B987352101_PFP1_2005_007.pdf
- Texte
-
Coll.
Littérama
Ont
Au vent
du Taui
participé à
Cote
ce
:
numéro
:
Patrick Araia AMARU
Mahirava ARIIOTIMA
Alexandre Moeava ATA
Louis-José
BARBANÇON
Anne BIHAN
Jean-Marie BIRET
Rarahu BOIRAL
Marc BOUAN
Aurélie CHANZY
Annie, Reva’e COEROLI
Flora DEVATINE
Vaite DEVATINE
Danièle-Taoahere HELME
Elise HUFFER
Malissa ITCHNER
Tatiana LAI KOUN SING
Jimmy M. LY
3
22
0154709
2
#r
v
'
v
?
*
v
Christa MAONO
Alvane MARAE
Miroslava PAIA
'
'
Jean MarcTera’ituatini PAMBRUN
Titaua PEU
TU
Ma’ohi
Raymond Vanaga P|ETRI
Chantal T. SPITZ
Marie-Claude TEISSIER-LANDGRAF
Elise TETUIRA
Numéro 7
Octobre 2005
EDITIONS
TEITE
Littérama’ohi
d’écrivains de Polynésie française
Publication d’un groupe
Directrice de la
publication
:
Flora Devatine
BP 3813, 98713
Fax
E-mail
:
Papeete - Tahiti
(689) 820 680
: tahitile@mail.pf
Numéro 07 / octobre 2005
Tirage : 600 exemplaires
Mise
en
-
page :
Imprimerie : STP Multipress
Patricia Sanchez
© Editions Te Ite 2005
HOTfOT; ’PAPttTt,
ARRiVË LE
fo
/
—'^
I
mmmW R*!™*
Littérama’ohi
Ramées
de Littérature
Polynésienne
Comité de rédaction
Patrick AMARU
Michou CHAZE
Flora DEVATINE
Danièle-Taoahere HELME
Marie-Claude TEISSIER-LANDGRAF
Jimmy M. LY
Chantal T. SPITZ
-Te
Hotu
Ma’ohi
LISTE DES AUTEURS DE LITTERAMA’OHI N°7
Patrick Araia AMARU
Mahirava ARIIOTIMA
Alexandre Moeava ATA
Louis-José
BARBANÇON
Anne BIHAN
Jean-Marie BIRET
Rarahu BOIRAL
Marc BOUAN
Aurélie CHANZY
Annie, Reva’e COEROLI
Flora DEVATINE
Vaite DEVATINE
Danièle-Taoahere HELME
Elise HUFFER
Malissa ITCHNER
Tatiana LAI KOUN SING
Jimmy M. LY
Christa MAONO
Alvane MARAE
Miroslava PAIA
Jean Marc Tera’ituatini PAMBRUN
Titaua PEU
Raymond Vanaga PIETRI
Chantal T SPITZ
Marie-Claude TEISSIER
-
LANDGRAF
Elise TETUIRA
SOMMAIRE du n° 7
Octobre 2005
Liste des auteurs
p.
Sommaire
Les membres fondateurs de la revue Littérama’ohi
Editorial
INFORMATIONS
DOSSIER
Au vent du Taui
: «
4
p.
5
p.
7
p.
9
p.
10
p.
15
p.
16
p.
23
p.
28
p.
34
p.
36
p.
41
p.
47
p.
59
p.
64
»
Introduction
Danièle-Taoahere Helme
Changements,
Chantal T.
vous avez bien dit
changements
Spitz
taui
Marie-Claude
On
Teissier-Landgraf
change les pions, on recommence
Titaua Peu
Annexion
Miroslava Paia
E
«
taui
»
ato’a anei
no
te reo ?
Raymond Vanaga Pietri
Changement de décor et de vitesse
Flora Devatine
Te tahi tauira’a... Le
changement
Jean-Marc Teraituatini Pambrun
Taui : Nous avons changé
en
littérature !
de pirogue et éclairci notre ciel
Elise Huffer
Au
non
de la gouvernance, oui à une
éthique océanienne
ECRITURES
Jimmy M. Ly
Sable noir...
Rivages lointains
p.
75
p.
79
p.
99
Araia Patrick Amaru
la
ora na
Le
tatou... Les
nouveau
prémices de l’abondance...
monde
Tuo Te Ama Alexandre Moeava Ata
La Rafflésie
en ses
JEUNES ECRITURES
-
mirages
POESIES
Alvane Marae
Souvenirs d’Australie
p.126
Mahirava Ariiotima
p.133
Changer? Renaissance,... Poésies
Vaite Devatine
Jet
p.138
d’autoportait
Aurélie
Chanzy, Christa Maono, Tatiana Lai Koun Sing
Orero et poèmes
p.139
Jean-Marie Biret Toromona, Elise Tetuira
p.141
Pehepehe
CONFERENCES
-
ARTICLES
-
3° SALON DU LIVRE DE PAPEETE
Anne Bihan
Paroles tressées
en
forme de libre abécédaire
3ème Salon du livre de Tahiti
«
sur
le thème du
:
La femme dans la littérature
(du) Pacifique
p.144
»
Rarahu Boirai
L’image de la femme tahitienne à travers la littérature française
du XX0 siècle
Louis-José
p.150
Barbançon
Pacifique
Femmes du
p.164
ACTUALITES LITTERAIRES
A propos du roman de Marie-Claude Teissier-Landgraf,
racines et déchirements (Editions Au vent des îles)
La fureur d’écrire. Interview de
Œuvre
Jimmy M. Ly (Serge Vialet - TahitiPresse)
poétique de F. Devatine (Marc Bouan)
L’île des rêves écrasées
e
Hutu painu
Chantal T.
Spitz (P. Humbert)
-
Tahiti,
p.166
p.173
p.175
p.177
L’ARTISTE DU N°7
Malissa Itchner par
Annie Reva’e Coeroii
p. 181
Littérama’ohi
Ramées de Littérature
Polynésienne
Te Hotu Ma’ohi
La
Littérama’ohi
été fondée par un groupe
apolitique
polynésiens associés librement :
Patrick AMARU, Michou CHAZE, Flora DEVATINE,
Danièle-Taoahere HELME, Marie-Claude TEISSIER-LANDGRAF, Jimmy LY, Chantal T. SPITZ.
revue
a
d’écrivains
Le titre et les sous-titres de la
sienne
-
d’aujourd’hui
revue
traduisent la société
polyné-
:
«Littérama’ohi», pour l’entrée dans le monde littéraire et pour l’afson identité,
firmation de
«Ramées de Littérature Polynésienne», par référence à la rame
papier, à celle de la pirogue, à sa culture francophone,
«Te Hotu Ma’ohi», signe la création féconde en terre polynésienne,
Fécondité originelle renforcée par le ginseng des caractères chinois intercalés entre le titre en français et celui en tahitien.
-
de
-
-
La
-
pour objectifs :
de tisser des liens entre les écrivains
revue a
originaires de la Polynésie
française,
de faire connaître la
variété, la richesse et la spécificité des
originaires de la Polynésie française dans leur diversité
contemporaine,
de donner à chaque auteur un espace de publication.
Par ailleurs, c’est aussi de faire connaître les différentes facettes
de la culture polynésienne à travers les modes d’expression traditionnels et modernes que sont la peinture, la sculpture, la gravure, la photographie, le tatouage, la musique, le chant, la danse... les travaux de
chercheurs, des enseignants...
-
auteurs
-
7
Littérama’ohi N°7
Et pour en revenir aux premiers objectifs,
mouvement entre écrivains polynésiens.
un
c’est avant tout de créer
Les textes
peuvent être écrits en français, en tahitien, ou dans n’importe quelle autre langue occidentale (anglais, espagnol,.. ) ou polynésienne (mangarévien, marquisien, pa’umotu, rapa, rurutu...), et en chinois.
Toutefois,
qui concerne les textes en langues étrangères
recommandé de les présenter
traduction, ou une version de
un extrait en langue française.
en ce
pour ceux en reo ma’ohi, il est
dans la mesure du possible avec une
comme
compréhension,
ou
Les auteurs sont seuls
responsables de leurs écrits et des opinions
émises.
En
tent la
général tous les textes seront admis sous réserve qu’ils respecdignité de la personne humaine.
Invitation
au
prochain numéro :
polynésiens,
Ecrivains et artistes
cette
revue
est la vôtre
:
tout article bio et
biblio-graphique
vous concer-
nant, de réflexion sur la littérature, sur l’écriture, sur la langue d’écriture,
sur des auteurs, sur l’édition, sur la traduction, sur l’art, la danse,...
ou sur
tout autre
sujet concernant la société, la culture, est attendu.
Les membres fondateurs
Cher(e) auteur,
Nous
invitons à faire
parvenir vos écrits à l’association Littérama’ohi.
publiés.
La revue ne comptant qu'un nombre limité de pages, si un texte est trop long nous nous
réservons le droit de proposer quelques coupures à l’auteur. Le texte modifié ne sera
publié qu’avec son accord.
Les textes retenus seront publiés dans le prochain numéro. Mais si ce numéro est déjà
complet, leur publication sera repoussée au numéro suivant.
vous
Tous les textes seront
1
8
a
Rédaction
Editorial
Non
ce
de réflexion
n’était pas une année sabbatique pas non plus une année
encore moins une année de tout repos. Pour ne pas justi-
fier cette année de silences d’absences de
mais
puisqu’il faut
quelque chose disons pour faire concis et éviter les plaintes
intempestives que les membres de Littéramà’ohi ont baissé les voiles
sous les divers taui qui ont agité ébranlé chancelé leur vie.
Les auteurs descendants des navigateurs d’hier ne se sont pas
laissé impressionner par cette morne accalmie et ont continué à croire
à la traversée. Le nombre de textes de ce septième numéro aussi florissants percutants vivants que d’habitude témoigne de la persévérance
des écrivains polynésiens. De même les attentes des lecteurs de tous
horizons maintes fois énoncées exprimées signifiées démontrent la
confiance et l’intérêt attachés à la création littéraire contemporaine
en
vacances
dire
comme
Le bonheur est
grand de la parution de ce numéro fidèle au thème
du taui choisi dès la sortie simultanée des numéros 5 et 6 en mai 2004.
Soufflent tous les vents de tous les
imaginaires
Bon voyage
Chantal T.
Spitz
Littérama’ohi N°7
INFORMATIONS
•
PARUTIONS
EVENEMENTS
•
Les journaux, relayés par les média, radio, télé, annoncent régulièrement des
dédicaces de livres, des expositions, de peinture, de photos, des spectacles de danses,
de chants, des festivals,... (Musée de Tahiti et des Iles, Te Fare Tauhiti Nui-Maison de
la Culture, Place To’ata, Salons ou Ateliers de peinture privés,...)
Nous avons relevé quelques-uns de ces événements.
PARUTION
-
Revues
DEDICACES
Ouvrages
Journaux
Te U'i Mata
N°10
Yucca
City Blues (2004) (Editions Au
vent des îles) ; dédicace à l’espace
Odyssey, (19 juin 2004).
La Voix des Etudiants
-
le
sur
Heiva
Farereira’a i Tahiti
-
: ses pages
2004 et sur le
Fa’a'a
Coco Hotahota et de Moana
les
-
septembre/novembre 2004
culturelles
Chantal KARDILES
(interviews de
Teheiura), sur
retenus pour
le Prix littéraire des
(interviews des éditeurs,
Christian Robert, (Editions Au vent des îles),
Gilles Marsauche, (Editions Te Ite), Florent
Massot ( Oh Editions) : Célestine Hitiura
romans
Etudiants 2004
Patrick PONS
Cannée du
(illustré
-
par
sport à Tahiti Nui 2003 (2004)
près de 800 clichés)
Marie-Claude TEISSIER-LANDGRAF
Hutu Painu.
Tahiti, racines et déchirements (2004) (Editions Au vent des îles)
Vaite : L ‘Arbre à pain ; Maeva Shelton : Et
j’ai cueilli des orchidées ; Marie-Claude
Teissier-Langraf : Hutu Painu
Marie-Claude TEISSIER-LANDGRAF
TAHITI BELOVED AND FORBIDDEN,
Tahiti Herehia, Tahiti Rahuia (septembre
Littérama’ohi
2004)
Traduction par
le Dr N. Carruthers
Littérama’ohi
Bruno SAURA
Entre nature et culture
-
La mise
en
placenta en Polynésie française
(2004) (Editions Haere Po)
SALONS DU LIVRE
Bruno SAURA
La société tahitienne
au
dits d’un malentendu culturel
(2004) (Editions Au vent des îles)
(Réédition augmentée de nouveaux
Préface
de
Michèle
de
Chazeaux, Postface de Flora Devatine)
Bernard RIGO
Conscience occidentale
ou la dynamique de la contradiction (204) (Ed.
L’Harmattan,
Collection
Monde
Océanien)
10
PRIX LITTERAI
Le 3° Salon du Livre de Papeete. Lire
en
Bernard RIGO
articles.
-
miroir d’Israël
(2004) (Cnrs Editions)
-
N°6
-
Spécial : Rencontres océaniennes
(2) (mai 2004)
terre
du
Lieux
N”5
-
Spécial : Rencontres océaniennes
(1) (mai 2004)
Polynésie.
(Place To’ata, 27-28-29 mai
2004),
Organisé par I ‘Association des éditeurs
de Tahiti et des îles en partenariat avec Te
Fare Tauhiti Nui - Maison de la Culture, sur le
thème
:
La femme dans la littérature du
Pacifique.
Une
grande
entre les
anglophones et de
nombreux écrivains francophones calédoniens :
auteurs océaniens
rencontres
:
deux
Sia
Figiel de Samoa
;
Teresia Teaiwa de
Nouvelle Zélande.
Nicolas
chant. Nous
Kurtovitch,
Arlette
Peirano,
Claudine
Jacques, Anne Bihan, Jean Vanmai,
Bernard Berger, Loui-José Barbançon, de
Nouvelle
Calédonie,... pour la plupart,
a
l’Association
des
Ecrivains
Le
Salon
sommes
reconnus
dans
expliqué le jury composé de
quatre étudiants en lettres modernes et en
droit. » (SV.Tahitipresse)]
-
membres de
nous
œuvre"
son
6°
Ouessant
du
Livre
Insulaire
,
(19-22 août 2004)
Calédoniens.
3 auteurs de
Au programme :
Chaleureuse cérémonie d’accueil et d’al-
toires de la terrasse
Etienne Ahuora
vibrant ‘orero de Raphaël Tehiva dit
leurs écrits
»
;
Rencontre
dédicaces.
le public, débat entre les
avec
écrivains océaniens ;
Débat avec les auteurs de Littérama’ohi,
à la radio RFO, Place To’ata
Conférences
térature du
Rarahu
:
Les his(Arue, Tahiti, 2003)
Les Parfums du silence
Jean-Marc Tera'ituatini Pambrun
préà la
secrets de famille
-
:
Huna
(Matoury, Guyane,
2004)
« séances “auto-portraits”, «
rencontre des auteurs et à la découverte de
sents ;
étaient en corn-
(Editions Le Motu, Papeete, 2003)
Ratio, professeur de ‘orero au Conservatoire
artistique territorial.
Interviews nombreux des auteurs
y
avec de nombreux autres :
Marc Frémy : Te po rumaruma-
liance entre les écrivains océaniens soutenue
par un
Polynésie
pétition
Le Prix Fiction (l’une des 5 catégories
prix) a été décerné à Etienne Ahuora,
(pseudonyme de Jean-Marc T. Pambrun)
pour son livre, Les Parfums du silence
(Editions Le Motu, Papeete, 2003)
de
La femme dans la lit-
sur «
Pacifique
» :
11° Salon
interventions de
Boirai, de Chantal Spitz, de Sylvie
du
Livre de l’Outre-mer
(Paris, 16-17 octobre 2004)
André...
Organisé
Pour le Prix Littéraire des Etudiants de
l’Université de la
Polynésie française 2004
(2° édition) lancé par l’équipe du journal « Te
L/7 Mata
-
La Voix des étudiants », trois
auteurs avaient été retenus
:
L'Arbre à pain,
(Editions Au vent des îles)
Maeva Shelton : Et j’ai cueilli des orchidées (Editions Te Ite),
Célestine Hitiura Vaite
Tauaea Raioaoa
:
:
"Si loin du monde”
(“Oh éditions”)
sur
le thème
«
par le Ministère d’Outre-Mer
Mémoires d’Outre-mer ».
Participation de maisons d'édition de la
Polynésie française : (Association des
Editeurs, Editions Au vent des île, ...)
Participation de deux auteurs de la
Polynésie française, membres de Littérama'ohi : Flora Devatine et Jimmy Ly.
Au programme :
des débats, des confé-
des tables rondes autour des «
Mémoires d’Outremer », « Mémoires partarences,
», « Mémoires oubliées ? » ;
contres et entretiens avec les auteurs :
gées
Finalement, le Prix littéraire des Etudiants
2004
a
été décerné à Célestine Hitiura Vaite
pour son roman
Vent des îles)
Larbre à pain (Editions Au
[“Nous avons choisi de primer le livre de
Célestine parce qu’il est écrit de manière profondément naturelle. Elle a rendu son héroïne
très naïve et
son roman
est véritablement tou¬
ren-
Edouard Glissant,
Roland Brival/ Ch
Patrick Chamoiseau,
Audrey Pulvar ; Daniel Maximin ;
« Rencontre avec la littérature polynésienne » : Flora Devatine, Jimmy Ly
Des dédicaces, des performances artistiques...
Seranot ; Claude Ribbe,
11
Littérama’ohi N°7
16° Salon de Lire
17 octobre
en
Fête
le thème
De l’oralité à
l'écriture, le
rôle de la mémoire, l’identité de l’écriture polynésienne et sa place
À
«
tés
en
dans
et
la
et le
«
Prix
aux
Journées du Patrimoine
également la
Académie marauisienne
Nomination de deux
responsabilité de Joelle Cousinaud,
collaboration
Littérama’ohi et
avec
l’Association la Graine d’Or.
Participation de deux auteurs membres
fondateurs de Littérama’ohi
et
»
dans le monde contemporain»
l’initiative
en
2005,
lesquelles
sera intégrée
Journée du Reo Ma’ohi.
du Centre d’Etudes, de
Recherche, d'Accueil et de Création (Cérac),
sous
Prix du Président
«
du Président pour les Jeunes », renommés « Prix du Reo Ma’ohi », ont été repor-
Rencontre autour de l’écriture polynésien-
«
ne » sur
Le
(Paris, 15,16,
2004)
:
Flora Devatine
nouveaux
membres
à l’Académie
marquisienne : Christiane Duceck
épouse Gaubil et Gabriel Teikitekahioho en
remplacement de « Lucien Kimitete, décédé,
et Mathias Tohetiaatua, démissionnaire ».
Jimmy Ly
AUTRES INTERVENTIONS
Quatre Soirées de lecture de textes
d’auteurs
polynésiens, au Salon des Arts
(Paris 11°, le 16, 18, 19, 20 octobre 2004)
dans le cadre de Lire
Textes
Claude
de
en
Louise
Fête.
de Danièle Tao’ahere
Helme, de Michou
Chaze, de Flora Devatine, de Araia Patrick
Amaru, de Jimmy Ly, de Simone Grand, de
Vaea Duplat et de Raiteva Greig.
deux comédiennes, Corinne
Barois, Mychau Nguyen, et par les deux
auteurs présents : Flora Devatine et Jimmy Ly
20° édition du Concours
«
Vive l’Ecrit
»
Prix littéraire des Scolaires
»
(11
juin 2004)
Organisé par le ministère de l’Education et
de l’Enseignement technique et par le Centre de
Recherche et de Documentation Pédagogique
de la Polynésie française (CTRDP)
La production scolaire, sur le
thème
“Histoire d’animautf', est passée de 69 en
2003 à 83 textes
en
2004, dont des
textes
rédigés
mière
en langue Puamotu et, pour la prefois, Mangarévienne
.
et de Tahitien
Treize
participants.
prix avaient été
Concours littéraires
siennes
12
en
décernés.
langues polvné-
F. Devatine
»
:
Découverte de la littérature
polynélangue d’écriture
« Découverte de
l'anthroponymie » Le Nom dans les mythes polynésiens. »
(Deux journées consécutives de conférences et d'ateliers.)
