B987352101_PFP1_2012_020.pdf
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à?»
LittéRa
juin 2012
Te hotu ITla'ohi
Ramées de littérature
polynésienne
Pina’ina’i
écho de l’esprit et des corps
Littérama’ohi
Publication d'un groupe d'écrivains de Polynésie française
Directrice de la publication :
Chantal T. Spitz
Farepoiri Motu 'Ara'ara
Huahine
E-mail : hombo@mail.pf
Numéro 20 / Mai 2012
Tirage : 600 exemplaires - Imprimerie : STP Multipress
Mise eu page : Backstage
Couverture : 41 an’so Te Boulc’h
Peinture rupestre, grotte de Eiaone, Hiva Oa, Marquises Sud
Photo : Tupuna et Nuuroa - Marie-Hélène Villierme
TM° Tahiti lti
:
755900.001
Revue
Littérama’ohi
Ramées
de Littérature
Polynésienne
-
Te Hotu lVla’olii -
LISTE DES AUTEURS DE LlTTERAMA’OUl N°20
Patrick 'Amaru
Vaihere Cadousteau
Steve Teùrahau ChaiHoux
Flora Devatine
Taraua Devatine
Valérie Gobrait
Clothilde Grand
Moeava Grand
Orava Guenin
Anita Heiss
Henri Hiro
Isidore Hiro
Léopold Hnacipan
Malissa Itchner
Rosa Lia
Wilfred Pina'i Lucas
Charles Manutahi
Diana Kakeahu Mao
Carmen Marcias
Chantal Millaud
Hong My Phong
Noëlla Poemate
Chantal T. Spitz
Régina Suen Ko
Taunehenehe a Tahitotera'i
Moana'ura Tehei'ura
Tuari'i Tracqui
SOMMAIRE
LlTTERAMA’Om N°20
Mai 2012
Liste des auteurs
p.
Sommaire
p.
La revue Littérama'ohi - Les membres fondateurs
p.
Editorial
p-
4
5
7
9
Dossier : Pina’ina’i - Echo de l’esprit et des corps
Chantal T. Spitz
Elenri Hiro lu par Marguerite Lai
Vaihere Cadousteau
Valérie Gobrait
Te souviens-tu mon frère...
(extrait de « l'écrire colonisé »)
p. 15
To ù fare au
Pô hotu no te manu
p. 17
p. 20
Moemoea
p. 24
‘Aimeho Charousset
Terre, ô ma terre
p. 27
Chantal T. Spitz lue par Moeava Grand
Rarahu iti (extrait)
p. 29
Taraua Devatine
Question de temps
Moana'ura Tehei'ura
No Hitihiti-i-Te-Marama-Tea a Hiro
p. 32
....
p. 34
FSnaura'a
Ua nanu te miti
p. 37
La mer est haute à l'embouchure
p. 40
Renouveau
p. 43
Tuari'i Tracqui
Papa
p. 45
Patrick 'Amaru
Na to'u rima i ueue na to'u rima
Régina Suen Ko
Patrick 'Amaru ft Edgar Tetahiotupa
Mataa'ia'i Itchner
i 'o'oti
p. 47
Valérie Gobrait
Vers Reva
p. 50
Chantal T. Spitz
Notre chemin
p. 52
Qui suis-je (extrait)
p. 54
E Mâôhi
p. 56
Anita Heiss lue par Hitivai Tracqui
Steve Teùrahau Chailloux
Wilfred P. Lucas lu par Mareva Leu
Mon père Teriite'ite'i,
Terii qui sautille
p. 58
E reo iti pina'ina'i
p. 62
Charles Manutahi lu par F. Devatine
Mon ‘Ora
p. 66
Flora Devatine
Pehe rauti
p. 67
Isidore Hiro
Création littéraire libre
Clothilde Grand
Amour-ire, Bêtes malfaisantes
p. 72
Orava Guénin
Va nâ te Moana nui ‘o Hiva, ua nâ te tai hiti-tautau-'ore
p. 75
Malissa Itchner
Force physique
p. 78
Moeava Grand
L'indiférence nuit gravement à la santé, La Pierre de Lumière,
Une terre, un peuple, un homme
Diana Kakeahu Mao - Mataoa
.
;
Te Mara'ara'a miti, Te ’a’amu no na tae’ae e toru
p. 79
p. 83
Chantal Millaud
En ma terre
p. 96
Hong My Phong
Comment élever un enfant prodige ?, Comment oublier son ex ?,
Saveurs, Portrait de C...j'ai des idées noires
p. 97
Taunehenehe a Tahitotera'i
Poro'i
p.103
.
Elèves du lycée de Taravao
Lectures et commentaires
p.105
Auteurs invités
Léopold Hnacipan
Les seins de Wananathin
p.118
Rosa Lia
Mythologies of love
p. 125
Carmen Marcias
Défigurer l'espoir, Joindre ses mains
p.127
Noëlla Poemate
La fourmilière.....
.
p.130
l’artiste
Miriama Bono
p.134
Littérama’ohi
Famées de Littérature Polynésienne
-
Te Liotu Ma’ohi -
La revue Littérama'ohi a été fondée par un groupe apolitique d'écrivains
polynésiens associés librement :
Patrick ‘Amaru, Michou Chaze, Flora Devatine,
Danièle-Tao'ahere Helme, Marie-Claude Teissier-Landgraf,
Jimmy M. Ly,
Chantal T. Spitz.
Le titre et les sous-titres de la revue traduisent la société polynésienne d'au-
jourd’hui :
«Littérama'ohi», pour l'entrée dans le monde littéraire et pour l'affirmation
de son identité,
«Ramées de Littérature Polynésienne», par référence à la rame de papier, à
-
-
celle de la pirogue, à sa culture francophone,
«Te Hotu Ma'ohi», signe la création féconde en terre polynésienne,
-
Fécondité originelle renforcée par le ginseng des caractères chinois inter-
-
calés entre le titre en français et celui en tahitien.
La revue a pour objectifs :
-
de tisser des liens entre les écrivains originaires de la Polynésie française,
-
de faire connaître la variété, la richesse et la spécificité des auteurs originaires de la Polynésie française dans leur diversité contemporaine,
-
de donner à chaque auteur un espace de publication.
Par ailleurs, c'est aussi de faire connaître les différentes facettes de la culture
polynésienne à travers les modes d'expression traditionnels et modernes que sont
la peinture, la sculpture, la gravure, la photographie, le tatouage, la musique, le
chant, la danse... les travaux de chercheurs, des enseignants...
Et pour en revenir aux premiers objectifs, c'est avant tout
de créer un mou-
vement entre écrivains polynésiens.
Les textes peuvent être écrits en français, en tahitien, ou dans n'importe
quelle autre langue occidentale (anglais, espagnol,... ) ou polynésienne (mangarévien, marquisien, pa'umotu, rapa, rurutu...), et en chinois.
Toutefois, en ce qui concerne les textes en langues étrangères comme pour
ma'ohi, il est recommandé de les présenter dans la mesure du possible avec une traduction, ou une version de compréhension, ou un extrait en
ceux en reo
langue française.
Les auteurs sont seuls responsables de leurs écrits et des opinions émises.
En général tous les textes seront admis sous réserve qu'ils respectent la
dignité de la personne humaine.
Invitation au prochain numéro :
Ecrivains et artistes polynésiens,
cette revue est la vôtre : tout article bio et biblio-graphique vous concernant,
de réflexion sur la littérature, sur l'écriture, sur la langue d'écriture, sur des
auteurs, sur l'édition, sur la traduction, sur l'art, la danse,... ou sur tout autre
sujet concernant la société, la culture, est attendu.
Les membres fondateurs
Editorial
Dossier : Pina’ina’i
Echo de l’esprit et des corps
Pina'ina'i est la rencontre originale entre l'écriture, la danse et la musique.
Danse des mots et poésie des corps prennent vie sur le paepae a Hiro à Te Fare
Tauhiti Nui...
Les mots se libèrent des pages pour danser sur des sonorités joyeuses et douloureuses. Quelques lampes-tempête suspendues à l'instant réveillent cette paisible
nuit pour rendre hommage à l'arbre du poète. Paradoxe d'un hommage intime et
public. L'espace déploie ses ailes dans le néant. Frémissements de bambou jusqu'à
la vallée du temps. Pluie battante sur les mots de louange et la Nouvelle Cythère
se noie dans l'immondice de la modernité. Une voix tremblante surgit tout à coup
du chapeau du saltimbanque tandis que le gecko valse sur le sable chaud. Sable.
Plage. Les vahiné s'enduisent allègrement du mythe fleuri de la désolation. Viol des
consciences sous des airs sirupeux. Le ton devient long sous la pression du temps.
Le joueur de vivo entame ensuite une mélodie d'espoir afin que Hina témoigne
d'une union. Les mots déferlent, les corps se tordent en anaphore. Orgasme de la
prose musicale d'une danse éternelle. Les mots sont consommés. L'union aussi. La
partition des rimes suscite l'envie. Envie de la vie. Envie de donner vie. La graine
est semée. Echos de bonheur aux premiers battements du cœur. L'auteur remercie
la terre mère. L’enfant chante le père au ciel. Puis, une comptine ensanglantée
entonne sa démesure. Notes brisées par les cloches incestueuses. Les mots heurtent
les parois du corps. Le suicide dessine un acrostiche sur la corde du destin. Echos
de douleur aux derniers battements de cœur. Les violons sont tristes et pleurent
un amour
égaré. Au bout du chemin du désespoir, l'identité perçoit l'écho d'un bol
tibétain qui résonne dans un bambou aborigène. Quête de soi et retour à la source
de l'émoi. Corps de himene tarava capturant l'essence de notre être. Encre nostal-
gique de l'existence d'un temps. Duo identitaire entre Tahiti et Paris. La dame au
grand chapeau attise les braises du passé. Pas de deux du moment singulier. Sous
le piétinement des enfants de la terre, l'amour renaît. La sagesse a coiffé ses cheveux blancs et interpelle la jeunesse. L'arbre du poète sourit. L'écriture d'une nuit
s'inscrit dans nos mémoires. L'oubli est banni. L'espoir ressurgit.
Moana'ura Tehei’ura
Concepteur de Pina'ina'i
il
Ouuerture du spectacle
an ie
De corps en corps,
de vies en vies,
pina'ï
de morts en morts,
je coule depuis l’infini
Simple remix d’éléments,
Terre, Eau, feu, espace,
Dosier
autoproduction
de pensées
qui passent.
J’habite provisoirement
avec compassion
ce corps impermanent,
changeant
I
et vieillissant si vite...
«
...Dans ma chambre,
Je déroule
lieu d’expression
émotions,
esprit qui divague sur les
rêves et passions
frustrations de mon corps,
que mon esprit embrumé
de mon
Ma couche vide, espace
prend pour la réalité,
de ma solitude contrainte, au
une suite d’instants
déchaînement des orages
m’accouche d’écrits,
déposés sur le courant
de mon continuum.
Pendant que mon corps
souche de pourrissement de
mes
émotions, s’essouffle à
mes dits... »
Le chaos du Big Bang était génésique
sans déité
indigène au générique
La sonorité se rit d'être - depuis le cosmos sans sillon
ni signature
L’écho du cœur du gecko coagule sa pulsation
jusqu’au col lapsus
La résonance de la danse dans le corps se diffuse
comme une irridiation heureuse
Le tempo de la pensée bat la chamade jusqu’à l’harmonie
retrouvée
Poésie des mots et des corps. Enfin !
LittéRama’oHi #2G
□ uuerture du spectacle
Tâvevo
<E E fati â te are o te tau
£ E huri â te oneone taata
ro
E hiti noa mai â ôe
I roto i ta ù moemoea
E tià noa mai â oe
I te ùputa o te mahana
Mai te tâvevo ra no te tatarahapa...
E tiare ta ù i pâfai
E tiare ta ù i tâiva
E fati â te àre i tahatai
~~
ta’iori’ori’o te ‘â’au
E huri â te oneone taata
to
tâvevovevo te âue
Eita râ te tâvevo no tatarahapa
3 pàhaehae te rima
E moè...
‘ümere te ‘â’au
tâvevovevo te ‘âhâhë
mirimiri te rima
haruru te pahu
tâ’ue’ue te tino
eie te pïna’ina’i
-^5 je marche ma vie sombre
mes deuils cisèlent ma peau
CD
mes
peines burinent mon corps
■jrj et mes mots
multiples échos sanguinolents de mon âme éclatée
s’accrochent à tous les vents
flottent parmi les étoiles
et se fondent dans le néant immaculé
pour effacer toute trace de mon existence
13
Bagages de voyage
Loin des lèvres, au bout des doigts, / Loin du nez, dans les mains,
Loin des oreilles, plein les bras, / Loin des yeux, sur les épaules,
Près de la peau, / Contre la peau, / Sur la peau, / Dans la peau,
Sans autre support que mon corps, / Sans autre bagage que mes manières,
Sans autre héritage que mon sang, / Sans autre abri que mon esprit,
taru
mareu
Je sculpte sur mon être ces sens bannis.
-
co
I te hitiraa mai te ava ’ e re ’ are ’ a,
Ua hiti ato’a mai te hoê taure’are’a
co
ro
I roto ia’u nei.
No ‘oe ho’i teie hunt to’u,
E ri’ari’a ‘ore, hia’ai rahi, moemoea a’au.
L’esprit fait-il écho au corps ? Le corps fait-il écho à l’esprit ? Mais,
le peuvent-ils seulement ? L’ont-ils pu déjà ? Le pourront-ils un jour ?
Faire écho, c’est répondre, mais c’est aussi reprendre et renvoyer un
son.
L’esprit alors, renvoie-t-il toujours le son des corps ? Mens sana in
corpore sano entendons-nous nous répéter depuis les temps immémo-
riaux... « Les immémoriaux »... Qui dépassent la mémoire, le souvenir...
Qu’en est-il alors « quand l’esprit s’égare » ? Citation d’Aloïs, célèbre
neuropsychiatre allemand dont le nom m’échappe, encore une fois, bien
malgré moi. Je ne souhaite pourtant pas me souvenir de son nom tellement
celui-ci est associé au funeste. « Quand l’esprit s’égare » - disait Aloïs
pour décrire la maladie neurodégénérative la plus fréquente aujourd’hui
il ne reste alors que quelques traces pour permettre encore à l’esprit de
retrouver son corps afin qu’ils continuent à se faire écho.
-
pina'
Dos ier
LittéRama’oHi » 2D
Ouverture du spectacle
et)
■—
CJ)
-CD
*-
Manavarere !
Rere e, rere â
...
marere
!
O Rümia, ia au i te rereata,
e marere nei
i roto i te pô.
‘Ohu, pâinu, rara, tlpapa...
tlpapa faahou, rara faahou,
pâinu faahou, ‘ohu faahou.
Mau a’e ra o Rümia. Haamata ra ia o Taaroa i te patu
i te ao. Rave iho ra o ia i te
‘âfa o Rümia nô te ra’i. Te
tahi ‘âfa, nô te papa ia i te
fenua.
Te ra’i, te fenua, te moana,
te
mou’a, te anavai... ua
mau ia te ao. Ao e
pô e pô e
ao, ua mau ia mâhana !
'
jD Pinainai, e pi iti nainai o tau pinai iti e, mai te
pinainai e tuea e tou nainai
O vai tei faaroo i tera pinai, aita e vevo.
P E vevo o tou mafatu tupai, tupai i tou taaore,
d
mea tau
^
*5
horo pupara tou feruriraa, hiaai e opéré,
Hiai no vai, na vai, o vai te apo mai tou hiaai,
ua ii nei a tou apu
i te hoe pehe navenave
Ei faufaa ai ia tavevovevo, atire, atire ua aaoa
te moa i te taamino noa raa.
E oe tou mafatu, e oe tou apu rahi, e tamaro o
tou hou, nao, oe tou hoa o te mau taime atoa a
rave, a opéré te pehe nave, ia pinainai i te peho
o te tau,
mai te vai pue e tatahi i te fenua.
Voir la vidéo sur : http://www.youtube.com/watch?v=tvu6jNYxMVg
15
LittéRama’OHi « 20
Chantal T. Spitz
pina'
Dos ier
Extrait de
«
l'écrire colonisé »
paru dans « Pensées insolentes et inutiles » aux éditions Te Ite
te souviens-tu mon frère te souviens-tu tu disais « écris tu dois écrire
nous tu dois le faire
ne réfléchis
...
pour
plus il est tard
écris ». Ecrire maître-mot
d’une réalité à énoncer mosaïque d’identités à ciseler vitrail de cultures à flamboyer voyage-découverte de multiples influences tissage-articulation de diverses présences. Mon frère écrire quoi de quoi sur quoi pour quoi avec quoi
écrire qui de qui sur qui pour qui avec qui écrire comment. Comment écrire
quand mes sentiments se sont abreuvés aux imaginaires étrangers quand ma
pensée s’est burinée aux discours occidentaux quand mes rêves se sont éclievelés de littérature blanche quand ma langue première primaire est celle des
hommes d’un autre peuple. Ecrire pour dire pour parler écrire âu lieu de parler.
Comment écrire-parler quand les mots de l’Autre venus des cieux brumeux
d’un inconnu ailleurs ont squatté mon âme. Comment parler-écrire quand la
parole créatrice s’est éteinte sous la bonne parole de la frénésie évangélisatrice
quand la parole libératrice s’est aliénée sous l’unique vérité des hordes colonisatrices. Comment parler-écrire quand notre imagination s’est immobilisée dans
une trajectoire sans histoire quand notre essence s’est anesthésiée dans l’infinie
fascination de l’Occident. Comment parler-écrire quand les hurlements de l’autre qui pense de nous pour nous parle de nous pour nous occupent l’espace nous
...
...
dissocient de nous-mêmes nous folklorisent nous illusionnent. Te souviens-tu
mon
frère te souviens-tu ils te disaient ils me disaient ils nous disaient ils
s’étaient installés et ils parlaient ils parlaient ô comme ils parlaient. Fort vite
plus fort plus vite que nous toujours partout suffisants arrogants écrasants motscouperets mots-suicide mots-castration. Ils étaient venus vêtus de leurs inébranlabiés certitudes d’être la création la plus achevée des cieux à la recherche du
maillon manquant dans la chaîne qui mène à l’humanité à mi-chemin entre Noir
LittéRama’oHi » 20
Lectures - Chantal T. Spitz
d’Afrique et Blanc d’Europe. Alors ils nous avaient inventés mythe réducteur
sclérosant qui désonnais nous fondait nous établissait nous authentifiait dans
une identité immuable immobile alibi les confortant dans leur incommensurable
supériorité bon sauvage à l’aube d’une probable humanité qu’il leur incombait
par directe filiation divine d’évangéliser d’éduquer d’éclairer de civiliser. Les
vents et les houles atlantiques les avaient flottés marins-voyageurs pour nous
découvrir religieux-voyageurs pour nous christianiser militaires-voyageurs pour
nous coloniser
écrivains-voyageurs pour nous raconter professeurs-voyageurs
pour nous cultiver.
Voir la vidéo sur : http://www.youtube.com/watch?v=tvu6jNYxMVg
Lectures - (Tlarguerite Lai
pina'
□s ier
Henri Him
To ù fare au
Extrait du recueil Pehepehe i taù nuriaa, Message poétique
Edition Elaere P5 2004
Unaùna pôraô ore no to ù pâreu,
Hii pümâhana no ta ù moemoeâ,
Maru hau püvaivai no taù tino,
Nohoà tumu no to ù hiroà,
Niu papa no to ù iho,
Rohipehe âruerue no to ù vaerua,
Aià tumu no to ù âià,
Utuâfare mâhere ore no to ù fenua,
Mâôhi no to ù mâôhi,
Hum no to ù hum,
Ite haamere ore no mua ra e a mûri noa atu,
Fare mâôhi e,
O ôe ihoâ ôe, aita atu ai.
Aore â i parau ua ôrero mai ôe.
Aore â i himene ua târava mai ôe.
Aore â i àhu ua tlhere mai ôe.
Aore â i mâa ua ahi-mâa mai ôe.
Aore â i înai ua tâhana mai ôe.
Aore â i haamiti ua tâpë mai ôe.
Aore â...o ôe na, o ôe na vau.
LittéRama’oHi # 20
Lectures - marguerite Lai
I te âtea ê roa ra ua pürero mai to reo :
“Haere mai râ i te fare nei !”
Mâôhi no to ù mâôhi,
Hum no to ù huru,
Ite haamere ôre no mua ra e a mûri noa atu,
Fare mâohi e,
O ôe ihoâ ôe, aita atu ai.
Fare tâôto, fare tâmâa,
Fare ahimâa, fare farii,
Fare pôtee, fare haupape,
Fare hauparu, fare taupee.
Râau no te fenua,
Tâpoi no te fenua, pâpai no te fenua,
Vauvau no te fenua.
Tâôto ihoâ, tâmâa ihoâ.
Ite haamere ore no mua ra,
e a mûri noa atu.
Terâ ra pëùe iti,
Neea te ihu e te raô i te ao,
püâvereverea i te pô.
Fare mâôhi e,
O ôe ihoâ ôe, aita atu ai.
I no reira anaè mai,
Hôhoi anaè na e terâ ra Mâôhi.
Na na te faaherehere i to tâua,
Ta na poihere te arofa mâôhi.
Ta na fatu to tâua hanahana,
Ta na tiàmâ to tâua tura.
Nâ ô mai ôe, nâ ô nei atu vau,
Nâ ô aè mai terâ, nâ ô atu terâ aè,
Ua hono anaè ia i te mana tupuna.
A ôre te haamâ, a ôre te piô,
a ôre ke
tlpee,
Tâôto ihoâ, tâmâa ihoâ, e ora ihoâ !
19
pina'î’
Dos ier
Voir la vidéo sur : http://www.youtube.corn/watch?v=x-j7cBHUj80a:feature=relrnfu
LittéRama’OHi # 20
Lectures - Uaihere Cadousteau
Pô hotu no te manu
Pô hotu, pô no te manu... Tipaepo
Ua tipae te manu i teie ru’i.. .Tipaeru’i
Tauraa i te pô... Taupô
A rere mai e manu rau, a tau mai, tipae mai
‘Oti’otiroa, Fenua’ura ra na moti’a e rua 0 te âvei’a
Tei arata’i ia ‘u i ni’a i teie ê’a
Mau tu’iri hum rau tei haapurarahia no’u tae roa i teie puna vai
Te rêni 0 te hôê âvei’a faatahia no’u e
‘ite atu ra vau i te hôê âpoo hohonu mai na âpoo e va’u 0 te vata i te
‘aehai reva
I to’u hi’oraa atu i roto, i reira to’u hutiraa i te aho ûâna a Fenua
Aue! Te taiâ e te mana’o-‘ore-hia!
I reira to na tutonu-raa ia ‘u mai roto mai te pouri o te ‘ite-‘ore- hia
Turama atu ra vau i to’u mori ti’airi
Mahuta iho ra te pina’ina’i o te Hiro’a
Mata tu’atu’a ia ‘u te mata ia a Fenua
Atua vahiné 0 to u âi’a tupuna te titau mai ia ‘u ia heuheu vau i te vari
0 te te Taa’ore ia ti’a mai te
‘aai a Fenua’ura
Maraa iho ra te no’a te paru tupuna mai roto mai teie âpoo hohonu
Aehu’ehu a’e ra to’u hiro’a
Nana’o taaê tei faa’itehia mai, nana’o no na maehaa te ta’oto nei i roto
i te anu
o te ru’i
Puhi vahiné te na’ue mai i roto i to na ro’i vai hî
21
pina'
Dos ier
LiftéRama'oHi tt 20
Lectures - Uaihere Cadousteau
Tino nanehu’avai, îtere ôhinu
Ti’a atu ra ho’i te menema, te hôê ôfa’i parahurahu
Te vai ateate viivii’ore o te puna Tauôpu tei tauhani i to’u ‘iri
Vahine’ura tei ti’a mai e tei hi’a i ni’a i to na ro’i ôpuhi ‘ura
Mai te hôê Hinemoea tei ma’ue na te ata tura’ihia e te ta’i o te
napara
Ta’i 0 te ‘una e te pina’ina’i o te puna ta’u i faaroo atu ra
No’a puhi’ava, no’a ‘ura’ura tei haaparare mai
Hura taaê tei tupu mua ia ‘u, te hura o te tiare ia
pee e te vai ia hee
Ta’i ‘ahehe, uihi o te hitapere ia hîrere te pape
Vai tiare, mâtipi pahee I te ta’I âpere
Maraa ihora te puai o te peho no Tipaepô roto mai teie ôrama roa
Pua ‘ura tei faura mai i roto i te puna no Tauôpû e tei na’ue i roto 0 te
marumana 0 te vaitea
Tia’oro 0 na âau e rua
Hôê ana’e ôtu’itu’iraa o te âau no na tino e rua
Tetauri te i’oa nana’ohia i roto i te repo fenua
Umatatearaa o te âai a Fenua ‘ura
‘era te pô ua hotu, ua haamata te aora’i o te heva i te ti’araa o te hema
Manava i te aora’i matarua no Taupô
Po’iva’iva no na maehaa, ‘ete teie te fano mai i ni’a taua puna ra
Ta’i hauriri’a 0 te meho
Manu rau e ti’a i teie pô
Manava i te aora’i matarua no Taupô
la ti’a te âai no na maeha
Taupô... tauraa i te pô
Ua tipae te manu i teie ru’i.. .Tipaeru’i
Pô hotu, pô no te manu... Tipaepo...
