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REPUBLIQUE FRANÇAISE
liberté
—
égalité
—
fraternité
ETABLISSEMENTS FRANÇAIS DE L’OCEANIE
CIRCULAIRE
Service du Patrimoine
3
Là lutte contre l’alcoolismeParmi les mesures qu’envisage M. le Gouverneur pour com¬
battre dans la colonie l’ivrognerie, l’alcoolisme et leurs effets, l’ac¬
tion sur les enfants lui paraît un des moyens
les plus efficaces
d’obtenir des résultats, du moins pour l’avenir.
En conséquence, à partir du Ier mars, il sera fait
chaque se¬
maine dans toutes les écoles , à la ire classe dans les écoles à 2 ou
3 classes, à la première division dans les écoles à une classe, une
causerie sur un sujet d’anti-alcoolisme.
Cette causerie prendrà la place d’une des leçons de morale de
la semaine. Les Directeurs et Directrices d’école choisiront le jour
qui leur conviendra le mieux et mettront sur leur emploi du
temps, pour le jour désigné, anti-alcoolisme à la place de morale.
La matière des leçons sera fournie aux Instituteurs et aux Ins¬
titutrices par les connaissances qu’ils ont acquises
déjà sur cette
question et par les nombreuses observations qu’ils ont dû faire
autour d'eux. Ils trouveront beaucoup de
renseignements utiles
dans la brochure rédigée par le Dr. Sasportas, Chef du Service
d’hygiène de la colonie, qui leür sera envoyée incessamment. De
plus je leur donne ci-après, dans le programme détaillé des leçons,
quelques indications dont ils tireront parti.
Enfin au cours de mes inspections, je leur donnerai tous les
conseils utiles et tous les renseignements qu’ils voudront bien
me
demander.
Ilsexposeront avec le plus de simplicité et le plus de netteté pos¬
sible le côté scientifique du sujet, mais ils insisteront tout
particu¬
lièrement
sur
le côté moral et social. Ils feront sentira leurs élèves,
qu’il
y a de dégradant, de vil, d’abject dans l’ivrognerie, ils as¬
socieront à ce vice, un sentiment d’aversion et de
mépris : pour
le petit Tahitien s’enivrer doit ” faire honte ”, et si l’école crée un
ce
d’opinion dans ce sens, si elle parvient à dresser l’amourpropre si vif de la race Contre l’ivrognerie, elle forgera Larme la
plus efficace pour la lutte entreprise.
Les Instituteurs étudieront ensuite les effets de
l’ivrognerie sur
l’individu, qui subit une dégradation progressive dans soncorps>
son cerveau et son
intelligence, dans sa conduite. Ils montreront
les actions de l’ivrogne dans sa famille, dans ses rapports avec
courant
camarades,
voisins, avec les autres hommes.
Ils diront quelques mots de l’hérédité alcoolique, des maladies
qui menacent les enfants de l’ivrogne.
ses
ou ses
Üans la coldriiè; i’acdolisme proprement dit, qui résulte de l’ab¬
sorption journalièré d’une certaine quantité d’alcool, sans qu’il y
àit ivresse, ni rriêrrié ëxcitation mentale, est peu répandu, sauf
peut-être à Papeete.
On ne consacrera donc que quelques causeries, 3 ou 4, à cette
forme de l’alcoolisnlei
PROGRAMME DES LEÇONS O’ANTIALCOOLISME.
I.
—
Led boissons
•
.
9
alcooliques.
»
*
f
I ° Boissons ïernieutées.
prdfitera de toutes les circonstances locales (accident
d’auto causé par un chauffeur ivre, rixe entre ivrognes, délit ou
crime commis par des individus pris de boisson etc.) pour illus¬
trer les leçons par des exemples, et inspirer plus sûrement l’a¬
version pour les actions qu’on veut combattre.
Il est inutile de recommander aux maîtres de donner l’exemple
a) Le vin.Teneur en alcool : 10 à 12 degrés; renferme en
outre quelques substances nutritives.
Boisson agréable, saine; à condition qu’on n’en boive qu’aux
toute circonstance.
Au moment où dans la colonie toutes les personnes qui exer¬
cent une autorité morale vont être invitées à unir leurs efforts
de l’eau.