«
sienne
»
-
ateliers
sur
la
-
Lycée de Taravao.
(25 novembre 2004)
Dans le cadre de la
Cultures
polynésiennes
«
Journée des
» :
Plusieurs interventions et ateliers dont
de F. Devatine
portent sur « L’origine
polynésiens », et sur la littérature
polynésienne
ceux
des Noms
Un millier de
:
[« Dans le prolongement du stage mis
en place par la DES sur I' « intégration de la
littérature polynésienne dans les programmes
de français »],
Organisation d’ « une rencontre entre
un
écrivain polynésien, Madame Flora
Devatine, et les élèves du L.U. T. » par « les
professeurs : Madame Mouline, Madame
Piens, Madame Tapea », « pour les élèves
de 1ère L et TL en priorité, en cours de français
-
«
( 8 et 9
2004)
Invitée
Peltzer, de Marie-
Teissier-Landgraf, de Chantal Spitz,
Lecture par
Lycée d’Uturoa- Raiatea
novembre
EXPOSITIONS
FESTIVALS
Le festival des chants, des danses et
Exposition
sports traditionnels de Polynésie, le
de Tahiti et des îles
des
“Heiva I Tahiti” 2004
la pirogue
sur
: au
Musée
(122° Edition) Place
de photographies de
(1900-19801 sur le thème « Moorea
d’autrefois », « Moorea i te matamua »,
organisée par la commune de Mooréa-Maiao
(1-8 octobre 2004) à la mairie de Teavaro,
Exposition
To’ata, à Papeete :
“Heiva des écoles de danses", regrou-
pant plus de 500 élèves, répartis en six
écoles de danses
Premiers prix de danses remportés
Tamarii Ahutoru Nui (groupe de danse
professionnel) et par Tamarii Tipaerui (groupe
catégorie « amateur »),
Premiers prix de chants, gagnés par
les groupes de Tamarii Tautira et de Tamarii
Tipaerui.
Moorea
Dans
-
par
le
cadre
la Journée des
de
Matahiapo, Journée internationale des personnes âgées
« Un hommage aux anciens » (Joël Hahe)
-
A noter que les chants du groupe Tamarii
Tipaerui ont été composés par Vaihere
Cadousteau, « 22 ans à peine,.. .vient d’obte-
CAPES de lettres modernes,...ancien-
nir
son
ne
brillante étudiante de
l'UPF...(nédaillée d'or
de tamure du Conservatoire
artistique territo-
(Mareva L, Te U'i Mata
Septembre/Novembre 2004)
rial
»
Festival
Le
Fa’a’a
«
-
N° 10
Farereira’a à Tahiti
-
(juillet 2004).
Une grande rencontre entre groupes de
chants et de danses organisée par Coco
Hotahota et par la commune de Fa’a’a.
Participation de 9 groupes de danses
étrangers (hawaiens, américains) par amour
de la danse polynésienne, et de ceux ayant
»
concouru au
122° Heiva i Tahiti 2004 à To’ata.
Le 9° Festival des Arts du Pacifique
(Palau
-
Micronésie, 22 au 31 juillet 2004)
Sur le thème
«
Noum'r, Célébrer, Renaître
Exposition des
copies d’œuvres de
(septembre 2004) par Farina
Viera, peintre copiste, et par le petit fils du
peintre, Marcel Gauguin, dans leur atelier de
Paul Gauguin
Fa'a'a
:
“150
à
200
tableaux de
Paul
Gauguin sur les 600 » déjà reproduits.
[“Nous souhaiterions organiser dans les
mois à venir une exposition de ces tableaux
en Autriche”, explique Marcel Gauguin et
celui-ci d'ajouter: “En 2000, la plus grande
exposition des œuvre de mon grand père
s’est déroulée à Vienne où j’étais l'invité
d’honneur. Je voudrais les remercier.”]
(JBC,Tahiti Presse)
jardins et fontaines
Papeete (mai 2004)
Halola « sur Je thème “multiplicité, culture,
nature". Parrainée par Ernest Sin Chan,
Exposition de
miniatures à la mairie de
de
et
ethnopsychologue-écrivain avec le concours
de l’artiste peintre, Mateata Vitrac et du sculpteur Bruno, l’exposition met l’accent sur l’art
du “Pen-Jing”, les jardins et fontaines miniatures ». (CD TahitiPresse)
»
Participation d’une délégation de 10 pérsonnes, artistes et écrivains : Marie-Hélène
Villierme, Chantal T. Spitz, (écrivaine,
membre
fondateur
de
Littérama’ohi),
Marguerite Lai, Mauarii Meul, Poema Adams,
Taaroaarii Teururai, Varii Huuti, Mareva Netide Montluc, Kahu Tametona, Yvana Vaki.
Exposition
«
de biioux en perles du
bijoutier Philippe LeTohic, gérant de la société polynésienne Mana'o, (basée à Pirae) à
Paris, à la Délégation de la Polynésie française, ainsi que des bijoux et objets d'art de
Rodrigue Hikutini, son associé marquisien. »
(TahitiPresse)
13
Littérama’ohi N°7
AUTRES EVENEMENTS
Alban Ellacott
(Proscience Te Turu Ihi,
Haururu), Le soleil Te Ra dans
la culture polynésienne,
Louis Cruchet (Centre d'investigation
d’ethnoastronomique local (CIEL) et Libor
Prokop Association Haururu), Maui : attrapeur de soleil, image d’un héros mythique,
passé maître du ciel,
-
et Association
Journée
Ciel
du
«
Te Rai
o
te Ao Maohi
Monde Polynésien
-
Le
(Papeete,
Assemblée de Polynésie, 19 juin 2004),
Organisée, en partenariat avec l'ancien
Ministère de la Culture, par les Présidents et
»
les membres des Bureaux de l’Association
ProScience Te Turu’lhi,
Haururu,
du
-
de l’Association
Cercle
d'investigation
d’Ethnoastronomie Locale (CIEL), de la
-
Société des Astronomes de Tahiti
l’occasion du passage
devant le soleil.
«
La lune
ou
Hina dans la
».
(23-29 juin 2004)
Cycle cinéma d’autrefois - Cinématamua
-
-
«
Les festivités du Tiurai
«
Tarava
»
ciel,
de Henri Hiro
Fête de l’autonomie
en
:
le 12
juillet 2004,
remplacement du 29 juin.
F.D.
Libor
Prokop et Jean-Claude Teriieroo
(Association Haururu) et Hans Carlson
(Polynesian Voyaging Society), Le ciel dans la
culture polynésienne et ses applications,
-
:
»
Robert
Koenig Société des Etudes
Océaniennes) « 1769 : Cook ou Comment
Vénus devient une pointe à Tahiti »,
-Yannick Amaru (Proscience Te Turu ‘Ihi),
Quelques objets célestes remarquables du
14
Devatine,
polynésienne
Fête du Cinéma
(SAT),...à
de la planète Vénus
Plusieurs interventions dont celle de
-
F.
culture
DOSSIER
:
AU VENT DU TAUI
Le 23 mai 2004 à la
surprise générale, l’opposition remportait les élections territoriales de Polynésie française.
Nous
reviendrons pas sur
les raisons de ce vote, ni sur
qui ont précédé ce renversement, pas plus
que sur ceux qui ont suivi, ni sur les choix politiques des uns
ou des autres. Tout cela les politologues, économistes ou
ne
les évènements
autres scrutateurs de nos sursauts l’ont fait ou le feront avec
le recul nécessaire.
En demandant
tion
»
aux
écrivains d’écrire
(dans le
nous avons
Nous
sens premier du terme,
voulu qu’ils s’expriment.
sur
cette
«
révolu-
changement soudain),
voulu
qu'ils apportent leur regard sur cette
période de la vie politique polynésienne, non pas qu’ils s’engagent, c’est leur choix et certains ne prennent aucun détour,
mais qu’ils témoignent sur ces années de profondes transformations de la Polynésie et surtout sur la place des écrivains,
avons
des artistes dans les mutations
Certains
en cours.
excès parlent avec
leur cœur, d’autres se
font témoins, d’autres encore se souviennent ou rêvent, mais
chacun à
ment,
ne
sa
avec
manière
nous
rappelle que le fat//, le change-
vit que par ceux qui le veulent et pour cela, les écri-
vains sont à la
première place, spectateurs et acteurs.
Gilles Marsauche
15
Littérama’ohi N°7
Danièle-Taoahere Helme
TAUI
CHANGEMENTS,
VOUS AVEZ BIEN DIT CHANGEMENTS ?
J’avais tout,
Mais je n’avais
Rien,
A
partir dé rien,
J’ai créé
Les évènements
se
sont
un
tout !
précipités et les changements sont arrivés
à la suite des élections. Que penser de tous ces résultats ? Les mots
avaient déjà transcrit le senti profond d’un peuple ligoté par un pouvoir
qui n’a
entendre la blessure du peuple dans sa « gémissure »
l’appel de la liquidité matérielle. Les insatisfactions
n’ont pas permis de reconsidérer les véritables
nécessités pour résorber le malaise humain. La fracture est venue de
l’assistance dangereuse de pourvoir à celui qui ne sait plus se pourvoir.
L’avenir n’est pas à un parti, il est dans l’esprit qui amènera la justice en tenant compte de la profonde blessure sociale. Ce n’est pas une
étiquette qui définit les sens des bulletins, c’est la justice véritable que
le peuple revendique par ses cris alarmants et déclame ce que le poupas su
pour ne retentir qu’à
et les grincements
voir
insonorisé.
a
Je souhaite
simplement que le destin de notre pays soit reconsidécapacités à revendiquer une vraie liberté.
Que les maisons soient confiées à des personnes dans la capacité de mettre en valeur leur espace afin de dire que la dignité est de
ré
en
fonction des
retour.
Que l’environnement puisse prolonger son abondance sur les
générations
en
marche
Que la terre vienne
16
vers
en
leur avenir substantiel.
aide à
ceux
qui la mérite !
Dossier
:
Au vent du Taui
Revendications !
Tahiti veut
place,
pouvoir des grâces,
Un religieux sa classe,
Le peuple se lasse.
sa
Un
Tahiti cherche
ses origines,
pouvoir ses pantomimes,
Un religieux ses hymnes,
Le peuple mime.
Un
Tahiti délie
Un
Un
Le
son
destin,
pouvoir ses bulletins,
religieux des larcins,
peuple geint sans fin.
Tahiti saisit
son
envol,
Un
pouvoir son protocole,
Un religieux des oboles,
Le peuple force sa farandole.
Tahiti choisit
Le
Le
Le
son
lendemain,
pouvoir tend les mains,
religieux prêche en vain,
peuple exige son pain.
(Extrait Influences et adaptations
-
Fidji - 2003)
17
Littérama’ohi N°7
Daniele-Taoahere Helme
Pour calmer la blessure
La douleur
se
libère
Enterrée elle retient
Des sensibilités
Qui écorchent
Sans panser
encore
la souffrance
Qui secrètement tend
Vers
sa
guérison !
La
Polynésie comme tout pays cherche sa définition à partir des
qui constituent sa spécificité. De si nombreuses petites îles
disséminées sur un vaste Océan Pacifique se
regroupent en cinq archipels, avec des airs communs et des tempéraments différents.
données
Les conditions
climatiques ont déterminé la cadence appropriée à
polynésienne : la survie, la langue, les coutumes, les croyances,
la notion de rythme et de temps. Nous sommes dans un système d’autonomie interne rattaché à la France avec des affinités au système
actuel, avec en opposition, des contractions qui revendiquent l’indépendance du pays. Les malaises de société sont un amalgame de problêmes personnels et professionnels. La société, au travers des crises,
cherche sa précision !
la vie
L’identité d'un
peuple se forge à partir de ses repères géographiques, de ses racines sociales et de ses assises culturelles. Cette
identité est rattachée à une histoire constituée par la mémoire des
Ancêtres, préservée par les Traditions et les coutumes. Ce prolongement dans le temps intègre l’influence extérieure et coule avec la mouvance, reliée aux étirements inéluctables des transformations qui sont
déjà des facteurs d’évolution de la société.
18
Dossier
:
Au vent du Taui
Nos crises
peuvent être comparées à un roman feuilleton avec ses
qui éclatent dans le paysage social
sous forme de grèves ou de contestations. Les barrages, sur les sorties de
la ville, ont connu leur époque pour extérioriser la pression lorsque les
revendications n’étaient pas entencjues. Ces poussées de fièvre sociale se
traduisent aujourd’hui par des manifestations de grévistes qui, pacifiques
en apparence, brandissent leurs banderoles d’opposition dans le but d’affirmer un questionnement sur les notions de justice. Ces revendications
expriment certainement le message profond d’un cycle social en quête
d’une nouvelle réflexion nécessaire à son processus de mutation.
séries à suivre et des rebondissements
Chaque étape cherche sa croissance en libérant des malaises qui
diagnostics. Ces troubles génèrent dans le paysage
social des secousses ressemblant tellement à nos propres crises de
croissance. Ici ou là, paralysie d’un chantier, extinction de la communication, abcès ou enflures des non-dits cumulés, cancers dans la relation. Tout ceci confondu indique bien que le baromètre d’une maladie
sociale recherche un traitement approprié pour son développement. La
négociation aurait probablement avantage à considérer les causes
réelles, exprimées à partir des colères : être estimé dans le sens de partenaires qui veulent faire évoluer une structure, apport de leur rendement, de leur assiduité et de leur efficacité. La révolte sourde demande
nécessitent des
une
reconnaissance différente.
Pour l’instant cet éclatement
épidémique est la seule façon de crier
douleur pour avoir sa valeur. Cela affecte bien entendu d’autres travailleurs en direction de leur gagne-pain, ligotés par l’expression de la
sa
qu’à Tahiti, en temps normal, il a fallu pendant longtemps se lever à cinq heures du matin pour faire 20 kilomètres et
rejoindre son travail, donc à partir de ce calcul simple, il faut multiplier
ce temps par deux cette estimation dès qu’un accident intervient dans
le paysage routier. La conséquence sur un plan personnel est l’agacement croissant de ce climat qui affecte chaque personne et déstabilise
tout service prisonnier des ralentissements imposés. L'impact général
crise. Il faut savoir
19
Littérama’ohi N°7
Daniele-Taoahere Helme
est le retard de
chaque établissement inter-relié qui estime bien évidemproductivité à partir du temps. Toutes ces réactions obligent le
questionnement sur les causes profondes et les interrogations de société qui subissent la mutation des systèmes qui se profilent en Polynésie
ment
sa
et ailleurs dans le monde.
Notre destination attise les rêves les
plus fous : le mythe de la
Polynésie est bien établi dans le monde entier, il est associé aux paysages, aux femmes, aux danses, aux chants et fait naître des espoirs
pour parvenir un jour à visiter cet espace tant convoité. Le rêve a évidemment son prix. Les visiteurs bien nantis ont la liberté et le choix de
leur séjour privilégié. Le touriste moyen se trouve confronté au calcul du
prix de revient et il tente de réussir l’authentique en s’infiltrant dans le
quotidien du Polynésien !
La valise d’un touriste
quittant l’aéroport de Tahiti-Faaa n’est jamais
comparable à celle d’un Tahitien qui séjourne à l’extérieur et qui rentre
au Fenua (Pays). Les excédents des bagages des
Polynésiens sont
bien célèbres et à l’étranger les chauffeurs de bus reconnaissent immédiatement le Tahitien à partir du volume des colis transportés. Les douaniers peuvent le confirmer. Cela dénote qu’il est plus facile de ramener
de la quantité de l’extérieur que de la sortir de chez nous.
Cette affirmation est à considérer. Comment
produire la qualité et
des produits qui
accèdent au marché international ? La production a besoin de couvrir
premièrement les besoins du marché local, puis de développer l’ouverture à l’exportation. Les emplois de la bureaucratie ont précipité trop de
monde dans la monoculture de l’emploi stable à rentabilité immédiate
au détriment du secteur de l’agriculture et de la pêche tandis
que l’industrie développe son secteur avec une bonne dynamique.
La qualité réclame la finition des produits ; les prix pratiqués sur le
Territoire sont la conséquences du coût de vie élevé souvent décrié par
les visiteurs étrangers.
réussir les
20
quantités
en
restant dans la
concurrence
Dossier
:
Au vent du Taui
production a besoin de confirmer son label pour
garantir son concepteur et préserver la valeur des produits. Les copies
provoquent l’étouffement au détriment de la nouveauté et la diversité.
Celui qui crée est capable d’assurer la continuité puisque son produit se
forme tel un enfant virtuel et attend le souffle du maître d’œuvre pour
son prolongement et son développement.
Le domaine de la
Polynésie à ses habitants. Cet attachement
certain nombre d’aventuriers a choisi de
couper les amarres avec une Patrie pour oser l’aventure îlienne.
L’influence vient donc apporter des modifications dans les structures
établies avec des adaptations conséquentes plus ou moins bien tolérées par les principes installés : les différents pouvoirs, les tranches
d’âge, les ethnies, les classes sociales, les expressions religieuses. La
crise d’adaptation s’exprime par une secousse dans les fondements et
cherche un consensus pour préserver l’équilibre entre le naturel et la
Un lien fort unit la
résonne
assez
loin puisqu’un
transformation.
La mouvance c’est donc bien
la direction à prendre pour refaire
la
composition des éléments, avec des avancées et des obstacles inhérents à la transformation d’un peuple en marche vers son lendemain.
Voici la Polynésie accélérée dans sa mutation qui a dû passer trop rapidement du naturel au matérialisme, avec des avancées et des étranglements pour ceux qui ne savent pas encore nager dans le liquide amniotique monétaire. Les Racines et la Culture retiennent l’acquis tandis que
le courant matérialiste précipite ses nouveaux concepts, injectant des
rêves à gros débits financiers pour proposer le changement, l’adaptation et le déracinement.
Interrogations individuelles, professionnelles, sociales, religieuses
nécessaires et contribuent au réajustement des possibilités tant que les intérêts personnels ne se prennent pas pour des inté-
sont donc bien
rêts collectifs !
21
Littérama’ohi N°7
Daniele-Taoahere Helme
Aujourd’hui tout s’évalue
A partir d’un montant,
Reparlons demain
Des valeurs,
L’abondance
En
a son sens
Polynésie !
Danièle-Taoahere. HELME
22
erama
’ohi N°7
taui
rythmé de toutes les couleurs tagué de toutes les voix
dans les mémoires dans
l’Histoire ? comme signe particulier marque distinctive nom propre de
l’espoir avéré
mot de ralliement
clamé de toutes les convictions qui restera
mot de tous les
sers
les changetemps de pen-
engagements tous les déploiements tous
par une société essoufflée d’un trop lent
muselés de dires émasculés d’imaginers mutilés
ments
portés
début l’enterrement d’un huis-clos ploutocratique
plateforme démocratique le couchant d’une autorité
dominatrice le levant d’une collégialité libératrice
comme une
fin
un
l’avènement d’une
alliances politiques des posi-
soutenu par des libertés artistiques des
tions journalistiques des opinions publiques
éclos de l’ardeur
populaire
osé le changement fondamental comme acte fondateur d’un devenir plus conforme à nos aspirations
au moment où notre ciel paraissait si sombre que même les rêves les
plus débridés s’effilochaient au calcul des proportionnalités
car
c’est tous ensemble que nous avons
chacun dans son environnement
militants de longue date ou nouveaux
engagés déroulant patiemment modestement fermement l’ultime espérance
terrasser le monocrate au pouvoir depuis trop de ruines
...
libération de la pensée de l’écriture de l'expresinstigué par le groupe littérama’ohi au travers de la revue des lectures et des débats publics depuis quatre ans a sans aucun doute aidé
le vaste mouvement de
sion
23
Littérama’ohi N°7
Chantal T.