23
pinal'
Dos ier
LittéRama’oHi tt 20
Lectures - Valérie Gobrait
...Moemoea,
Une aube nouvelle battait sourire,
Une aube nouvelle battait espoir,
Monde d’éclat, de déluges de flammes
d’allégresse et de joie
pupilles l’oiseau ivre de bonheur
scintille les bougainvilliers et la fleur symboles
des paillettes argentées.
Mère sans foi, aride je te quitte
un pays de fruits d’eau douce un pays de mains ouvertes...
la prophétie poétique du mirage cythérien
vers luisants de nos
Pape’ete mon amour,
l’élégance la brillance la mer indocile désespoir tsp
Tahiti la grande aux longues tresses d’or la nuit
le chant des échassiers nébuleux engloutit le désert salé
ceinturé pas de voie lactée mais de béton, d’acier de quartiers sulfureux
mal famés
mais non, on t’aura menti et la mer de la fulgurance est tyramiique
l’essentiel c’était de le savoir la technologie de l’avoir
l’auxiliaire être est banni et plus on a et plus on est
pas facile pour mes pensées dépenser à l’envers
et je lis du haut de son faîte un pays de soleil d’eau douce
et de mendicité.
Ainsi donc Corbeille d’eau, ton panier est percé.
25
LittéRama’OHi n 20
Lectures - Valérie Gobrait
J’ai rêvé d’un fils pour fermer les yeux de sa mère
J’avais choisi d’ouvrir sous un autre soleil les yeux du fils
mon cœur mon âme m’ont
guidé jusqu’à ces mots
poète je t’ai cru j’ai cru aux mensonges aux mots d’école qui rient
aux éclats et
qui se moquent des étoiles. Illusions.
Tué fichu cahier des mes propres mains Hiro
de m’avoir offensé dans mon choix attirés par les lustres cirés
la lumière insensé j’étais si je bouge pas deux mains je le serai
je cours hirsute avec mes poings serrés,
et gerbe seul dans ma poursuite du vent.
Voir la vidéo sur : http://www.youtube.com/watch?v=x-j7cBHUj80afeature=relmfu
Lectures - 'Rimeho Charousset
Terre, ô ma terre
Jean MarcTera'ituatini Pambrun 7e Fare Tauhiti A/u/N°17, septembre 1998
Ou, « Les voies de la tradition » Editions Le Manuscrit 2008, pp. 123,124
Terre, ô ma terre
Pourquoi abandonnes-tu tes enfants
Pourquoi les laisses-tu t’ignorer
Oublier ton nom, te vendre et te détruire
Terre, dis-leur qui tu es et d’où tu viens
Enseignes leur ta fondation et ton histoire
Terres, dis-leur tes paroles originelles
Montre leur tes signes et tes gardiens
Terre, récite leurs généalogies
Raconte les exploits de leurs héros
Terre, dis-leur tout cela
Dis leur que c’est cela la tradition
Que tes paroles doivent être retransmises
Qu’elles doivent être exactes
Que la transmission doit être fidèle
Et que sans cela il n’y a pas de tradition
Et que sans cela il n’y a que des bribes
Et que sans cela tout se perd
Et que sans cela il n’y a plus d’origine
Terre, dis leur que tes paroles sont uniques
Que tes paroles se soufflent par les vieux
Que tes paroles se mangent par les enfants
Et qu’elles ne s’inventent pas
pina'
Dos ier
LittéRama’OHi » zo
Lectures - 'Rimehc Charousset
Terre, dis à tous ceux-là qui te respectent
Qui préservent tes paroles originelles
Terre, dis-leur qu’ils sont dans la tradition
Terre, ô ma terre
Chasse les charlatans, démasque les voleurs
Les ignorants et les bouches impures
Ceux qui déforment les paroles ancestrales
Ceux qui violent tes secrets
Ceux qui profanent tes marae
Ceux qui fabriquent que du vide
Ceux qui ne créent que des mythes
Terre, inspire l’amour aux véritables créateurs
Que tu puisses encore enfanter des légendes
Que tu puisses mettre au monde des héros
Et que ta conception soit leur seul souci
Et que ton enseignement soit leur seul guide
Et que ta glorification soit leur seule guerre
Terre, dis aussi à tous ceux qui créent
En puisant à la source de tes paroles originelles
Qu’ils sont aussi dans la tradition.
Voir la vidéo sur : http://www.youtube.com/watch ?v=Cr7hUmRegDQafeature=relmfu
29
Lectures - iïloeaua Grand
Rarahu iti e (extrait)
Chantal Spitz lue par Moeva Grand
Paru dans « Pensées insolentes et inutiles » aux éditions Te Ite
Rarahu iti e autre moi-même... Ils sont si fiers d’avoir créé le mythe Nouvelle Cythère de tous les possibles peuplée de bons sauvages. Nous sommes si
fiers d’être le mythe. Je devrais être fière moi aussi d’être un mythe. Le Mythe.
C’est drôle mais ça m’énerve. C’est drôle mais ça me blesse. Rarahu iti e autre
moi-même... Comment pourrais-je t’aimer comment pourrais-je m’aimer «petite
fille maorie, ignorante et sauvage», «petite créature inférieure, jouet de hasard»
donné à l’homme blanc. Comment pourrais-je aimer les gens de mon peuple au
caractère «comme celui des petits enfants», «ces natures incomplètes chez qui
le fond demeure mystérieux et sauvage», «restes oubliés des races primitives».
Comment pourrais-je aimer les gens de mon pays «objet de dégoût et d’horreur», «une chose horrible» qui se rhabille par «honte d’étaler au soleil d’aussi
laides choses».
Définitivement je n’aime pas le mariage de Loti lu par tous ceux qui veulent nous connaître avant de débarquer dans notre pays, grâce auquel se perpétuent des siècles d’infâme hypocrisie grâce auquel tous peuvent faire l’économie
de nous voir.
Rarahu iti e autre moi-même... Je ne veux pas être un mythe je veux juste
être un être humain à l’égal de tous les autres êtres humains, ceux de la Décla-
ration de l’Homme et du Citoyen. Mais comment quand depuis tout ce temps
on m’a décrite dite
parlée imagée chantée fantasmée, Rarahu étemelle immuable
à jamais telle que dans l’imaginaire occidental européen français. Rarahu qui
me
colle à la peau comme ces étiquettes qu’on a beau mouiller frotter gratter
pina'I
Dos ier
I Li'ttéRama’oHi tt 20
.
'
I Lectures - fTloeaua Grand
écorcher qui restent pour toujours gluées à certains flacons. Indélébiles. Rarahu
tatouée à mon âme à mon identité à mon humanité à ma différence, tu me précèdes comme ton roman fige les gens de notre peuple de notre pays dans leur
paresse leur laideur leur incomplétude leur chosité. Rarahu iti.e autre moimême... héroïne d’une banale histoire de marin, vulgaire fille à marins, grâce à
ton Loti nous ne sommes que différents sans possibilité d’accéder à la civilisa-
tion à l’humanité, à jamais affligés affublés affabulés d’un exotique mythe qui
résiste à toutes les modernités - Internet n’y pourra rien non plus - et qui ne veut
voir en nous que d’étranges étrangers dépaysants.
Non. Décidément je n’aime pas le mariage de Loti, best-seller fondateur
du mythe, roman exotique par excellence, alibi de tous les fantasmes toutes les
hypocrisies intellectuelles tous les paternalismes tous les racismes, qui excuse
toutes les exactions tous les mépris toutes les vexations tous les cynismes. Non.
Décidément je n’aime pas ce mythe qui n’en finit pas de ne pas mourir puisqu’il
arrange dédouane convient. Non. Décidément je n’aime pas ce mythe.
Et je l’aime encore moins depuis que nous nous le sommes appropriés et
que nous nous efforçons consciencieusement de lui correspondre.
Rarahu iti e autre moi-même... Si tu n’avais pas existé j’aurais pu être.
31
pina'
Dos ier
Voir la vidéo sur : http://www.youtube.com/watch?v=Cr7hUmRegDQ6tfeature=relmfu
LittéRama’oHi » 20
Lectures - Taraua Deuatine
Question de temps
(Revue Littérama'ohi, n°3, 2003, p.72)
Pendant encore combien de temps ?
A la première déception,
Au premier ressenti d’injustice,
A la première discussion à coeur ouvert,
Au premier soupçon de parti-pris,
Pendant encore combien de temps ?
A l’écoute d’une contre vérité,
Face à l’incompréhension
A l’écoute d’une interprétation erronée,
Face au refus de comprendre,
Pendant encore combien de temps ?
Avec une brutalité contenue,
Avec un trait d’humour pour défense,
Avec une fierté ravalée,
Avec un juron pour attaque,
Pendant encore combien de temps
Devra-t-il y avoir confrontation,
Suffira-t-il de se moquer de leurs travers,
Faudra-t-il critiquer leurs comportements,
Sera-t-il nécessaire de les rendre responsables de nos regrets ?
Ce n’est qu’une fois ce temps pris,.
Utilisé, décliné, rallongé, intégré, occupé,
Que, les. rames solidement enserrées au creux des mains,
Les pirogues glisseront à nouveau au dessus de la mer.
33
pina'
Dos ier
Voir la vidéo sur : http://www.youtube.com/watch?v=3BM7oNUpOow&:feature=relmfu
LittéRama’OHi « 20
Lectures - ITloana'ura Tehei'ura
No Hitihiti-I-Te-Marama-Tea a Hiro
Hiti’a o te ra.
Ua ti’a to’u manava
Tapapa.
Tapapa atura vau i te hihi.
Te hihi marama. Te hihi maramarama.
Maramarama i tau.
Taharaa mahana.
Vai taha to’u manava.
Aore tau. Aore tauraa.
Taura tupuna. Firi nape.
Toparaa mahana.
Ua topa turi to’u manava.
Maramarama i hee. i te mo’eraa o te iriatai.
Ua mo’e te ra. Rahui. Rahui te here.
Mo’e. Moe. Moemoea.
Ua po...
35
pina'ï
Dos ier
LittéRama’oHi B 20
Lectures - fTloana'ura Tehei'ura
Hitihiti i te marama tea.
Hitihiti i te marama tea i roto i to’u oraraa.
Pererau o to’u manava.
Perepere rau to’u aau.
Vehi atura vau i te ata ‘ura
Vehi atura ona i te ata tea
Vehi atura maua i te ata tea‘ura
E ata ‘oa’oa. E ata hitihiti i te moe hani.
E ta’u ipo iti e, e faarii anei ‘oe i te hei ‘ura o no’u e ?
la ho’e ai taua i roto i te tapa o te tau
la hotu ai te mau pu’e iti rau no taua.
E ta’u ipo iti e, e faarii anei ‘oe i te hei ‘ura o no’u e ?
Voir la vidéo sur : http://www.youtube.corn/watch?v=3BM7oNUp0ow8:feature=relrnfu
Lectures - Régine Suen Ho
Fanaura'a
Ua haamata nâ mua roa e te tahi farereiraa. I ni’a i te ‘e’a o te ora,
ua ü te tino o nà taata i hiti mai ai te here. Here e ora
nei, here e rahi nei,
here e ‘atu’atuhia nei.
Fârerei, ‘aparau... ‘opua. Mea nâ reira ihoâ i te haamataraa.
Tae atu ai i te taime o te oraraa ‘àmui. Të vai noa ra te here, ua tae
ra i te taime e faanaho ai te oraraa
‘âpiti. Türorirori te feruriraa, ü ato’a
ho’i te mana’o... Të vai noa ra te here.
Mai te tiare e ‘ümatatea nô te faa’iteraa i to na nehenehe, e hotu
ato’a te here. E faa’ite ato’a te here i tô na nehenehe. E ô anei, e mata
‘ata anei... te mea pàpü, e ‘oa’oa e e maita’i të hôro’ahia.
Pau atu ra ia ‘ava’e, pau atu ra ia matahiti... të vai noa ra te here.
Teie here e ‘atu’atuhia nei mai te tumu tiare a aupuruhia i te mau mâhana
ato’a. Plpï teie here e te faa’oroma’i, te faatura, te hia’ai... të vai noa ra
te here.
Here te tahi i te tahi, hiaai te tahi i te tahi. Pau ia ‘ava’e, e iva
ava’e...
LittéRama’OHi # 20
Lectures - Régine Suen Ho
Ua hotu te here, ua ‘oao’oa tei here e tei herehia. Mâramarama te
pô, mâramarama te oraraa. Ua tae mai te morï i roto i te ‘utuâfare... Tê
vai noa ra te here. Nâ fanau ia o ia i ‘âfa’i mai. Teie mon 0 teie ia tama,
hotu nô te here.
Tama iti e, mânava e maeva !
Tama iti e, tîma nô te here !
Tamaiti e, mâuruuru... të vai noa ra te here !
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pina'î
Dos ier
Voir la vidéo sur : http://www.youtube.com/watch?v=3BM7oNUp0ow&feature=relmfu
LittéRama’oHi # 20
Lectures - Patrick ‘Amaru £t Edgar TetahiDtupa
Ua nanu te miti i te muriavai...
La mer est haute à l’embouchure..
I te mûri a here
Au delà de l’amour
I te àre fati mau ère
Sous les vagues incessantes
No te hanihani,
Des caresses,
I te mûri a tau,
Au delà du temps,
I te hiti 0 te ao,
A l’aube du monde,
Te ao taata nei,
De l’humanité,
I te mûri a nave,
Au-delà du plaisir,
I te pô nenevaraa,
De la folie,
No te nave pü mahana,
De l’orgasme en mille soleils,
E arato â vau i tô ôe tino,
Je tirerai ton corps,
E arato â vau i tô ôe tino...
Je tirerai ton corps...
E tô ù hoa,
Mon amie,
Ua nanu te miti i te mûri a vai...
La mer est haute à l’embouchure.
LittéRama’oHi « 20
Lectures - Patrick 'Amaru Et Edgar Tetahiotupa
Voir la vidéo sur : http://www.youtube.com/watch?v=3BM7oNUpOowEtfeature=relmfu
M3
Lectures - ITIataa'ia'i Itchner
Renouveau
Confiance en soi,
Assurance du paraître,
Sont choses étrangères à mon être.
Mais grâce à toi,
Epanouissement, féminité
Sont enfin révélées.
En vagues concentriques,
Du fond de mes tripes,
Me vient l’envie, encore !
De donner la vie, encore !
Ventre-centre-antre
Profusion-passion-fusion
Dériver-délirer-aimer
Rupture-brûlure-luxure
Epicé-acidulé-volupté
Toutes ces étapes vécues...
A l’homme tu es devenu,
Un enfant, don du ciel, don de soi,
Je voudrais offrir, pareil à toi.
Enfin, dans ma vie, tu es revenu.
pina'î
Dos ier
LittéRama’om # zo
Lectures - iïletaB'is'i Itchner
Voir la vidéo sur : http://www.youtube.com/watch?v=_dHls_4ivmQ&feature=relmfu
Lectures - Tuari'i Tracqui
Papa
To’ii pâpâ
‘o tô’upapaïa
E pâ e
‘a pâpâ mai i te vauvau
‘a pâpâ mai i tâ’u roimata
‘ia papa te papa pa’apa’a
Te papa ni’a
Te papa raro
Te papa tupuna
Nâ ‘oe e papa ïa
E pâ tô ‘oe na rima
Mai te pâ ari’i
Mai te pâ ‘upa’upa
Epâ ra’aîa
‘ua pâ mai tô ‘oe reo
Mai te mara’ai ïa i pâ mai
‘ë, ‘ua pâ te mara’ai
E pâpâ e
‘a pâmai
I tô aroha...
pina’î'
Dosier
LittéRama’OHi # 20
Lectures - Tuari'i Tracqui
Voir la vidéo sur : http://www.youtube.com/watch?v=_dHls_4ivmQ&feature=relmfu
Lectures - Patrick 'Rmaru
Ta to ù rima i ueue,
Ta to ù ia rima e ôoti
Ce que mes mains ont semé
lVles mains cueilleront...
E hotu hoi au
Je suis fruit
No te here metua
D’amour
Ta to ù metua tâne
Que mon père
I tanu,
A planté
Ta to ù metua vahiné
Que ma mère
I amo.
A porté
E tumu ânei teie
Est ce les raisons
I pô ai to ôe mata
Qui t’ont fermé les yeux
Mâmâ ?
Mama ?
E hotu hoi au
Je suis fruit
No te here metua
D’amour
Ta to ù metua tâne
Que mon père
I tanu,
A planté
Ta to ù metua vahiné
Que ma mère
I amo,
A porté
E tumu ânei teie
Est-ce les raisons
I faru ai oe ia ù nei
Qui t’ont poussé à me violer
Pâpâ ?
Papa ?
pina’
Dos ier
LittéRama’OHi » 2D
Lectures - Patrick 'Rmaru
Aue te mauiui e te haamâ
J’ai mal et j’ai honte
To ù metua tâne,
O mon père
Te rave ino noa nei â ôe ia ù
Et tu me violes encore
I teie pô...
Cette nuit...
Auê te mamae e te viivii
Je souffre et je suis souillée
To ù metua tane,
O mon père
Te rave ino noa nei § ôe ia ù.
Et tu me violes encore
Ta oe tamahine...
Moi, ta fille...
Tatou rima i ueue
Ce que mes mains ont semé
Ta to ù ia rima e àoti...
Mes mains les cueilleront...
E pai !
Pourtant
E hotu hoi au
Je suis le fruit
No te here metua
De l’amour
Ta to ù metua tâne
Que mon père
I tanu,
A planté
Ta to ù metua vahiné
Que ma mère
I amo
A porté
To ù na metua
Mes parents
Te môrohi nei te hotu
Le fruit se flétri,
Te môrohi nei au.
Je me fane.
M9
■
I
i.eu id
si
■
1
jaisog
LittéRama’OHi tt 20
Lectures - Valérie Gobrait
Vers Reva
le temps est vertige
sous le miroir des cieux
qui sombre est si sombre
vilipender l’azur
ce
vers
la pente Reva
il nous faut nous glisser
sur les
répons en sourdine
la ballade des pendus
on dirait un
un
écho
écho très profond
qui n’appartient qu’au ciel
et au secret de nous
il est bon et si doux
elle ne m’a pas prévenue
de tant de désespérance
tout ce mal être
que je veux mourir
endiguer le fléau
comme au paradis
on ne peut aboutir
qu’en allant voir allons y boire
le mal être la jeunesse
préserver la vie sacrée
j’ai une famille soudée
sans mensonge vilénie
quelle raison espérer
de se recroqueviller
la mort n’est rien
la vie silencieuse
un
à l’abri de l’imposture
deux comas et puis trois
avant la délivrance
je pense à Reva
cachet juste un
il faisait bon respirer
la ballade continue
l’eau de source vive
et villons virevolter en vrilles
la tendresse infinie
les corps amers
51
pîna'i
Dos ier
Voir la vidéo sur : http://www.youtube.com/watch?v=LDdOTDXRko4a:feature=relmfu
LittéRama’oHi » 20
Lectures - Chantal T. Spitz
grâces
notre chemin était parfumé de
pluies d’éternité
je me souviens du chant fou de notre amour audacieux
ma douleur dérange le silence des
pierres
la mélancolie griffe mon corps mort
les mots glissent de mon esprit flétri
et tombent étincelants dans le vide du monde
des rires s’évadent de mes souvenirs
et la lune me murmure un sourire
mon âme est vêtue de
plaies
je ne te quitte pas
je déambule dans le dédale de tes rires
je m’endors dans l’étreinte de mon désespoir
tu es l’étoile la plus brillante de mon ciel
tu es la plus belle écriture de ma vie
tu m’inventes des rêves ailés
je te rends grâces pour tous les bonheurs
53
pina'
Dos ier
Voir la vidéo sur : http://www.youtube.com/watch?v=HbtwijfGWOI&feature=relmfu
LittéRama’oHi # 2D
Lectures - Hitioai Tracqui
Qui suis-je (extrait)
Anita Heiss lue par Hitivai Tracqui
Foyer pour enfants aborigènes de Bomaderry
Jeudi 28 janvier
Bon, je suppose que tu veux savoir comment je suis arrivée ici. C’est que
je ne me rappelle pas grand-chose parce que je n’avais que cinq ans quand on
m’a amenée ici avec mes deux petits frères
Bluey et Busta, ma sœur Betty et
mon cousin Max. Le
jour où nous avons quitté notre vraie famille a été le plus
triste de toute ma vie. Mes tantes et ma mère pleuraient. Maman disait
qu’elle
ne voulait pas
que nous partions mais les hommes en costume ont juste dit que
nous devions aller avec eux. Mes
bébés, mes frères et ma sœur étaient si petits
qu’ils ne se rappellent même pas qu’ils pleuraient, je crois qu’ils avaient peur,
j Je ne sais toujours pas pourquoi on nous a amenés ici.
Bluey, Busta, Max et Betty sont maintenant tous partis dans d’autres foyers
et je n’ai plus entendu
parler d’eux. Ils me manquent beaucoup et, quand ils sont
partis, j’ai pleuré pendant des jours et des jours. J’ai pensé que mon cœur s’était
cassé en plein de tout petits morceaux car mes vrais
parents, mes frères et ma
sœur, étaient alors tous sortis de ma vie. Je voulais partir d’ici aussi parce que je
voulais rester avec ma famille, mais Mère Rose a dit
qu’il valait mieux que je
reste avec elle au Foyer. Je pense à eux tout le
temps. J’espère qu’ils vont bien.
J’ai aussi deux sœurs plus âgées, Margaret et Janie, mais
je ne sais pas où
elles sont et c’est pareil pour mon grand frère James. Peut-être
qu’ils sont encore
avec notre vraie
maman et notre vrai
papa à la campagne. Il m’est arrivé de
poser la question à Mère Rose mais elle a répondu que je ne devais plus jamais
parler d’eux, alors j’ai arrêté de poser des questions. (Mon amie) Marj est un
peu comme une sœur maintenant.
55
Le jour où nous sommes arrivés, nous ne savions pas ce qui se passait. Je
pensais que nous allions en vacances ou quelque chose comme ça, à cause de
ce grand voyage en train. J’étais un peu excitée parce qu’on nous avait donné
des sandwiches et des biscuits. Mais Maman et Papa n’étaient pas avec nous,
alors je ne savais pas réellement ce qui se passait et je me suis contentée de sur-
veiller les petits.
Toutes les sœurs ici sont gentilles mais personne ne nous a jamais dit pourquoi nous étions ici, ni pourquoi nous ne vivions plus avec nos parents. Maman
est venue nous voir deux fois, puis elle n’est plus jamais venue. Peut-être parce
qu’elle était toujours si triste ou peut-être parce qu’elle ne voulait plus me voir.
Je me suis demandé si j’avais fait quelque chose de mal. Elle a beaucoup pleuré
et ça m’a fait pleurer aussi, parce qu’elle m’avait tellement manqué. Ses bras,
ses chansons me manquent. Elle m’apprenait à bien chanter et je chante encore
tout le temps, donc je suis vraiment comme elle. Mais maintenant, quand je suis
triste, Mère Rose me prend toujours dans ses bras et me dit de t’écrire ce que je
ressens, c’est ce que je fais, hein !...
Voir la vidéo sur :
http://www.youtube.com/watch?v=HbtwijfGWOIEtfeature=relmfu
pina'
Dos ier
LittéRama’oHi t* 20
Lectures - Steue Teùrahau Chailloua
E Maôhi
A tau matahiti i teie nei, i to tatou hiô-ino-noa-raa te
parau o te fenua
màôhi, inaha hoi, a hitu matahiti mâiri i teie nei, i to tatou pârahi-noa-raa
i roto i te türoriraa poritita. I roto i teie area
mata i te taupe i nià i te vari hâiriiri
tau, ua tütonu noa to tatou
veoveo, ma tâuà ôre faahou â i te
heeuri e vai i nià i te fenua, e e vai atoà nei i roto i te
paari, e te âau tae
o te nünaa màohi.
E faateni au i teie fenua iti manamana i faariro nâ ia
na.
ù, èi tamarii nâ
Maoti i to na itiraa, e ôre ia e mau i te riro i te rahiraa i roto i to ù âau
màohi, no te mea, ua mau ôia ia ia ù i to na parau, e te faufaa ôtià ore e
vai nei i roto i te navenave 0 te tai e te âminamina 0 te
parau 0 te reo
fenua, te reo màohi. E pehepehe au i to ù nünaa manahune no to na âau
haèhaa e te paari, ôia i haapii mai ia tatou i te ui
püôi, i te parau o te hau
i roto i teie tau ahoahoraa. « Ei hau ! Ei
hau, mea mà !» Eie te parau e
tàvevovevo noa nei i roto i to ù âau, e faahaamanaô nei ia ù
ê, tei io te
nünaa ra te aratià o te faufaa mau.
E màohi ! Oia e ôhi tatou i te hotu mà, e heeuri nei i nià i te fenua.
E màohi ! Oia e ùme tatou i te hotu 0 te miti àuhune.
E màohi ! Oia atoà e ohi mà tatou i roto i te
àpu 0 te Atua.
E faateni au ia na, no te fenua hau e paèpaè nei ia tatou. A
noa ai tatou i
pâinuinu
roto i te mau fenua tîpee o teie ao, e hià faahou â i to tatou
âau, i te mànaônaôraa i te pü-fenua i tanu hia ai i to tatou püfenua. No te
e hono manamana teie e fera nei ia tatou i nià i te paèpaè o to
mea ra,
Âparau taua i te parau o to taua nünaa, ia ôre tatou ia paremo
i roto i te vari. A faariro i to taua nei hoi mau taata, èi tirà no to taua vaa.
taua parau.
