BENHALIMA-YACINE-MEMOIREM2-Du lagon au désert.pdf
- Texte
-
École des Hautes Études en Sciences Sociales
Paris 6e – Aubervilliers
Département d’Histoire et Civilisations
Parcours « Histoire du Monde, Histoire des Mondes »
Yacine BENHALIMA
Du lagon au désert
Le Bataillon du Pacifique dans la Seconde Guerre
mondiale (1940 – 1946)
William Grand, soldat tahitien, vers 1943
© Archives de l’auteur
Mémoire de Master 2 recherche en Histoire contemporaine
Préparé sous la direction de Monsieur Julien BLANC
Soutenu devant M. Julien BLANC (CESPRA) et M. Éric WITTERSHEIM (IRIS)
Année universitaire 2019 – 2020
À mon arrière-grand-père
À mon grand-père
« À quoi bon murmurer ces noms qui ne disent plus rien à
personne ? À quoi bon aussi, puisqu’ils ne m’ont jamais vraiment quitté.
Tout ce qui reste en moi de vivant leur appartient. Il me semble parfois
que je ne continue moi-même à vivre que par politesse [...] »
Romain Gary, La promesse de l’aube (1960)
2
Table des matières
Remerciements .................................................................................................. 4
Note liminaire .................................................................................................... 6
Liste des sigles et des abréviations ..................................................................... 7
Introduction ....................................................................................................... 8
Partie 1 : le Bataillon du Pacifique en guerre .................................................... 29
I.
II.
III.
1.
2.
1.
2.
1.
2.
Le profil sociologique des engagés .................................................................. 29
Des hommes jeunes et volontaires ............................................................................... 29
Les héritages de la Grande Guerre : le poids du passé .................................................. 35
Une unité en construction, 1941 – 1942 .......................................................... 39
L’autorité au sein du BP1 : des rapports hiérarchiques Français Libres ........................ 39
Transports et entraînements ......................................................................................... 45
Le Bataillon du Pacifique au combat, 1942 – 1944 ....................................... 49
Les Pacifiens dans le désert ........................................................................................... 49
Le BIMP en Europe : les campagnes d’Italie et de France (1944) .................................. 55
Partie 2 : La construction d’un groupe social organisé ...................................... 59
I.
II.
III.
1.
2.
1.
2.
1.
2.
Les pratiques culturelles du Bataillon du Pacifique .......................................... 59
Croyances, coutumes et mythologies ............................................................................ 59
La musique entre identité, symbolique et propagande................................................. 65
Un bataillon sensible à la politique.................................................................. 70
Les Pacifiens face à Vichy et Giraud ............................................................................... 70
Les Pacifiens et la politique dans le Pacifique................................................................ 74
Loisirs et distractions .................................................................................. 79
« Nous avons fait un coup de pêche à la dynamite » .................................................... 79
Permissions et tourisme ................................................................................................ 84
Partie 3 : fin et sortie de guerre pour les Pacifiens ............................................ 89
I.
II.
1.
2.
1.
2.
Dix-huit mois d’attente : novembre 1944 – mai 1946 ...................................... 89
Le séjour parisien : quelles expériences, quels cadres ?................................................ 89
Rapatriement par le « Sagittaire » et retours au pays ................................................... 94
La sortie de guerre du BP1............................................................................... 99
Destinées d’après-guerre .............................................................................................. 99
La cohésion par la mémoire......................................................................................... 104
Conclusion ..................................................................................................... 108
Bibliographie ................................................................................................. 111
Sources .......................................................................................................... 129
Annexes ......................................................................................................... 136
3
Remerciements
La réalisation de ce mémoire a été rendue possible par le concours de plusieurs
personnes à qui je tiens à adresser mes plus sincères remerciements. Au fil des recherches
en archives, des rencontres et des correspondances, mon sujet de recherches s’est révélé
de plus en plus passionnant.
Je tiens tout d’abord à remercier mon directeur de recherches, M. Julien Blanc, pour
sa disponibilité, son écoute, sa confiance, ses conseils et son exigence. Nos échanges
furent essentiels dans la conduite de ma recherche et surent ne rien enlever à mon
autonomie tout en renforçant mon esprit critique et mon analyse.
Merci également aux enseignants et aux chercheurs qui m’ont suivi ces deux
dernières années. La richesse des séminaires que j’ai suivis est pour beaucoup dans
l’aboutissement de ce travail. Merci tout particulièrement à M. Eric Wittersheim,
rapporteur de ce mémoire et dont j’ai suivi les enseignements tant en M1 qu’en M2, pour
le temps qu’il a bien voulu accorder à la lecture de ce travail.
Je tiens à exprimer ma vive reconnaissance à toutes les personnes qui surent
m’orienter dans mes recherches en archives, en bibliothèques ou ailleurs. Merci à
Mme Béatrice Parrain,
documentaliste
de
l’Ordre
de
la
Libération,
à
MM. Ismet Kurtovitch et Christophe Dervieux pour leur accueil aux Archives de la
Nouvelle-Calédonie ainsi qu’à Mme Lydia Bodmer aux archives municipales de
Nouméa, à Mme Véronique Defrance, conservatrice des musées de la ville de Nouméa ;
merci au Commandant Fabien Evesque, officier supérieur adjoint du RIMaP-NC, pour
m’avoir cordialement ouvert les archives de son unité et fait visiter le Camp Broche à
Plum (Nouvelle-Calédonie), le 2 septembre 2019. Je remercie également les personnels
du Service Historique de la Défense, des Archives Nationales d’Outre-Mer, de la
Bibliothèque nationale de France, du Service du Patrimoine Archivistique et Audiovisuel
de Tahiti, du Musée de la Seconde Guerre mondiale en Nouvelle-Calédonie et du Centre
Culturel Tjibaou.
4
De même, je remercie très vivement, pour leurs orientations, leur aide, leurs
conseils, pour les échanges que nous avons eus (aussi brefs eût-ils été), pour leur
bienveillance et/ou leur intérêt pour mes travaux, M. Sébastien Albertelli,
M. François Broche, M. Georges Buisson, Mme Dolorès Chan, Mme Marie-Hélène
Chatel, M. Sylvain Cornil, M. Eric Jennings, M. Philippe Leydet, M. Jean-Paul Lextrait
M. Eric Noble, Mme Yvette Quelen-Buttin, Mme Florence Roumeguère, M. JeanChristophe Shigetomi et M. Jean-Claude Tranape.
J’achèverai ces lignes en remerciant ma famille, que je ne puis oublier, présente
derrière moi sans discontinuer depuis le début de ces études relativement peu communes.
Merci à mes parents et à mes grands-parents pour leur soutien indéfectible et leurs
patientes relectures, et à ma grande famille tahitienne pour son accueil sans pareil lors de
mon séjour en Polynésie à l’été 2018 et en Nouvelle-Calédonie en septembre 2019. Merci
également à mes amis : merci à Médéric pour ses relectures et ses conseils avisés, JeanMichel et Lucille pour leur présence et leur soutien, et à tous mes camarades de l’EHESS,
pour nos séances à la BnF, et tous nos moments d’échange et de partage : une pensée
chaleureuse pour Agnès, Alix, Ania, Ambre, Clara, Clément, Darius, Eléa, Félix, Ignacio,
Inès, Léo, Mouhamade, Nadjet, Nicola, Salomé, Siga, et tou.te.s les autres.
Mes excuses, enfin, vont à celles et ceux que j’aurais pu oublier de citer malgré tout.
5
Note liminaire
En tenant compte de l’évolution de la graphie de certains mots, il sera procédé de
la façon suivante :
•
Nous emploierons « kanak » (adjectif) et « Kanak » (nom propre), invariables en
genre et en nombre. Cette graphie ayant progressivement remplacé l’usage de
« canaque(s) » / « Canaque(s) » depuis les années 1970, elle est également
présente dans l’accord de Nouméa du 5 mai 1988, qui n’utilise cependant pas de
majuscule le cas échéant.
•
Nous privilégierons de même l’emploi de « Bir Hakeim », sans trait d’union,
s’agissant de l’usage le plus répandu parmi plusieurs choix possibles
(par exemple, les anciens de la 1e DFL écrivaient fréquemment « Bir Hacheim »).
•
Dans la mesure du possible, les termes et expressions en langue tahitienne seront
utilisés conformément aux recommandations de l’Académie Tahitienne.
6
Liste des sigles et des abréviations
-
AFAT : Auxiliaire Féminine de l’Armée de Terre
-
AFNOR : Agence Française de Normalisation
-
ANOM : Archives Nationales d’Outre-Mer
-
BFL : Brigade Française Libre
-
BIM : Bataillon d’Infanterie de Marine
-
BIMP : Bataillon d’Infanterie de Marine et du Pacifique
-
BM : Bataillon de Marche
-
BMIC : Bataillon Mixte d’Infanterie Coloniale
-
BP1 : Bataillon du Pacifique
-
CAICT : Compagnie Autonome d’Infanterie Coloniale de Tahiti
-
CEF : Corps Expéditionnaire Français en Italie
-
DB : Division Blindée
-
DFL : Division Française Libre
-
DI : Division d’Infanterie
-
DIM : Division d’Infanterie Motorisée
-
EFO : Établissements Français de l’Océanie
-
EHESS : École des Hautes Études en Sciences Sociales
-
EPHE : École Pratique des Hautes Études
-
FAFL : Forces Aériennes Françaises Libres
-
FFC : Forces Françaises Combattantes
-
FFI : Forces Françaises de l’Intérieur
-
FFL : Forces Françaises Libres
-
FNFL : Forces Navales Françaises Libres
-
PUF : Presses Universitaires de France
-
PUR : Presses Universitaires de Rennes
-
QG : Quartier Général
-
RIMAP-NC : Régiment d’Infanterie de Marine du Pacifique – Nlle-Calédonie
-
RIMAP-P : Régiment d’Infanterie de Marine du Pacifique – Polynésie
-
SHD : Service Historique de la Défense
-
SPAA : Service du Patrimoine Archivistique et Audiovisuel de Tahiti
7
Introduction
Après la débâcle de l’armée française à l’été 1940, les colonies françaises se
rallient en masse au régime de Vichy. Le général de Gaulle, exilé à Londres, y arrive seul
et avec fort peu de soutiens. Les débuts de la France libre sont très difficiles, et le
ralliement d’une colonie au mouvement est à l’été 1940 un événement significatif et
encore exceptionnel. La toute première colonie à entrer en « dissidence »1 est un confetti
d’empire, les Nouvelles-Hébrides2, archipel du Pacifique Sud. Le 20 juillet 1940, un mois
à peine après l’appel du général de Gaulle sur les ondes de la BBC, le commissairerésident Henri Sautot3 réunit les colons de Port-Vila autour de lui, organise un référendum
parmi les autorités4, et d’un commun accord, ils décident de se placer sous son autorité.
Cette volonté de continuer la guerre aux côtés des Alliés est notamment partagée par deux
autres colonies du Pacifique qui se manifestent très tôt, dès juin et juillet 1940. Il s’agit
des Établissements Français d’Océanie5 (EFO) et de la Nouvelle-Calédonie.
Le ralliement des EFO, ensemble de cinq archipels6 regroupant 118 îles éparses sur
un territoire grand comme l’Europe7, survient le 2 septembre 1940. Il résulte également
d’un référendum organisé la veille parmi les populations des îles voisines de Tahiti et
Moorea ; le vote étant ouvert à toute la population, y compris aux femmes8. Si les
protestants et les communistes locaux se mobilisent en masse, les catholiques,
généralement pro-Vichy, s’abstiennent largement, permettant un résultat éloquent :
1
Pour reprendre l’expression utilisée par Vichy.
Les Nouvelles-Hébrides sont, à partir de 1907, un condominium franco-britannique. À son indépendance
en 1980, le territoire prit le nom de République du Vanuatu.
3
Henri Sautot (1885 – 1963) est Compagnon de la Libération par décret du 1er août 1941.
4
Un télégramme du Haut-Commissaire britannique pour le Pacifique à Suva (Fidji) adressé au Secrétaire
d’État aux Dominions (à Londres) le 6 août 1940 indique les résultats : « pour De Gaulle 21, contre 7,
ambigu 14. Le commissaire-résident suggère que les 14 ambigus attendent peut-être d’apprendre quelle
sera l’attitude du gouvernement de Sa Majesté concernant la protection et la garantie des salaires. » Un
télégramme postérieur (19 août 1940) fait savoir que les autorités australiennes furent prêtes à prendre en
charge l’ensemble des dépenses relatives à l’administration des territoires français ralliés. Archives de la
Nouvelle-Calédonie, 1 Num 30.
5
Les EFO deviennent une colonie française en 1880 ; ils prennent le nom de Polynésie Française en 1957.
6
Les îles de la Société, les Tuamotu, les Gambier, les Australes et les Marquises.
7
Si l’on fait coïncider Papeete avec Paris, les îles Sous-le-Vent se retrouvent dans le sud de l’Angleterre,
les îles Marquises en Norvège, les Gambier dans les Balkans, les Australes autours de Toulouse, et les
Tuamotu, formant une « chaîne » longue d’environ 1300 km, s’étendent des Pays-Bas à la Serbie
(E. DE CURTON, Tahiti, terre française combattante, Londres, Publications de la France combattante, 1942,
p. 13.)
8
Alors que le droit de vote des femmes, en France, n’est obtenu qu’en 1944.
2
8
5564 personnes se prononcent en effet en faveur du général de Gaulle contre à peine
18 pour le Maréchal Pétain. Le gouverneur Frédéric Chastenet de Géry, entretenant
jusqu’alors une attitude ambiguë, démissionne sous la pression et est remplacé par un
quadriumvirat qui prend le titre de gouvernement provisoire, en attendant la nomination
d’un nouveau gouverneur. Ces quatre hommes sont tous membres fondateurs du « Comité
France Libre »9 des EFO. Il s’agit du maire (franc-maçon) de Papeete,
Georges Bambridge, et de trois membres du Conseil privé du gouverneur,
Georges Lagarde, Émile Martin et Édouard Ahnne10. Seuls les deux premiers sont natifs
de Polynésie, et sont issus de familles de notables. La famille Bambridge, d’ascendance
anglaise, vit son premier représentant arriver à Tahiti dans les années 1830 ; Lagarde
étant, quant à lui, de la première génération à voir le jour dans les îles11. Les deux derniers
sont natifs de métropole.
En Nouvelle-Calédonie, le ralliement a lieu le 19 septembre 1940. Escorté par un
croiseur australien, Henri Sautot débarque à Nouméa, et, le même jour, démet et remplace
le gouverneur vichyste, le lieutenant-colonel Denis12, avec le soutien unanime du Conseil
Général et de la population qui se mobilise en masse.
Ces ralliements traduisent la perception majoritaire des événements survenus en
métropole par les populations et les autorités locales. La défaite de l’armée française, la
plus puissante d’Europe en 1918, provoque la stupéfaction générale, même dans les
colonies les plus éloignées où les communications prennent plus de temps, et où les
habitants n’ont pas été des témoins de la débâcle. Ainsi, le fait pour une colonie ou un
territoire, ou même pour un individu, de se rallier à la France Libre consiste à se
positionner en faveur de la poursuite de la lutte armée contre l’Allemagne nazie et ses
alliés, et à refuser l’armistice conclue par le Maréchal Pétain. À l’été 1940, Charles de
Gaulle est un nom que personne ou presque ne connaît dans le Pacifique. Son discours à
la BBC n’est que très peu entendu le 18 juin 1940, mais son nom ne tarde pas à se répandre
9
Le Comité France Libre est fondé le 24 août 1940 et s’oppose au Comité des Français d’Océanie, qui
promeut la fidélité au régime de Vichy. Le Comité France Libre, défenseur du ralliement au général de
Gaulle, compte une trentaine de membres à sa fondation, des notables tant européens que polynésiens.
10
Édouard Ahnne, né en 1867, est le doyen des Compagnons de la Libération (décret du 28 mai 1943) et,
d’après Jean-François Muracciole, de tous les Français Libres (Jean-François MURACCIOLE, Les français
libres : l’autre résistance, Paris, Tallandier, 2009, p. 66).
11
Son père naquit dans le département de la Marne.
12
Le Lt. Col. Denis, jusqu’alors commandant supérieur des troupes en Nouvelle-Calédonie, remplace le
gouverneur Georges Pélicier, désapprouvé par le Conseil Général.
