B987352101_PFP3_2011_323.pdf
- Texte
-
SOCIETE
OCEANIENNES
DE LA
Societe
Fondee
LE
1 er
do Service des Archives de
B.P. 110,
•
e-mail:
98713
CCP
de
JANVIER
•
web
Polynesie, compte
Papeete, compte
Composition
du
M. Fasan Chong
1917
Polynesie frangaise, Tipaerui
Papeete, Polynesie frangaise
seo@archives.gov.pf
Banque
Oceaniennes
Etudes
des
:
•
Tel. 41 96 03 -Fax 41 96 04
etudes-oceaniennes.com
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web
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n°12149 06744 19472002015 63
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Conseil d'Administration 2011
dit
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Membres Correspondants
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•
M. Darrell! Tryon
Membre d'Honneur
M. Raymond Vanaga Pietri
Bulletin
DE LA SOCIETE
des Etudes oceaniennes
(POLYNESIE ORIENTALE)
N°323
Septembre / Decembre 2011
-
Sommaire
Me’eti'a, Pile mysterieuse Frederic Torrente
-
Me’eti’a, Pile mysterieuse
I
Les donnees du milieu naturel
II
Le passe dans le paysage et les donnees de
III
Me’eti’a, espace du mythe et espaces dans le
Les differents noms de File
l’archeologie
mytlie
13
p. 35
L’ancienne societe de Me’eti’a decrite par les
Espagnols en
1779, observations de James Cook
1772
p.
45
p.
49
p. 61
Les relations interinsulaires
p. 63
1792, le
p. 67
Me’eti’a
La
au
retour
de
Bligh
XLXe siecle
la fin des temps paiens
et le Protectorat
paix aux Tiiamotu
L’affaire
Osnaburgh
et
1845, mission mormone sur File de ’’Metia”
1854, visite du gouverneur Page a Me’eti’a
VI Comment
Un
une
ile devient-elle
privee
no
projet de leproserie
p. 75
p. 78
p. 83
p. 93
Meketika
Portrait d’un collectionneur
p. 70
p. 72
p. 87
p. 88
?
Conclusion
Parau
8
p. 32
IV Premiers contacts europeens
V
p.
p.
iegende de Tuhiva et les liens avec Tautira
et
p.
p. 30
Les chants
1773
3
4
p. 13
Les donnees de la tradition orale
La
p.
p.
-
96
p. 104
Christian Beslu
Compte rendu d’ouvrage
Mythologie du Pacifique,
hi es
dichotomie
-
Julie Gueguen
p. 107
Croquis
lors de
de I'Tle denommee Ysla de San Cristobal (Maytu)
I'expedition espagnole de
Dn
Domingo
de Boenechea
© Real Academia de la Historia, Madrid / Archivo nacional de
en
Espana.
1772.
Me‘eti‘a,
l’ile
mysterieuse
plus meconnues de l’actuelle
d’hommes, en raison de son
aujourd’hui
Polynesie frangaise.
acces difficile et du fait que ses proprietaries n’occupent plus les lieux.
Cette lie est tombee dans l’oubli, n’ayant plus d’interet que pour les geologues et volcanologues qui surveillent l’activite de son point chaud. Mais
ce cone volcanique abmpt n’a pas ete toujours desert, puisqu’une population importante s’accrocha a ses pentes et s’y developpa, eut quelque
importance, puis petit a petit periclita.
Le mystere qui planait sur son passe a justifie la presente recherche
qui, combinant les sources archeologiques, ethnographiques et historiques est destinee a porter un eclairage sur le role que jouaient certaines
1
petites lies peripheriques dans la Polynesie ancestrale
De nombreuses petites lies du Pacifique sont devenues ’’mysterieuses” parce que desertees, la memoire de leurs occupants peu a peu
erodee ou disparue a tout jamais.
Les lignes qui vont suivre se proposent de donner quelques ’’coups
de projecteurs” sur le passe de Me‘eti‘a.