Haamanaô faahou tatou ë, tei io te nünaa ra te aratià 0 te faufaa mau
o to taua fenua.
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pina'
Dos ier
Voir la vidéo sur : http://www.youtube.com/watch?v=HbtwijfGWOI&feature=relmfu
LittéRama’OHi m 20
Lectures - fTlareua Leu
Mon père Teriite'ite,
Terii qui sautille
Wilfrid Pina’i Lucas lu par Mareva Leu
Extrait de Une famille polynésienne
La fierté et la chance d’être un « demi »
Tu es un heureux mélange. Tu es né d’un père français, Jean-René
LUCAS, et d’une mère tahitienne Riria MAHUTATUA, originaire de Paea. Il a
fallu que tes parents fassent un voyage en France pour que tu sois né à Paris le
2 Septembre 1889. Tu es un parisien. Tout ce que je sais de ma grand-mère Riria
c’est qu’elle était une grande et belle dame. Le maire de la commune de
Papeete, Tetua Pambrun, m’a dit qu’on l’appelait « Tour Eiffel ». La famille est
rentrée à Tahiti en 1890, après l’inauguration de la Tour Eiffel. Embarquée sur
un bateau à vapeurs, la famille a traversé les deux plus grands océans de ce
monde. Maman nous a raconté que vous aviez traversé une tempête et que le
bateau a failli sombrer à jamais. De qui tient-elle cette information ? Certainement de ta mère. C’est toujours maman qui raconte, toi, tu es silencieux. Tu es
un homme d’action, un pêcheur, un agriculteur. Cela me fait penser à [...] la
question des rapports entre parents et enfants polynésiens. [...] Certains sujets
sont tabous. [...] Je n’ai fait que penser à toi pendant tout ce temps [...]. Tu
n’avais pas le temps de nouer conversation. Tu consacrais toute ta vie à nourrir,
à habiller, à élever tes enfants avec tout ton cœur. C’est là l’essentiel ! Tu parlais
peu, mais le peu que tu disais avait un sens profond. [...] C’est le langage du
cœur qui compte. Ce langage du cœur, c’était avec tes petits-enfants, tes
mo ’otua que tu l’entretenais. Vous vous
compreniez merveilleusement bien.
Teriite’ite’i le silencieux mais qui converse facilement avec ses mo ’otua, Terii
pina'j
Dos ier
LittéRama’OHi # 2a
j
Lectures - (Tlareua Leu
qui sautille mais qui marche, qui plante dans la journée. [...] Bien souvent, dans
l’après midi, on te voyait préparer ton attirail pour la pêche : hameçons, plumes
d’oiseau... Je me souviens surtout du fil, du ‘anavae qu’il fallait tirer pour faire
le tour de plusieurs cocotiers pendant que tu l’enroulais, assis à même le sol,
autour d’un morceau de bois, confectionné et artistiquement taillé avec cœur,
adéquat pour l’utilisation que tu en faisais. Le nylon n’avait pas encore fait son
apparition. Le poisson que tu rapportais à la maison prouvait que tu étais un
excellent pêcheur. [...] Tu es né dans la plus belle ville du monde, la ville de
lumière. Tu as vécu dans la plus belle île du monde. [.. .jComme dans la chanson, tu as deux amours : ton pays, ton ferma et Paris. Ils étaient en parfaite harmonie. Ils étaient'intimement et naturellement liés. [...]
Au fur et à mesure que je grandissais, je découvrais tes qualités humaines.
Né aux antipodes de nos îles, d’un père français et d’une mère tahitienne, tu as
aussi été élevé par un chinois de la presqu’île. Tu as perdu ton père alors que tu
étais très jeune. Tu nous as parlé de ce père nourricier avec respect. Oui, tu as
gardé en ton âme les qualités de tes trois origines. Il n’y a pas que les liens du
sang qui forgent le caractère de l’homme, mais aussi ceux de l’affection, de
l’amour. [...] C’est cela la Polynésie profonde, pluriethnique, humaine. C’est
un art de vie. Une composition florale
qui allie les formes et les couleurs avec
harmonie.
[...]
Parmi tant de souvenirs que j’ai de toi, il en est un qui me tient particulièrement à cœur. Il m’arrivait de t’accompagner à Afaahiti, sur la terre de maman,
à bord de notre petite Citroën sans toit avec son klaxon « pouêt pouêt » en
caoutchouc. Côté mer, il y avait des maiore. A côté de ces grands arbres jaillissait du sol une petite source d’eau claire. C’est là que tu nous as construit une
petite cabane [...] en ni ’au. Tu ralentissais toujours à hauteur de la cabane pour
voir si un habitant du district ne cueillait pas de uru. S’il était là, alors tu continuais ta route. Nous nous arrêtions plus loin au bord de la mer et tu me racontais
des histoires. Tu citais le nom des vallées qui s’enfoncent à l’intérieur de la
presqu’île [...]. Tu n’oubliais jamais de situer les lieux de pêche où le poisson
abondait. [...] Tu connaissais cette presqu’île du bout des doigts. Chaque pierre
avait son histoire. Aussi t’étais-tu lié d’amitié avec Raiarii, le chef du district de
Tautira. C’est auprès de lui que tu as appris l’histoire de notre belle presqu’île
de Taiarapu. Au bout d’une heure, tu me disais : « Ua oti, il a fini ». Au retour,
à la petite cabane de Afaahiti, nous trouvions, devant l’unique porte d’entrée,
deux paquets, deux peeta de uru, soigneusement préparés, choisis certainement
panni les meilleurs que l’homme, l’inconnu pour moi, a cueilli.
61
Je n’ai jamais su qui il était. Tu me disais : « Il a une famille nombreuse et
c’est leur pain quotidien ». [...] Ton cœur de vieux tahitien, de vieux pêcheur,
guidait ton comportement. Le mea ha ’ama, [...] t’empêchait de t’arrêter et de
gêner ce père de famille et d’être gêné toi-même. Le tahitien, du moins à cette
époque là, avait ce tact, cet art de vivre.
[...]
pira'n
Dos ier
LittéRama’oHi # 20
Lectures - Isidore Hiro
Reo iti pinainai
Iaù i taravarava
noa
I raro aè i te marumaru 0 te tumu hotu ra
Fanao noa ai, oaoa noa ai e hutihuti noa ai
I te matai puvaivai rahi o te âho ôra nei,
Inaha, e reo iti pinainai mai ra
Taù i faaroo, i te parau riiriiraa mai iaù e
E tenâ na...te âha na oe....
Hitimahuta iho nei aü e te uiui maere e,
Eaha râ hoi teie taù e faaroo nei....
Parahi mai nei, fariuriu aéra,
E nevaneva haere noa iho ra i te taa ère
I te mea e, aita nei ra....
Opua iho nei au i te pahono riirii noa atu e :
O vai râ oe e parau mai nei....
Taua reo iti pinainai faahou mai ra,
I te tâvevovevo rahiraa mai e :
A tià....ua navai tenâ
A hume i to maro-ùra, te tono nei hoi âu ia ôe
Ahitahita roa aéra âù manava e te panaônaô rahi e....
E tono....e tono....i hea....no te âha....
I reira ra, taa iho nei iaù....
E reo iti haihai atu ra toù i te pahono riiriiraa atu e....
E tenâ na, a parau noa mai
Te faaroo atu nei to tavini.
S3
pîna'i
Dos ier
LittéRama’OHi 8 20
Lectures - Isidore Hiro
Taua reo iti pinainai nei â
I te parau ônoônoraa mai iaù e....
E haere ôe, e e parau atu ôe
I toù nunaa iti mâôhi e....te parau mai ra
O TE VAI NA....O TE VAI NEI....E O TE VAI À
A here i to ôe fenua
la here hoi ôe iana ra
Ua here mai ia iaù
E o tei here mai hoi iaù ri ra
Ua here ia iana iho
O te ôra iho ra ia.
Oia nei....o VAU nei ia....
Tiàoro rahi atu ra vau e....
E ia ôre noa atu ratou e faaroo mai iaù ra....
Nafea iho nei au....
Taua reo iti pinainai faahou mai ra
I te faaitoitoraa mai iaù e....
Naù tenâ....ta ôe o te parau noa atu
la parau hoi ôe râ ra,
E ôra ia ratou e ôe atoà iho.
la ôre râ ôe ia parau,
E pohe ia ratou e ôe atoà iho.
la parau râ ôe,
Ore noa atu ai ratou
E faaroo mai ia ôe ra
E pohe mau à ratou
Ua ôra râ ôe ia ôe iho.
la here ôe i to fenua ra....
Ua here ia ôe ia ôe iho....
Ua here ia i te Atua.
B5
pina'
Dos ier
Voir la vidéo sur : http://www.youtube.com/watch?v=QKbBHGSZkiM&:feature=relmfu
LittéRama’oHi # za
Lectures - Flora Deuatine
Mon 'Ora
Charles Teriiteanuanua Manutahi Lu par Flora Devatine
Toi qui me contemples en silence,
Toi qui tires ta vie là où tu veux,
Ici dans le calme de ces lieux,
Aide-moi, donne-moi de ta science.
L’affliction, les passions, me déchirent
Et la folie obscurcit mon esprit.
Revenant vers toi, je me fais petit.
Vers l’enfance où fusaient les rires.
Viens mon enfant, Viens, Viens donc à mes pieds
Moi qui te donne chaque jour la vie,
Pourquoi donc m’as-tu quitté mon petit,
Car tes pères avaient mon amitié.
Viens car je baisse mes branches pour toi.
Prends mes bras et tu comprendras la vie.
Prends, bois à ma source jamais tarie,
Garde tes racines garde la foi.
te ‘ora: le banyan
67
■
Cf
-
.H
B
Pehe rauti
Poème d’exhortation
Pi’i te pi’i noa ra
Version de compréhension du poème d'exhortation
Des appels, des cris s’élèvent : Grimpez ! Grimpez ! Faites l’ascension !
Oh ! Les grimpeurs !/Jeunes gens forts et vigoureux !/Le chemin vers le
fort de la vie sauve est là dressée devant tous !/Allez ! Grimpez ! Grimpez !
Faites l’ascension !/Jusqu’à Te Anavaharau, «La grotte aux multiples enseigne-
me«A»/Jusqu’à la falaise-arc-en-ciel sacrée de la sagesse !/ Creusez, extirpez
les racines qui germent !/ Partez à la récolte des fruits qui fécondent !/A l’ouvrage ! Soyez courageux !/
Oh ! Les « Pi’imato » forts et vigoureux 1/Tressez vos cordes !/Raccommodez vos cordes !/ Attachez vos cordes !/ Il faut de la corde au souffle !/Fabriquez vos cordes ! /Filez, roulez les brins de vos cordes, ressentez vos
fibres\/Tournez, tordez les cordes 1/Attachez vos cordes !/Et cramponnezvous... à vos cordes-diplômes !/Enfilez-en ! Le souffle... est la corde pour s’y
lancer, se balancer, et avancer !/
Allez ! Grimpez ! Faites l’ascension !/De la falaise qui se dresse vers le
ciel !/De la falaise en surplomb qui tombe à pic !/En creux du ciel qui
pend !/Allez, bondissez, et envolez-vous, cramponnez-vous avec vos pieds
agiles !/Utilisez la force de vos bras !/Usez de vos mains généreuses !/Des
mains qui exultent !/Afm que l’amour se répande par tout le pays !/
La falaise y répond en accrochant à elle tous ceux qui s’y lancent !/
i.eu id
V—1
jaisoQ
LittéRama’OHi « 20
Lectures - Flora Deuatine
Ô ! Cris d’excitation ! Vives exhortations ! Quelle explosion de joie ! Dans
à corps //Les petites chevrettes transparentes collées à la falaise au
pied des cascadês/Se mettent à bondir, à rebondir !/Elles sautillent sur la terre
ferme !/ Elles rampent sur la falaise à pic, tels de jeunes lézards !/Ô ! Elles s’y
suspendent joliment !/Tels des « oro » ! Petits bouquets délicats de fines fleurs
variées de la vallée, à porter à l’oreille !/Tels de jeunes lézards en fleurs !/ C’est
là un « piri », une énigme, « te Piri o Te Pari Mata’uta’u» ! La Falaise qui fait
tant peur aux apprentis-grimpeurs !/
ce corps
Ô ! Cris d’excitation ! Vives exhortations ! Quelle explosion de joie ! Dans
ce corps
à corps //Les grimpeurs volent vers la falaise aux perruches à plumes
rouges !/Ils tentent d’atteindre le sommet dans le vaste ciel !/Ils volent vers la
source de «Vai’ite» ! «Source du savoir » au
fumet d’abondance de nourriture
étalée au soleil !/Vers la source de lumière qui jouxte la terre riche de
«Ma’ara» !/
N’ayez crainte ! Là-haut, grimpeurs, vous trouverez des provisions de
!/Du cochon !/De la bonne
route,... ! Vous y trouverez de la nourriture
chair !/Allez ! Formez convois !/Ramenez tout cela vers la côte !/ Efforcez-
!/ Nourrissez votre conscience, vos émotions //Faites
jubiler vos entrailles !/
Et vous, jeunes gens, vous, « te fa’ataratara mou’a», les petites cimes de la
montagne, célébrités et louanges de votre pays !/ Vous êtes, «te tara o Mai’ao» !
Le sommet, et la fierté, de la montagne Mai’ao ! Vers laquelle constamment
garder son regard tourné, et à laquelle, sans cesse, se mesurer !/ Vous êtes, « te
paripari o te fenua », Falaise et Poème de la terre, chant «élevé» pour célébrer
la terre et le pays !/ Vous êtes, « te tara i’ei’e o te maire rau ri’i», Elégantes et
odorantes pointes de la plus fine espèce de fougère «maire» ! Vous êtes, enfin,
te «Tara Unu o te ‘ai’a», Bois sculptés et enchantés, Fleurons de la couronne du
pays !
vous
et Encouragez-vous
Aussi
encore une
fois/A Fa’atoa i to Manava !/Faites jubiler vos
entrailles !/Efforcez-vous et Encouragez-vous ! Nourrissez vos émotions et votre
conscience 1/Afin que du pays, et avec justesse, l’on dise, en affirmant ces
mots /Le Pays est Peuple, Habité d’Honnêtes Hommes !/N’ayez crainte ! Là-
haut, vous trouverez des provisions de route,... ! Vous y trouverez du cochon !/
De la nourriture !/ De la bonne chair !/Allez ! Entrez !/
Entrons ! Dans «la grotte aux multiples enseignements» !
B9
pina'î
Dos ier
Voir la vidéo sur : http://www.youtube.com/watch?v=QKbBHGSZkiM8:feature=relmfu
LittéRama’OHi #20
Lectures - Flora Deuatine
Pi’i te pi’i noa ra :
E ‘a’e ! E ‘a’e !
Te mau pi’imato / Te mau taure’a matuatua / Ua tu te ‘e’a / O te pa
ea
! / Ua tu ! / E‘a’e ! E
‘a’e ! /1 te Anavaharau, /1 te mato tapu tea 0 te ‘Ihi / E heri i te a’a
e
tupu / E tomo i te ma’a e hotu
A rohi ra ! /
E te mau pi’i mato matuatua ra / E firi i te taura / E tifai i te taura /
E feti’i i te taura / Te’ie / E
nino i te taura / E taviri i te taura / E ta’amu i te taura / Tuitui / E
tapi’i... i te taura tu’ite / E aho
...
te
taura ta ! /
E ‘a’e ! E ‘a’e ! / Na te mato tafare / Te mato toreva / O te ra’i
maruarua / Ma te
tapi’i rere Ma to rima puai / To rima puhara / Pu hura
.
/ la tautau te aroha /
Aue ! E fete e fêta ! / Te ‘oura ‘onana pirimato / Ua mahuta / Ua
patifenua / Ua ne’e a mo’o i te mato tarere / Aue ! Ua tarere ‘una’una /
Ua tautau a oro / Ua tiare roa hia te mo’opuapua / Te piri o te Pari
mata’uta’u ra /
E fete e fêta ! / Ua rere te pi’i i te mato ‘a’a’ura / Titau i te tupua’i o
te ra’i tua ta’a / Ua taurere i te puna Vai’ite /
Ua taurere i te vai marama
/ Tapiri i te fenua 0 Ma’ara /
‘Eiaha e mata’u / Tena te pua’a / Tena te ma’a / Tena te ‘ina’i / A
tutari ra / A tutai / A Fa’atoa i to Manava /
E te mau tamari’i fa’ataratara mou’a / ‘Outou te tara o Mai’ao / Te paripari o te fenua / Na tara i’ei’e o te maire rau ri’i / Na Tara Unu o te ‘ai’a /
E teie a / A Fa’atoa i to Manava / la tupu e la tu te parau ra e / Ua
ta’atahia te fenua / ‘Eiaha e mata’u / Tena te pua’a7 Tena te ma’a / Tena
te ‘ina’i / A tomo ra ! /
Tomo ana’e ra !
Flora Devatine (l°déc 1994)
(extrait du texte d’inauguration du Lycée Pômare IV, Publié dans Pornarescope)
LittéRama’oHi » 2D
Clothilde Grand
59 ans, est mariée à Simon Grand
depuis 1974. Elle est mère de trois
enfants :-Moeava 34 ans, Vaitea 29
ans, Heinarii 24 ans et grand-mère
de deux
petites-filles : Moehei
11 ans et Teavai 4 ans.
«
Des
maux »,
mots
pour
prévenir les
voilà son message comme
écho à « Des mots pour soigner
les maux » de son très cher ami
un
Patrick Amaru.
Amour - Ire
L’on me disait que j’étais belle. Moi, je ne me trouvais pas belle. Alors, je
faisais tout pour être belle.
Un immense escalier avec des marches interminables séparait nos deux
classes. Lui en bas. Moi en haut.
Tous les matins, je montais, les yeux fixés, jusqu’à ce que nos regards se
rencontrent et que nos visages s’éclairent, à l’unisson.
Lors qu’il avait le temps, il se précipitait pour me faire deux bises, chastes,
qui extasiaient mes journées.
Mon début d’année de lère fut rythmé par ce rituel qui commençait plus
tôt, lorsque je m’habillais. D’un uniforme. D’une jupe bleue plissée un peu plus
courte. D’un haut blanc un peu plus moulant. Pour qu’il me repère, moi, la plus
belle d’entre toutes les autres.
Jusqu’au jour où, deux bras posés sur mes épaules, des yeux d’une couleur
bleu acier intensifiée par des verres cerclés de métal, une voix suave et mielleuse
me dirent :
« Nous t’estimons
beaucoup. Nous avons confiance en ton avenir. Ce gar-
çon n’est pas celui qu’il te faut. Nous avons décidé de vous interdire les moin-
dres contacts au sein de l’établissement... »
73
Je l’avais connu à un endroit improbable. Sur une plage dont je foulais le
sable noir pour la première fois. Il m’a vue. Il s’est approché. Il m’a accrochée.
Je ne lui ai pas vite donné mon cœur. Je lui ai d’abord donné mon corps...
puis mon cœur. Puis ce fut mon être tout entier, mon corps et mon âme, qui fut
happé dans une descente aux enfers vertigineuse.
Je me demande encore comment mon cœur n’a pas explosé sous les coups
de boutoir d’une mort lente.
Le manque de lui. La jalousie. La crainte qu’il ne m’abandonne pour une
autre, plus belle que moi. Me laissaient pantelante. A l’agonie.
Je priais souvent Dieu pour qu’il apaise mon cœur et qu’il le fasse battre,
normalement, comme on entend battre le cœur d’un bébé à l’échographie.
Aujourd’hui, l’on me dit que je suis encore belle pour mon âge. Moi, je ne
toujours pas belle. Mais, dans mon corps de mère et de grand-mère,
je me dois d’être belle pour que l’on m’aime encore et toujours.
Lui ne m’a jamais dit et ne me dira jamais que je suis belle.
me trouve
De quel mutisme sont-ils affligés ?
Savent-ils les blessures infligées ?
Ceux qui ne peuvent pas dire. Ne serait-ce que murmurer. Ou bien même
susurrer.
A une sœur
A une amie
A une amante
A une épouse
A une mère
A une fille
A une grand-mère
A une mo’otua
« Oh
! Que tu es belle ! »
Car lui dire « Oh ! que tu es belle ! » n’est-cé pas lui dire aussi « Oh ! Que
je t’aime ! »
libtérrae
Création
LittéRama’OHi 8 20
Clothilde Grand
Bêtes malfaisantes
Mon enfant ! Regarde ! Les empreintes sont là. Enchâsse tes pas dans ces
écrins précieux ! N’aie pas peur de chanceler ! N’aie pas peur de trébucher !
Pose un pied ! Puis l’autre ! Voilà ! Suis la cadence ! 1,2, 1,2...
Maintenant, libère-toi ! Ton corps et ton esprit se font écho. Invente les
! Ecris la chorégraphie pour faire danser tes
mots pour faire danser ton corps
mots !
Danse ta joie ! Danse ta peine ! Sans censure. Ni tabou.
Le corps se fige
Quelle est cette bête malfaisante, qui de ses liens invisibles, emprisonne les
esprits et marionnettise les corps pour empêcher leurs pas de fouler, d’érafler et
de craqueler les vernis de nos tahua ?
Mon enfant ! Que de parchemins à décrypter ! Prends ton courage à deux
mains ! Pose ton doigt ! Et, de mot en mot, de ligne en ligne, dans des va-etvient incessants jusqu’à écorner la page, apprends les mondes. ! Jusque dans
leurs moindres failles.
Ton front se plisse, tes yeux se voilent, ta tête est pleine.
Maintenant, lâche ! Attrape les lettres ! Fabrique des mots ! Et, à ton tour,
raconte ! Raconte ! Jusqu’à en perdre le souffle.
Le corps se fige
Quelle est cette bête malfaisante qui, de ses liens invisibles, scelle les
lèvres, menotte les mains pour empêcher les doigts de graver les sillons nourriciers sur ces terres étendues, vierges, désolées d’avoir été oubliées ?
La voix crie
Bêtes malfaisantes ! Gavées de fatuité. Vous qui écrasez les rêves de nos
enfants ! Recroquevillez-vous ! Enfermez-vous dans vos cocons mités ! Laissez
les chrysalides déployer leurs ailes pour consteller, de leurs arabesques, notre
ciel ma ’ohi !
Oraua Guénin
‘Ua na te lVloana nui ‘o Hiva,
‘ua nâ te tai hiti-tautau-‘ore...
E te huimana ë, Maeva,
E tô tei iti o te mana, tô tei rahi o te mana, Mânava ‘e ‘ia ora
‘la ora ‘e mânava ia ‘oe
e te nüna’a rau nô
‘Oteania
Mânava ‘e ‘ia ora ia ‘oe e te nüna’a hau nô Patitifa.
Maeva ia ‘oe e te nüna’a nô te ara moana,
Nô nà poro e hâ o te ao mâ’ohi, fari’i mai i te tâpa’o o te aroha,
‘la ora, mânava ‘e maeva iâ ‘oe e Pôrïnetia nui.
Tâtou pau roa tei rum mai i teie mahana,
Enâ atu te mânava !
E roa’a ânei ia ‘u i te fa’ati’a atu ia ‘outou nô hea mai tô’u hïro’a tumu ?
E ti’a ânei ia ‘u i te vauvau atu i mua ia ‘outou te tuatua fa’ahiahia o te
iho tumu mâ’ohi ?
‘Ë paha.
‘A fari’i mai Ta i teie reo iti pehepehe, ‘ôrero fa’atara i tô’u mau tupuna.
I te maruao rerureru o te ‘anotau nô tahito ra
I raro a’e i te mau hihi matameha’i o te râ,
I roto i te muhu-’ore hauriri’a o te moana nui mâuriuri,
Të fano ra te va’a tau’ati o tô’u hïro’a tumu,
Të he’e mai ra te pahï nui o tô’u mâ’ohira’a,
Të tahirihiri mai ra te tira o tô’u te’ote’ora’a.
libtérrae
Création
LittéRama’OHi tt 20
üraua Guénin
Mâta’i maoa’e ho’i teie e puhi nei,
Fa’a’eta’etara’aîa i te ‘ie ‘a’ano o teie va’a tupuna,
Fa’atôra’a i te firi nape mutu-’ore o teie va’a metua
Niupapa ho’i nô tô’u nüna’a ta’ata,
Fa’ahiahiara’aïa nâ tô’u nüna’a ora.
‘Ua nâ te Moana nui ‘o Hiva tô’u iho tumu i te ta’ita’ira’ahia mai,
‘Ua nâ te tai hiti-tautau-’ore tô’u hïro’a tumu i te hôpoira’ahia mai,
‘Ë pa’i !
‘Auë ho’i te itoito ‘e te püai fa’aau-’ore-hia o teie mau ‘ihitai
‘Auë ho’i te onoono ‘e te mana’o hi’a-’ore o tô’u mau tupuna
i mua i te puai hope o te nâtura.
‘Auë ho’i te itoito mâhere-’ore o tô ‘u mau tupuna i te mana’ora’a ë :
E reva ! E fano ! E tere i te vâhi àtea !
E pôfa’afa’a hâere i te mau fenua ‘ômo’emo’e he’euri o te ao mâ’ohi.