Spitz
à délier des
esprits déranger des certitudes défaire des confiances et
quels qu'ils soient ont été par leur engagement leur
persévérance leur opiniâtreté agents acteurs artisans du changement
les auteurs
il n’est
qu’à se replonger dans les six premiers numéros de la revue
ressentir les houles les flux les remous des textes publiés et
prendre mesure de la contribution des écrivains à l’évolution des idées
dans une société où la pensée unique tenait lieu de credo quasi colpour
lectif
gardons cependant raison et
approprions pas une entreprise
seule la convergence de multiples prises
de positions venues de tous coins du pays a permis la survenue du taui
puis du taui roa et que les écrivains n’ont été qu’une composante de
l’émancipation des consciences ayant débouché sur le renversement
de l’ancienne majorité
collective
car
ne nous
il est évident que
mais
aujourd’hui les écrivains restent étrangement silencieux eux qui hier
étaient prompts à s’enflammer pour tous les sujets particulièrement
ceux touchant le déni de démocratie le refus de
dialogue le mépris des
minorités qu’ils affirmaient caractéristiques de l’ancien gouvernement
et soudain des doutes titillent mes
esprits brouillent mes intelligences
pensées des doutes comme des morsures des doutes
comme des coupures des doutes comme des blessures des doutes cuisants comme des horizons d'orage luisants comme des vertiges de
larmes épuisants comme des nuées de sécheresse des doutes d’agochamaillent
mes
nie nauséabonde
et
se
posent crucialement toutes les question? de l’écrire les pour quoi
pour qui de quoi de qui sur quoi sur qui dont les réponses soutiennent
étaient guident le travail de l’écrivain convoient ses fidélités ses partia-
24
Dossier
:
Au vent du Taui
loyautés escortent ses désertions ses dérades ses dérives
se constituer se revendiquer écrivain et plus particulièrement
écrivain engagé implique une réflexion permanente pertinente perçutante sur ses convictions ses obsessions ses émotions et cette réflexion
ne devrait souffrir aucune concession aucune soumission aucune dévaluation des idéaux qui hier rendaient insupportable le fonctionnement
politique du pays
lités
ses
car se
vouloir
les écrivains sont-ils désormais
assujettis aux politiques au pouvoir ou
le dire autrement l’écrivain hier engagé pour le changement est-il
aujourd’hui condamné à soutenir toutes les actions du gouvernement
en place sous peine d’être accusé de cracher dans la soupe voire de
trahir la cause ? plus encore cet écrivain est-il aujourd’hui sur le chemin d’être labellisé authentifié certifié écrivain officiel d’origine et d’appour
pellation contrôlées ?
grande paraît la tentation de poncer ses dissidences polir ses divergences lisser ses discordes quand on émarge au budget du gouvernement quand on n’ose le politiquement incorrect quand on espère un
quelconque avantage personnel
posent capitalement toutes les questions de l’indépendance de la
complaisance intellectuelles de la volonté de la servilité contextuelles
de la fermeté de la fragilité émotionnelles de l’écrivain dans les temps
de déséquilibre de flottement de convalescence que nous traversons
et
se
les écrivains ont-ils désormais devoir de
soutien sans faille à toutes les
gouvernementales sous le prétexte qu’hier ils partaient en
taui ou pour le dire plus précisément doivent-ils aujourl’espérance concentrée dans ce mot sous le voile
glauque du grisant pouvoir
décisions
bataille pour le
d’hui recouvrir
car
il
s’agit bien de laisser s’épancher dans notre corps toutes les quesl’importance de l’insigni-
tions de l’utilité de la futilité de notre écrire de
25
Littérama’ohi N°7
Chantal T.
Spitz
fiance de notre espace de la conservation de
nalité pour nous dégager de toute allégeance
l’abandon de notre origià un quelconque pouvoir
politique religieux social économique et renouer avec l’indicible plaisir
de la création
pourtant
dissocier en nous l’écrivain de l’individu
qui hier était tendu dans l’exigence suprême
écrouler
l’autocrate en omnipotence depuis trop de crépuscules et faire naître
une société généreuse soucieuse de chacun de ses membres les
plus
pouvons-nous
celui-là même
...
faibles
ô
jeunesse du rêve décrépite
en une
si brève éternité
et nous
perclus de mutismes de plus en plus grimaçants nous entrad'émancipation d’hier qui aujourd’hui sombrent mollement vers leur néant nous abreuvons d’une idéologie nébuleuse d’hier
qui aujourd’hui expire impassiblement dans son artifice nous abusons
d’une fidélité à l’espérance d’hier qui aujourd’hui chemine sereinement
vers son trépas afin d’éviter la douleur d’une espérance tarie au feu des
compromissions d’ajourner le deuil que nous sentons glacer nos
vons
de discours
entrailles
nos
silences
nos
absences
nos
connivences sonnent
comme
lâchetés
vacuités
légèretés quand le taui emprunte les allures des arrogances
d’hier gratifie les servilités des opportunistes d’aujourd’hui fructifie les
moissons des fortunés de demain dans une euphorie d’épais émoluments d’onctueux avantages d’affables privilèges ceux-là mêmes pour
lesquels nous avons chassé le vieux despote
dans les
temps de déséquilibre de flottement de convalescence que
de nous taire de nous
complaire de nous satisfaire d’un dévoiement du taui sous prétexte
nous
26
traversons pouvons-nous nous contenter
Dossier
d’une indéfectible fidélité à un idéal
:
Au vent du Taui
moribond
mais
si
finalement
la fidélité de l’écrivain ne se contractait
qu’envers son écrire ?
,
Chantal T.
Spitz
Tarafarero Motu Maeva
août, 2005
27
Littérama’ohi N°7
Marie Claude Teissier-Landgraf
ON CHANGE LES
PIONS,
ON RECOMMENCE
Dans toute tentative de
changement on veut penser que ce monde
humain, d’apparence flexible, peut-être transformé selon des idées. On
ne regarde que les choses instables, on se laisse influencer par les
espérances ou les peurs, par les intérêts, les ambitions et les passions.
On ne veut point voir les nécessités géographiques, économiques,
biologiques, qui ne cèdent jamais que pour revenir.
On ignore la résistance individuelle au changement. Or amener
une personne à
l’envisager, à l’accepter, à l’adopter n’est guère simple. L’entreprise
s’effectue à trois niveaux
Sur le
:
plan cognitif il faut arriver à transformer les perceptions
négatives
ou
inhibitrices concernant le
Sur le
changement, (rôle de l’information)
plan émotionnel il faut créer les motivations qui donneront
envie
d’essayer le changement, (rôle des groupes sociaux)
Sur le plan social il faut faciliter et renforcer les nouveaux comportements. (existence de structures économiques ou sociales adaptées et
disponibles).
Ceci étant planifié et réalisé du mieux que faire se peut, tout en
sachant que les déterminismes de l’ensemble des comportements
humains ne nous laisse guère de choix ; toutes les espèces terrestres,
la nôtre comprise, ayant jusqu’ici obéi au cours des siècles à une prèssion de nécessité.
Alors, le changement, réalité ? Illusion ? Ou encore...
En considérant le
changement sur le plan social on peut dire
qu’une de ses principales caractéristiques est l’ambivalence, créant
pour les individus comme pour la société autant de problèmes qu’il en
résout. En voici quelques exemples pris en Polynésie :
28
Dossier
L’accès à des
revenus
salariés réguliers
:
Au vent du Taui
sécurise les esprits et
enclenche le crédit bancaire. Quand celui ci entraîne l’amélioration de
l’habitat de conception de plus en plus européenne, cela modifie la
dimension horizontale de la famille traditionnelle polynésienne toujours
prête à accueillir des parents, en une dimension verticale du type occi(le père, la mère, les enfants). Autres conséquences des crédits
bancaires avantageux : ils permettent d’accéder au confort du transport
individuel en voiture et produisent la multiplication des véhicules ce qui
entraîne la mortalité des jeunes sur la route ainsi que la croissance du
nombre des handicapés.
Dans le domaine de la santé on a assisté en Polynésie à la disparition
progressive des maladies infectieuses telles la poliomyélite, la typhoïde, le
tétanos, la tuberculose etc. Mais ce sont les maladies non transmissibles
qui ont pris leurs places : l’obésité, le diabète, le stress avec ses conséquences multiformes, l’alcoolisme et la dépendance aux drogues, etc.
Autre exemple tiré du passé : l’évolution des familles aux revenus
modestes, en particulier celles originaires des districts ou des îles,
durant la première décennie de l’implantation du CEP. L’homme, au lieu
d’être maître chez lui, capable dans une large mesure de conduire son
propre travail comme il l’entendait, devint dépendant d’une source de
revenus. Sa femme et ses enfants eux mêmes employés, s’échappèrent
de l’autorité patriarcale. Les enfants encaissant très souvent des rémunérations égales et même supérieures à celles de leur père, tout le système de sécurité sur lequel reposait la famille traditionnelle se trouva
rompu. Pire, le pêcheur ou l’agriculteur non seulement fut mis en position d’infériorité vis à vis de ses jeunes garçons, mais il lui fut impossible
de transmettre son savoir et toutes les valeurs qui y étaient liées : ces
métiers étant devenus inadéquats, improductifs, inutiles. Pour toutes
ces raisons, le père ne fut plus un modèle d’identification pour ses fils.
La mère, traditionnellement transmetteur de savoirs et d’héritage
culturel, continua son rôle auprès de ses filles qui aidaient aux travaux
domestiques et qui étaient tenues à la maison. La mère resta ainsi un
dental
'
modèle de référence stabilisateur dans la construction de la personnalité enfantine féminine.
29
Littérama’ohi N°7
Marie Claude
Teissier-Landgraf
Les années
passant, les signes d’adaptation (réussite scolaire,
acquisition et permanence d’un emploi) devinrent plus fréquents chez
les femmes que chez les hommes, bouleversant ainsi les statuts
sociaux traditionnels.
façon générale, du moment que se trouvaient touchées les
onde d’ébranlements se propagea dans
famille et finit par toucher tous les secteurs de la vie sociale.
D’une
valeurs essentielles, toute une
la
En s’intéressant à
l’aspect de la durée, on remarque que les moulong terme se caractérisent par des modulations
dont les variations propulsent toujours les mêmes problèmes sous les
feux de l’actualité. Jugez plutôt :
En 1950, Dans le Mémorial polynésien N°6, p, 266 :
“... Chaque mois voit arriver des familles entières à Papeete”. On
la cite comme étant ...’’une ville en mauvais état..”. En politique touristique on s'inquiète :...” Comme le tourisme prend une place de plus en
plus importante dans l’économie de EFO, il n’est plus possible que le
voyageur découvre à son arrivée des habitations délabrées, et trop souvent le spectacle du laisser aller. Si l’on n’installe pas rapidement l’eau
courante et le tout à l’égout ...” Cela ne rappelle t-il pas les commentaires d’un reportage télévisé de Septembre 2004 au sujet de la rivière
Pape Ava ?
Toujours à la même époque, Page 270 :
La circulation de Papeete y est anachronique et fort dangereuvements sociaux à
“
se...
»«
...Devant l’encombrement des
l’administration trouve tout de même
rues
à la sortie des bureaux...
prudent d’avancer d’une demi
la grosse
d’actuali-
heure la fin des classes pour permettre aux enfants d’éviter
circulation.” Cette proposition de décalage horaire n’est-il pas
té
aujourd’hui ?
En 1962, Dans « Tahiti de l’atome à l’autonomie », p, 317 :
Madame Rosa RAOUL, conseillère territoriale, 20 ans cheffesse
d’Arue, dégoûtée de prêcher dans le désert, s’exprime à la une des
journaux. Elle définit, entre autres, les causes de la délinquance juvénile : absentéisme scolaire, immigration des îles, carence éducative des
30
Dossier
:
Au vent du Taui
parents, inorganisation des loisirs, oisiveté des adolescents de 14 à 18
Page 318
on estime par exemple que 80% des jeunes de 15
à 21 ans ne travaillent pas dans le quartier de Tuteraitane comprenant
330 personnes...” Bien sur que des mesures furent prises. Mais depuis
cette date jusqu’à aujourd’hui, le contenu des discours officiels et populaires, surtout en périodes pré- électorales, n’a pas changé d’un iota. La
compassion éphémère pour la veuve, l’orphelin et le jeune oisif ainsi
que les promesses de changement radicaux et idylliques font toujours
ans.
recettes.
Quant à la construction d’une aire de jeu
dans les lotissements
sociaux, présentée il y a quelques mois comme une idée novatrice, les
services sociaux n’ont cessé de la réclamer
depuis 1960, lors de la
premier lotissement territorial de ce genre à Faaa face
à l’aéroport. Idem pour l’aménagement des trottoirs et autres accès
publics pour les handicapés etc, etc...
construction du
Si l’on
peut résumer les modalités du changement social de la
façon suivante :
Une phase de débâcles des manières de faire à l’ancienne.
Une ère de troubles caractérisée par la multiplicité des initiatives
du type “essais et erreurs” dont aucune ne parvient à s’imposer
L’émergence d’une innovation qui sera finalement consolidée
grâce à des effets créateurs et stabilisants.
Il faut savoir que chacune de ces étapes présente une alternative
dans le changement ou la régression ; que cette éventualité peut bloquer durablement le changement ; et qu’enfin le risque de régression
est d’autant plus grave que le processus est moins planifié.
-
-
-
Une idée que
je crois fausse - et à laquelle s’attachent souvent
partis les plus opposés - c’est qu’il faudrait changer beaucoup les
institutions et tout pareillement les hommes, pour avoir un état de politique passable.
Ceux qui ne veulent point du tout de réformes, y trouvent leur
compte, car ils effraient par la perspective d’un profond bouleversement ;
les
-
31
Littérama’ohi N°7
Marie Claude
ainsi
Teissier-Landgraf
voulant pas tout mettre en risque, on ne changera rien.
Et d’autre coté les révolutionnaires essaient de faire croire la
ne
-
même chose à leurs amis, les
détournant
avec
mépris des demi-
mesures.
Or il faut l’admettre,
coincés par certaines réalités énumérées pré-
cédemment,
vivons de demi-mesures
nous
-
peu
Une bonne constitution
:
promettant des changements diffère très
d’une
mauvaise, de même qu’à bord de la pirogue, un heureux coup de
barre diffère très peu de celui qui
Il y a peu de changement
-
la fait chavirer.
entre un homme qui part à la pêche
avec son
matériel de survie, et un autre qui
Pourtant les conséquences d’un problème
s’embarque
technique en
le sien.
sont diffé-
sans
mer
rentes.
Au fur et à
mesure
des années qui passent
dans une vie humaine,
on se
rend
compte qu’il faut vivre politiquement selon un état des relade toutes façons choisir, et se conten-
tions humaines que l’on ne peut
ter de changements minimes,
relayée
par
même si notre société marchande
les politiques veulent nous faire croire le contraire.
La conclusion de tout ceci ?
personne qui a exercé avec enthousiasme sa profession
l'objectif était d’améliorer durablement la vie des individus ainsi
que les systèmes sociaux susceptibles de bénéficier aux plus défavorisés, et qui a vécu plusieurs élections politiques, cette exclamation imaginaire de Jammel Debbouze s’il lisait cet article jusqu’à ces derniers
Pour
une
dont
mots
:
“
Le
Le
32
Changement ? Bof !
système n’est ni bon ni mauvais
Dossier
Ta
:
Au vent du Taui
gueule !
C’est
comme
ça
!”
Marie Claude TEISSIER-LANDGRAF
33
Littérama’ohi N°7
Titaua Peu
Courriel
bonjour Flora, bonjour Chantal
«
Je
joins un texte pour le prochain littéra, mais ce n’est pas celui
précédent Salon du livre, comme Flora me l’avait demandé. En effet,
j’avoue que je l’ai perdu, car c’était un brouillon, écrit pour une fois à la
main... Bref, j’espère que celui-là fera l’affaire. Il faut cependant replacer ce
vous
du
texte dans
son
contexte
: aux
lendemains des élections territoriales, à
l’élection du
président et suite à la polémique du 29 juin (date de fête de
l’autonomie) ou 29 juin, annexion, jour de deuil, Tea Hirshon a eu la bonne
idée de faire une expo itinérante concernant la période de l’annexion.
Manque de pot ou d’organisation, cette expo n’a pas pu se faire à cette
date et prendra la forme d’une longue description de notre histoire depuis
le contact jusqu’à 1977.
J’avais écrit un texte dans lequel je dis mon sentiment sur l’annexion.
Un peu choquant peut-être, mon texte ne sera finalement pas retenu pour
l’expo qui doit aller dans les écoles. Décidément, peut-être ne sommesnous
toujours
prêts à entendre quelques autres
pas
sons
de cloche...
Voilà, j’espère que littéra ne trouvera pas à y redire.
Bisous, à +
»
Annexion
Annexion, j’aime pas ce mot.
Je déteste
ce
mot. Il
me
fait penser
à l’Anschluss.
Anschluss, mot barbare, oppressant... comme un long fil de barbelé
Anschluss, oppressant comme ses syllabes rugueuses que même les
fumées d’une haute cheminée
ne
réussiront
jamais à couvrir
Annexion, anschluss...A l’avenir choisissez mieux vos mots.
« Annexion, anschluss », il
y a comme un gros malaise.,.
34
Dossier
:
Au vent du Taui
anschluss, annexion ...pour dire que des mots étrangers ont mis à
mon Histoire, une fin de non recevoir
29
juin 1880
nous sommes
C’est
«
: va savoir ce qui s’est passé... Mais toi, moi, lui... nous
retrouvés français... C’est pas tellement ça qui me gêne.
qu’ensuite
Autre chose
on nous a
Et si cette
»...
dit
«
« mieux vaut ça qu’autre chose ».
autre chose » c’était ce « nous » tout
simplement. Ce nous qui manque. Ce nous entier, pas ce nous d’un statut hybride, peureux. Pas ce nous d’un peuple toujours heureux et
«
danseux
».
Un
nous
absolu. Un
nous
du début. Ce
nous
de la fin.
Annexion, anschluss. C’était un 29 juin 1880. Il y a plein de photos qui
parlent de cette époque. Photos sépia-nostalgie, « tu sais en ce temps
là... » Ca avait l’air si facile, si paisible. L’air seulement. Parce que j’y
crois pas...
Je dis v[i]ol
quand certains parlent de mariage
je dis volontiers : anschluss
Je dis anschluss et
ça
ressemble
un peu
à
Auschwitz...
Annexion
:
à l’avenir choisissez
un
peu
mieux
vos
mots.
Titaua Peu
Littérama’ohi N°7
Miroslava Paia
E “TAUI“
ATOÀ ANEI NO TE REO?
te taô
paha teie ta te taata i Porinetia farani nei i faaroo
pinepine roa aè mai te ômuaraa o te maitiraa porotita e tae roa mai i teie
nei mahana. Aita e faataaraa tona faaôhiparaa : tei roto i te mau vaha
atoà, mai to te tamarii rii roa, te feia âpi e tae roa atu i te feia paari ; tei
roto i te mau veà e i roto roa atoà i te mau parau papal noa hia na roto i
te reo farani. Ahiri e, eere i te mea huru ê tona talraa na roto i te reira reo,
e manaôhia paha ia e taô farani ihoa teie. Mai te huru atu ra ia e, e taô
âpi teie e te huru manamana no te mea, i tona noa ihoa faahitiraahia, ua
taa roa ia i te taata tataitahi i tona mau auraa parau. Eere ra hol i te ôhipa
maere, ua ite tatou e, aore e mea e ôre e taui. Aita atu, te àito rahi o te
tauiraa o te taata ia. E hinaaro te taata e faaâpi, e mono, e huri, e faaôre, e tamata i te mau peu âpi, e taui! la faahiti tatou i te parau o te reo,
reo maôhi anei, reo farani anei, reo peretane anei, te ite atoà hia ra te
tauiraa. Na te feia e faaôhipa nei i te reo, noa atu te faito e te huru faaôhiparaa : te feia parau noa (ia au i te faito matahiti), te mau àivanaa, te
mau ôrometua haapii, te mau àuvaha, te mau tià mana faatere, te feia e
ôpua i tona faanahoraa i roto i te hoê fenua, i roto i te hoê hau... Te vai
ra te reo e mou roa atu no te mea, aita e taata e faaôhipa faahou ra i te
reira. Eiaha tatou e haere atea, i te mea e, i to tatou noa ôtià fenua, e
tauiraa rahi te itehia ra i te pae o te reo. E tauiraa peàpeà no àmuri aè
mai te peu e, eita tatou e ara e e arai i tona huru tereraa. Ei hiôraa no
tatou, te reo tahiti (tei matauhia i teie nei i te parau e, reo maôhi).