L’lle de Me‘eti‘a (Mehetia)
Elle est
est
Tune des
vide
.
1
Cette monographic insuloire est extroite d'un memoire de D.E.A. intitule La societe insulaire de Me'eti'a (Mehe-
I'histoire des ties de la Societe, soutenu a I'Universite de lo Polynesie fron16B195 dons la bibliotheque de la S.E.O. Frederic Torrente est Docteur
coise en 2003 et entre sous la
francaise.
en ethnologie, anthropologie culturelle, laboratoire EAST, Universite de la Polynesie
tia). Contribution a I'etbnologie
et a
cote L4
bulletin
Le paysage de File
montagne Hi‘ura‘i, abrupte,
La
est recouverte
d’une vegetation dense
partie basse, qui se rarefie a mesure que Ton s’eleve. Le sommet
du pic comprend trois petits ressauts dont le plus eleve est Fare‘ura. Le
dans
sa
de
sommet
volcan culmine
ce
a
435
m.
Un cratere situe en contrebas du sommet occupe la partie nord de
File. Parfaitement conserve, il fait 1500 m de circonference et a une profondeur de 180 m, ou se situe la cheminee. Il n’y a pas de lac, le fond etant
couvert de vegetation. Les pentes vers le nord sont instables et de nom-
breux eboulements ont taille des canyons.
Vu l’etroitesse et le caractere abrapt du
cone
volcanique, le plateau offre
espace de vie providentiel, eleve d’une centaine de metres environ. Cette
elevation offrait une protection certaine en cas de raz-de-maree ou de fortes
un
vagues, par rapport aux atolls voisins. C’est un milieu mixte, a l’abri des
influences marines, recouvert par une belle foret-galerie avec des arbres gigan-
tesques. Ce terroir plat et fertile est relativement propice aux cultures vivrieres.
remarque pas de constructions coralliennes subaeriennes,
mais des hauts fonds laissent supposer l’amorce d’un platier et d’un recif
On
ne
frangeant. Le littoral est fortement indente par des baies au sud, dans lesquelles la mer s’engoufifre avec violence, dominees par des falaises vives.
Les plages de beach rock sont battues par la houle du large, et une grotte
a
dans la falaise par la mer: c’est ici que l’erosion marine est
forte. Les littoraux ouest et est sont moins decoupes, traduisant
ete creusee
la
plus
ainsi la moindre erosion marine. Il existe des
partie abrupte
Le
du
mouillage
nord,
plages
de sable noir
sur
la
resultant d’incessants eboulements.
des navires est
tion des vents et de l’etat de la
problematique, en fonction de la direcLes possibility de debarquement sont
mer.
facteur d'isolement dans le passe. Une passe au
sud-ouest de File (nommee Fatiapo) traversant le recif frangeant se trouve
difflciles,
au
ce
en
fit
un
pied d’une haute falaise.
ment
Une autre passe,
Manauea, plus praticable
se
protection selon le vent. Le debarqueest repute dangereux, et Ton peut, pour en juger, se reporter a cer-
trouve a
l’est,
tains recits
6
qui
mais n’offre
aucune
figurant dans ce travail.
Vue aerienne du sommet et du cratere de Me'eti'a
(photo
C.E.A. / Laboratoire de
Acces
sur
ie
plateau,
Geophysique
cote Est de
(photo de I'auteur)
de
Pamatai)
Me'eti'a
^bulletin
Societe* dex Studex OiceaMe/i/ic&
de /a
l
particulierement abrupte et accidentee, possesismique, elle n’a cependant pas empeche une societe de
s’y installer. Remarquons que ce ne sont pas toujours les lies les plus attirantes qui determined 1’implantation humaine.
