et aux lies Loyalty, dans les differentes regions
1’interieur de la Nouvelle-Guinee), rectangulaires (aux Salomon, au nord
du Vanuatu, a Fiji et a Tonga) ou ovales (a Samoa, au Centre sud du
38
N°324- Janvier /Fevrier/ Mars 2012
Vanuatu et a Ouvea); constructeurs de pirogues, sculpteurs de tambours de
bois, d’armes ou de plats en bois; agriculteurs specialises dans telle ou telle
culture; maitres de la peche au large, maitres des techniques de navigation,
maitres des rites lies a la peche ou a l’agriculture, orateurs et porte-parole,
devins et voyants, pretres, guerisseurs, chirurgiens de la circoncision vraie,
rare, ou de l’incision du prepuce, plus commune. Aucune societe insulaire
ne fonctionne dans la region sans ces differentes composantes.
Elies ont ete decrites de cette fagon, pour la premiere fois, par Mariun
marin anglais six annees prisonnier des insulaires, dans sa descripner,
tion de l’archipel des Tonga. On les a retrouvees ensuite aux lies Fiji, puis
aux lies Loyalty, dans la plus grande partie de la Nouvelle-Caledonie, dans
une bonne moitie du Vanuatu, puis dans les des du Centre des Salomon.
Tous ces gens sont les memes, parlent les memes langues, participent
aux memes rituels a
grand spectacle, appliquent les memes regies de com-
portements sociaux. Us se marient de la meme maniere, allant chercher
leurs femmes aux memes endroits, tres souvent chez les adversaires, avec
lesquels ils sont en relation d’oncle uterin a neveu, ce qui est un facteur
de controle des pertes dans le cas de guerre : on ne touche jamais a ses
uterins, meme classificatoires, ni aux membres de sa belle-famille, meme
classificatoires. Ce qui fait des centaines de gens qui sont inviolables sur
le champ de bataille : Taction tend alors a se circonscrire entre cham-
pions, les fameux guerriers cites dans la tradition orale, qui n’ont pas de
relations de parente entre eux, sinon ils seraient impuissants malgre eux
(Lifou). D’ou les guerres aux Salomon perpetrees au-dela de Taire geographique des parentes alliees, et par expeditions maritimes.
Les idees fatisses sur le passe oceanien
Les Oceaniens, qui transformed les guerres en recits de poesie
epique, n’exphquent jamais aux blancs le fonctionnement et les consequences de ce fonctionnement, en ce qui conceme du moins la parente
classificatoire.
U en resulte que les recits des guerres anciennes enregistrees par les
missionnaires, ou meme par des ecrivains lai'ques europeens, expriment
un recit de massacres continuels
—
qui n’ont jamais eu heu. Chaque fois
39
Q&ulleti/i de la Societe de& lotude& Ocean/*
que j’ai verifie ce qu’il en etait de ces lignees massacrees dans la tradition,
elles etaient bien vivantes, mais souvent ailleurs, ayant ete obligees de
changer d’habitat et, chose importante au plus haut point, de changer de
noms. Changer de nom est une forme de mort sociale et a pour consequence la perte des droits fonciers ; c’est une raison tres forte pour aller
chercher fortune ailleurs, parfois a cote, un ou deux villages plus loin, en
d’autres cas provoquant une mini-migration de l’autre cote de la montagne
ou vers une autre lie.
Les soi-disant massacreurs et massacres peuvent
aujourd’hui se retrouver au sein des memes villages chretiens. Ce qui n’arrange pas les relations.
Une autre motivation des migrations a petite echelle peut avoir ete la
honte, provoquee par une strategic de conquete d’un statut social renouvele mal conduite et ratee. Le jeu social des rivalites entre individus et des
competitions de prestige entre groupes de descendance peut creer des
oppositions potentielles controlees qui durent des generations. II peut
aussi provoquer des affrontements, pas necessairement guerriers, qui se
terminent brutalement par une telle perte de prestige que Ton voit des
departs au loin, ou meme des suicides. Les calculs ou les intrigues sont le
pain quotidien d’une part au moins des insulaires, les autres sont spectateurs; tout cela comporte des risques (et cela a Paris comme en Corse),
mais plus la societe locale est en nombres relativement faibles, plus le danger de devoir s’en aller est grand.
Au milieu d’une agglomeration urbaine, on peut glisser plus aisement a d’autres positions, d’autres fagons de vivre et d’autres strategies
sociales.
Le jeu de la parente classificatoire
Les auteurs europeens, en particular sur la Polynesie, ignorent com-
pletement le jeu de la parente classificatoire et par consequent generalisent des faits isoles.
i.a parente classificatoire est la base de la structure sociale et colore
tous les evenements, quels qu’ils soient. Les auteurs specialises devraient
le savoir, mais ne se rendent jamais compte des consequences reelles:
leur discours a toujours trait aux parentes vraies, et le fonctionnement
40
N°324 Janvier/Fevrier/Mars 2012
-
de systemes de parentes, ou chaque categorie represente des dizaines de
sinon beaucoup plus, cela depend du lieu —, ne leur appapersonnes
rait jamais concretement.
—
II arrive ainsi que memes les meilleurs se trompent. Claude Levi-
Strauss, dans un ouvrage celebre qui constitue sa these d’Etat, a un cha-
pitre sur le mariage de cousins croises en Chine ancienne, chapitre qui est
fragile de bout en bout, parce qu’il ne repose sur aucune etude genealogique. Or il n’existe pas d’analyse de parente sans maitriser l’univers
genealogique de la population concernee. Il l’a dit lui-meme. Et cette
population peut agir en contradiction complete avec les regies que Ton
aura cru pouvoir mettre en evidence. Sur ce
point Radcliffe-Brown, qui
discourait a partir de genealogies theoriques et pas de genealogies reelles,
avait completement tort. Mais comment maitriser l’univers genealogique
de centaines de millions d’individus ?
Un des facteurs si souvent ignores (quoiqu’on dispose de descrip-
tions de multiples cas dans la litterature specialist) est que la parente
classificatoire a, entre autres, pour fonction d’assurer un reservoir de
main-d’oeuvre benevole important, du cote maternel aussi bien que du
cote paternel
—
a condition d’etre bien
nourrie, ce qui demande une
capacite d’organisation et de programmation agricole d’existence generale
chez les Oceaniens. On en a des milliers d’exemples, mais on n’en a pas
encore tire la
leqon.
Deux cents Oceaniens presents au meme lieu savent faire et peuvent
vous
transporter le volume le plus lourd n’importe ou. Tout se met en
place sans difficultes, tant ils maitrisent tous les techniques adequates.
Deux cents Europeens constituent une foule agissant anarchiquement en
l’absence de cadres professionnels bien formes, reconnus et acceptes.
Le probleme papou
L’opinion generale veut qu’il existe une autre categorie d’Oceaniens,
plutot meprisee de maints specialistes, que 1’on rencontre dans l’interieur
de la Nouvelle-Guinee, des lies Bismarck et des Salomon du nord, a Bougainville (voir sur ce point les analyses brillantes de Douglas Oliver chez
les Siuai, qui parlent une langue theoriquement papoue).
41
fl&uttelin dc (a Joaelc de& Sludcs Oicvamc/meii
Leur categorisation est linguistique, mais, de ce point de vue, le dossier parait plutot incoherent. On a defini le nombre approximatif de
langues papoues, sans foumir la moindre definition coherente de qui sontelles. Les langues papoues sont toutes celles qui ne sont pas austronesiennes, ce qui n’est pas une definition satisfaisante. II y a des moments
ou les
linguistes ne font pas vraiment leur travail.
Mais, ce dont les memes linguistes comparatifs ne parlent jamais, des
langues classees comme austronesiennes presentent des caracteristiques
que Ton retrouve dans les langues de la Terre d’Amhem, en Australie: voir
les classes multiples de pronoms possesses, que Ton decrit aussi dans le
iaai, la langue melanesienne d’Ouvea, et aussi dans la langue du nord
d’Ambrym, au Vanuatu (langues dont Claude Levi-Strauss cite l’existence
en Amazonie). En plus des langues a tons, tout a cote, cela fait deja bien
des incoherences dans l’univers austronesien. II me semble evident qu’il
est plus multiple que prevu, et que certaines langues papoues mieux etudiees pourraient peut-etre retrouver place dans l’univers austronesien.
Une raison annexe est que de nombreuses langues papoues ont ete
etudiees par des bnguistes missionnaires americains, protestants evangeliques, qui sont tenus au secret par contrat. Nous n’avons souvent pas
acces a leurs materiaux.
Une autre raison est que, depuis Bronislaw Mahnowski, les Papous
austronesiens cotiers grands, minces, de belle allure, a la peau claire, au
aquilin, et aux filles belles, sexuellement agressives, font l’objet d’une
forme de romantisme anthropologique dont ne beneficient pas ceux que
Ton qualifie de Papous de l’interieur.
nez
Par ailleurs, toutes les classifications linguistiques fondees sur la lexi-
costatistique et en particuher sur la glottochronologie, qui ont regne trente
ans sur le sujet, sont a mettre au panier. Elies ne sont plus acceptables
comme methode de travail, du moins de la maniere dont elles ont ete utihsees par Isidore Dyen. Il y a eu la une sorte d’echec professionnelle de
la bnguistique nord-americaine.
42
N°324 Janvier/Fevrier/Mars 2012
-
Elies constituaient une forme de raccourci qui a fait faillite, comme
avait d'ailleurs prognostique Andre Haudricourt au nom de l’ecole fran-
gaise. C’etait d’ailleurs aussi mon avis a l’epoque. Le fondement etait
trop fragile, la comparaison un peu partout d’un lexique de deux cents
mots.
II faut tout recommencer en comparant entre elles les globalites de
chaque langue. II n’y a pas de raccourcis possibles. Ce qui est plus facile
qu’a faire et necessitera le recours aux ordinateurs de grande puissance et des logiciels qui n’existent, apparemment, pas encore. On est
oblige en attendant d’utiliser le simple bon sens: la simple recherche de
ce qui est possible et ce qui ne Test pas.
a dire
II existe ainsi des modes dans les sciences humaines nord-americaines qui se presentent a chaque fois comme des raccourcis vers la
connaissance ; elles sont a rejeter des le depart, du moins si Ton a un peu
de jugeote. La Polynesie a beaucoup souffert des discours de certains specialistes: l’un des plus dynamiques, theoriquement, croyait mettre en evidence des modeles sociaux polynesiens (ils etaient si generaux qu’ils
devenaient valables pour l’ensemble de l’Oceanie), mais n’etait jamais
vraiment sorti de chez lui. II y en a eu pour le prendre au serieux. Certains
specialistes modemes de la societe marquisienne n’y sont jamais vraiment
alles ou, s’ils l’ont fait, ne disposaient d’aucune methode de travail serieuse
et y sont restes peu de temps. II n’existe aux Etats-Unis aucune formation
au terrain
anthropologique et les individus sont obliges de reinventer la
methode chacun de leur cote. Ce n’est pas le meilleur moyen d’avancer et
certains ratent leur affaire.
La realite est que les soi-disant Papous sont difflciles, ethnographi-
quement, a distinguer des aborigenes australiens. En ethno-histoire, leur
recouvrement de la Nouvelle-Guinee et celle de l’Australie sont difflciles a
peut-etre
separer, puisqu’il s’agit des memes perimetres geographiques,
ans
60.000
de
memes
des
finalement
d’age ; les abogroupes, ayant plus
d’Austrahe seraient une specialisation, relativement peu de relaet
rigenes
tions ayant ete conservees entre eux, sinon pour la zone intermediate des
lies du detroit de Torres. Les Aborigenes du sud-est de l’Australie sont
43
m ibulletin de (a uociete de& Oludev Ocean
devenus genetiquement plus clairs de peau, avec des cheveux ondules,
dans un environnement qui n’etait plus tropical. Ils etaient en train de passer lentement a
l’agriculture.
Une conclusion est que les linguistes comparatistes, ou les linguistes
se disant historiens des
langues n’ont pas eu, sauf exception, l’experience
langue convenablement et, par consequent, s’en tiennent
a ce qui les interesse en fonction d’une theorie a priori. Ils ne connaissent
de recueillir une
pas la situation sur le terrain et ne se rendent pas compte que la situation
normale est que les Oceaniens, surtout en dehors de la Polynesie, sont
multilingues. Les personnes parlant une demi-douzaine de langues non
mutuellement intelligibles sont extremement nombreuses, et cela depuis
l’enfance, ce qui a inevitablement des effets sur des langues ainsi parlees,
et done pour une grande part par des non-locuteurs. Cet effet n’a pas ete
reellement etudie, quoiqu’il soit signale de ci, de la. La methode n’est pas
evidente. Les linguistes n’aiment pas ces situations. L’ambigui'te n’est pas
une
categorie beneficiant de leur faveur.
La politique des manages, pour une part notable en dehors de l’aire
linguistique, confirme cette tendance. Des parents multilingues ont des
enfants multilingues, et cela depuis des millenaries. La faible importance
geographique de la diffusion de nombreuses langues cree un etat de
choses qui rappelle les zones frontalieres en Europe, ou les habitants sont
bihngues a l’ouest, ou meme multihngues aux anciennes frontieres des
empires russes et autrichiens. Les gens renfermes sur leur territoire et ne
parlant que leur propre langue de naissance n’existent pas. Les frontieres
linguistiques ne se rencontrent que dans les archipels eloignes les uns des
autres, ou dans les hautes vallees de Nouvelle-Guinee separees par des plateaux de calcaire karstique difficiles a penetrer. 11 n’existe rien de pareil
le long des cotes et d’une ile a l’autre, le long de l’aire ou Ton se voit d’une
ile a l’autre.
L’idee que les langues austronesiennes remonteraient a 7.000 ans est
parfaitement inacceptable. La venue des Austronesiens le long des cotes
d’Asie, a travers l’lndonesie, la Nouvelle-Guinee, la Melanesie et la Polynesie,
Mammiferes
placentaires
PI ate forme
ontinentak
Sund'a
■
Ligne de Wallace
PI ate forme
coritinentale
Sahul
Mammiferes
marsupiaux
1000 km
0
•
=
site archeologique
A. Dettloff
Carte des plateformes continentales et de la ligne de Wallace
-
© Guiart / Arapo
Q&ul/ctin de !a Jociele des Slades 0ixxxmiemic&
l
pris plusieurs dizaines de millenaires. Certaines demonstrations linguistiques ne sont pas des chef-d’ceuvres de bon sens. Les lexicostatisticiens
americains, travaillant sur des lexiques trop courts, paraissent etre de
a
grands naifs. Us imaginent que l’ancetre des langues austronesiennes etait
situe quelque part en Oceanie. Que font-ils de la
langue du Cham et des
de
?
Leur
etablissement de phylums»linguistiques
langues Madagascar
differencies est depourvue de valeur scientifique.
Les quelques linguistes qui ont veritablement travaille sur des
langues
oceaniennes qu’ils maitrisent sont beaucoup plus prudents. II a faUu beaucoup plus de temps. On ne peut pas parler de 7.000 ans pour l’apparition
des langues austronesiennes, alors que le peuplement de
1’archipel Bismarck remonterait a 30.000 BP. L’austronesien original a au moins 40.000
«
ans
d’existence.
Quant au lien essentiel des Austronesiens avec la pirogue a balancier,
il s’agit d’une autre naivete. Les pirogues a balancier ne sont
pas assez
anciennes et elles sont arrivees assez tard. Ce lien existe, mais bien
le peuplement de la plus grande partie de la Melanesie, qui s’est
sans elle. Et il
apres
produit
s’agissait deja d’Austronesiens.
Jean Guiart
46
Tentative de chronologie
oceanienne
Les datations ci-dessous sont indicatives et relatives, elles sont a plus
ou moins mille ans pres, sinon
plus, en Nouvelle-Guinee, par exemple, oil
l’on va jusqu’a moins 60.000 ou moins 40.000 ans BP (Before Present)
selon 1’auteur conceme. Elles peuvent etre plus anciennes que celles habituellement proposees pour deux raisons.
L’une est qu’il n’y a dans le Pacifique que de rares tentatives d’archeo-
logie sous-marine, alors que les dates les plus anciennes sont souvent a
rechercher dans les lagons ou les amorces des plateaux continentaux, du
fait de l’importance de la montee postglaciaire des eaux (on parle de
150 m).
L’autre est que les dates les plus anciennes donnees par les archeo-
logues ont trait a des etablissements evidemment bien plus anciens que les
dates elles-memes. Y voir la marque de pionniers, sinon meme des premiers decouvreurs, est le fruit d’une forme d'innocence. Il est impossible
de le prouver. Les archeologues sont comme les magistrats fran$ais, ils
travaillent trop souvent a partir de leur «intime conviction ». Il n’est rien
de moins rationnel. En plus, ils se disputent constamment quant a la sobelite des dates qu’ils proposent. On est done obbge de prendre des marges
de securite beaucoup plus grandes que celles qu’ils proposent.