9
et à devenir fédérateur grâce aux quelques postes de radio particuliers et au bouche-àoreille. Plusieurs raisons viennent expliquer ces ralliements dans le Pacifique : le refus de
l’armistice semble occuper une place prépondérante, mais Jean-Marc Regnault et Ismet
Kurtovitch rappellent que « dans un premier temps, dans les colonies, la volonté de
continuer la lutte, c’est pour être aux côtés de la Grande-Bretagne et pas forcément pour
soutenir le général de Gaulle. »13
Cette décision politique de se rallier à la France libre a des conséquences militaires
immédiates. Des volontaires originaires des trois territoires concernés formèrent un
bataillon, le Bataillon du Pacifique (abrégé en BP1), qui fut de toutes les campagnes
terrestres de la France Libre à l’exception de celle de Syrie. En effet, il se distingua lors
des batailles de Bir Hakeim (mai – juin 1942) et d’El Alamein (octobre 1942), lors des
campagnes de Tunisie (1943) et d’Italie (avril – août 1944) puis lors du débarquement en
Provence (août – novembre 1944). Il fut un bataillon d’élite, très cité et décoré aussi bien
collectivement qu’individuellement. La précocité de sa formation et des engagements de
ses volontaires associées à son riche parcours en fait un acteur majeur de la France Libre,
qui pourtant demeure encore aujourd’hui largement méconnu. C’est pourquoi nous avons
choisi d’en faire notre objet d’étude.
L’idée de former un corps expéditionnaire du Pacifique, comme celui constitué en
191614, naît dans les esprits avant même les ralliements. Il en existe en effet une trace dès
le 14 juillet 1940. Ce jour-là, Émile de Curton15, médecin militaire, administrateur des
îles Sous-le-Vent16 et membre fondateur du « Comité France Libre » réunissait autour de
lui quelques notables et partageait avec eux sa tristesse de voir le sol national occupé. Un
juge indigène lui avait alors répondu, dans un discours aux forts relents coloniaux17 : « La
13
Jean-Marc REGNAULT et Ismet KURTOVITCH, « Les ralliements du Pacifique en 1940. Entre légende
gaulliste, enjeux stratégiques mondiaux et rivalités Londres/Vichy. », Revue d’histoire moderne et
contemporaine, 49-4, 2002, p. 75.
14
Un Bataillon Mixte du Pacifique s’était illustré sur le Chemin des Dames et en Champagne.
15
Le Dr. Émile de Curton (1908 – 1993) rejoint l’armée fin 1927 et arrive à Tahiti en 1938. Il y reste jusqu’à
octobre 1941, arrive ensuite en Angleterre et s’engage dans les FFL. Après la guerre, il entame une carrière
diplomatique et sera notamment ambassadeur de France aux Philippines (Service Historique de la Défense,
GR 16 P 164200).
16
Une des deux subdivisions des îles de la Société, incluant notamment Bora Bora et Maupiti. L’autre
subdivision est les îles du Vent, dont font notamment partie Tahiti et son « île-sœur » Moorea.
17
La grammaire coloniale demeure très présente chez les notables autochtones. Émile de Curton écrira par
la suite que « la société tahitienne, en 1938, était une situation typiquement coloniale. Et si cette dure réalité
n’est pas évidente, c’est qu’une longue tradition littéraire en a adouci les contours. » (E. DE CURTON,
Tahiti 40, Paris, Société des Océanistes, 1973, p. 13).
10
France nous a donné des écoles pour instruire nos enfants, des médecins pour guérir nos
malades. Aujourd’hui, la France est malade. Nous voulons la soigner. La France est notre
mère à tous. Nous voulons lui montrer que nous sommes ses enfants reconnaissants. Nous
voulons former un autre bataillon du Pacifique et tous les tamarii maohi18 iront aider les
Piritane19 à chasser les Prussiens du sol de France ! »20 La différence notable entre les
soldats de ce corps expéditionnaire et leurs aînés de 14-18 est que ces derniers sont issus
de la mobilisation et non du volontariat.
La concrétisation de cette idée doit également beaucoup à un homme : le capitaine
Félix Broche. Arrivé à Papeete le 4 juillet 1939 pour prendre le commandement de la
Compagnie Autonome d’Infanterie Coloniale de Tahiti (CAICT), l’attitude de cet officier
de carrière durant les événements précédent le ralliement des EFO peut prêter à confusion.
Il demeure en effet dans l’expectative et s’affiche officiellement neutre. La troupe reste
consignée dans ses quartiers. Le capitaine entretient même, dès son arrivée en Polynésie,
des liens amicaux avec le docteur Alain, hésitant mais chef du milieu majoritairement
pétainiste des médecins militaires, et avec Hubert Rusterholtz, commerçant vichyste et
membre d’un groupe royaliste d’Action Française21. Il convient pourtant, à notre sens, de
voir dans cette neutralité affichée une volonté de faire réussir le ralliement sans effusion
de sang et sans violence (ce qui fut en effet le cas) et non comme la marque d’une
conviction ou d’une orientation. Deux arguments vont dans ce sens : en premier lieu,
lorsqu’Émile de Curton lui demanda s’il ferait tirer sur la foule en cas de manifestation
publique de soutien au Comité France Libre, Félix Broche répondit par la négative22.
Ensuite, le lendemain du ralliement, il entraîna sa compagnie à rejoindre le mouvement
et adressa au gouvernement provisoire sept conditions dans une lettre23, qui lui furent
toutes accordées. Parmi ces conditions, outre le refus d’exercer toute violence « contre la
personne de Monsieur le Gouverneur, de Monsieur le Capitaine de Corvette commandant
la Marine, des officiers et de toutes autres personnes qui n’ont pas adhéré au
mouvement », on retrouve la constitution d’un corps de volontaires destiné à aller
combattre sur les champs de bataille sous le drapeau français à croix de Lorraine, aux
18
« Enfants Polynésiens » en langue tahitienne.
« Britanniques » en langue tahitienne.
20
Émile de Curton, Tahiti 40, op. cit., p. 56-57.
21
François Broche, Le bataillon des guitaristes, Paris, Fayard, 1970, p. 74.
22
Ibid., p. 97.
23
Archives de l’Ordre de la Libération.
19
11
côtés de l’allié britannique. Il mit alors toute son énergie et sa volonté à monter et à former
ce corps qu’il devait bientôt commander. Dans son ouvrage Le bataillon des guitaristes,
François Broche, son fils, ajoute que s’agissant d’un arbitrage politique, la décision du
ralliement « ne lui appartenait pas »24, bien qu’il l’eût « approuvée sans réserve »25 : elle
lui donnait en effet l’opportunité d’aller combattre, ce qu’on lui avait plusieurs fois refusé.
Étant le seul officier d’active d’Océanie, l’envoi de métropole d’un remplaçant aurait pris
du temps. Et lorsque le chef de la France Libre nomma Félix Broche commandant des
forces armées dans le Pacifique et l’envoya à Nouméa sous les ordres du gouverneur
Sautot26, plusieurs jeunes et moins jeunes s’étaient déjà portés volontaires pour le
rejoindre.
Le 7 janvier 1941, le capitaine envoya au Général un rapport confidentiel
comprenant entre autres ces lignes :
« En plus des volontaires actuellement sous les drapeaux, sont
inscrits à Nouméa 1000 indigènes et 150 européens ; à Tahiti, 400
environ (surtout des indigènes). […] L’insuffisance des casernements,
des cadres et du matériel ne permet pas d’instruire en même temps tous
les volontaires. D’où la nécessité d’échelonner tous les contingents
comme suit :
- premier contingent, prêt immédiatement (300 tahitiens et 300
Calédoniens blancs)
- second contingent, prêt à la fin de mars 1941 (300 Calédoniens
indigènes, 100 Calédoniens blancs et 100 Tahitiens)
- ensuite, tous les trois mois, contingents de 500 à 600 hommes, dès
la période d’instruction terminée. »27
Le Bataillon du Pacifique tel qu’il exista d’avril 1941 à juin 1942 correspond au
premier contingent décrit dans ce rapport. Ses volontaires, à la fin de l’année 1940,
24
François Broche, Le bataillon des guitaristes, op. cit., p. 130
Ibid., p. 130.
26
Télégramme no 72 du 24 septembre 1940. Archives de l’Ordre de la Libération.
27
Archives de l’Ordre de la Libération & document cité dans François BROCHE, Le bataillon des guitaristes,
op. cit., p. 156-157.
25
12
représentent environ 8,4 % du total des volontaires ralliés à la France Libre à la même
date (environ 7000 personnes), ce qui représente une proportion considérable, surtout au
regard de la taille des territoires dont ils sont issus. L’historien Jean-François Muracciole
rappelle même que « de tous les territoires coloniaux, c’est en Nouvelle-Calédonie et en
Polynésie que les engagements d’indigènes dans la France libre furent, en proportion de
la population totale, les plus nombreux. »28 Ce même premier contingent compte dans ses
rangs 587 volontaires, répartis entre 284 Néo-Calédoniens Blancs (détail important) et
303 Polynésiens. Notre propre recensement correspond ainsi aux chiffres donnés par
Félix Broche dans un récapitulatif daté du 30 juin 1941 faisant état de 567 hommes plus
18 hospitalisés et 2 déserteurs. De même, dans son journal de guerre29, le soldat Raoul
Michel-Villaz évoque également le nombre de 283 Néo-Calédoniens présents au départ,
le 5 mai 1941.
Il existe cependant d’autres décomptes comme celui de l’historienne
Sarah Mohamed-Gaillard, qui dans son Histoire de l’Océanie avance le nombre de
605 volontaires30. Nous avons également eu des difficultés à évaluer la place des
volontaires néo-hébridais, en raison de leur intégration parmi leurs camarades néocalédoniens. Les deux archipels sont en effet très proches (530 kilomètres à peine
séparent Nouméa de Port-Vila) et entretiennent de ce fait des liens commerciaux,
politique, économiques et démographiques de longue date31. Dans le premier contingent,
à l’origine divisé en deux compagnies tahitiennes et deux compagnies calédoniennes, les
néo-hébridais sont répartis entre ces dernières. Enfin, un second récapitulatif de Broche
signé à Alep le 15 novembre 1941 transcrit une évolution dans l’effectif du bataillon, qui
passe à 645 hommes dont 24 officiers, là où ces derniers n’étaient que 8 le 30 juin. Cette
augmentation est due à l’affectation, à l’arrivée de l’unité au Moyen-Orient, d’officiers
européens et de nouveaux soldats.
28
Jean-François MURACCIOLE, Les français libres : l’autre résistance, Paris, Tallandier, 2009, p. 64.
Archives de la Nouvelle-Calédonie, 1 J 44.
30
Sarah MOHAMED-GAILLARD, Histoire de l’Océanie de la fin du XVIIIe siècle à nos jours, Paris, Armand
Colin, 2015, p. 146.
31
Voir par exemple : Dorothy SHINEBERG, La main-d’œuvre néo-hébridaise en Nouvelle-Calédonie
1865 – 1930, trad. fr. Béatrice ATHERTON, Nouméa, Société d’Études Historiques de la NouvelleCalédonie, 2003.
29
13
Le second contingent néo-calédonien, comptant environ 170 volontaires Kanak32,
ne sera dirigé sur les théâtres d’opérations qu’à l’été 1943. Le second contingent tahitien
ne quitta jamais l’île et fut chargé de la défendre contre une possible attaque japonaise,
mais le territoire fut épargné par toute agression, tout comme le fut la NouvelleCalédonie. Plus encore, cette dernière devint une importante base arrière de l’armée
américaine33. Les contingents suivants prévus dans le rapport du capitaine Broche ne
verront jamais le jour.
Le contingent polynésien quitte ainsi Tahiti le 21 avril 1941 sur le navire
« Monowai », arrive à Nouméa quelques jours plus tard et fait sa jonction avec le
contingent néo-calédonien. Le corps expéditionnaire est placé sous les ordres du
chef de bataillon Broche et embarque le 5 mai 1941 sur le « Zélandia » à destination de
l’Australie. Après un entraînement d’une quarantaine de jours à Liverpool, localité située
à 27 kilomètres de Sydney, les « Pacifiens » reprennent la mer à bord du « Queen
Elisabeth », paquebot de luxe transformé pour l’occasion en transport de troupes, aux
côtés de plusieurs milliers de soldats du Commonwealth. Ils débarquent à Suez le
31 juillet, sont dirigés au camp de Qastina (Palestine), où se rassemblent les forces
terrestres de la France Libre, avant d’être cantonnés en Syrie, d’abord à Damas, puis Alep,
et enfin Lattaquié. Le bataillon traverse ensuite l’Égypte dans les tous premiers jours de
1942, entrent en Cyrénaïque34 et prennent position avec le reste de la 1ère Brigade
Française Libre du général Koenig à Bir Hakeim. La mission de la brigade est alors
d’aménager la position et de mener des missions de harcèlement de l’ennemi. Ces
opérations motorisées, visant également à faire des prisonniers, sont nommées les
« jock columns », d’après l’officier anglais les ayant conçues35. Elles se poursuivent
jusqu’au début de la bataille, le 26 mai 1942. Les Français Libres résistent aux attaques
d’un ennemi dix fois supérieur en nombre pendant deux semaines. Entretemps, la mort
de Félix Broche et de son adjoint, le capitaine Gaston Duché de Bricourt, tués par un obus
allemand le soir du 9 juin, provoque l’émoi parmi les volontaires du Pacifique qui lui
vouaient une grande admiration. Le soir même, le chef de la brigade ordonne la fusion du
32
Musée de la Seconde Guerre mondiale en Nouvelle-Calédonie (Nouméa). Visite du 21 septembre 2019.
Sur le sujet, voir : Kim MUNHOLLAND, Rock of Contention : Free French and Americans at War in
New Caledonia, 1940 - 1945, New York, Berghahn, 2005.
34
Province orientale de la Libye, une des trois que compte le pays avec la Tripolitaine à l’ouest et le Fezzan
au sud.
35
Le major-général John Charles « Jock » Campbell (1894 – 1942).
33
14
Bataillon du Pacifique et du 1er BIM et confie les rennes de l’unité ainsi créée au chef de
bataillon Jacques Savey, prêtre dominicain ordonné en 1934, commandant le 1er BIM
depuis la campagne de Syrie en 1941, « connu, aimé et respecté du BP1 »36. Savey est à
son tour tué lors de la sortie de vive force dans la nuit du 10 au 11 juin 1942. Le Bataillon
d’Infanterie de Marine et du Pacifique (BIMP) combat ensuite à El Alamein en octobre
sous les ordres du chef de bataillon Roger Bouillon, puis est engagé dans la poursuite des
troupes de l’Axe jusqu’en Tunisie aux côtés de la VIIIe Armée britannique.
Les forces germano-italiennes en Afrique du Nord déposant les armes le 13 mai
1943, le BIMP repasse en Libye pour se réorganiser avec un nouveau chef de corps, avant
de revenir en Tunisie, puis à Bône (actuelle Annaba, en Algérie) d’où il embarque pour
l’Italie le 17 avril 1944. Le bataillon arrive à Naples après trois jours de traversée et
combat sur le Garigliano37. Il passe ensuite par Rome libérée puis par Sienne et se dirige
vers Tarente où il prend de nouveau la mer le 7 août. Le 17 août 1944, il débarque en
Provence sur la commune de Cavalaire (Var). Le 21 août, il prend d’assaut l’hôtel du
Golf, transformé en forteresse par les Allemands, fait de nombreux prisonniers, et dans
les jours suivants, il entame sa remontée vers le nord. Il atteint ainsi Nîmes le 30 août,
Lyon le 2 septembre, Marnay (Saône-et-Loire) le 11 septembre, Villargent (HauteSaône) le 20 septembre, et combat à Ronchamp au début du mois d’octobre 1944 avant
d’être dirigé sur les arrières à Linexert le 5 novembre, dans le cadre de la relève
coloniale38.
Celle-ci voit plusieurs milliers de soldats coloniaux retirés des théâtres d’opérations
et remplacés par de jeunes FFI, officiellement en raison des mauvaises conditions
climatiques mais également pour des raisons raciales, à la demande des Américains qui
veulent « blanchir » les armées amenées à entrer en Allemagne. Deux cent soixante-deux
« Pacifiens » sont dirigés à Paris39 pour être cantonnés à la caserne Latour-Maubourg,
dans l’enceinte des Invalides, et former la compagnie de QG 31, sous les ordres du
lieutenant Pierre Pannetier. La compagnie constitue la garde d’honneur du gouverneur
36
Pierre KOENIG, Bir Hakeim 10 juin 1942, Paris, Robert Laffont, 1971, p. 337.
La bataille du Garigliano est également connue sous le nom de quatrième bataille de Monte Cassino.
38
Voir par exemple : Claire MIOT, « Le retrait des tirailleurs sénégalais de la Première Armée française en
1944 », Vingtième Siècle. Revue d’histoire, 125-1, 2015, p. 77-89.
39
Liste nominative de la compagnie de QG 31, détachement du Pacifique. Archives de la NouvelleCalédonie, 31 J 9.