Si Me'eti'a est
dant
une
une
lie
activite
II. Le passe dans le paysage
et les donnees de
Les releves de
Parcheologie
Emory en 1930
partir des 1920, le Bishop Museum de Honolulu programma une
exploration des lies de la Societe et de l’archipel des Tbamotu, dans le but
A
systematique des sites de surface, double par une
vaste enquete ethnographique. Un petit cotre, leMahina-i-te-pi/a, fut afirete
a cet effet. Certaines lies eloignees ou difficiles d’acces, comme Me‘eti‘a,
furent cependant visitees, a 1’exception de Maiao et Tetiaroa. Cette expedition
pionniere fut une reussite et permit de localiser 240 sites. Me'eti'a fut visitee
par l’equipe d’Emory du 13 au 16 decembre 1930. Kenneth Emory etait
accompagne de l’archeologue neo-zelandais H. D. Skinner, du botaniste
M. L. Grant, et de Marcel Krainer qui, a cette epoque, etait proprietaire d’une
grande partie de l’ile. Les deux families qui vivaient alors sur l’ile les guiderent. Six marae furent decouverts en parfait etat de conservation, ce qui
etonna Emory. Les vestiges de quatre autres marae etaient enfouis dans la
vegetation. Les scientifiques trouverent egalement de nombreux sites de maisons, parfois marques de simples terrasses, et des enclos de pierres grossierement assemblees. Des parcelles cultivees etaient encloses par des
murets. D’anciens defrichements, recouverts d’une couche de terre, etaient
de dresser
encore
un
inventaire
gardes en culture.
Ils firent l’ascension du volcan et descendirent
fond du cratere ; ils n’y trouverent
la cheminee presentait des pentes inclinees
aucune structure
ou
lithique.
les cendres etaient couvertes
vegetation de fougeres et de petits bosquets de purau.
quelques pieds defe'i croissaient alors tout au fond *.
par
une
1
4
Emory, 1933, pp. 114-115, traduit par Verin, 1964, pp. 67-68.
8
au
L’interieur de
Des
‘ape et
6
N°323 Septembre / Decembre 2011
-
Sur la terre
Ponao, ils virent les fondations d’un temple
mormon
pres
d’un petit cimetiere.
Au
total, ils
pilons (penu)
trouverent sur
1’ile 10
n’avaient pas la forme
n’avaient pas de barre de tete.
Dims son rapport au directeur du
pilons et 28 herminettes.
commune
de
Tahiti,
Certains
et certains
Bishop Museum, Emory notait qu’il
trouva a Me’eti’a un marae
de Nihoa
(archipel
finement travaillee
de
du type de ceux qu’on rencontrait dans File
Hawaii). Ils y trouverent aussi la « pierre la plus
qu’ils n’avaient vue jusqu’alors en Polynesie 5 Emory
publia en 1933 dans Stone Remains in the Society islands, le compte
rendu de ses fouilles, enrichi de genealogies, chants et legendes recueillis
»
.
dims les lies voisines.
Deuxieme visite du
Bishop Museum en 1934
1934, l’equipe du Bishop Museum passu une journee supplementaire sur Pile afin de reexaminer quelques mines sur lesquelles
Emory se posait des questions. Ils mouillerent pres du rivage flanque de
sinistres laves noires. Le troisieme groupe de debarquement chavira, et
Gessler, le joumaliste du Bishop Museum, fut projete sur des rochers ghsLe 12 mai
Le
tranchants. Il
atteignit difficilement le rivage, trempe et meurtri.
botaniste (St John), le malacologiste (Montague), et l’entomologiste
sants et
disparurent immediatement dans la brousse pour collecter.
L'ile en 1934 etait deserte et Patmosphere qui y regnait etait particuhere: ils trouverent un village abandonne, enveloppe d’une douce lumiere,
au milieu de bananiers de
grande taille. Emory notait dans son journal:
«jeudi 13 mui 1934: lie de Me’eti’a. Sous-le-vent de Pile au lever du jour.
Debarquai en premier, a Fatiapo. Clifford Gessler, dans le troisieme voyage
du canot, chavira. Trouve
Papres-midi.
Dans
un nouveau marae.