Tere ‘imira’a i te ora hau, fa’atupura’a i te ora hou,
Tere ‘imira’a fenua, ha’apüra’a ïa nâ te u’i hou.
Tere ha’apararera’a i te toto, te reo ‘e te peu mâ’ohi,
Tere ‘imira’a Ta i te vaira’a püfenua nâ tô hua’ai.
‘Ua nâ te Moana nui ‘o Hiva tô’u iho tumu i te ta’ita’ira’ahia mai,
‘Ua nâ te tai hiti-tautau-’ore tô’u hîro’a tumu i te hôpoira’ahia mai.
‘E pa’i!
‘Auë ho’i te ‘aravihi ‘e te ‘ite ta’a ‘ë o teie mau ‘ihitai
tei tïpae i terâ ‘e terâ motu nâ roto Ta i te ‘apora’a i te mau tâpa’o huru
rau o te
aru-tai-mâ-reva,
Nâ roto i te ‘âpe’era’a i te ‘una’una ‘e te ‘ânapanapa o te mau feti’a rau
o te
ra’i,
Nâ roto i te aurarora’a i te fa’auera’a a te ‘ôpape
a te Moana
‘e te mau peu hau-’ore
nui,
Nâ roto i te tütonu-tu’utu’u-’ore -ra’a i te mata i ni’a i te mau tara mou’a
o te fenua.
‘Ua tâpae, ua tïpae, ua tae !
77
‘Ua fafati huanane te ‘are’are ri’i teatea o te tai i te ‘ao’ao ô te va’a,
‘Ua vâhihia te nïnamu mitimiti o te ava i te tirio pâutuutu o tàua va’a nei,
‘Ua mure te reimua va’a i roto i te one pâpâmarô o te fenua ‘âpï.
‘Ua manuia te tere, ‘Ua oti te he’era’a,
‘Ua ora ïa tô’u mà’ohira’a !
‘Ua nâ te Moana nui ‘o Hiva tô’u iho tumu i te ta’ita’ira’ahia mai
‘Ua nâ te tai hiti-tautau-’ore tô’u hlro’a tumu i te hôpoira’ahia mai.
‘Ë pa’i,
‘Auë ho’i ‘outou e tô’u mau tupuna nui ë,
I mana’o ho’i ‘outou ë, ‘aore e faufa’a tô te hô’ë fenua tanu-’ore-hia,
‘Ua tari ato’a mai ‘outou i te mau râ’au hotu huru rau o te fenua e rau
noa atu â te hotu.
I ‘ite ho’i ‘outou i te faufa’a mate-’ore o teie reo iti pehepehe,
‘Ua fero ‘outou ia na i ni’a i te ivimo’o pi’o-’ore o te mëhara mâ’ohi.
I po’ihia tô ‘outou hlro’a i te pa’ari tumu o te ora mâ’ohi
‘Ua ta’ita’i ato’a mai ‘outou i te hanahana o tô’u hïro’a tumu.
I ora ho’i ‘outou i te hô’ë orara’a niuhia i ni’a i te ‘ite nui o te tupuna
‘Ua ‘ôpere nounou ‘ore ‘outou i te reira ‘ia ora te mou’a ‘ura o te ‘ihi
mâ’ohi,
‘la pura te ‘una’una o tô’u mâ’ohira’a !
‘Ua nâ te Moana nui ‘o Hiva tô’u iho tumu i te ta’ita’ira’ahia mai,
‘Ua nâ te tai-hiti-tautau ‘ore tô’u hlro’a tumu i te hôpoira’ahia mai.
‘E nâ poro e hâ o te ao mâ’ohi, e ‘ore roa Ta teie tere fa’ahiahia e ‘ara-
moinahia.
‘E nâ te Moana nui ‘o Hiva, e ‘ore roa ïa te toto o tô’u mau tupuna e
mou.
‘E ‘atiti’a a’e i te mau motu rau o tô’u nei ‘âi’a, e ‘ore roa ïa te reo o tô’u
nuna’a e mutu.
‘E i te âtea ‘ë roa o te ao mâ’ohi, e ‘ore roa ïa tô’u mâ’ohira’a e mate !
‘la ora, manava ‘e maeva !
litbérrae
Création
LittéRama’oHi tt 20
(Tiataa'ia'i Itchner
Origines entremêlées depuis l'île Emeraude et les hauteurs de Stafa jusqu'à
Huahine la magi-gnifique et Raiatea
la majestueuse... Richesse d'une vie
trépidante-trébuchante si généreuse...
Un prénom lourd de sens qui, avec le
temps, s'est heureusement mué en un
don, celui d'observer ; combiné à ditférentes fibres innées, j'en ai tiré des
interprétations éclectiques...
Force physique
Un père, force de la nature,
L’affect ne suit pas.
Nature violente contre
Emotions réfrénées,
Homme-garçon-enfant,
Ta force physique est-elle
Etouffées jusqu’à l’explosion
Si lourde à vivre ?
Verbale-physique-mentale.
Garçon-homme juché sur
Sa force-beauté physique,
Contraint de plaire,
Plaire à tout prix,
Prix d’une enfance gâchée ;
Trop tôt sevré, ou pas assez.
Homme-garçon en stagnation,
Peur des responsabilités,
Décalage entre deux maturités,
Si pesante que tu aies besoin
De la sentir-voir-laisser
Se déchaîner pour te retrouver ?
En face de toi, toujours,
Tu trouveras une femme-fille
Qui te renverra à... ta mère.
79
(Tloeaua Grand
Professeur d'anglais de métier, Moeava
Grand s'intéresse davantage à sa culture polynésienne lorsqu'elle intègre en
2010 un comité de rédaction pour le
lancement d'un magazine local qui a
pour principal thème le Heiva i Tahiti.
Ensuite, elle devient membre de Littérama'ohi et participe à la promotion
des auteurs autochtones.
libtérrae
Création
L'indifférence nuit gravement
à l'humanité
On est toujours trop quelque chose et pas assez autre chose, on voudrait ou
on devrait être moins ceci et
plus cela, ou inversement - on ne sait même plus dans un monde où le regard et la pression des autres nous rend interchangeables
à condition de ne rien vouloir changer. A force de vouloir être quelqu’un tout en
ressemblant à tout le monde, non seulement on ne sait plus qui on est, mais on
n’est vraiment plus personne. Les fous d’hier sont les héros d’aujourd’hui, mais
dans notre frilosité incurable malgré la chaleur qui brûle nos entrailles, on considère les héros d’aujourd’hui comme les fous d’aujourd’hui. On attenddésespérément un héros sans nom, on regrette ceux du passé qui ne seront plus
puisqu’ils ont déjà été, on espère ceux d’un avenir incertain, mais on ne fait rien.
On se trouve des excuses et des «oui mais» pour ne pas avoir à dire non, on
enfouit la lâcheté sous une carapace d’impossibles, on déplore les injustices
mais on reste impassible. Si par malheur l’une de ces injustices venait à nous
concerner, on s’insurgerait alors de l’inaction des autres. Dans la course à la
reconnaissance d’un soi on piétine son voisin, on se galvanise de la moindre
fugitive gloriole inutile, on se nourrit des cauchemars des autres mais on garde
ses propres rêves secrets, on rabaisse au lieu d’élever, on oppresse de peur d’être
LittéRama’OHi » 20
fTloeaua Grand
opprimé, on méprise et on ignore pour ne pas donner, on conjugue avoir plutôt
qu’être, on oublie d’aimer. La générosité attire les parasites, la sincérité rend
vulnérable, dire ses doutes demande du courage, alors on préfère laisser l’indifférence tuer l’humanité à petit feu, en culpabilisant chaque jour un peu moins.
Finalement, à bien y réfléchir, ce serait tellement plus simple d’être soi-même,
avec ses trop et ses pas assez, de pouvoir se
regarder dans une glace en s’acceptant tout en sachant qui on est, ni plus ni moins que quelqu’un d’autre,
juste
idéalement le meilleur de soi-même, pour apprendre à aimer chaque jour un peu
plus.
■
81
La Pierre de Lumière
L’âme assoiffée de Lumière,
De Savoir et d’Univers,
De cet amant éprise, dans l’ascension
Se met à nu, laisse parler son désir,
Sans tabou, sans rougir ni mentir,
A lui, elle s’abandonne avec passion.
Des lames d’enfants,
Des lames de sang,
Elle remonte le Temps,
Pour aller de l’avant,
Pour laver les offenses,
Alléger les souffrances.
Qu’importe la maladresse,
De cet amant-tendresse,
A force de caresses,
Ils atteignent l’ivresse,
Et au sommet de l’extase,
Gît la magique ardoise.
De ces signes gravés
En des temps reculés
Par des âmes oubliées,
Elle apprend la Vérité :
Formules de la Connaissance,
Symboles de sa Renaissance.
litbérrae
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LittéRama’oHi » 20
iïloeaoa Grand
Une terre, un peuple, un homme
Parle-moi de ta terre, de ton pays
Parle-moi de ton peuple, de sa vie
De sa mémoire, de ses oublis
Dis-moi l’âme de ton pays.
Parle-moi des étoiles, du ciel au crépuscule
De la force du soleil et de l’éclat de la lune
Des montagnes, des plaines et des dunes
Qui se dressent, s’étendent et ondulent
Raconte-moi le souffle du vent
La pluie, les torrents
Les soubresauts de la mer
Les lacs, les rivières
Explique-moi les croyances
Les paix les violences
Les dieux les héros
Les hommes et les mots
Enseigne-moi le courage
Les joies les victoires
Les défaites et les rages
Les peines et les espoirs
Montre-moi les chemins de traverse
Qui mènent aux forteresses
Murmure-moi au creux de l’oreille
Les mille et une merveilles
Fais-moi toucher les formes, les couleurs
Partage-moi le secret du bonheur
Et dans un ultime corps à cœur
Fais-moi goûter toutes les saveurs
Celles de ton pays
Et les tiennes aussi.
83
UfH Diana Kakeahu (Tlao - ITIataoa
libtérrae
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Te Mara'ara'a miti
Mai te tau a u’iu’i mai â a rahu ai te Atua
I te ao e na tâne e vahiné matameha’i
Ua ‘ï te fenua i te mau maita’i ato’a
O ta te Tumu nui i poiete no te maita’i e te ‘oa’oa o te ta’ata nei.
Ua ti’a te mau mou’a
Ua piha’a te mau vai puna
Ua taha te fenua
Ua horo te mau pape anavai
Ua pâhe’e i te muriavai
Fârerei a’e ra tô uta i tô te tai
I one ai tô tahatai, ‘outu ai tô tai
Ua ‘aere te mau hum ‘animara ato’a
Mai ni’a roa e, e raro roa.
Te mea ne’e haere na raro i te fenua
Te mea haere na ni’a i te fenua
Te mau manu e rere nei na te reva
Te mau i’a e vai nei i raro a’e i te Moana Nui a Hiva
LittéRama’OHi it 20
Diana Hakeahu (Tlao - ITlataoa
Tô te fenua faufa’a, maoti ra tô na repo
Maoti ai ‘oia i hotu ai te mau mâ’a maita’i ato’a
A tanu ai te mâ’ohi i te pü fenua nô nara
‘Oia ho’i te vahi i reira ‘oia i fanauhia ai.
Tô te tai faufa’a, maoti ra te mau huru i’a e vai nei i roto ia na
Te mau i’a rarahi e te mau mea ri’i.
Ua horo te i’a, e pârava ia i te ‘üpe’a
I he’euri ai fenua
Hotu ato’a ia fenua
I taha ai tai
Nana ato’a ia te i’a i reira.
I topa ai te i’oa o Tahiti nui mâre’are’a
E ua rau te ‘oto o te manu
Tei roto i te arutaimareva te mau maita’i ato’a
O tâ te mâ’ohi e hia’ai nei no tô na orara’a.
I parauhia ai e fenua nounouhia teie e te mau râtere o teie ao
I tera ra tau, e mea nahonaho maita’i te parau o te orara’a va’a mate’ina’a
E mea tura te parau o tâ te mau ra’au e fa’ahiti ra
Tô te râhui, e mea tapu te reira
Tô te taimara, e mea tapu ato’a te reira.
Teie te huru orara’a 0 te mâ’ohi, e fenua ha’amaita’ihia te reira
E .‘ere i te fa’ahiahia nei.
Tae a’e ra i te hô’ê mahana, ua taui te tau e ua nu’u te mau ‘ohipa ato’a
i te hô’ë faito teitei :
He’e te tau, ua tipae mai te mau papa’a matamua
He’e te tau, ua tupu te mau tama’i
He’e te tau, ua tae mai te hô’ê fa’aro’o ‘api
He’e te tau, ua fa’ahemahia te mâ’ohi e te mau tao’a ‘âpl a verâ ma
He’e te tau, ua ‘ape’e te mâ’ohi i te huru, te reo e te peu a vëtahi ‘e
He’e te tau, ua huehue te orara’a o te mâ’ohi
He’e te tau, te ta’a ‘ore nei te mâ’ohi i tô na iho parau
He’e té tau, ua mou te parau o te orara’a a tô tahito ra
85
He’e te tau, ua mo’e i te mà’ohi i te ‘itera’a
No hea mai ‘oia ?
O vai ‘oia ?
•
E te haere nei ‘oia i hea ?
Ma’iri iho nei te mà’ohi i te fa’aherehere i to na iho parau
Ma’iri iho nei te u’i ‘àpï i te fa’aiho fa’ahou à i tô na reo
Ma’iri iho nei te mau metua i te ha’api’i ato’a atu i ta râtou mau tamari’i
Ua ‘ere ia fenua i tô na parau
Ua ‘ere ia fenua i tô na nuna’a
Ua ‘ere ia fenua i ta na mau tamari’i.
E fano ti’a atu i na ta’a motu e pae e ‘aua ha’atihia râ e Moana Nui a
Hiva
Ua rau te mau tuha’a fenua
Terâ fenua tô na parau e terâ fenua tô na parau
Te vai râ te mau fenua e mou’a tô ni’a iho
E te vai râ te mau fenua e ‘aore roa atu
E parauhia râtou te mau motu no Tuamotu mâ
E mau motu ha’iha’i roa ‘ino
‘Aita ra te reira faito e rava’i no te tâpe’a i te mara’ara’a o te miti
Tae mai ai i teie mahana, e ‘ere tena parau i te hô’ë parau huna
Ua fa’ahiti ’e na te reira e te mau ‘aivana’a e tuatâpapa nei te parau no
te reva
Ua ‘atutu te parau e te vai râ te tahi mau fenua o tei mo’e roa i raro a’e i
te miti
E au ra e, e riro te tahi mau fenua mai te mau motu no Tuamotu mâ i te
mo’e ato’a.
No reira, te pi’i atu nei te fenua i te mâ’ohi ia mata ara i te reira
Nô te mau ‘aivana’a, te vai râ te mau tumu
E ‘ere teie mau fa’ahuehuera’a natura i te mea tupu ta’ue noa mai terâ
E aha mau à te tumu ?
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LittéRama’oHi s 20
Diana Makeahu fTlao - iTlataoa
Te tumu matamua roa ‘ino, te ta’ata iho.
E mea pâpü maita’i, nâ te ta’ata e fa’atupu i te reira
Ua rau te ‘ana’ira’a 0 te mau ‘ohipa tano ‘ore o tâ te ta’ata e fa’atupu ra :
Te ha’avi’ivi’ira’a fenua
Te tapu haerera’a i te mau tumu ra’au
Te tâninara’a i te mau uruvao
Te ‘amu pu’unenara’a i te mau mâ’a : te ‘i’o pua’atoro, te i’a e te vai atu â
Te fa’a’Tra’a fenua tura ‘ore i te mau pae tahatai
Te taipura’a tura ‘ore i te vâvara (soupe de corail)
Te rave ‘inora’a i te mau ‘ofa’i pu’a
Te herura’a i te fenua e te moana no te pâmu i te mori ma te ‘ore e feruri
tô ‘ananahi
Te ha’amau’ara’a i te uira e te pape
Te tapura’a i te fenua
E te vai atu â
A tahi roa ‘ino, tô tatou iho orara’a.Teie mahana, ua niu te orara’a o te
mâ’ohi i ni’a i te huru arata’ira’a a verâ ma. Te aura’a, rahi noa atu â te
mau tao’a o tâ te mata e hi’o tütonu
nei, rahi ato’a ia te hina’aro e ho’o
roa mai taua mau tao’a râ. Noa atu â tô râtou moni teitei.
Te mea râ o tâ te ferurira’a e aratô nei, ua rahi roa tâtou i te nounou i te
‘ohipa ‘âpï no rapae mai : te ‘afata teata, te matini roro uira, te
pere’o’o uira, te mau ‘ahu fa’anehenehe e te vai atu â. Teie mahana, ua
pu’unena roa te tamari’i mâ’ohi i te ‘amu noara’a i te mâ’a tunu ‘oi’oimau
hia.
Te pi’i nei te pü 0 te fenua i te mâ’ohi a ara i te ‘ohipa tâpapa haere noa
i tô verâ ma fa’anahora’a. Ariro te reira i te fa’a’ere roa atu te mâ’ohi i
tô na iho parau, maoti ra tô na ‘ananahi.
Teie mahana, te ha’avi’ivi’i nei te ta’ata i te arutaimareva. I parauhia ai
e, ua ahu te fenua e ua ‘itehia te tahera’a o te mau ‘ofa’i to’eto’e rarahi
vai nei i na poro e piti o teie ao, maotira tô ‘Apato’a e tô ‘Apato’erau.
E ua haruharuhia te hô’ë mara’ara’a iti rahi i roto i te tahi mau fenua mâ
e
anei ‘âore râ te tahi mau fenua ha’iha’i.
87
Te na’o ra pa’i tera parau pa’ari e : « te mea o ta ‘oe e ueue nei i teie
mahana te mea ato’a ia o tâ ‘oe e ‘ohi i mûri iho. »Te aura’a, rahi noa atu
â te mata’i puva’iva’i e ueuehia râ, rahi noa ato’a atu te mata’i rorofa’i e
fa’aruru i mûri mai.
E ora tô te arutaimareva mai te mau mea ato’a o tâ te Rahu Nui i poiete
mai. Te uru ‘aihere, te tiare, te tumu ra’au, te mou’a, te fenua, te pape
anavai, te tai, te mata’i, te ua, te ‘animara e te vai atu â.
Ua fa’aara ‘e na te mau ru’au. ‘Aita râ tô te tari’a i tau’a noa a’e. ‘Aita
ato’a tô te mata i hi’o noa a’e. ‘Aita ato’a tô te rima i aupuru noa a’e.
Mara’a noa atu â te faito o te rahira’a ta’ata i ni’a i te fenua nei, mara’a
ato’a ia te fa’a’ïra’a fenua i te mau pae tahatai.
E api noa atu â te mau fare nohora’a, rahi noa atu â te hâmanira’a fare.
Rahi noa atu â te reira, ua fa’ahe’e ato’a ia tumu ra’au.
‘Ore noa atu â tumu ra’au, ‘ore ato’a ia te parau o te vahi haumaru, ‘ore
ato’a ho’i te parau o te manu ‘inaha ho’i e nô râtou teie vahi nohora’a.
E homa, ua ro’ohia te mâ’ohi i te ma’i maha ‘ore. Te hi’opo’a tütonu nei
tô mata i ni’a i tô te tahi purara’a : te piru, te tâpe’a rima, te fifi arapo’a,
te pere’o’o, e aha ana’e atu â.
Ua ‘ü’ana roa te reira i rotopü i te nuna’a mâ’ohi e te vahi e pe’ape’a
rahihia ra, ‘oia ho’i te parau o te fenua.
Teie tau, te tupu nei te au ‘orera’a i rotopü i te mau ‘opu feti’i. ‘Aita te
‘opérera’a fenua e tupu na roto i te hau.
Ua fivahia te mâ’ohi, ua ma’ihia te fenua, ua ha’avi’ivi’ihia te fenua.
I parauhia ai e, ua riri te fenua i te ‘orera’a te ta’ata e aupuru ia na. Te
mauiui nei te fenua e teie tâ na pâhonora’a : te huehuera’a fenua, te
mata’i rorofa’i, te fa’a’ïra’a miti e te vai atu â.
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LittéRama’oHi # 20
Diana Hakeahu ITlao - iTlataoa
Te ’a’arrm no na tae’ae e toru
Teie te tahi ‘a’amu no na tae’ae e toru e ora râ i ni’a i te hô’ê fenua o tei
pupuhia nô râtou e te mau tupuna. Te i’oa o taua fenua râ, o Tai Papa Nui
i te Ra’i. E te i’oa 0 na tae ‘ae e toru : Maraehau’ore, Maraehotu, Maraetohu.
I te tau a u’iu’i mai â, te vai nei te hô’ë fenua nehenehe mau â e te mau
ta’ata e ora râ i ni’a iho e mau ta’ata hâviti mau e te mâramarama. Hô’ê
tô râtou ari’i, o Tahi Tumu Nui i te Ra’i Tuatini tô na i’oa. E ari’i teie ua
‘ï i te pa’ari, te mâramarama e te hau. E ta’ata tuiro’o o tei ‘atutu i tô na
parau i te mau tuha’a fenua ato’a e ‘aua ha’ati nei ia na.
I piha’i iho ia na te vai nei te mau ra’atira e mana ti’a’au ta’a’e ihoâ tô
terâ e terâ ra’atira. E mea naho maita’i te orara’a va’a mate’ina’a i reira.
la tupu ana’e te tahi mau umeumera’a aore ra te tahi mau tama’ira’a, e
fa’a’itehia te reira i te ari’i e te mau ra’atira. E na te ari’i iho e haere e
fa’ahau fa’ahou i taua feiâ ra.
E fenua maiteta’i teie e te tupu nei te mau huru mà’a ho tu ato’a i reira.
E te tahi ato’a, ua riro taua nuna’a râ ei nuna’a o tei ‘aravehi i te parau o
te fa’a’apü e te parau o te tautai. E te ora nei na tae’ae e toru i roto i te
hô’ê ‘utuafare i piha’i iho i tô râtou mau metua i reira râtou e ha’api’ihia
ai te mau ha’api’ira’a maita’i ato’a i ni’a ihoâ râ i te parau 0 te orara’a :
te fa’a’apu, te tautai, te hâmanira’a fare, te tohura’a i te ahi mâ’a, te
tupa’aira’a i te pua’a, te ‘ou’oura’a pua’a e rau atu â te mau ha’api’ira’a
89
o
ta ratou i fana’o. Te i’oa o te metua tane, o Feti’a ‘Ura e te i’oa o te
metua vahiné o Ata ‘Ura.
Tae a’e râ te mahana i ti’a ai tô ratou matahiti, ua feruri iho nei na metua
i tô ratou parau. E te mea e mâna’ona’ohia râ e na metua to’o piti, ‘oia
ho’i te parau no te fenua. No te mea, ua hi’o raua i tô raua mau tamaroa
pâutuutu maita’i e ua ‘ite i te rave i te ‘ohipa. Te mea pâpü, ua ineine
tae’ae to’o torn i te fa’anaho i tô ratou orara’a. Tnaha, ua farerei na
e ua
na
metua i te ari’i e ua fa’a’ite raua i tô raua màna’o e ‘imi i te hô’ë
tapu
fenua e pupu no ta raua mau tamaroa. Fa’a’ite a’e ra te ari’i ia raua i te
hô’ë vahi pâpü ia nehenehe tâ raua mau tamaroa e patu i tô râtou orara’a.
Ho’i atu râ na metua e tô raua taera’a atu i te fare, te tama’i râ te mau
tae’ae. E ‘ere tô te metua tâne i te riri nei. ‘Avau iho nei te metua tâne ia
râtou e ua ani ‘oia te tumu i pe’ape’ahia ai râtou. Nâ ‘o atu ra o Marae-
hau’ore te matahiapo :
« Ua umeume ri’i mâtou no te mea ‘aita tô mâtou mâna’o i tü ri’i noa a’e
no te mea te hina’aro nei au e fa’a’amu i te
‘animara i ni’a i te fenua. »
Na ‘o atu râ te tua’ane :
« No’u
nei, mea faufa’a a’e nâ’u e tanu i te mâ’a i ni’a iho. » Ui atu râ
te metua tâne i te hope’a : « E ‘oe e aha tâ ‘oe e ‘opua nei ? » Pâhono atu
râ : « Te ‘ohipa e au rahihia e au maoti râ te ‘ohipa tautai ».
Ua oti ia parau. Te vahi râ e maumuruhia râ e na metua nei, ua fa’a’ite
pa’i tô raua mau tamaroa i tô ratou mâna’o tumu. Tau’aparau atu râ na
metua to’o piti hô’ë mahana i te maoro. E ‘inaha, i te po’ipo’i a’e ua rave
râua i te hô’ë fa’aotira’a o tâ raua e mâna’o râ e mea tano e, e mea ‘aifato
no te ta’ato’ara’a. Teie taua fa’aotira’a râ. Na mua râ, ua
pi’i na metua i
tâ raua mau tamaroa ia ‘amui hô’ë mai i te fare.
