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■4.
DU,CAPITAINE COOK.
O
ÉLOGE
DU CAPITAINE COOK.
Par M. blanc GILLI
,
de
Marseille.
Venient annis
Secula feris
quibus Oceanus
Vincula rerum laxet, Sc ingens
Pateat tellus tiphyfque novos
Delegat orbes ; nec fît terris
,
Ultima Thule.
Senec. Idedca. AB. II.
AMSTERDAM,
A
à Paris^
Libraire rue St. Jacques , à !a
Vérité, & chez les Marchands de Nouveautés,
Et fe trouve
Chez Morin
,
,
M. DCC. LXXXVil.
V
>:.».Attl-
V
AVERTISSEMENT.
E
célébré
reufe
a
Cook, dont la fin malheu-*
c-aufé les regrets
s’eft
de l’Europe
»
acquis tant de droits à la reconnoiffance univerfelle, que nous devons être
furpris qu’on ne fe foit pas encore oc¬
cupé parmi nous de fon éloge, fi l’on
confidere fur-tout que nous
puis long-tems
en
les honneurs de
fommes de¬
poffefiîon de rendre
l’apothéofe
grands
hommes de tous les pays. Notre filence
à l’égard de celui-ci ne doit pas être at¬
tribué à
moire
,
un
défaut de fenfibiiité
j’ofe le dire
,
aufli révérée en France
mais la raifon
fous
tous
aux
en
fa mé¬
eft pour le moins
qu’en Angleterre;
eft que pour
les rapports
:
les
apprécier
travaux
d’un
grand navigateur
teur
foi-même,
,
ou
il faut être naviga¬
du moins il faut avoir
des connoiflances fuffifantes de la navi¬
gation , avoir
vu
la
mer
& l’avoir bien
Les gens
de lettres ne fe montrent
guères fur cet élément ; les marins en
vue.
état d’écrire font affez
s’^attendre
je
rares.
Il faut donc
fort, qu’un
éloge de ce genre fera toujours foible
par un de ces côtés. S’il en eft un qui
réunilTe
,
ou
toutes
me trompe
les beautés de l’éloquence,
onn’y trouvera pas peut-être les tableaux
impofans de la mer les peines ^ les fa¬
tigues, les perplexités du Marin, moins
,
l’importance de ces obfervations
nautiques : fi quelqu’autre développe
d’une maniéré vraie ces objets importants
qu’il faut abfolument faire connoître,
on
rifque beaucoup de ne pas les voir
retracés avec ces grâces de ftyle qui
encore
« «
vi;
peuvent
feules captiver la bienveillance
du Ledteur.
Il faut obferver de
vain célébré de
nos
plus
jours
avec un
que
Ecri¬
l’éloge tel
qu’on letraite ordinairement, devient un
d’éloquence affez indifférent, &
qui ne parle pas au cœur, attendu que les
idées s’y trouvent tellement généralifées
que l’éloge d’un feul homme pourroit
être appliqué à tous ceux de fa profeffion, en changeant fimplement les noms.'
Il eft certain qu’en atténuant le récit des
faits on manque fon but, qui doit être
de manifefter les grandes aêlions de fon
genre
,
héros.
Quelqu’importantes
tes ces
confidérations
que
,
foient
comme
j’ai
tou¬
tou¬
jours aimé les grands tableaux de la mer
& comme j’étois pénétré du fentimenc
,
de la
plus profonde vénération
pour
viij
infortuné Cook , je
n’ai pu réfifter au defir confolant d’être
le premier à faire fon éloge. On
y
l’illuftre & trop
trouvera
fans doute des
défauts,
parce
c’eft l’ouvrage d’un homme qui ne
peut guères donner aux lettres que des
que
dérobés à fon repos; niais il
lui eft doux de l’avouer en même tems :
momens
on ne
tardera pas
à s’appercevoir qu’il a
été écrit fous la diêtée feule de fon
cœur.
E L
DU
D
CAPITAINE
ûucES
COCk.
illufidns de la vie ! BonHéur apires !e-
}uicé (4) n’a-t-il pas
Celüi dont la
_
le droit de s’unit à
triomphe
neurs
du
notre
âge ?
Un titre fi
décerner les hon¬
plus grand navigateur de
vous
au
pour
digne d’envie, & qui n’étoit refervé
qu’à Cook, reçoit
luftre de cet
qui renferme
l’humanké !...*
Jettons-nous dans la noble carrière qu""!! a par¬
courue ;
retraçons les beaux jours de fa vie qui
fe font trop tut écoulés j livrons nous à tous les
tranfports de notre imagination étonnée j faifons
retentir pour lui le vivat solemnei, & rendons
tous enfemble un tribut éclatant de
louanges à
fa mémoire éternellement glorieufe.
un nouveau
homme extraordinaire par celui
feul tous les autres j bienfaiteur de
difparoît 5 les longues
habitudes de l’inimitié font oubliées : tel eft l’afIci la rivalité nationale
eendant de la
qu’elle fe fait toujours
elle peut fe faire eonnoître ÿ
croyois n’aimer autre chofe de
vertu
aimer par-tout où
& moi-même qui
l’Angleterre que fes chefs-d’œuvre du génie,
je feus en cette oceafion quej’aimoîs un Auglois,
& que je l’aime encore après fa mort d’une
amitié qui me fut infpirée quand je connus les
qualités de fa grande âme. Eh ! nous ferions bien
(
malheureux fi, réfiftant
5
)
impulfionsde cet efpric philofophique qui tend journellement à,
réunir tous les humains
par les doux liens d’une
aux
bienveillance univerfelle, nous ne favions aimer
grands hommes quelle que foie leur patrie.
Si, dans les jours de la difeorde, la vue d’un
champ de bataille nous offre des fcênes terri¬
bles
le théâtre immenfe des mers nous pré¬
les
,
fente à fon
fpeéfacle bien plus impofouvent même des cataftrophes
encore
plus épouventables. Horace eut raifon de
le dire ; celui
qui le premier ofa s’embarquer
tour
un
fant,
& trop
fur
frêle vaitTeau & confier la deftinée de fes
un
jours
aux
flots inconflans de la
de la
nature une
&
cœur
avoir reçu
mer,
âme inacceffiblc à la
cuirafle d’un
crainte,
triple airain. En effèc,
tranfportons-nous par ' la penfée fur ce.théâtre
redoutable où l'a puiflTance infinie du fouverain
un
,
dominateur fê manifefle
avec
d’énersi'e
tant
:
c’eft-là que le
courage le plus audacieux fléchit
fous le poids de cette force invincible
les éiémens
lieux
avec une
verge
qui frappe
de fer ; c’efl:
éloignés de la demeure des
en
hommes
,
ces
que
à connoître notre foiblefle &
notre
fragile exiftence lorfque renverfés fous les
coups dévorans de la tempête, uous élevons nos,
nous
apprenons
,
A
3
(
Fait partie de Éloge du capitaine Cook