C’est ici une simple proposition de mise en ordre de faits connus,
tous relatifs les uns par rapport aux autres, sans que la relation soit tou-
jours clairement etabbe. Elle a besoin d’etre affinee : les commentates
seront les bienvenus, les contradictions aussi, c’est du choc que surgit la
m f$u//e/in dc /a Society de& Qtmlcs Occa/ucnncs
lumiere. Je reflechis depuis plus d’un demi-siecle sur une masse de faits
oil il fallait mettre de l’ordre et cela donne provisoirement ceci (je corrige
d’ailleurs chaque fois que je relis, et je l’ai fait ici aujourd’hui en fonction
des donnees les plus recentes).
Pour realiser le grand mouvement d’Asie en Oceanie, a travers Tin-
donesie (la geographic impose cet itineraire et il n’y en a pas d’autre pos-
sible), il a fallu du temps, beaucoup de temps. Les apports culturels
oceaniens ne proviennent qu’en partie de l’aire qui sera plus tard chinoise
(ignames, taros, bambous, chiens, pores), mais aussi de l’aire sud asiatique (banian, betel) et indonesienne (pabnier Metroxilon ). En dehors
de la Nouvelle-Caledonie ou les especes vegetales autochtones sont si nombreuses, les plantes medicinales oceaniennes sont celles de la flore indopacifique, pas celles de la zone sino-siberienne. De cela, nos archeologues
ne traitent pas non plus. Us se sont
braques sur les plantes alimentaires et
ont oubhe les
plantes medicinales et autres.
En plus, les auteurs ne tiennent jamais compte de Madagascar, dont
l’existence pesante, qui ne saurait etre negligee, reequihbre automatiquement le centre de
dispersion principal des populations a langues austro-
nesiennes plus du cote de la peninsule de Malacca que de la Chine du sud,
et surtout pas de Taiwan.
40.000 BP
Acceleration d’un mouvement deja engage de descente vers le sud ou
l’ouest, a partir de la Siberie, en particuher au cours de la demiere
glaciation dont le maximum se place a 21.000 BP, de ceux qui deviendront
par la suite les Chinois et les Mongols. L’expansion mongole provoquera,
bien plus tard, un lent mouvement des populations turques vers le MoyenOrient, mouvement qui se terminera par une retraite de Soliman le Magni-
vers
fique devant Vienne sous la poussee d’une armee de secours chretienne
(son artiUerie lourde s’etant envasee dans des marecages serbes). Les
enchainements historiques peuvent etre surprenants.
Tous ces mouvements aboutiront aussi, au centre de la Chine, a la
dispersion de toutes sortes de populations montagnardes qui termineront
leur mouvement, a langues tonales complexes, plus lent que le long de la
48
N°324 Janvier /Fevrier/ Mars 2012
-
cote, dans les montagnes de l’Asie du Sud et du Sud-Est, bloquees en fin
de compte dans une descente eventuelle vers une nouvelle cote
les
par
ancetres des nations actuelles, thais, vietnamiennes, khmers.
Les Austronesiens, peuplant apparemment les cotes et le bas des
grands
fleuves, feront mouvement, de ce fait, en direction du sud et sud-est.
A ce moment-la, les pirogues a balancier n’existaient
pas. L’agriculture
de cereales non plus. Tous ces gens se nourrissaient des fruits de la chasse,
de la peche cohere ou d’eau douce et plus tard de cultures d’ignames et de
taros. On ne semble pas savoir qu’il y a tres
longtemps que l’igname et le
taro sont manges en Chine, dont on imagine toujours les habitants avec leur
bol de riz: en general, ils cherchent justement ay echapper, echapper aussi
a la valeur
symbolique modeme de ce bol de riz.
La diffusion de 1’igname et du taro a partir de la Chine du Sud, par
les habitants de cette region preexistant a l’implantation des Han, marque
le maintien de relations a travers l’lndonesie; cela permet une tres large
diffusion de ces cultivars a partir du point geographique de leur apparition, quel qu’il soit.
Ces Austronesiens ne connaissaient ni la banane, ni la canne a sucre,
ni le fruit a pain. Sur leur chemin de migration lente, ils ont acquis le
banian, dont personne ne parle jamais, specifique du sud de l’Asie et qui,
en Oceanie, qui fait l’objet d’une veritable culture, sinon d’un veritable
culte : ses racines terrestres sont l’une des entrees au pays souterrain des
morts. Ce banian est ainsi un marqueur du point de depart exact de la
migration oceanienne: il ne saurait etre qu’au point de jonction du mouvement le long des cotes de l’ocean Indien a celui le long des cotes de l’In-
donesie. Ces gens-la ont acquis par la suite la poterie dite cordee.
Les ignames longues, Dioscorea alata, semblent avoir ete mises au
point dans l’aire Nouvelle-Guinee-archipels melanesiens, Dioscorea bidbifera etant l’igname apportee d’Asie. La premiere est celle qui regne
en Nouvelle-Caledonie, la seconde est celle chantee par Malinowski,
introduite tardivement aux lies Loyalty, ou son centre de dispersion, y
compris vers la Grande Terre, est l’ile d’Ouvea. Ce que cela signifie n’est
pas evident. Les ignames cultivees au Vanuatu sont essentiellement des
D. alata.
49
bulletin ilc la Society de& Stiidas Oicea/iicn/ics
Parvenus au sud du Vietnam et a la peninsule de Malacca, a ceux qui
aspiraient a peupler les lies riches qui se presentaient a leur vue, lorsqu’il
n’y avait pas de pont a sec, s’est pose le probleme du moyen de passer les
detroits et aller d’ile en ile, au fur et a mesure de leur croissance demo-
graphique, absorbant la population australoide precedemment instabee.
Le moyen etait tout simple : il leur a ete foumi par cette meme
population,
a savoir les radeaux a double
manoeuvres a la
epaisseur, perces d’un trou au centre et
godille ; il leur avait deja permis d’atteindre l’Austrahe,
en suivant les cotes du moment. Avec ce
groupes a la
moyen, on pouvait aller, par tout
bien
fois,
sur, (pas plus de six personnes sur un
petits
radeau) jusqu’a Pile de Santa Catalina a Test des lies Salomon, en choisissant bien ses itineraires, ses jours et ses
angles de sortie et d’entree dans
les detroits separant les lies et parcourus par de forts courants
fallait
qu’il
attaquer par diagonales successives: itineraires en forme de V place a
l’horizontale: >.
Les itineraires suivis en Indonesie n’ont pas d’interet
pour la reconstruction. Ils ont ete de toutes sortes et l’archeologie
prehistorique de Tindonesie presente trop de trous pour valider la moindre hypothese par
trop
detaillee. Le bon sens et l’evidence sont que toutes les lies etaient rebees
entre elles par des abees et venues et
qu’il s’agit d’un mouvement general
ouest-est, avec des retours ou des abees et venues dans tous les sens ima-
ginables.
Mais ce moyen ne permettait pas d’aller peupler Formose, ni les lies
Phibppines, pour lesquebes la pirogue a balancier sera necessaire. La
migration de Formose a la Polynesie, en gbssant d’ile en ile, etait, a ce
moment-la, impossible : Formose n’a pas encore ete peuplee, en tout cas
par des Austronesiens. La migration de Chine continentale a Fonnose semble etre datee du Vie ou du Ve mibenaire avant J.-C. Ce
qui marquerait
peut-etre aussi 1’apparition de la pirogue a balancier, a moms que ce peu-
plement n’ait utihse plutot les ancetres des jonques, ou les deux a la fois.
Les reponses manquent a tant d’interrogations. Les
voyages experimental^
ne repondent
qu’a une partie des hypotheses possibles et ils peuvent etre
fondes sur de fausses hypotheses, comme cebe d’une origine polynesienne
a Taiwan, couverture culturelle d’une
intrigue internationale toute
50
Jardin suspendu dans un marecage. Waropen, cote
nord de la Nouvelle Guinee occidentale. Ces jardins
ou le sol
utile est constitue de dechets vegetaux, per-
mettent de faire pousser des patates douces et d'avoir
un production pres des maisons sur pilotis, la ou
n'existe aucune terre arable non salee. Cette techno-
logie couvre en definitive des surfaces considerables
et permet la vie humaine la oil la cote est couverte de
mangrove sur des centaines de kilometres carres. Ces
populations sont peu connues et peu travaillees etant
donne le peu de confort que represente leur habitat
pour un etranger, et les moustiques toujours presents.
Photo JG. J. Held, ex : The Papuas of Waropen.
(Sid/elin de fa Society dius Slade,i Ocea/u'e/tsies
moderne et d’une competition plus politique que scientifique entre la
Chine continentale et Formose sur ce point.
L’Insulinde est ainsi recouverte d’Austronesiens, avec une surface
emergee plus grande qu’aujourd’hui. Ils y sont toujours, mais la pression
interieure a l’Asie de populations parlant des langues a tons, sur les Austronesiens cotiers, poussera ces demiers a poursuivre, a traverser lentement l’lndonesie, puis a aborder les cotes de la Nouvelle-Guinee, et a aller,
d’ile en lie, en direction de Test.
Tout ce monde en est encore reduit a la cueillette, a la culture d’ar-
bres fruitiers et a des formes archai'ques d’agriculture de l’igname et du
taro ; il va s’y ajouter, peu a peu, le fruit a pain, la fecule de palmier
Metroxylon (a partir de Kalimantan), le bananier, la canne a sucre et le
cocotier et, plus tard, la patate douce (on ne sait pas vraiment quelle est
la date de l’introduction de cette demiere en Chine continentale, ou elle
est tres appreciee ? Et introduite par qui, les decouvreurs chinois de l’Ame-
rique ? Les Portugais, les Hollandais ?).
Les formes de bananiers aux fruits devenus comestibles semblent les
plus anciennes en Nouvelle-Guinee. Le mouvement vers Test a partir de
TAsie continentale s’est done traduit par des apports culturels nouveaux,
pas tous mis en evidence, a partir de la traversee de l’lndonesie, puis de
la cote nord de la Nouvelle-Guinee et des grandes lies de l’arc melanesien.
20.000 BP
C’est le debut de la coupure culturelle entre l’Oceanie restee a Page
de la pierre et l’Asie et l’lnsulinde qui acquierent lentement le metal
—
selon la progression habituelle, d’abord la pierre pohe, puis le bronze,
enfin le fer.
Les relations entre l’lnsulinde et la Melanesie a travers la Nouvelle-
Guinee n’ont jamais cesse mais, pour le metal, elles ont ete bloquees par
politique offlcielle, historiquement et physiquement attestee au cours
des millenaries, des tout premiers pouvoirs publics etablis en Indonesie
orientale, et qui interdisaient la transmission de l’industrie du metal aux
une
Papous. Il fallait que ces demiers restent a leur niveau de fournisseurs de
noix de muscade, et que les Indonesiens puissent en maitriser eux seuls
52
N°324- Janvier /Fevrier/ Mars 2012
le commerce. On n’a explique, bien plus tard, ni aux
Portugais, ni aux
Espagnols passant par la et qui eussent adore s’emparer de la NouvelleGuinee, s’ils l’avaient su, que la noix de muscade venait de la. Par contre,
les assiettes et les perles de verre chinoises ont couvert les cotes de la partie orientale de la Nouvelle-Guinee, tresors echanges a l’occasion des
marines et dont l’origine etait les expeditions de pirates a partir de la Gelvink Baay.
Date aussi du peuplement des lies de rarchipel Bismarck, le peuplement des lies de l’Amiraute etant intervenu, dit-on, six mille ans plus tard
(elles etaient plus difflciles a atteindre). Puis interviendra le peuplement
des Salomon du nord, avant celui des Salomon centrales. Les Salomon
orientales et le Vanuatu devront attendre l’intervention des voyages en
pirogues.
10.000 BP
L’agriculture de cereales nait a pas comptes en Asie, le millet et, plus
tard, le riz au nord et le ble au sud (en Inde). Le riz gagnera partout.
L’elevage des bovides nait aussi et la metallurgie du bronze passe a
celle du fer. La roue est inventee.
La pirogue a balancier apparait tout le long des cotes de l’Ocean
Indien, de l’lndonesie et de la Melanesie, a partir d’un centre de diffusion
inconnu.
N. B. Un probleme methodologique acmel est que bien des archeo-
logues sont les derniers defenseurs d’une position par ailleurs consideree
aujourd’hui generalement comme heretique, celle de la coherence qui
serait necessaire entre l’aspect physique, la langue et la culture materielle
(c’etait le point de vue enseigne par le dr Paul Rivet, directeur du Musee
de l’Homme, quand j’etais etudiant). Cette position n’est tenable ni en
Nouvelle-Guinee, ni en Melanesie, ou les populations de la Nouvelle-Gui-
large s’etalant en chaines en direction de Test ne
presentent jamais de coherence dans leur aspect physique: ils n’en avaient
pas au depart, les Austronesiens etant melanges partout a leurs voisins non
austronesiens en Asie, puis aux populations australoi'des les ayant precedes
en Indonesie. Leur coherence est strictement linguistique au depart, et
nee cohere et des lies au
53
ibulletin de la Jociete des &tudes Qcea/iu
langues austronesiennes est-elle beaucoup plus
grande qu’il ne nous est si souvent affirme. Toutes ces langues se sont toujours metissees avec les langues papoues environnantes, c’est tout de
meme la un point generalement acquis.
encore la variability des
C’est comme si Ton voulait que les Alsaciens represented une seule
coherente, alors qu’ils se marient depuis des siecles et a l’ouest en
France, et de l’autre cote du Rhin, en Allemagne, et qu’il faut bien tenir
compte des consequences genetiques de toutes les invasions armees qui
race
sont passees par la.
Par ailleurs les archeologues tendent a croire qu’a l’arrivee de tel ou
tel element de culture materielle doit forcement correspondre un transfert
physique de populations entieres. C’est l’ideologie de la migration »,
attrape-tout et explique-tout. La fonction reelle des reseaux d’echanges qui
«
traversent la Melanesie et se terminent en Nouvelle-Zelande (voir le voyage
du percoir a archet, qui n’est pas specifiquement chinois non plus, et dont
les archeologues ne recherchent pas les pointes en pierre dure enchassees
dans une gomme vegetale : il serait important de dater son apparition un
peu partout), ne leur apparait pas clairement. Elle est pourtant justement
celle de la transmission culturelle sans qu’il y ait mouvement de popula-
tion, peu ou prou, voir le voyage des coquilles d’huitre perliere depuis les
des au large et les cotes nord de la Nouvelle-Guinee jusqu’aux montagnes
et aux vallees alpestres de l’interieur. Certaines peuvent meme venir de
Micronesie et se retrouver au fin fond de la Nouvelle-Guinee. Elies y par-
viennent, de proche en proche, les porteurs changeant a chaque etape. Le
pergoir a archet et a volant (une demi-coque de noix de coco ou un
disque en bois dur) et contrepoids (trois pierres egales en poids), identique partout, est arrive jusqu’en Nouvelle-Zelande, sans etre lie a une
quelconque migration. Il a tout simplement suivi les hommes partout ou
ils sont alles. Il est bien venu de quelque part. Nous ne savons pas si son
origine est en Asie ou en Indonesie. On ne s’est tout simplement pas pose
la question. Or il s’agit de l’outil le plus sophistique de la region.
Les apports culturels asiatiques se poursuivent a travers l’lndonesie,
a rythme lent
a l’exception de ce qui pourrait detruire la superiorite
indonesienne, a savoir le metal, les cereales, les bovides et la roue. De ce
—
54
Pergoir a archet,Tuvalu (lies Ellice). La pointe de pierre dure est enchasvegetale. Le disque de bois dense sert de contrepoids. II peut etre remplace par trois pierres de poids egal attachees a
see dans de la resine
I'axe. En dehors du metier a tisser, rare (lies Santa Cruz), c'est la I'outil
le plus complexe de I'Oceanie que I’on retrouve aussi bien en Nouvelle
Guinee, en Melanesie qu'en Polynesie. II sert a la fabrication des monnaies de perles de coquillage, a gros diametres (travail feminin, lies Sa-
lomon), qu'a la sculpture taillee dans les benitier (on perce des trous
rapproches, que Ton rejoint par un travail d'usure utilisant par sciage
des tresses en fibres d'enveloppes de noix de coco entramant du sable
de riviere), ou a tous ce qui necessite de percer des trous, en particulier
dans la pierre polie. Ces outils sont peu represents dans les illustrations
publiees, qui se concentrent sur les objets realises grace au pergoir. Peu
outil, les archeologues ne recherchent
pas systematiquement les pointes en pierre dure, ou les pierres contrepoids, ce qui fait que nous ne disposons d'aucune date pour I'apparition
au courant de I'existence de cet
de cet outil. Ex: Gerd Koch, Die Materielle Kultur der Ellice-lnseln.