Hâmata atu râ na metua e ‘aparau ia râtou e teie tô reo :
«
‘I nanahi nei ua tupu te tahi umeumera’a mâna’o i rotopü ia ‘outou e
ua ‘imi maua i te râve’a ia vai hau noa tâtou e ua fa’aoti maua e tâtuha’a
i te fenua e torn a’e tuha’a hô’ë â faito tô ratou. Te tuha’a matamua tei te
pae tahatai, ua fa’ata’ahia te reira nô ‘oe e Maraetohu. Te piti o te tuha’a
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LittéRama’oHi 8 20
Diana Makeahu iïlao - iïlataoa
tei te pae uta, ua fa’ata’ahia te reira nô ‘oe e Maraehotn. ‘Are’a râ nô ‘oe
e Maraehau’ore tei te pae mou’a roa te vahi o ta maua i fa’ata’a nô ‘oe. »
I roto i taua ‘operera’a fenua râ, ua fa’a’ite te mau tae’ae i tô râtou
mâna’o mauruuru no te mea ua tü’ati maita’i te mâna’o.
Tau mahana ri’i i mûri iho, ua nahanaho maita’i te orara’a nô na tae’ae
e toru e ua hamata râtou i tâ râtou mau
‘ohipa. Tô te tahi, e fa’a’amura’a
‘animara, tô te tahi e tanura’a mâ’a e tô te tahi e tautai.
E ‘ere tô râtou orara’a i te fa’ahiahia nei, e fenua tô râtou, e fare noho-
ra’a, e mâ’a, e tino pautuutu maita’i e te vahi faufa’a ua ‘ore te parau o
te fifi fenua. ‘Inaha, e mea fa’aturahia te mau ‘oti’a fenua i taua vahi râ.
‘Aita te tahi e haru atu i ni’a i te tuha’a a te tahi. Ua ‘ahuru matahiti ti’a-
hapa tô râtou ora noa ra’a mai teie te huru, na roto i te hau.
Taua ‘ahuru matahiti râ i mûri iho, ua mara’a te faito o te rahira’a ta’ata
e
‘aua ha’ati nei ia râtou. E ‘ere atu râ o râtou ana’e teie e noho nei i ni’a
i taua fenua râ. Ua hamata te ta’ata e patu i tô râtou mau fare na te hiti 0
taua ‘oti’a râ. Ua hamata ato’a te ta’ata i te tanu i te mâ’a, te fa’a’amu i
te ‘animara mai te moa, te pua’a, te pua’a niho, te
pua’a horo fenua, te
pua’a toro. Ua hâmata ato’a i te tautai i te mau huru tautai ato’a : te hï,
te ‘üpe’a, te patia, te hôrâ, te taipu e te vai atu â.
I mua i teie mau tauiuira’a e rave rahi, ua hâmata ato’a na tae’ae e toru i
te ui maere ia râtou : « ‘aita ho’i i maoro a’e nei o tâtou ri’i ana’e iho teie
e ora mâ te poupou e
te hau e ua tupu maita’i te mau mea ato’a. I te tae-
ra’a mai tena mau ta’ata ua taupupu roa ‘ino te orara’a i ‘ô nei. »
E parau mau roa tena parau, no te mea te ‘ü’ana noa atu râ te faito 0 te
rahira’a ta’ata e ua rahi roa ‘ino e ua api roa te fenua. Ua hâmata te ta’ata
i te tapupu haere i te mau tumu ra’au, te tapu ato’a i te fenua, te fa’al ato’a
i te mau pae tahatai. Ua tupu ato’a teie huru ravera’a i tai. ‘Aita fa’ahou
te ta’ata e fa’ata’a nei te faito 0 te mau i’a 0 tei tautaihia : te mea rarahi,
te mea tanotano, te mea hu’a. Hô’ê â tautaira’a, ‘aita e fa’ata’ara’a. Ua
hâmata te ta’ata i te tapiho’o i tâ na faufa’a : te mâ’a hotu, te ‘ina’i no tai
mai e tô na fenua. Tei roto atu râ te ta’ata i te parau 0 te moni.
91
I terâ tau te ora râ te hô’ë tahu’a, o Matau’ïtepô tô na i’oa. Ua haere te
mau tae’ae e
farerei ia na no te mea ua titauhia râtou e ana. Ua fa’ahiti
te tahu’a i tô na mâna’o pe’ape’a no te mea ua ta’otohia ‘oia e ua ‘ite ‘oia
i te hô’ê ‘ôrama e fatata i te tupu. Ua parau ato’a ‘oia ia râtou e râve’a tô
râtou no te tauturu ia na no te mea ia ‘ore ana’e, tau ta’ata tei pohe ia au
i te mea o tâ na i ‘ite.
Na mua râ, ua vauvau mai ‘oia i taua ‘ôrama râ, teie ia :
«
‘I napo nei mai tei matauhia e au, e pô tô mata i te ru’i hae. I taua taime
râ, ua tupuhia te hô’ê ‘orama. Ua ‘ite mata vau i tâ’u tino i te ma’urere
na roto i te
‘aore e ua tupu tâ’u tino mai te hô’ê manu râ te hum. Tô na
i’oa, o Hui Mata i te Ra’i. Ua rere haere atu taua manu râ i terâ vahi e
terâ vahi e tae a’e râ i te hô’ë taime ua rohirohi, ‘imi atu râ i te hô’ë tumu
ia tau atu i ni’a iho. E ‘ere taua manu râ i te maere nei, ‘inaha te ‘ite atu
râ ‘oia i te ta’ata i te tapupu haere i te mau tumu ra’au.
‘Imi iho nei i te
tahi vahi ‘e atu ia tau i reira. ‘Aita râ i manuia, ua ‘ere ia manu i te vahi
taura’a nô na râ ia maha tô na rohirohi.
Tâmata atu râ taua manu râ e rere ti’a atu i te tahi pae o te fenua, ‘aita
ato’a te reira i manuia no te mea ‘aore fenua fa’ahou e ti’a mai i mua ia
na. Fâriu a’e ra i Hitia’a o te râ,
‘aore fenua. Fâriu a’e ra i To’o’a o te râ,
‘aore fenua. Fâriu a’e râ i Apato’a, ‘aore fenua. Fâriu a’e ra i Apato’erau,
‘aore fenua. ‘Are’a te mea o tâ na e ‘ite râ, maoti ra te Moana Nui a Hi va
Uripa’o ia. E ‘ere tô taua manu râ i te ri’ari’a nei, ‘inaha ‘aore e ‘aore roa
atu fenua e hiti mai nei i te ‘iriatai. Tau hora i mûri iho ‘ite mai nei ‘oia
i te hô’ë ‘apa’apa ra’au e painu noa nei na ni’a i te moana. Tau iho nei
‘oia i ni’a iho ia maha tô na rohirohi.
Ua hope te rohirohi o taua manu râ i ta’oto roa ai ‘oia i ni’a i taua
‘apa’apa ra’au râ. Tau hora i mûri iho, ua maere te manu no te mea ua
vai noa taua ra’au râ i te vahi hô’ë. Ui maere atu ra ‘oia : “e aha ra ? Tau
hora teie nei e ‘aita roa atu tena ra’au i ha’uti ri’i noa a’e.” Hi’opo’a
tütonu atu râ ‘oia e i mûri iho tô na ‘itera’a e ‘ere i te hô’ë ‘apa’apa ra’au,
e tâhuhu fâre râ teie e vai nei i raro a’e i tô na
‘avae. I reira tô na mata i
ra’ara’a maita’i ai i te ‘ohipa e tupu râ, ‘oia mau ua tomohia taua fare râ
e te miti e ua
pâremo roa te mau ta’ata e noho râ i reira.
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üttéRama’OHi # 20
Diana Hakeahu (Tlao - [Tlataoa
‘Inaha e vahi pohera’a ta’ata teie, ua peuhia taua vahi râ. Pe’e mai nei
taua manu ra no tô na ri’ari’a faito ‘ore. Ma’urere atu râ i te ra’i tuatini
te vahi i reira o Manu Tane e noho ai. Fârerei atu râ 0 Hui Mata i te Ra’i
ia Manu Tane e ua ‘aparau atu ra raua. Ua ui o Hui Mata i te Ra’i ia
Manu tane : « Manu Tane 0 te ao, Manu Tane o te pô, i mata ai ‘oe i te
huru ravera’a a te ta’ata nei i ni’a i te fenua o tei pupu he’eurihia nô
râtou e te Atua, te taparu haeha’a atu nei teie mâna’o iti ia ‘oe e Manu
Tane, e aha mau na te ‘ohipa i tupu i raro a’e i ta ‘oe mau pererau i te
raravaru ?
È aha tâ te ta’ata nei i rave ia piha’a mai te mau Pape 110 roto
ia Moana Nui a Hiva Uripa’o i tomo ai tô ratou mau fare, i paremo ai te
ta’ata ? »
I mûri i tô na uiuira’a ia Manu Tane, ua hâmama 0 Manu Tane i tô na
vaha e taua taime ra, mai te hum ra e, ua tâveovevo tô reo na te ao
ta’ato’a nei mai te hô’ê tuorora’a teitei puai roa ‘ino e ‘ore te ta’ata e ti’a
e fa’aro’o i te reira. la na i hâmama ai i tô na
vaha, e ‘ere no tô na riri. E
‘ohipa ‘ümerehia ra e tupu i mûri iho. Maoti ra, te ho’i fa’ahou mai nei
te mau mea ato’a o tei tupu i mûri mai te taime a tau ai te manu o Hui
Mata i te Ra’i i ni’a i te ‘apa’apa ra’au e tae roa atu i te taime hou a tupu
ai taua fa’a’îra’a miti ra.
Teie atu ra ia tâ na pâhonora’a :
« Hui Mata i te Ra’i 0 tei rere na te reva,
Hui Mata i te Ra’i 0 tei rere na
te moana, manu rere tau ‘ore, manu tau ‘ore ua maha te rohiohi nô ‘oe
ra. Mauruuru iti rahi tâ’u ia
‘oe i tô ‘oe taera’a mai i te ra’i tuatini te vahi
i reira vau e noho ai. E tâtara atu vau i mua i tô aro te ‘ohipa o tei
tupu i
ni’a i te fenua.
I te ‘omuara’a mai, ua pupuhia te hô’ë fenua no te ta’ata nei e ua fa’aue-
hia ‘oia ia ti’a’au maita’i te reira : te fenua, te tai, te ‘animara e te mau
mea ato’a e ora râ i reira.
Ua ti’a ia râtou i te rave i te ta’ato’ara’a o taua
mau mea ra ia ora te ta’ata mâ te
poupou e te hau.
Tae a’e ra te hô’ë mahana ua mara’a te faito 0 te rahira’a ta’ata. E aha te
‘ohipa i tupu i mûri iho ? Ua api te fenua, ua rahi roa ‘ino te ta’ata e ua
93
iti mai te mau mâ’a no roto mai i te arutaimerava. Ua hamata te ta’ata i
te tapu i te mau tumu ra’au, ua tapupu haerehia te fenua. Ua fa’a’Ihia te
tahatai. Ua ha’avi’ivi’ihia te natura. Ua hemhia te fenua e te
pâmu mai te mori ‘arahu. Ua ha’amau’ahia te pape e te
mâ’a. Ua rahi roa ‘ino te ta’ata o tei ‘amu nei i te mâ’a mai te ‘i’o pua’a
mau pae
moana no te
toro e te mau i’a e te vai atu â e te vai atu â.
No teie mau ravera’a a te ta’ata nei, ua hâmata te fenua i te ahu. Ua ahu
i te mau pae fenua to’eto’e, ua tahe te mau ‘ofa’i rarahi to’eto’e e vai nei
i na poro e piti o te ao nei, tô ‘Apato’a e tô ‘Apato’erau.
Ua mara’a te faito o te miti i mûri mai i te tahera’a o taua mau ‘ofa’i
rarahi to’eto’e ra e ua paremo te tahi mau fenua ha’iha’i. E au ra e, e riro
te tahi mau motu mai ia Tuamotu ma i te tapae ato’a atu i te reira faito.
Ua riri te fenua ‘oia ho’i te metua vahiné i te ‘orera’a tâ na mau tamari’i
i aupuru maita’i ia na mai ia na i aupuru noa na ia ratou. ‘Aita te fenua i
taho’o i ni’a i tâ na mau tamari’i, te fa’a’ite ra ‘oia i tô na mâna’o tâhiti
e te
‘ore ‘oia e roa’a fa’ahou i te fa’aoroma’i.
I ahu ai te fenua no te ‘ohipa ha’apa’ora’a ‘ore a te ta’ata i mara’a ato’a
ai te faito o te miti e i tomo ato’a ai te fenua e i paremo roa ai te ta’ata. I
te taime a tupu ai te fa’a’ïra’a miti, ua mutu te pito e ta’ai nei te ta’ata i
te fenua, ua topa mai te ua rahi, ua piha’a te ‘Opu Nui a Moana Nui a
Hiva Uripa’o e ua tupu te hô’ë mara’ara’a miti. Ua horo hâ noa te ta’ata
‘imi i te ora, ‘inaha e tau ora ‘ore. Ua ‘imi i te vahi pâruru e te teitei,
‘inaha e fenua pâpü ‘ore. Ua pi’i te metua i to tama, ‘inaha ua ‘ere ia
e
taura feti’i. Ua pure tô te tahu’a i tô te ra’i, ‘inaha e pure fa’aro’o ‘ore.
Ua pi’o te ‘aero o te ‘uri i raro a’e i tô roroe, ‘inaha e aho hope’a e hutihia râ. Ua ‘aue te ta’ata, ua ‘aue te fenua, ua ‘aue te ‘animara. E ao hepo-
hepo e ua fa’aro’ohia te ta’ivevovevo o te autara’a a te ta’ata hara. Ua
tutuô i te reo ‘ore ia fari’i tô te ra’i i te ‘a’au tâtarahapa a te ta’ata hara
nei. ‘Aore atua, ‘aore tahu’a, ‘aore tuputupuâ, ‘aore ta’ata e ‘aore mana
e ti’a e fa’ahau te Atua i te ta’ata. Ua rave tô te Ra’i i te fa’aotira’a e fa’a-
ho’i te ture natura i tô na vaira’a matameha’i. I mûri iho, ua ha’amouhia
tô ratou parau e Moana Nui a I liva Uripa’o. Hâmama fa’ahou mai nei o
Manu Tane i tô na vaha e na ‘o atu ra : Na te ta’ata iho i ‘imi i te hara, e
‘ere na te Atua. »
litbérrae
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LittéRama’OHi # 20
Diana Hakeahu (Tlao - iïlataoa
I mûri iho i te tâtarara’a a Manu Tane, ua ra’ara’a maita’i te mata o Hui
Mata i te Ra’i. ‘Oto a’e nei taua manu râ i te mea ‘aita te natura i fa’ahe-
rehere noa a’e i te ta’ata nei e ‘aita ato’a ho’i tô na e fa’ata’ara’a: te mau
‘aiu, te tamari’i, te feia ‘âpî, te tâne e te vahiné, te ta’ata pa’ari, te ruhiruhiâ. Ua pehe atu râ te manu i te pehe ‘otora’a nô na râ :
« Na u’i tini e hâ o te ao tahuti nei
Ua pârutu e ua rüpehu te ra’i tuatini i uruvao
Ua tôhu’ahu’a e ua tuha’a te ua o ti’afa’a i te mou’a o ‘Orohena
Ua piha’a te ‘Opu Nui a Moana Nui a Hiva Uripa’o
Ua mara’a tô tai i te ‘are hau ‘ore
‘Aue te aroha i tô mata ua ‘ite i te ravera’a a te Tumu Nui
‘Aue te mauiui tô te mana ‘ore ia hau te Manahau
‘Aue ua heva te metua i tô tama
‘Aue ua ta’i te tama i tô tae’ae
‘Aue ua ‘oto te atua i te ‘orera’a tô tama i fa’aro’o i tô na reo
Te pi’i atu nei tô te fenua i tô te ra’i, ‘aore pâhonora’a
Te tuôrooro nei tô te reo hevara’a i tô te ra’i tuatini, ‘aore vevo
Tô’u fenua iti maha ‘ore e te mata nounou
I aha ‘oe i hi’a ai i mua i te fa’ahemara’a
Tao’a ora ‘ore, tao’a papa ‘ore
Ua taha tô ‘a’au i te atua mana ‘ore
E tâ’u nuna’a here e
Nô vai terâ mana i fa’ahae ai ‘oe i te Tumu Nui
E tâ’u metua i aha na ‘oe i tümutu ai tô taua taura fïri
No tô taua fenua i ‘ü’ana roa ai te ‘ino’ino i roto ia taua
Na poro e hâ 0 te ao mâ’ohi nui nei e
A auraro i tô Atua
Apoihere i tô ‘ai’a
A ho’i mai i tô peu tumu
la puhihau te hupe haumaru
la pâhe’e tô tai hiti tautau ‘ore
I te tua o te ‘are hau ‘ore
la maha tô pâ’iria
I mua i te mata o te arutaimareva
E i mua i te aro o te Atua
E ia tara’e te hara o te ta’ata tahuti nei. »
95
I mûri i taua pehe ‘otora’a no na ra, ua ho’i atu taua manu râ i te vahi no
reira mai ‘oia. Terâ ia te fa’ati’ara’a parau o tâ te tahu’a o Matau’itepô i
fa’ahiti i mua i te aro o na tae’ae to’o tom. E ‘ere tô ratou ‘a’au i te homhoru nei. Ua pe’ape’a roa taua mau tae’ae râ i mua i teie hum fa’ati’ara’a
e ua ui atu râ ratou i te tahu’a e aha te mea e ti’a ia râtou i te rave ia ‘ore
taua mau fifi ra ia tupu. Pâhono atu ra ‘oia, teie tô na reo :
« Maraehau’ore, Maraetohu, Maraehotu. A fatafata mai na i tô târi’a e ia
ra’ara’a maita’i tô mata. Te na’o râ tera parau pa’ari : tô te mata a hi’o,
tô te târi’a a fa’aro’o e tô te rima a rave. ‘Inaha, ua riro ‘outou i teie taime
nei ‘ei mataara, ‘ei araivavao e ‘ei ve’a, e haere atu ‘outou i roto i te
nuna’a e fa’aara ia na i te mau ‘ohipa e ti’a ia ravehia. A ha’amau atu i
te tahi mau ‘apo’ora’a hui mata rau i reira e na ratou a’e e ti’a’au i te mau
‘ohipa ato’a i ni’a i te parau o te orara’a va’a mate’ina’a : te fa’ahotura’a
i te fenua, te fa’a’amu ‘animara, te fa’a’apu, te tautai e te vai atu â.
A horo’a atu i te mau parau poro’i no roto mai ia’u ‘inaha no ‘ô roa mai
taua mau poro’ira’a ra. la tupu te mau farereira’a na roto i te hau e te
tau’ara’aparau. la ‘ore te umeumera’a mâna’o ia tupu, ia ‘aifaito te ta’ato’ara’a. A fa’atupu i te mau rurura’a i reira e ‘amui hô’ë ai te nuna’a no
te vauvau i te mau ‘ohipa e nehenehe e tupu mai, mai te
peu e rave
‘inohia tô te amtaimareva.
Terâ, a haere râ. A haere atu mâ te hau. A tere i tô tere hara ‘ore e ia vai
ti’amâ ‘outou ia ho’i ana’e mai. A ha’amâna’o, e hopoi’a rahi tei ni’a i
tô tâpono, tei roto te parau o tâ’u ha’amaita’ira’a ia ‘outou i te Atua ra.»
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LittéRama’oHi » 20
Chantal Teraimateata ITIillaud
Née à
Papeete Tahiti Polynésie Française en 1950, Chantal T.
Millaud effectue sa scolarité au Collège Anne-Marie Javouhey
puis au Lycée Paul Gauguin à Papeete. Rentre en Métropole pour
continuer des études supérieures. A la retraite près de Montpellier (Hérault) après une carrière d'enseignante, elle est nouvelliste
et poète. Elle participe à des ateliers d'écriture, des concours. Elle
est publiée dans de nombreuses revues poétiques. Adhérente de
"lettres de sables" (Palavas les Flots) et "Mots Passants" (Mont-
pellier) ; au cours de nombreuses rencontres poétiques à Montpellier, elle lit des textes de poètes connus et parfois les siens.
En ma terre
Je ne suis plus de mon île.
Moitié blanc moitié azur,
Mes hanches n’oscillent plus
Teraimateata je suis.
rythme faux de mes pas.
Las ! La cascade est perdue
Ancêtres ainsi nommés,
si tu n’as pas le pied nu.
chemin lacté de ma nuit.
Au marché de Papeete,
Par mon nom de ciel et d’eau ;
les vahinés fuient des yeux
par ma peau d’appartenance
la blanche étrange étrangère.
aux douloureux
Elle questionne les fruits,
du corail et du cent pieds
ne connaît pas
je me rejoins en ma terne.
au
les poissons,
la monnaie lui est énigme.
Ma mère connaissait-elle
l’enterrement du nombril ?
Privée de ce don fertile,
ma terre m’a méconnue ;
mon odeur lui
est mystère.
vous êtes
le lien sacré
tatouages
97
Hong-lfly Phong
Née à Papeete, d’origine chinoise, Hong My aime la lecture et l'écriture depuis l'enfance. Membre de l’association
"L'aire des Mots",
elle s'essaie à l’écriture poétique : certains de ses poèmes [Où et
comment vivre, Eruption) ou texte (Solidarité) ont été
publiés dans
la revue " Les Pages récréatives des Atelier d’Ecriture". L’écrivain
Jean-Christophe Camus à la lecture de son texte Le front de mer
écrivit : "Ce trajet plein de sensations vives et fortes transporte le
lecteur en Polynésie : tu nous décris bien la chaleur, les couleurs,
les scènes de la rue, et aussi les odeurs et les parfums des lieux...
Avec l’œil d’un sociologue averti, tu saisis ces scènes, avec distance
et, tout à la fois, en captant tout, pour notre plus grand plaisir"
Comment élever un enfant prodige ?
Laissez votre enfant s’exprimer à sa guise : sa parole compte dans les déci-
sions le concernant. S’il ne veut pas aller chez le père, qu’importe. Le plus
important est de lui inculquer quelques principes moraux tels que rejeter le père
parce qu’il a voulu quitter le foyer, un acte très égoïste. Assurez-vous de faire
un véritable suivi scolaire et
psychologique afin qu’il surmonte le traumatisme
de la séparation.
Inscrivez-le à un stage d’échec, de cuisine, de piano, de violon, de piscine.
Tout ce qu’il faut pour stimuler son intellect. Soyez persuadé que son équilibre
passe par l’écoute et la connaissance de celui ci, l’éducation n’a rien à voir avec
l’obéissance ni avec l’autorité parentale.
Cultivez, valorisez le travail, ne laissez jamais votre progéniture s’ennuyer : jeux éducatifs, loisirs créatifs et éducatifs, sorties pédagogiques et bien
sûr les discussions très philosophiques parent-enfant.
Instillez en lui le sentiment de sa supériorité, et de celle des membres de la
famille, sur les autres bambins de son âge et personnes. Résultat : voyez comme
il s’exprime bien, comme il passe ses journées à recopier des livres entiers, à
faire des exercices à n’en plus finir, un véritable prodige ou un singe savant ?
Un enfant qui ne regarde pratiquement jamais la télé, ni ne joue aux consoles de
jeux.
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LittéRama’OHi » 2D
Hong-[Tly Phong
Guidez le, poussez le à choisir la meilleur voie possible, ayez de l’ambition
pour lui jusqu’à l’âge adulte. Là vous rendre compte que votre surdoué est mar-
ginal et malheureux, totalement inapte à la vie sociale et à la vie familiale. Il
dédaigne, méprise les autres dont il estimera l’intelligence médiocre. Quand il
aura peu d’amis, et échouera dans sa vie de couple, vous aurez réussi à créer
votre enfant à votre image.
Comment oublier son ex ?
Pensez d’abord que votre ex conjoint, ou ex concubin n’était qu’une pourriture pétrie d’égocentrisme et de stupidité. Convainquez-vous que vous êtes
hautement attirante et séduisante. Persuadez-vous que même avec
enfants, vous n’êtes pas une denrée avariée pour un autre homme. Commencez
par sculpter votre corps en suant sur un banc de musculation, rien de tel qu’une
bonne activité physique pour se débarrasser des tensions sexuelles en même
temps que de ses bourrelets disgracieux. Pourquoi ne pas poser des implants
une personne
mammaires ou relifter les seins si nécessaire ? Mettez en valeur votre décolleté :
il n’y a pas meilleure façon d’attirer l’attention d’un homme. Bien évidemment,
celui qui sera captivé par votre poitrine parfaite n’est là que pour vous sortir de
votre routine. Tous les moyens sont bons pour se mettre à son avantage : faux
cils, faux ongles... s’ils sont assez stupides pour se laisser séduire par de tels
artifices, tant mieux pour vous !
Laissez maintenant votre amant prendre les initiatives. Choisissez un jeunot, leur naïveté et leur romantisme sont d’une fraîcheur revigorante. Vous
conviendrez aisément que vous n’avez absolument aucune envie de passer votre
temps à éduquer un autre mâle, vous avez déjà contribué ! Profitez donc bien de
cette petite aventure tant qu’elle ne vous lassera pas. Si vous préférez passer un
moment plus intellectuel, un homme mûr serait plus stimulant et instructif. C’est
un homme qui va aimer étaler son savoir, disserter sur ses extraordinaires cornpétences professionnelles, vous faire partager ses fabuleuses découvertes durant
ses voyages.
Soyez vous-même ! Riez, critiquez, soyez odieuse si l’envie vous prend.
Ainsi vous ne perdrez pas de temps en simagrées ou malentendus. Dîtes ce que
attendez, ce que vous voulez, ce que vous pensez, ce que vous aimez, ce
que vous détestez. Vous êtes unique !