Mer tres calme
Quittons Pile
a
2 h de
<
jusqu’a Anaa. ’»
Bishop Museum, il precisait: Je reexaminai
plusieurs mines pour lesquelles des questions restaient en suspens et, avec
5
6
son
rapport
au
«
Emory, 1931, p. 8.
Emory, Journal de bord de la Mangarevan Expedition, manuscrit, Bishop Museum.
9
(bulletin
de la
l’aide de Gessler
Socicte
et
des
Glades Ocea/t
d’un membre de
l’equipage,
nous creusames
la
cour
de Tune d’entre elles, prouvant de cette facon que les pierres dressees ne
marquaient pas l’emplacement de tombes humaines. Un marae jusqu’ici
non
repertorie fut aussi decouvert.
Le
»
malacologiste de l’equipe fit le recit suivant
7
:
«
En raison d’un fort
d’ouest, nous pumes accoster seulement du cote nord-est de Me, au pied
d’une falaise de 150 a 200 pieds de haut, ou un gros rocher a environ
30 pieds du rivage offrait une certaine protection contre les vagues. Sept
hommes debarquerent sur Me. Les deux premieres foumees eurent la chance
d’accoster facilement, mais la demiere fut delicate. En escaladant les falaises,
les coquillages n’etaient pas tres abondants, mais au sommet, dans un fouillis
de noix de cocos et de fruits de l’arbre a pain et d’arbres locaux, 5 ou
6 especes de petits coquillages se trouvaient par milliers. A midi, nous avions
vent
deja reuni une consequente collection.
Pour
embarquer les 3 groupes, deux
petite ile de 3 miles de circonference environ, elevee de 1400 pieds. Elle est abrupte sur son cote nord et
s’incline graduellement vers le sud, depuis la base du pic. Llle est apparemment constitute de cendres volcaniques et de laves qui semblent geologiquement plutot recentes, si Ton en juge par la faible erosion des roches que nous
avons collectees dans cette partie. La jeunesse de Me est plus encore demonheures furent necessaries. Me‘eti‘a est
une
furent trouvees par
par les coquillages. Seulement des especes repandues
nous ou par Emory, qui en avait fait la collecte en 1930.»
tree
John indiquait: La moitie environ de la
superficie de Me‘eti‘a etait ravagee par les chevres, et un tiers recouvert
d’une belle foret et d’une vegetation originelle », et l’entomologiste E. Zimmerman, plus laconique, termina: A Meetia, les collectes furent pauvres
Le botaniste Harold St
«
«
et
les especes sont de toute evidence
Travaux de Pierre Verin,
non
endemiques.
en mars
»
1961
Verin, archeologue faisant partie de la mission Bishop
Museum/ORSTOM, passa trois semaines dans Pile, accompagne d’Henri
Picard et d’une equipe de travailleurs de coprah envoyee quelque temps
Pierre
7
Emory, 1935,
10
p. 38.
N°323
Septembre / Decembre
-
2011
auparavant par Tutaha Salmon, pour aider aux fouilles. Depuis la visite
d’Emory, l’archeologie avait fait de notables progres, en particulier dans
la methode de datation
au
Carbone radioactif. La methode
stratigraphique
prenait alors le relais des releves de surface des pionniers.
Le releve d’Emory fut verifie, la position de certains sites sur la carte
etait parfois imprecise. De nouveaux sites furent decouverts, notamment
d’habitat, autant sur le plateau qu’en montagne 8 Des terrasses d’habita.
tion
se
situaient
sur
des pentes
abruptes,
sans
edifice
religieux associe,
laissant suggerer une occupation temporaire. D’apres P. Verin, ces villages
de montagne, a moins d’une heure de marche du rivage, auraient send de
refuges,
car
situes dans
reviendrons
un
peu
une zone
pauvre
en ressources
vegetales
9
.
Nous y
plus loin.
Les fouilles realisees
permettaient de
montrer que
«
les
marae
detruits, puis reconstruits de fagon plus grossiere avant la christianisation, ce qui etait assez exceptionnel. Lors des guerres entre clans,
les marae des vaincus etaient detruits, le territoire ainsi profane.