SSu/letin de la Socicle des Stades Ocea/Uennes
fait, les groupes indonesiens solidement etablis ne sont plus tentes de
poursuivre une migration vers Test. Us y auraient perdu en termes de commodites de la vie quotidienne. La consequence sera le passage des Papous
occidentaux a la piraterie, leur apportant entre autres les pieces chinoises
qu’ils appreciaient et des outds, ou des armes, de fer glanes ici ou la, ou
a eux vendus par les commergants malais, mais qu’on ne rencontre que
dans la partie des cotes de la NouveUe-Guinee occidentale frequentee par
les marchands malais.
La richesse miniere de la NouveUe-Guinee etait alors inconnue et le
minerai de nickel en particulier n’avait encore aucune utilisation qui aurait
pu provoquer un mouvement. La richesse des gisements d’or, qui aurait
pu provoquer un afflux chinois venant de loin, etait tout aussi inconnue.
Sinon eUe aurait eu la capacite de changer l’histoire de la region. L’Oceanie n’a pas ete troublee par l’histoire mfflenaire des empires asiatiques,
parce qu’eUe n’avait rien d’interessant a leur apporter.
De ce moment, la specialisation oceanienne porte sur la complexity
de plus en plus grande des rituels et des modeles sociaux, tenant compte
de ce que le support materiel est l’agriculture de tubercules, en plus de la
chasse (de moins en moins pertinente en aUant vers Test) et de la peche
mfflenaires. Les pieges a poisson en murets de pierres etablis un peu par-
plateformes recifales en sont une manifestation constante. Us
ne sont pas plus melanesiens que polynesiens, ou micronesiens, il y en a
tout sur les
partout, et Us sont partout semblables.
Les absences techniques essentieUes sont ceUes du metal, et de la
roue, qui vont avec l’elevage des bovins, inconnus jusqu’a l’arrivee des
missionnaires.
Les materiaux hthiques utilises pour les lames d’herminettes ou de
haches ne permettaient pas de couper le bois, mais seulement d’en briser
les fibres, ce qui pouvait suffire pour certains bois tendres dans les operations de debroussage.
Les arbres de quelque importance etaient abattus au moyen d’un
processus de conduite d’une combustion lente, sans Qamme, constantment maitrisee et alimentee, travaiUant dans le bois vert, les parties calcinees etant nettoyees au fur et a mesure en ayant recours a 1‘herminette,
56
N°324-Janvier/Fevrier/Mars 2012
souvent a lame de tridacne dans les lies au
large de la Nouvelle-Guinee,
des lies Salomon ou au Vanuatu du nord et du centre nord. Ces lames
de tridacne etablissent a chaque fois un lien avec la Micronesie. J’ai
encore vu faire cette
combustion, d’une technologie sophistiquee, qui
permettait, devant moi, en 1949, a un vieux monsieur du nord d’Am-
brym, sans aide, d’abattre un arbre de grandes dimensions en quinze
jours. Nous n’en sommes plus capables. Cette technologie, d’une grande
importance et d’une grande anciennete (elle etait utilisee dans la sculpture et le creusement des coques de pirogue), ne laisse aucune trace
archeologique.
L’absence de la roue (on note ici et la l’utilisation de sortes de traineaux sur des
pentes ou sur le plat), amene a faire evoluer la pirogue a
balancier vers des modeles de grande taille puis, plus tard et plus loin, le
passage a la pirogue a double coque paralleles et legerement inegales, permettant de transporter des cargaisons importantes.
Ou est apparue la technique de transporter d’enormes plaques
rocheuses entre deux eaux, dans un filet de lianes tendu entre deux
pirogues, en application du theoreme de Pythagore ? On ne sait. Meme les
ingenieurs egyptiens ignoraient cette technique. On la connait pour sur a
Malaita (trait culturel apparemment melanesien) et a Tikopia (trait culturel apparemment polynesien) aux lies Salomon. On ne sait pas ou cette
technique aurait pu etre pratiquee en Asie, nos savants ne s’etant jamais
pose le probleme. Un constat general pourtant est que les avancees techniques oceaniennes ont leur contrepartie en Asie. Les ponts suspendus a
partir de hanes de Nouvelle-Guinee ont leur parallele dans la Chine montagneuse, les hanes etant remplacees par des chaines en fer, illustrant d’ailleurs un episode celebre de la Longue Marche.
Apparition des cultures irriguees de taro a travers le drainage des
hautes vallees alpestres marecageuses de Nouvelle-Guinee. Apparition de
l’irrigation monumentale, selon un modele austronesien amene d’Asie, diffuse aussi aux Philippines par les Ifugao (eux aussi Austronesiens), dans
les basses vallees et la ou la pente s’y pretait, sur les flancs occidentaux
plus secs des lies de la Melanesie. La pratique de la petite irrigation de
proximite pour le taro avait ete constante depuis le debut, partout ou les
57
m {Bulletin de la Society de& Studcx &ceanicnne&
Oceaniens s’etaient installes. Des qu’ils se sont etablis dans un milieu mon-
tagneux sec, ces demiers vont chercher l’eau pai’ des canaux qui peuvent
faire plusieurs kilometres. Je ne crois pas qu’on soit passee du drainage
l’irrigation. Les deux etaient connus parallelement, l’un etant le contraire
logique de l’autre. On choisissait selon l’opportunite et Ton pouvait passer
ainsi d’une terrasse irriguee a un champ draine dans le meme environnement (une vallee alpestre, ce que j’ai observe personnellement dans la
a
haute vallee de la Baliem, en Nouvelle-Guinee occidentale).
8.000 BP
L’Austrahe se separe de la Nouvelle-Guinee du fait de la montee des
eaux, qui reconfigure lentement les cotes de tous les archipels melanesiens
et polynesiens. L’arret de la montee des eaux se placerait apres 6.000 BP.
6.000 BP
Occupation lente des lies Santa Cruz, puis du Vanuatu, qui n’est pas
encore tout a fait dans sa configuration actuelle de volcanisme jeune
adosse a des plateaux ou des colfines de calcaire dur et de plateaux kars-
tiques (centre est d’Espiritu Santo, nord-ouest de Malekula, centre
d’Efate). II n’y a pas trace de grands mouvements, et la structure des societes locales ne suggere pas de grandes arrivees, sinon en meme temps qu’il
s’en est produit, bien plus tard, en Nouvelle-Caledonie. Pas de flottes de
pirogues: 0 n’y en a jamais eu, nulle part, pour avancer d’lle en ile.
Les raisons de la pratique de la circoncision vraie, au nord de Malekula et au nord de Ragha (Pentecote), alors que l’incision du prepuce est
la pratique generate en Oceanie, ne sont pas connues. Les chefferies Big
Nambas, qui pratiquent la circoncision vraie, les chirurgiens de cette circoncision etant issus d’une population decrite comme plus ancienne, se
veulent venues de l’ouest, par l’intermediaire du demiurge Xambat, a l’origine de toutes choses. Leur ceremonie du kava evoque celle des lies Fiji,
mais leurs rites lies aux premices de la recolte d’ignames ont des paral-
leles proches en Nouvelle-Caledonie (Bourail). Leurs rites agraires lies a
la lune ont aussi un parallele dans la vallee de Houailou, y compris dans
la coiffure de plumes en forme de casque des pretres.
58
N°324 Janvier/Fevrier/Mars 2012
-
5.000 BP
Les archipels ont atteint, avec la montee des eaux dues a la fonte de
glaciers polaires, presque leur configuration actuelle. Un des facteurs du
mouvement constant disparait, mais le mouvement se
prolonge par sa
force propre. II ne freinera que beaucoup plus tard.
La migration austronesienne a partir de Formose vers la
Polynesie en
passant par les cotes des ties de Fare melanesien devient impossible, elle
aurait apporte le millet, cultive en Asie avant le riz, ainsi que le metal. Les
Austronesiens, installes depuis peu sur Formose, glissent vers les Philippines, ou ils deviennent majoritaires, s’ajoutant aux Austronesiens venus
d’Indonesie, et provoquant des mouvements en direction de la Micronesie,
mais pas de la Polynesie. On n’avait pas besoin d’eux en Melanesie, deja
entierement peuplee.
Occupation tres lente des ties Loyalty, puis de la Nouvelle-Caledonie,
ou l’inverse.
Le dessin des cotes se stabilise petit a petit, En Nouvelle-Caledonie, des
mouvements orographiques locaux s’y ajoutent. La mangrove emigre d’une
baie a l’autre ou de la moitie d’une baie a la moitie en face, recouvrant des
sites archeologiques potentiels. De tels mouvements orographiques pourraient certainement etre demontres ailleurs dans la region. Les dates les plus
anciennes sont a retrouver dans le lagon, ou personne n’a encore travaille,
les archeologues ne tenant pas compte de la montee des eaux dues a la fonte
des glaciations polaires. La « petite periode glaciaire
»
et ses consequences
hydrographiques ne sont pas prises en compte. Le site Lapita eponyme se
prolonge sous le lagon, et cela jusqu’a lilot Koniene, au-dela meme de ce
qui serait le fruit de l’usure de la cote par la mer, usure acceleree depuis la
Europeens qui se sont attaques a la mangrove protectrice.
Multiplication des relations nord-sud et sud-nord, entre la Melanesie
et la Micronesie, y compris touchant la cote nord de la Nouvelle-Guinee,
venue des
les Salomon et le Vanuatu.
4.000 BP
Premiers departs, tres lents aussi, au-dela de la Melanesie orientale,
d’abord par le chapelet d’lles dites depuis Polynesian outliers (qui ont
59
m bulletin/ de/ la Society des &tude& &cea/uenne&
ainsi send aux voyages dans les deux sens, les Polynesiens sont revenus
par la parce qu’ils avaient garde la tradition des elements pertinents du
voyage dans l’autre sens), puis plus directement vers Fiji, puis le reste de
la Polynesie occidentale.
Pour la suite des evenements, j’adhere pour le moment aux proposi-
tions actuelles. Si le role de diffusion des lies Samoa est mal connu (les
archeologues ne semblent pas connaitre la migration lente, au cours de
plusieurs siecles, de Samoa a Kiribati), peu etudie, celui des des Marquises
ne me semble pas contestable (la societe marquisienne est la plus proche
du modele multiple des societes melanesiennes ou Ton trouve de tout, du
big man au chef hereditaire, mais qui peut etre remplace s’il n’est pas
convenable, et qui est sounds a la meme competition de prestige que le
big man).
II s’y ajoute les multiples departs a partir de Samoa, vers la Micronesie (Tuvalu, Kiribati, dont les lies du nord seules sont micronesiennes),
vers les lies Tokelau, Rarotonga et les lies Cook, qui n’ont pas ete peuplees
seulement a partir de Tahiti etc.
La Polynesie se termine dans l’eblouissement des departs vers les
lies Hawai’i et vers la Nouvelle-Zelande. Le point de depart vers Pile de
Paques est inconnu, comme le point d’arrivee en Amerique, du fait de la
faiblesse de l’archeologie ciblee sur les cotes de l’ocean Pacifique. Je
favoriserais, pour ma part, la liaison entre Hawai’i et la Califomie (d’ou
Ton peut descendre aisement vers le sud), parce que c’est la plus facile,
et qu’elle serait parallele aux allees et venues entre la Siberie et le nord-
ouest du Canada, et peut-etre s’appuyant sur elles. Les preuves manquent,
quelle que soit l’hypothese. Mais la recherche de la methode la moins
difficile est une constante de 1’evolution des societes humaines. Les plus
mauvaises mers ne sont jamais le lieu du passage des migrations
humaines. Les marins nordiques ont fait le grand tour pour parvenir en
Amerique, en passant par l’lslande et le Greenland. Ils n’y sont pas alles
directement. On dit que Saint Brendan a reussi le voyage direct a partir
de l’lrlande, mais il n’y en a pas la moindre preuve. Et les coracles irlandais ronds, en cuir, n’etaient pas les plus adaptes a la traversee de l’At-
lantique Nord.
60
N°324 Janvier / Fevrier / Mars 2012
-
3.000 BP
Date de depart approximative et logique des ancetres des Malgaches,
de points multiples le long des cotes de l’ocean Indien, par des populations austronesiennes ayant acquis le fer, la roue, l’elevage des bovides et
les cereales. Ce qui etait l’achevement de leur lente migration du sud-est
asiatique vers 1‘ouest a partir du sud-est de 1‘Asie, et le long des cotes de
l’ocean Indien, oublies de tous sous la forme de villages de pecheurs,
eventuellement sur pilotis et dans des endroits impossibles, prolongeant
les orang laut indonesiens. Depuis, le Bouddhisme, puis l’lslam, ont
absorbes ceux qui n’etaient pas partis, ou les ont de nouveau pousses au
depart, en pirogue une fois de plus.
Parmi tous ces migrants vers Madagascar se placaient des groupes
qui etaient bien etablis comme cultivateurs de riz, similaires aux Chams
du Vietnam, et le point de depart de ces groupes est egalement inconnu a
ce jour. Le point de depart logique serait le Sri Lanka. Des linguistes veulent les faire partir de Sumatra, mais la encore, ce n’est pas le bon sens
qui les inspire. La seule chose qui est certaine, a partir de la situation au
point d’arrivee, c’est qu’il y avait multiplication de points de depart comme
il y a multiplication ethnique a 1’arrivee. La comparaison, point par point,
des langues malgaches avec les langues locales le long des cotes de
1’ocean Indien n’a pas encore ete tentee. Elle sera tres difficile. Le mobilier
archeologique ne comporte pas de variations d’une clarte eblouissante
dans l’interieur de ces regions. La civilisation du bronze sud asiatique etait
plutot coherente. Et qui voudrait aller travailler dans des aires culmrelles
d’oii sont issus, ou que frequentent encore, les pirates modemes ?
Debut de la diffusion du decor lapita en Melanesie, a partir d’un
decor I’annongant sur la cote nord de la Nouvelle-Guinee. Il s’agit done
d’un phenomene tardif, bien apres l’installation d’une population permanente aux lies de 1’archipel Bismarck, et qui n’a pu jouer le role unificateur qu’on lui attribue trop facilement. Il faudrait supposer une
acceleration de l’histoire que rien ne vient confirmer. Par contre, la gene-
tique des populations tendrait a proposer que les populations insulaires
de ce temps etaient majoritairement matrilineaires, ce qui facilitait l’assimilation des apports etrangers. Cela va de pair avec l’adoption des motifs
61
dfouflclw d& /a tlaciele de& Otude& QceanL
lapita en tant que favorises par des artisans femmes, jusqu’a ce que ces
memes femmes l’abandonnent et
passent a autre chose, ce qui est une
situation parfaitement normale. II n’y a jamais eu de peuple du Lapita,
mais des potieres qui se sont amusees un temps a jouer avec cette forme
de decor.
La date de l’introduction de l’elevage de pores est donnee pour avoir
ete aux environs de 3.000 BP. II est venu d’Asie selon toute probability,
comme les
gallinaces. La Chine du Sud n’en est pas obligatoirement le
point d’origine. II est arrive avec, ou a ete precede, par differentes formes
de l’elevage de chiens et de differentes especes de rats. L’homme a meme
transporte le crabe de cocotier avec l’arbre dont il se nourrit. Pourtant,
personne n’en parle.
Si le pore n’est pas parvenu aux lies Loyalty et sur la Grande Terre de
Nouvelle-Caledonie, le chien, kuli, y etait par contre, malgre des affirmations contraires. Le nom vemaculaire local est le nom austronesien.
Les Loyaltiens connaissaient 1’existence du pore, par leurs relations
maritimes avec Anatom, et plus au nord jusqu’a Epi, mais, pour une raison
ou une autre, ne Font pas
adopte. Les ravages dans les cultures effectues
par les pores sauvages peuvent foumir une explication. La necessite d’etablir des barrieres contre les depredations des pores eleves en stabulation
libre a pu ne pas etre souhaitable, dans un milieu corallien souleve, en
grande partie karstique, et ou les pores n’auraient eu d’autre nourriture
possible que les tubercules plantes dans les champs par les hommes. Le
substrat corallien aux lies ne permettait pas facilement, dans un grand
nombre de cas, l’implantation de poteaux de barriere anti pores. La
concurrence pour la nourriture entre les hommes et les pores necessite
des terres nombreuses et fertiles, friables et profondes que Ton trouve
dans la bonne proportion au Vanuatu, mais pas aux lies Loyalty.
2.000 BP
A une date a determiner, avant ou apres 2.000 BP, se produit une arri-
importante sur la cote est de la Nouvelle-Caledonie, d’un peuple parlant une langue a tons, le paaci, arrivee qui, petit a petit, met en branle
toutes les structures existantes, qui se mettent a migrer du centre des
vee
62
N°324 Janvier/Fevrier/Mars 2012
-
plaines littorales de la cote ouest vers le sud-est et le nord-ouest, ce moucontrecoup les lies Loyalty du nord-ouest
au sud-est. Pour le moment, rien ne nous
permet de croire que ce peuple
touchait au Lapita. La poterie, non decoree, ne semble pas avoir joue un
role autre que materiel dans sa vie quotidienne. Les locuteurs paaci se
sont installes, dans leur grande majorite, a cote d’une autre
langue a tons,
le cemuhi, deja installee et plus ancienne, dont l’aire d’expansion a ete
vement traversaiit a nouveau par
partie recouverte par les nouveaux venus, evolution acceleree par les
consequences des repressions militaires coloniales.
en
Si l’hypothese d’une creation autochtone d’une langue a tons par
derivation d’un etat de choses a accentuations trop complexes necessitant
ordre, le point de depart ne serait plus a envisager de la
langues a tons, qui ont plusieurs milliers d’annees
de presence concevable, ne sont pas venues de nulle part. Et ou doit-on
chercher leurs liens ? L’Indonesie ne comprend pas de langues a tons ?