Bref, amusez-vous, sortez, flirtez, collectionnez les amants. Ces moments
insouciants en galante compagnie valent mieux que de se morfondre toute seule
vous
99
en
pyjama dans son lit. Se conduire comme une adolescente avec un grain de
folie et de passion rien de tel pour rester jeune et belle. Seule certes mais enfin
épanouie !
Saveurs
Le nouvel an. Mes parents étaient invités pour un repas à la maison. Une
occasion pour eux de sortir de chez eux où ils vivaient comme des ermites, une
occasion pour moi de leur montrer mes talents de cuisinière. Je décidais de faire
gigot. La famille ne manquait pas de carnivore et pour mon père, un repas
complet ou suffisamment consistant.
De plus, la cuisson du gigot se faisait au four. Là, j’avais un avantage pour
rapport à ma mère, elle ne faisait pas de plat au four. Elle cuisinait toujours à la
vapeur ou au wok : l’occasion donc de lui faire goûter autre chose.
Aussi loin que je me souvienne, ma mère a toujours préparé tous les repas
à la maison. Elle préparait de délicieux plats chinois. Les repas invariablement
se composaient d’une portion de riz, de
légumes et de viandes, quelquefois une
soupe claire. J’aimais les plats mis sur la table encore filmants car ils exhalaient
des odeurs si appétissantes, même le riz était parfumé. La viande était toujours
tendre et fondante, les légumes colorés et croquants. Un festival de couleurs et
de saveurs. Ma mère ne suivait aucune recette et dosait les ingrédients à l’œil.
Ensuite, je la regardais cuire les ingrédients selon un ordre précis. Si
aujourd’hui, je peux faire la cuisine tout en étant extrêmement ordonnée et efficace, je pense que c’est grâce à elle. Elle ne perdait pas une minute et ses mains
étaient tout le temps occupées. Pendant que la viande cuisait, elle découpait les
légumes, ou préparait la sauce qui allait napper le plat. Je savais que jamais je
ne saurais égaler son savoir faire.
Aussi lorsque je fus en âge de faire la cuisine, je décidais de faire de la
cuisine française. J’avais acheté un petit livre qui s’intitulait « cuisine facile ».
Il y avait là, la recette d’un gigot d’agneau qui me semblait effectivement très
simple.
Il fallait pour la recette un gigot, de l’ail et de la menthe fraîche. De l’ail,
j’avais l’habitude d’en utiliser car ma mère ne prenait que des gousses d’ail bien
fraîches. Quand à la menthe, mon père en faisait pousser dans le jardin. Je commençais par frapper les gousses d’ails sur la planche de bois puis j’en retirais le
cœur. Je les hachais finement avec le couperet. Le bruit de la lame sur la planche
de bois me rappelait instantanément ma mère quand elle découpait le poulet
un
sans viande n’était pas un repas
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LittéRama’OHi » 20
Hong-fTly Phong
blanc, les travers de porcs, le canard laqué. Tout devait être découpé en petit
morceaux avec
les os.
Je procédais de même avec les feuilles de menthe fraîches. Je sentais
déjà
l’arôme délicieux que procurait ce mélange. La menthe évoquait tout de suite
pour moi les fois où ma mère préparait la farce pour les nems. C’était son
secret : elle mettait de la menthe fraîche avec la viande et les vermicelles.
Lorsqu’ensuite, elle les faisait frire, l’odeur de la menthe embaumait toute la
cuisine.
Je piquais le gigot et suivant les instructions, j’y insérais quelques
d’ail. Puis avec le reste d’ail haché mélangé à la menthe, du sel et du
gousses
poivre, je
massais la viande. Je devais laisser la viande s’imprégner au moins une heure
avant de le mettre au four.
Après avoir préchauffé le four, je mettais le gigot à cuire. Je vérifiais la
cuisson régulièrement car je ne souhaitais pas que la viande soit trop cuite. Ce
serait une grosse déception. Je l’arrosais régulièrement de son
jus bouillant et
parfumé. Je pensais qu’il fallait certainement que je mette à table un bol et une
paire de baguette pour ma mère car jamais elle n’a mangé dans une assiette.
Quand elle voulait un morceau de viande, par exemple d’entrecôte, elle
demandait à l’un de nous de le découper. Le gigot était prêt lorsque j’entendis
la voiture dé mes parents pénétrer dans l’allée menant au
garage.
Portrait de C...
J’ai des idées noires...
« J’ai des idées noires et
j’ai envie de me suicider. J’ai eu une vie vraiment
que tu as vécu, tu t’es montrée vraiment forte dans ta vie. J’ai un copain et un
enfant, un toit, cela ne
m
’empêche pas d’avoir des idées noires... je suisfiu alors j'ai envie de me suicider. Des fois, je prends un couteau et je me coupe les bras... j’ai du
sang partout. Ma fille est là et elle pleure quand elle voit
ça. Maintenant ça va mieux. Je
vois plein de psy, ils me donnent des cachets. Ca me rend KO. J’aimerais bien
changer de peau, etj’aimerais bien aussi refaire mes seins mais ça coûte cher...
je suis déjà allée demander un devis. Je veux juste remonter, je ne veux pas les
faire plus gros, je veux pas de faux seins ! Je m 'ennuie à la maison, je suis toute
seule quand ma fille est à l’école. Je n ’ai pas de voiture
puisque je sais pas
conduire mais j’ai un scooter. Le soir, j'ai peur quand mon copain n ’est pas là,
dure même on me dit : ce n ’est pas possible tout ce
101
quand il part en mission dans les îles et que je suis seule avec ma fille, je ferme
tout à clé. J’ai toujours peur qu ’un type rentre dans la maison. Je ne suis
plus
amie avec R. car il est partit raconter mon passé à tout le monde alors
que mon
copain était déjà au courant comment était ma vie avant... »
Avant, Elle se prostituait. Elle me parle tout en roulant sa cigarette. Elle
tourne la tête sur le côté pour ne pas souffler la fumée à ma
figure : une odeur
âcre parvient quand même à mes narines. J’imagine ses petits poumons noirs et
ratatinés, carbonisés par le goudron et la nicotine. Elle me tend son paquet de
tabac et je vois ses ongles tellement rongés que cela ne ressemble
plus à des
doigts mais à des moignons. Petite, frêle et maigre, elle ne doit pas peser plus
de 45 kg, elle est assise par terre et ressemble à une enfant. Elle me dit
que pour
trouver ses habits, elle va dans le rayon enfant. Elle a un short court en
jean, et
un débardeur moulant, aux
pieds, une paire de bottines. Elle me sourit en me
montrant deux belles rangées de dents malheureusement
jaunies par le tabac.
Même quand elle rit, ses grands yeux bordés de
longs cils noirs restent sans vie.
Il y a une beauté résiduelle en elle qui me serre le cœur.
« On sort jamais. Toute
façon, je n ’ai pas tellement envie de sortir aussi.
J’aime bien faire mon business..., des fois je vais casser des
mangues ou des
avocats chez la famille pour vendre. Je connais
plein de collègues à quije peux
vendre, ça me fait un peu de sous comme ça.»
Son copain a une bonne situation et subvient aux besoins de la famille.
C’est un garçon d’origine chinoise. Je me demande comment sa famille a
pris
ménage avec cette jeune tahitienne sans instruction, qui plus est, avec un tel
passé. La vie lui a donné une seconde chance, et elle a su la saisir. Malgré tout,
son passé la rattrape et la hante. Son
visage témoigne de son mal-être : elle a des
son
lésions minuscules à la surface de la peau, preuves qu’elle a du s’acharner sur
ses boutons, je
remarque quelques gros points noirs saillants, son teint terne et
brouillé. Elle mange peu, trop peu mais boit énormément de coca cola. Elle
aime les sucreries et me dit que son gâteau
sa belle-mère
préféré c’est la tarte à la crème, que
fait une excellente forêt noire, la meilleure qu’elle ait
jamais
mangé. Un jour, elle apportera une part et je pourrais y goûter. Je la remercie
pour sa gentillesse. Elle se lève prestement et commence à faire la vaisselle malgré mes protestations.
Je lui propose des vêtements dans lesquels
je ne rentre plus. S’ensuit une
séance d’essayage. Mes vieux vêtements ont l’air de lui
plaire. Ce sont des vêtements que j’ai soigneusement conservé
parce qu’ils ont une certaine valeur sentimentale, ou tout simplement parce que ce sont des vêtements de qualité. Je me
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LittéRama’OHi » zo
Hong-(Tly Phong
suis dit qu’il ne servait à rien de les laisser dans le placard. Il y a cette merveilleuse robe longue, découpe princesse de Cacharel. Elle appartenait à ma mère
et lorsqu’elle me l’a donnée, je l’ai mise avec fierté tant elle soulignait alors ma
taille svelte et me donnait une allure romantique. A l’époque, elle l’avait acheté
chez Loanah et elle coûtait très cher. Elle était de couleur écru avec des petites
fleurs en bleu marine imprimées, des emmanchures courtes en boule et des boutons devant tout le long de la robe. Elle l’essaie et nous voyons tout de suite
qu’elle est trop longue mais elle réplique : non ce n’est pas grave, je vais la metdonnir ! Un instant, j’ai envie de la lui arracher des mains tant je lui
en veux de ne pas comprendre le cadeau que je lui fais, de ne pas réaliser qu’il
ne s’agit pas là de simple chiffon. Mais ce n’est pas de sa faute : pourquoi enfermer cette robe dans cette penderie alors qu’elle pourrait servir de pyjama ?
tre pour
Elle se déshabille et tient à me montrer ses seins. Elle soulève son soutien
gorge et me dévoile un sein tout plat qui tombe jusqu’au bas du ventre. Elle
m’explique qu’elle a allaité pendant de longues années. Je reconnais bien là la
faiblesse des mères face à la volonté de leur enfant. Confidence pour confidence, je lui avoue que moi aussi j’ai été tentée par le bistouri mais heureusement mon copain ne raffole pas de gros seins, et puis je préfère qu’un homme
me remarque pour autre chose que mes seins ! Elle renchérit en disant que son
copain l’aime aussi comme ça : il s’en fiche que ses seins tombent, c’est normal
puisqu’elle a un enfant.
J’ai honte de mon mouvement d’humeur alors qu’elle est là, toute joyeuse
d’avoir une nouvelle garde robe. J’ai l’impression d’avoir fait une bonne action.
Plus tard, c’est elle qui me donnera un sac plein de vêtements pour ma fille et
je suis touchée par cette délicate attention. Un autre jour, c’est une grosse part
de forêt noire et je suis étonnée qu’elle se soit souvenue de cela. Tant de gens
disent faire une chose et ne font rien.
Ses paroles révèlent sa force et sa fragilité, son courage mêlé de désespoir.
Mais surtout, il y a de la bonté chez cette âme meurtrie par la vie. Tant d’autres
finissent par faire le mal pour le mal qu’ils ont subi mais pas elle.
103
Taunehenehe a Tahitotera'i
Je m'appelle Taunehenehe a Tahitotera'i.
Par mon père, je suis originaire de Rangiroa
pour ses lagons turquoises et où j'y
passé toute mon enfance, et par ma
mère, de Raiatea où j'enseigne actuellement le Reo Ma'ohi au sein d'un collège.
connu
ai
libtérrae
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Poroi
E papa iti E...
E tâàta ahavai oe e te maitai
E ahonui to oe
I teie nei, ua rahi oe i te paari, E aha râ...
I teie nei, E aha râ ta oe e parau
Ua feruri anei no tô ananahi, ua feruri anei no ta oe mau huaài tamarii
Ua àti anei ia oe i te mau parau paàri atoà o to oe iho motu
Rairoa, fenua âià no to oe mau tupuna, fenua i paàri ai oe mai to oe vai
àruàru raa.
E o Turi Hinahina, e aha atura ta na parau.
Ua hei te ùtura e te ùniee noa nei o ta oe iho i roto i te haapee
Tei hea roa te mau parau paari o ta oe i vai iho no râtou
Tei hea roa te papa o te hiroà ta to oe mau tupuna i vai iho mai no oe
Te vai ôvere noa ra râtou i roto i te hôê ao màà ère, i roto i te hôè ao
ôre
Tei hea roa oe i teie nei, te imi nei au ia oe mai te raira ra te huru
I hea oe e mau ai
I Otepipi, i Vahituri, i Utôtô aore râ i Toàroa noa â
I àmu noa na oe i te hotu no te tai,
pape
LittéRama’OHi tt 20
Taunehenehe a Tahitoterai
Aore i toe mai
I àmu noa na i te kaveu,
I àmu noa na i te huero kaveka
Aita atu ai
E ère râ teie mâà o tâù e imi noa nei
O te mâà râ
no te parau mau e
te ite
Inaha, eie hoi te hihi o te râ
Ua afa te fenua te ua ë
Ua afa te fenua te ua roa ra
Ua moè ia na tama Manuiva i Tevaiùtiùti
la mou ta o.e parau, ua hope ia tau
Ahiri, ahiri pai...
Lectures et commentaires - Elèues du lycée de Tatauao
Hsitea Deane, Claudia Diaz Rosales, Poeraua Dupuits, Randy Haerehoe,
Uaimiti Hunter, Rauahere Itchner, Harmen Petit, Toreta Pugibet,
Dacia Tahaia, Teheiarii Teururai, Ludmilla Oaiho, Sacha LUilliams.
Après avoir reçu, en septembre 2011, Flora Devatine, - sous l'impulsion de leur professeur
de littérature française, M. Jean-Luc Picard -, pour échanger avec elle sur la poésie, sur
la littérature et sur la revue Littérama'ohi,
Les élèves de VL du Lycée de Taravao ont envoyé à Littérama'ohi des textes, dans les-
quels ils partagent leurs sentiments dans le choix qu'ils ont fait des extraits d'ouvrages
d'auteurs autochtones,
Extraits qu'ils ont lus à l'occasion de cette rencontre.
Frangipanier
Célestine Hitiura Vaite par Claudia Diaz Rosales
J’ai choisi le passage parlant de la maternité dans la mesure où cela parle
de règles, « les règles de l’accouchement tahitien traditionnel ». Ce passage m’a
inspiré, car depuis le moment où je l’ai lu, cela m’a permis « d’apprendre »
quelque chose que personne ne m’avait appris. Je n’aurais jamais pensé qu’il y
avait des règles à respecter lors de l’accouchement pour le bien-être du bébé :
«
Ne pas crier en poussant pour mettre l'enfant au monde parce que si tu
cries le bébé va avoir peur en naissant, et c 'est pas bon pour lui »
-
Je peux dire que ce passage m’a beaucoup encouragée à continuer à lire la
suite du livre, car j’ai pu voir et apprendre des choses. En fait ce livre est vraiment intéressant et amusant.
La façon dont Célestine Hitiura Vaite raconte et interprète « la vie » d’une
famille polynésienne est vraiment captivante. En effet l’écrivaine y a mis sa
petite touche d’humour, sans oublier le subtil mélange entre le tahitien et le français qui rend ce livre encore plus intéressant à lire (et notamment pour les
locaux). Effectivement, c’est une sorte de « reflet » quant à l’histoire de Materena et sa famille, famille typiquement
polynésienne.
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LittéRama’OHi » 2D
Lectures et commentaires - Bleues du lycée de Tarauao
A tea roa, Voyages inattendus
Marie-Claude Teisser-Landg par Heitea Deane
Tout d’abord, j’ai choisi ce livre au hasard donc je ne savais pas trop à quoi
m’attendre. Le titre ne me disait pas grand chose. Ensuite, j’ai commencé a
feuilleter, sans rien trouver d’intéressant.
..
.enfin, qui m’intéresse quoi ! ! ! Puis
à la fin du livre, j’ai trouvé ce beau passage.
J’ai choisi ce passage car il parle de la fin d’une histoire amoureuse, qui
est très émouvante. Ce qui m’a beaucoup plu.
C’est l’histoire d’une femme appelée Sophie qui quitte son amoureux,
Romuald.
Avant le décollage de l’avion, elle regarde au loin, vers la mer. Ce qui est
romantique mais en même temps nostalgique, mélancolique et émouvant. Elle
a le regard triste car elle doit quitter l’être aimé. Elle est prête à tenter l’impossible. Elle est courageuse. Et, j’aime ça, le courage. « fa’aitoito ». Il y a aussi un
peu de tahitien et j’aime la langue tahitienne. C’est la dernière phrase que dit
Romuald à Sophie :
«
...Aue te mauiui to ’u mafatu. E'ore e mo ’e ia ’u to taua hereherehia
mama e...
»*.
Une fin déchirante, blessante sans solution. Une fin inéluctable. Elle doit
partir !
Je n’ai pas lu le livre en entier mais je vais le faire ! ! ! Car ce passage me
pousse à le lire entièrement.
Pourquoi une fin si fatale ?
*
«
.
..Que mon cœur mefait mal, ne m’oublie pas ainsi que notre amour... »
.
107
Tergiversations et rêveries
de l'écriture orale
Flora Devatine par Toreta Pugibet
Le livre que j’ai choisi est Tergiversations et rêveries de l’écriture orale,
TE PAHU A MONO 'URA, de Flora Devatine.
J’ai choisi de lire ce passage parce qu’il m’a beaucoup plu, il me fait rire.
Flora DEVATINE, parle dans ce passage de ce que l’on ressent lorsque l’on se
met à écrire, surtout physiquement :
«
«
Ça fait mal aux mains ! »
Ça fait mal aux doigts ! »
Puis elle ajoute aussi :
« Pour écrire il
« Il
faut être as »
faut être popa ’a »
Ces phrases me font moins rire, mais ça me plaît. Car au fond, tout le
monde pense ça, alors que ce n’est pas du tout le cas. Tu n’as pas besoin d’être
intelligent, Français, pour savoir écrire ; c’est une chose que chaque être humain
peut faire s’il s’en donne les moyens. Chaque idée même la plus idiote, peut
devenir roman ou encore poème. Tout le monde peut écrire même les moins
intelligents, mais ce qu’elle décrit là est l’idée que chaque Tahitien se fait de
l’écriture ; pour eux, écrire, c’est typiquement Français et c’est une idée qu’ils
ne se sortiront
jamais de la tête, si l’on ne les convainc pas.
Ensuite pour finir elle ajoute ici, les raisons pour lesquelles nous n’avons
pas le temps d’écrire, parce que tout le monde, en particulier les Tahitiens, a des
occupations beaucoup plus importantes que se mettre à écrire :
« La vaisselle à laver »
« Le
linge à repasser »
frères et sœurs à garder, faire baigner... »
« Les
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LittéRama'oHi b za
Lectures et commentaires - Elèves du lycée de Taravao
Tous ces petits travaux à accomplir à la maison avant de penser à écrire.
Cela me fait rire car toutes ces choses, ces sentiments qu’elle évoque sont bel et
bien vrais, nous n’aimons pas écrire, nous Tahitiens, c’est fatigant, c’est FIU’.
Ça encore une fois, une idée typiquement Tahitienne, pas le temps pour écrire.
Je crois que c’est cette idée que l’on a voulu mettre en avant dans ce passage,
et c’est pour toutes ces choses que ce
livre m’a plu.
Le Roi absent
Moetai Brotherson par Dacia Tahaia
Le passage lu est la première page tirée du livre Le Roi absent de Moetai
Brotherson.
Pour moi, ce passage évoque une famille et la signification du prénom
donné à l’enfant. L’enfant se demande pourquoi son père lui a rajouté un m à
son
prénom alors que Moana en tahitien représente l’Océan, donc pourquoi un
plus ?
m en
Ce passage concernant le prénom Moanam de l’enfant montre que le père
n’est pas doué pour chercher ou inventer d’autres prénoms. Moanam a droit à
trois prénoms, et nous, enfants de Tahiti, avons aussi un rapport avec ça. Nous
premier, pour l’école ; le deuxième, pour les membres de la famille et
le troisième, le nom de baptême. Pour le nom de baptême, cela est réservé uniavons le
quement aux enfants de religion catholique.
Ce passage lu me rappelle tant de choses concernant les prénoms donnés
cela montre que c’est bien de faire valoir la signification de nos prénoms à d’autres. Ce qui est bien pour nous, c’est d’insister
aux membres de ma famille et
plus sur la signification du prénom en tahitien qui veut dire quelque chose pour
nos futurs enfants.
109
Je reviendrai à Tahiti
Ariirau Richard par Randy Haerehoe
J’ai choisi le livre Je reviendrai à Tahiti de Ariirau Richard par hasard.
Mais à partir du moment où je l’ai ouvert, j’ai vite commencé à aimer le registre
de langue. Comme par exemple quand ils disent pa ’i. C’est un peu comme le
registre qu’on utilise pour parler à la maison ou entre amis à l’école. Et quand
j’ai vu cela, ça m’a vraiment encouragé à lire la suite parce que je comprenais
mieux, comparé aux livres de Maupassant ou de Chateaubriand par exemple. Je
ne dis pas que je n’aime pas lire les livres de Maupassant ou de Chateaubriand
mais c’est différent des livres qui sont de chez nous.
J’ai aussi aimé les scènes érotiques, car c’est tout détaillé et c’est ce qui est
différent des autres livres. C’est rare qu’on y trouve des scènes pareilles dans
les livres que l’on lit d’habitude. Ce que j’ai le plus aimé, ce sont les dialogues.
Comme par exemple le passage que j’ai lu devant madame Flora Devatine
qui elle aussi fait partie des écrivains de Tahiti. Voici une partie du passage que
j’ai lu :
«
Clara !... Clara ! Tico dit pa 'i que ta copine, la demie, est la maîtresse
du président, c ’est vrai ?
-Mais non, il raconte des bêtises ce garçon. C’est un menteur, pa’i ! Que
je ne le voie plus traîner chez nous s’il continue de raconter des choses
pareilles. »
-
J’ai aimé le passage que j’ai lu car, aux moments des dialogues, je faisais
comme si
j’étais à la place des personnages.
S’il y a un conseil que je dois donner à mes amis ou à mon entourage, c’est
de lire des livres de nos écrivains tahitiens parce que leurs histoires sont un peu
ce que l’on subit nous en tant qu’habitants de Tahiti ou ce que les écrivains ont
vécu.
Voila ce que j’ai ressenti lorsque j’ai lu ce livre de Ariirau. Et en plus c’était
la première fois que je lisais un livre de chez nous, et je n’ai pas du tout regretté.
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Lectures et commentaires - Elèves du
lycée de Taravao
Théâtre d’Océanie
Valérie Gobrait par Teheiarii Teururai
.
I
Au départ, j’ai choisi ce livre Théâtre D'océanie pour deux raisons :
-
Tout d’abord, parce que je m’intéresse beaucoup au théâtre et encore plus
aux scènes de comédie. Je n’ai lu que
trois pièces de ce livre, et je trouve que le
registre de langue qu’utilise Valérie Gobrait ressemble beaucoup à celui que l’on
utilise dans la vie courante à Tahiti. J’ai beaucoup aimé les pièces quej’ai lues.
Comme celle qui est intitulée Le partage des Terres de Valérie Gobrait dans
laquelle un père doit partager ses terres avec ses trois fds en guise d’héritage,
car, depuis la mort de sa bien- aimée, il n’a cessé de prendre soin de ses enfants,
de les éduquer, les élever, les nourrir...L’un étant plus têtu que l’autre ils ne
s’entendent pas.. .L’Aîné se nomme « Haunui ». Lui, c’est le fils qui a le mieux
réussi ses études, il a décroché son bac en secrétariat et il travaille dans l’administration. Le second se nomme «Hu’i », il ressemble plutôt au vilain petit
canard, et il n’en fait toujours qu’à sa tête. C’est un alcoolique qui n’a aucune
responsabilité et qui ne crée que des problèmes. Et enfin, le dernier se nomme
« Teina », c’est l’enfant qui a été mis de côté, car il n’était encore qu’un bébé
lorsque sa mère est morte. J’ai vraiment adoré cette histoire car, la famille qui
est décrite dans cette pièce par Valérie Gobrait ressemble beaucoup au genre de
famille qu’il y a à Tahiti, les problèmes quotidiens, les relations pas très
joyeuses. Tout cela se rapproche de très près de la réalité. L’histoire de trois
frères qui ne voient pas tous les efforts que leur père fait pour eux. Pour ma part,
ce qui m’a vraiment plu, c’est surtout le fait que je puisse m’identifier à Haunui,
car je suis le seul de mes frères à continuer à aller à l’école et j’ai aussi un petit
frère qui est en primaire et ressemble beaucoup à Teina. De plus j’ai un autre
frère qui ne fait que des bêtises.
Ill
Hutu Painu
Marie-Claude Teissier par Ravahere Itchner
J’ai choisi de lire un extrait de Hutu Painu de Marie-Claude Teissier Lan-
graf. J’ai lu l’extrait où des Tahitiens qui ont longtemps vécu en France, arrivent
à Tahiti. J’ai pris cet extrait car, je pense que le moment où une personne rentre
chez elle après avoir vécu très loin, est un moment très émouvant. C’était touchant de voir tous ces Tahitiens qui étaient loin de chez eux pendant longtemps,
et qui reviennent enfin à la maison, à Tahiti.
Je pense que c’est un des meilleurs passages du livre.
J’ai aimé les paroles prononcées par la femme, Vaea, à la fille lorsqu’elle
dit que Tahiti ne se voit pas mais qu’elle se sent. Les Tahitiens sur le bateau ne
voient pas l’île mais ils savent qu’ils sont proches d’elle Car ils la sentent.