«
Taui
»
I teie mahana, eere te reo
o
te
mau
tamarii
e
te feia
tahiti i te
reo
tumu1 faahou
no
te rahiraa
âpi i Porinetia farani. Eere atoà te reo farani to
hol, ua matau roa te taata i te ânoinol i na reo e
piti, ôia te reo tahiti e te reo farani. Ua riro atu ra ia te reira ei reo taaê e
ratou
reo
tumu. Inaha
te haamata
auraa ra
ra
i te riro mai ei
i teie mahana, e
reo
tumu no te mau tamarii e raverahi. Te
mal te reira
no
te reo tahiti e no te reo farani
mau reo maôhi. Eaha
atoà. Ua haamata atoà teie mai i nià i te tahi atu
ra
tatou i
tapae ai i te reira huru faito reo?
^ Parau atoà hia
36
«
reo marna
»
oia hoi te
reo
tamau matamua o te hoê taata.
Dossier
:
Au vent du Taui
Hou a tapae ai i teie faito fifi o te reo, ua farerei mai te reo tahiti e piti
tauiraa rahi. A tahi tauiraa, te mono maite raa hia te reo tahiti i te reo tarani i roto i te mau vahi e te mau taime i matauhia na i te faaôhipa i teie reo
(ùtuafare, vahi taata, pureraa, âpooraa...). I te tau a faaterehia ai te haapiiraa a te hau i Porinetia farani i haamata atoà ai te reo tahiti (e te tahi
atoà atu mau reo maôhi) i te ôpanihia, i te tare haapiiraa e tona âua noa
ra. E porotita te reira no te hau repupirita farani mai ei raveà no te haapii
maitai i te reo farani, aore hoi e reo e haatafifi i tona tereraa i te âua haapiiraa. E faanahoraa âmui no te mau fenua e tuhaa fenua atoà i raro aè i
te faatereraa a te hau farani. Aita ia te mau reo tumu o teie mau
fenua i
Tera ra, aita te taata i ôpanihia i te faaôhipa i to ratou
reo
i te âua o te fare haapiiraa. No reira te taata i tamau
noa ai i te parau i teie reo i te ùtuafare e i te tahi atu a mau vahi. I roto i te
tahi mau motu, te rave noa ra te taata i te reira peu e tae roa mai i teie
haapaô
noa aè hia.
tumu i rapaeàu
faahape rahi hia nei e, na teie ture haapaôhia i te fare haapiiraa i tera ra tau i faaôre roa i te reo tahiti na te mau
ùtuafare. E raverahi mau tumu : e mea tià atoà ia parau e, na te mau taata
tahiti i ôpanihia ihoa ra ia parau i te reo tahiti i te fare haapiiraa, i haamata atoà i te faaôhipa i te reo farani i roto i te ùtuafare e tae roa atu i te mau
vahi e i te mau taime i matauhia na i te faaôhipa i te reo tahiti. I te mau
mahana,
e mea
matahiti 1960 i
iti
roa ra
maraa
ratou. Te
ai te faaravairaa faufaa o te fenua, na roto ihoa ra
tamatamataraa no te CEP i Porinetia farani. Ua nuu
atoà te tau, ua àere te mau raveà e rau o te tau âpi. Te haafaufaa maite
atoà hia ra te reo farani ei reo àveià no te maramarama, no te ite, no te
i te
mauraa
mai te pu
haapiiraa e no te mau ôhipa moni tamau a te hau...Ua riro aéra te reo
reo faufaa e ei fauraô papu no te haamaitai i te oraraa totiare o
te taata tahiti. Te tahi atoà tumu, ôia hoi, e tià atoà ia parau e, te rahiraa
o te mau taata tahiti i faaea i te taata popaa tei ôpua e parau noa i te reo
popaa i ta ratou mau tamarii. Noa atu a te mau tautooraa a te mau tià e
te mau àmaa atoà o te totaiete maôhi e haafaufaa i te mau reo maôhi,
eiaha ia morohi atu, aita ihoa te tauiraa i faaea. Te mea ra ia faahaamanaôhia ia tatou, i roto i teie tauiraa matamua, hoê i roto i na reo e piti tei
mana rahi mai i roto i te faaôhiparaa tamau a te taata, ôia te reo farani. E
farani ei
raverahi ia tamarii tahiti tei
mau
mai i te
reo
farani ei
reo
tumu.
37
Littérama’ohi N°7
Miroslava Paia
I teie nei, e hinaaro
rahi to teie ui tamarii i te haapii mai i te reo tahi-
ti. Ua
puai roa atoà te mau titauraa huru rau no te haafaufaaraa i te reo
(te Fare Vanaa, te mau pu imiimiraa i nià i te reo, te fare haapiiraa, te
faatereraa hau no te taère e no te mau reo maôhi, te porotita a te tahi
mau pupu, te mau haapaôraa, te mau rahuà, te mau rohipehe, te tahi
mau tataùraa papairaa reo, te mau pupu ôri...). Noa atu teie mau raveà,
te tahi pae o te taata i Porinetia farani tei taui roa i ta ratou huru parauraa i te reo. Te piti ia o te tauiraa rahi. I teie nei, te rahiraa o te taata, te
feia âpi ihoa ra, tei ère i ite maitai i na reo e piti atoà. Te ânoinoi nei ratou
i na reo e piti ma te ère faahou e ite e, tehea te taô farani (i te tahi taime
te taô peretane) e tehea te taô tahiti. E mea hepohepo atoà no te mea,
te mau metua ite ôre aore ra ite rii i te reo farani te parau tamau nei i te
reira reo (te tahi noa mau taô) i ta ratou mau tamarii, ua tae roa atoà i
te
mau
metua
ti. Eita atoà
e
ruàu, tei matauhia
na e
tatou no to ratou ite i te reo tahi-
nehenehe faahou, i teie nei, e
faahepo i te tahi mau metua
te mea aita i papu ia ratou
No reira, e mea manaônaô
ia parau tahiti noa i ta ratou mau tamarii no
e ia tatou atoà e, ua ite anei ratou i te reira.
roa no
Porinetia farani i roto ihoa
ra
i teie tau, tau no te matararaa o te
ôtià fenua, eita atura tatou e
haapapu noa i to tatou iho tumu i mua
atoà ra i te hau èuropa. I teie nei, ua matara te
parau o te mau reo tumu i roto i te hau repupirita, eaha ra te faufaa mai
te peu e, aita faahou e taata e faaôhipa i te reo tahiti? Nahea te ui âpi
e reva atu i tera mau pae fenua mai te peu e, aita te reo farani na mua
mau
i te hau farani, i mua
roa
i papu noa
aè ia ratou?
Eere to tatou
te
mau
ôtià fenua anaè tei farerei i taua huru tereraa
èia hoi te tuàtiraa
te tahi
o
te tahi atu reo tumu o te
fenua i riro mai ai ei reo tumu no te taata, te vai ra i te mau fenua farani na te aramoana mai i Matinita ma, aore ra i te tahi atu mau fenua mai
ia Vanuatu ma...Teie ra, e feia tei ite papu maitai i te parau i taua mau
reo popaa noa aore ra i te tahi atu a reo. E tapae anei ra tatou i tera
faito? Peneiaè, na teie porotita âpi a te faatereraa hau i nià i te mau reo
(reo maôhi, reo farani, reo peretane etv...) e to ratou haapiiraa e haaferuri ia tatou tataitahi i nià i te fifi rahi e riro i te tinai roa i te haapaôraa o
38
reo
o
reo
popaa e
Dossier
:
Au vent du Taui
piti. Mai te mea ra e, te haapapu nei teie porotita i te faufaa mau
te ite papuraa i te hoê reo tumu ei mauihaa haapaàraa no te haapii
mai i te tahi atu mau reo. E mea maitai atoà no te mau tamarii ia parau
na reo e
o
e
piti aè red. Ôia
e, uà
ratou
mau, eere
anei i te mea faahiahia no tatou ia parauhia
e piti reo, i te parauhia e, hoê noa reo ta
reo haapaàraa ère?
ite ta tatou mau tamarii
i ite, e reo ânoinoi ra, e
Ua ite tatou e, e taui maitai to te mau mea ia faataehia te mau titaui to ratou
faahoperaa. Aita e raveà ê atu i teie nei, e mea tià ia faahepohia te haapiiraa i te reo tahiti aore ra i te mau reo maôhi i roto i te
mau piha haapiiraa. Eita e nehenehe e tiàturi noa i te mau metua no te
faananea atu i te parauraa i teie reo i roto i te ùtuafare. la faaineine maitai hia ra te mau ôrometua haapii (faito ite i te reo, puta haapiiraa, haapiipiiraa...), ia faaravai atoà hia te faito hora (hau atu i te 4 hora i te
hepetoma hoê). la puai atu a te mau pu haapurororaa i te faaôhipa i te
mau reo maôhi. la puai atoà te mau pu faatitiàifaroraa i te reo i te hiôpoà, i te aô, i te haapii i te tereraa e te haapaàraa mau o te reo (Fare
Vanaa, te mau taatiraa no te parururaa i te reo, te mau rohipehe, te mau
haapaôraa atoà e faaôhipa tamau nei i te mau reo maôhi...). E au ra e,
te faaterehia ra te tahi tamatamataraa i te tahi hum haapiiraa i te reo ôia
te haapiiraa i te reo ma te haapae roa i te tahi ê atu reo. Eita atoà e tià
ia faatitiàifaro noa i te parau o te mau reo maôhi, ia haapaô atoà hia ra
te parau o te reo farani. Ôia hoi, ia feruri maite ra i te mau raveà faatitiàifaroraa i te faito ite i te reo farani, o te mau tamarii, o te feia âpi i faaruè aèna i te haapiiraa e tae noa atu i to te feia paari atoà. E tiai atoà
anei tatou e na te mau tamarii rii e haapii atu i te mau metua i te reo
(mai te àtuàturaa i te natura etv...) ? Te mea papu ra, eiaha tatou e
manaô e, e tahe mai te reo, te tahi noa aè topata reo, mai te toto tupuna. E rohi ra e e faaitoito ra i te taui i ta tatou huru faaôhiparaa i to tatou
raa
mau reo.
39
Littérama’ohi N°7
Miroslava Paia
Résumé
langue tahitienne a subi deux changements importants. Le prechangement va en faveur de la langue française qui l’a remplacée
dans ses sphères sociales (foyer, religion, assemblée....). L’école républicaine, la transformation socio-économique de la société polynésienne
depuis les années 60, l’expansion du secteur publique, l’arrivée massive
des nouvelles technologies ont grandement favorisé l’utilisation de la
langue française. Le statut de la langue française a ainsi changé et est
devenue la langue maternelle de beaucoup de Polynésiens. Malgré les
nombreuses tentatives des différentes institutions pour promouvoir la
langue tahitienne ainsi que les autres langues du pays, le changement
poursuit sa course. En effet, à l’heure actuelle, on assiste avec impuissance à l’émergence d’un mélange appauvri du tahitien et du français,
processus qui menace fortement le tahitien mais aussi le français. Ceux
qui parlent exclusivement cette variété de langues, en particulier les personnes de moins de 25 ans, ne sont structurés ni en tahitien ni en français, compromettant ainsi leur chance en matière de communication
dans le contexte européen et mondial. Ce phénomène est également
encouragé par les parents et grands-parents qui parlent un « mauvais
français » ou encore ce mélange appauvri à leurs enfants. Comment en
est-on arrivé à cette situation préoccupante dans le domaine de la
langue ? Comment inverser la tendance actuelle alors que paradoxalement, le tahitien jouit d’une forte représentation institutionnelle ?
Pouvons-nous encore mobiliser les parents à la transmission de la
langue tahitienne qu’ils ne maîtrisent peut-être même plus ? Comptons
sur le changement gouvernemental pour mettre en place de nouvelles
perspectives pour la promotion et l’enseignement de la langue tahitienne. Le changement devrait ainsi s’alimenter d’une prise de conscience
collective de la situation précaire de la langue tahitienne et de la langue
française en Polynésie française.
La
mier
Miroslava Paia
Maître de
40
conférences à l’université de Dauphine (Inalco).
trama’ohi N°7
mond Vanaga Pietri
CHANGEMENT DE
DÉCOR ET DE VITESSE
générale mensuelle de l’Académie tahicollègue Flora m’a invité
à participer aux écrits du prochain livret de “Litteramà’ohi”. Le thème
retenu pour cette mouture étant le “taui” — le changement politique
intervenu depuis le 23 mai 2004 dans le gouvernement du “Fenua” of
course
mes élucubrations de ce week-end du 04 septembre ont
sécrété les “texticules” quadrilingues ci-après, en rimaillant à la mode
de sonnets (que d’outre-tombe Ronsard et Rimbaud ne me lapident pas
!) conçus à partir de souvenirs d’ambiance” tout yeux, tout ouïe” à l’enAu sortir de l’assemblée
tienne
“Fare Vana’a” du 26 août dernier, ma
-
—
tour.
“taui”, ne jouissant point de la fréquentation des
élus, que nous avons toutefois choisis sur listes, ni n’étant versé en politicologie, mon melting-pot de comprenette est issu de la lecture en surPour ausculter
ce
quotidiens de Tahiti (La Dépêche, Les Nouvelles), des révélal’hebdomadaire “Tô’ere" et du mensuel “Tahiti Pacifique
Magazine”, du bi-hebdomadaire “Le Semeur” et de l’écoute télévisuelle
locale, avec itou une pénétration dans l’opuscule satirique “Pe’ape’a
vol des
tions de
Island" de Petero Vérin et accessoirement dans un sérieux article,
à la
“une” d’une récente livraison de l’hebdo
“UExpress", attestant scientifiquement que “L’amour est bon pour la santé”, ceci dit en batifolant par
■l’esprit du côté des villégiatures galantes de Mai’ao-lti (ti’apa’i motu à
proximité de Vava’ü) ou à mi-parcours de Rotoava (oh ! ses réverbères
d’avant cyclone) et Tetàmanu. Un séjour en bungalow de “Fakarava
Dream” m’a fait zieuter du speed-boat le complexe de labeur et loisirs
de Makarea avant la venue expectante là du Premier Elyséen.
puisé également dans l’excellent bulletin double de la Société
(n° 296-297 de février/juin 2003) réservé à
l’anthropologue-naturaliste Léon-Gaston Seurat. M’atteler à la présente
littérature m’a fait compulser, comme dans un retour mnémotechnique
au lointain temps scolaire, ma triade de dictionnaires français Hachette/
J’ai
des Etudes Océaniennes
41
Littérama'ohi N°7
Raymond Vanaga Pietri
Robert/Larousse
:
si, si ! J’y ai glané une flopée de combinaisons de
prose pour habiller ma rédaction envisagée autour du “taui”, mais hélas
! la condensation en sonnets rétrécit l’expression dans une grandiloquence abstruse, mea culpa ! J'ai aussi plongé dans mon dico anglais
obsolète de Clifton & Mc Laughlin (Editions Garnier Frères 1956) et,
mes références du “Pays” : les
(français/tahitien) et “Davies”
(tahitien/anglais) soutenus par le “Fa’atoro” du “Fare Vàna’a”
(tahitien/français), enfin l’affirmation de mon indigénat mitigé Corsicapa’umotu en effeuillant le remarquable ouvrage du parler des Tuamotu
en english de Stimson & Marshall.
toujours
avec ravissement, dans
inusables
“Tepano Jaussen”
Si l’avant-taui s’est emballé dans des
gigantismes tous azimuts à
fentes des urnes, appâtés par de
impressionner les bulletineurs aux
rémunérations, et favoriser d’alléchantes affaires, un mien camarade m’a rappelé, une de ses réminiscences universitaires, que tout
homme en obtenant le pouvoir est naturellement porté à en abuser...
avec un clin d’œil cardinalice à l’épectase (?)... En tout cas, la nouvelle gouvernance avec urbanité et humilité, après les fatidiques Cent
Jours attendus par les observateurs, doit affronter les sarcastiques banderilles lancées par les trépidants et trépignants prédécesseurs, dans le
Temple des Débats des élus de Taraho’i, quand mon ex-Caserne transformée naguère en sardanapalesque chasse-gardée est désormais
béante au monde tout-venant dans l’ivresse de profond heur.
féales
Le “match” nul (O-O) que vient de disputer chez elle l'Equipe de
France new-look face à Israël a bénéficié quand même de critiques pon-
dérées de la part
des connaisseurs Jacquet, Wenger et Guy Roux, sans
impatience... Mêmement, dans la nouvelle conjugaison politique locale
pour garder la tête haute, supputons que le Fenua atteigne la division
harmonique mathématiquement souhaitée/souhaitable !
Voici donc le
“fat//”, de
42
mes
résultat, en raccourci descriptif des tâtonnements du
tribulations du week-end qui se veulent ni gourmeries
Dossier : Au vent du Taui
d’escarpin, ni bourneries de tapin, ni fourberies de larbin... décidément,
je bégaie dans ces scapinades d’étourderies, en signant Vert aux initiales de mes quatre prénoms à l’état-civil. Comme a chanté Herbert
Léonard de Châteauvallon à l’ancien OTAC : “Pour le plaisir...” du verbe,
ajouté-je.
Week-end à ‘Orovini, 4-5
septembre 2004.
Vert Pietri.
1. Les
seigneurs des anneaux (1)
Vingt-trois mai an deux mil quatre, date historique :
La clôture vespérale au scrutin unique
Des élections paysiennes a permuté
Le rang des candidats aux affiches listés.
(2) en effet, bien avant minuit,
selon le dit évangélique,
Stupéfaits, ils ont cédé leur place eu-follique,
S’étant grisés dans un pouvoir majeur qui fuit,
Caserne Broche
Premiers inscrits,
Victimes de
Par
eux
l’inique loi électorale
en capitale.
rayé les transports stup(r)éfiants
initiée via Chirac
Le bonus
a
En
Tüpai et Fakarava si vivifiants.
L’hybride oscarisation, choréomanie (3) neuve,
Déjà porte sa croix après cent jours d’épreuves.
Vànaga
43
Littérama’ohi N°7
Raymond Vanagra Pietri
2
-
‘A fa’a ro’o i te Fenua
Rau mahana a’enei te
tupura’a
O te ma’itira’a i ha’a-’àmui
‘I teie huiti’a
‘Ei
mono a
‘Ua hau
Nô te
‘àpï no Hitinui
vërâ fa’aterera'a
rua
‘ahuru matahiti te
roa
!
tühapa ho’i o teie ture
paenui tahito i tàroa
O ta râtou
Rü
noa
‘i Faràni i mahere ai te rë.
‘ài’a
E inaha, e feia ‘à’au amo
Të noho nei ‘i te Aora’i Fa’ahau
Ma te tàno’o
o
Temaru
l‘ite iho nei tô te Fenua
‘I to
o
(4)
te hau.
ma
Ni’a
Tüpai ‘e Makarea hanahana...
‘A ito
no
te ro'o
o
tô mou’a
na
!