Les arrivees polynesiennes (a Samoa, a Tonga, a Wallis, a Futuna, sont
pour bien plus tard, les toutes dernieres arrivees etant de Rarotonga au
Vanuatu et sur Mare et Lifou. Elies ont ete precedees, autour de 1.000
une remise en
meme facon. Mais ces
apres J.-C. par un mouvement venu de l’extreme nord de la NouvelleZelande, qui s’est installe aux lies du sud du Vanuatu et s’est prolonge
d’une part jusqu’a Epi, d’autre part aux lies Loyalty, puis sur la Grande
Terre de Tile des Pins jusqu’a Pouebo et Poum (l’avancee des chefferies
Xetriwaan en Nouvelle-Caledonie, de Tile des Pins a Poum : Jean-Marie Tji-
baou appartenait a l’une de ces lignees). Ce mouvement est lie, tout au
moins geographiquement, a la poterie lapita (de des Pins, Kone), peutetre dans sa demiere phase locale, les informations obtenues etant que le
Lapita s’est maintenu en Nouvelle-Caledonie et a l’de des Pins, plus longtemps qu’ailleurs, sous forme de poteries de prestige ?
63
bulletin dv /a Joccetv de& Studcs 0icecuuenne&
Sources
La bibliographic du sujet comprend, linguistique, ethnographic,
anthropologie, archeologie melangees, aujourd’hui plusieurs milliers de
titres, impossible a rassembler dans le corps d’un ailicle. Ces titres se suivent et ne se ressemblent pas tous. Certains correspondent a une vision
perimee, tels les publications allemandes et suisses relevant de l’ecole de
la Kultur Kreis. Mais ils apportent de l’information ethnographique,
comme beaucoup de publications missionnaires, ou les epouses sont parfois les meilleurs observateurs.
J’ai achete, il y a un demi-siecle, les microfilms de l’ensemble de la
correspondance des missionnaires de la London Missionary Society avec
leur direction a Londres. Personne n’a daigne s’y interesser. Je l’ai depose
en fin de
compte au Service des archives de la Nouvelle-Caledonie. C’est
potentielle d’informations, par ce qu’ils disent et par ce qu’ils
ne disent pas. Mais il faut former les chercheurs potentiels a l’anglais ecrit
une mine
de la fin du XVIIIe siecle.
Les rares pubhcations medicales, meprisees par tant de nos collegues
qui ne s’y reportent jamais, peuvent apporter une information essentielle,
comme la multiphcation des cas d’Alzheimer jeune chez les populations
oceaniennes vivant sur un sol constitue en tout ou partie de bauxite, en
general sur des sols issus de plateaux coralliens exhausses.
Ou le cas, qui devrait etre enseigne partout, de quasiment le meme
treponeme donnant en Asie et en Oceanie le pian, maladie parasitaire non
sexuelle, contractee en marchant pieds nus, et en Amerique du Sud la
syphilis, maladie sexuelle redoutable (la decouverte de l’identite d’origine
entre le pian et la syphilis et de leur immunite croisee est due a mon pere,
le professeur Jules Guiart, de la Faculte de medecine de Lyon).
Ce pian qu’aucun auteur de sciences humaines ne connait et qui, a
un stade terminal, donne des pertes de chair au nez ou aux oreilles, ce qui
l’a fait confondre longtemps avec la lepre par les medecins mihtaires de
la fin du XLXe siecle (d’ou les confusions faites par Marshall Sahlins a Fiji).
Le pian a bien du, lui aussi, passer par le detroit de Behring. Les peuples
a
potieres lapita l’avaient normalement contracts, mais la plupart survi-
64
N°324 Janvier / Fevrier / Mars 2012
-
vaient, le pian se caracterisant par le grand nombre de guerisons sponta-
l’adolescence, guerisons qui se sont revelees precieuses, plusieurs
millenaires plus tard, car ceux qui avaient ete gueris, et meme ceux
qui
ne 1’avaient
pas ete, etaient proteges de la syphilis importee par les blancs.
nees a
Le serpent n’a pas pu en ce cas se mordre la
queue. Tous les discours missionnaires et medicaux sur les ravages de la syphilis sont faux. II
de
s’agit
la blennorragie, qui bloque les trompes chez les femmes et les rend ste-
riles. La naivete de ces auteurs ignorait la difference. Et tant d’autres
auteurs, tout aussi ignorants, les ont suivis sur ce point.
On salt que les lies occidentales d’Oceanie sont soumises au
palu-
disme dans les regions coheres, mais que la Nouvelle-Caledonie, les lies
Loyalty, les Fiji et toutes les lies polynesiennes ne le sont pas. La frontiere
entre les deux commence entre Tanna du Vanuatu et la
petite de de Futuna,
la, qui n’est pas impaludee. Ses habitants se reclament
d’une relation privilegiee avec Tonga. On n’a pas encore decouvert la raison de cette difference et
pourquoi les relations modemes, par mer et par
a soixante milles de
air, n’ont pas encore reussi a transferer vers Test le vecteur du paludisme,
l’anophele, alors que le moustique vecteur de la filariose est partout,
excepte en Nouvelle-Zelande. On s’est apergu que les manifestations exterieures de la filariose, l’elephantiasis, evoluaient avec les changements
dans l’habitat induits par la venue des Europeens. Au Vanuatu, mes observations m’ont montre que l’elephantiasis de la jambe, qui avait frappe de
vieux missionnaires cathobques, dont en Nouvelle-Caledonie, avait disparu
(excepte aux des Torres). Je n’ai rencontre que de l’elephantiasis du scroturn. Vingt ans plus tard, d n’y avait plus de manifestations exterieures. L’archeologie de la filariose, bien sur, n’existe pas. Les geneticiens finiront
bien pas s’y interesser. Ainsi qu’aux variahons oceaniennes de la maladie
de Creutzfeldt-Jakob.
La htterature sur le Pacifique conhent ainsi des tresors d’informahon
caches dans des coins restes obscurs. II faut la considerer dans son entier,
et reflechir
longtemps. Mettre en evidence les contradichons et chercher
par quel moyen les depasser, ou les utihser pour un meilleur eclairage de
65
m bulletin de fa Society de& Htudm Gecaniennes
la situation. Un auteur peut avoir raison ici et pas la, sur ce point et pas
sur cet autre. II convient d’avoir rassemble un tres grand nombre de don-
pouvoir en juger sainement.
Mais les auteurs actuels qui maitrisent dans le detail les variations de
nees de toutes sortes pour
l’ethnographie materielle oceanienne sont extremement rares, depuis la
disparition dans 1’anthropologie et l’archeologie americaine des chercheurs d’origine allemande ou autrichienne. Je suis le seul Francais survivant forme dans un musee, ayant eu en mains tous les objets du Pacifique
Sud et a m’etre pose des le depart des questions par rapport a la repartition de ces objets, les plus connus et les moins connus. J’ai trouve sur de
nombreux terrains insulaires des reponses, mais pas toutes. J’en rencontre
encore aujourd’hui, perdues dans le coin d’un livre que personne ne lit.
Jean Guiart
66
Les plantes et les oiseaux
de l’atoll de Temoe
Sur les 76 atolls des Tuamotu
1
quelques-uns seulement beneficient
d’une monographie faisant la synthese des connaissances sur leur faune
et leur llore. Les classiques en la matiere sont les productions de Morrison
(1954) pour Raroia et de Chevalier, Denizot et al. (1968) pour Moruroa.
Ce type de syntheses est important a plusieurs titres et leur accessibilite a
en hgne
travers des revues pubhees ou
indispensable. Tout d’abord,
pour la connaissance generate des ecosystemes de l’archipel car les don«
,
»
presentees peuvent servir de base pour des comparaisons avec d’autres atolls ou d’autres regions du Pacifique. Elies permettent egalement a
nees
pubhc non scientiflque, mais interesse par son patrimoine, d’en decouvrir la diversite. Notre objectif est d’inventorier les plantes vasculaires et
les oiseaux de l’atoll de Temoe en reunissant des informations historiques
et actuelles: connaitre le nombre des especes, leur statut d’indigenes ou
d’introduites pour les plantes, de reproducteur ou de migrateur pour les
oiseaux. Puis, nous replacons les informations dans un contexte plus general, c’est-a-dire dans une zone geographique comprenant le sud des Tuaun
1
-
Par Tuamotu, nous entendons I'aire geographique et non I'aire administrative; en effet,
les naturalistes comprennent generaiement I'atoll de Temoe ou ceux des Acteon, voire
Oeno aux Pitcairn, comme faisant partie de I'archipel geographique des Tuamotu alors
qu'ils sont indus dans les archipels administrates des Gambier ou de Pitcairn.
$>u//etin de tu doc/ete de& S///(/c<i Oceania
motu et l’atoll Oeno dans le Groupe Pitcairn. La recherche d’informations
dans les textes anciens et les collections des musees d’histoire naturelle
nous permettent de presenter une histoire naturelle de Temoe, et de suivre
partie des changements intervenus ces 150 demieres annees. Cette
periode recouvre en grande partie la periode coloniale qui modifla si
une
»
«
profondement les lies Gambier et le sud des Tuamotu.
Methodes
Description
LUe de Temoe (parfois mal orthographiee Timoe) hit signalee en 1797
sous le nom de « Crescent Island » par le
navigateur James Wilson, capi-
taine du Duff. Administrativement rattachee aux lies Gambier dont elle est
distante de 37 km, elle s’en distingue par sa nature geologique qui en fait
l’atoll le plus meridional des Tuamotu, juste a l’ouest des lies Pitcairn. D’un
point de vue geologique, Temoe est situe sur un plancher oceanique datant
de l’Oligocene qui s’etend depuis Marutea sud jusqu’a I'Tle Pitcairn. (Bonvallot, 1993 ). LUe a grossierement la forme d’un trapeze de 8 x 4 km, avec
2
une superficie des terres emergees de 3,59 km sur une cinquantaine de
2
motu et un lagon de 10,24 km (Andrefouet et al 2005). Elle ne possede
,
aucune passe et seuls de rares hoa permettent des flux permanents entre
le lagon et la pleine mer sur les cotes ouest et sud; de ce fait, la bande de
terre est quasi continue entre les motu Tepu au nord et Panuikakao au sud.
II faut noter que sur les cotes est et sud, cote ocean, les motu presentent
detritique, de plus de 5 metres de hauteur sur 50 a 100 m de larde
geur, d’ou la vegetation est quasiment absente. La plus grande partie
l’atoll appartient a des proprietaries prives tandis que quelques motu de la
facade ouest sont presumes domaniaux (motu A a M).
une levee
Histoire
Temoe fut occupee a une epoque ancienne, au moins du 14 au
siecle, comme en temoignent les structures archeologiques (Murail
& Conte, 2005), puis I’Tle fut abandonnee. On peut distinguer trois phases
XVII
e
dans la presence humaine de l’epoque coloniale a aujourd’hui:
68
Atoll de Temoe
Kurara
Archipel des Gambier
Tutapu
orea
Tokeve
Pakake
LOgeue
■Omenii iti
.Omenii nui
Mootagi
Panuikakao4
Tepunui
Taketake
Maemae'
Orotu
Ikoamo iti
Parekura
koriu
Teiriamai
inore
Koutuna
Onape nui
koamo nui
Includes material ©11STA Space Systems Inc.
Toponymie de I'lie Temoe
[d'apres Murail & Conte (2005) et Molle G., comm. pers. 2010]
apposee sur I'image satellitaire IKONOS datant du 28 mars 2005
Oxxanienne*
($u//cii/t (/c (a Society de&
Tableau 1
Dates de visites des personnes relatant des observations ornithologiques et/ou botaniques
Sources
Date de visites
24 mai 1797
Wilson (1799)
17 mai 1836
Rouchouze in Emory (1939)
2 novembre 1842
Lucett (1851)
1902 ou 1903
Leon-Gaston Seurat (1903)
Avril 1902
A. Seale (ms), Bishop Museum,
24 avril 1922
Quayle (ms), WSSE, et collections de I'AMNH-NewYork
Harold St John et Raymond Fosberg (Mangarevan Expedition)
25 juin 1934
(journal de collectes, Bishop Museum), (St John, 1934)
23-25 octobre 1934
Kenneth Emory (1939)
April 1992
Graham Wragg
Juin 1997
Ed Saul, Graham Wragg (ce travail)
11-16 avril 2010
Jean-Frangois Butaud (ce travail)
Figure 1
Situation de TTIeTemoe au sein des Ties du sud desTuamotu,
des Gambier et du Groupe Pitcairn
Archipel des Tuamotu
Carte du sud-est des Tuamotu,
135° Ouest
des Gambier
° TUrC ' a
et de l'ouest du groupe Pitcairn
Vahanga
Vanavana
Tenararo
» O0
Tenarunga
°
.
Moruroa
.
O
.
Marutea Sud
Maturei vavao
a
Maria
O
Fangataufa
Mangareva
Morane
^v ,,!
Temoe
Tropiquc du Capricomc (23° 26' Sud)
Archipel des Gambier
Groupe des ties Pitcairn
Oeno
70
o
N°324 Janvier /Fevrier/ Mars 2012
-
1
l’occupation par les exiles de Taku provenant de Mangareva qui
resterent environ 80 ans
jusqu’en 1838 (Emory, 1939). En raison de
l’abandon a elle-meme de cette population, on peut penser qu’une
exploi-
tation tres intense des ressources naturelles locales eut lieu.
2
-
la plantation du cocotier pour l’exploitation du coprah a partir
des annees 1920. Aujourd’hui, la cocoteraie occupe une grande partie de
l’atoll (voir liste systematique), mais elle n’a pas ete aussi
importante que
sur d’autres atolls du sud des Tuamotu.
3
-
l’abandon de la coprahculture il y a plusieurs dizaines d’annees,
surement dans les annees I960 pour une
irreguliere (peche,
pares a
frequentation plus ponctuelle et
poissons, ensemencement en nacre...). La
cocoteraie est desormais en friche, reculant localement, meme si elle est
devenue tres dense dans certains sites. Depuis une dizaine d’annee, un
programme de recherches archeologiques, anthropologiques et paleoge-
netiques est conduit sur l’atoll, par Eric Conte et Marshall Weisler en 2001,
puis par Eric Conte et Pascal Murail en 2002, 2003, 2005 et 2010. Une
demiere mission devrait avoir lieu en 2011 ou 2012.
Prospections
Le Tableau 1 indique les dates des differentes visites pour lesquelles
des observations ornithologiques sont disponibles et des collectes de
plantes ont ete effectuees. Dans son journal, Ernest Quayle indique qu’il
prospecta la facade est de l’atoll, tres certainement entre les motu Tlitapu
et Tupa. Charles Curtis a recolte des plantes sur la partie nord (echantillons 411 a 457, mais pas uniquement des plantes vasculaires). Harold
St John et Raymond Fosberg ont prospecte les dots du nord, tres probablement Kurara, Torea et Tepu (echantillons 15204 a 15226 dont une
mousse et un lichen). Kenneth Emory a prospecte les fagades nord, est et
sud-est, entre les motu Tepu et Tupa. Ed Saul et Graham Wragg parcoururent tous les petits motu de l’ouest et le motu principal de la cote est.
Enfln, Jean-Frangois Butaud visita l’ensemble des motu de l’atoll (echantillons 2624 a 2649).
71
(Sit/Ze/in de- fa Society de& Etudes- 6ceani<
Noms de plantes
Nous indiquons les noms scientiflques et les noms mangareviens des
differentes plantes. Ces derniers proviennent essentiellement de Emory
des autres scientifiques ayant visite T atoll
( 1939 ) mais
egalement
(Tableau 1), du dictionnaire mangarevien (Janeau 1908) et de la synthese
plus recente de St John sur la flore des Gambier (St John, 1988a).
Noms d’oiseaux
Nous indiquons les noms frangais et scientifiques des differents oiseaux,
ainsi que leurs noms mangareviens, en Tabsence de noms vemaculaires proont ete recueillis par le Pere
pres (voir plus loin). Des noms mangareviens
e
Laval au XD( siecle (Janeau, 1908), mais nous n’en avons pas tenu compte
puis Emory (1939) mit a jour cette liste,
en tentant de les identifier (Buck, 1938). Nous avons egalement indique
quand ces noms nous avaient ete signales (JCT en 1996, JFB en 2010). En
car il n’identifia pas les especes;
1996, les noms furent recueillis aupres de deux informateurs assez ages
(Tune de 83 ans et l’autre de plus de 70 ans) dont les sejours a Tahiti et dans
le nord des Tuamotu avaient influence leurs connaissances (par exemple,
les deux personnes nommerent les fregates ‘otaha et non moko’e ).