L’excitation de la petite fille lorsqu’elle se rend compte qu’ils s’approchent
de Tahiti me touche beaucoup car enfin, elle se sent chez elle, car elle se sent plus
tahitienne que française mais à sa grande déception lorsqu’elle arrive à Tahiti,
elle constate qu’elle est considérée comme une française. Elle devra se battre
pour s’introduire dans cette communauté qui la voit comme une étrangère.
Voilà les différentes raisons pour lesquelles j’ai choisi de lire ce passage de
Hutu Painu.
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Lectures et commentaires - Elèues du lycée de Taraoao
Comme deux navires qui se croisent
dans la nuit
Tumata Robinson par Poerava Dupuits
Mon livre s’intitule Comme deux navires qui se croisent dans la nuit écrit
par Tumata Robinson. Le passage que j’ai choisi parle de « tupapa’u » dans la
vallée d’Ofaipapa. Le choix de celui-ci ne s’est pas directement fait. Tout
d’abord, il m’a fallu feuilleter en ouvrant des passages par hasard. Mais, au fil
du temps, plus je feuilletais et plus je m’y intéressais. J’ai donc pris la décision
de lire ce livre en entier. Celui-ci raconte la quête de Tumata, sur les réelles
causes
de la mort de sa mère. Ce livre est passionnant. J’ai beaucoup aimé la
sincérité de l’histoire, ainsi que les événements qui s’enchaînent. Je trouve que
ce livre est imprégné de mystères, qui se résolvent petit à petit au fil des pages.
J’avoue que certains passages me font frissonner, surtout ceux parlant des
tupapa’u ». D’ailleurs c’est parce qu’il parle d’une vallée hantée par des
tupapa’u » que je l’ai choisi. Il m’a beaucoup marqué, lorsque je l’ai lu, j’en avais
la chaire de poule.
«
«
« Des
tupapa 'u, il y en a plein par ici. Dans l’ancien temps, on disait que
toute la vallée d’Ofaipapa était une terre sacrée, pleine de marae,
de fare
tupapa ’u, alors il y a des ancêtres partout, des esprits qui se baladent et qui ne
rigolent pas, c’est vrai ».
De plus, en entendant toutes les lectures de mes camarades, je me suis
rendu compte que plusieurs d’entre elles étaient amusantes. J’ai donc pris la
décision de trouver un passage intéressant et amusant, or aucun d’eux ne me faisait rire. Bien au contraire, je ressentais de la peur, de la tristesse et du mépris.
C’est pourquoi j’ai choisi un passage effrayant à mon goût. Le fait de savoir que
l’histoire transmise par l’écrivaine est réelle, me captive encore plus et
déclenche en moi une sensation de peur intense. Il y a d’ailleurs beaucoup d’autrès passages parlant de « tupapa’u », mais je ne les ai malheureusement découverts qu’après la visite de.Madame Devatine.
J’ai beaucoup aimé Comme deux navires qui se croisent dans la nuit, c’est
une histoire
intérêt.
étrange inspirée des faits réels, qui justement lui donnent tout son
113
Hombo
Chantal T. Spitz par Karmen Petit
Le passage que j’ai retenu est tiré du livre Hombo écrit par Chantal T.
Spitz. Ce passage raconte l’au revoir que fait un jeune homme, Hombo, à sa
famille : c’est le commencement d’une nouvelle vie, un long voyage vers une
terre inconnue, loin de sa terre natale.
J’ai choisi de lire le dénouement de l’histoire à mes camarades car il m’a
beaucoup plu et ému. Ce passage exprime l’amour qu’éprouvent les Tahitiens
pour les leurs. C’est très courant à Tahiti, lorsqu’un membre de la famille part à
l’étranger, de voir toute la famille réunie le jour du départ pour lui dire au revoir
et « fa’aitoito » pour sa nouvelle vie. Il n’est pas rare de voir quelques uns verser
des larmes. Ce texte est donc inspiré de la réalité et c’est ce qui me plaît.
Je m’identifie plus à cette œuvre qu’à celles que l’on étudie habituellement
car le
langage utilisé par l’auteur m’est très familier. Le mode de vie des per-
sonnages aussi ne m’est pas inconnu. L’histoire du jeune homme qui a tout
appris de la vie grâce à sa famille, qui connaît des difficultés, arrive à les surmonter et qui, à la fin, part pour commencer une
nouvelle vie, peut-être remplie
d’aventures, m’a beaucoup touchée.
En lisant ce passage à mes camarades, j’espérais leur faire passer un message. Aujourd’hui, c’est dur de quitter le foyer familial :
« L’avion
—
décolle Hombo part pour exister.
Mon Dieu prend pitié de moi, mon cœur se casse. »
Mais un jour, il va falloir voler de ses propres ailes et faire sa propre vie,
tracer sa route pour « exister » comme l’a fait Hombo. Je pense que
c’est ce que
l’auteur a voulu faire passer comme message au lecteur, ce qui m’a poussé à lire
le livre en entier.
L’amour de la famille, une nouvelle vie et un nouveau chemin, une nou-
velle terre et des au revoir qui font mal. Voilà tout ce que j’ai aimé et pu retenir
de cet extrait de Hombo.
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LittéRama’oHi » 20
Lectures et commentaires - Bleues du lycée de Tarauao
L’Arbre à pain
Célestine Uitiura Vaite par Ludmilla Vaiho
‘Tupapa V est le titre du texte que j’ai choisi tiré du livre L’Arbre à pain
de Célestine HITIURA VAITE.
Les raisons pour lesquelles j’ai choisi ce texte sont les suivantes.
Lorsque j’ai vu le titre du texte, je me suis tout de suite dit que c’est ce passage là que je vais lire. Le titre m’a fait penser à beaucoup de légendes tahitiennes que l’on me racontait dans le passé au sujet des ‘Tupapa’u’. Même
lorsque j’ai lu la première page, ça m’a plu car on parlait de tupapa ’u.
‘Lorsque Materena raconte l'histoire d’une femme qui aimait siffler la nuit
dans sa cuisine et qu ’un soir un tupapa ’u avec des pattes de bœufs est venu lui
rendre visite. Tellement qu ’elle a eu peur elle est tombée dans sa marmite et elle
est devenue folle. Puis elle ne sifflait ni la nuit ni le jour. ’
Le texte a ce côté amusant et effrayant. Avec des mots tahitiens qui sont
introduits à l’intérieur du texte. Ainsi que la façon dont les personnages jouent
leurs rôles. C’est tout cela qui m’a donné envie de lire son livre en entier. Tous
les passages qu’elle a écrits m’ont plu également: comme ‘Lefilm d’amour ’,...
et bien d’autres encore. Ses histoires sont des moments passés ici en Polynésie.
C’est la vie d’avant que l’on raconte. Je trouve que c’est un livre merveilleux à
lire et amusant. Alors ceux qui liront ce livre à leur tour ne le regretteront pas.
Et de plus ces textes ne sont pas difficiles à comprendre par rapport aux textes
que nous avons l’habitude d’étudier en français. La façon dont parle l’auteur, en
mélangeant le français et le tahitien, me rappelle mon quotidien.
115
Tiare
Célestine Hitiura Vaite par Sacha Williams
J’ai choisi de prendre un extrait du livre Tiare, écrit par Célestine Hitiura
Vaite.
Ce passage parle de la rencontre entre Loana, une jeune Tahitienne, et Torn,
jeune Français faisant son service militaire. Il parle de leur rencontre, dans
un bar réputé, mais aussi de leur séparation.
un
Après s’être rencontrés, ils emménagent. Au bout de six mois, Tom se
moque du poulet pois cassés de Loana devant les invités, et il quitte ensuite la
maison.
J’ai choisi ce passage car il parle d’amour, d’un amour qui est prêt à sup-
porter toutes les critiques ; mais il y a aussi beaucoup d’humour, car l’auteur
parle d’une rupture en s’amusant, ce passage a fait rire bien des lecteurs.
Ça montre aussi le caractère des Tahitiennes de l’époque. Loana est tellement fière qu’il est hors de question pour elle d’aller récupérer son mari
a
qu’elle
chassé pour une petite dispute, elle décide d’attendre que Tom vienne lui
demander pardon, mais il ne revient jamais.
L’auteur est très doué pour parler de moments importants en s’amusant,
comme une rencontre, une
rupture et bien d’autres choses encore.
J’ai trouvé ce passage émouvant et amusant, il montre bien la mentalité des
Tahitiens de cette époque, qui traitent de putes les filles qui traînent avec des
Français.
Lire leur histoire d’amour m’a beaucoup touchée et c’est pour ça que j’ai
aimé ce passage, mais j’ai aussi été très déçue de voir qu’une belle histoire
d’amour qu’on croyait prête à faire' face à toutes sortes d’affrontements, se
brise aussi facilement, pour une chose aussi stupide qu’une dispute à propos de
cuisine.
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LittéRama’oHi »20
Lectures et commentaires - Elèves du lycée de Teravao
Vîle des rêves éerasés
Chantal T. Spitz par Vaimiti Hunter
J’ai choisi un passage tiré du livre L’île des rêves écrasés écrit par Chantal
T. Spitz.
J’ai donc choisi ce court passage car il contient une émotion particulière,
celle de la séparation physique de deux personnes Laura et Terii qui s’aiment
d’un amour profond.
Ils se quittent simplement et se promettent un amour éternel, le moment de
la séparation est très dur c’est pourquoi j’ai pris plaisir à lire ce passage je me
suis mise à la place des personnages et je conseille donc à mes camarades de le
lire.
Cette histoire est émouvante car Laura et Terii vivent un amour impossible
elle qui vient de métropole pour l’envoi des missiles et lui qui milite contre les
envois de missiles. Je pense que cette situation de contraire fait tout le charme
de leur amour et de ce passage :
« - Nous nous écrirons
-
?
Nous aurions encore plus mal. Ilfaut nous donner une chance de moins
souffrir.
-Je t’aime comme aucune femme ne t’a jamais aimé. Je t’aime comme
aucune
femme ne t’aimera jamais. Je t’aime plus loin que ma vie et plus loin
cpie ma mort. Dans toutes les vies qui me restent à vivre, je t’attendrais et je te
chercherai. Je renaîtrai de chaque mort pour t’aimer. Et quand l’univers aura
cessé d’exister, quand tout aura disparu, je t’aimerai encore.
-
Tu es en moi Laura. Pour l’éternité de l’espace. Pour l’immortalité du
temps, je t'aime. »
►
6
/*, c
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Léopold Hnacipan
Né en 1964, à Lifou une des îles Loyauté. J'ai fait
toute ma scolarité jusqu'au collège sur l'île avant d'aller sur
Nouméa pour le lycée et Grenoble pour des études universitaires. Aujourd'hui, j'enseigne le français dans un collège
confessionnel de la Grande terre. L’écriture a toujours été
une passion. Entre mes cours et ma vie de famille,
j'écris. Au
début, j'écris pour m'exorciser en quelque sorte. Mais, de
Wé2
plus en plus je tends à aller vers des sujets de la vie quotidienne en Nouvelle-Calédonie, et surtout ceux auxquels le
peuple kanak est confronté comme la drogue, l’alcool, la
condition femme etc...
Les seins de Wananathin
Nous arrivions vers la fin de l’année. Et, la chaleur rendait déjà nos journées
de classe de moins en moins supportable. L’atmosphère devenait étouffante.
Nous étions alors intenables devant notre vieil instituteur. Il n’y avait pas que
nous autres, ses élèves, qui menions la vie difficile au vieux Wakeca
qatr. L’influence des autres écoliers qui étaient déjà en vacances avant nous et qui arri-
i
vaient de Wé, créait aussi un électrochoc dans la tête de notre vieil instituteur.
Pique-niquer. C’était le nouveau mot qui avait enrichi notre vocabulaire
journalier. Ce mot avait d’abord circulé dans la cour de l’école pendant nos
I heures de récréation. Luetu, le fils d’une tante de la tribu, un ancien de notre
école, poursuivait sa scolarité à
à l’école pilote. Il nous attendait toujours sur
notre chemin de retour pour nous raconter ce qu’il vivait
déjà là-bas. En effet,
après le cours élémentaire à Hnadro3, on passait en cours moyen à Wé ou bien à
Hmelek. Deux établissements publics, après quoi, nous mettions le cap sur Nouméa. On n’avait pas idée du niveau auquel nous allions être affectés. Seulement,
;
nous étions, sensés être des érudits pour élever le niveau de
l’intelligence à la
1
Wananathin
:
Le nom d'une fée à qui les légendes, racontées lors des veillées dans la case, attri-
buent des gros seins pour étouffèr les enfants rebelles. Wananathin est aussi l'ancêtre
d'un clan de la tribu de Thuahaik, une tribu de l’île de Drehu.
2
Wé : village (ou capitale) de l'île de Lifou. Lifou faisant parti des trois îles Loyauté.
3
Hnadro, Kejëny, Hmelek, Hunbj, Luengôni, Mou, Luecila sont des tribus de l'île de Lifou.
totémique
119
tribu. Suivre nos aînés : nos modèles de réussite. Il n’y en avait pas pour dire.
Seulement, on passait, et importait peu la filière qu’on allait prendre. On n’ignorait tout de cela. « Tu vois Walewen, il est maintenant à Do-Néva. Si tu continues
à bien travailler, tu vas finir comme lui. » Disait ma grande sœur qui percevait
en moi des
dons, et surtout de l’intelligence.
L’intelligence, c’était trop dire. J’excellais à Hnadro, à l’échelle d’une
petite école de tribu. En 1971, nous étions quatre élèves en cours préparatoire
deuxième amiée. Tous, de même niveau. Ailleurs, je n’aurais pas eu les mêmes
attributs qu’à Hnadro. Je dominais par la faiblesse de mes camarades et cousins
de classe en même temps.
« Pique-niquer » a dû s’échapper de la bouche d’un camarade d’école dans
la cour de récréation. Luetu était sûrement pour quelque chose. Il était vrai qu’à
Wé, à chaque fin d’année, les élèves et leurs instituteurs avaient leur sortie.
Un jour, le maître nous prévint que la semaine qui allait suivre, allait avoir
lieu une sortie dans une tribu du bord de mer au sud de l’île. Une première.
Jamais nous n’avions eu de sortie dans notre vie d’écolier. Même, les générations
avant nous n’ont eu de sortie de classe à Hnadro. C’était connu. Une trouvaille.
On s’étonnait alors en s’émerveillant déjà de la nouvelle orientation pédagogique
du vieil homme. La bonne et grande résolution. La nouvelle était accueillie dans
la classe par des cris de joie et avait fini par gagner rapidement nos foyers. « Sortir en pique-nique » était sur toutes les lèvres à la tribu. La sortie avait apporté du
nouveau à notre
ordinaire. Elle modifiait même nos rapports avec les parents à
la maison. Nous étions devenus par la magie du mot pique-nique, des nouveaux
élèves. Nous allions nous aussi être investis par le progrès, comme tous les
enfants du monde. La résolution de notre enseignant se répandit rapidement à la
tribu. Les femmes en parlaient pendant les soirées de rencontre à la maison du
petit chef de la tribu lors de la confection de la natte, participation de la tribu à la
grande case de la chefferie de Mou. « Eux maintenant, ce n ’est plus comme à
notre époque. Ils font des sorties. Ceux de l’école pilote de Wé sont allés à la
plage de Mou. Ils ont passé toute la journée de vendredi là-bas. » Dit Ikalia la
maman de Luetu. Elle parlait posément en clignant des yeux et en lissant bien les
feuilles sèches de pandanus tant elle semblait connaître l’école de son enfant.
« Les élèves de Luecila sont allés à Qamalany. Ils y ont passé même la nuit de
jeudi là-bas. » Surenchérit-elle. Il est vrai que la tante était la seule femme salariée de Hnadro. Elle travaillait à Wé, le ménage à la mairie. Personne n’avait
exactement idée de ce que ménage voulait dire. Elle était seulement investie du
progrès. Deux maisons : une à Wé, la capitale et l’autre à la tribu. Elle était toujours citée dans les discours à la tribu pour être passée comme un modèle de réussite. Elle ne touchait peut-être pas beaucoup à l’époque, elle arrivait cependant à
ménager son foyer. Mes autres tantes l’enviaient certainement. Je les entendais
inAvutetérss
j LittéRama’OHi tt 20
Léopold Hnacipan
toujours parler mal de tante Ikalia dans les commères. « Fille mère, elle va à Wé
Hnadropour s’occuper de sa mère. » D’autres tantes en rajoutaient et en inventaient d’autres paroles déplaisantes pour bien la traiter avec
mépris. Ikalia, la femme de mauvaise vie. La fille mère qui va encore dénicher
un enfant par-ci, par-là. C’était la jalousie qui accouchait
l’opprobre.
Les mamans nous préparèrent alors nos goûters et nos effets pour la plage
de Luengôni. Icica, pour la circonstance avait deux boîtes de pâté et une bouteille
de boisson gazeuse d’une très jolie couleur. Tous les écoliers que nous étions, le
remarquâmes très vite. Du coup, chacun s’efforça de lui donner plus d’amour que
d’habitude. Acic avait conscience qu’on était jaloux de lui. A l’époque, il était le
seul garçon de la famille du deuxième oncle qui allait à l’école. Tout le monde
n’avait jamais vu, ni goûté à ce met... de luxe. Du pâté de jambon. Je me souviens bien de cela. On élaborait alors des stratégies d’approche pour avoir droit
à un peu de miettes de la boîte du cousin à l’heure de casser la croûte.
L’heure du départ sonna. Tous les élèves prirent place dans la Peugeot 404
du vieux Wakeca qatr. On chantait les comptines à tue-tête. D’autres criaient de
joie. Une belle journée s’annonçait. Dépassé Kejëny la tribu voisine, où nous
avions aussi crié les passants que nous allions nous baigner à Luengôni, la
camionnette Peugeot quitta la route principale et s’enfonça dans la brousse en
direction de la grande forêt. Là-bas vers le bord de mer et des falaises. Exactement
comme la grande forêt de chez nous à Hnadro. Là où on allait donner à
manger et
déplacer les biquettes de mon oncle. Le dernier frère de ma mère. Aussitôt, nos
chants s’estompèrent. On s’inquiéta, mais on nous rassura que c’était juste pour
une affaire qui ne prendrait pas beaucoup de
temps. Notre instit s’était rappelé
d’un différend l’opposant à Kumala qatr au sujet d’un chevreau qui ne lui avait
pas été livré chez lui à Troutrouh.hu. Arrivé chez Kumala qatr, notre instit présenta
le qëmek. L’ermite remercia le geste et offrit du café moulu aux visiteurs pour
manifester son hospitalité. Les deux vieux s’installèrent après sous la tonnelle,
Jako qatr, l’épouse du vieil homme reclus, étala la natte et nous appela aussi pour
nous asseoir. Tout le monde lié
par le désir de vite repartir s’impatientait et ne quittait pas la voiture pour faire revenir le vieil instit sitôt son affaire conclue. On discuta alors avec le conducteur. Wakeca qatr prenait son aise et son
temps qui était
au lieu de rester à
aussi le nôtre. Les voix et les fous rires fusaient alors. Ils se serraient la main et se
congratulaient à chaque fois qu’ils évoquaient des souvenirs. C’était comme deux
enfants, deux amis qui se retrouvaient depuis de longue date. Ils devraient sûrement entretenir une très forte amitié. Leurs discussions emplissaient Gazinemaea,
ce bout de pays fort éloigné de Kejëny où il faisait bon vivre si on voulait s’éloigner des remous de la tribu. Un bel endroit pour se refaire une santé.
Un à,un, chacun mit un pied à terre, puis deux. Quelques uns s’éloignèrent
même de la voiture. Pas trop loin, juste à la portée d’une voix. Quelques autres
121
se mirent sous les
grands banians qui poussaient autour de la cabane de l’ermite.
pour attirer l’attention
du vieil homme qui n’entendait pas ou qui se fichait éperdument de nous. Il
continuait tout son soul. Il conversait allègrement avec Kumala qatr sans faire
cas de notre présence.
L’éternité eut raison de nous. Quelques filles sont allées aider la
grandmère pour casser les feuilles de choux gluants. Deux
garçons furent nommés
comme chefs de notre
groupe pour attraper le chevreau parmi le troupeau de
cabris du vieil homme. Charlie et Haedas. Ils ne perdirent même
pas de temps
On poussait volontairement des grands ouf d’impatience
à abandonner leurs effets sous les bancs dans la benne de la camionnette. Ils dis-
parurent ensuite dans la broussaille en empruntant le sentier que le reclus leur
pointait de l’index. Ils ne prirent même pas le temps de nous appeler, Emile et
moi. Ils étaient tout joyeux qu’ils partirent en courant. Courir
après ces pauvres
bêtes était un jeu pour nous tous. C’était ce que nous faisions tout le
temps en
allant chercher du bois après nos cours de l’après-midi. Mon oncle nous avait
confié la charge du nourrissage de son troupeau.
Le soleil de décembre chauffait la terre entière de tous ses
rayons. Il était
à son zénith. Le ciel était cruellement beau de bleu. Les
petits êtres que nous
étions, devenions une fois encore abusés par l’autorité de notre instituteur. Notre
impatience tirait toujours vers l’autre moitié de la journée. Moi, au fond de ma
petite tête d’écolier du plateau, je remis encore une fois en doute ma foi au
monde des adultes, même à mon grand oncle, celui qui était notre référence à la
tribu. Toutes les grandes personnes sont menteuses. Je mis fin de me créer à
moi-même des illusions. Le soleil était déjà haut dans le ciel bleu. Très bleu.
Tout le monde comprit que le large marin serait du
cerveaux
pur fantasme au fond de nos
d’élèves du plateau. Quelques uns parmi nous n’avaient jamais vu
Luengôni. La mer était le rêve de toujours, une jouissance pour un habitant du
plateau. Wakeca qatr, il est de Drueulu, une tribu du bord de mer de l’île, surnommé Littoral. Tout le monde en voulait au vieux. Mais comment
l’exprimer ?
n’y
avait pas de conseil de classe à l’époque et même que s’il
y en avait un, le dialogue serait toujours à sens unique. Le vieux parlait, nos parents écoutaient et
Nos parents ne savaient même pas qu’ils pouvaient formuler des vœux. Il
exécutaient surtout. La réunion se résumait de la sorte. C’était le vieux Wakeca
qatr qui décidait même à la place de nos parents.
C’était sur lé bord de la route principale où je me tenais avec Loulou
que Waipio était venue à notre rencontre.
Monsieur a dit qu’on va rester ici mais qu’on peut faire tout ce qu’on veut.
Les autres ont déjà construit des cabanes, Waimo, sa maison c’est comme un nid
d’oiseau. Il l’a construit sur un arbre. Comme on fait quand on va chercher du
bois sauf que lui, c’est meilleur. Le chauffeur lui a donné la main.
inRuuteférss
LittéRama’OHi # 2D
Léopold Hnscipan
Tu fais quoi ? Moi je me joins aux autres. Reprit Loulou qui s’engagea sans
hésiter sur la voie qui rejoignait les autres camarades.
Je me tins tout seul face à Waipio qui reculait instinctivement sur son che-
min du retour. Elle ne voulait pas être trop distancée par Loulou.
Vas-y, moi, je vais à Luengôni. Lui crachais-je au visage d’un ton sec. Et
tu diras ça à ton vieux con de bouc !
J’étais agressif. Je sentais mon sang chauffé couler sur toutes les artères de
Il tapait fort à ma tempe. Mes larmes allaient même couler. Mais je
que j’avais honte de pleurer devant Waipio. Cette dernière avant de disparaître à son tour, prit bien son souffle pour hurler
à mon encontre que Wananathin* allait m’étouffer dans ses seins. J’en avais cure,
ma colère me portait pour
m’éloigner de Gazinemaea. Je ne voulais même pas
imaginer ce que faisait notre vieil instit. Je savais qu’il discutait. Et il discutait seulement faisant face à Kumala qatr. Ces vieux, ils ont leur petit monde à eux. Parler,
se serrer la main, parler encore, cracher, rire comme bêle le bouc
qui a envie de
monter sa bique, péter, croiser et décroiser les pieds, s’étirer mais toujours assis,
se lever après pour aller faire leurs besoins dans les brousses. Et le monde tourne.
mon corps.
me retenais très douloureusement parce
Autour d’eux. Nos vieux sont nos maîtres. Notre centre d’attraction.
Je ne sentis même pas un aiguillon d’hésitation. Je me mis à courir en
direction de Hmelek, la tribu voisine. Il fallait passer deux tribus pour arriver
sur la
plage. Sur cette plage. A nu-pieds, je ne mis pas de temps à prendre mes
distances de l’endroit où Wakeca qatr déroulait magistralement sa monstruosité.
Je m’efforçais de tout oublier de Gazinemaea, même le pâté et le soda du cousin. Fichtre ! Je courais la liberté à perdre haleine. J’étais transporté. Le vent
arrivait par bouffées successives et soulevait la poussière qui me fermait les
yeux. Je m’amusais. J’étais tellement heureux que j’oubliais d’être coupable
d’avoir désobéi à l’autorité du vieil homme. « Luengôni, Luengôni » répétai-je
par moment en criant aux oiseaux et à la nature entière. Je sautillais. Non. Je
sautais. Non. Je m’élevais. J’arrivais jusqu’aux étoiles. Je voyais même la terre
entière. J’étais débordant de gaieté. Une joie intense me soulevait de terre.