Émile
3. New enlistment
near
“Pëtoro’ü”
(5)
Ever since about end of
May upon this year,
political team was choosed through a tear
Of the ancient gang astonishingly exhausted
In regular election from rules they just trusted
A
new
By remote interposition of Big Brother.
a reign of so overjoyed power
Lasting more than twenty years, the owners upset
Never did enjoyed their mishap on this sunset.
Thus after
44
Dossier : Au vent du Taui
Thenceforth, Tahiti’s people, so trustful in Bible,
Discover two
Dream islets
pearly and too incredible
recently kept for Government’s sake.
fashioned urban keepers now have to take
Care of their Common Palace to receive persons
The
new
With all due honours,
having to pay attention.
Raymond
4. Te ruruga o
te nunaga ke te vanaga (6)
Kaore te kaunuku ki te marae fata ra
Tahitinui ki Nuihi, ki tahatika,
Ke tôna nau huhuki ki te pafata
E hakamori à ki te t'ffai reka.
E peu tau-tahito hoki i
Ki Fakahina, koia hoki
Ki Tahiti tôreu.
garohia
ki konei
Rogo fakahiahia
To te Hau Henua i heke noa iho nei,
Ki mûri ake ki te tahi ràroa mau
Hakaterehaga rua gahuru tuatau :
Kua fanako te hakoi i noho reka ai !
Kia fakatura tâteu ki te pupu
nei,
fakaariki mai
Ki te Fare Kura-tuaroa ki teienei !
Ko rateu te tükau
e
Takapua
45
Littérama’ohi N°7
Raymond Vanaga Pietri
NOTES
1
) Il s’agit des atolls de Tüpai (Mai’ao Iti) — à quelques encâblures de Porapora — et de Fakarava
(où le site de Makarea est joignable (?) par “speed-boat' ou par la bitumée Via Tihati directement
d’un bel aéroport).
La Caserne de la CAICT
(Compagnie d’infanterie Coloniale de Tahiti — plus tard Bataillon
: BIMAT puis du Pacifique : BIMAP) alors sise Avenue Bruat : c’est
là que fut coffré, en son gnouf à bat-flanc, quelques jours début octobre 1958, Pouvana’a a 'O’opa
lors des événements “troubles” du Référendum du 28 septembre 1958. Baptisée Caserne Broche
pour honorer ce capitaine ayant vaillamment accompagné son Bataillon du Pacifique, l’Armée
transféra ses campements à Pü’o’orotevaita’irea (’Àrue), allant permettre au Territoire autonome
d’y installer son quartier général rénové dit Palais de la Présidence. Au temps de l’ancienne mand’infanterie de Marine de Tahiti
dature de la Commune de
Pape'ete, celle-ci avait souhaité donner à l’ancienne avenue de la “Reine
Blanche", devenue Avenue Bruat, l’appellation contrite de “Avenue du Sénateur Pouvana’a” allant
du seuil de la Gendarmerie Nationale
3) Vocabulaire emprunté
4) Selon le
au
l’ex-place maritime du Général de Gaulle...
“Pe'ape’a Island" de Pierre Vérin.
Dictionnaire du Fare
“fa’ehau")
vers
Vâna’a, le terme “fa’ahau" peut signifier soldat (variante de
conforme aux notions de paix et de gouverne-
ou pacificateur, réconciliateur, ce qui est
ment dont doit être garante cette maison (fare).
5) Patoro'ü est le lieudit en bas du promontoire en versant de la vallée de Sainte Amélie, occupé
par les édifices du CESC, du bâtiment ministériel de la Culture et de l’Académie Tahitienne, du
Monument aux Morts pour la Patrie, à proximité de la “Caserne - Présidence”, cet ensemble
connaissant des infiltrations de la rivière Vaihï aujourd’hui recouverte de béton et déviée.
/ noho mai nei te
mau
tika fakatere ki tô tateu Henua. Eie ïa te tahi
hipahipa ki roto ki te puka hakatoro reko Tuamotu
46
a
Stimson.
puke tuatako i tâhia
ma
te
irama’ohi N°7
ra
Devatine
TE TAHI TAUIRA’A
...
LE CHANGEMENT EN LITTERATURE !
Le
Le
ne
changement en littérature impulsé par Littérama’ohi
«
Taui
»,
changement ou tournant majeur pris dans le domai-
littéraire, s’est amorcé il y a 2 ans, quand en
mai 2002, 7 auteurs
polynésiens qui jusque-là travaillaient isolément créèrent l’événement
Premier Salon du Livre de Papeete, en faisant paraître le numéro 1
de Littérama’ohi, la seule revue littéraire, faite par des auteurs natifs de
Polynésie,
Et le changement a rapidement produit ses fruits, concrétisés non
seulement par le nombre de numéros de la revue Littérama’ohi parus
régulièrement, soit un total de 7 numéros à ce jour, au bout de deux
au
années d’existence,
celui croissant des ouvrages des auteurs polynéqui ont été publiés.
Mais aussi par
siens
Littérama’ohi créa à nouveau la surprise lors du 3°
Papeete, avec la parution simultanée non pas d’un
mais de deux numéros, le N° 5 et le N° 6 dont le thème du « dossier »
portait sur les « Rencontres océaniennes »,
Avec la présence au Salon de plusieurs écrivains océaniens, anglophones et francophones, dont de nombreux auteurs venus de la
Nouvelle Calédonie,
Un Taui, un tauira’a rahi, historique, dans le monde, la vie littéraire
francophone et anglophone de la région océanienne ! Il coïncida avec
le changement de gouvernement en Polynésie française.
En mai 2004,
Salon du Livre de
Pour
en
fut un total
auxquels viendra s’ajouter le N°7 à paraître avant la fin
revenir à la revue, de mai 2002 à mai 2004, ce
de 6 numéros
du mois de décembre 2004.
Tous
ces
numéros sont importants car ils
deur de la conscience, de la
témoignent de la profon-
réflexion, de la variété, de la richesse, des
47
Littérama’ohi N°7
Flora Devatine
écritures, des langues, d’une fraction, non des moindres, des
Polynésiens qui jusque-là n’avaient pas pu trouver de lieu, d’espace de
partage, de communication, de leurs dits, sentis, écrits. C’est ainsi
qu'en lieu et place de quelques dizaines de pages prévues initialement
pour le démarrage de la revue Littérama’ohi, ce furent plus de deux
cents qu’il allut faire imprimer. Grâce au partenariat avec l’OPT, l’impression a pu être réalisée pour le :
N° 1, en mai 2002, 202 pages : 35 auteurs (auteurs d’articles,
écrivains) parmi lesquels 5 non polynésiens sensibles à/intéressés par
ce qui se joue en Polynésie, et comptant 21 femmes !
N° 2, en décembre 2002
298 pages : 29 auteurs dont 4 non
polynésiens, et 18 femmes,
N° 3, en avril 2003, 214 pages : 21 auteurs dont 3 non polynésiens, et 13 femmes,
N° 4, en novembre 2003, 218 pages : 22 auteurs dont 4 non polynésiens, et 14 femmes,
N° 5, en mai 2004 - Ecrivains du Pacifique Sud, 186 pages : 23
auteurs, et ô changement, seuls 7 d’entre eux sont de Polynésie française,
Comportant donc 16 écrivains océaniens anglophones et francophones, parmi lesquels 12 femmes,
N° 6, en mai 2004 - Auteurs de la Polynésie française, 220 pages :
23 auteurs dont 2 non polynésiens : 4 hommes - 19 femmes,
N° 7, à paraître en décembre 2004, plus de 200 pages : 33
auteurs dont 8 non originaires de la Polynésie française, parmi lesquels
-
-
,
-
-
-
-
-
19 femmes.
Ce furent
chaque fois, un défi, un challenge à relever ! Cela était
possible grâce à la cohésion et à la volonté du groupe des 7
auteurs fondateurs d’accord sur un point primordial : lancer, faire avancer et tenir la mer, la pirogue de la littérature
polynésienne.
rendu
Ainsi,
tion
en
au cours
tions de livres
48
même temps que Littérama’ohi, et en termes de
des deux dernières années, se sont multipliées
pensés écrits par les Polynésiens.
publicales édi-
Dossier
Un
:
Au vent du Taui
changement remarquable au regard de l’ensemble de
Polynésie française !
la popu-
lation de la
En effet,
à côté des ouvrages collectifs, bulletins, revues,... aux-
quels participent de plus en plus de Polynésiens, sont apparus ceux,
individuels, d’un certain nombre d’auteurs :
Célestine Hitiura Vaite, Larbre à pain (traduit de l'original écrit en
anglais, Breadfruit, en collaboration avec Henri Theureau, Editions Au
vent des îles, Papeete, 2003), Titaua Peu, Mutismes, (Editions Haere Po,
Tahiti, 2003), Jean-Marc Pambrun, La nuit des bouches bleues (2002),
Jean-Marc Pambrun, alias Etienne Ahuora, Les parfums du silence
(théâtre, Editions Le motu, Tahiti, 2003), Tavae Raioaoa, Si loin du monde
(récit écrit en collaboration avec Lionel Duroy, Ohéditions 2003), Maeva
Shelton, Et j’ai cueilli des orchidées, (Editions Te Ite, Papeete, 2003),
Virgile Haoa, Lalliance ma’ohi (Editions Au vent des îles, Papeete, 2003),
Corinne Mateata McKittrick, Te ‘a’amu no Tintin, Te pa’apa’a ‘avae fa’ahoboni piru (traduction en tahitien du Crabe aux pinces d’or..., Editions
Casterman, Paris 2003), Ernest Sinchan, Identité Hakka à Tahiti Histoire, rites et logiques (Editions Te Ite, Papeete, 2004), ...
Les fondateurs de la revue
Littérama’ohi n’étaient pas en reste :
(Imprimerie Polytram, Tahiti,
2002), Chantal Spitz, L’île des rêves écrasés (1991, réédition par les
Editions Au vent des îles, Papeete 2003j, Hombo (Editions Te Ite,
Papeete 2003), Jimmy Ly, Adieu l’Etang aux chevrettes (Editions Te Ite,
203), Marie-Claude Tessier-Langraf, Hutu Painu -Tahiti, racines et
déchirements (Editions Au vent des îles, Papeete, mai 2004), TAHITI
BELOVED AND FORBIDDEN - Tahiti Herehia, Tahiti Rahuia” (version
anglaise, traduction de Dr Neil Carruthers, (Nouvelle Zélande) éditée
par Institute of Pacific Studies (IPS) - University of the South Pacific Suva
FIJI, septembre 2004)
Danièle-Tao’ahere Helme, Créativité
-
Et
la démocratisation de
l’écriture, dans l’apparition de la
là, le changement réside également dans
l’informatique, outil performant pour
49
Littérama’ohi N°7
Flora Devatine
Toile », ou Internet,
qui permet l’accès à des sites sur lesquels on
peut lire des études sur les écrivains ou sur la littérature polynésienne.
«
La création littéraire faisant fleurir tout naturellement des Prix
qui
encouragement à la production de nouveaux ouvrages, aussi
s’en suivit-il des Prix littéraires décernés à des auteurs polynésiens
pour des ouvrages écrits en français et/ou en tahitien, lors des salons
du livre en France, notamment à Ouessant, ou en Polynésie, comme
sont
aux
un
Journées du Reo Ma’ohi
:
Prix du Livre Insulaire,
catégorie Fiction, Ouessant 2004 (6° édition), attribué à Jean-Marc Pambrun alias Etienne Ahuora pour Les
parfums du silence (théâtre, Editions Le motu, Tahiti, 2003)
-
Prix Littéraire des Etudiants de i’Université de
Polynésie française
2004, (2° édition, Prix créé en 2003), décerné à Célestine Hitiura Vaite :
Uarbre à pain ((traduit de l’anglais, Editions Au vent des îles, Papeete 2003),
-
En
se
souvenant que parmi d’autres livres, avaient été également
en 2003 puis en 2004, les romans de Chantal T. Spitz :
sélectionnés
Hombo
(Editions Te Ite, Papeete 2003), de Maeva Shelton
(Editions Te Ite, Papeete, 2003).
:
Et j’ai
cueilli des orchidées
Avant
ces
dates, d’autres Prix littéraires spécifiques à la Polynésie
Prix Henri Hiro, prix de poésie, le Prix Littéraire
avaient été créés, tel
de l’Académie tahitienne
Président, Re
a
(Fare Vana’a), devenu le Prix Littéraire du
te Peretiteni, (institué en 2000), et le Prix Littéraire du
Président pour la Jeunesse (créé en 2001),
Et attribués à des auteurs d’ouvrages, récits
fictifs et poésies, écrits en
quelconque des langues polynésiennes, reo ma’ohi,
Raison pour laquelle le Prix du Président récompensant un ouvrage écrit en langue polynésienne fut transformé en Prix du Reo Ma’ohi
qui sera décerné pour la première fois en 2005, pendant les Journées
tahitien
ou
dans l’une
du Patrimoine.
50
Dossier : Au vent du Taui
Parmi les lauréats de
ces
prix,
on
peut citer ;
Fare Tauhiti Nui/Maison de
à trois lauréats :Tane a Raapoto, Valérie
Gobrait, poète, auteur par ailleurs de pièces de théâtre, en tahitien, Te
‘a’ai no Matari’i, La légende de Matari’i (2000), Te vahira’a fenua, Le
partage de la terre (2001), et Arai'a Patrick Amaru, lauréat par ailleurs,
en 2000, du Prix Littéraire du Président.
Leurs poèmes font l’objet de publication d’un livret, Puhihau (Te
Fare Tauhiti Nui-Maison de la Culture, Impression STP Multipress,
Tahiti, 2003)
-
Prix Henri Hiro, créé et décerné par Te
la Culture, en mars 2000,
oho
Et pour les Prix Littéraires du Président, il y a eu, Patrick Amaru, Te
no te tau ‘auhunera’a - Les prémices de l’abondance (1° Prix
2000, édité en 2001), EtetieraTchongTai, Aita
‘ino, uafa’aora mai ra ‘oia i ta’u vahiné (1°
Prix Littéraire du Président en 2001, édité en 2002), Te’ura, Camélia
Littéraire du Président
en
te Atua i tau’a mai i to’u
Marakai
Aue ...Te Oeoe
:
o
te ‘a’au...- UEcho des entrailles
Littéraire du Président pour la jeunesse, 2002,
Claude Teriierooiterai : Te heva {Le Deuil)
Président
en
2003,
en cours
d’édition).
(1° Prix
édité en 2003), Jean(1° Prix Littéraire du
.
changement, opéré en profondeur, est que les gens maintes’expriment sur des questions d’actualité : « Quelles
langues d’écritures », « Où sommes-nous ? », « Rencontres », ou sur
« Le Taui
le Changement », et dans la langue de leur choix, celle à
leur portée.
Une prise de parole salutaire ayant trouvé à s’enraciner dans les
pages de la revue Littérama’ohi !
Enfin, ils s’affirment peu à peu, ils acceptent de se faire connaître,
alors que jusqu’ici ceux qui écrivaient ne publiaient quasiment jamais. Il
y en avait, - et il y en a toujours !- qui gardaient leurs cahiers, et écrits
par de vers eux, et certains s’enterraient même avec eux !
Car le
,
nant osent écrire, et
-
51
Littérama’ohi N°7
Flora Devatine
Se faire enterrer
avec ses
pouvoir participer
pas
Autre
changement
:
écrits était le signe du
désespoir de
ne
monde !
au
des publications bilingues, et trilingues, appa-
raissent.
C’est le
cas
non
seulement des publications
régionales anglophones, et universitaires, telle que la revue Manoa, qui prépare la parution pour 2004 d’un numéro spécial consacré à la littérature
polynésienne,
Ou telle que
la revue Mana, de l’Université du Pacifique Sud à Fidji,
qui prépare pour 2005, un numéro portant sur la Polynésie française,
Et c’est le cas de la revue Littérama’ohi qui accepte les écrits dans
toutes les langues océaniennes, occidentales, chinoises, ou autres.
Enfin, c’est le
-
en
cas des romans de :
Célestine Hitiura Vaite, Breadfruit, roman écrit en anglais, traduit
français
-
en Uarbre à pain,
Marie-Claude Teissier-Landgraf,
Hutu Painu, Tahiti, racines et
français, traduit en anglais, TAHITI BELOFORBIDDEN Tahiti Herehia, Tahiti Rahuia.
déchirements,
VED AND
Le
roman
écrit
en
-
changement, c’est donc également que des pays anglophones
Polynésie française, et suivent son évolution.
découvrent la littérature de la
Le
changement, c’est aussi l’intérêt, de plus en plus manifeste pour
polynésienne, d’étudiants, de doctorants qui, bien que
n’ayant jamais posé le pied en Polynésie, prennent les auteurs polynésiens et leurs écrits comme sujets d’étude.
la littérature
On y compte non seulement des individus mais aussi des
organismes aussi fondamentaux que l’IRD (Institut de Recherche
pour le
Développement), que la FILLM (Fédération Internationale des Langues
et des Littératures Modernes ), des Universités, notamment améri-
caines, (Universités de Santa Clara, de Santa Cruz, en Californie,
Université de New-York, Université de Hawaï, Universités de Pau,
52
Dossier
:
Au vent du Taui
Bordeaux, Metz,...), des Associations, l’APEP (Association pour une
école
de
la
psychanalyse), le CERAC (Centre d’Etudes, de
Recherches, d’Art, de Création),...
changement, c’est l’intérêt grandissant porté à tout ce qui s’écrit
Polynésie française.
Et le changement énorme, c’est que ceux qui étudient la langue ou
ceux qui lisent les textes font enfin la distinction entre la littérature exotique inspirée par la Polynésie et la littérature polynésienne.
Le
en
En
Polynésie française, l’un des changements rassurants relevés
au cours
de
ces
deux dernières années, c’est
l’éveil de la nouvelle
qui touche à la littérature du fenua, comme on l’enefforts des auteurs eux-mêmes relayés par des
avance sur l’évolution des programmes.
génération à tout
ce
tend dire, fruit des
enseignants en
laquelle, lorsque des collèges, des lycées et
appel aux auteurs polynésiens dans le cadre de
leurs travaux d’étude, de recherche, pour des conférences et/ou ateliers
en classe, suivies ou précédées toujours d’un travail spécifique sur les
auteurs en question,
Leur demande est toujours prise en compte, et satisfaite dans la
mesure du possible :
C’est la raison pour
des universités font
Ainsi sont intervenus
:
Chantal
-
-
-
-
Spitz
Lycée Samuel Raapoto
Lycée de Taravao
Lycée du Taaone
Mairie de Mont Dore
en
-
Lycée Paul Gauguin
Lycée de Papara (à deux reprises)
Université de la Polynésie française
Nouvelle Calédonie,
Récemment, à l’Université du Pacifique Sud à Suva (Fidji) (du 14
octobre
au
dence »,
le Dr
), Chantal T. Spitz, « écrivaine en résiDépartement de Littérature et de Langue dirigé par
14 novembre 2004
invitée
au
Larry Thomas.
53
Littérama’ohi N°7
Flora Devatine
Patrick Amaru
Université de la
-
Polynésie française ( à deux reprises)
Marie-Claude
-
Teissier-Landgraf
Lycée d’Uturoa
Michou Chaze
-
Lycée La Mennais (à deux reprises)
A l’Université de
Hawaï,
en
Nouvelle Zélande.
Jimmy Lycée
Lycée La Mennais - Lycée Technique du Taaone
Lycée Hôtelier
- Collège de Paea
Ecole philanthropique chinoise.
-
-
-
Danièle-Tao’ahere Helme
Dans de très nombreux établissements scolaires, écoles primaires,
collèges, de plusieurs îles, (Il du Vent, Iles sous le Vent, Iles
Marquises,..) dans le cadre d’ateliers d’écriture et de poésie.
Collège de Papara
Collège de Paea,
-
-
...