Listes floristique et avifaunistique des especes
Les especes de plantes et d’oiseaux sont presentees dans Tordre syste-
matique adopte par les botanistes et les zoologistes. Pour chaque plante,
donnons une breve presentation, precisant les synonymes employes aux Gambier et a Temoe, son type biologique (arbre, arbuste, herbacee, fougere,
liane...); un second paragraphe precise sa situation a Temoe, indiquant son
statut de plante indigene ou introduite (introduction
polynesienne ou
modeme »), Tabondance relative, et la repartition avec le nombre de motu
la repartition
occupes. Pour les oiseaux, un premier paragraphe indique
generale en Polynesie; dans un second paragraphe, nous precisons le statut
a Temoe [reproducteur, apreciser (= statut inconnu), migrateur (depuis
TAmerique du Nord) ou encore visiteur (depuis d’autres iles de Polynesie) ].
Abreviations: AMNH American Museum of Natural History, WSSE
nous
«
«
=
=
Whitney South Sea Expedition.
72
»
Liste systematique des plantes
Dicotyledones
Achyranthes aspera var. velutina Amaranthacees
Arbrisseau indigene trouve dans les archipels Cook, Australes,
-
Societe, Tuamotu et Pitcairn. II est absent des Marquises et des Gambier,
ayant pu neanmoins disparaitre de ce dernier archipel sous Faction de
Fhomme, comme ce fut le cas dans plusieurs atolls des Tuamotu. Aux Pitcairn, il n’est connu que de l’atoll Oeno, d’autres taxons se developpant a
Henderson et Pitcairn.
Nouvellement repertorie pour l’atoll en avril 2010, probablement non observe precedemment en raison de sa rarete. En effet, cet
Indigene
-
arbrisseau dont les fruits piquants sont dissemines en etant accroches au plumage des oiseaux est restreint aux deux motu Ikoamonui. Ces motu n’avaient
probablement pas ete prospectes lors des visites botaniques precedentes.
Barringtonia asiatica
Syn.: B. speciosa
-
Barringtoniacees
-
‘UTU
Arbre trouve dans tous les archipels polynesiens ou il est considere
indigene. Neanmoins, certains auteurs le qualifient d’introduction
polynesienne dans tout ou partie de son aire de repartition (Whistler,
1992). A noter qu’aux Tuamotu, il est probablement indigene sur l’atoll
souleve de Makatea tandis qu’il a ete introduit dans tous les autres atolls
comme
ou il est present.
—
d&td/etui dc /a dodete des Sludes Ocea/u'eanes
Introduction modeme
-
Observe seulement par Seurat sous la
forme de jeunes pieds nommes HUTU. Dans la mesure ou cet auteur cite
egalement le TAMANU (Calophyllum inophyllum ) avec lequel il pourrait
etre confondu, son observation n’a pas lieu d’etre mise en doute. Nous la
considerons comme une introduction modeme cultivee qui ne s’est pas
maintenue, bien que ses fruits puissent en principe coloniser les lies du
fait de leur bonne flottaison. Son absence des atolls polynesiens sans intervention humaine confirme ce statut.
Boerhavia tetrandra
-
Nyctaginacees -RUNA
Syn.: B. diffusa var. tetrandra
Herbacee rampante presente dans tous les archipels polynesiens a
l’exception des Marquises. Se developpant uniquement sur les littoraux
sableux ou les falaises bttorales et done particulierement abondante sur
les atolls.
Indigene
-
Recoltee en 1934 par St John et Fosberg et nommee
RUNA par Emory la meme annee. Observee sur 26 des 53 motu de Temoe
en avril 2010 ou elle etait commune.
Occupe a la fois les sous-bois clairs
et les formations rases tres exposees.
Calophyllum inophyllum
-
Clusiacees
-
TAMANU
Grand arbre present dans l’ensemble des archipels polynesiens et
dans la plus grande partie des lies. Frequent sur les littoraux, plus rare en
altitude et alors toujours a proximite d’implantations humaines actuelles
ou anciennes. Aujourd’hui considere introduction dans l’ensemble de la
Polynesie frangaise.
Introduction polynesienne Cite sous le nom de TAMANU par
Rouchouze en 1836, puis au tout debut du XX siecle par Seurat (ce der-
e
nier considerant que les quelques pieds observes avaient ete amenes de
Mangareva), et enfin en 1934 par Emory. Il a, de plus, ete collecte par
Quayle en 1922, puis St John et Fosberg en 1934. En avril 2010, il etait
sur
present sous la forme d’une quinzaine de pieds centenaires repartis
3 motu : 1 pied sur Tepu (et un tronc mort), 1 pied sur Kurara (alors
a
Une
que Emory en notait deux en 1934) et une dizaine de pieds Tupa.
76
N°324 Janvier / Fevrier / Mars 2012
-
plantule a egalement ete reperee sur le motu Torea. II faut noter que tous
les pieds adultes sont situes a proximite de plateformes pavees, confirmant
en cela le statut d’introduction
polynesienne de l’espece et son etat d’espece subspontanee.
Casuarina equisetifolia subsp. equisetifolia
-
Casuarinacees
-
TOA
Le bois-de-fer est un arbre present dans tous les archipels polyne-
siens ou il est considere comme une introduction polynesienne. II est
generalement trouve a proximite de structures archeologiques ou sur
d’anciennes zones depourvues de vegetation, que ce soit naturellement ou
a la suite d’incendies ou d’erosion. Il avait disparu des Gambier avant l’arrivee europeenne et y a ete reintroduit depuis.
Introduction modeme Il n’avait pas encore fait l’objet d’observation a Temoe jusqu’a sa decouverte en 2010. Une quinzaine d’individus
ont ete recenses en debut de naturalisation sur les motu Kurara (12),
Torea (1) et un petit motu au nord de Tepunui. Ils proviennent vraisemblablement d’un ancien campement situe sur le motu Kurara (voir egalement la fougere Nephrolepis hirsutula, nouvelle pour Tile). Les pieds les
plus ages ont au minimum une dizaine d’annees tandis que plusieurs juveniles et plantules ont ete observes dans les zones ouvertes a proximite.
S’agissant d’une espece potentiellement envahissante sur les atolls a la
flore pauvre, le TOA a ete juge indesirable et les pieds ont, autant que possible, ete elimines (arrachage, devitalisation, abattage ou feu autour du
tronc).
-
Cassytha filiformis
-
Lauracees
-
TAXAINOKA
Petite liane parasite presente dans tous les archipels polynesiens a
l’exception des Marquises. Elle se developpe generalement sur les atolls
ou le littoral des lies hautes ou elle atteint parfois 400 m d’altitude dans
des conditions exceptionnelles.
Indigene Citee par Seurat au tout debut du XX siecle, puis par
Emory en 1934 qui la nomme TATAINOKA. La meme annee, St John et
Fosberg Font egalement collectee. En avril 2010, elle etait commune sur
e
-
21 des 53 motu.
77
m bulletin/ da la tlacielo de& &tude& &cea/ue/i/ie&
Cyanthilium cinereum -Asteracees
Syn.: Vemonia cinerea var. parviflora
Herbacee d’origine asiatique, aujourd’hui presente dans tous les
archipels polynesiens ou elle apparait liee aux perturbations d’origine
humaine. Aux Tuamotu notamment, favorisee par les feux, elle est ainsi
quasi-systematique sous les cocoteraies entretenues.
Introduction moderne
-
Collectee et observee seulement par
Quayle en 1922, probablement sur le motu 'I’utapu, cette plante adventice
ne s’est pas maintenue.
Guettarda speciosa
-
Rubiacees
-
TA’ANO, ‘ANO
Arbre present dans tous les archipels polynesiens. Il frequente essentiellement les zones Morales, atteignant neanmoins plusieurs centaines de
metres d’altitude aux lies Marquises. Generalement abondant sur les atolls,
il semble ne pas etre indigene dans les Hiamotu de Test (Tatakoto, Reao,
Pukarua), voire peut-etre meme des Gambier (Emory, 1947).
Introduction moderne Recolte a Temoe pour la premiere fois
en 1934 par St John et Fosberg. La meme annee, Emory notait qu’il y avait
seulement 2 a 3 pieds de TA’ANO sur File. Assez commun en avril 2010
sur 13 des 53 motu, generalement sous la forme de pieds isoles de petites
dimensions et plus rarement sous celle de peuplements purs. Son statut
d’introduction moderne, deduit de l’absence de citation anterieure a 1934
-
et de sa rarete cette meme annee, est confirme par son caractere invasif
2010, puisqu’il etouffe progressivement et remplace des formations a
Pemphis acidula. Egalement tres rare sur les petits motu des facades sud
en
ecologiquement favorables. Il a probablement ete introduit durant les annees 1920 et s’est naturalise depuis lors.
Cette espece est egalement absente de l’atoll de Oeno dans 1’archipel des
et ouest qui lui sont pourtant
lies Pitcairn. Ainsi, si dans 1’est des Tuamotu, cet arbre, pourtant caractede la flore d’atoll, est une introduction moderne, il est raisonnable
ristique
de penser qu’il constitue une introduction polynesienne dans un certain
nombre d’atolls plus a l’ouest ou il etait considere jusqu’alors comme
indigene.
78
N°324 Janvier / Fevrier / Mars 2012
-
Heliotropium foertherianum Boraginacees TO’UNU
Syn.: Toumefortia argentea, Messerschmidici argentea
-
-
Arbre ou arbuste caracteristique des atolls et du littoral des lies
hautes de tous les archipels polynesiens a l’exception des Marquises d’oii
il aurait pu disparaitre. II est present sur la totalite des atolls, generalement
facades du lagon et de l’ocean, mais egalement au sein des formations vegetales de l’interieur des motu.
Indigene Cite sous les noms de TOHUNU en 1922 par Quayle et
de TO’UNU en 1934 par Emory, puis recolte en 1934 par St John et Fosberg. En 2010, il etait commun sur 39 des 53 motu generalement par
pieds isoles ou en bosquets. Il est souvent exclu de l’interieur des motu
par la cocoteraie ou les pandanus.
sur les
-
,
Hibiscus tiliaceus subsp. tiliaceus
-
Malvacees
-
‘AU
Arbre parmi les plus communs dans tous les archipels polynesiens,
1’exception des Tuamotu ou il est generalement considere comme etant
une introduction polynesienne, voire moderne, y compris sur les atolls
a
souleves.
Introduction moderne
-
Observe et collecte settlement en
avril 2010, sous la forme d’un unique pied sterile de 3 m de haut sur le
motu Torea, cote lagon. Il pourrait s’agir neanmoins d’une confusion avec
le cultivar ‘sterilis’ egalement present (voir ci-dessous). En effet, certains
petites feuilles ne peuvent etre distingues
de ceux issus de la sous-espece type. Il s’agit d’un taxon cultive, ou tout
rameaux de ce cultivar sterile a
au
plus subspontane.
Hibiscus tiliaceus subsp. tiliaceus ‘sterilis’ Malvacees ‘AU
Il s’agit du cultivar sterile a petites feuilles de la sous-espece type. Cet
-
-
arbuste semble propre a la Polynesie frangaise ou il est trouve dans tous
sur le littoral et jusqu’a plusieurs centaines de metres d’alles
archipels,
titude, la plupart du temps a proximite d’implantations humaines actuelles
ou anciennes.
Introduction moderne
-
Observe et recolte a une seule reprise,
par St John et Fosberg en 1934, probablement
sur le motu Kurara-Torea.
79
fftit//elin de /a Society de& Studcs Oicea/iic/i/ies
II a sans doute ete introduit a partir de Mangareva pour les perches qui
en etaient
tirees, a l’epoque de I’implantation de la cocoteraie. II s’agit
d’un taxon cultive ou, tout au plus, subspontane.
Kadua romanzoffiensis
-
Rubiacees
Syn.: Gouldia romanzoffiensis, Hedyotis romanzoffiensis
Arbrisseau propre aux lies du Pacifique ou il est present dans tous
les archipels polynesiens a l’exception des Marquises. Plante caracteris-
tique des atolls, exclusivement trouvee sur les sables httoraux.
Indigene Observe ou collecte en 1922 par Quayle et en 1934 par
St John et Fosberg, puis Emory. En 2010, il etait assez commun et trouve
sur 23 des 53 motu. Il se
developpe essentiellement en vegetation basse
-
a la strate arbustive
eparse ou dans les cocoteraies claires.
Lepidium bidentatum var. bidentatum
-
Brassicacees
-
NAUNAU
Syn.: L. bidentatum var. o-waihiense
Herbacee presente dans l’ensemble de la Polynesie orientale, neanmoms tres rare ou eteinte aux
sur les httoraux
Marquises. Se developpant essentiellement
sableux, elle est probablement presente sur la totahte des
atohs des Tuamotu.
Indigene Observee au tout debut du XX siecle par Seurat et collectee
en 1934 par St John et
Fosberg. Cet echantillon a ete identifie par Fosberg
(1992) comme appartenant a la variete o-waihiense, maintenant consideree
par plusieurs auteurs comme endemique de l’archipel hawaiien. Aussi, nous
incluons les plantes de Temoe dans les variations de la variete type. Cette proposition est confirmee par l’observation des siliques de nombreux individus
qui affectent une forme elhptique a orbiculaire, voire obovales. Emory la
e
-
nomm e NAUNAU en
1934. En 2010, elle etait relativement commune et pre-
sente sur 31 des 53 motu de 1’atoll. Ehe se developpe essentiellement en
vegetation basse et ouverte ou sous cocoteraie claire.
Morinda citrifolia
-
Rubiacees
-
NONO
Arbuste present sur la quasi-totalite des lies de tous les archipels poly-
nesiens, y compris sur les atolls. Il se developpe ainsi a la fois sur sable
80
N°324 Janvier/Fevrier/Mars 2012
-
calcaire et sol d’origine volcanique. Considere
parfois comme une espece
polynesienne
indigene, il est actuellement classe comme une introduction
Polynesie orientale.
Introduction polynesienne Collecte en 1922 par
Quayle, puis
en 1934 par St John et
Fosberg. La meme annee, Emory relevait la presence
de seulement quelques pieds d eNONO. En 2010, il etait
peu commun,
trouve sur seulement 16 des 53 motu. Generalement
reparti par pieds isoles
ou par bosquets dans la
vegetation arbustive a arborescente sur les motu les
et
plus grands, done toujours relativement abrite des influences marines. Son
statut d’introduction polynesienne n’est
pas a remettre en cause a Temoe,
ses multiples utilisations en ayant
probablement fait une espece indispensable a la vie sur cet atoll. Il s’agit done aujourd’hui d’une espece naturalisee.
en
-
Pemphis acidula
Lythracees TVPAPA
Arbuste present dans tous les archipels de Polynesie orientale a l’exception des Marquises. Il se developpe uniquement en position httorale
sur un substrat d’origme coraflienne et constitue
generalement la formation vegetale la plus exposee a l’ocean.
Indigene Cite par Seurat au tout debut du XX siecle sous le nom
paumotu MIKIMIKI. Collecte egalement en 1934 par St John et Fosberg.
-
-
e
-
En avril 2010, il etait tres commun, note sur 41 des 53 motu. Il se deve-
loppe essentiellement sur substrat coraflien rocheux, generalement tres
legerement au-dessus du niveau de la mer, cote ocean, cote lagon, et a l’interieur des motu. Il est absent sur les sols sableux ou caillouteux ou
Suriana maritime le remplace.
Phyllanthus amarus Phyllanthacees
Petite herbacee presente dans la plus grande partie des lies habitees de
Polynesie orientale, a 1’exception des lies Pitcairn. Il s’agit d’une plante adven-
tice commune qui se naturahse aisement, en zone littorale ou en altitude.
Introduction polynesienne
en 1922. En avril
Tupa
-
Collectee uniquement par Quayle
2010, une seule jeune pousse a ete observee sur le motu
sur le site d’un ancien
campement. Il est probable qu’elle disparaisse
de l’atoll en raison de sa tres faible frequentation humame.
81
m ($id/e/in de fa Society des Studes Oceaniennes
Portulaca hi tea
-
Portulacacees
-
POKEA
Herbacee chamue presente dans tous les archipels polynesiens et la
plupart des lies. Elle se developpe generalement sur le littoral, mais peut
etre trouvee a plusieurs centaines de metres d’altitude, en vegetation herbacee seche ou sur des falaises basaltiques.
Introduction modeme Recoltee par St John et Fosberg en 1934.
La meme annee, Emory la nomme POKEA comme dans la plus grande
partie des Tuamotu et aux Marquises. En avril 2010, elle etait commune
sur 27 des 53 motu ou elle se developpe dans les tapis herbaces, les zones
-
arbustives ouvertes ou les cocoteraies claires.