37
15
militaire de la capitale, leur ancien chef à Bir Hakeim, le général Koenig. Le BIMP,
accompagné d’une partie des volontaires issus du Bataillon du Pacifique n’ayant pas été
relevés (étant pour la plupart européens), poursuit les combats en Alsace et dans
l’Authion. Une fois les hostilités achevées, l’ensemble des volontaires du Pacifique est
réuni à Paris à partir du 12 mai 194540. Ils quittent la capitale pour Saintes le 20 septembre
1945, cantonnent à Saint-Laurent-du-Var puis Marseille avant d’embarquer le 14 mars
1946 sur le « Sagittaire » qui touche Papeete le 5 mai, Port-Vila le 19 mai, et Nouméa le
21 mai.
Le Bataillon du Pacifique se retrouve ainsi fort d’une riche histoire militaire. Ses
volontaires virent le monde, ceux ayant la chance de survivre jusqu’au bout en faisant
littéralement le tour41. D’avril 1941 à novembre 1944, le Bataillon du Pacifique est
engagé sur de multiples terrains d’opération, subit de nombreux réagencements et une
mortalité conséquente. Plus de 150 de ses volontaires perdent la vie (76 Polynésiens et
80 Néo-Calédoniens), ceci sans compter les très nombreux blessés. Son parcours et sa
valeur militaire démontrée à de nombreuses reprises lui ont valu plusieurs citations et
décorations, en tant qu’unité, dont la Croix de la Libération42 et la Croix de Guerre avec
palme43.
Cependant, malgré un profil et un parcours étoffés, le Bataillon du Pacifique
demeure fort peu étudié. Seuls deux ouvrages lui sont à ce jour spécifiquement dédiés.
Le premier, Le bataillon des guitaristes de François Broche44, fut publié en 1970.
Parfaitement documenté, servi par de nombreux témoignages et par un voyage
préparatoire à Tahiti et en Nouvelle-Calédonie lors duquel l’auteur put rencontrer les
vétérans qui côtoyèrent son père jusqu’à sa mort au combat, il traite dans sa première
moitié du ralliement des EFO à la France Libre, et en seconde du Bataillon du Pacifique
et de son parcours jusqu’à la bataille de Bir Hakeim. Le récit s’achève donc en juin 1942,
laissant de côté la bataille d’El Alamein, les campagnes de Tunisie et d’Italie, le
débarquement en Provence, la relève coloniale de novembre 1944, le séjour parisien et le
retour des volontaires, ainsi que la participation d’éléments océaniens aux combats
40
Dossier individuel de Robert Hervé. Service Historique de la Défense, GR 16 P 292512.
Voir les cartes en annexe.
42
Décret du 28 mai 1945.
43
Citation à l’ordre de l’Armée du 28 mai 1945. Archives de l’Ordre de la Libération.
44
François BROCHE, Le bataillon des guitaristes, op. cit.
41
16
d’Alsace, des Vosges et des Alpes. Il convient également de noter que l’ouvrage est aussi
celui d’un fils écrivant sur son père, traduisant ainsi une certaine piété filiale avec le biais
évident que cela induit, sans que cela n’enlève en rien ni à sa qualité, ni au fait qu’il
s’agisse d’une œuvre absolument essentielle de notre corpus. Le second, intitulé
Tamari’i Volontaires45, plus récent puisque datant de 2014, n’est pas un ouvrage
académique stricto sensu. Son auteur, Jean-Christophe Shigetomi, y traite de tous les
soldats tahitiens et polynésiens dans le second conflit mondial, aussi bien dans le
Bataillon du Pacifique que dans d’autres unités. La rigueur des recherches y ayant mené,
la richesse des sources mobilisées, des témoignages et illustrations mis en avant en font
également une référence de tout premier plan. Notre propre étude se situe à la croisée de
ces deux travaux. Nous souhaitons en effet traiter exclusivement du Bataillon du
Pacifique, ainsi que du BIMP en nous concentrant alors sur les volontaires océaniens, tant
Polynésiens que Néo-Calédoniens et Néo-Hébridais, sur toute la durée de la guerre, des
ralliements de l’été 1940 jusqu’aux retours au pays du printemps 1946.
Comme l’ouvrage de Jean-Christophe Shigetomi, le sixième tome du Mémorial
polynésien46 aborde le Bataillon du Pacifique dans une perspective plus large, ici la
Polynésie française et son histoire complexe, sa politique, etc. Ses auteurs accordent en
effet un chapitre d’une cinquantaine de pages (sur plus de cinq cents) à son parcours,
suivi par un album photographique contenant plusieurs dizaines de clichés. Outre ces
titres, on retrouve parfois des mentions plus ou moins brèves dans les travaux portant
sur les batailles et campagnes auxquelles le BP1 et le BIMP participèrent, comme ceux
de François Broche sur la bataille de Bir Hakeim47,48 ou de Jean-Christophe Notin sur
la campagne d’Italie49, ainsi que dans l’ouvrage phare de Jean-Louis Crémieux-Brilhac
sur La France libre50. Nous nous appuyons également sur un ouvrage plus récent (paru
en 2019) dirigé par Nicola Labanca, David Reynolds et Olivier Wieviorka, intitulé La
45
Jean-Christophe SHIGETOMI, Tamari’i Volontaires, les Tahitiens dans la Seconde Guerre Mondiale,
Papeete, Api Tahiti, 2014.
46
Jean-Marie DALLET, Christian GLEIZAL et Jean-Louis SAQUET, Le Mémorial polynésien, vol. 6 : 19401961, Papeete, Hibiscus éditions, 1977.
47
François BROCHE, Bir Hakeim, mai-juin 1942 : la bataille qui réveilla les Français, Paris, Perrin, 2012.
48
François BROCHE, La cathédrale des sables. Bir Hakeim (26 mai-11 juin 1942), Paris, Belin, 2019.
49
Jean-Christophe NOTIN, La campagne d’Italie, 1943-1945 : les victoires oubliées de la France, Paris,
Perrin, 2007.
50
Jean-Louis CREMIEUX-BRILHAC, La France Libre, Paris, Gallimard, 1996, rééd. 2 vol. 2014.
17
guerre du désert51, qui traite d’une période capitale de l’histoire de l’armée de terre des
Forces Françaises Libres.
Jean-François Muracciole quant à lui choisit de ne pas évoquer le Bataillon du
Pacifique dans son ouvrage sur Les Français Libres52 en raison des « pesanteurs
culturelles de la colonisation », influant sur les motivations des volontaires et le
contexte de leur engagement. Les volontaires des Établissements Français de l’Inde
(EFI) en sont également écartés pour la même raison. Les sujets français du Pacifique
et des EFI sont ainsi distingués des citoyens français, ce que l’auteur justifie en écrivant
que « leur présence massive aurait conduit à diluer la signification de l’engagement des
uns et des autres. La distinction entre "coloniaux" et "Européens" était d’ailleurs
parfaitement claire aux yeux des contemporains, comme en témoignent les deux
grandes vagues de "blanchiment" des unités FFL : à l’été 1943 lors de la formation de
la 2e DB, puis à l’automne 1944 dans la 1e DFL »53. Ce titre nous est pourtant d’une
importance capitale puisqu’il dresse un profil général des Français Libres et pose des
questionnements similaires aux nôtres, nous permettant de situer le Bataillon du
Pacifique par rapport aux autres volontaires des FFL.
Par ailleurs, quelques dictionnaires établis par des historiens sur la France Libre
mentionnent notre sujet et ses protagonistes. Le Bataillon du Pacifique et le BIMP font
chacun l’objet d’une entrée dans le Dictionnaire de la France Libre54 de François
Broche, Georges Caïtucoli et Jean-François Muracciole, aux côtés de Félix Broche,
Henri Sautot, Jean Bellec, la bataille de Bir Hakeim et d’autres personnages et
événements leur étant reliés. Le Dictionnaire historique de la Résistance55, paru en
2006 sous la direction de François Marcot, inclut une entrée sur le BIMP. Une autre
entrée consacrée aux territoires français du Pacifique, rédigée par Christine LevisseTouzé, est parsemée d’erreurs et d’approximations. En effet, l’auteure situe le
référendum ayant eu lieu dans les EFO au 10 septembre soit neuf jours trop tard, fait
d’Émile de Curton le président du gouvernement provisoire alors même qu’il n’en
51
Nicola LABANCA, David REYNOLDS et Olivier WIEVIORKA, La Guerre du Désert, 1940 – 1943,
Paris, Perrin, 2019.
52
Jean-François MURACCIOLE, Les français libres, op. cit.
53
Ibid., p. 31
54
François BROCHE, Georges CAÏTUCOLI et Jean-François MURACCIOLE, Dictionnaire de la France libre,
Paris, Robert Laffont, 2010.
55
François MARCOT (dir.), Dictionnaire historique de la Résistance, Paris, Robert Laffont, 2006.
18
faisait pas partie, écrit que la France Libre autorise l’aviation américaine à faire de
Tahiti une base alors que le seul aéroport de l’île est inauguré dans les années 196056 et
va jusqu’à omettre de citer la Nouvelle Calédonie comme l’un des trois territoires
d’origine des volontaires du Bataillon du Pacifique57. Plus ancien est le répertoire
biographique de la Polynésie Française du père Patrick O’Reilly, publié par la Société
des Océanistes et réédité en 197558. Le père O’Reilly, religieux et ethnologue diplômé
de la Sorbonne et de l’EPHE, s’est rendu par ses nombreux travaux spécialiste du
Pacifique. Il nous semblait ainsi intéressant de l’inclure à notre corpus
historiographique. Son ouvrage rassemble de très nombreuses biographies succinctes
de personnalités polynésiennes dont plusieurs combattants ou anciens combattants des
deux guerres. Notons également la publication sous sa supervision et celle d’Édouard
Reitman d’un autre dictionnaire intitulé Bibliographie de Tahiti et de la Polynésie
française59, également publié par la Société des Océanistes, regroupant des centaines
de références bibliographiques60 sur la Polynésie. Malheureusement, en raison de sa
date de parution (1967), les titres les plus récents n’y figurent pas. Nous avons
également consulté le Dictionnaire des Compagnons de la Libération de Vladimir
Trouplin61, conservateur du Musée de l’Ordre de la Libération à Paris, ouvrage d’un
grand intérêt au vu de la présence de dizaines de Compagnons au sein du BP1 et du
BIMP. Robert D. Craig est pour sa part l’auteur de deux ouvrages ayant retenu notre
attention : Historical dictionnary of Oceania62 (1981) et Dictionnary of Polynesian
mythology63 (1989), ce dernier relevant de l’ethnologie.
Enfin, sur des sujets proches du nôtre, nous nous sommes notamment appuyés sur
l’article de Jean-Marc Regnault et Ismet Kurtovitch sur les ralliements du Pacifique à
56
Un aérodrome américain est en effet construit dans les EFO en 1942, mais à Bora Bora, située à près de
250 km au nord-ouest de Tahiti.
57
« D’autres venus de tout le Pacifique (Polynésie, Nouvelles-Hébrides) forment sous le commandement
du lieutenant-colonel Broche le bataillon du Pacifique qui s’illustrera à Bir Hakeim où il perdra son chef. ».
François MARCOT (dir.), Dictionnaire historique de la Résistance, op. cit., p.338.
58
Patrick O’REILLY, Tahitiens : répertoire biographique de la Polynésie Française, 2e éd., Paris, Musée
de l’Homme, 1975
59
Patrick O’REILLY et Édouard REITMAN, Bibliographie de Tahiti et de la Polynésie Française, Paris,
Musée de l’homme, 1967.
60
Yvonne Oddon, bibliothécaire du Musée de l’Homme et résistante, figure dans les remerciements
61
Vladimir TROUPLIN, Dictionnaire des Compagnons de la Libération, Bordeaux, Elytis, 2010.
62
Robert D. CRAIG, Historical dictionary of Polynesia, Metuchen London, Scarecrow Press, 1981.
63
Robert D. CRAIG, Dictionnary of Polynesian mythology, Westport, Greenwood Press, 1989.
19
la France libre à l’été 194064 qui, par sa richesse, nous fut d’un grand intérêt, ainsi que
l’ouvrage de Kim Munholland65 sur les rapports entre Français libres et Américains en
Nouvelle-Calédonie durant le conflit, qui évoque sur un chapitre le ralliement de la
colonie. De même, l’article d’Anne-Christine Trémon sur les citoyens indigènes et
sujets électeurs dans les EFO nous a éclairé sur les catégories politiques construites et
sur la situation politique propres au contexte colonial du territoire entre 1880 et 194566,
et l’article d’Éric Jennings sur La dissidence aux Antilles nous permet de dresser un
parallèle entre les territoires français du Pacifique et ceux des Caraïbes, restés dans le
giron de Vichy jusqu’en 194367.
Les chercheurs spécialisés dans l’étude du Pacifique sont quant à eux moins
nombreux, mais néanmoins tout aussi importants. Les ouvrages de Frédéric Angleviel sur
l’histoire de la Nouvelle-Calédonie68 ou de Sarah Mohamed-Gaillard sur l’histoire de
l’Océanie en général depuis la fin du XVIIIe siècle69 nous ont permis d’approcher ces
questions de manière générale, nous avons pu les affiner grâce à différents travaux dont
ceux de Francis Cheung sur la Polynésie coloniale entre 1919 et 194570. Isabelle Merle et
Adrian Muckle ont de même traité de la Nouvelle-Calédonie sous le prisme de la
colonisation71. L’anthropologue Alban Bensa a quant à lui produit de nombreux travaux
sur les Kanak72, notamment sur la guerre de 1917 en Nouvelle-Calédonie73, au même titre
que Jean Guiart, ayant également travaillé sur la Mélanésie, ses structures sociales74 et
ses pratiques culturelles.
64
Jean-Marc REGNAULT et Ismet KURTOVITCH, « Les ralliements du Pacifique en 1940. Entre légende
gaulliste, enjeux stratégiques mondiaux et rivalités Londres/Vichy. », Revue d’histoire moderne et
contemporaine, 49-4, 2002, p. 71-90.
65
Kim MUNHOLLAND, Rock of Contention : Free French and Americans at War in New Caledonia, op. cit.
66
Anne-Christine TREMON, « Citoyens indigènes et sujets électeurs. Statut, race et politique dans les
Établissements français de l’Océanie (1880-1945) », Genèses, 91-2, 2013, p. 28-48.
67
Eric JENNINGS, « La dissidence aux Antilles (1940-1943) », Vingtième Siècle. Revue d’histoire, 68-1,
2000, p. 55-72.
68
Frédéric ANGLEVIEL, La France aux antipodes. Histoire de la Nouvelle-Calédonie, Paris, Vendémiaire,
2018.
69
Sarah MOHAMED-GAILLARD, Histoire de l’Océanie, op. cit.
70
Francis CHEUNG, Tahiti et ses îles, 1919 – 1945 : étude d’une société coloniale aux antipodes de sa
métropole, Paris, L’Harmattan, 1998.
71
Isabelle MERLE et Adrian MUCKLE, L’indigénat : genèses dans l’Empire français, pratiques en NouvelleCalédonie, Paris, CNRS éditions, 2019.
72
Alban BENSA et al., Les Chemins de l’alliance : l’organisation sociale et ses représentations en NouvelleCalédonie, région de Touho, aire linguistique cèmuhî..., Paris, SÉLAF, 1982.
73
Alban BENSA, Kacué Yvon GOROMOEDO et Adrian MUCKLE, Les sanglots de l’aigle pêcheur. NouvelleCalédonie : la guerre Kanak de 1917, Toulouse, Anacharsis, 2015.
74
Jean GUIART, Structure de la chefferie en Mélanésie du Sud, Paris, Institut d’ethnologie, 1963.
20
Rappelons enfin qu’il exista durant le conflit deux autres « bataillons du Pacifique »,
dans le sens où ils furent constitués dans la même aire géographique et culturelle, sur
lesquels l’historiographie est également quasi inexistante. Le premier est le 100th Infantry
Battalion, dit « bataillon d’Hawaii », le bataillon d’infanterie le plus décoré de l’armée
américaine, composé de citoyens américains d’origine japonaise. L’autre, néo-zélandais,
est le 28th Māori Battalion, dit « bataillon Māori », qui fut également formé dans la
continuité d’une unité de la Grande Guerre du même nom. Sur le premier, Bruno Algan
a publié en 2018 Le bataillon d’Hawaii75, qui est à notre connaissance le seul travail
francophone y étant dédié. Sur le second, un roman76 fut écrit par l’auteure néo-zélandaise
Patricia Grace, publié en 2009 et traduit en français l’année suivante, mais nous ignorons
si l’unité a fait l’objet de travaux scientifiques. Ses effectifs et ses pertes furent
considérablement supérieurs à ceux du Bataillon du Pacifique : sur 3500 volontaires77,
655 furent tués et 1945 blessés78. Les archives nationales de Nouvelle-Zélande conservent
des archives similaires à celles que nous utiliserons. Dans les FFL, on recense une unité
qu’il est possible de mettre en parallèle avec celle faisant l’objet de notre étude, originaire
de ce que sont aujourd’hui d’autres territoires français ultramarins : le « Bataillon des
Antilles », constitué de volontaires guadeloupéens, martiniquais et guyanais, formé après
le basculement de ces territoires du côté de la France Libre79. Tous ces bataillons, y
compris le Bataillon du Pacifique, présentent diverses particularités, notamment au
niveau de leur organisation (six compagnies pour le Bataillon d’Hawaii au lieu de trois
pour un bataillon d’infanterie américain classique) et de leurs effectifs.