Trois sondages furent pratiques:
le premier sur une terrasse a
avaient ete
»
«
Vaiava. Un deuxieme
marae
une
sondage
sur un
enclos de Mahutoa revela
profondeur
de 35
cm.
Enfin
une
une
site de maison pres de Vahu du
couche de
tranchee
coquillages (rna'oa)
creusee sur
a
la terre de
Ponao, pres du mur Fareohu, mit au jour des debris de nacre taillee, mais
des clous en cuivre etaient presents a la base de la couche culturelle. 10 »
P. Verin notait alors
qu’«
a
peu pres tous les
objets preleves
en
surface
etaient brises mais ils demeuraient suffisamment reconnaissables pour
affirmer,
comme
l’avait
deja remarque Emory, qu’ils appartenaient tous a
des types qui se rencontrent communement a Tahiti. Aucun des 10 pilons
observes par Emory ne possedait a son sommet de barre transversale.
Cependant, une tete de pilon de ce type fut trouvee dans l’enclos du site 4
et
il existe
un
pilon possedant cette particularite parmi
lection Picard provenant de Me‘eti‘a.
les pieces de la col-
»
8
Verin, 1964, pp. 79-80.
’Verin, 1962.
10
Verin, 1961.
11
S>
bulletin
de la
Society des Slades 0icea/u€/me&
Des collectionneurs
coniine
Henri Picard
(Papeete), Francois Bordes
(Fa’aone), mais egalement
proprietaries de File, Snow et Terrie,
possedaient des objets pre-europeens de Me‘eti‘a. Un inventaire de ces
objets se trouve au Musee de Tahiti et des lies.
certains
Le
denomme, decrit en 1772 par les Espagnols
de leur visite de File, les navigateurs trouverent pres d’un groupe
marae non
Lors
Reprenons les sources espagnoles; Boenechea
11
Plus loin, je trouvai une enceinte de pierres
note dans son manuscrit :
de 1 vara de large et 20 a 25 varas carres avec une grande palissade, et
a Pinterieur, sur une surelevation, il y avait des tombes, les unes sur les
autres, ornees de poteaux sculptes, ou portant des inscriptions oil la
silhouette d’un petit chien predominait sur chacun : les Indiens ne voulude maisons
un marae.
«
rent pas
s’approcher de
cet
endroit.
»
Dans le manuscrit du Pere Joseph
loin,
une
enceinte de
poteaux sculptes
voulurent pas
puisqu’ils
12
Amich, la version differe
:
«
Plus
25 varas, ornee a son pourtour de
s’ils avaient du caractere, dont les Indiens ne
pierre de
coniine
s’approcher,
20
a
nous avons
pense alors que e’etait
profond respect.
un
tombeau,
eprouvaient
13
Enfin, dans le journal de Bonacorsi (dans l’ouvrage de Corney ) :
Et plus loin, une enceinte de pierres de 20 ou 25 varas, au pourtour
orne de poteaux sculptes, coniine s’ils avaient du caractere, ce pourquoi
dont les indigenes ne voulaient pas en approcher. Ce qui, en regardant
bien, etait leur endroit funeraire pour lequel ils avaient un grand respect.
Coniey precise dans une note : marae, ou sanctuaire a la memoire
des ancetres dispanis, possedant un Chien comme ancetre totemique ou
un
en
»
«
»
«
symbole
du clan 14
».
"
Boenechea, Manuscrit, MS 1035, Lima. Un rare correspond environ a 0,86 m.
Amich, Museo Naval, Madrid, folio 111.
13
Journal de Bonacorsi, in Corney, vol. 2, p. 41.
I!
Manuscrit de
H
Corney, 1913, vol. I,
12
note
2,
p. 296.