Portulaca oleracea
-
Portulacacees
-
POKEA
Herbacee consideree comme etant une introduction moderne dans
la plupart des lies habitees de Polynesie orientale. Elle est generalement
commune en tant
qu’adventice des zones habitees, mais peut egalement
vegetation secondarisee.
Introduction modeme Repertoriee pour la premiere fois en
avril 2010, uniquement sur le motu Orotu, au niveau d’un abri en tole
se naturaliser en
-
abandonne dans une cocoteraie. Elle a sans aucun doute ete introduite par
inadvertance il y a moins d’une dizaine d’annees. En l’absence de nouvelle
perturbation, elle disparaitra probablement a moyen tenne.
Scaevola taccada var. tuamotuensis
-
Goodeniacees
-
NAUPATA
Syn.: S. frutescens, S. koenigii
Arbuste plus ou moins sarmenteux qui se developpe sur les littoraux de
tous les archipels polynesiens. Particulierement rare aux Marquises (Ua Pou
et Fatuiva), il se
developpe jusqu’a pres de 100 m d’altitude a Makatea. Il ne
faut pas le confondre avec la sous-espece type, absente des Marquises, des
lies Pitcairn, des Gambier et de l’Est des Tliamotu, qui possede des feuilles
plus grandes et moins coriaces, ainsi qu’un port arbustif plus dresse.
Indigene Signale des 1836 par Rouchouze, puis par Seurat au
tout debut du XX siecle. Collecte par Quayle en 1922, puis par St John
et Fosberg en 1934. Emory le designe sous le nom de NAUPATA en
-
e
1934. En 2010, il etait commun sur 30 des 53 motu, notamment dans
82
N°324 Janvier /Fevrier/ Mars 2012
-
des formations ouvertes ou il peut constituer des couverts denses diffici-
lement penetrables.
Suriana maritima
-
Stirianacees
-
GEGIE
Arbuste present dans tous les archipels polynesiens a l’exception des
Marquises. Il se developpe uniquement sur les littoraux sableux et constitue done une des especes caracteristiques des atolls.
Indigene Signale au tout debut du XXe siecle par Seurat sous le nom
paumotu deHUHU (V’U), puis en 1934 par Emory sous le nom mangarevien de GEGIE. Cette meme annee, il a egalement ete recolte par St John et
-
Fosberg. En 2010, il etait tres commun sur 44 des 53 motu. Il se developpe
essentiellement sur les littoraux sableux et caillouteux, cote ocean et cote
lagon, mais egalement dans les formations ouvertes d’interieur de motu.
Terminalia catappa
-
Combretacees
KOUARIKI
-
Arbre d’introduction modeme en Polynesie orientale ou il est present
dans tous les archipels et la plupart des lies habitees. Il se developpe generalement sur le littoral mais peut etre trouve a plusieurs centaines de
metres d’altitude. Il ne doit pas etre confondu avec l’espece endemique
Terminalia glabrata appel & KOUARIKI aux Gambier.
Introduction modeme
Repertorie pour la premiere fois en
-
avril 2010, sous la forme d’un seul pied de 50 cm de diametre au nord du
motu Tutapu, cote ocean. Il a vraisemblablement ete plante plus de 20 a
30 ans auparavant. Aucune fructification ou plantule n’a ete observee.
Ainsi, a l’heure actuelle, il peut etre considere comme cultive.
Triumfetta procumbens
-
Malvacees
-
VAVAI
Liane rampante presente dans tous les archipels polynesiens a l’ex-
ception des Marquises. Elle se developpe exclusivement sur le littoral.
Indigene Signalee des 1836 par Rouchouze, puis par Seurat au
tout debut du XX siecle. Quayle la recolta en 1922, puis St John et Fosberg
en 1934. La meme annee, Emory l’indique sous le nom de VAVAI. En
-
e
2010, elle etait relativement commune, rencontree sur 27 des 53 motu
,
essentiellement en formations ouvertes sur sable ou cailloutis.
83
bulletin de la Joc/ete de& &tadc& Oceanu
Monocotyledones
Cocos nucifera -Arecacees
-
ERE’I
Present dans toute la Polynesie orientale ou il est considere comme
polynesienne dans la plupart des lies et une introduction
une introduction
modeme dans certains atolls. Neanmoins, le cocotier pourrait etre indigene de quelques lies hautes comme des fouilles archeologiques menees
aux Australes et aux Cook le suggere Prebble (2008).
Introduction modeme Absent de Temoe selon les premiers visiteurs occidentaux comme Wilson en 1797 et Lucett en 1842. Rouchouze en
-
1836 ne le mentionne pas alors qu’il signale d’autres especes vegetales. Seurat, au tout debut du XX siecle, note que le cocotier est extremement rare
tandis que Quayle en 1922 en indique "a good grove", probablement sur le
motu Tutapu. Emory, en 1934, indique que jusqu’a recemment, il n’y en
avait pas. En avril 2010, le cocotier etait present sur 28 des 53 motu. Il a
fait l’objet de plantations pour la production de coprah des la premiere
decennie du XX siecle, mais probablement de fagon plus intense entre 1922
et 1934. Ces plantations, concentrees sur les motu Tepu, Kurara, Tutapu,
Tokeve, Omenii iti, Tlipa et Orotu, ont ete abandonnees au cours des annees
I960. Dans certains cas, les cocoteraies se densifient comme a Tbtapu ou le
e
e
sous-bois ne presente qu’un enchevetrement de palmes, noix de coco et
jeunes cocotiers; dans d’autres cas, elles disparaissent progressivement avec
le developpement du pandanus (Tupa, Kurara). Neanmoins, le cocotier peut
etre considere comme naturalise a Temoe.
Leptums repens
-
Poacees
-
TORINO
Graminee presente sur les littoraux de la plus grande partie des lies
de Polynesie orientale a l’exception des Marquises. Elle est commune sur
la totalite des atolls des Tuamotu.
Indigene Notee par Rouchouze en 1836 sous la description de
"touffes d’herbe puis collectee par Quayle en 1922 et St John et Fosberg
-
”
1934. Elle est nommee TORINO par Emory en 1934. En 2010, elle etait
commune sur 41 des 53 motu. Parfois presente a l’etat de touffes isolees,
en
elle peut neanmoins recouvrir le sous-bois de zones forestieres claires.
84
N°324 Janvier / Fevrier / Mars 2012
-
Pandanus tectorius var. tectorius
Pandanacees
-
-
‘ARA
Syn.: P. bicurvatus, P. crassus, P. timoeensis, P. taravaiensis
Arbre repandu dans la plus grande partie des lies de Polynesie orien-
tale, notamment tres commun sur les atolls. De nombreuses especes endemiques insulaires ont ete decrites par plusieurs auteurs, mais bien peu
d’entre elles sont considerees comme taxonomiquement distinctes du
variable Pandanus tectorius var. tectorius. C’est le cas de quatre especes
endemiques de Temoe et des Gambier decrites par St John (1988b et
1989), et aujourd’hui mises en synonymie. En effet, en avril 2010, il n’etait
pas rare d’observer deux infrutescences de formes differentes sur un
pied.
Indigene Signale des 1797 par Wilson sous le nom de "WHARRA”,
puis sous celui de pandanus par Rouchouze en 1836, Seurat au tout debut
du XX siecle, et Quayle en 1922. En 1934, Emory le cite sous son nom local
de ‘ARA. Plusieurs echantillons ont ete recoltes par St John et Fosberg en
1934. En avril 2010, le pandanus etait tres commun sur 31 des 53 motu
ou il forme notamment des couverts monospecifiques tres denses dont le
sous-bois est reduit a une couche de feuilles seches non decomposees.
meme
-
e
Pteridophytes
DavaIlia solida var. solida
-
Davalliacees
-
RAU ‘EI’EI, ‘EVEI
Fougere terrestre ou epiphyte commune sur les lies hautes de Polynesie orientale a l’exception de Farchipel des Marquises duquel elle est
absente. Elle est exceptionnelle sur les atolls et ne se developpe que sur
certains atolls de la Societe et sur Makatea aux Tuamotu.
Introduction modeme
-
Nouvellement repertoriee sur File en
avril 2010, elle est presente uniquement sous la forme d’une tache occupant quelques metres carres sur le motu Tokeve, a proximite d’un ancien
campement. Elle est en debut de naturalisation.
Polypodiacees MOKU ROA, MOKU PAPA
Syn.: Polypodium scolopendria, P. phymatodes
Fougere terrestre ou epiphyte presente sur la quasi-totalite des lies
Microsorum grossum
-
-
85
de Polynesie orientale ou elle est generalement commune, notamment en
zone littorale.
e
Indigene Notee par Seurat des le debut du XX siecle comme Polypodium importe de Mangareva, puis collectee par Quayle en 1922 et St
John et Fosberg en 1934. La meme annee, Emory la nomme MOUKU
ROA (corrige ulterieurement en MOKUROA). En 2010, elle etait presente sur 16 des 53 motu, apparemment restreinte aux motu les plus
etendus et les plus forestiers; notamment absente des petits motu de la
facade ouest.
-
Nephrolepis hirsutula
-
Nephrolepidacees
Fougere terrestre presente dans l’ensemble des archipels de Polynesie orientale, mais neanmoins exceptionnelle sur les atolls. Ainsi, elle est
restreinte aux atolls souleves des Tuamotu de l’ouest et a Henderson dans
1’archipel des lies Pitcairn. Elle a, par ailleurs, tendance a se naturaliser
dans certains atolls bas a partir de jardins ou de transferts de terre.
Introduction modeme
-
Nouvellement repertoriee sur File, cette
est presente uniquement sous la forme de touffes occupant
fougere
quelques metres carres sur le motu Kurara avec une autre introduction
modeme (Casmrina equisetifolia), probablement a l’emplacement d’un
ancien campement. Elle est en debut de naturalisation.
Psilotum nudum
-
Psilotacees
-
TATUAEA
Caracteristique de la flore des atolls, cette fougere terrestre ou epi-
phyte est presente dans la plupart des lies de Polynesie orientale.
Indigene Nouvellement repertoriee en avril 2010, probablement
omise lors des precedentes etudes en raison de sa petite taille et de son
caractere saisonnier. Elle a ete observee sur les motu les plus larges, et
done les plus humides et favorables, comme Tepu, Kurara, Tutapu et Tupa.
-
86
Liste systematique des oiseaux
Petrel de Murphy Pterodroma ultima KOKOKOKO [JFB ;
nom attribue a P.
parvirostris (= P. alba) par Emory in Buck (1938) ]
Son aire de repartition se limite au sud de la Polynesie orientale. Des
effectifs importants habitent le Groupe Pitcairn, alors que ceux des Australes et des lliamotu-Gambier sont beaucoup plus modestes (Thibault &
Bretagnolle, 2007). Classe dans la categorie
«
near threatened »
par
l’Union Internationale de Conservation de la Nature (IUCN, 2010). II s’agit
d’une espece protegee par la reglementation polynesienne.
Reproducteur Note par la WSSE en avril 1922 (Murphy & Pennoyer
1952). L’effectif etait d’environ 200 ind. dans les annees 1990. En avril 2010,
229 couples etaient recenses sur 14 motu du sud et de l’ouest (entre Ogeue
et Panuikakao), la plus grande colonie reunissant 89 couples sur Maemae.
-
Petrel de Kermadec Pterodroma neglecta
Reproducteur sur des lies du Pacifique sud-ouest (Lord Howe et Kermadec), ainsi que dans le Pacifique sud-est (Tliamotu, Australes et Groupe
Pitcairn) (Thibault & Bretagnolle, 2007). Aux Tuamotu, il se reproduit en
nombre restreint et dans quelques localites seulement.
Statut a preciser La preuve de sa reproduction serait a rechercher a Temoe ou 1-2 individus furent observes en vol (et sans doute
poses) sur les motu Panuikakao et Onapenui en avril 2010.
-
Petrel du Herald Pterodroma heraldica
Reproducteur dans plusieurs archipels de Polynesie centrale et orientale, c’est le Groupe Pitcairn qui abrite la grande majorite des effectifs.
Niche en nombre tres limite aux lies Gambier.
Abondace indgen s
CD
4/6
CD
CD
9/9 0/6
CD
CD
9/9 9/0 2/6
CD
CD
CD
des
al.
et
Oeno
Fosberg (1989), (19 5)
John
Temoe
travail
Motu
coraliens Gambier Butaud (2010)
&
St
Philpson (1960), Florence
al.
Ind. Ind. Ind. Ind. Mod.
Ind. Mod.
Ind. Pol.
Ind. Mod.
et
E
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Ind.
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Ind. Pol. Ind. Ind. Ind. Pol. Ind. Ind.
Ind.
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Ind.
Ind.
Ind. Mod. Ind.
Ind. Mod.
Fangtufa
Jolinon (198 )
Ind.
Ind.
Ind. Mod.
Mod.
Ind. Mod. Mod.
Ind. Pol. Mod.
Mod.
al.
modern ) Moru a
et
(20 7)
(Bablet 19 5), Chevalier (1968), Meyer
et
al.
introducin
lies
polynesi ; Especs
/
introducin
Pol.:
Ind.?
Acteon atols)
(4
Mod.:
Mod.
Sources
axons
velutina
var.
oen si
var.
solida
mangrevicum austrlicum hendrso i terandra inophylum sericea cordifola filormis nucifera subcordat solida stenoaphrdes cymosa
aspera
var.
Abutilon Achyranthes Asplenium Bidens Boerhavi Calophylum Can vali Cap aris Cas ytha Cocos Cordia Dav lia Digtari Fimbrstyli
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Indigens
TOTAL
Tableau 3
-
Liste comparee des oiseaux reproducteurs des atolls du sud desTuamotu, induant Oeno
(Groupe Pitcairn). N
=
present/reproducteur, N ?
statut de reproducteur a preciser,
3,59
-
Date du releve le plus recent
2010 (J.-F. Butaud, ce travail)
1922 (WSSE)
Presence du rat polynesien*
N
N
1922 (WSSE)
N (observe en 2002, Elie Poroi)
Vuen 1992,12010
Oiseaux marins
Paille-en-queue a brins rouges
N
N
Fou a pieds rouges
Sula sula
N
N
Sterne blanche
Gyglis alba
N
N
Noddi brun
N
N
Noddi noir
Anous tenuirostris
N
N
Fou masque
Sula dactylatra
N
N
Grande fregate
Fregata minor
N
N
Petrel de Murphy
Pterodroma ultima
N
N
Petrel de Kermadec
Pterodroma neglecta
N ?
N
N
?
Phaethon rubricauda
Anous stolidus
Sterne fuligineuse
Sterna fuscata
Puffin de la Nativite
Puffinus nativitatis
Noddi bleu
Procelsterna cerulea
Fou brun
Sula leucoqaster
N ?
Sterne huppee
V
V
9-11
9-10
N
N
Sterna bergii
N especes reproductrices
Oiseaux terrestres
Aigrette sacree
Egretta sacra
Becasseau des Tuamotu
Prosobonia parvirostris
N
Gallicolombe erythroptere
Gallicolumba erythroptera
N
Marouette fuligineuse
Porzana tabuensis
Ptilope desTuamotu
Ptilinopus coralensis
Rousserolle des Tuamotu
Acrocephalus atyphus
N especes reproductrices
au moins
277
Ca. 1903 (Seurat, 1903)
Presence du chat*
=
3,75
Date du releve le plus ancien
Presence du rat noir*
*
Marutea sud
Maria
Temoe
Superficie emergee (km 2 )
Distance a Temoe (km)
=
1
sur certains motu, V =
visiteur, t eteint. Superficies tirees de Andrefouet ef al. (2005) a I'exception
de celle de Oeno tiree de Florence et al. (1995).
=
Marutea sud
Morane
Oeno
Fangataufa
12,10
2,24
0,62
5,43
287
296
396
485
1922 (WSSE)
1990 (Seitre & Seitre, undated)
1922 (WSSE)
1965 (Lacan & Mouqin, ms)
1965 (Lacan & Mougin, ms),
2006 (M. Gaskin in lift.)
1990-1992
2007 (Serra, 2007)
1995 (partiel, V. Bretaqnolle)
N
(Brooke 1995b)
Non note par Seitre & Seitre en
N
N
1990, puis (Pierce et al., 2003) en
2003
1987
1939 (Beslu, 2008)
N
N
N
N
N
N
N
N
N
N
N
N
N
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N
N
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N
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N
N
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N
N ?
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N
N
N
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V
V
V
6-9
8
9-10
N
N
N
N
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N
N
N
N
N
N
+ entre 1966 et 1987
L±5
3
3
9 ^ul/etui d& la* Society des &tude& &ceamenne&
Visiteur Deux femelles collectees respectivement les 24 et 25 avril
-
1922 et deposees a 1’AMNH sont libellees « Timoe » (Murphy & Pennoyer,
1952), mais il semble que ces oiseaux furent collectes en mer par Rollo
Beck alors que le bateau de la WSSE toumait autour de l’ile.