À l’inverse, si la bibliographie spécifique au Bataillon du Pacifique est
extrêmement ténue, les sources sont quant à elles plus abondantes. Les archives
conservées au Service Historique de la Défense (Vincennes) figurent au premier plan
d’entre elles. La sous-série GR 16 P regroupe plus de 600 000 dossiers individuels de
résistants issus des Forces Françaises Libres et Combattantes, de la résistance
intérieure, des déportés résistants, du BCRA et des FFI. Si nous n’avons pas pu
consulter l’intégralité des plus de 700 dossiers des volontaires des deux contingents et
75
Bruno ALGAN, Le bataillon d’Hawaii : des combattants du Pacifique aux côtés des Alliés durant la
Seconde guerre mondiale. Hawaii, Tahiti-Nouméa et Nouvelle-Zélande, Paris, L’Harmattan, 2018.
76
Patricia GRACE, Le Bataillon Māori, Pirae, Au vent des îles, 2010.
77
L’équivalent de l’ensemble des Forces Aériennes Françaises Libres.
78
Patricia GRACE, Le Bataillon Māori, op. cit., p. 9 (introduction).
79
Voir : Eric JENNINGS, « La dissidence aux Antilles (1940-1943) », op. cit.
21
des aspirants et sous-officiers affectés au bataillon à partir de la fin 1941, faute de
temps, nous avons malgré tout pu prendre connaissance des dossiers d’un échantillon
de volontaires appartenant à toutes les catégories : polynésiens, néo-calédoniens, néohébridais, aspirants, officiers, sous-officiers et hommes de troupe, du premier comme
du second contingent, de même que celui de Raymonde Jore, néo-calédonienne
engagée dans le Corps des Volontaires Françaises. Ces dossiers individuels renseignent
sur l’état-civil de l’intéressé(e), sa profession dans le civil, sa confession, son éducation,
son parcours militaire, ses décorations, citations et punitions éventuelles, son évolution
en grade, ses blessures, le cas échéant son décès, et sont parfois enrichis d’une
photographie. Les dossiers individuels d’officiers de la sous-série GR 8 YE reprennent
ces éléments et présentent en plus de cela des détails sur la formation s’il s’agit d’un
militaire de carrière. Pourtant, certains des dossiers de la sous-série 16 P sont pauvres
en documents, ne contenant parfois qu’une seule pièce. Il est ainsi difficile, parfois
impossible de pallier ces manques concernant l’individu en question. Les sous-séries
GR 11 P et GR 12 P regroupent quant à elles les dossiers dédiées aux unités, entre 1940
et 1945. Sont ainsi concernés la 1ère Brigade Française Libre, le 1er BIM, le Bataillon
du Pacifique et le BIMP, dont il est possible de dresser un tableau du parcours, de
l’organisation et de l’encadrement, des effectifs, de l’armement et des pertes grâce aux
journaux de marches, télégrammes et autres documents administratifs. Pour le Bataillon
du Pacifique et le BIMP, viennent s’y ajouter des éléments relatifs à la pratique
musicale, aux sports et loisirs, à l’hygiène, au confort et à la tenue des volontaires. Les
archives de l’Ordre de la Libération conservent des dossiers individuels similaires à
ceux du SHD mais sont un peu plus étoffés, en ceci qu’ils contiennent en plus des
éléments susmentionnés le décret d’attribution de la Croix de la Libération de
l’intéressé, des coupures de presse, récits, témoignages et correspondances. Le dossier
du BIMP, unité Compagnon, contient pour sa part des lettres, des témoignages et divers
documents administratifs sur l’unité, ses pertes et son parcours.
À l’inverse, les Archives Nationales d’Outre-Mer (ANOM), sises à Aix-enProvence, et où nous nous sommes rendus en avril 2019, ne conservent que des
documents sur les colonies et leur administration. Le Bataillon du Pacifique y est
22
quasiment absent, n’apparaissant que sous la plume des gouverneurs, notamment
Georges Orselli80. Ces quelques pièces concernent principalement les rapatriements.
Si ces documents administratifs sont d’une utilité capitale pour dresser le cadre de
l’unité, ils demeurent insuffisants pour en saisir l’esprit et l’âme. C’est pourquoi nous
nous sommes intéressés de très près à la littérature grise. Selon l’AFNOR, un document
issu de la littérature grise est un « document dactylographié ou imprimé, souvent à
caractère provisoire, reproduit et diffusé à un nombre d’exemplaires inférieur au millier,
en dehors des circuits commerciaux de l’édition et de la diffusion »81. Cette définition se
rapproche de celle des sources imprimées.
Notre intérêt ce type de sources trouve son origine dans notre attachement aux
témoignages des soldats. À ce titre, nous tenons à mentionner trois éléments. Le premier
est les entretiens que nous avons menés avec les deux derniers survivants du bataillon,
tous deux résidents en France métropolitaine : le néo-calédonien Louis Kasni Warti, du
second contingent, et le tahitien Ari Wong Kim82. Cependant, ceux-ci ayant atteint un âge
avancé, ces entretiens présentent des incomplétudes, que l’on peut imputer au passage
des années, mais également au caractère intrinsèque du témoignage, qui est par définition
une reconstruction83. Il est donc subjectif en plus d’être imparfait. Pour tenter de remédier
à ce biais, et c’est le second élément, nous avons contacté les familles de vétérans afin de
tenter d’explorer les archives familiales et leur avons adressé des questionnaires afin de
tenter d’en apprendre plus sur le parcours de leurs parents et aïeux et de localiser ces
archives. Nous avons notamment pu accéder à celles de deux sous-officiers, Philippe
Bernardino et Jean Tranape, tous deux Compagnons de la Libération. Mais, là encore,
bien peu nombreux sont celles et ceux nous ayant retourné ce questionnaire, malgré la
80
Georges Orselli succède à Émile de Curton au poste de gouverneur des EFO le 1er octobre 1941. Il est
remplacé par Jean-Camille Haumant le 13 décembre 1945 (Francis CHEUNG, Tahiti et ses îles, op. cit.,
p. 505).
81
Joachim SCHÖPFEL, « Comprendre la littérature grise », I2D Information, données documents, 52-1,
2015, p. 30
82
Il a un temps été annoncé que John Martin, décédé en 2012, était le dernier survivant du bataillon, avant
de réhabiliter Ari Wong Kim. Nous tenons à rectifier cette information : au moment où nous écrivons ces
lignes, deux vétérans sont toujours en vie : Ari Wong Kim est le dernier survivant tahitien, et Louis
Kasni Warti le dernier néo-calédonien.
83
Sur le rapport entre l’historien et le témoin, voir l’ouvrage : Florence DESCAMPS, L’historien, l’archiviste
et le magnétophone : De la constitution de la source orale à son exploitation, Institut de la gestion publique
et du développement économique, 2005 ; et : Thomas GOMART, « Quel statut pour le témoignage oral en
histoire contemporaine ? », Hypothèses, 3-1, 2000, p. 103.
23
richesse des archives laissées par Jean Tranape et conservées par son fils. Enfin, nous
nous sommes rendus en séjour de terrain en Nouvelle-Calédonie afin d’effectuer des
recherches sur place. Notre voyage à Nouméa, du 31 août au 28 septembre 2019, nous a
permis de visiter plusieurs fonds d’archives et d’en ramener diverses sources relevant
pour la plupart de la littérature grise. Les archives municipales de Nouméa conservent
notamment des exemplaires de journaux d’époque, « Le Bulletin du Commerce » et
« La France Australe ». Les extraits que nous avons reproduits portent essentiellement
sur le départ et le retour des volontaires ainsi que sur leur séjour parisien. Nous avons
également pu consulter les archives du camp militaire Broche, où est cantonné le
Régiment d’Infanterie de Marine du Pacifique en Nouvelle-Calédonie (RIMaP-NC),
constituées de récits narrant plusieurs épisodes auxquels le bataillon prit part, de
biographies des chefs de corps et de listes de volontaires incomplètes. Nous nous sommes
également rendus dans des lieux de mémoire tels le Musée de la Seconde Guerre mondiale
en Nouvelle-Calédonie, dont les collections évoquent la présence américaine dans
l’archipel, le ralliement de la colonie à la France Libre, la Milice Civique créée par le
gouverneur Sautot, l’internement des Japonais et les volontaires néo-calédoniens, Blancs
comme Kanak, du Bataillon du Pacifique. Aux archives territoriales, nous avons pu
consulter de nombreuses listes nominatives plus exhaustives contenant notamment des
indications sur le nombre de volontaires à divers stades du parcours du bataillon, leurs
origines et les pertes subies, ainsi que les états signalétiques et des services de quelques
volontaires84 et plusieurs lettres échangées avec l’Association des Français Libres. Nous
avons également pu consulter et reproduire des extraits des journaux de guerre de deux
volontaires néo-calédoniens, l’adjudant Édouard Magnier et le soldat Raoul MichelVillaz. Ce séjour de terrain fut ainsi centré sur la littérature grise et sur les soldats, leur
quotidien et leurs principaux combats.
Nous avons ainsi poursuivi nos investigations dans la littérature de témoignage et
nous appuierons sur deux autres textes, qui cette fois ont été publiés. Le premier est le
journal de guerre du caporal tahitien Jean-Roy Bambridge, musicien notable du bataillon,
annoté et publié par Jean-Christophe Shigetomi dans le 346e numéro du Bulletin de la
Société des Études Océaniennes (septembre – décembre 2018). Le second est celui du
caporal-chef néo-calédonien Gaston Rabot, annoté et publié aux éditions L’Harmattan
84
Document administratif rassemblant les informations essentielles sur le soldat tels l’état civil, la
description physique, le parcours, les décorations, citations et punitions.
24
par François Broche et Yvette Quelen-Buttin, secrétaire de la Fondation de la France
Libre, paru en septembre 2019. Nous nous intéressons de très près aux témoignages des
soldats puisqu’ils sont rédigés sur le moment, et laissent ainsi transparaître leurs ressentis
et émotions, leurs mouvements, leurs combats, leurs loisirs, leurs craintes et leur
quotidien au jour le jour. S’ils contiennent également une vision subjective, ils ont
néanmoins le mérite de moins revêtir un caractère incomplet et biaisé que les entretiens
menés après la guerre.
Dans le même esprit, nous nous sommes également intéressés aux photographies.
Le corpus photographique produit par les volontaires du Bataillon du Pacifique est en
effet considérable. Partagées entre fonds d’archives publics et fonds familiaux privés, ces
images, dont la conservation et la netteté sont remarquables, renseignent entre autres
choses sur la vie quotidienne des soldats, leur habillement, leurs loisirs et leur
positionnement lors des combats. En cela, le corpus photographique constitue une source
à part entière et absolument essentielle85. Le fonds photographique de Jean Tranape
occupe ainsi une place de tout premier rang. Sous-officier néo-calédonien du premier
contingent, Jean Tranape rapporte après la guerre une collection de clichés dont le volume
et la qualité sont exemplaires. Ces photographies sont conservées aux archives
territoriales de Nouvelle-Calédonie, nous avons pu les y consulter. Ainsi, nous avons
reproduit certaines photographies en annexe de ce mémoire, issues de diverses collections
dont la nôtre86.
Enfin, étant donné l’importance de la musique au sein du « bataillon des
guitaristes », il nous est impossible de ne pas intégrer de morceaux musicaux à notre
corpus de sources. Les chants composés par les volontaires, constituant l’essentiel du
corpus, laissent notamment transparaître leur motivation et leur solidarité mutuelle, leur
patriotisme et leur volonté d’aller combattre et sont aujourd’hui conservés dans plusieurs
fonds d’archives tels le SHD, les archives territoriales de Nouvelle-Calédonie et de
Polynésie Française, ou sont reproduits dans les ouvrages traitant du bataillon, notamment
ceux de François Broche87 et de Jean-Christophe Shigetomi88. Le chant le plus important,
85
Un dossier photographique figure parmi les annexes du présent mémoire.
Nous reproduisons en effet des photographies des membres de notre famille ayant appartenu au BP1 ainsi
que des clichés que nous avons pris à Paris, Papeete et Nouméa.
87
François BROCHE, Le bataillon des guitaristes, op. cit.
88
Jean-Christophe SHIGETOMI, Tamari’i Volontaires, op. cit.
86
25
le plus significatif et le plus représentatif du bataillon est « Tamari’i Volontaires », écrit
et composé en 1940 par le caporal-chef Pea Tutehau. Il est aujourd’hui entré dans les
traditions du Régiment d’Infanterie de Marine du Pacifique – Polynésie (RIMaP-P), autre
héritier contemporain du bataillon, et est chanté par ses soldats tous les 14 juillet lors du
traditionnel défilé militaire. Nous en avons réalisé un enregistrement lors du voyage que
nous avons fait à Tahiti à l’été 2018. D’une manière générale, les musiciens du bataillon
furent les Tahitiens plutôt que les Calédoniens89. Notons malgré tout l’exception que
constitue le récital donné par un groupe de volontaires néo-calédoniens à la Société de
Géographie (Paris) à l’automne 1945, relaté dans un article paru dans le second numéro
du Journal de la Société des Océanistes90.
Ainsi, nous avons décidé de traiter de notre sujet en nous plaçant dans le courant de
la new military history91. Initié par l’historien britannique John Keegan92 dans les années
1970, ce courant historiographique vise à les phénomènes guerriers à l’échelle du
combattant plutôt qu’à celle des unités, c’est-à-dire à faire de l’histoire militaire en y
introduisant une dimension anthropologique, par opposition à l’« histoire-bataille » qui
l’aborde à travers l’étude des batailles, des stratégies et des hauts gradés. Nous avons ainsi
décidé d’aborder le Bataillon du Pacifique et les volontaires océaniens du BIMP à travers
le prisme des relations interpersonnelles et des éléments de cohésion leur étant propres.
Nous utiliserons pour ce faire les concepts de fraternité militaire, de sociabilité militaire,
d’autorité et d’expérience combattante, forgés en premier lieu pour étudier la Première
Guerre mondiale par des historiens tels Stéphane Audoin-Rouzeau, dans le premier tome
de La guerre au XXe siècle93 ou dans Combattre94, et Emmanuel Saint-Fuscien dans sa
thèse de doctorat, soutenue en 2008 et publiée en 2011 sous le titre À vos ordres ?95.
89
Entretien avec Louis Kasni Warti, 27 novembre 2018.
Patrick O’REILLY et Jean-Albert VILLARD, « Autour de la musique des Néo-Calédoniens. », Journal de
la Société des océanistes, 2-2, 1946, p. 93-107.
91
Voir : John KEEGAN, « The Historian and Battle », International Security, 3-3, 1978, p. 138-149.
92
On considère l’ouvrage suivant comme fondateur du courant : John KEEGAN, The face of battle, Londres,
Jonathan Cape, 1976. Nous renvoyons également à l’ouvrage suivant, rassemblant trois travaux de Keegan
y compris celui-ci dans une nouvelle traduction : John KEEGAN, De la guerre, éd. Arnaud BLIN, Paris,
Perrin, 2016.
93
Stéphane AUDOIN-ROUZEAU, La guerre au XXe siècle, Tome 1 : L’expérience combattante, Paris,
Documentation française, 2004.
94
Stéphane AUDOIN-ROUZEAU, Combattre : une anthropologie historique de la guerre moderne, XIXe XXIe siècle, Paris, Seuil, 2008.
95
Emmanuel SAINT-FUSCIEN, À vos ordres ? La relation d’autorité dans l’armée française de la Grande
guerre, Paris, Éditions de l’EHESS, 2011.
90
26
Nous mobiliserons également des travaux de sociologues comme l’article de
François Gresle sur la « société militaire »96, ou ceux de l’ethnomusicologue Adeline
Poussin, notamment sa thèse sur les chants militaires dans les Troupes de Marine et son
article sur la place du vin rouge dans les rituels pratiqués au sein de cette arme97,98. Les
principaux concepts ethnologiques polynésiens sont quant à eux exposés dans les œuvres
de Robert Craig99. Enfin, nous nous baserons également sur les ouvrages de Benoît
Rondeau sur l’armée allemande pendant la Seconde Guerre mondiale100 et sur
l’Afrikakorps101, qui en dressent également une histoire « par le bas ». Outre
l’établissement de possibles comparaisons, ces ouvrages nous donnent également des clés
d’interprétation de notre propre sujet.