Flora Devatine
Collège Notre Dame des Anges (à deux reprises)
Lycée de Papara ( à deux reprises)
- Collège de Papara
Lycée de Faaa
- Collège de Faaa (CDI)
Lycée de Uturoa
- Lycée de Taravao
Collège de Taravao
- Lycée Paul Gauguin
Université de la Polynésie française (à deux reprises)
Stage pédagogique à la DES
A Paris, à l’Association des Etudiants de Polynésie française, à
l’IRD, auprès de doctorants sur la littérature francophone du Pacifique
Sud, sur celle de la Polynésie française.
-
-
-
-
-
-
-
54
Dossier
Il
revue
en
Au vent du Taui
ayant publié ou non dans la
Titaua Peu, Célestine Hitiura Vaite, Jean-Marc
est de même d’autres auteurs
Littérama'ohi
Pambrun,
:
:
...
La direction des études secondaires
(DES) ne fut pas en reste
puisqu’elle a, elle aussi, organisé en mai 2004 un stage pédagogique
portant sur « l’intégration de la littérature polynésienne dans l’enseignement des lycées et collèges », à l’intention des professeurs de tahitien et de
Autre
français.
changement, c’est l’invitation des auteurs de Littérama’ohi à
régionaux, internationaux
intervenir dans des séminaires, colloques
tels que :
Le Séminaire
«
Ecritures de l’identité
Journées annuelles de l’unité de recherche
«
»
(dans le cadre des
Constructions identitaires
(Centre IRD.d’Ile de France, 23-24 octobre 2002)
(Flora Devatine)
Colloque International « Paul Gauguin : héritage et confrontation »
(Université de la Polynésie française, 6-8 mars 2003) (interventions de
Chantal Spitz, Jean-Marc Pambrun, Flora Devatine)
Colloque International de la FILLM à l’Université de la Nouvelle
Calédonie (19-24 octobre 2Q03) Rencontre écrivains chercheurs (21
octobre 2003) ; Atelier « Littératures féminines » (23 octobre 2003)
(interventions de Chantal Spitz, Flora Devatine)
Festival des Arts à Palau (Micronésie) (juillet 204) (Chantal Spitz)
Invitation et participation à « Ecrivains en résidence » à
l’Université du Pacifique Sud de Suva-Fidji (Chantal Spitz)
et mondialisation
Autre
changement, c'est l'invitation et la participation des auteurs
de Littérama’ohi
-
»
Premier
Salons du Livre :
Salon du Livre de Papeete
aux
des auteurs fondateurs de
(mai 2002)( interventions
Littérama’ohi, interventions de Flora
ceux qui analysent ce qui s’écrit. (Bertrand- F. Gérard,
Margueron, Sylvie André )
Devatine, et de
Daniel
55
Littérama’ohi N°7
Flora Devatine
-
2° Salon du Livre de
Papeete (avril 2003) (Interventions de Titaua
Bertrand-F. Gérard, de Ernest
Peu, de Célestine Hitiura Vaite, et de
Sinchan, de Bruno Saura,...)
1° Salon du Livre de la Nouvelle Calédonie à Poindimié
(16-19
2003) (interventions de Chantal Spitz, de Flora Devatine)
3° Salon du Livre de Papeete (mai 2004) (interventions de
Chantal Spitz, de Titaua Peu, de Rarahu Boirai, de Sylvie André,...des
auteurs océaniens, francophones, anglophones,... )
-11° Salon du Livre de l’Outre-mer à Paris (16-17 octobre 2004),
avec au programme, parmi d’autres, une « Rencontre avec la littérature polynésienne ». (intervention de Jimmy Ly et de Flora Devatine).
16° Salon de Lire en Fête à Paris (16-20 octobre 2004) (interventions de Jimmy Ly et de Flora Devatine lors de 4 soirées de rencontre,
témoignages, lectures de textes tirés des numéros de Littérama’ohi ou
extraits des ouvrages des auteurs,
Soirées organisées par le Cérac en collaboration avec
Littérama’ohi et l’Association Graine d’Or, en amont d'un spectacle pour
le Printemps des Poètes 2005, « Au nom de Ségalen,... littératures
ma’ohi », consacré à la littérature polynésienne.
-
octobre
-
Et à
autre changement, c’est l’organisation de soirées
publique des textes de Littérama’ohi, ou extraits des
ouvrages des auteurs. Ainsi :
de
à
re
ce
propos,
lecture
Papeete
A l'occasion de la sortie du N° 2 et du N° 4, trois
mises en place :
-
le 11 décembre 2002
sienne
soirée
: «
Lectures
soirées de lectu-
publiques de littérature polyné-
par la revue Littérama’ohi au Petit Théâtre
de la Maison de la Culture/TFTN à l’occasion de la sortie du N°2
-
»
21
:
-
organisée
22 novembre 2003
autour de la littérature
:«
Miroir Littéraire
»
:
deux soirées
polynésienne organisées par les fondateurs
Littérama’ohi pour présenter le N° 4, au Petit Théâtre de la Maison
la Culture /TFTN à la Maison de la Culture /TFTN de Papeete)
56
de
de
Dossier
Lecture des autres », lectures
«
:
Au vent du Taui
publiques par les écrivains poly-
nésiens d’autres auteurs
L’auteur face à facteur », théâtralisation par
d’extraits du N° 4 de la revue Littérama’ohi
«
de jeunes étudiants
à Nouméa
A l’occasion du
re
Colloque de la FILLM
22 octobre 2003
-
: «
:
intermèdes Océaniens
»
:
soirée de lectu-
déambulatoire de textes d’auteurs océaniens,
jeunes
au Centre Culturel Tjibaou, parmi
auteurs de Littérama’ohi (Chantal Spitz et
A Paris
:
Dans le cadre du 16° Salon de Lire
Arts
programmée par des
les textes retenus, ceux des
Flora Devatine)
en
Fête 2004
au
Salon des
:
-16 octobre 2004
-
18-19-20 octobre 2004
Cérac,
se
déroulant
en
:
4 soirées de lecture,
organisées
par
le
deux temps :
1 °) « De l’oralité à
Lecture de textes
l’écriture, de la mémoire à l’écriture »,
(par deux comédiennes, Corinne Barois et
Mychau N’Guyen,
«
Rencontre
Témoignages
-
français et en tahitien »
Echanges : deux auteurs polynésiens
en
:
Jimmy Ly
et Flora Devatine
2°)
« De l’oralité à l’écriture, le rôle
l’identité de l’écriture polynésienne
et
sa
de la mémoire
place dans le monde contemporain »
ou de poèmes issus de la revue
Lecture de textes de réflexion
Littérama’ohi
En 2005, il est prévu, dans le cadre du Printemps des Poètes,
qu’une troupe de comédiens français parcourre les régions de France
-
57
Littérama’ohi N°7
Flora Devatine
spectacle intitulé « Au nom de Segalen,
Littératures
présenter cette nouvelle facette de la littérature française qu’est la littérature polynésienne ».
avec
un
...
Ma’ohi », pour «
Ainsi, s’est produit un « Tauira’a... Un changement notable » en
littérature, après l’intervention du « Groupe des 7 », fondateurs de
Littérama’ohi. Ce mouvement a permis à la littérature des natifs de
Polynésie de sortir de l’ombre et de s’afficher sans complexe à la lumière
des lecteurs
comme
des
critiques.
Les fondateurs de Littérama’ohi
aient été
atteints, et
au
se
réjouissent
que
leurs objectifs
delà de leurs espérances.
Certes ! Mais tout n’est pas acquis
Car il semble que dans les esprits,
!
il y ait une spécialisation telle
que : « Aux Antilles, les Arts littéraires, et à la Polynésie, les Arts chorégraphiques, ou festifs !»
Les clichés ont la vie dure !
Et
ment
a
malheureusement, il y en a qui ignorent encore que le changemaintenant quelques années d’âge dans le domaine littéraire en
Polynésie française.
Il
reste donc
plus aux auteurs polynésiens qu'à accomplir, en
polynésienne, un long travail d’information, pour
dire que cette dernière existe, un lourd travail de traduction pour qu’elle soit accessible au plus grand nombre de lecteurs,
Enfin un permanent et puissant travail d’écriture, de publication,
pour qu’elle soit mieux connue, reconnue.
ne
faveur de la littérature
Il faut donc continuer de ramer,
Ramées de Littérature polynésienne
!
Flora Devatine
n-MarcTeraituatini Pambrun
TAUI
:
NOUS AVONS
CHANGÉ
DE PIROGUE
ET ECLAIRCI NOTRE CIEL
Étonnante, inattendue, inespérée, la pensée libératrice polynésienjamais à court d’épithètes pour conter la double victoire des
indépendantistes emmenés par Oscar Temaru aux élections du 23 mai
2004 et du 13 février 2005. Inconcevable, invraisemblable, impossible,
l’idéologie francophile aux relents du colonialisme ne trouvera plus non
plus les mots pour exprimer son aversion de l’indépendance. Mais une
fois la surprise savourée par les uns, et l’impact amer digéré par les
autres, tous sont convaincus que les Polynésiens savent désormais que
l’indépendance, n’est pas un spectre de la misère, n’est plus un miroir
aux alouettes, une chimère de la littérature du colonisé, un mythe oral
perdu derrière eux, mais une histoire faite par eux, pour eux, devant
eux, à portée de main.
Au soir du 23 mai, d’immenses clameurs se sont élevées de toutes
parts sur la terre polynésienne comme autant de soupirs de soulagement pour les vivants et de plaintes de consolation à l’égard de toutes
les âmes de nos disparus qui s’étaient battus pour cette victoire, ou en
avaient tout simplement rêvé. J’ai songé en cet instant à toutes les
femmes et tous les hommes de notre cher pays emportés par la mort,
la maladie et la misère engendrées par plus de deux siècles d’occupation anglaise et française, trente années d’essais nucléaires et quinze
longues années d’un régime autonomiste dictatorial, et j’ai pleuré de
tristesse pour tous ceux qui avaient espéré voir et savourer ce moment
unique.
J’ai pleuré comme un prisonnier libéré du bagne, comme un survivant d’une catastrophe, tremblant de joie et n’osant croire encore à ce
qui nous arrivait. Car, nous avons tant lutté contre le colonialisme français, et contre la tyrannie morale et psychologique du régime monarchique de Gaston Flosse, que nous désespérions de goûter un jour aux
premiers parfums de la démocratie. Nous avions tant sacrifié de nos
vies familiales et renoncé à tant de projets de vie pour dénoncer l’iniquité,
ne ne sera
59
Littérama’ohi N°7
Jean-Marc Teraituatini Pambrun
que nous nous étions résolus à l’attentisme
jusque dans la mort.
Parfois, la colère assourdie par des échecs électoraux trop cuisants ou
la tristesse de voir nos compagnons de lutte tout
perdre, se perdre ou
disparaître, nous nous sommes laissé gagner par l’amertume et le
découragement. Et pourtant, sans le savoir, nous étions parvenus aux
portes de la victoire.
Ces 23 mai 2004 et 13 février 2005, nous avons fait le Taui, nous
fait le changement comme on échange sa pirogue contre une
qui file mieux sur le lagon, comme on change l’état et la couleur
du ciel. Nous l’avons fait en Polynésiens, en maîtres avertis de notre
destin, nous avons franchi une étape décisive de notre révolution amorcée, il y a deux cent ans, par Opuhara et poursuivi par tous nos héros
nationaux, Teraupo, Pouvanaa a Oopa, Henri Hiro. Une révolution bien
polynésienne qui s’inscrit dans la longue durée et le temps acyclique
d’un peuple indifférent en apparence à son sort de colonisé, mais attentif aux bouleversements de l’histoire. Une révolution
qui ne s’achèvera
que lorsque notre peuple aura retrouvé sa peine souveraineté, son histoire, sa culture et ses traditions, son organisation politique fédérale, ses
terres et ses biens culturels, en un mot sa civilisation. Un art de
penser
et de vivre que le colonisateur n’a pas encore renoncé
pour autant à
avons
autre
réduire à la sienne.
En
effet, tout danger de revenir aux affres du depostisme de Gaston
Flosse n’est pas définitivement écarté. Car quelque part, de l’autre côté
de la planète, sévit en France une droite
politique réactionnaire, encore
et
toujours coloniale. Sorcière bégayant ses valeurs républicaines et ses
l’Homme, vieille gouvernante acariâtre et arrogante d’une maison polynésienne qui ne lui a
jamais appartenu, dresseuse de pseudo
enfants d’une terre ma’ohi dont elle a toujours ignoré la puissance, docteur Moreau d’îles habitées par des cerveaux impossibles à
manipuler,
cette France-là a refusé le scrutin. Et cette France-là fomente, dans ses
laboratoires de déstabilisation de la pensée émancipatrice, des stratégies contre-révolutionnaires de récupération politique de notre pays.
Et comment pourrait-il en être autrement? Cette France-là voudrat-elle mener jusqu’au bout la mission
émancipatrice dont elle se targue
droits de
60
Dossier
:
Au vent du Taui
la scène internationale? J’en doute encore. Elle qui a
temps, d’argent et d’hommes à nous enfoncer la
langue française dans la gorge et à la déployer pour entonner la
Marseillaise ; elle qui s’était évertuée à nous faire les louanges de son
sacro-saint modèle de développement ; elle qui avait réglé nos vies en
les enfermant derrière les barreaux de ses règlements administratifs et
de ses lois, cette France-là, même si elle se rend compte que toute son
entreprise de génocide culturel, de lobotomie de la pensée traditionnelle n’a servi à rien, ne renoncera pas aussi facilement à l’enjeu géostratégique que représente ses colonies françaises du Pacifique.
Mais depuis le 23 mai, nous avons retrouvé la parole et bouté en
quelques mois hors de l’enceinte de notre assemblée la pensée unique
et la censure, le décorum et les règles du temps de parole établis par le
législateur français. Nos langues se sont déliées comme nos ancêtres
nous l’avaient enseigné, pour dire le fond d’une pensée jusqu’ici
ligotée
jusqu’au sang, d’un cœur jusqu’ici bridé à mort, d’entrailles jusqu’ici
étouffées par l’oppression de la raison d’État. Nos langues se sont
déliées et ont révélé toute l’ignominie du régime autoritaire et corrompu
de Gaston Flosse, un régime aux couleurs honteuses d’une France protectrice des œuvres les plus nuisibles et indifférente aux malheurs d’un
peuple dont rien ne justifie la pauvreté et la détresse. Rien, sauf de
l’avoir délibérément sacrifié sur l’autel de l’inégalité, du profit et de la
concentration des richesses entre les mains d’une oligarchie locale à la
botte d’une république française coloniale et ultra-libérale.
Nos langues se sont déliées pour oser dire au grand jour que nous
n’avons jamais cru que l’histoire de nos relations avec la France n'avait
été qu’une longue suite d’amitiés franches qui auraient abouti à un heureux mariage franco-tahitien. Nous savons que nos îles furent naïvement abusées et forcées par l’Etat colonial français, comme des filles
promises depuis leur enfance en vertu d’un droit de cuissage à des rois
conquérants. Comme nous savons aussi que la colonisation de la
Polynésie n’a pas été pour nous qu’une entreprise d’assimilation, mais
un temps de récupération pour panser nos plaies, une longue convalescence durant laquelle nous avons appris à comprendre le colonisateur
pourtant
sur
consacré tant de
61
Littérama’ohi N°7
Jean-Marc Teraituatini Pambrun
et le monde
extérieur, à lutter contre notre propre extinction, à faire des
enfants, patiemment et obstinément pour nous préparer au moment où
pourrions nous libérer du joug monarchique et colonial.
C’est donc que le processus révolutionnaire n’est pas achevé. Le
Taui doit à présent entretenir sa nouvelle pirogue et conserver à la surnous
face du ciel
son bleu limpide. Car dans un pays encore pénétré de ses
aristocratiques, dans un pays à l’économie modelée sur les lois
capitalistes, dans un pays où le clientélisme et le népotisme sont devenus une seconde nature, dans un pays où la critique et la contestation
sont encore jugées déloyales et irrespectueuses, dans un pays où des
habitudes anti-démocratiques ont marqué ses habitants depuis leur
naissance, changement de parti ne rime pas forcément avec pluralisme
et changement de mode de gouvernance, souveraineté ne danse pas
naturellement avec tolérance et liberté. Nous avons encore beaucoup à
apprendre et à réapprendre.
Car nous vons perdu l’habitude d’être indépendants, nous avons
perdus l’expression libre de nos opinions et la tolérance à l’égard de
celles des autres sans nous préparer au conflit. Et surtout nous n’avons
pas appris à refuser l’argent facile, les passe-droits et les privilèges, à
repousser les marques de prestige et à nous mettre avec humilité au
service de notre communauté, nous n’avons pas appris tout cela car ce
n’est pas dans notre culture. Nous commençons à peine à apprendre la
notion d’égalité et ferons encore beaucoup d’erreurs avant de devenir
une nation où chacun aura sa place, un métier, un toit et des conditions
de vie décentes et équitables. Nous sommes encore dans l’ignorance
de tout ce que la Démocratie impose comme droits et comme devoirs,
et nous ferons encore beaucoup d’erreurs avant de devenir meilleur que
nous-mêmes et meilleur que ceux qui nous ont imposé leur organisation institutionnelle et leur code moral sans que nous n’ayons eu le
temps de les modeler nous-mêmes à notre image, à celle de notre his-
avatars
toire intellectuelle et de
C’est cela
à
ce
ver,
62
nos
traditions.
qui nous reste à faire : bâtir une démocratie qui ressemble
qu’il y a de plus juste et de plus beau dans notre cœur. Et pour y arrinous devons réveiller, réapprendre, enseigner et développer toutes
Dossier
:
Au vent du Taui
les valeurs positives qui sommeillent, s’agitent en nous, sont en nous
depuis l’aube de notre civilisation : la compassion, l’entraide, la générosité, le respect et le courage. Nous disposons de tout ce qu’il faut pour
construire un- modèle de société qui nous ressemble, débarrassé des
valeurs négatives de notre propre culture et des normes individualistes
dévastatrices du style de vie occidental ultra-libéral. Nous avons tout ce
qu’il faut pour bâtir une démocratie et une société qui nous ressemble,
une démocratie sociale qui prenne en compte notre identité communautaire et fédéraliste. Et c’est dès à présent qu’il faut la faire, pour que l’espoir incarné par le Taui ne meure jamais, n’ait pas été qu’un slogan
électoral, mais soit la pierre de fondation de l’édifice de notre liberté.
Jean-Marc Teraituatini Pambrun
63
Littérama’ohi N°7
Elise Huffer
AU NON DE LA
GOUVERNANCE,
OUI A UNE ETHIQUE OCEANIENNE
Je
ne
suis ni écrivain ni littéraire, mais ayant eu
le privilège de parau colloque de la FILMM sur la littérature d'«émergence» en
octobre 2003, (organisé par l’Université de Nouvelle-Calédonie dans le
ticiper
site
magnifique de la Communauté du Pacifique - CPS), j’ai eu l’occame rendre compte en quoi mes préoccupations
pouvaient rejoindre celles des écrivains océaniens présents. Leur oeuvre,
fut, à ce colloque, qualifiée d’ «émergente». Commençons donc par ce
terme d’«émergence» qui froisse et gêne parce qu’il catégorise immédiatement (’«autre» (dans ce cas l’écrivain océanien) et son savoir-faire.