Près de Hmelek, je fus surpris par une femme. Elle sortait d’un sentier qui
rentrait dans les champs.
Ah, c’était toi alors que j’ai vu. Et tu étais avec qui ?
Je suis tout seul. Répondis-je d’une félicité infinie.
Le fait d’avoir marché seul m’avait enorgueilli. Les yeux de la vieille
femme s’écarquillèrent. Elle tiqua du visage par moment. Ses paupières tremblèrent à la manière des aveugles qui cherchaient quelque chose qu’ils ne pouvaient pas voir. Quelque chose s’était brisée en elle. Je reconnus, une maman
tourmentée. Elle s’était retirée de la route pour nous voir arriver. Elle fut suiprise
de se trouver seule devant un môme.
123
Et de qui es-tu le fils, mon garçon ?
De maman Atrexetë de Hunôj. J’arrive de Hnadro...
Je sais, elle est originaire de là-bas, tu dois m’appeler maman. Elle est ma
sœur, nous avons grandi ensemble à Eika à Hmelek, quand les deux vieux
étaient encore pasteurs chez nous.
Il se passa un temps avant qu’elle reprit :
Et, où est-ce que tu allais comme ça ?
A Luengôni. Repris-je.
Elle ferma fortement ses paupières en grimaçant comme si quelque chose
eut touché sa prunelle.
Viens mon fils, ne reste pas sur la route.
Je sortis de la route pour rejoindre la vieille dame sous le, figuier sauvage
où elle était debout avec son panier d’ignames sur les épaules. C’était un endroit
où les gens qui arrivaient des champs, se reposaient. Cela sautait aux yeux. Un
endroit très dégagé avec des écorchures de couteau sur le tronc du figuier sauvage. Elle se tourna en direction des champs et appela trois fois le prénom de
Unedro qui répondit :
Pour quoi faire ?
Il y avait de l’agressivité dans la voix. Il sortait sûrement de sa sieste. Il
arriva quand même. Un jeune homme de l’âge de Luetu. Avant qu’il nous
rejoigne tout à fait sous le feuillage du figuier, la vieille dame se fut déjà décalée
en s’avançant à sa rencontre. Elle lui murmura des paroles graves que je ne
compris pas. Je saisis seulement son attitude très inquiète qui prit très soin pour
que les paroles n’arrivent pas jusqu’à moi. Unedro avait les mêmes réactions
que la dame quand elle m’avait vu pour la première fois. Il repartit en courant
en reprenant le sentier qui menait vers les
champs. Il reparut au bout d’un
moment. Il avait avec lui une marmite. Leur reste de midi. La dame m’installa
rapidement sur une racine de banian non loin du figuier. Pendant qu’elle tirait à
manger de la marmite, Unedro disparut. La dame était comme aux petits soins
à mes côtés. Alors, avec des feuilles de pandanus et des brindilles de bois mort,
elle alluma un petit feu pas loin de la racine où j’étais assis. Elle fit passer dessus
des feuilles d’un arbuste qu’elle voulait ramollir sur les flammes. Quand j’eus
fini de manger quelques ignames et les feuilles de choux gluants, elle me frappa
le visage avec les feuilles chaudes qu’elle venait de retirer de dessus les
flammes. Elle le fit en prononçant religieusement des paroles comme pour
conjurer un sort. Je sursautai en battant nerveusement les paupières. C’était
comme si je fus tiré précipitamment vers le grand jour. J’étais alors ébloui par
la brutalité de la lumière. Je fermai encore plus vigoureusement mes paupières
qui frétillaient toujours. Après ce rituel incantatoire, ce fut comme si je sortais
d’un long sommeil. Sur le bord de la route, attendait la voiture du vieux Wassa.
inRvutetérss
LittéRama’oHi # 20
Léopold Hnacipan
Le moteur continuait de tourner. D’autres personnes qui se trouvaient entre
Gazinemaea et Hmelek s’étaient jointes à lui.
Il faut le porter. Disait le vieux qui descendit en même temps de la voiture.
Le chœur des habitants de mon cœur résonna alors en écho et en force dans
ma tête. « Ekôlô cia la
hnetieng, ihengejë ekala, trodrei a uën, tco, tco, tco... »4
Il m’invitait à revenir et à continuer de marcher sur la route. La ritournelle en
fait, faisait parti de ces chants incantatoires qui nous permettaient de nous élever
du sol et de marcher dans le vide comme si l’on flottait dans le fond bleu de
l’océan. Les êtres sur la route me reprochaient aussi par leurs regards d’être rentré dans l’ornière et d’écouter la dame de Hmelek. Il me fallait repartir et respirer
l’air de la liberté à plein poumon. S’envoler. C’était ce que j’avais fait
auparavant avant d’être vu par la vieille dame. S’enfuir. Il me fallait m’en aller
en m’envolant d’une seule secousse. Je fis alors l’effort de me lever de la racine
de banian, je ne voulais pas que quelqu’un s’approche de moi et me touche,
mais ma force n’y était plus. Je sentis alors une lourde fatigue s’abattre sur tout
et une poussée qui me maintenait collé à la racine de l’arbre où j’étais
assis. Je n’avais même plus la force de bouger. Mes jambes étaient tout engour-
mon corps
dies. Je n’avais seulement que mes yeux pour fixer une autre dame qui se tenait
sur le bord de la route.
Une dame aux seins lourds. Beaucoup d’enfants riaient
et s’amusaient en courant autour d’elle. Elle me regardait fixement dans les
yeux ; mais mes yeux étaient troubles. Je n’arrivais pas à distinguer son visage.
Peu de temps après, je vis des mains s’agiter. Ces êtres-là s’en allaient. Ils me
quittaient. Pleurerais-je ? Je n’avais même pas de lamies. J’étais comme vide
d’existence. Insensibilisé. Je quittais l’autre monde en m’abandonnant.
Je fus seulement réveillé à Hunôj lorsque maman me vit allongé sur le
siège avant de la voiture entre la vieille dame et le vieux Wassa. Je pouvais alors
entendre dans la benne des voix de garçons dire qu’ils m’avaient retrouvé et que
j’étais en compagnie de Wananathin et ses petits.
La vieille dame pleurait maintenant en enlaçant ma mère. Dans la cour, il y
avait d’autres baraques qu’ils avaient érigées pour approvisionner les personnes
parties à ma recherche. La famille de Hnadro et même celle de notre vieil instituteur se retrouvaient réunies à la maison. Cela faisait deux jours que des jeunes
des tribus du plateau étaient en agitation intense entre Gazinemaea et Hmelek.
Ils étaient partis à ma recherche. Je mis beaucoup de jours à me remettre de ce
périple sans fin entre Gazinemaea et Luengôni. Seulement parce que Waipio
avait dit que Wananathin allait m’étouffer dans ses seins, j’étais parti avec elle.
4
Une ritournelle : “ Je pense tellement
à mon derrière qui pousse que je perdis ma raison et alors...
125
Rosa Lia
Studying in Comparative Literature at King's College
London has deepened my respect and understanding
for other cultures. In particular I have deepened my
knowledge of French both through the literature and
the language, as well as having had the opportunity to
study in the States at the University of North Carolina,
Chapel Hill. Alongside my studies, I write for the
university creative writing magazine and have been
working on filming spoken word poetry for a small
production company.
inRvutetérss
Mythologies of love
Giving a talk for KCL students, Chantal T. Spitz spoke about her frustration with the mythology of the Tahitian woman. She expressed her anger over
the idea that they come to greet you with breasts on display and flowers around
their neck and along with the flora and fauna have become a way of selling the
island to tourists.
She and others see Paul Gauguin’s paintings as mythologizing and primitivizing the Tahitian woman, as if the artist gains the object of his desire by
manipulating her in art fonn.
Yet while reading The Island ofShattered Dreams, I couldn’t help but feel
that we mythologize in many ways and for many ends. Gauguin is not the first
to simplify, or even transform, his subject matter so that it fits his desires.
Spitz’s book contains many love stories, one of them being the relationship
between Laura and Terii. When I put it to Spitz that the impression of love
seemed to me just as mythologized as the paintings, she asked me if I’d ever
been in love.
The answer? Yes. Head over heels. But it seemed far more in keeping with
Tiare’s view of writing, as ‘Shipping yourself bare to reveal yourself to another’
than Laura’s view of Terii ‘He is my beginning. He is my end. [...] He is
life. He is me.’
my
LittéRama’OHi » 20
Rosa Lia
Just as Edward Said claimed that colonial forces often respected the countries they occupied but did not see them worthy of self-governance, so does
Gauguin create a level of innocence in his subjects. This idea of representing
rather than letting people speak for themselves seems to be mirrored in Laura’s
need to find herself in another. It is as if love has claimed her sense of Self. To
borrow from Alison Krauss’s song Killing The Blues ‘nothing is sadder than los-
ing yourself in love’.
I think there are two aspects to this. The reflection of colonial domination
of the Other in romantic relationships, and the myth of love that requires a loss
of Self. Admittedly both sexes appear to be equally dominated by love — Temetua allows ‘his love for his land to fade so that his love for her
.
[Emere] might
grow’. I think this domination is therefore less a case of submission to a person,
than of the displacement and loss of identity associated with the postcolonial
state.
I think far too often we consume art out of a sense of lack. Whether this be
frustration with the state of the world, or a personal sense of desire. In further
response to Spitz’s question, I think love is about building a sense of Self as well
as
losing it. I also think it’s about the everyday more than about the stories that
make good art, and I think that often it’s the eveiyday that breaks it.
In short, most art uses myth. Myth gives us a sense of a shared experience,
which brings us closer together, though also fragments us by building unattain-
able models. Perhaps dreams should be shattered, if only to make way for the
real, for a sense of identity based bn firmer ground.
127
Carmen (Tlarcias
Née à Nouméa le 13 mai 1965, une
fille de 14 ans Marylou. Actuellement
professeur de lettres anglais, elle
enseigne au lycée professionnel Pétro
Attiti de Noumea. Auteur compositeur,
elle chante ses textes parfois. C'est une
ilienne contemplative et heureuse !
A cette enfant en lamies dans les rues de Bassora
occupée par les troupes dites alliées un certain 8 Avril...
Défigurer l'Espoir
Les yeux fermés
Les voix qui me parviennent sont les parfums d'Orient
Les sourires francs des enfants
Les regards de velours qui n'attendent plus l'Amour
Les plis soyeux des voiles
Femme d'Orient
Ton poing est dur mais ta main reste ouverte
A l'avenir
Qui s'accroche à la soie de ta robe
Qui l'implore
De le protéger de tout
De tous les dangers de ce monde
Si immense..
inAvutetérss
LittéRama’oHi » 20
Carmen iïlarcias
.Mère d'Orient
Frère d'Orient
Eve d'un autre temps
Ses larmes sont sèches
Tu donnerais ta vie
Sa douleur est silence
Pour conjurer le sort
Son poing est dur
Pour empêcher la mort
Il doit le lever haut
De te reprendre -
Car son coeur est lourd
Si tôt
Quand il te voit tomber
Celui à qui tu as donné la Vie
TOI
Enfant d'Orient
TOI
Son seul pays.
son seul
Enfant d'Orage
Innondé de pluies
D'un feu qui te rends orphelin
Qui te vide les veines
Petit Ange Lumière
En images
Le monde entier t'a vu t'en aller
En direct
Ils ont vu tes yeux
Sans vie
Que personne n'avait encore fermés
Ta main couleur du sable
Ne serrera plus aucune autre
Pas celle de ton père
Qui caresse la peau froide d'une arme
Priant
Sous ce Ciel ensanglanté d'Orient
Rêvant
Aux silhouettes des anciens
Dansant dans le vent du sable
Le guidant
A travers les brumes
Les reflets ternis
Des anciennes lumières
De la glorieuse Mésopotamie
enfant
129
Joindre ses mains
Les hommes, lorsqu'ils prient
Son espoir
Joignent leurs mains
Qu'un jour
Seuls, ou en groupe
Encore
Ils joignent leurs mains
Un homme
Leurs deux petites mains pour de si
Même un seul
grands espoirs
Cela parait si facile
De joindre sa main à l'autre
Joigne ses mains à celles d'un autre
A son autre main
Mais
Sans effort
Que la forçe et la chaleur de ses mains
Comme une étemelle prière
La prière les rapproche
Sans effort et sans détour
Et porte avec lui tous ses déséspoirs
Lui ouvre le coeur
Vers tous les espoirs du monde...
Un jour pourtant
Il faudra bien que la prière leur dise
Sans parler et sans détour
Que leurs mains jointent en son nom
Ressemblent tant à de l'amour
Mais
Que l'Amour
Lui aussi a sa prière
Unique et secrète...
Que les hommes,
Un jour,
Joignent leurs mains à celles des autres
Et l'Amour garde toujours son espoir
inRvutetérss
LittéRama’oHi s 20
flaëlls Poemate
Née à Nouméa, d'un père sicilien et d'une mère kanak,
c'est à la tribu de Baco, dans le Nord de la Calédonie
qu'a grandi Noëlla. Ses grands-parents, Poemate Alphonse et Madeleine qui l'ont éduquée, lui ont appris
la rigueur et le respect, et à travers ses textes, c'est leur
mémoire qu'elle'tente d'honorer. Sa tribu, les us et les
moeurs qui s’y rattachent sont
pour elle une source
d'inspiration intarissable, mais néanmoins, c'est toujours avec une certaine appréhension qu'elle écrit ses
textes. Elle espère qu'à travers son écriture, les jeunes
de son île apprennent à aimer la littérature.
La fourmilière
■
Une vie ne vaut rien, mais rien ne vaut une vie...
Neuf heures, on émerge tout juste de notre tanière. A nous voir ainsi, les
visages tout barbouillés de sommeil, les yeux cernés de ce bleu immonde que
tentent de détourner des cheveux hirsutes, on pourrait nous
prendre pour des
ours mal léchés sortis accidentellement de leur hibernation.
Autour de nous, chaudement emmitouflés dans des manteaux de tout genre
et enveloppés comme des sucres d’orges dans des échaipes
burberry, la popu-
lation hétéroclite de la grande ville de Paris se met en branle. Qui vers le métro,
qui vers le tramway, qui à vélo. Pourtant comme elles semblent lointaines ces
balades à bicyclette que chantaient gaiement Bourvil ou Montand et comme ils
paraissent inimaginables tout ces Fernand, ces Firmin et ces Paulettes qui pédalaient en toute liberté dans les rues de la Capitale, tant autour de nous se bousculent les Mohamed, les Mamadou ou les Lu-Yang entre les klaxons
assourdissants des taxis fous furieux, des cris des vendeurs à la sauvette ou des
voix envoûtantes des garçons de café, qui vous proposent très aimablement une
petite table bien au chaud à l’abri sous une tonnelle en plastique.
131
Nous venons de débarquer de notre petite île située aux antipodes du
monde, à cent mille lieux de tout ce brouhaha permanent, de ces vieux messieurs qui promènent leur caniche à poils frisés et qui nous frôlent sans prêter
attention à ce que nous sommes. Nous sommes des immigrés provisoires, des
migrants de passage qui viennent exporter le travail si durement élaboré à l’intérieur des vallées endormies de la Grande Terre vers la grande cité du parc des
expositions de Versailles...
Versailles, Louis XIV, Le Nôtre, terre de richesse culturelle, de richesse
intellectuelle nous accueille en ses lieux. Bon, nous sommes au parc des expositions, les grands jardins fleuris et les statues imposantes de ma vision du lieu
ont été supplantés par une sphère blanche métallique pareille à une noix de coco
et des grandes barrières de fer forgé, cela n’a rien de très poétique en somme,
mais il faut faire avec n’est-ce pas ?
Car aujourd’hui et pour cinq jours, nous devons honorer notre engagement
qui est de représenter notre Calédonie au salon du livre de Paris. Ainsi, nous
noyés dans la masse foisonnante des auteurs de tout horizon et
des maisons d’éditions de renom. Mais, nous sommes motivés et motivants, les
nous retrouvons
Gallimard et autres gros revendeurs n’ont qu’à bien se tenir.
Au milieu de la foule, nous restons nous-mêmes, partant dans des délires
incontrôlables, parlant un peu trop fort.
Le rire de Paul le slameur s’envole dans tous les couloirs du salon .et bouscule les esprits étriqués des gens trop sérieux, alors il commence son show et
déclame ses mots qui mettent à mal les maux, comme il aime tant le chanter à
qui veut bien prêter l’oreille.
Nicolas, tout de noir vêtu, tourne comme une fourmi, toujours en activité
allant prendre un livre par-ci en le reposant par-là, accroché à son téléphone
qu’il vient tout juste d’acquérir et qui lui complique un peu la vie ! Il regrette
son vieux Nokia avec qui il avait noué la relation tout
simple de locuteur à appareil. Bein oui, un mobilis (comme on nomme l’appareil chez nous) sert à téléphoner et non pas à prendre des photos ou à écouter de la musique, non mais
alors !
Et il y a aussi Luc la force tranquille tenant toujours d’une main ferme et
poétique son sac à dos noir et vert kaki, qui discute avec Chantal la rebelle polynésienne et Patrick toujours nostalgique de sa Vahiné...
Paris a réuni pour quelques jours tous les soleils du Pacifique.
Nous vendons nos livres, signons des dédicaces, brisons les clichés des
cartes postales qui hantent encore certaines personnes si curieuses de nos îles :
« mais oui, en Calédonie, la vie est très chère... les usines créent des
emplois,
oui mais à quel prix... Ah l’accord de Nouméa... La tribu ?... C’est notre quotidien ». Nous voulons juste leur dire à tous ces absorbeurs de « vouloir-savoir »
inAvutetérss
LittéRama’oHi « 20
(laëlla Poemate
que c’est de notre littérature que nous désirons parler. Nous ne sommes pas des
encyclopédies vivantes... Mais, nous nous prêtons au jeu car nous sommes
comme cela : toujours polis et
respectueux. Nous acceptons de nous faire triturer
les neurones, si cela peut faire plaisir à cet autre en mal d’un ailleurs
qui lui
parait si exotique. Ainsi, les journées se succèdent au rythme trépidant et
cadencé du salon. Dès lOh, nous nous présentons à notre stand. Nous y restons
quelques heures avant de se prendre une p’tite pause soit déjeuner, soit cigarette,
soit café et cigarette. Les heures s’égrainaient ainsi telles les
pétales de ces fleurs
qu’on arrache parce qu’on a le cœur fébrile.
Et puis un soir, toujours dans l’obligation et notre devoir d’écrivain, nous
devions nous rendre à la Maison de la Calédonie. Nous avons donc pris le
métro. Nous étions tout un groupe, une bande de joyeux lurons prêts à
conquérir
les souterrains de Paris la Belle. C’est toujours plus facile de se
déplacer en
bande, comme les bancs de raies mantas qui volent dans nos mers chaudes. Installée sur la banquette à moitié défraîchie du métro 12, je tentais
d’enregistrer
tous les noms des arrêts, noms que les habitués de la ligne devaient connaître
sur le bout de la langue et
que moi j’oubliais une fois la porte du métro fermée.
Mes amis ne prêtaient pas attention au monde autour d’eux, car ils parlaient de tout et de rien. Nicolas et Jean, debout devant moi et fortement
agrippés à la barre métallique causaient littérature. Paul, pour sa part encourageait en
frappant des mains, un vieux monsieur qui était monté avec son vieil accordéon
pour quémander quelques pièces. Sandy et Chris refaisaient l’histoire de leur
famille, ils étaient cousins et ils se rencontraient pour la première fois, ils avaient
donc beaucoup de choses à se raconter. Moi, j’observais toujours. Dans les couloirs du métro parisien, les gens cherchaient leur sortie d’un
pas rapide. Ils voulaient absolument s’extraire de ce dédale de pierre et des rails où l’air
qui
circulait, générait des odeurs nauséabondes. Les inconditionnels du métropolitain rentraient dans un tunnel, puis en prenaient un autre, débouchaient de droite
et rentraient à gauche. Et le rythme était toujours le même. Il fallait aller vite. Il
fallait sortir, retrouver un air plus pur ou moins pollué de cet enfermement
qu’on
s’infligeait par devoir envers son patron, sa société, son école. Ils se bousculaient, se suivaient, montaient deux à deux les escalators. Il fallait qu’ils sortent !
Alors, nous les Calédoniens avec nos airs nonchalants, on serrait à droite. Et on
les regardait passer comme des fusées sur pattes avec leurs traits tirés et le col
de leur manteau remonté jusqu’aux oreilles. Et chaque être reprenait sa voie,
dans des directions différentes et la vie continuait ainsi.
J’étais déjà venue sur Paris, mais jamais je n’avais pris le métro. Alors, je
tentais de percer son secret. Comment certaines personnes courraient presque
vers
la sortie alors que d’autres se complaisaient à demeurer dans ce monde
infernal, comme s’ils étaient déjà morts ? Et vous savez, ces pauvres damnés
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qui restent là assis des heures durant à regarder les fous de cette société de
consommation, sont ceux qui ont déjà tout perdu, ceux pour qui la lumière s’est
éteinte en pleine journée, ceux qui continuent d’avancer un
gobelet en plastique
empli de vin à la main... Dans cette fourmilière géante, il y a les travailleuses
et les égarées toutes régies
par la même Reine : la Vie, avec un grand V qui
aiguille certaines sur de bons rails et qui fausse la trajectoire pour d’autres. Je
regardais consternée, les pauvres clodos assis sagement côte à côte et les preneurs de métro debout près d’eux qui ne leur accordaient aucun
regard sans
doute par habitude de les voir là ou bien par peur d’attraper le mal de vivre...
Nous, nous avons fait comme tout le monde et avons regagné la sortie toujours en riant, en s’esclaffant des bêtises des uns et des autres. À la Maison de
la Calédonie, nous avons fait notre show : interview, lecture de
textes, échange
avec un public plus attentif à notre écriture. À la fin de cette
journée harassante,
après avoir ingurgité quelques bières du Pays et du bon punch fait maison, nous
avons pris le chemin du retour.
Dans l’embrassure d’une porte, à même le sol, caché sous trois tonnes de
couvertures, un homme dormait. Il faisait 4 ou 7 degrés. Nous sommes passés
près de lui sans rien dire, comme pour mieux respecter Sa présence.
Plus tard dans la soirée, Luc me glissa à l’oreille : « Tu sais, le mec
qui dormait par terre à la sortie de la MNC, bein c’est un mec de Lifou... Oui... ». Je
restais sans voix.
Lifou, c’est une des trois îles loyautés qui entourent la Grande Terre. Le
sable y est si fin qu’il vous glisse entre les doigts comme une rivière d’or et
l’eau est si claire qu’elle vous éblouit. Le cliché tant convoité, n’est-ce
pas ? Et
pourtant cet homme endormi là, avait décidé de quitter le paradis pour faire sa
vie dans l’enfer des villes.
Lui aussi s’était égaré dans la fourmilière géante de la Vie...
inRuvtetérss
LittéRama’oHi it 20
L'artiste
IVliriama Bono
Entre références contemporaines et interprétation traditionnelle, la peinture
de Miriama Bono brasse ses racines. Mélange de papiers, de peintures, de
matières, ses œuvres reflètent ce perpétuel va-et-vient, ce brassage revendiqué
et assumé, en toute liberté.
Le fil conducteur de sa recherche picturale reste le papier de soie,
qu’elle
froisse, retravaille, repeint, et qui par couche successive, forme la matrice de
l’oeuvre, presque une peau, qui évoque la texture du tapa. Le papier est la
constante de sa recherche. Il s’allie ainsi parfois avec de la toile, du bois, de
l’aquarelle ou de l’acrylique, selon l’inspiration du moment.
Miriama travaille le plus souvent autour d’un thème (“ Tiki ”, “ Tapa ”,
Origine ” ) qu’elle décline avec une trentaine d’œuvres, dans un même nuance
chromatique : Le noir et le brun, parfois teinté d’ocre, sont ses teintes de prédilections, couleurs pour elle essentiellement polynésiennes.
“
Pour sa prochaine exposition, Miriama entame une recherche alliant motifs
polynésiens et “ écriture ”, une idée qui lui est chère depuis un petit moment...
La graphie est un signe, tout comme le motif, porteur de sens, mais
également
esthétique... Un recherche esthétique à laquelle s’ajoute un questionnement plus
universel, celui des origines.
Une recherche en cours, dévoilée pour Littérama’ohi.
135
Remerciements à...
sa
S
Marie-Hélène Villierme.
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mU
Matareva Photos, Coco Urarii, musiciens, danseuses et danseurs qui ont participé
à Pina'ina'i
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Litténa
LittéRa
Ramées de littérature polynésienne
Te
hotu
Patrick
fïla'ohi
Rmaru, Uaihere Cadousteau, Steue Chailloun, Flora Deuatine,
Taraua Deuatine, Walérie Gobrait, Clothilde Grand,
fTloeaua Grand, Oraua
Guénin, Rnita Heiss, Henri Hiro, Isidore Hiro, Léopold Hnacipan, fTlalissa
Itcher, Rosa Lia, LU i If red Pina’i Lucas, Charles iïlanutahi, Diana Hakeahu
fTlao, Carmen ITlarcias, Chantal millaud, Jean-marc Pambrun, (Tly Phong
Hong, floëlla Poemate, Chantal T, Sptiz, Regina Suen Ko, Tahit-otera'i
Taunehene a, moana'ura Tehei'ura, Tuari'i Tracqui
2 000
ISBN
Fcfp
978-2-916411-10-0
Fait partie de Litterama'ohi numéro 20