Nous traiterons ainsi du volontariat des soldats « pacifiens » du Bataillon du
Pacifique puis du BIMP, à travers ses modalités et ses raisons, mais également des
logiques familiales qu’il revêt. On observe en effet une très forte proportion de soldats
engagés aux côtés d’un ou plusieurs membres de leurs familles. Nous évoquerons les
questions entourant l’identité océanienne des volontaires, en nous interrogeant sur leurs
pratiques culturelles et guerrières, à savoir leurs manières de combattre et de s’occuper
lors des « temps morts » (en d’autres termes les périodes hors combats). Nous
présenterons notamment leur participation à la bataille de Bir Hakeim, leur baptême du
feu, ainsi que leurs pratiques de la musique, du tourisme et du sport. Nous chercherons
ainsi à savoir ce qu’il reste du Pacifique dans les sables du désert, dans les montagnes
italiennes ou en Métropole à travers les pratiques de sociabilité et les interactions des
volontaires avec la vie civile, les relations entre troupes et gradés, notamment avec
Félix Broche et l’intérêt porté à la vie politique et aux événements ayant lieu dans leurs
îles en leur absence.
96
François GRESLE, « La “société militaire” », Revue française de sociologie, 44-4, 2003, p. 777-798.
Adeline POUSSIN, « Le vin rouge : un élément essentiel de la ritualité au sein des Troupes de Marine »,
Civilisations, 1-66, 2017, p. 195-207.
98
Nous entendons ici le mot « arme » dans son sens de corps militaire. Les Troupes de Marine en sont un,
au même titre que l’infanterie, l’arme blindée, l’artillerie, le génie, les transmissions, le train, etc. À noter
que la Légion Étrangère n’est pas une arme mais un corps à part.
99
Voir par exemple : Robert D. CRAIG, Handbook of Polynesian mythology, Santa Barbara, ABC Clio,
2004.
100
Benoît RONDEAU, Être soldat de Hitler, Paris, Perrin, 2019.
101
Benoît RONDEAU, Afrikakorps. L’armée de Rommel., Paris, Tallandier, 2013.
97
27
Notre étude sera organisée selon trois axes. Nous exposerons dans le premier le
Bataillon du Pacifique dans la guerre, en étudiant ses volontaires, ses degrés de hiérarchie
et rapports d’autorité, ainsi que les principaux combats jalonnant son parcours. Nous
évoquerons l’unité dans son contexte, notamment celui de la 1ère Brigade Française Libre
et des mélanges y étant opérés, ainsi que les questions de hiérarchies et d’autorité. Le
second visera à approcher l’unité en tant que groupe social en interaction avec son
entourage, développant ses pratiques culturelles et ses loisirs, en nous inspirant de l’article
de François Gresle que nous citions plus haut sur la « société militaire ». Le troisième
traitera des quelques mois précédant et suivant l’arrêt des hostilités. Nous y évoquerons
le séjour parisien des volontaires océaniens, leur statut après la capitulation allemande ;
nous y décrirons la sortie de guerre des volontaires, leurs retours en Océanie, leurs
destinées d’après-guerre, leur poids politique et la question de leur reconnaissance, en
gardant à l’esprit les questions de cohésion et en tentant de voir en quoi celles-ci peuvent
(ou non) perdurer.
28
Partie 1 : le Bataillon du Pacifique en guerre
I. Le profil sociologique des engagés
1.
DES HOMMES JEUNES ET VOLONTAIRES
Lorsque l’on veut dresser le profil des soldats du Bataillon du Pacifique, le premier
constat qui s’impose est que, comme le reste des Forces Françaises Libres, tous sont des
volontaires. Outre le volontariat, les soldats du BP1 ressemblent à leurs camarades
Français libres en se caractérisant par leur jeunesse, bien qu’elle soit quelque peu relative.
En effet, la moyenne d’âge du BP1 en 1940102 est de 26,3 ans, soit supérieure d’un an à
celle de l’ensemble des FFL (25,4 ans103). On observe également une nette opposition
entre le contingent calédonien et le contingent polynésien, le premier étant sensiblement
plus vieux que le second : l’âge moyen des Néo-Calédoniens du premier contingent
s’établit à 27,3 ans (l’âge médian étant de 26,5 ans), alors que celui des Tahitiens est de
25,5 ans (avec un âge médian de 24 ans). François Broche a d’ailleurs souligné le fort
taux d’hommes mariés et de pères de familles chez les Calédoniens104 de ce premier
contingent.
En revanche, s’il est un point sur lequel le Bataillon du Pacifique se démarque
sensiblement du reste des Français libres, c’est par la part des classes sociales dans ses
rangs. Si les classes moyennes et aisées sont « nettement surreprésentées »105 dans les
FFL, à l’inverse, comme l’écrit Jean-Marc Regnault : « il faut noter que les engagés [au
Bataillon du Pacifique] viennent le plus souvent des milieux populaires, ce qui est lourd
de clivages futurs comme le traduit bien l’expression qui désigne certaines élites locales
"armons-nous et partez !" »106 L’étude des dossiers individuels de la sous-série GR 16 P
du SHD démontre en effet une variété de métiers appartenant aux classes sociales
généralement désignées comme basses : les volontaires sont en effet, dans leur majorité,
employés, chauffeurs, navigateurs exerçant dans les liaisons interinsulaires,
télégraphistes, mécaniciens, maçons, menuisiers, boulangers, etc. Ainsi, si le patriotisme,
102
La date de naissance de 50 volontaires sur les 587 du premier contingent nous est manquante. Nous
avons réalisé nos calculs pour les 537 restants, ensemble suffisamment nombreux pour être significatif.
103
Jean-François MURACCIOLE, Les français libres, op.cit., p. 65.
104
François BROCHE, Le bataillon des guitaristes, op. cit., p. 168.
105
Jean-François MURACCIOLE, Les français libres, op.cit., p. 96.
106
Henri WEILL, Tahiti, France libre, op. cit., p. 107.
29
le refus de l’armistice et la volonté de poursuivre la guerre aux côtés des Alliés sont des
motivations absolument essentielles et de premier plan au volontariat, communes à
l’ensemble des engagés, il ne faut pas négliger le goût de l’aventure qui anime nombre de
jeunes soldats. Bien que certains aient eu l’occasion de naviguer entre les archipels des
EFO, la quasi-totalité d’entre eux n’a jamais quitté l’Océanie avant la guerre. L’ouverture
des hostilités représente un moyen parmi d’autres de partir voir du pays. Seuls ceux dont
l’emploi le permet ou issus de familles disposant de moyens suffisants ont pu voyager
hors de l’Océanie auparavant, pour aller étudier en métropole par exemple. C’est le cas
du lieutenant Raymond Perraud, licencié en droit de l’université de Montpellier en 1936,
de retour en Nouvelle-Calédonie l’année suivante. D’autres comme Robert Hervé ou
Félix Broche sont nés en France (tous deux à Marseille) et y ont grandi, avant de
s’installer à Tahiti, Hervé en 1934 et Broche en 1939. C’est également le cas de Louis
Rollin107, médecin et vétéran de la Grande Guerre d’origine bretonne installé aux îles
Marquises à compter de 1923, où il parvint en une année à inverser la courbe
démographique de l’archipel, alors qu’à son arrivée « les décès l'emportaient encore sur
les naissances »108. Il s’engage dans le corps expéditionnaire en 1940 et devient le
médecin du bataillon avant d’être rapatrié en 1943 en raison de son âge.
À l’inverse, le cas d’Ari Wong Kim attire d’emblée l’attention : né en 1924, âgé de
16 ans en 1940 et n’ayant donc pas l’âge minimum requis pour s’engager dans les FFL109,
il usurpe l’identité de son demi-frère Tetuahira a Teaupahere, de trois ans son aîné, pour
pouvoir s’engager. Sa mère, illettrée, signe son engagement « sans méfiance »110. Il faut
en effet, pour les volontaires âgés de 18 à moins de 21 ans (l’âge de la majorité à l’époque)
une autorisation parentale. Il admettra plus tard que le goût de l’aventure fut pour lui une
motivation motrice111. À son retour à Tahiti en 1946, il perdit le droit de porter ses
décorations et finit par retourner s’établir en métropole112.
107
Louis Rollin (1887 – 1972) cumule son emploi de médecin à des fonctions administratives. Blessé en
14-18, cité, décoré de la Croix de Guerre, promu Grand’Officier de la Légion d’Honneur peu avant sa mort,
l’hôpital de Nuku Hiva porte désormais son nom.
108
François BROCHE, Le bataillon des guitaristes, op. cit., p. 50.
109
Le général de Gaulle reprend pour les FFL les codes de l’armée française d’avant-guerre et fixe l’âge
minimum d’engagement à 18 ans pour l’armée de terre et à 17 ans pour la Marine.
110
Rapport d’enquête de la Gendarmerie fait à Papeete le 2 mars 1955, dans lequel interviennent les deux
demi-frères ainsi que trois anciens combattants du Bataillon du Pacifique : Alexandre Wohler, Puahio a
Puairau et John Martin. Service Historique de la Défense, GR 16 P 604230.
111
Questionnaire retourné par son neveu, M. Georges Buisson.
112
Idem.
30
Par conséquent, si Jean-François Muracciole exclut les volontaires du BP1 de son
étude sur les Français libres, comme nous l’exposions en introduction, il reconnaît malgré
tout que « leur engagement dans les FFL a revêtu un caractère de liberté et d’intention
bien plus grand que celui des tirailleurs africains. »113
Dans le contingent polynésien, il est une autre catégorie qui tient une place de
premier plan : celle des « demis »114, issus de métissages entre Polynésiens et Européens.
Ils maîtrisent de ce fait plusieurs langues : outre le français et le tahitien, l’anglais vient
parfois s’y ajouter, des origines britanniques (et/ou américaines) aidant. Les « demis »
sont ainsi très largement représentés parmi les sous-officiers polynésiens, étant le plus à
même d’encadrer et de communiquer avec des subordonnés qui parfois ne maîtrisent que
très peu voire pas du tout la langue française. Félix Broche remédiera au problème en
ordonnant que les volontaires concernés reçoivent une instruction durant l’entraînement
du bataillon. John Martin, sous-officier « demi » (il termine la guerre au grade de sergentchef) élabore même un lexique comprenant les principaux termes militaires, notamment
les grades et armes, et les traduit en langue tahitienne pour faciliter la compréhension de
ses camarades, inventant ainsi de nombreux termes n’existant pas en tahitien115. Les
Européens sont en effet ultra minoritaires dans le contingent polynésien. Les officiers et
sous-officiers de réserve présents à Tahiti refusent en masse de rejoindre le corps
expéditionnaire116, à l’inverse des descendants des première et seconde générations de
colons117, et, fait notable, d’une trentaine de prisonniers de droit commun ayant manifesté
leur désir de s’engager dès septembre 1940, sans qu’une suite ne puisse y être apportée118.
Les origines des volontaires néo-calédoniens méritent également qu’on y accorde
de l’intérêt, en raison de leur diversité. Dans un témoignage, l’aspirant Jean Bellec, plus
tard fait Compagnon de la Libération, écrit : « dans la première section que je commande,
il y a une majorité de Blancs, mais aussi des Métis, des types d’origine arabe, des
descendants de bagnards. Ça pose des problèmes de coexistence, ce qu’il faut essayer de
113
Jean-François MURACCIOLE, Les français libres, op.cit., p. 31.
Le terme « demi » apparaît dans les années 1930.
115
John Martin (1921 – 2012) sera après la guerre un des membres fondateurs de l’Académie Tahitienne
en 1972 et l’interprète officiel lors des deux voyages du général de Gaulle en Polynésie, en 1956 et 1966.
116
Francis Cheung, Tahiti et ses îles, op. cit., p. 119.
117
Ibid., p. 120.
118
François BROCHE, Le Bataillon des guitaristes, op. cit., p. 143.
114
31
résoudre. »119 Si le second contingent formé en 1943 est composé de volontaires kanak,
le premier contingent est en effet composé d’Européens descendants de colons libres
arrivés dans l’archipel entre la fin du XIXe et le début du XXe siècle, mais également de
descendants de bagnards, parmi lesquels les 1822 Nord-Africains condamnés entre 1864
et 1897120 à purger une peine au bagne de l’île Nou121. D’autres encore comptent parmi
leurs aïeux des bagnards Européens, qui comme certains détenus algériens (une minorité
est originaire du Maroc et de Tunisie) décident de s’établir sur le territoire à l’issue de
leur peine, y fondant une famille et y démarrant une activité professionnelle. Citons parmi
eux les soldats André Abdallah ben Amar et Albert Kabar, fait prisonnier lors de la sortie
de Bir Hakeim et disparu en mer alors qu’il était transféré en Italie.
De même, lorsque l’on s’intéresse de plus près aux relations familiales existant entre
les volontaires, force est de remarquer que dans la liste des volontaires, certains
patronymes reviennent deux à quatre fois, traduisant les engagements en famille.
Au moins 26,24 % des volontaires rejoignent les rangs aux côtés d’un membre ou plus de
leurs familles122, dont un père et son fils. Nous insistons sur l’expression « au moins »
puisque la présence de cousins ne portant pas le même patronyme est avérée, ainsi qu’un
neveu et son oncle. Le cas le plus notable d’engagements familiaux est celui des
descendants de la famille Bambridge, dont le premier représentant, Thomas Bambridge,
né à Londres en 1801, arrive à Tahiti au début des années 1830. Parmi les volontaires du
bataillon issus de sa descendance figurent Jean-Roy et Thomas Bambridge (par ailleurs
neveux du maire de Papeete, Georges Bambridge), les frères William et Walter Grand,
Taero Taerea, ainsi que John Martin123. On retrouve d’autres représentants de la famille
Bambridge dans d’autres unités (Gaspard Coppenrath sert dans les Fusiliers Marins avec
lesquels il combat à Bir Hakeim) ou sur d’autres fronts (les frères Gérald et Michel
Coppenrath, fils d’un ancien combattant de 14-18, étudiants en Métropole au début de la
guerre, entrent au maquis « Joël » en 1943 pour échapper au STO). Le phénomène est
119
Témoignage non daté. Archives de l’Ordre de la Libération.
Rachid OULAHAL, Zohra GUERRAOUI et Patrick DENOUX, « Entre mémoire collective et émergence
diasporique, le cas des descendants d’Algériens en Nouvelle-Calédonie », Journal de la Société des
Océanistes, 147-2, 2018, p. 373.
121
Depuis reliée à l’île principale, l’île Nou, renommée Nouville, est aujourd’hui un quartier de Nouméa.
Les archives territoriales y sont d’ailleurs installées, à proximité immédiate des anciens bâtiments
pénitentiaires.
122
D’après notre propre recensement.
123
Ronald Quentin SMITH (dir.), The Bambridge family of Tahiti and the World, Volume II : descendants
of Amelia Elisa Bambridge, s.l., Ronald Q. Smith, 2010.
120
32
également observé chez les Calédoniens. En résumé, les engagements des volontaires du
Pacifique répondent largement à des logiques familiales, mais également à des logiques
de clan et de tribu, qui peuvent expliquer leur caractère massif. Ils s’opposent en cela aux
engagements de métropole et dans la résistance intérieure, où les résistants s’engagent de
façon isolée, mais partagent néanmoins avec eux l’idée que « “faire quelque chose”, ce
n’est pas alors résister au sens que le mot prendra graduellement, c’est se dire qu’il faut
agir avec des gens qui pensent comme soi. »124
Enfin, les relations entre Calédoniens et Tahitiens, au sein du bataillon, font l’objet
de déclarations parfois contradictoires. Le point de vue dominant dans l’historiographie
consultée s’accorde avec la rivalité ancestrale opposant les habitants des deux territoires,
« cette animosité sourde, ce mépris réciproque, ce fossé qui sépare habituellement les
Nordiques des Méridionaux »125. L’accueil réservé aux Tahitiens lors de leur escale à
Nouméa en mai 1941, où ils arrivèrent avec un habillement sensiblement plus moderne
que celui de leurs camarades calédoniens (dont les uniformes remontaient à la Grande
Guerre) fut plutôt froid. Lors du séjour du bataillon à Sydney, l’on faisait « bande à
part »126 durant les permissions en ville. Le phénomène est également observé par les
aspirants, tels Jean Bellec qui note que « ils se bagarrent souvent entre eux, une vieille
rivalité paraît-il. Pour moi, c’est un signe de bonne santé. »127 De fait, de la création du
corps expéditionnaire à la fusion avec le 1er BIM, les quatre compagnies que compte le
bataillon ne sont pas mixtes. Les 1ère et 2ème compagnies sont composées des volontaires
néo-calédoniens
et
néo-hébridais,
respectivement
commandées
par
les
lieutenants Guillaumet et Perraud ; les 3ème et 4ème comptent dans leurs rangs les
volontaires polynésiens, avec à leurs têtes le lieutenant Desprès (le sous-lieutenant
Robert Hervé étant son adjoint) et le sous-lieutenant Gilbert128.