Il témoigne d’un certain dédain (ou d’un dédain certain) envers celui
dont on juge l’œuvre à l'aune de critères définis dans les grandes capitaies du monde. Qui doit décider ce qui émerge ? Et qui émerge réellement ? Est-ce celui qui écrit ou celui qui décide enfin d’écouter et de
prendre en compte la voix de (’«autre»? Plutôt que de parler de littérature «émergente» ne faudrait-il pas parler d’émergence de la reconnaissance des voix océaniennes ? Car les auteurs du
Pacifique (comme
ceux d’ailleurs) expriment, selon des normes littéraires convenues
(certes), les espoirs, les angoisses, les voyages, les vies et les rêves de
leurs ancêtres comme de leurs enfants à/venir. Ils ont simplement choisi de le faire par écrit alors que bien d’autres l'ont fait avant eux (et continuent de le faire) à travers la danse, le chant, les arts plastiques, l’oralité et même la politique.
sion de mieux
On
ne
peut nier que l’écriture
souvent mal
ouvre une
fenêtre
sur
des mondes
compris, des histoires de souffrances réprimées, des senteurs passées enfouies, et des vies à venir. Comme l’écrit le philosophe
Richard Rorty, les écrivains sont les témoins et interprètes privilégiés
des injustices subies par les hommes et les femmes : ils rendent leur
histoire réelle et prenante, chose que les sciences sociales et humaines
ont du mal à faire. Mais parler de littérature d’«émergence» sert surtout
64
Dossier
:
Au vent du Taui
à cloisonner la
littérature, à la répertorier et à établir des barrières là où
justement de les faire sauter. Parler d’émergence
c’est avant tout parler de politique, de politique de domination. C’est
s’arroger le droit de classer les uns et les autres selon des critères définis par les puissants et subis par les autres.
les écrivains tentent
Au
non
de la gouvernance...
C’est au cœur de cette domination aussi, malheureusement, que se
situe souvent le discours de la gouvernance, ou de la «bonne» gouvernance, notion qui déferle sur le Pacifique (surtout anglophone) depuis le début
des années 1990, et thème de cet essai. D’où nous vient ce terme ?
Quelle est
sa
généalogie ? Et à qui s’adresse
ce nouveau
credo ?
Le terme de «gouvernance» est ancien (et français)1 mais l’usage
qui en est fait désormais est récent et nous provient tout droit de la
Banque Mondiale (BM). C’est en cherchant à expliquer les faillites des
plans d’ajustement structurels en Afrique sub-saharienne que la BM a
ressuscité ce terme dont le contenu peut se résumer en une.proposition : si les plans n’ont pas fonctionné c'est en raison de la mauvaise
gestion politique des dirigeants politiques africains et en particulier à
cause de leur corruptibilité. La BM étant un organisme « apolitique », et
n’étant pas habilitée à s’ingérer « ouvertement »dans les affaires politiques des Etats, elle choisit de parler de «gouvernance», et par proiongement de «bonne gouvernance». Ironie du sort réservé à ce terme :
alors qu’il était proprement politique, il devient singulièrement apolitique.
Ce message
qui s’adresse d’abord à l’Afrique à la fin des années
dirige petit à petit en direction du Pacifique, où les affaires politiques ne vont pas toujours très bien non plus, il faut l'avouer. Quel est
son contenu et par qui est-il véhiculé dans la
région ? Le mot d’ordre est
simple, pour ne pas dire simpliste : pour attaquer la corruption, il faut
1) réduire le rôle de l’Etat (car l’Etat est tenu responsable de la corruption) ;
1980,
se
65
Littérama’ohi N°7
Elise Huffer
2) promouvoir la société civile, en particulier les organisations non
gouvernementales - peu importe si celles-ci sont créées artificiellement
et pilotées par l’extérieur, et,
3) promouvoir le rôle du secteur privé comme moteur de l’économie.
En Océanie
indépendante et anglophone, le message est repris en
premier par le Programme des Nations Unies pour le Développement
(PNUD) et les bailleurs de fonds, en particulier l’Australie, la NouvelleZélande, et la Grande-Bretagne, suivi de l’Union Européenne et de la
Banque Asiatique de Développement (celle-ci a pris jusqu’à récemment
le relais de la BM dans le Pacifique). L’assistance financière et économique est désormais liée à la bonne gouvernance (du moins en principe) : elle est apportée en priorité aux domaines qui sont jugés susceptibles d’améliorer la gestion des affaires politiques des pays. Les
bailleurs soutiennent par conséquent les programmes de réforme
publique ainsi que les ONG qui prônent les droits de l’homme, l’ordre
démocratique, le développement de la micro-finance et du secteur informel, et le renforcement de la liberté des médias. Les Etats insulaires
sont, par ailleurs, priés de privatiser nombre d’industries et de services
publics et d’offrir de toujours meilleures conditions à l’investissement
privé et étranger.
Et
alors, direz-vous, n’est-ce pas ce qui se pratique ailleurs et puis
le remède n’est-il pas
1) La bonne
indiqué? A
ces
questions, plusieurs réponses
:
d’autres notions qui l'ont précéaux pays en voie de
développement (ou en «émergence») et provient du ‘Nord’. A titre
d’exemple, à l’USP2 lorsque l’on reçoit des groupes d’étudiants d’université américaines (et non des moindres) et que je leur demande s’ils ont
connaissance des termes gouvernance ou bonne gouvernance, ils me
regardent d’un air perplexe et hochent la tête. Par contre, il n’y a pas un
étudiant de l’USP qui n’ait pas entendu parler de gouvernance. On peut
en conclure que ce qui est considéré «bon» pour les Océaniens
gouvernance, comme
dé, s’adresse d’abord
66
au
tiers monde, c’est-à-dire
Dossier
([’«autre»)
:
Au vent du Taui
s’applique pas aux Américains. Pareillement, lorsque les
parlent des droits de la personne chez eux, ils emploient le
terme «civic rights». Lorsqu’ils appliquent le terme aux pays du tiers
monde, ils parlent de «.human rights». Distinction qui en dit long sur leur
ne
Américains
vision des «autres»3.
Pour
résumer, la bonne gouvernance c’est donc d’abord pour
l’autre, c’est-à-dire pour « celui qui ne sait pas vraiment se gouverner ».
C’est dans cette
encore
moins les
logique que les Africains n’ont pas été consultés (et
Océaniens) quand au contenu de cette notion.
La gouvernance ne cherche pas à poser de vraies questions sur
systèmes et structures politiques mais plutôt de promouvoir et d’appliquer des modèles issus de la pensée et de la pratique politique et
économique libérales occidentales. L’idéologie de la «bonne gouvernance» permet donc, pour reprendre les termes de Sophie Bessis, « de
faire l’économie d’une analyse des rapports mondiaux »4 et même de
les occulter. La « bonne gouvernance » ne demande pas aux peuples
et aux dirigeants océaniens de réfléchir à des solutions à leurs propres
problèmes politique, économique et sociaux ; au contraire, elle impose
un dogme.
les
2) Les solutions préconisées
ne
sont pas adaptées. En Océanie
ne
faut-il pas davantage d’Etat (ou un Etat différent) plutôt que moins
d’Etat ? Ne faut-il pas privilégier les liens entre les populations
Autrement dit, ne vaut-il pas mieux repenser l’Etat plutôt que
cher à le réduire?
et l’Etat.
de cher-
Pourquoi vouloir imposer, à tout prix, la domination d’un secteur
privé de type occidental souvent peu contrôlable ? L’exemple de certaines entreprises de confection dans la région est édifiant : celles qui
emploient une main-d’œuvre entièrement composée de travailleuses
Chinoises enfermées dans les usines de jour et dans leurs dortoirs de
nuit, ou encore les usines qui, en pleine nuit, «plient bagage» avec tout
67
Littérama’ohi N°7
Elise Huffer
leur matériel
sés
«sur
le
sans
même payer le dernier salaire de leurs employés
Dans les industries des pêches et des forêts,
carreau».
ploitation sauvage par certaines compagnies privées
causé des dégâts considérables sinon irréparables.
étrangères
a
laisl’exdéjà
3) Troisièmement, une société civile artificielle (qui représente souune élite urbanisée) peut-elle réellement apporter un mieux-être
aux populations alors que les messages qu’elle prône vont souvent à
l’encontre de la pensée et des valeurs autochtones (ou du moins les
prend peu en considération) ? Ne risque-t-elle pas de remplacer un
dialogue direct entre la population et l’Etat ?
vent
Le
dogme de la bonne gouvernance paraît donc, en grande partie,
inadapté aux réalités océaniennes, même s’il faut reconnaître qu’il peut
être utile par certains aspects : par exemple, dans les efforts entrepris
pour susciter une meilleure compréhension des systèmes constitutionnels démocratiques, l’amélioration du fonctionnement des institutions et
le soutien aux médias, entre autres. Mais il pêche par deux cotés : en
tant que dogme, il n’accepte pas la critique et reste étanche aux discours
alternatifs et 2), il se débat dans un «vide» politique et agit souvent en
dépit, voire à l’encontre de, la conceptualisation politique océanienne.
Pourquoi parler de «vide» politique et qu’entendons-nous par
conceptualisation politique océanienne ? Cela nous amène à la
deuxième partie de cet essai.
...
oui à
Avant de
une
éthique politique océanienne
répondre à ces deux questions (auxquelles nous reviendrons) il est utile de faire deux détours rapides. Premièrement, il faut
rappeler qu’en Océanie, comme ailleurs dans le monde, il y a de sérieux
problèmes politiques. Il ne s’agit donc pas ici de nier les problèmes mais
plutôt de chercher à y apporter des solutions adaptées. Deuxièmement,
nous utilisons le terme éthique non dans le sens limité de comporte-
68
Dossier
:
Au vent du Taui
ment individuel si cher à l’air du
temps (voir Frédéric Lordon5), mais
plus large de la philosophie et dont l’objectif, pour reprendre
les propos de Calum Paton, est de répondre aux questions suivantes :
dans celui
1) «
bon et le
What does good
juste ?)
or
right
mean »
? (que comprend-on
par
le
2) «What sorts of things are good and right »? (qu’est qui est consicomme bon ou juste ?)
Comme le rappelle Calum Paton, la première question est de portée universelle, c’est-à-dire que toutes les sociétés se la posent, alors
que la deuxième question s’adresse au contenu de ce qui est juste et
bon, et cela varie selon les sociétés et à travers le temps6.
déré
Pourquoi donc parler d’éthique politique océanienne et comment
aborder
ce
domaine ?
1) Parler d’éthique politique océanienne c’est s’intéresser à un
champ connu implicitement des populations mais occulté du discours
politique « moderne » et national, et souvent ignoré par les universitaires, chercheurs et à fortiori par les «gurus» de la bonne gouvernance.
L’éthique océanienne se décline-sous nos yeux mais nous ne la voyons
pas. Pourquoi ? Parce qu'il est plus facile pour le monde occidental, qui
régit le Pacifique insulaire, d’encourager (sinon d’imposer) un schéma
de pensée qui se dit (et se veut) universel et de demander à l’autre
(l’Océanien) de s’y conformer (et surtout de ne pas le remettre en question
du moins au niveau national)7.
-
Parler
d’éthique politique océanienne c’est chercher à comprendre
qui constitue le bien-être politique dans le monde océanien8. Pour ce
faire il faut travailler avec les chercheurs et universitaires océaniens,
mais surtout avec les gens ordinaires de la région afin de comprendre
et de permettre une connaissance et une diffusion plus large au sein de
l’espace public national, de leurs valeurs et principes politiques. Il ne
ce
69
Littérama’ohi N°7
Elise Huffer
s’agit
pas
avec eux
re
des
de se mettre à la place des Océaniens mais plutôt de trouver
des ouvertures ou des voies nouvelles permettant de construi-
systèmes et institutions adaptées.
2) Pourquoi l’éthique politique océanienne n’a-t-elle pas été davantage prise en compte ? Jusqu’à présent, les conceptions éthiques et
politiques océaniennes n’ont pas primé (loin de là) dans le débat politique national pour les raisons suivantes :
a) l’héritage colonial : les institutions coutumières ont été, selon le
cas créées (Fidji), modifiées (Tonga), tolérées (Samoa) ou vidées de
leur contenu ou démolies (Tahiti, Iles Cook), marginalisées (Vanuatu
/Salomon), mais les valeurs qui les sous-tend(ai)ent ont été évacuées,
comme effacées de la vie publique politique officielle et reléguées au
champ (classé) coutumier, en opposition au champ politique.
Le traitement des idées politiques océaniennes est un peu à l’image de l’idée que se faisaient les anciennes administrations coloniales
des populations indigènes ; elles étaient destinées à disparaître.
b) Les mondes de l’administration puis de l'enseignement et de la
Pacifique, longtemps été dominés par l'héritage philosophique et académique occidentaux. Comprendre et apprécier les
notions éthiques et politiques océaniennes suppose une connaissance de la
langue, une ouverture réelle sur le monde océanien et la volonté de le
connaître avant de le juger. Peu d’enseignants /chercheurs, du moins en
sciences politiques, ont voulu s’engager dans cette voie, préférant étudier les
institutions, l’histoire et les changements. Les politologues ont longtemps
recherche ont, dans le
considéré l’étude des sociétés non-occidentales
comme
relevant de l’ethno-
logie ou de l’anthropologie. La non prise en compte de la philosophie politique océanienne par les politologues, a reléguée celle-ci (particulièrement
dans la vision occidentale) à une sorte de « folklorisation» coutumière. La
coutume est, dès lors, souvent jugée comme étant en dehors du champ politique (malgré certaines concessions ou aménagements institutionnels).
3) Il semble important de s’intéresser à l’éthique politique océanienne aujourd’hui pour les raisons suivantes :
70
Dossier
:
Au vent du Taui
a) les modèles importés tendent à contribuer à la «malgouvemance»,
maldéveloppement et à la corruption car en entrant en conflit avec
des modèles plus anciens basés sur des principes et normes différentes,
ils créent des malentendus et facilitent la manipulation politique.
au
b) Il est grand temps d’écouter les populations locales et de
prendre en considération leur pensée profonde, afin de mieux cornprendre en quoi consiste les normes particulières aux société océaniennes on pourrait ainsi mieux les mettre en relation avec les normes
-
dites internationales.
c) Nombre de chercheurs océaniens, qu’ils soient théologiens, édusociologues ou économistes (llaitia Tuwere, Faauuga Logovae,
Konai Helu Thaman, ‘Ana Taufe’ulungaki, Kabini Sanga, David Gegeo,
Ropate Qalo, Manulani Meyer pour n’en citer que quelques uns), ont
déjà publié des travaux sur la pensée océanienne, en particulier sur les
notions de bien-être social, éducatif, économique, spirituel, et sur
l’épistémologie9. Sitiveni Halapua, économiste et directeur du Pacific
Islands Development Program au East-West Center de Hawaii, a,
quand à lui, théorisé la notion et la pratique de talanoa, forme océanienne de dialogue et de résolution de conflit qu’il applique actuellement à
Fidji10. Ces intellectuels ont donc lancé un mouvement de réflexion
approfondie sur la pensée océanienne qui mérite d’être poursuivi et surtout généralisé.
cateurs
d) La philosophie et l’éthique politique océaniennes sont contenues
langage quotidien, dans les pratiques, dans les questions que
se posent les artistes, les écrivains et les gens du commun (même si
elles ne sont pas toujours explicitées). Mais pour qu’elles puissent vivre
au niveau politique national (et même international), elles ont besoin
d’être mises en valeur, diffusées, analysées, débattues, critiquées, bref- il leur faut sortir de leur enfermement actuel dans ce qu’on appelle la coutume, qui les paralyse et les contient à l’écart des normes étadans le
blies
au
niveau national.
71
Littérama’ohi N°7
Elise Huffer
Le besoin se fait sentir particulièrement dans le domaine de la politologie où il n’existe quasiment aucun travail théorique sur la pensée
océanienne. A l’USP, par exemple, il n’y a aucun enseignement sur la
philosophie politique océanienne en 1er et 2e cycles. Les étudiants n’ont
donc pas la possibilité d’examiner dans un contexte formel, c’est-à-dire
soumettre à un travail critique intellectuel et rigoureux, les valeurs et principes qu’on leur inculque dans leur milieu social et qui entrent souvent en
conflit avec les principes qui sous-tendent les institutions introduites.
Faire connaître
l’éthique océanienne servirait à combler le vide
politique auquel nous avons fait allusion plus tôt. Ce vide existe du fait
que la pensée politique océanienne est mal connue et qu’elle n’apparaît
guère dans l’espace public national. D’un coté se trouvent les institutions étatiques fondées sur des principes issus d’une histoire particulière (la création de l’Etat-nation, invention
européenne du 18e siècle), le
marché et la société civile (inventions libérales) et de l’autre, le monde
dit de la coutume. Entre les deux se situe le vide politique conceptuel
même si, par nécessité, il existe de multiples aménagements institutionnels [par exemple, création d’institutions comme les conseils de chefs,
système électoral samoan ou seuls les matai (chefs de famille étendues) sont autorises a devenir parlementaires], procéduraux et même
mentaux. Mais ces derniers ne font que masquer le fossé conceptuel
qui existe entre les valeurs libérales qui dominent la pensée occidentale, et la pensée océanienne. Il faut donc susciter une connaissance plus
approfondie et une diffusion plus large de l’éthique politique océanienne afin de permettre à la région de mettre en avant sa
propre vision du
monde, et de décider de
son
avenir dans de meilleures conditions. Il
s’agit là d’un projet bien différent de celui de la «bonne gouvernance»
qui ne cherche pas à comprendre les fondements de la moralité océanienne mais, au contraire, à imposer un modèle de gestion politico-économique d’inspiration libéral.
Pour mener à bien ce projet, au niveau universitaire, il faut créer un
cadre permettant aux étudiants de travailler sur ces questions et de
chercher leurs propres solutions, adaptées aux problèmes politiques du
72
Dossier
:
Au vent du Taui
Pacifique. C’est ce qu’on a commencé à faire en créant un cours en 3e
cycle sur la pensée, philosophie et éthique océanienne. Dans un
deuxième temps, l’université va accueillir un colloque sur l’épistémologie océanienne en 2006, auquel seront invites artistes, écrivains et
chercheurs. Déjà, le Programme d’Etudes du Pacifique à l’USP (Pacific
Studies Program) a organisé une table ronde avec l’Université
Nationale de Samoa (NUS) sur l’éthique et la philosophie politique
samoane. Cela nous a permis de réunir des «sages» et des chercheurs
samoans afin de faire un travail de défrichage des principaux concepts
samoans liés à la politique ; premier exercice du genre.
Dans un deuxième temps il faut travailler avec des communautés
locales, qu’elles soient rurales, péri-urbaines ou urbaines, afin de corn-
prendre comment elles construisent leurs valeurs et leurs normes politiques - et comment ces dernières s’articulent avec les institutions et
services publics. L'objectif est de construire ensemble, avec ces cornmunautés, de nouveaux outils ou axes leur permettant de peser davantage dans la gouvernance (au sens de gestion sociale, politique et économique) contemporaine11.
Pour conclure, il
serait souhaitable qu’il y ait davantage d’échanges
écrivains, chercheurs et universitaires en sciences
sociales et humaines, et les populations en général, afin de réfléchir
ensemble au monde océanien, actuel et en devenir.
entre artistes et
Elise Huffer
Littérama’ohi N°7
Elise Huffer
NOTES
I
)
Le terme de gouvernance, en soi, n'est pas ici mis en cause. La gouvernance est une
façon utile
simple de parler de gestion politique et économique des sociétés. C'est l’usage qui en est fait
dans le «discours» de la «gouvernance» qui pose problème.
et
2) University of the South Pacific. L’USP est une université
régionale composée de 12 pays
membres. Elle compte trois campus principaux : le plus important se situe à Fidji et les deux autres
sont au Vanuatu et aux Samoa. Chaque pays membre compte un centre universitaire.
3) Voir à
of
ce propos, Makau Mutua, 2000. Human
Rights: A Political and Cultural Critique, University
Pennsylvania Press, Philadelphia.
4)
Voir Sophie Bessis, L’Occident et les autres
Essais, 2001, p.93.
5) Frédéric Lordon, 2003. Et la vertu
6)
sauvera
:
Histoire d’une suprématie, La Découverte/Poche,
le monde, Broché
The first is “answered
universally” and that “the content of good and right [i.e. the focus of the
time or across societies” (1992: 60). Calum Paton, 1992. Ethics and
Politics, Avesbury Series in Politics, Ashgate, London.
second
question]
vary over
7)
La pratique de normes particulières est tolérée
puissance de l’Etat.
au
niveau local, généralement en raison de l’im-
Ce dernier n’est évidemment pas singulier mais ii a une cohérence philosophique. On peut donc
parler de pensée philosophique océanienne comme on parle de philosophie occidentale.