Enfin,
on
en
compte d’abord sur les
enfants est continue et
ne saurait admettre de leur part ni mauvais exemple,
pour combattre l’acoolisme, alors qu’on
Instituteurs parce que leur action sur les
durable,
on
ni défaillance.
Aucune occasion, aucun
entrainement ne saurait excuser un
acte qui risquerait de compromettre les résultats de leur ensei¬
gnement et d’affaiblir leur influence morale.
repas et en petite quantité.
(Ne pas dépasser un demi-litre par personneadiilte et par jour.)
Le vin est dangereux pour les enfants qui ne doivent boire que
Tahitiens, la meilleure boisson c’est l’eau de coco.
b) La bière. —- Teneur en alcool : 3 à 6 degrés, renferme une
assez forte proportion de substances nutritives.
Boisson saine, mais dont il ne faut pas abuser.
(Ne pas dépasser une bouteilie par adulte et par jour.)
On ne doit pas donner de bière aux enfants.
c) Le vin d’orange. — Boisson très alcoolisée et très dange¬
reuse parce qu’elle renferme un
poison violent, et qu’elle enivre
Pour les
facilement.
L’usage en est interdit.il ne faut jamais en boire, et on doit em¬
pêcher si possible les gens d'en faire usage autour de soi.
2° Les boissons
distillées.
a) Caractères généraux.
proportion d’alcool ; environ 40
pour cent, 4 fois plus que le vin, 7 ou 8 fois plus que la bière.
Leur goût spécial leur est donné
généralement par des essences
qui sont des poisons violents.
(1 centigramme d’essence pour fabriquer le cognac à bon mar¬
ché tue un gros chien en 10 minutes) il en entre un gramme ou
un gramme
et demi dans un litre de cognac de fantaisie.
Toutes les boissons distillées produisent rapidement l’ivresse
et sont dangereuses ; elles empoisonnent lentement.
Elles contiennent
une
forte
b) Ias rhum»
Les rhum de marque
sucre fermenté que l’on
du jus de canne à
distille. Mais le rhum ordinaire est fa.
sont fabriqués avec
c)Les
briqué souvent avec de mauvais alcools auxquels On ajoute des
très dangereuses.
Le rhum enivre très vite ; il est très nuisible à la santé ; il affai¬
blit l’esprit. Les enfants doivent promettre de ne jamais en boire.
essences
boissons dites ” apéritifs” comme lé vermouth, le bitter,
l’anis, le pernod, sont aussi nuisibles; il en est de même des li¬
queurs dites” digestifs”, comme le curaçao, la bénédictine, la
chartreuse, etc.
Il
ne
II.
faut
—
jamais
en
boire»
Les effets des boissons
alcooliques
sur
les
i°Les boissons fermentées prises avec excès et les boissons
distillées même prises en petite quantité, affaiblissent tous nos or¬
ganes.
Les hommes qui ont à fournir un effort musculaire considé¬
rable (coureurs cyclistes, joueurs de foot-ball, boxeurs,
lutteurs)
au cours de leur entraînement ne consomment
par une goutte
de boisson alcoolique.
2° Effets sur* l’estomac et le
système nerVeux.
Ce sont ces deux organes qui ont le plus à souffrir. L’estomac
devient paresseux, digère mal, ne nourrit pas suffisamment l’or¬
ganisme.
système
nerveux,
perd la mémoire,
le
se met
facilement
en
ment et mal.
L’alcoolique
colère, travaille lente¬
alcooliques sonttrès exposés aux maladies Contagieuses
parce que leur corps est affaibli. Ils sont plus que les autres at¬
teints par la grippe, la fièvre typhoïde, la tuberculose.
Les troisquarts destuberculeux sontdes alcooliques et on a
pu
dire ” L’alcoolisme fait le lit de la tuberculose”.
III,
conséquences morales et sociales
de
Palcoolisme.
Il existe
deux formes d’alcoolisme
différentes, l'ivrognene frequente et l’alcoolisme chronique ; c’est la première qui
est la
1°
ne sait plus ce qu’il fait; il marche avec
peine, ti¬
tube et tombe. Il dit de vilains
mots, il est grossier et malpropre.