À l’inverse, les quelques témoignages de soldats à notre disposition semblent
démontrer que les officiers ne sont pas les seuls à échapper à ce schéma d’opposition, de
par leur statut. Les moments de camaraderie et de fraternité ne manquent pas, entre parties
124
Sébastien ALBERTELLI, Julien BLANC et Laurent DOUZOU, La lutte clandestine en France. Une histoire
de la Résistance 1940 – 1944, Paris, Seuil, 2019, p. 24.
125
François BROCHE, Le Bataillon des guitaristes, op. cit., p. 166-167.
126
Ibid., p. 176.
127
Archives de l’Ordre de la Libération.
128
Service Historique de la Défense, GR 12 P 273.
33
de football et représentations artistiques, la musique des Tahitiens, vue d’un mauvais œil
à leur arrivée à Nouméa, finissant par être quelque peu appréciée. Le caporal Gaston
Rabot note dans son journal, à la date du 29 août 1941, que « les Tahitiens chantent et
dansent ; tout le monde est content » 129. Raoul Michel-Villaz écrit quant à lui, à la date
du 2 août 1941 : « les Tahitiens jouent de la guitare. On s’amuse jusqu’à 11 heures du
soir. »130 Dans l’ensemble de ces témoignages de soldats, si les volontaires ont tendance
à appeler leurs camarades venant de l’autre côté du Pacifique « Tahitiens » ou
« Calédoniens », il convient de ne pas oublier que le bataillon compte plusieurs centaines
d’hommes dans ses rangs, qu’un second contingent le rejoint à l’été 1943 et que le BP1
puis le BIMP sont composés de plusieurs compagnies, ceci ne favorisant pas toujours la
proximité. Il nous semble ainsi que l’opposition latente entre les volontaires tend à se
dissiper au cours du conflit, au profit d’une fraternité et d’une cohésion favorisée par la
traversée des mêmes épreuves liées à la guerre, et que les vieilles dissensions
n’empêchent en rien les rapprochements individuels.
129
Gaston RABOT, Journal de guerre d’un caporal du bataillon des guitaristes, éd. François BROCHE et
Yvette QUELEN-BUTTIN, Paris, L’Harmattan, 2019, p. 91.
130
Archives de la Nouvelle-Calédonie, 1 J 44.
34
2.
LES HERITAGES DE LA GRANDE GUERRE : LE POIDS DU PASSE
Si la place des colonies françaises du Pacifique dans la Seconde Guerre mondiale
n’a été que peu abordée par l’historiographie, le cas échéant de façon parcellaire, la
Grande Guerre dans ces territoires fait l’objet d’études plus complètes et plus larges : sur
la Polynésie, l’historienne Corinne Raybaud a dédié son mémoire de maîtrise aux
« Établissements Français d’Océanie pendant la Première Guerre mondiale », publié en
2011131. Concernant la Nouvelle-Calédonie, l’historienne Sylvette Boubin-Boyer a
réalisé sa thèse de doctorat sur le premier conflit mondial dans l’archipel132, puis une
étude sur les « Révoltes, conflits et guerres mondiales en Nouvelle-Calédonie et dans sa
région »133.
En 1916, un Bataillon Mixte du Pacifique avait été levé pour aller combattre en
Europe. Dans ses rangs combattirent près de mille hommes ; les chiffres précis varient,
de 1062 soldats dont 20 officiers selon Corinne Raybaud134 à 1137, pour citer
Alban Bensa135. Seulement, à la différence du bataillon de 1941, ces soldats sont en quasitotalité issus du recrutement et de la conscription. Ils s’illustrèrent en Champagne, sur le
Chemin des Dames et en Salonique. Cité à l’ordre de la Xe armée en décembre 1918, le
Bataillon Mixte du Pacifique est officiellement dissous le 19 mai 1919 et rapatrié dans
les semaines suivantes. Les combats comme les retours s’avérèrent particulièrement
difficiles pour les insulaires, victime des climats inhospitaliers, des violents combats et
du racisme inhérent à la colonisation.
Pendant ce temps, en Nouvelle-Calédonie, un conflit meurtrier avait éclaté en 1917
en réponse au recrutement de soldats que les Kanak refusaient, mais également aux
logiques coloniales contradictoires appliquées par les Européens, que sont « l’injonction
au progrès et le mépris des colonisés, l’exaltation de l’amour du prochain et le rejet des
131
Corinne RAYBAUD, Les Établissements Français de l’Océanie pendant la Première Guerre Mondiale
(1914-1918), Papeete, Mémoire du Pacifique, 2011.
132
Sylvette BOUBIN-BOYER, « De la première guerre mondiale en Océanie : Les guerres de tous les
Calédoniens », thèse de doctorat en Anthropologie historique sous la direction de Paul de Deckker,
Université de Nouvelle Calédonie, Nouméa, 2001.
133
Sylvette BOUBIN-BOYER, Révoltes, conflits et guerres mondiales en Nouvelle-Calédonie et dans sa
région, Paris, L’Harmattan, 2008.
134
Corinne RAYBAUD, Les Établissements Français de l’Océanie pendant la Première Guerre Mondiale,
op. cit., p. 82.
135
Alban BENSA et al., Les sanglots de l’aigle pêcheur. Nouvelle-Calédonie, op cit., p. 41.
35
Kanak hors de toute citoyenneté, les appels simultanés entre 1914 et 1918 à la paix dans
la colonie (malgré les injustices) et à la guerre en Métropole contre une nation pourtant
chrétienne, elle aussi. »136
Si Jean-François Muracciole a mis en lumière l’importance des engagements
familiaux dans la France Libre (sans pour autant que les familles n’aient « constitué un
puissant vecteur de politisation »137), ce point est particulièrement vrai dans les territoires
du Pacifique. Il l’est d’autant plus que ces territoires furent directement touchés par la
Grande Guerre138, en dehors de l’envoi de troupes en Europe. En effet, en plus de la
Guerre Kanak, notons que Papeete fut bombardée par deux croiseurs allemands139 le
22 septembre 1914140, le Scharnhorst et le Gneisenau, appartenant à une flotte alors basée
dans le nord de la Chine. Son commandant, l’amiral von Spee, avait en apprenant la
déclaration de guerre décidé de regagner l’Allemagne via le Chili en détruisant autant de
navires alliés que possible sur son chemin141. Par ailleurs, l’empire colonial allemand
comprend alors des territoires dans le Pacifique, notamment la Nouvelle-Guinée et les
Samoa. Les populations des EFO et de Nouvelle-Calédonie étant sensiblement moins
nombreuses qu’en Métropole et les cercles étant ainsi plus restreints, les témoignages et
les souvenirs des vétérans de 14-18 circulent et se répandent plus facilement. Les jeunes
de 1940, soit la génération suivante, les fils et les neveux des Poilus océaniens, sont ainsi
marqués par leurs récits des tranchées et désirent les « venger »142. Le moyen le plus
évident est alors de rejoindre le corps expéditionnaire du capitaine Broche.
Le Bataillon du Pacifique va ainsi permettre de poursuivre et d’ancrer, par la
seconde participation des territoires concernés à un conflit mondial, une tradition
guerrière, une « mémoire kanak résistante »143 découlant de la guerre de 1917, qui
remonte aux affrontements armés de la colonisation dans les années 1840, et qui se
poursuit jusqu’à nos jours avec la présence du Régiment d’Infanterie de Marine du
136
Alban BENSA et al., Les sanglots de l’aigle pêcheur. Nouvelle-Calédonie, op cit., p. 16
Jean-François MURACCIOLE, Les français libres, op. cit., p. 209
138
Voir notamment : Sarah MOHAMED-GAILLARD, « L’Océanie et la Grande Guerre », dans Histoire de
l’Océanie de la fin du XVIIIe siècle à nos jours, Paris, Armand Colin, 2015, p. 117-127.
139
Voir : Didier DESTREMAU, Septembre 1914, jours de guerre à Tahiti. Les fausses notes du clairon, Paris,
Les Éditions du Pacifique, 2014.
140
Il existe à Papeete une rue du 22 septembre 1914, non loin du marché.
141
Corinne RAYBAUD, Les Établissements Français de l’Océanie pendant la Première Guerre Mondiale,
op. cit., p. 20-21.
142
Henri WEILL, Tahiti, France libre, op. cit., p. 106
143
Alban BENSA et al., Les sanglots de l’aigle pêcheur, op. cit., p. 15.
137
36
Pacifique – Polynésie (RIMaP-P), basé à Arue (Tahiti), et du Régiment d’Infanterie de
Marine du Pacifique – Nouvelle-Calédonie (RIMaP-NC), basé à Plum, dont nous avons
visité le camp lors de notre voyage à Nouméa en septembre 2019. Les volontaires de 1940
se placent donc dans le sillage de leurs aînés et reprennent leur héritage.
Ceci étant dit, une question se pose, et non des moindres. En l’espace d’une
vingtaine d’années, on passe d’un engagement obligatoire voire forcé (par la mobilisation
générale et la conscription) provoquant des réactions plus ou moins fortes en 1915-1917
à un volontariat massif en 1940. L’article de l’anthropologue Anne-Christine Trémon144
sur les catégories sociales de la période coloniale dans les EFO (1880 – 1945)145 peut
apporter une piste de compréhension. En effet, ne manquant pas de souligner le caractère
à part de la colonie, qui « déroge largement au schéma juridico-politique le plus répandu
dans l’Empire, selon lequel les droits politiques sont réservés aux seuls citoyens, tandis
que les sujets en sont exclus »146,147, il souligne deux phases dans cette période : la
première, allant de 1880 à 1897, voit un élargissement dans l’attribution des droits
politiques aux autochtones, notamment du droit d’élire leurs représentants. La seconde, à
partir de 1897, voit à l’inverse se développer une « restriction des droits politiques »148 :
réduction du nombre de représentants élus au Conseil Général des EFO, suppression du
droit de vote pour certains archipels (notamment aux Tuamotu), etc. La Grande Guerre
débute ainsi dans une période où les élites européennes et polynésiennes (la catégorie des
« demis »), qu’Anne-Christine Trémon évoque en parlant « d’élite blanche », accaparent
la vie politique du territoire, alors même qu’un débat avait été ouvert une quinzaine
d’année plus tôt sur la possibilité pour les EFO d’élire un député149. Il est ainsi aisé de
percevoir les réticences des Polynésiens à partir combattre pour une puissance ayant
limité leurs droits politiques. À l’inverse, dans les années 1930, la représentativité locale
144
Anne-Christine Trémon a soutenu sa thèse de doctorat à l’EHESS sur les Chinois en Polynésie Française
en 2005 et enseigne actuellement à l’Université de Lausanne (Suisse).
145
Anne-Christine TREMON, « Citoyens indigènes et sujets électeurs. Statut, race et politique dans les
Établissements français de l’Océanie (1880-1945) », Genèses, 91-2, 2013, p. 28-48.
146
Ibid., p. 31.
147
À noter également qu’à compter de 1880, les habitants de ce qui était jusqu’alors le royaume des Pomare
(Tahiti, Moorea, les Tuamotu et une partie des Australes) deviennent citoyens. Les habitants du reste des
EFO demeurent sujets jusqu’en 1945 (Ibid., p. 29-30).
148
Ibid., p. 38.
149
L’article s’ouvre sur une citation d’une lettre adressée par le gouverneur des EFO au ministre des
colonies en date du 2 août 1897 : « Les électeurs des Établissements Français de l’Océanie sont formés à
la vie publique beaucoup mieux que ceux de nos autres colonies et peut-être même que certaines régions
de la France ».
37
repart à la hausse, de nouvelles institutions voient ou revoient le jour comme les
Délégations Économiques et Financières (DEF), créées en 1932 et où sont représentés
Tahiti et les différents archipels, ainsi que le Conseil Privé du gouverneur, rétabli la même
année après avoir été supprimé en 1912 (bien que le gouverneur, pour citer Francis
Cheung, « détien[ne] la quasi-totalité des pouvoirs »150). Les autorités se mettent alors à
exprimer un désir accru de représentation à l’échelle nationale. L’article souligne dans sa
conclusion que « en 1936, les quatorze conseillers des DEF expriment à l’unanimité le
vœu que "les citoyens des EFO soient traités sur le même pied d’égalité que les Français
de France." »151. Partir combattre en 1940 permet ainsi de porter plus haut ce message et
de relancer le débat sur la possible élection d’un député et l’attribution de la citoyenneté
à l’ensemble des autochtones, aussi bien dans les EFO qu’en Nouvelle-Calédonie, ce qui
n’était alors pas possible en 1915-1916. Ainsi, en 1940, lorsque le grand chef de Maré,
Henri Naisseline, premier chef kanak à soutenir la France Libre, amenait 80 volontaires
avec lui à Nouméa, ce « don » appelait selon la coutume un « contre-don », celui attendu
ici étant justement la citoyenneté. Henri Naisseline adressa à cet effet un télégramme au
général de Gaulle lui faisant clairement part de ses attentes, en écrivant : « Je vous
[demande] de donner l’assurance qu’en reconnaissance de notre geste et le sacrifice de la
vie de ceux qui, là-bas vont sûrement tomber, qu’il nous soit donné la faculté d’accéder
au titre de citoyen français »152. Son message sera entendu : la fin de la Seconde Guerre
mondiale verra ainsi s’achever la période coloniale dans le Pacifique, les EFO et la
Nouvelle-Calédonie accèdent au statut de Territoires d’Outre-Mer, élisent leurs premiers
députés et sénateurs, et voient attribuée la citoyenneté à tous leurs habitants sans
distinction.
150
Francis CHEUNG, Tahiti et ses îles, op. cit., p. 57.
Anne-Christine TREMON, « Citoyens indigènes et sujets électeurs. », op. cit., p. 45.
152
Cité dans Jean-Marc REGNAULT et Ismet KURTOVITCH, « Les ralliements du Pacifique en 1940 »,
op. cit., p. 87.
151
38
II. Une unité en construction, 1941 – 1942
1.
L’AUTORITE AU SEIN DU BP1 : DES RAPPORTS HIERARCHIQUES FRANÇAIS LIBRES
Sur le non-conformisme dans la France Libre, malgré la forte diversité
d’expériences vécues (on ne vit en effet pas les mêmes que l’on soit dans la Marine,
l’aviation, le BCRA, l’armée de terre, etc.), Jean-François Muracciole fait la remarque
suivante :
« Si, toutefois, on tente d’approcher la culture militaire des
Français libres, le premier sentiment qui s’impose est le nonconformisme. Certes, tout rituel militaire n’a pas disparu, […]
pourtant, un style de vie décontracté et fraternel s’est vite imposé, très
éloigné de la stricte discipline et de la rigoureuse observation des
marques extérieures de respect en vigueur dans l’armée traditionnelle.
[…] Il en résulte, à l’exception des officiers d’active, une attitude
distanciée vis-à-vis de l’institution militaire. Discipline librement
consentie, proximité entre soldats et gradés, relâchement des marques
de respect, fraternité et esprit de camaraderies s’imposent dans tous les
témoignages. »153
Au sein du Bataillon du Pacifique, on observe que ce constat est de rigueur. Il est un
élément qui contribue grandement à l’expliquer, selon nous, à savoir le fait qu’un grand
nombre de volontaires se connaissaient déjà avant la guerre, entretenant des relations
professionnelles, amicales ou familiales. En 1941, les EFO sont peuplées de
51 221 âmes154, et la Nouvelle-Calédonie d’environ 54 000155 ; ces relativement faibles
populations, ajoutées aux faibles superficies de ces territoires, favorisent les contacts
humains, encore plus qu’en métropole ou que dans d’autres colonies. À titre de
comparaison, les Établissements Français de l’Inde (EFI)156, dont la taille est très
sensiblement inférieure157, comptent près de 299 000 habitants en 1936 dont 63 % à
153
Jean-François MURACCIOLE, Les français libres : l’autre résistance, op. cit., p. 235-236.
Francis CHEUNG, Tahiti et ses îles, op. cit., p. 519.
155
Jean-Marc REGNAULT et Ismet KURTOVITCH, « Les ralliements du Pacifique en 1940 », op. cit., p. 73.
156
Les EFI se rallient à la France Libre le 7 septembre 1940.