Paille-en-queue a brim rouges Phaethon rubricauda TAVAKE
(JCT, JFB; Emory in Buck 1938). Bien repandu dans les regions tropicales des oceans Indien et Pacifique. Habite tous les archipels de Polynesie, mais c’est aux Tuamotu et aux Australes que les sites de
reproduction abritent le plus d’individus (Thibault & Bretagnolle, 2007).
Reproducteur Note par tous les observateurs. Au debut du XX siecle, (Seale, ms) et (Seurat, 1903) le trouvaient abondant. Il fut egalement
signale en 1922 par la WSSE qui collecta des specimens. Environ 200 individus dans les annees 1990. En avril 2010, l’effectif etait estime a 291
couples
C
-
repartis sur 11 motu du sud-ouest (entre le motu H ?????? et Parekura), la
colonie la plus importante reunissant 114 couples (Ikoamonui est).
Fou a pieds rouges Sula sula KENA (nom attribue a cette
espece par Emory in Buck 1938, mais la description qu’il en donne correspond au fou bran)
Repandue dans les eaux tropicales et sub-tropicales des oceans Atlantique, Indien et Pacifique. Reproducteur assez commun en Polynesie
orientale, il est cependant mieux reparti aux lies Marquises-Societe-Tuamotu que dans le sud, aux Australes ou il est localement absent (Thibault
& Bretagnolle, 2007).
Reproducteur
-
Il semble que la WSSE ne l’ait ni observe (Quayle,
ms), ni collecte (collection de l’AMNH) lors de son
passage en 1922. L’effectif reproducteur etait estime a environ 500 individus dans les annees
1990. En avril 2010, au moins 450 individus etaient recenses, mais la
periode de reproduction touchait a sa fin et il est vraisemblable que la colonie soit numeriquement plus importante. 11 a ete neanmoins note comme
reproducteur en petit nombre sur 16 a 18 motu. Il est vraisemblable, qu’en
raison de son isolement, Temoe serve egalement de dortoir a des fous
qui exploitent les ressources alimentaires des eaux de la region.
«
92
»
N°324 Janvier / Fevrier / Mars 2012
-
Fou masque Sula
dactylatra
Repandu dans les eaux tropicales et sub-tropicales des oceans Adantique, Indien et Pacifique. En Polynesie orientale, ou c’est la moins abondante des trois especes de fous, elle est surtout
presente auxiles Marquises,
Tuamotu et dans le Groupe Pitcairn (Thibault &
Bretagnolle, 2007).
Reproducteur
Un individu avait ete observe le 24 avril 1922
par
la WSSE, mais sans preuve de
ms). Une
-
reproduction (Quayle,
d’individus notes dans les annees 1990. En avril 2010, l’effectif
42 couples repartis sur 13 motu du sud-ouest de
vingtaine
comprenait
l’atoll, la moitie se
reproduisant sur le motu Koutuna.
Fou brun Sula
leucogaster (voir fou a pieds rouges)
Repandu dans les eaux tropicales et sub-tropicales des oceans Adandque, Indien et Pacifique. En Polynesie orientale, il se reproduit au nord
du tropique du Capricome, ne penetrant pas dans les eaux
sub-tropicales.
Ainsi, il est mieux represente dans le nord de la Polynesie que dans le sud
(Thibault & Bretagnolle, 2007).
Statut a preciser
annees 1990,
puis
un
-
Observe en nombre limite: une dizaine dans les
couple et un juvenile en avril 2010 sur le motu Ogeue.
Grande fregate Fregata minor MOKO’E (Emory in Buck 1938)
Vaste repartition dans les eaux tropicales et
sub-tropicales des oceans
Indien et Pacifique. Presente dans tous les archipels de Polynesie, elle se
reproduit essentiellement dans les ties inhabitees ou seulement occupees
d’une fagon temporaire (Thibault & Bretagnolle, 2007).
Reproducteur Pas de colonie de reproduction notee par la WSSE,
-
mais seulement des individus isoles et en vol (d’une espece d’ailleurs non
identifiee formellement) (Quayle, ms). Environ 200 individus reproducteurs dans les annees 1990. En avril 2010, quelques dizaines d’individus
observes, mais aucune preuve de reproduction.
Fregate ariel Fregata ariel MOKO’E (generalement confondue
avec l’espece precedente)
Vaste repartition dans les eaux tropicales et sub-tropicales des oceans
93
Indien et Paciflque, et localement dans l’Atlantique au large du Bresil. En
Polynesie, elle est presente aux lies Marquises, 'I’uamotu et de la Societe,
mais absente des Australes et du Groupe Pitcairn. Ne nichant pas au sud
de 23 6rae de latitude sud, Morane est la localite la plus meridionale (Thibault & Bretagnolle, 2007).
Visiteur
-
Observee seulement en avril 2010 avec moins de 10 indi-
vidus en vol, mais aucun indice de reproduction trouve.
Aigrette sacree Egretta sacra KOTUKU (Emory in Buck 1938, JCT)
Vaste repartition depuis les cotes de l’Ocean Indien jusqu’a la Polynesie, a la Nouvelle-Zelande et aujapon (Mayr & Amadon, 1941). II existe
deux phases de coloration, l’une ou les oiseaux sont uniformement blancs,
1’autre ou ils sont gris. On voit souvent des oiseaux bigarres blanc et gris
qui sont des immatures de la phase blanche dont le plumage entierement
blanc est acquis seulement apres plusieurs annees.
Reproducteur Signalee au debut du XX siecle par Seurat (1903)
decouvrit
qui
egalement un nid contenant une ponte, puis par la WSSE qui
collecta deux specimens (Mayr & Amadon, 1941) et observa trois individus de phase blanche et un de phase grise en avril 1922 (Quayle,
ms). En avril 2010 l’effectif etait estime a plusieurs dizaines d’individus
des deux phases representees a egalite.
e
-
«
»
«
»
Courlis d’Alaska Numenius tahitiensis KTVI, KIVIKIVI ?
(Emory in Buck 1938)
Nicheur dans une zone restreinte de l’Alaska, il hiveme essentiellement sur les atolls du Pacifique tropical, depuis les lies Hawai’i jusqu’a
Fidji et au Groupe Pitcairn (van Gils & Wiersman, 1996). Avec un effectif
de l’ordre de 10 000 individus, il est classe comme espece « vulnerable
»
(IUCN, 2010). Il s’agit d’une espece protegee par la reglementation polynesienne.
Migrateur Deux individus furent collectes le 24 avril 1922 par la
WSSE (Stickney, 1943) puis quelques dizaines (dont 6 ensemble) observes
en avril 2010. Temoe pourrait etre un site d’etape migratoire ou d’hivernage, ce que d’autres observations devront preciser.
-
94
N°324 Janvier/Fevrier/Mars 2012
-
Chevalier errant Heteroscelus incanus TOREA ?
(Emory in Buck 1938)
Reproducteur a T extreme nord-est de la Siberie et en Alaska, il
hiverne sur la cote Pacifique du sud de l’Amerique du Nord, mais egalement sur les lies d’une grande partie du Pacifique tropical,
depuis Hawai’i,
jusqu’a la Melanesie et au Groupe Pitcairn (van Gils & Wiersma, 1996).
Migrateur Un specimen collecte le 24 avril 1922 par la WSSE (Stickney, 1943), et Quayle (ms) en observa une petite dizaine. Plusieurs
-
dizaines d’individus furent comptees en avril 2010.
Sterne fnligineuse Sterna fuscata KAUEKA (selon Emory in
Buck 1938)
Occupe les zones tropicales des trois oceans. En Polynesie orientale,
elle est nettement mieux representee au nord du 17°S, c’est-a-dire aux lies
de la Ligne et Marquises. Il est cependant vraisemblable que sa presence
aux Tuamotu soit sous-estimee
Statut a preciser
-
(Thibault & Bretagnolle, 2007).
Selon (Seurat, 1934), elle « niche en nombre
considerable », information qui semble avoir ete reprise par Emory (1939)
”the large gray-back tem (tara-ra) are also abundant". C’est probablement egalement 1’origine de la donnee signalee par (Lacan & Mougin, 1974)
dans leur liste des colonies de steme fuligineuse aux Hiamotu. Cependant,
dans son texte sur la faune de Temoe publie en 1903, Seurat ne fait pas allusion a l’espece. Plus tard, en avril 1922, la WSSE ne la cite pas non plus
(Quayle ms) et n’a pas collecte de specimen. Aucune steme fuligineuse ne
fut observee dans les annees 1990, ni en 2010. Nous pensons qu’elle n’y a
e
pas niche durant le XX siecle et que c’est encore le cas actuellement. Ce qui
ne doit pas empecher des visiteurs de passer au-dessus de l’atoll.
Steme huppee Sterna bergii TARARA (JFB; Emory in Buck 1938)
Presente dans les trois oceans. En Polynesie, elle niche dans un petit
nombre d’Tles de la Societe et surtout des Tuamotu (Thibault & Breta-
gnolle, 2007).
Visiteur
-
Deux observations seulement [1 individu le 24 avril 1922
(WSSE) et au moins 3 ex. en avril 2010 dont 1 juvenile sollicitant 1
adulte], mais aucune reproduction constatee.
95
($u/le/ui dc la docielv de& Slude& Qceaniennc
Noddi bleu Procelstema cerulea GAGA, GARORA
(Emory in Buck 1938)
Localise aux eaux tropicales et sub-tropicales du Pacifique. En Polynesie, il est present dans chaque archipel, mais bien represente seulement
aux lies Marquises et a Rapa (Thibault & Bretagnolle, 2007).
Reproducteur Une seule observation d’une cinquantaine de
reproducteurs dans les annees 1990. Sa presence serait a confirmer car
-
il n’a pas ete note par la suite.
Noddi brunAnous stolidus GOIO
(Emory in Buck 1938, JCT)
Present dans les regions oceaniques tropicales et sub-tropicales, il
occupe tous les archipels de Polynesie et il est vraisemblable que chaque
ile abrite au moins une petite population (Thibault & Bretagnolle, 2007).
Reproducteur
-
Trouve en nombre relativement limite, mais peut-
etre parce que les visites ont ete faites surtout durant 1’automne austral.
La WSSE collecta des specimens en avril 1922. L’effectif etait estime a 200
individus dans les annees 1990. En avril 2010, il comprenait seulement
quelques dizaines d’individus, la reproduction etant etablie cependant sur
deux motu du sud-est de l’atoll.
Noddi noirAnous minutus GOIO ?, KIRIRI ? (JFB), KIKIRIRI
OCT)
Occupe les oceans Atlantique et Pacifique. Present dans tous les
archipels de Polynesie, mais absent des des les plus meridionales (Rapa,
Marotiri, lies de Paques) (Thibault & Bretagnolle, 2007).
Reproducteur En avril 1902, Seale (ms) Tobserva en petit nom-
bre. La WSSE collecta des specimens en avril 1922, mais n’apporta pas de
preuve de reproduction. Une cinquantaine d’individus reproducteurs
furent notes dans les annees 1990. Enfin, il etait rare en avril 2010 et sa
reproduction non confirmee.
Sterne blanche Gygis alba KOTAKE (Emory in Buck 1938, JCT)
Habite les regions oceaniques inter-tropicales, elle est assez bien
96
N°324 Janvier / Fevrier / Mars 2012
-
repartie sur l’ensemble de la Polynesie, presente dans tous les archipels
(Thibault & Bretagnolle, 2007).
Reproducteur
-
Seule espece pour laquelle il existe une donnee sub-
fossile : des ossements, appartenant peut-etre au meme individu, trouves
dans une sepulture datee entre le XV et le XVU e siecle (identification A. TenC
nyson, E. Conte comm, pers; Conte & Murail, 2004). La WSSE collecta des
reproducteurs en avril 1922, la trouvant eparpillee sur le motu principal,
mais assez abondante a son extremite (sans doute en se
rapprochant des
petits motu du sud-est). Dans les annees 1990, Teffectif des reproducteurs
etait estime a environ 500 individus. En avril 2010, plusieurs centaines de
reproducteurs etaient repartis sur tout l’atoll (20 motu), abondants seulement sur les petits motu du sud-ouest et de l’ouest.
Discussion
Composition floristiqne
A Tissue des differentes prospections, la flore de Temoe peut etre consi-
deree comme connue exhaustivement. Elle se compose de 29 taxons dont
15 indigenes, 2 introductions polynesiennes et 12 introductions modemes.
Parmi ces demieres, trois n’ont pas ete retrouvees en 2010 (.Barringtonia
asiatica, Hibiscus tiliaceus subsp. tiliaceus ‘Sterilis’ et Cyanthilium cinereum) tandis que deux autres semblent vouees a Textinction a court ou
moyen terme (PhyUanthus amams et Terminalia catappa). Ce faible nombre d’introductions est du a Tabsence d’occupation permanente puisque
Tatoll n’est plus frequente qu’occasionnellement depuis plus de 50 ans.
Neanmoins, les rares installations temporaires se sont accompagnees d’introductions vegetales: c’est le cas de 4 taxons tous lies a des traces d’occu-
pations recentes: Casmrina equisetifolia subsp. equisetifolia Davallia
solida var. solida, Nephrolepis hirsutida et Portulaca oleracea.
La flore indigene de Temoe apparait ainsi tres pauvre. En effet, a la
,
lumiere des connaissances actuelles sur la flore des atolls des Tuamotu-
Gambier-Pitcaim, il s’agit de Tatoll comportant le plus faible nombre d’especes indigenes (a Texception du petit atoll de Ducie dans le groupe
Pitcairn qui ne comporte que 2 a 4 indigenes). Le Tableau 2 presente ainsi
97
fUti/letui de la Society dev &tude& 6cea/ue/uie&
comparatif de la flore de Temoe et d’autres atolls proches dont la flore
est bien connue. Plus a l’ouest, les atolls de Moruroa et Faugataufa comprennent ainsi respectivement 18 et 17 especes indigenes. La flore des 4
atolls des Acteon (Tenararo, Vahanga, Tenarunga, Maturei Vavao) est
constitute, quant a elle, d’un ensemble de 21 especes indigenes tandis que
un
celle des motu coralliens des Gambier en compte 25. Sans considerer les
motu des Gambier qui beneficient d’un apport de plantes particulier du fait
de la proximite d’iles hautes, la pauvrete de la flore de Temoe est le resultat de 1’absence de plusieurs especes
indigenes pourtant caracteristiques
de la flore d’atoll plus occidentaux : Cordia subcordata, Digitaria
stenotaphrodes, Guettarda speciosa, Heliotropium anomalum var. anomalum, Ipomoea violacea, Laportea mderalis, Nesogenes euphrasioides
ou encore Pisonia grandis. Cette absence ou disparition s’inscrit dans la
tendance a l’appauvrissement de la flore indigene des atolls observe d’Ouest
en Est dans l’archipel des Tuamotu. Plus a l’Est, l’atoll de Oeno possede le
meme nombre d’especes indigenes meme si ce ne sont pas toutes les
memes. II faut remarquer la presence du grand arbre Pisonia grandis sur
Oeno, alors qu’il est absent de Temoe et des Gambier. Faut-il y voir Pinfluence de l’homme, cet arbre ne supportant pas l’incendie ? Nous ne disposons pas encore de suffisamment d’elements pour I’affirmer.
Description de la vegetation
La vegetation de Temoe apparait ainsi marquee par sa composition
floristique tres simplifiee. En effet, les formations indigenes arborescentes
se limitent a des forets denses de Pandanus tectorius var.
de rares
tectorius, avec
pieds de Heliotropium foertherianum dans l’etage dominant et
pratiquement inexistant du fait de l’epaisse couverture de
feuilles seches. L’absence de Pisonia grandis et de Guettarda speciosa a
un sous-bois
l’etat indigene limite ainsi considerablement la diversite des formations
vegetales. Des formations arbustives a Heliotropium foertherianum cernent les forets de Pandanus tandis que des fourres quasi-purs de Pemphis
acidula et de Suriana maritima se developpent sur des motu aux substrats particuliers (substrat massif faiblement exonde pour Pemphis ; substrat sableux littoral pour Suriana).
98
bulletin de fa Joa'etv des Slades Ocea/iA
Les peuplements vegetaux semblent ainsi tendre vers la monospeci-
flcite avec des formations marquees par l’abondance d’une seule espece
vegetale, ce qui est assez rare sous les tropiques ou le melange constitue
davantage la norme. L’introduction du cocotier et surtout celles de Giiettarda speciosa et de Casuarina equisetifolia subsp. equisetifolia ont eu
et vont avoir un impact certain sur la diversification du paysage vegetal de
l’atoll. En effet, les cocoteraies, aujourd’hui largement abandonees, couvrent probablement plus d’un tiers de l’atoll tandis que Guettarda speciosa semble promis a un developpement rapide dans toutes les
formations vegetales preexistantes.