On ne doit pas rire de
faut lui” faire honte ”.
mais
il
l’ivrogne,
11 se dégrade, il devient comme un
plus répandue dans la colonie.
assez
h
U
L’ivrognerie.
a) On s’enivre avec du vin quelquefois, mais le plus souvent
animal.
colère, crie, les frappe quelquefois
avec brutalité. Le Tahitien
doux et bon, devient violent et
qui est naturellement un homme
brutal quand il est ivre.
Presque tous les hommes qui sont condamnés par les tribu¬
naux
pour avoir maltraité leur femme
IVi
Ils regrettent
est
trop tard.
leur faute lorsqu’ils
ou
leurs enfants sont des
ne sont
plus ivres, mais il
cherche querelle à ses camarades, à ses voisins»
Quand il y a des batailles, des rixes, c’est presque
toujours
après des repas, où les convives ont bu du vin et surtout du
rhum.
du
qui s’enivre souvent, toutes les semaines, deux
trois fois par mois, est un
alcoolique, c’est-à-dire un malade
corps et de l'esprit.
2°
3° Les
Les
de)L’hivrmogne
b) L’ivrogne
ou
cerveau sont surexcités.
du rhum, qui est la boisson la
plus nuisible, la plus dan¬
gereuse.
Au lieu d’acheter du
rhum, il vaudrait mieux acheter des vête¬
ments pour les enfants, des outils
pour travailler au jardin ou à
la plantation, des
planches, de la peinture pour réparer ou em¬
bellir la maison, etc.
en
organes.
Le
avec
L’alcoolisme
chronique.
a) C’est la maladie de ceux
qui, sans s’enivrer, boivent chaque
jour un peu d’alcool (un litre de vin et plus, deux ou trois
petit
verres). Ce sont des malades qui s’ignorent et qui par suite ne se
soignent pas. Ils ressentent d'ailleurs peu de chose; ils toussent
le matin, ils éprouvent des sensations de
brûlure à l’estomac, des
lourdeurs de tête.
Ces malades sont peu nombreux dans les
districts, mais on en
rencontre beaucoup dans les villes, notamment à
Papeete.
b) Cette forme de l’alcoolisme est aussi dangereuse que l’au¬
tre ; elle est aussi nuisible à
l’estomac, au cerveau, à tout l’orga¬
nisme.
y) Conséquences sociales de l’alcoolisme.
a) L’alcoolique dépense beaucoup, travaille peu et mal ; il ne
devoirs de chef de famille; il est souvent Une
charge pour la société.
b) Son intelligence s’affaiblit au point qu’on est parfois obligé
de l’interner dans un asile d’aliénés. Beaucoup d’aliénés, la moi¬
remplit pas
ses
moins sont des alcooliques.
c) La surexcitation causée par l’ivresse peut pousser l’individu
à des actes de violence graves, quelquefois jusqu’au crime, Très
souvent un criminel quand il est interrogé sur les mobiles de
son acte répond qu’il ne se souvient pas, parce qu’il était en état
d’ivresse. Ce n’est pas une excuse, puisqu’il ne devait pas s’eni¬
tié
au
vrer.
d) Enfin, les enfants de l’alcoolique eux-mêmes peuvent être
atteints dans leur santé, dans leur intelligence. Ils sont souvent
maladifs, exposé à la tuberculose, incapables d’apprendre ; quel¬
quefois même ils deviennent idiots ou fous.
e) L’alcoolisme, quand il se répand, menace la race tout entière.
Si les tahitiens ne luttent pas contre ce fléau, ils s’exposent à
devenir de moins en moins nombreux, et peu à peu à disparaître.
L’alcoolisme et la tuberculose sont les deux causes principales
qui ont affaibli la race marquisienne.
CONCLUSION.
Les dernières
leçons qui seront des révisions de toutes les au¬
tres se termineront par des résolutions — de boire peu de vin
et de bière
de ne jamais boire de rhum — de ne jamais s’eni¬
vrer
d’essayer d’empêcher les gens autour de soi de devenir
alcooliques.
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IMPRIMERIE DU GOUVERNEMENT
Fait partie de La lutte contre l'ivrognerie et l'alcoolisme à l'école [circulaire du service de l'instruction publique]