157
La superficie des territoires émergés des EFO est de 2 400 km², dispersés sur 2 500 000 km² (autant que
le continent européen), l’île principale de la Nouvelle-Calédonie mesure approximativement 500 km par
154
39
Pondichéry, et plus de 324 000 en 1941158. De même, la très grande majorité des
volontaires étant issues des classes populaires, l’appartenance à un même milieu a pu
créer voire renforcer des liens. Ensuite, les engagements familiaux ont également joué un
rôle important dans la cohésion entre les volontaires pendant la guerre, au-delà des
différences de grades. À titre d’exemple, William Grand reste soldat de 1ère classe pendant
toute la guerre tandis que son frère Walter, sous-officier, gravit les échelons jusqu’au
grade d’adjudant. Jean-Roy Bambridge sera un temps caporal pendant que son frère
Thomas reste 1ère classe ; à son tour promu caporal peu après, Thomas Bambridge est
porté disparu à Bir Hakeim et déclaré mort, son corps n’étant jamais retrouvé après la
sortie. En dehors des liens familiaux, l’exemple de Gaston Rabot, caporal puis caporalchef, mentionnant plusieurs sorties et permissions en compagnie de l’adjudant Édouard
Magnier (également auteur d’un journal de guerre) et d’autres camarades, mérite d’être
souligné.
Les tutoiements et la proximité apparaissent ainsi fréquents, outrepassant les
différences de grades, marques de la continuité de ces sociabilités d’avant-guerre. Comme
pour la résistance intérieure, les rapports au passé ne disparaissent pas entièrement, au
contraire. De la même manière, à l’image des FFL, le Bataillon du Pacifique est composé
de civils engagés pour la durée de la guerre uniquement. La France Libre apparaît ainsi
comme une « société militaire » à part, rejoignant la distinction effectuée par le
sociologue François Gresle entre l’institution militaire et la société militaire159 (bien que
son article sur la « société militaire » soit centré sur « son devenir à la lumière de la
professionnalisation »). Certes il existe une hiérarchie, une autorité, mais elles ne sont pas
aussi strictes que dans une armée traditionnelle. Ces liens entre troupe et cadres seront
renforcés par l’expérience du conflit, où les gestes et les contacts plutôt informels relèvent
d’une « pratique empirique de l’autorité », dont parle Emmanuel Saint-Fuscien160 en
prenant exemple sur les officiers de la Grande Guerre pansant les blessures de leurs
subordonnées. Pour les survivants du BP1, l’existence d’une Association des Engagés
60 km (soit environ 30 000 km²), tandis que les Établissements Français de l’Inde couvrent à peine 510 km²
(Balveer ARORA, « Les établissements français de l’Inde », Revue française de science politique, 18-2,
1968, p. 362).
158
Jacques WEBER, Pondichéry et les comptoirs de l’Inde après Dupleix : la démocratie au pays des castes,
Paris, Denoël, 1996, p. 347.
159
François GRESLE, « La “société militaire” », Revue française de sociologie, 44-4, 2003, p. 777-798.
160
Emmanuel SAINT-FUSCIEN, À vos ordres ?, op. cit., p. 87.
40
Volontaires de la France Libre en Nouvelle-Calédonie vient également le confirmer ; ses
archives, conservées aux Archives Territoriales, commencent dès 1944161.
Par ailleurs, le tableau ne serait pas complet sans que ne soit évoqué le premier chef
de corps du bataillon. Né le 5 avril 1905 à Marseille, Félix Broche commence à travailler
très jeune : il quitte la France pour le Dahomey en 1923162, à peine âgé de 18 ans, poussé
par son désir d’aventures, et y passe trente-deux mois comme employé à la Compagnie
française de l’Afrique occidentale. Il refuse la dispense de service militaire accordée aux
jeunes français résident dans les colonies163 et rejoint le 22e régiment d’infanterie
coloniale à Aix-en-Provence164 comme 2e classe, en avril 1926. Il intègre ensuite l’école
militaire de Saint-Maixent et se classe 137e sur 1008 au concours d’officier de réserve
avec d’excellentes notes et appréciations165. Sous-lieutenant de réserve le 15 mai 1927,
lieutenant de réserve deux ans plus tard, il sert à Tunis au sein du 10e Régiment de
Tirailleurs Sénégalais à compter de 1929 et devient sous-lieutenant d’active le 1er octobre
1930, l’année de son mariage. Il est promu lieutenant à la fin d’août 1932, en même temps
qu’il est envoyé servir au 1er Régiment Mixte de Madagascar où il reste jusqu’en 1934,
avant de retourner à Tunis. Affecté à Fréjus en mars 1938, promu capitaine le
25 septembre166, sa dernière affectation en temps de paix est à la tête de la Compagnie
Autonome d’Infanterie Coloniale de Tahiti (CAICT), où il arrive deux mois avant
l’ouverture des hostilités, au tout début de juillet 1939. Dès lors167, il s’applique à
entretenir une forte proximité avec ses hommes, se promenant à cheval avec son
ordonnance, le soldat William Grand, dans la vallée de la Papenoo168, célébrant Noël avec
les soldats et leurs familles, gagnant ainsi leur confiance et les surnoms de « papa Félix »
et du « Metua169 ». De fait, il semblerait que cette dévotion entourant Félix Broche au
sein du bataillon du Pacifique émane surtout des Tahitiens, en raison de cet antécédent.
Le ressenti des volontaires calédoniens paraît en effet différent, ce que l’on peut
161
Archives territoriales de la Nouvelle-Calédonie, fonds 31 J. Des dossiers individuels d’ex-volontaires
contenant leur correspondance avec l’association (et d’autres pièces diverses) sont conservés dans les
dossiers 31 J 19, 31 J 20, 31 J 21 et 31 J 22, les bornes chronologiques extrêmes étant 1944 – 2003.
162
François BROCHE, Le bataillon des guitaristes, op. cit., p. 27.
163
Ibid., p. 27-28.
164
Service Historique de la Défense, GR 8 YE 63556.
165
Ibid.
166
Ibid.
167
S’il existe des sources faisant état des relations entre Broche et ses hommes avant son arrivée à Tahiti,
nous n’en avons pas eu connaissance.
168
François BROCHE, Le bataillon des guitaristes, op. cit., p. 38.
169
« Père » en langue tahitienne.
41
notamment expliquer, à notre sens, par la différence sensible de durée entre le séjour de
Broche à Tahiti, de juillet 1939 à octobre 1940, soit 16 mois, et celui à Nouméa
d’octobre 1940 à mai 1941, seulement 7 mois, à l’occasion de sa nomination par de
Gaulle comme chef des troupes dans le Pacifique170. Un séjour plus court, marqué par la
guerre et par l’entrée encore toute récente de la Nouvelle-Calédonie dans les rangs de la
France libre, donc en quelques sortes plus « agité », n’est sans doute pas pour favoriser
les relations de proximité entre Broche et les volontaires calédoniens, autant qu’elles l’ont
été en Polynésie. Dans une lettre adressée à son ami Yves Malardé à Papeete171
(probablement datée d’octobre ou novembre 1941, en tous cas postérieure à sa promotion
au grade de lieutenant-colonel), Félix Broche écrit : « il faut compter, aussi, avec la
susceptibilité des Calédoniens qui m’ont toujours reproché de trop aimer les Tahitiens,
alors que j’ai toujours été juste et impartial. Vous voyez que j’ai un commandement
délicat. »172
Malgré des critiques voilées formulées par le caporal calédonien Gaston Rabot dans
son journal de guerre173, la vision plus que positive qu’a son entourage de Félix Broche
demeure très vive, notamment en raison de son non-conformisme. Il est en effet largement
décrit comme tel, sans que cela n’ait une connotation négative. Au contraire, ce nonconformisme permit de renforcer la confiance mutuelle partagée par Broche, officier de
carrière, et ses hommes, engagés dans l’armée pour la seule durée de la guerre.
Dans un témoignage non daté, très probablement rédigé en 1941, Jean Bellec écrit
au sujet de son nouveau chef de corps174 :
170
Télégramme no 72 du 24 septembre 1940 : « Veuillez rejoindre immédiatement Nouméa par avion
– stop – Vous désigne comme commandant supérieur des troupes sous les ordres du haut-commissaire
M. Sautot stop – Transmettez-moi d’urgence état des propositions d’avancement dès que vous aurez rejoint.
Général de Gaulle » (Archives de l’Ordre de la Libération).
171
Reproduite dans François BROCHE, Le bataillon des guitaristes, op. cit., p. 229-231
172
Ibid., p. 230.
173
Il écrit par exemple à la date du 19 juillet 1941 : « Conférence par le commandant Broche dans la salle
de cinéma. Son discours est plein de vérité, mais je crois qu’il est un peu tard pour fraterniser avec ses
soldats. […] Il veut absolument garder le Bataillon à son grand complet pour le combat, chose qui lui aurait
été facile s’il avait pris contact avec ses hommes bien avant. Maintenant, il est un peu tard, chacun veut
rentrer dans une spécialité et laisser tomber l’état-major. »
Gaston RABOT, Journal de guerre d’un caporal du bataillon des guitaristes, op. cit., p. 58.
174
Archives de l’Ordre de la Libération.
42
« Broche est un type ouvert, qui dégage une immense chaleur
humaine. […] Il a sur les hommes une autre autorité que l’autorité
militaire ce qui explique qu’on le trouve trop doux sur le plan
strictement militaire. Il a aussi une autorité politique et morale. […]
Après tout, il y a trente-six façons de commander, chacun commande
avec son tempérament. L’essentiel est de réussir. La preuve : Broche !
[…] Toujours d’après Favreau, qui a l’air bien renseigné, le Haut
Commandement aurait dans l’idée d’enlever le bataillon du Pacifique
à Broche, qui serait nommé Lieutenant-Colonel et envoyé à Londres.
Mais il sera impossible de lui enlever son Bataillon. Je n’ai jamais vu
un chef de corps avoir à ce point la confiance de ses hommes. »
Cette « autre autorité » à laquelle l’aspirant Bellec fait référence, cette « autorité
politique et morale », joua pour beaucoup dans le maintien du moral et de la combativité
des « Pacifiens » à Bir Hakeim et renforcent leur confiance en leur chef. Dans un texte
daté du 9 juin 1942175, Jean-Roy Bambridge note :
« Nouveau message, après celui de De Gaulle. Larminat télégraphie
au Vieux Lapin176 qu’il nous envoie à tous le témoignage de son
admiration et de sa fervente amitié, et il termine en disant : "Vive la
France et vive les soldats qui se battent pour la libérer". C’est bien
pour ça que nous sommes là, le Colonel nous l’avait bien dit à Tahiti et
nous l’avions suivi parce que nous avions tous confiance en lui, et il ne
nous a pas trompés. C’est cela qui fait que nous, les Pacifiens, nous ne
regrettons pas une minute d’avoir quitté Tahiti… »
La nomination attendue de Broche au grade supérieur, qui survient le 1er octobre
1941, constitue une menace pour la cohésion du bataillon : en effet, il n’est pas dans les
usages de l’armée française de confier un bataillon à un lieutenant-colonel, contrairement
à l’armée britannique. C’est pourquoi Félix Broche n’accepta sa promotion qu’à la
condition de pouvoir rester à la tête de son unité, ce qui lui fut accordé177 par le général
175
Archives de l’Ordre de la Libération.
Surnom du général Koenig, chef de la 1ère Brigade Française Libre.
177
François BROCHE, Le bataillon des guitaristes, op. cit., p. 225-226.
176
43
de Larminat178. À la tête du bataillon du Pacifique, Broche sut montrer qu’en dépit du fait
qu’il fût un officier d’active, et bien qu’il gardât une certaine autorité, il sût montrer la
décontraction et l’attitude distanciée vis-à-vis de l’institution militaire décrites par JeanFrançois Muracciole comme constitutive de l’identité FFL. En témoigne notamment un
événement survenu alors que le bataillon était cantonné à Alep (Syrie), en
novembre 1941, relaté par François Broche dans Le bataillon des guitaristes :
« Un après-midi, le lieutenant-colonel décida d’emmener son
bataillon jusqu’aux confins syro-turcs, à une cinquantaine de
kilomètres au nord-est d’Alep, pour des manœuvres très particulières.
Ils s’avancèrent gaillardement jusqu’au poteau frontière. “Je veux, dit
le colonel, que mes Pacifiens puissent rentrer chez eux en disant, làbas, qu’ils ont été pisser en Turquie !” Il était épanoui à l’idée de ce
haut fait. Sous une bise glaciale, il accueillit avec malice les
véhémentes protestations du garde-frontière turc, qu’il feignait de ne
pas comprendre. […] Alerté, l’officier français des Affaires indigènes,
un capitaine de spahis au superbe dolman rouge, accourut, furieux,
mais sa colère tomba devant les cinq galons. […] L’indignation
franchement comique du garde-frontière les avait largement payés
d’une longue marche. Il y avait tout de même eu un incident de frontière
en temps de guerre, qui valut à son unique responsable une semonce
officielle de la part du général de Larminat. »179
Bien que les chefs de corps suivants n’entretiennent pas le même rapport avec les
soldats du BIMP, les relations entre gradés et soldats demeurent très bonnes durant toute
la guerre. Sur les quatre questionnaires que nous avons adressés aux familles des vétérans
au sujet de l’expérience combattante de leurs parents nous ayant été retournés, à la
question « entretenait-il de bonnes relations avec ses camarades ? Avec ses supérieurs ? »,
tous les quatre apportent une réponse positive. Deux d’entre eux emploient même le terme
178
Le général Edgard de Larminat (1895 – 1962) est l’adjoint du général Paul Catroux (1877 – 1969),
commandant en chef des FFL au Levant.
179
François BROCHE, Le bataillon des guitaristes, op. cit., p. 226-227.
L’épisode est également raconté par Benjamin Favreau (Compagnon de la Libération, Paris, Geste, 2011,
p. 171-172) et mentionné par Gaston Rabot dans son journal (entrée du 18 novembre 1941, p. 144).
44
« excellentes »180. Elles n’en demeurent pas moins très peu couvertes par les sources et
l’historiographie, d’où la nécessité de recourir aux questionnaires.
2.
TRANSPORTS ET ENTRAINEMENTS
La période allant du départ du corps expéditionnaire en avril-mai 1941 à la
campagne de Tunisie, s’étant achevée par la capitulation des troupes germano-italiennes
le 13 mai 1943, a largement été couverte par les témoignages et les journaux de guerre
des volontaires. Les Calédoniens Gaston Rabot, Roger Ludeau, Édouard Magnier et
Raoul Michel-Villaz, ainsi que le Tahitien Jean-Roy Bambridge ont ainsi produit de
longues pages sur ces quelques mois. Le transport des volontaires du Pacifique au MoyenOrient, comprenant leur période d’entraînement à Sydney, est ainsi largement
documentée, notamment lorsque l’on y rajoute les documents administratifs, rapports et
autres notes de service. Jusqu’à l’installation du bataillon à Bir Hakeim, l’unité enchaîne
les déplacements, les phases d’entraînement et les réorganisations.
Les mois d’avril et mai 1941 sont ceux des départs en grande pompe. Le 21 avril, le
départ du contingent polynésien est organisé en présence de l’ensemble des autorités
locales et d’une foule très nombreuse. Plusieurs discours sont prononcés, notamment par
Georges Spitz, membre du « Comité France Libre », et du chef Teriieroo a Teriierooiterai,
qui s’expriment en langue tahitienne. À Nouméa, la réunion des deux contingents est
actée, une prise d’arme est organisée en présence du gouverneur Henri Sautot, du
capitaine Broche, du maire et du gouverneur général Richard Brunot, envoyé en mission
d’inspection dans le Pacifique par le général de Gaulle181. Le 5 mai 1941 à quatorze
heures, le Zélandia quitte Nouméa avec à son bord l’ensemble du corps expéditionnaire
mené par le capitaine Broche, et atteint Sydney quatre jours plus tard.
Le Bataillon du Pacifique cantonne alors au camp de Liverpool, en banlieue de
Sydney, dont les installations, sommaires, datent de la Première Guerre mondiale.
180
Rappelons que ces questionnaires sont remplis par des membres des familles des vétérans et non par les
vétérans eux-mêmes, disparus parfois depuis fort longtemps. Néanmoins, les quatre questionnaires
retournés furent remplis par des descendants de la génération suivante, trois par un fils ou une fille et le
dernier par un neveu.
181
Voir photographies en annexe.
45
L’entraînement y est pour le moins complet et organisé selon un emploi du temps fixé
par le chef de bataillon. Débutant le lundi 19 mai 1941, il comprend le matin une marche,
une séance de tir et une séance de sports, ou trois séances pratiques (de 8h à 8h45, de 9h
à 9h45 et de 10h à 10h45), et l’après-midi une séance d’instruction théorique de 14h à
14h45, une séance pratique de 15h à 15h45, puis à nouveau une séance pratique de 16h à
16h45182. Il est également prévu que quelques gradés et spécialistes ainsi que les élèves
des cours spéciaux soient envoyés aux centres ou écoles d’instruction du camp183.