®)
Voir à ce sujet, E. Huffer et R. Qalo, “Have We Been Thinking Upside Down: The
Contemporary
Emergence of Pacific Theoretical Thought", The Contemporary Pacific, vol. 16:1, pp. 87-116. Dans
notre titre nous employons le mot émergence dans le contexte suivant:
“By using the term “emergence" in the title of this article, we are not suggesting that Pacific thought is new, only that it is gradually making its way into formal academic settings. While Pacific thought has formed the basis of
communal living in the Pacific for many years, it has not generally been accepted in modern discourse and institutions. Because Pacific
philosophies have been transmitted orally in vernacular
languages, the dominant institutions and actors in the colonial and postcolonial Pacific have ignored them. This is finally changing, thanks to. all the Pacific scholars and practitioners who have been
advocating Pacific thought', p. 109.
10) Le processus de talanoa est en cours depuis plusieurs années à Fidji. Il permet aux
dirigeants
politiques qui s’affrontent habituellement, de mieux se comprendre et de tenter de régler certains
dossiers sensibles.
II ) C’est
également ce
que
suggèrent P. Calame et A. Talmant, dans le contexte français, dans leur
Gouvernances Démocratiques, Desclée
ouvrage, LEtat au Cœur : le meccano de la gouvernance,
de Brouwer, Paris, 1997.
74
Je suis le
Ténébreux, le Veuf, l’inconsolé
d’Aquitaine à la tour abolie
Le Prince
Ma seule étoile est morte
Et
luth constellé d’étoiles
mon
Porte le soleil noir de la
Gérard de
Mélancolie
Nerval, El Desdichado (Le Déshérité)
SABLE NOIR
Vivre et mourir
Dans
un
éclat de rire
Embrasser dans un élan
De
volupté la vie
Se livrer tout entier
Dans
corps à corps
Avec le monde
un
éperdu
Plonger dans la mer
Sentir l’eau mouiller
Chaque carré de peau
S’allonger sur le sable de corail
Faire l’amour avec le soleil
Se rassasier de l’ombre
palmier immense
plus finir de boire
la source qui coule
Du
N’en
A
De la noix rugueuse
Exhaler
Le
soupir de l’homme
Revenu enfin
Chez lui
Littérama’ohi N°7
Jimmy M. Ly
DOUCE JENNY
Quand je serai reparti
Vers
mes
îles lointaines
Quand tu
Bien loin de
Je
De
me
ma
seras
mes
pensées
souviendrai
douce
Jenny
Devenue lasse
Du
temps qui passe
Emportant ses amis
Comme les feuilles
Au vent d’automne
HUPE
Il faisait bon le soir
Sentir le vent
Descendre de la
montagne
Il faisait bon le soir
Voir le soleil
Se coucher
sur
la
mer
Demain est bien loin
Aujourd’hui il fait bon vivre
Et
un
matin
Tout est devenu hier
Ecritures
E UA
La
pluie ruisselle
Sur les souvenirs de
Goutte
enfance
mon
après goutte
Elle descend
vers
la
mer
Emportant
Ma vie dans l’oubli
NUIT
La nuit
Une
porte ouverte
Sur les étoiles
La vie
Une
énigme fermée
Sur l’avenir
ETRE DEUX
Se dire que l’on s’aime
Se dire que l’on est deux
Le bonheur c’est l'autre
Ensemble c’est être
Pour
un
moment d’extase
Qui vaut toute
Pour
un
une
vie
instant de félicité
Un voile levé
sur
l’éternité
Aimer
C’est être Dieu lui-même
77
Littérama’ohi N°7
Jimmy M. Ly
TUAMOTUS
Atolls
A la lumière souveraine
Quelquefois implacable
Où le ciel et la
Tiennent
mer
plus de place que la terre
J’aime
îles ivres de soleil
ces
Où
vers
midi
L’ombre devient
un besoin
D’une oppressante urgence
RIVAGES LOINTAINS
Sous l’alizé nocturne
Au bord de la
plage déserte
Les purau décharnés
Veillent en ombres chinoises
Dans la clarté lunaire de
La nuit corallienne.
Sur cette île
sans
leçons
Rien
Pour
qui veut apprendre
A devenir meilleur
Ephémères sont les bonheurs d’ici
Sans remèdes les peines
Incurables les douleurs.
Solitaire et inquiet
Songeant
aux temps heureux
Je baisse la tête
d’avant
Et fermant les yeux
Je rêve
pensivement
A l’abandon insouciant
D’autres
rivages lointains
Jimmy M. Ly
78
ia Patrick Amaru
MATA’I TO’ETO’E
’arepurepu na i te hau o to’u manava, mata’i
te ta’ata, i mua i to tatou parau, to’u parau, te
E mata’i iti to’eto’e teie i
to’eto’e i
mua
i te ti’ara’a
o
parau o te iho tupu o te hia’ai hia nei e
i teie tapa’o, teie mana’o ’otahi o teie e
tuma, mata’i to'eto’e no roto mai
fa’ahepo maru noa hia nei.
IA ORA NA TATOU
la
ora na
Tei hea ho’i te aroha teitei
tatou
Na roto i te aroha teitei
I to vaha
O te Atua
E ‘a’au fati hara ‘ohie ho’i to ‘oe
O te Atua
Tei hea
To’u fatu”
I to vaha hitoa
Aue ia parau
Oia mau
Tei hea to tatauro mo’a
o
pa’ari
te Atua, to
‘oe Fatu
E Fatu Aroha ho’i to ‘oe
iti i te ‘oa’oa
I to vaha tihotiho
i to tatauro
E parau faro’o pinepine hia teie
Parau ’Amui i te Tavini i te vahi
Aore ho’i ‘oe
Ho’e
Tei hea
roa
to aroha teitei
Tei hea
roa
to tatauro
Tei hea
roa
‘oe
No te Here
e
te Ti’arama o te
'Ai’a
e amo
E te Fatu
Ahe, to’u nei taea’e
Tei hea ho’i te aroha teitei
I roto i to vaha
Monamona
mona
A he, to’u nei taea’e
A he
ha’ape i te ma o to
nuna'a
Tei hea ho’i te aroha teitei
I roto i to vaha tao’a
Amaru Araia
(16 03 91)
Aore ho’i ‘oe i tau’a i tei ‘aihamu
79
Littérama’ohi N°7
Amaru Araia
MOERURUA
CAUCHEMAR
Moerurua hia
J’ai fait
vau
Hier
Inapo ra,
To‘u tino i tua
J’étais
I te
Devant
ava
E motu teie
e
tu nei
Haruru atu
a
tini
cauchemar
soir
au
au
large
une
passe
Une île était là
Dans l’obscurité
I te ata po.
Mai
un
ra
te ra’i
Ma’u’u atu
Le ciel
gronda
Comme de milliers de tonnerres
patiri,
La terre
grinça
Mai te ‘iri ia
Comme
une
Te miti i te
La
ra
pahae hia
‘arepurepura’a,
po’opo’ora’a
Te ‘are i te
I te
Te
ava
ama
te fenua
Toata,
i te fatira’a,
mer
peau
déchirée
s’agita
Les vagues se
Dans la passe
Le balancier
creusèrent
de Toata
se
brisa
Te va’a mata’eina’a i te rarara’a...
La
pirogue société dérapa...
Mau papu atu ra
Te hoe arata’i,
Je
me
ia’u
saisis alors
Du
Te Reo Metua Vahiné
gouvernail
Lorsqu’une voix maternelle
i te mahutara’a
S’éleva
e:
:
Pitié
“Aue te aroha
«
I te tama”
Pour tes enfants
Iri atu
Je
ra
to’u tino
Te fenua i te ta’u’ura’a,
Te mou’a i te horora’a,
Te papa o te motu i te ‘afafara’a.
Tori’iri’i atu ra te roimata,
Ei roimata ‘ura.
Mareva atu
80
retrouvai
Sur le
I tahatai,
I te Pito
me
»
o
ra
to’u tino
Tahiti Nui.
rivage
Lorsque le sol trembla
Les montagnes s’éboulèrent
Lorsque la roche mère de l’île craquela
Des larmes en fines gouttelettes tombèrent
Des larmes de sang
Mon corps alors s’envola
Au Nombril de Tahiti Nui
Ecritures
Pa’a’ina atu
Te aho i te
Mai
«
mai i te Fenua
mai i te Pufenua :
De l’intérieur du Placenta :
te ‘Ofa’i
Tihi,
mapuhi ra’a
raro roa
Mai roto
Angulaires explosèrent
Lorsqu’un souffle s’échappa
Des profondeurs de la Terre
ra
roa
A ara, a ara
Les Pierres
«
Eiaha te Mono ia mutu...
»
garde, prends garde
Prends
Que le Lien ne se rompt point... »
Hape atu ra to’u mata
Cinq étoiles périrent
Lorsque mes yeux aperçurent
I te ‘ite ra’a atu
Une croix
Ma'iri atu
ra
Rima Fétu.
Te ho’e tatauro ‘ana’ana
O teie
e
tara nei
I te niu
Qui brisait
vavahi nei
e
o
Les fondements du
te ‘Ai’a...
‘Aore parau ia’u vaha
Ua haru hia te parau...
Teie a reo i te anaura’a e:
«
A ara, a ara
Pays...
plus de mots
La parole confisquée...
Et toujours cette lamentation:
ce Prends garde, prends garde
Je n’avais
Sur cette croix
I ni’a i teie tatauro
E
aveuglante
Au-dessus de Orohena
I nia a’e ia ‘Orohena,
O teie
Une croix
Qui s’élevait
Tu
patiti hia ‘oe
cloué
seras
I ni’a i teie tatauro
Sur cette croix
E
Tu
tapu hia ‘oe... »
Mure
maru noa
I te teimaha
o
atu
ra
te motu nei
teie tatauro
seras
sacrifié...”
L’île, lentement, s’enfonça
Sous le
poids de cette croix
I te Moana Uri Po
Dans l’Océan Ténébreux
l‘a’aoa ai te Moa no Maroto.
Lorsque le Coq de Maroto chanta
te Ra
Hiti atu
ra
Ara atu
ra vau
Moerurua
Ra
se
Je
me
leva
réveillai
Cauchemar
Amaru Araia
(Faaa 04 0104)
81
Littérama’ohi N°7
Amaru Araia
TE OHO NO TE TAU AUHUNERAA
LES PREMICES DE L’ABONDANCE
Fare ute, dix
sept heures, le long de la digue entre deux foulées
au
ralenti...
Amaru Patrick ?
-
O ! la
-
ora na
!
On étudie ton livre, Te oho no te tau Auhuneraa.
/ ae ! Paari !
-
-
Ah bon !
-On
ne
E
! Tu
comprend pas pai tout... les mots sont trop anciens...On
parle plus pai tahitien à la maison...
-
e
E
as
fait
une
pai ! Comment
ne
traduction...
/a
!
Comment
se rencontrer ? Comment partager mes émotions, mes
passion du reo si ce n’est que par la traduction... trahison ?
Terrible paradoxe ! Douloureuse demande puisqu’elle émane des
jeunes du fenua...
ressentis,
ma
Voici des extraits de traduction des nouvelles
ayant constituées le
Auhuneraa, traduction certes littérale, donc
maladroite, souvent incorrectement français mais sincère dans le souci
de répondre aux préoccupations de nos jeunes et de tendre des passerelies à ceux qui éprouvent un intérêt à la littérature en reo tahiti.
livre Te Oho No Te Tau
82
Ecritures
TETAPU NO MEHITI
Qu’adviendra-1- il de l’amour quand
le peuple
se
meurt ?
Manua était le roi,
Hina la reine,
Aifa le marae,
Tiarei le district.
histoire des temps
oubliés,
temps où Tiarei était appelé :
Mehiti Vaa Ino Taparahi Taata te Toroa.
Mehiti, le clan cruel, tueur d’hommes.
C’est
une
Des
Une nuit
se posa,
Sombre nuit,
Où le roi Manua
Décida de rassembler
Les nobles et les tahua.
Le
grand tambour hurla ;
Le clan
fit silence
se
Et même les atii
Sur le
sable, n’osèrent pas s’aventurer...
C’était
une
Il leur dit
-Les
uru se
sez-vous
réunion sacrée !
:
font
rares.
Dans peu
de lunes, ils disparaîtront...Qu’en pen-
?
Le
grand prêtre répondit en réfléchissant aux propos qu’il allait tenir :
-O
mon
roi,
A ton marae,
Nous instaurerons
l’interdit,
L’interdit du uru,
Que cet interdit soit
Et que
tapu
la vie puisse s’étendre...
83
Littérama’ohi N°7
Amaru Araia
Manua tarda à
répondre. Il
se
réjouissait de la terreur qu’il leur ins-
pirait.
-O assemblée de
prêtres, il
me
convient d’accepter votre proposition.
Alors, ils se rendirent en procession au marae
Des incantations bientôt s’élevèrent dans la nuit.
de Aifa.
-O nombreux dieux, o milliers de dieux,
Nous instaurons l’interdit sur la nourriture,
L’interdit du uru,
Qu’il soit
un
interdit sacré,
De Ana Pu
Malheurs
Mort à la
jusqu’à Anahoho.
clan qui le brisera !
personne qui commettra
au
La
nuit, peu à peu,
Les dieux s’envolèrent
Et
sur
s’estompa
ce
crime !
;
le terrain de réunion,
Un messager planta une
Surmontée d’un uru.
branche de ti
Le
Le
jour se fit.
village se réveilla et Mehiti prit connaissance de l’interdit.
Des lunes
plus tard,
Quelqu’un hélas,
D’une irrésistible envie,
Dévora ce qui avait été
Il commit
une
consacré.
faute...
Un crime !
En effet,
Le tonnerre
gronda comme les rochers qui se détachent
hurla à Anahoho ; les malheurs s’abattirent,
Le sable blanc s’assombrit,
La
84
mer
de la montagne,
Ecritures
Le
jour devint nuit ; la clarté, l’obscurité,
devint écarlate, Onohea charria du sang...
Le rouge
Et soudain, le ciel s’illumina ;
Une chaleur
étrange s’installa.
Les
fruits, tous, flétrirent,
Les cours d’eau se tarirent,
La sécheresse était là,
La famine aussi,
C’était la colère, la colère des atua.
Les dieux
en
Une nuit
voulaient
aux
hommes !
vint,
Une deuxième
puis une troisième...
comptait plus.
Très peu de survivants.
Plus de vieillards, plus de nourrissants,
On
ne
les
Tous morts de faim.
Plus de liens familiaux,
Déchirés par
l’avidité...
L’amour était rompu par la faim.
parents frappèrent les enfants,
Les enfants s’attaquèrent aux parents,
Le vent mauvais du péché avait défait les liens,
Les
Mehiti
se
tuait réalisant ainsi le dicton
Mehiti Vaa tno
:
Taparahi Taata,
Mehiti, le clan cruel, tueur d’hommes.
restait à manger que
quelques racines de ti. Mais la populas’inquiétait, car de mémoire d’homme, elle avait oublié le moyen de
conserver longtemps ces tubercules. Mehiti n’avait guère connu de
périodes de sécheresse et de famine. C’était une terre souvent baignée
Il
ne
tion
85
Littérama’ohi N°7
Amaru Araia
par les
vallées.
pluies
On y
;
la nature était verdoyante du rivage jusqu’au fond des
entendait maintenant des lamentations...
Une voix,
Cessez de
doucement, retentit
:
disputer ! Cessez de gémir !
Je suis Tanetua. Tanetua, le grand prêtre de Vahiné Nui Tahu Rai...
Je connais un moyen. Nous préparerons un umu ti. Nous cuirons
tubercules de ti, ils se conserveront longtemps.
-
vous
Qu’attendons-
nous
? Que la terre soit morte ! Cria
ces
jaloux le roi
Manua.
-O
roi,
ne nous pressons pas !
fonctionnera pas si un d’entre nous a péché en brisant l’interdit !
Nous devons le sacrifier pour adoucir le courroux des dieux
mon
Ce four
ne
...
ORAMA NUI TAU MAI TE RAI
GRANDE VISION DESCENDUE DU CIEL
Première Partie.
C’est
une
histoire qui nous vient du
plus profond de la nuit, la nuit
où Turei, au lever du soleil, vivait en harmonie.
Verdoyante était la vallée
Où demeurait la reine Orama !
«
Orama Nui Tau Mai Te Rai »,
Grande Vision Descendue Du Ciel.
Mais
Les
86
«
périlleux était de
maoa
»
ramasser
à Turei, à Anahoho,
Ecritures
Car
«
Mehiti Vaa Ino
Taparahi Taata
» y
veillait,
Mehiti, le clan cruel, tueur d’hommes.
Un
jour, hélas,
Haapaianoo, Arona,
Le roi de
«
Te arii
aro na
Le Roi Qui
i te po »,
S’opposa À La Nuit,
grotte qui hurle
Se rendit à Turei, à « la
Ramasser des « maoa
»,
».
O roi, tu restas sourd aux inquiétudes de ta fille bien
les conseils de tes prêtres lorsqu’ils te supplièrent :
-O roi, non, notre roi, non!
Tu seras tué ! Ne va pas ramasser
les
« maoa
aimée. Tu dénigras
»!
En effet,
Le malheur est
sur
toi, Arona!
La mort, ta mort,
Cette ombre glaciale se lève,
Elle t’ouvre ses ailes sournoisement,
Elle te couvre, elle te recouvre maintenant.
O
grand roi de Haapaianoo, ta fin sera horrible !
coquille de « maoa », sera brisée sur les rochers ! '
Les falaises noires de Anahoho seront rouges de sang !
Les flots, de peur à Faaurumai, mugiront !
Ton corps telles ses vagues à présent
Ta tête,
S’avancera, se retirera vers la passe,
Et s’enfoncera, inéluctablement dans les abîmes.
Tu
seras
Sacrifié
étalé
aux
aux
ténèbres,
dieux.
Ton cadavre décorera le
A Turei,
Arona !
«
marae
»,
à Turei
87
Littérama’ohi N°7
Amaru Araia
En effet,
Il fut
porté
Comme
de Turei
poissons enfilés
au « marae »
paquet de
un
En offrande
«
»
dieu Oro.
au
Mais les prêtres prirent peur
Et hésitèrent donc à offrir ce corps.
Ils se rendirent à la maison royale.
-O reine, Orama Nui Tau Mai Te Rai,
Voici un « tuia » pour le dieu Oro.
Mais ce « poisson » n’est pas un «
poisson » des plus
poisson noble », un « poisson sacré »...
C’est Arona ! Arona, le grand roi de Haapaianoo !
C’est
un «
Orama s’écria
-
:
O assemblée des
Hier
au
prêtres,
soir,
J’ai été couronnée de rêves !
Je
me
Dans
suis
vue me
débattre
de sang,
une eau
Un torrent de sang !
Un bourgeon de « uru » se
Ses feuilles étaient formées
Et s’ouvraient
majestueusement dans cette
Je me suis réveillée,
L’étoile du matin était
O
au
Retirez
Que
de sang.
firmament.
de
rêve,
qui m’empêche de voir clair en moi même,
âme soit limpide !
sens
ce
ce
mon
grand prêtre,
L’eau de sang,
C’est le sang de
en
transe, répondit :
-
Arona !
Le torrent de sang
Sera le torrent de malheurs
88
eau
prêtres,
Révélez moi le
Le
dressait.
communs,
Que Turei affrontera...
Quand, soudain, il s’écroula...mort !
Le trouble et la confusion
s’emparèrent de Orama.
Turei fut aussi appelé :
«
Turei, Umaa Tapau Piripiri »
Turei, à la grande confusion.
Et c’est ainsi que
Fait partie de Litterama'ohi numéro 7