Composition de I’avifaune
e
Les observations realisees depuis le debut du XX siecle permettent
d’avoir une vision assez precise du peuplement. Une seule espece d’oiseau
terrestre, la marouette fuligineuse, a pu echapper aux observateurs du fait
de sa discretion. On ne releve pas de difference importante entre les releves dans la
composition de l’avifaune marine, sauf peut-etre pour le fou
masque dont l’accroissement des effectifs parait etre general en Polynesie
depuis le debut du XX siecle (Thibault & Bretagnolle, 2007). Nous ne
chercherons pas a comparer l’avifaune de Temoe a celle de l’archipel des
Gambier dont les lies hautes etaient peuplees dans le passe par un assembiage beaucoup plus riche d’especes, en raison d’une plus grande divere
site des habitats. En revanche, nous comparons l’avifaune de Temoe a celle
des trois atolls les plus proches (voir pp. 88-89), auxquels nous avons
ajoute deux autres, geographiquement un peu plus eloignes : Oeno dans
le Groupe Pitcairn et Fangataufa (voir p. 68). Seul Maria n’a pas fait l’objet
de releve recent. Tous, a 1’exception de Morane, abritent des populations
de rats polynesiens, au moins sur une partie de leurs terres emergees. Les
etudes archeologiques menees a Temoe n’ont pas apporte beaucoup de
renseignements sur les oiseaux, mais il est vrai que les ossements se
conservent mal sur les lies basses, contrairement aux lies volcaniques ou
aux atolls souleves de la region qui ont revele la presence de nombreux
restes [Henderson : Wragg & Weisler (1994), Wragg (1995) : Gambier :
Worthy & Tennyson (2004), Steadman (2006)].
100
{$tdletin de la Societc des- Sl/ides Ocea/uenne
Oiseaux marins
-
On distingue cinq especes d’oiseaux marins qui
reproduisent dans toutes les lies (voir pp. 88/89); ce sont des especes
largement repandues dans toute la Polynesie. Puis, deux petrels dont la
repartition est plus contractee, peut-etre a cause d’activites humaines dans
le passe sur certains atolls. Deux stemes (noddi bleu et steme fuligineuse)
ont des sites de reproduction plutot localises aux Tuamotu, et il n’est pas
etonnant qu’elles soient inegalement representees. Il n’est pas certain que
le fou brim se reproduise sur ces lies, situees a la limite sud de son aire
de reproduction. Enfin, la reproduction de la sterne huppee, si elle est
possible, n’a jamais ete etablie sur ces atolls.
Oiseaux terrestres Une seule espece, l’aigrette sacree, habite les
six lies, mais il est vraisemblable que l’ensemble des especes signalees
se
-
dans le Tableau 3 les occupaient toutes, leur extinction pouvant etre attribuee a des activates anthropiques plus ou moins recentes (introduction de
chats, defrichements par le feu, developpement de la cocoteraie, tirs
thermo-nucleaires dans T atmosphere au-dessus de Fangataufa, etc.). Les
differences entre les especes dans leur presence ou leur absence entre les
six lies refletent leur degre de sensibilite aux facteurs d’extinction, et peutetre leur capacite a recoloniser plus ou moins rapidement des localites
d’ou elles ont disparu. On salt que, pour les rousserolles, ce phenomene
est tres lent, necessitant des decennies ou bien
sous
davantage (Cibois et al
.,
presse). Mais, il est possible que le becasseau polynesien montre de
meilleures aptitudes, compte tenu du nombre non negligeable d’observations sur les lies ou il ne se reproduit plus (Pierce & Blanvillain, 2004).
Brooke, (1995b) se demandait si les marouettes fuhgineuses observees
dans les annees I960 et 1990 a Oeno etaient des immigrants reguliers ou
si elles constituaient une population reproductrice stable. Alors que dans
le nord des Tuamotu la plupart des atolls ont une grande superficie et
qu’ils sont proches les uns des autres, dans le sud ils sont disperses et de
faible superficie. Une telle situation accroit les risques d’extinction et
reduit les chances de (re) colonisation des oiseaux terrestres.
L’interet omithologique de Temoe consiste done dans son assemblage
d’oiseaux marins assez diversifie avec au moins neuf especes reproduc-
trices, representees par des effectifs importants pour le petrel de Murphy,
102
N°324 Janvier / Fevrier / Mars 2012
-
espece protegee, et le paille-en-queue a brins rouges. Pour le
c’est l’une des plus
premier,
grandes colonies en Polynesie frangaise, meme si elle
reste modeste
comparee au Groupe Pitcairn (plus de 250 000 couples
selon Brooke, 1995a). Pour le second, Temoe
represente l’un des sites
majeurs des Tuamotu et du groupe Pitcairn.
Les facteurs limitant
I’avifaune
Le chat a ete observe a Temoe en
1992, mais plus par la suite (1997,
2010) et il est vraisemblable qu’il a disparu. Comme le passage a pied
sec est continu sur les cotes nord et
est, entre Tepu et Mootagi (voire
Panuikakao par le platier, (voir p. 72), on peut
sa
a pu y etre continue. Toute cette
imaginer que repartition
de
Pile
est occupee actuellement
partie
par seulement trois especes d’oiseaux marins nichant dans les arbres
(noddi brun, sterne blanche, et fou a pieds rouges sur un seul motu).
Inversement, au moins quatre especes (petrel de Murphy, paille-en-queue
a brins
rouges, fou a pieds rouges, fou masque) se reproduisant pour la
plupart au sol, nichent de Panuikakao a Pakake (voir Figure 2). Si le chat
a effectivement
disparu, on devrait s’attendre a voir la premiere serie de
motu etre recolonisee par les oiseaux nichant au sol. C’est ce
qui se passe
a Panuikakao
qui est relie a Mootagi a pied sec par le platier, avec la presence de
quelques couples de petrel de Murphy.
Il n’y a pas de rat noir (Rattus rattus) a
Temoe, mais le rat polynesien (Rattus exulans) est present sur tous les motu,
particulierement
nombreux sur Tutapu (ou ils ont ete pieges en 2010 afin de determiner
Tespece), sans doute en raison de la presence d’une cocoteraie tres dense
au nord du motu,
Aujourd’hui les activites humaines, pratiquees par des
se
Mangareviens, limitent a la peche sur la pente externe de l’atoll,
quelques tentatives de reprise de la coprahculture et au ramassage occasionnel de poussins de petrel de Murphy et de
paille-en-queue comme
nourriture.
103
bulletin dc' la Society de& &tude& 0icea/ucfmcs
Conclusion
Mesures de conservation
V atoll de Temoe constitue done le temoin d’un atoll encore peu
secondarise et a la flore et a la vegetation indigene tres peu diversifiees. II
presente ainsi des formations vegetales rares ou absentes de la plus grande
partie des atolls des Tuamotu, telles que des forets pures de Pandanus,
sans Pisonia ou Guettarda. Ainsi, sans qu’aucune espece vegetale patrimoniale ne soit a signaler, les formations vegetales de Temoe, en d’autres
mots, les assemblages de plantes, sont remarquables. S’il parait peu raisonnable de vouloir eliminer ou limiter le developpement de Guettarda
speciosa, il semble tout a fait pertinent et opportun d’eradiquer les
quelques pieds de Casuarina equisetifolia var. equisetifolia presents
avant qu’ils ne se developpent trop vigoureusement au sein des formations
vegetales naturellement ouvertes et claires de l’atoll. En effet, 1’invasion
par le Casuarina a ete reportee comme tres preoccupante sur certains
atolls des Tuamotu (Meyer, 2007). Dans le meme ordre d’idee, la vigilance
recommandee, lors d’eventuelles installations futures sur Tile, de ne
pas introduce de nouvelles plantes adventices ou potentiellement envahissantes. Des eradications precoces pourront etre mises en place.
Pour la preservation de l’avifaune, 1’introduction de chats ou de
chiens est evidemment a proscrire. L’eradication des rats polynesiens
meriterait d’etre evaluee, car il serait envisageable d’y transplanter des
becasseaux polynesiens, dans la perspective d’une multiplication de sites
relativement accessibles et gerables pour en controler plus facilement
sera
1’evolution des effectifs.
104
N°324 Janvier / Fevrier / Mars 2012
-
Remerciements
-
II nous est agreable de remercier la Mission archeologique
et anthropologique de 2010 dirigee par Eric Conte et Pascal Murail et a laquelle
le premier auteur a pu se joindre, ses participants dont Guillaume Molle, doctorant en archeologie ainsi que Kito Mamatui, Philippe Segala, Eric Paeamara et
Simeon. Nous sommes egalement reconnaissants envers Monique Richeton, mairesse des
Gambier, Tepano et Helene Paeamara et Bernard Fert pour I'aide logis-
tique, notamment pour les deplacements. Enfin, merci a Elie Poroi pour les
informations qu'il nous a communiquees sur I'Tle Maria, Didier Lequeux du service de I'Urbanisme (SAU) pour I'utilisation de la photographie satellitaire et
Clyde Imada du Bishop Museum de Hawaii pour I'acces aux documents de la
Mangarevan Expedition.
Jean-Fran^ois Butaud:
consultant en foresterie et botanique polynesienne, Tahiti
Edward K. Saul :Takitumu Conservation Area Project, Rarotonga
Graham M. Wragg : Department of Zoology, Oxford University, Royaume-Uni
Jean-Claude Thibault: Departement Systematique et Evolution,
Museum National d'Histoire Naturelle, Paris
105
{$ul/etuv de la Society dev Slade,i Ocean
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108
1
Petite histoire du logo de la Societe des Etudes Oceaniennes
Au hasard de rencontres avec des membres de la SEO ou des lecteurs du
Bulletin, on
parfois interroge sur le pourquoi du logo de la Societe des Etudes Oceaniennes et sur
la signification de l’appellation en
langue tahitienne figurant dans le courrier a en-tete de
est
la SEO: Te niu ‘ihi ma’ohi.
De 1’alliance du ti’i originel avec la plume
intemporelle
Ce logo est l’ceuvre de l’artiste Andreas Detdoff. 11 a ete cree a
Pinitiative de Robert Koenig alors president de la SEO, pour Panniversaire le ler janvier 1997 des quatre vingts ans de la Societe
des Etudes Oceaniennes. II a figure pendant quelques annees
comme en-tete de la SEO dans ses
correspondances et apparais-
sait en bonne place dans le Bulletin de la SEO. Puis on ne sait
par quel mystere Pusage est revenu a cet autre logo, qui pendant
des decennies a represente la Societe.
Ce logo premier est apparu sous la presidence de Paul Moortgat
en
juin 1976 a la premiere de couverture du Bulletin n°195- Si
l’on examine Pun a cote de l’autre les deux logos un lien de
parente s’impose. Dans celui de Dettloff on note que l’artiste a
associe avec adresse et humour une main tatouee et diligente au
ti’i devenu porte-plume en mouvement, le detoumant ainsi de
son
emploi originel.
Ce ti’i est la transposition stylisee d’un motif fascinant composant un chasse-mouches tres ouvrage, en usage a Tahiti a
Pepoque du Contact'. 11 s’inscrlt done tout naturellement dans
Part polynesien 2
.
1
Une photo de lo poignee figure dons Pouvmge«Oceanie et Austrolie, Part de la Mer du Sud»par A. Biihler,
T. Barrow et Ch. P. Mountford, editions Albin Michel, Paris 1962 (p.146).
2
On releve avec interet qu'un eleve du Centre des Metiers d'Art que conduit avec beaucoup d'allant
Viri Taimana, a realise en 2006 une copie interessante de ce manche de chasse-mouches aux li'i. II s'agit de
Louis Bonno alors en 2™ e annee.
109
bulletin da la Socicla da& &lude& Gceaniaruies
Telle une representation de Janus les deux figurines a caractere anthro-
pien, sont opposees dos a dos en position semi-accroupie ; les bras
sont inflechis sur le ventre et le nombril est saillant; la tete triangulaire,
aux traits
simplifies a l’extreme presente deux curieuses protuberances
sur le haut du front. Cette oeuvre
enigmatique, tres apuree laisse a pen-
allegorie plutot qu’a un embleme figuratif. Pouriant ne cherchons pas aujourd’hui dans cette image de ti’i une supposee fonction
de gardien du temple ou 1’evocation d’un pouvoir de chef. Arretonsnous plus simplement a cette pose hieratique du ti’i ; le personnage
dans sa placidite parart traverser le temps plutot qu’en etre le jouet;
c’est sans doute la une forme de sagesse qu’il propose a chacun.
ser a une
De nos jours les bois parlants sont morts. La communication des
hommes est desormais soumise au bon vouloir de media souverains; ils sont habiles a
manier les images ondoyantes et a diffuser un discours haut en couleur que va retenir
l’esprit. Regardons autour de nous, les fils de pub comme la mouvance pohtique ont elu
pour se faire connaitre, pour se faire reconnaitre, des vocables qui claquent et qui sonnent fort; il est souvent question du Peuple toujours souverain dans l’absolu sauf dans la
pensee de celui qui le dirige ; un peuple toujours indigene, je veux dire ma’ohi. Meme
une Eglise s’est convertie recemment au jeu des mots qui parlent, pour dire peu.
Te niu ‘ihi ma’ohi
Le lecteur aura note aussi dans la symbolique qui nous occupe, l’association du logotype
avec cette
signaletique de quatre mots en langue tahitienne Te niu ‘ihi ma’ohi. J’avoue
avoir cherche mais en vain qui en etait son auteur au sein de la SEO.
En reo tahiti, le vocable te niu est le nom generique du cocotier, materiau dont on se
servait autrefois comme base de construction du fare, d’oii son sens extensif de /fondation de premier rang d’un ouvrage/.
’
L’acception du terme ihi forme erodee du prototype kihi pourrait etre /sage, arise, adroit/.
Enfin nul n’ignore que la Societe des Etudes Oceaniennes est une rieille institution indigene, c’est-a-dire stricto sensu ma’ohi /qui est du pays meme, qui en est originaire/.
Alors pourquoi avoir mis en exergue Te niu ‘ihi ma’ohi ?
Peut-etre etait-ce pour attenuer l’austere appellation des termes Societe et Etudes, surement pour faire savoir plus largement la place occupee par la SEO dans le paysage cul-
turel du Pays, sans doute aussi campee la comme une antienne stimulante pour ceux qui
ceuvrent, a ne pas devenir le jouet du temps.
Constant Guehennec
110
Publications de la Societe des Etudes Oceaniennes
Prix reserve aux membres, en vente au siege de la societe/Archives Territoriales de Tipaerui
•
Dictionnaire de la langue tahitienne
•
Tepano Jaussen (1 l edition)
Dictionnaire de la langue marquisienne
Mgr Dordillon (3™ edition)
•
imc
2 000 FCP
17 €
e
2 000 FCP
20 €
2 000 FCP
20 €
2 000 FCP
20 €
1 000 FCP
10 €
A Dictionary of some Tuamotuan dialects
J.Frank Stimson et Donald S. Marshall
•
•
Mangareva Dictionary
Edward Tregear
Etat de la societe tahitienne a l’arrivee des Europeens
Edmond de Bovis
•
•
Journal de James Morrison, second maitre a bord de la Bounty
2 000 FCP
Traduction Bertrand Jaunez
Chefs et notables au temps du Protectorat (1842-1880)
1 200 FCP
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Mai’arii Cadousteau
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Raoul Teissier
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Genealogies commentees des arii des iles de la Societe
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Les Etablissements frangais d’Oceanie en 1885
(numero special 1885-1985)
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Tranche de vie a Moruroa
Christian Beslu
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Naufrage a Okaro, epopee de la corvette Alcmene (1848-1851)
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Les ages de la vie
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Tahiti & Hawai’i aux temps anciens
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Tahiti au temps de la reine Pomare
Patrick O’Reilly
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Tahiti 40,
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Collection des numeros disponibles
des Bulletins de la S.E.O.:
Anciens numeros du BSEO, nous consulter
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Omai, ambassadeur du Pacifique
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Le Bulletin de la Societe des Etudes Oceaniennes
Le Bulletin de la Societe des Etudes oceaniennes (B.S.E.O.)
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Le Bureau de la Societe accepte les articles qui paraissent
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membres residents en France metropolitaine et Dom-Tom : 42 € plus frais de port.
Reglement: mandat ou virement postal. Autres pays: 70 $ US par transfert bancaire
N° ISSN: 0373-8957
Imprime a Tahiti par Timprimerie STP Multipress
Mise en page: Backstage
SOMMAIRE DU BULLETIN N°324,
DE LA SOCIETE DES ETUDES OCEANIENNES :
Jean Guiart analyse les moyens qui ont permis
aux Oceaniens d’explorer puis de coloniser les
Ties du Pacifiques (invention des pirogues aux
coques multiples, du propulseur, du percoir a
archet, des poteries, des Ties artificielles et des
•
jardins suspendus) et en propose une nouvelle
chronologie.
•
Reunissant les informations historiques et
actuelles, une equipe de botanistes et d'ornithologues, menee par Jean-Fran^ois Buteaud et
Jean-Claude Thibault, fait l’inventaire des plantes
et des oiseaux de Temoe dans
Gambier.
N° ISSN: 0373-8957
l’archipel des
Fait partie de Bulletin de la Société des Études Océaniennes numéro 324