N°323
-
Septembre / Decembre 2011
C’est la seule
description historique d’un marae dont nous disposons
pour Me‘eti‘a. D’apres les mesures indiquees par les visiteurs espagnols
et la situation de ses vestiges,
Emory situait ce marae sur l’emplacement
du site 107, sur le plateau, pres du rivage sud.
III.
Me‘eti‘a, espace du mythe
et espaces dans le
Les differents
Coniine toutes les lies
de
noms
polynesiennes,
mythe
de file
l'ile
changea de nom
au
fur et
occupation par differents groupes, au gre des migrations
et des changements politiques. Son nom le plus ancien serait Tuhna. Elle
a mesure
aurait
son
egalement porte
le
de Ahu
Ahuahu, d’apres les traditions
maories
Puis elle devint Me'etu (Meketu en pa'umotu), pour finalement etre transformee en Me‘eti‘a (Meketika). Le nom actuel de Mehetia,
avec un h, est une erreur qui s’est perpetuee depuis la fin du XIXe siecle.
nom
ou
15
.
Tiihua
C’est le
plus ancien nom retrouve. Tu (dresse) hua (adj.: entierement) par analogie probable a son pic qui emerge des dots. Mais hua
signifie egalement l’endroit ou Ton cachait les femmes, les enfants et les
vieillards
en
16
temps de guerre
historiques maoris,
(Tahiti).
ou
.
«
elle est
L’ile Uihua est mentionnee dans les recits
censee se
trouver au
sud-est de Hawaiki
Henry apprit de Poroii, un vieux sage tahitien, que Tuhua
meme Tie que Me‘eti‘a, et que c’etait son ancien nom. Le nom plus
moderne de Pile (Me‘eti‘a) est conserve dans les traditions des Maoris
17
En 1927,
Taranaki, comme celui d’une Tie pres de Hawaiki (Tahiti)
Teuira
etait la
.
15
Best, 1976,
16
Hua,«the aged, the infirm,
»
p. 392.
women
and children put in
a
place of safety in time ofwar», Davies, 1851,
p. 111.
17
Henry, 1911.
13
bulletin c/f !a Society de& &lude& Qcca/uc/wcx
l’ethiiologue neo-zelandais Eldson Best,
dans
une
des Tuamotu, demandait de faire des recherches
a
l’administrateur
sur une
lie des Tuainotu
lettre
son
autrefois Tuhua. Les investigations menees par le capitaine Bris18
resterent infructueuses
Ce nom avait ete oublie a Tahiti, alors que
son
souvenir
nommee
de
.
persistait chez les Maoris de Nouvede-Zelande. Emory, lors
travaux sur Tile, en 1930, ecrivait: « Comey s’est fie a certains era-
ses
dits tahitiens pour affirmer que l’ancien nom de Me'eti'a etait« Tuhua ».
II pensait alors que « Tuhua etait une mauvaise transcription de Tuhiva,
ancien chef de Me‘eti‘a 19
Lors des
en
»
grandes migrations des lies de la Societe vers Aotearoa,
du Nord de la
velles
.
Tile
groupes nommaient les terres nouleurs des d’origine, transferant ainsi leur toponymie.
Nouvelle-Zelande, les
reference
a
l’Abondance, dont le
nom maori est Tuhua fut nommee lors du celebre voyage de Toi, en raison de sa ressemblance avec Tuhua voisine de Tahiti, de comiue egalement
C’est ainsi que
«
dans la baie de
Mayor island »,
,
Maiteka 20 D’autres toponymes correspondant a
lile sont retrouves: Hikurangi (Yli'wrdx), Maketu (Meketu), Irakau. Ces
sous
le
nom
deAhu
ou
.
analogies toponymiques suggerent ainsi des relations sur de grandes distances, de Tahiti via Me‘eti‘a et les des Cook, vers la Nouvede-Zelande. Ceci
pourrait exphquer, en outre, que Ton ait retrouve des objets de Me‘eti‘a
(herminettes,/>
Fait partie de Bulletin de la Société des Études Océaniennes numéro 323