Cette organisation de l’entraînement n’est que théorique, prévu par une note de
service datée du 19 mai 1941. Dans les faits, les volontaires bénéficient fréquemment de
permissions pour se rendre hors du camp et aller visiter Sydney, facilement accessible en
train électrique. La note de service ne fait également pas mention des longues marches de
vingt-cinq à cinquante kilomètres, organisées par le commandant Broche184. Toujours
dans les faits, l’accent fut mis sur les séances de sport et la théorie. Pour citer François
Broche :
« L'entraînement à Liverpool Camp fut, pour ainsi dire, nul au point
de vue militaire. Ils n'avaient touché 600 fusils que plusieurs semaines
après leur arrivée, malgré les demandes constamment renouvelées et
les promesses prodiguées. […] Ils n'avaient pu effectuer qu'une seule
séance de tir, à 100 yards et à 200 yards. Les résultats ont été excellents
et ont surpris les autorités australiennes. Le bataillon a participé à une
manœuvre avec engins blindés. Et c'est strictement tout. »185
Tant et si bien que le jour du départ vient clôturer un séjour australien relativement
peu fécond militairement parlant. Le 27 juin 1941, le bataillon s’embarque sur le Queen
Elizabeth à destination du Moyen-Orient. Près de sept mille soldats au total,
essentiellement australiens, prennent place dans le plus grand navire transatlantique du
182
Note de service « Instruction et entraînement », 19 mai 1941. Service Historique de la Défense,
GR 12 P 273.
183
Ibid.
184
Extrait du journal de Roger Ludeau cité dans François BROCHE, Le bataillon des guitaristes, op. cit.,
p. 176-177.
185
François BROCHE, Le bataillon des guitaristes, op. cit., p. 180.
46
monde (313 mètres de long, sept ponts)186. La traversée se passe sans encombre,
agrémentée de séances de cinéma, de parties de cartes, de matchs de boxe ; le caporal
Rabot mentionne dans son journal des leçons de morse. La discipline est strictement
appliquée et fait l’objet de rapports reprenant les règles à suivre par l’ensemble des
personnels, produits dès le départ de Sydney187.
À partir de son arrivée au Moyen-Orient, le bataillon est réorganisé, la répartition
en deux compagnies calédoniennes et deux compagnies tahitiennes plus une section de
commandement cesse d’exister. À compter du 28 août 1941, le bataillon est composé
d’un état-major, d’une section de commandement, de trois compagnies de fusiliers
voltigeurs et d’une compagnie lourde comprenant une section de canons de 75, une
section de mortiers de 81 et d’une section de canons de 25. L’unité compta également,
pendant un temps, une compagnie de chars dotés de 13 véhicules, des Renault 35 ;
cependant, afin d’éviter que le bataillon ne soit éclaté et ses volontaires répartis dans
diverses autres unités, les chars sont retirés au bataillon à la mi-décembre, à la demande
du lieutenant-colonel Broche188. Fin septembre 1941, le Bataillon du Pacifique devient
un bataillon moto-mécanisé et se voit armée de mousquetons, pistolets, fusils mitrailleurs,
mitrailleuses et mitraillettes, ainsi que de fusils anti-tanks ; l’artillerie quant à elle se
compose de mortiers, de canons de 25 mm et de 75 mm189. S’y ajoutent six
automitrailleuses et plus de quatre-vingt-dix véhicules en tous genres, de la voiture
sanitaire au camion de transport, 28 motos et les 13 chars190, soit plus de 140 véhicules
au total. Il s’agit là d’un armement et d’une dotation en matériel et en véhicules très denses
compte tenu de l’équipement dont dispose l’ensemble de la brigade, d’une importance
supérieure à la norme des FFL en termes de volume191.
D’abord cantonné à Qastina (Palestine), le bataillon rejoint ensuite la Syrie, trop tard
pour participer à la campagne opposant Français Libres et troupes vichystes, et cantonne
à Damas, puis Alep, et enfin Lattaquié. C’est au Moyen-Orient que le bataillon achève
son entraînement et son instruction, cette fois de manière intensive et complète. Il fallait,
186
Jean-Christophe SHIGETOMI, Tamari’i Volontaires, op. cit., p. 177.
Rapport du 1er juillet 1941, Service Historique de la Défense, GR 12 P 273.
188
Journal de Jean-Roy Bambridge, entrée du 16 décembre 1941.
189
François BROCHE, Le bataillon des guitaristes, op. cit., p. 225.
190
Ibid., p. 225.
191
Équipement de la 1ère BFL, Service Historique de la Défense, GR 11 P 250.
187
47
conformément aux ordres du général de Larminat, que le bataillon fût opérationnel au
plus vite. Sur ce point, les résultats se montrent positifs dans l’ensemble, rattrapant les
lacunes de l’entraînement australien. Jean Bellec reconnaît ainsi les qualités au tir des
volontaires, témoignant que « on leur a quand même appris à tirer, et ils ne tirent pas si
mal, fort bien même. Il paraît que ce n'est pas si fréquent. »192
Le jour de la Saint Sylvestre 1941, la 1ère Brigade Française Libre du général Koenig
entre en Égypte, puis en Lybie le 5 janvier 1942. La brigade, que Jean-Louis CrémieuxBrilhac appelle à juste titre « un condensé de tout ce que sont les Forces Françaises Libres,
avec ces hommes venus de partout »193, présente une diversité d’armes et d’origines
illustrant la variété des territoires et des parcours ralliés à la France libre : en son sein, les
Pacifiens côtoient deux bataillons de Légion Étrangère, les soldats maghrébins de la
22e compagnie nord-africaine, le Bataillon de Marche no 2 formé en Oubangui-Chari, le
1er BIM, le 1er Régiment d’Artillerie, le 1er bataillon de Fusiliers Marins et divers services,
notamment médicaux. Le 17 janvier, alors que la brigade s’apprête à attaquer le
lendemain la position germano-italienne du col d’Halfaya, fortement défendue, la
garnison dépose les armes et se rend en masse, permettant aux Français libres de faire
5600 prisonniers dont deux généraux194. Seuls quelques coups de canon sont tirés. Cet
affrontement sporadique s’apparente pour les volontaires à un baptême du feu manqué et
alimente la frustration. Édouard Magnier note dans son journal : « C’est la poisse pour un
baptême du feu »195. L’événement sera rapidement oublié puisque dès la mi-février, la
brigade s’installe sur une position dont le nom est passé à la postérité : Bir Hakeim.
192
François BROCHE, Le bataillon des guitaristes, op. cit., p. 243.
Jean-Louis CREMIEUX-BRILHAC, La France Libre, Paris, Gallimard, 1996, p. 355.
194
Journal de Raoul Michel-Villaz. Archives territoriales de la Nouvelle-Calédonie, 1 J 44.
195
Journal d’Édouard Magnier, Archives territoriales de la Nouvelle-Calédonie, 1 J 53.
193
48
III. Le Bataillon du Pacifique au combat, 1942 – 1944
Par ses actions lors des différents combats jalonnant son parcours, le Bataillon du
Pacifique se forgera très tôt une réputation de bataillon d’élite, se retrouvant
régulièrement en première ligne, du désert libyen au territoire français.
1.
LES PACIFIENS DANS LE DESERT
Pour le Bataillon du Pacifique, la Guerre du Désert représente, outre ses premiers
affrontements, la plus longue période de son engagement en temps de guerre, du début de
l’année 1942 jusqu’à la capitulation des forces de l’Axe en mai 1943. L’unité restera en
Afrique du Nord encore une année supplémentaire, jusqu’au printemps 1944 et son
embarquement pour l’Italie.
Le 16 février 1942, la brigade Koenig prend position à Bir Hakeim, point situé au
sud du dispositif de défense allié, visant à empêcher les forces de l’Axe d’atteindre
Le Caire et de mettre la main sur le canal de Suez. Dès lors, les Français Libres multiplient
les opérations de harcèlement de l’ennemi, avec pour objectif de détruire un maximum
de véhicules et de faire un maximum de prisonniers allemands et italiens. Les Pacifiens,
occupant le secteur sud-ouest de la position, s’illustrent dans ces opérations motorisées,
nommées Jock columns, qui rythment le quotidien et rompent la monotonie des longues
journées dans le désert, dans un calme relatif. Raoul Michel-Villaz relate dans son journal
que « les hostilités se bornent à des duels d’artillerie », ajoutant que « les obus de 105
allemands ne valent rien. Ils explosent sans faire d’éclats. »196 Il est intéressant de noter
les similitudes entre les grandes étendues désertiques du Sahara et celles de l’océan, où
l’on navigue à la boussole, au compas solaire et avec les étoiles ; la seule différence étant
que l’on y circule à pieds ou en camion. Les Pacifiens s’y distinguent ainsi tout
particulièrement et sont remarqués par le général Koenig197. C’est pourtant lors d’une de
ces sorties, le 4 avril 1942, que le bataillon recense son premier mort : le Tahitien
196
197
Journal de Raoul Michel-Villaz. Archives territoriales de la Nouvelle-Calédonie, 1 J 44.
François BROCHE, Le bataillon des guitaristes, op. cit., p. 250-251.
49
Kararo Tainui, né en 1906. Il est enterré sur place avec les honneurs militaires, en
présence du sous-lieutenant Podevigne198, aumônier catholique du bataillon199.
La bataille de Bir Hakeim200 à proprement parler ne commence qu’au soir du 26 mai
1942, alors que les forces germano-italiennes encerclent la position, commandés par le
général Rommel en personne. Bir Hakeim constituera le véritable baptême du feu des
Pacifiens, après l’épisode de Halfaya, en plus d’être un événement hautement symbolique
et l’occasion de mettre le bataillon à l’épreuve après son réarmement, sa réorganisation
et son renforcement en cadres. Bir Hakeim est en effet la première bataille où des Français
affrontent des Allemands sur le champ de bataille depuis l’été 1940.
Les chars italiens de la division Ariete attaquent le 27 mai au matin, ayant reçu
l’ordre de prendre la position en un quart d’heure : reçus par les canons antichars du
1er BIM, de la Légion Étrangère et du Bataillon du Pacifique, leur échec est total. Gaston
Rabot note dans son journal que cet affrontement résulte en la destruction de 34 chars sur
44 et la prise de 108 prisonniers. Jean-Louis Crémieux-Brilhac avance quant à lui les
chiffres de 33 chars détruits et 91 prisonniers201. Quoi qu’il en soit, parmi ces prisonniers,
figure le commandant du 132e régiment blindé de la division, le lieutenant-colonel
Pasquale Prestisimone, qui, à la surprise des Français, avait combattu en 14-18 de leur
côté et maîtrise parfaitement leur langue202. S’y ajoutent une quarantaine de morts côté
germano-italien. Malgré l’optimisme généré par l’échec de cette première attaque, la RAF
bombarde la position dans la soirée, trompée par les carcasses de chars italiens restés sur
le terrain, causant des pertes au bataillon203. Ces véhicules seront détruits par les
Légionnaires.
Le fait marquant de la bataille, pour le Bataillon du Pacifique, survient le 1er juin.
Malgré un déficit en véhicules (certains ayant été détruits), le bataillon quitte Bir Hakeim
198
Le Père Jean-Baptiste Podevigne (1902 – 1972) commence sa carrière ecclésiastique comme
missionnaire aux îles Salomon. À Nouméa en 1940, il se rallie aux FFL le 17 février 1941 et rejoint le
Bataillon du Pacifique comme aumônier catholique. Service Historique de la Défense, GR 16 P 482703.
199
Jean-Christophe SHIGETOMI, Tamari’i Volontaires, op. cit., p. 199.
200
La bataille de Bir Hakeim est assez largement couverte par l’historiographie. Voir notamment les deux
ouvrages de François Broche (2012 et 2019) et celui de Nicola Labanca et al. sur la guerre du désert (2019).
201
Jean-Louis CREMIEUX-BRILHAC, La France Libre, op. cit., p. 356.
202
Le Lt. Col. Prestisimone arbore parmi ses décorations la Légion d’Honneur et la Croix de Guerre 1418. Il sera évacué de la position avec le reste des prisonniers peu après.
203
Jean-Marie DALLET et al., Le Mémorial polynésien, vol. 6 : 1940-1961, Papeete, Hibiscus éditions, 1977,
p. 149.
50
pour aller occuper la position de Rotonda Signali, croisement de routes situé à une
centaine de kilomètres à l’ouest, accompagné d’éléments divers de la brigade dont des
artilleurs et des servants de DCA issus des Fusiliers Marins. L’ennemi semblant se replier,
Koenig ordonna qu’il fût poursuivi et confia la mission à Broche. Les attaques répétées
de la Luftwaffe occasionnent de nombreuses pertes malgré l’action de la DCA, qui
parvient à abattre quatre appareils de la Luftwaffe. Le Bataillon du Pacifique déplore à
cette occasion la mort d’un soldat tahitien et de Marcel Kollen, soldat calédonien touché
alors qu’il portait assistance à un camarade et qui sera fait Compagnon de la Libération à
titre posthume204. Bien que le détachement ne soit pas censé revenir à Bir Hakeim, le
général Koenig dut ordonner son repli205, pour deux raisons liées aux mouvements des
forces germano-italiennes. D’une part, la veille, une très importante colonne ennemie est
signalée au nord-est de Bir Hakeim. Deux officiers italiens viennent apporter une
demande de reddition au général Koenig, qu’il repousse. Ainsi, l’absence du Bataillon du
Pacifique et de ses plus de six-cents soldats (sur 3700 présents à Bir Hakeim) constitue
un danger. Ensuite, les Italiens menacent également de revenir encercler Rotonda Signali
et de détruire les Français libres s’y trouvant. Le Bataillon du Pacifique regagne ainsi Bir
Hakeim au matin du 3 juin, alors que l’encerclement germano-italien se referme sur la
brigade. La maîtrise de la langue tahitienne par les opérateurs radio permet alors de sauver
la colonne de la destruction, occasion pour les Pacifiens d’affirmer un peu plus leur
identité océanienne. François Broche relate l’événement, qui rappelle l’usage de la langue
navajo par les Américains pendant la guerre du Pacifique, dans un ouvrage récent
consacré à la bataille206 :
« En réalité, les Italiens ont fait mine d’abandonner la position. Les
Sud-Africains, qui patrouillent dans le secteur, préviennent Broche
qu’ils ne se sont pas éloignés et qu’ils sont en train de se regrouper. À
la tombée de la nuit, le mouvement de l’ennemi vers Rotonda est de plus
en plus prononcé. Broche flaire un piège. Il décide d’en informer
Koenig, en lui demandant des instructions, mais, pour éviter que
l’ennemi intercepte l’échange, il demande au Tahitien Jean Thunot de
204
Par décret du 29 mars 1943.
Un nouvel ultimatum parvient aux Français libres le 3 juin, cette fois écrit de la main du général Rommel.
206
François BROCHE, La cathédrale des sables, op. cit., p. 196.
L’histoire est également mentionnée par Jean-Christophe Shigetomi dans Tamari’i Volontaires (op. cit.,
p. 206), d’après un entretien avec John Martin.
205
51
décrire par phonie la situation en langue maorie à son ami André
Snow207, qui se trouve à Bir Hakeim et devra transmettre, dès que
possible, la réponse de Koenig. Celle-ci ne se fait pas attendre. Elle est
concise et percutante : "A hoi oioi mai !" Ce qui signifie : "Revenez
vite !" Les Italiens branchés sur la fréquence des Français maîtrisent
parfaitement le français, mais le maori leur demeure étranger. »
Jusqu’à la fin de l’affrontement, les forces de l’Axe lanceront plusieurs assauts
visant à s’emparer de la position, en vain. Les volontaires du BP1 se distinguent de
nouveau en menant de nombreux « coups de main » dans les lignes ennemies afin d’y
poser des mines, d’y détruire des canons ou d’en ramener prisonniers et renseignements.
Pour avoir mené avec succès plusieurs de ces sorties périlleuses, la première compagnie
recevra le surnom de « compagnie danger »208, et les aspirants André Salvat et Benjamin
Favreau seront cités après la bataille. Vers la fin du siège, le 7 juin, un groupe de six
Calédoniens parmi lesquels figure le caporal-chef Jean Tranape209 et menés par l’aspirant
Jean Bellec210 se distinguèrent à nouveau en faisant rentrer dans Bir Hakeim le dernier
convoi de ravitaillement de la bataille211. Sur une trentaine de camions, l’officier en
sélectionne la moitié jugés les plus essentiels, comprenant vivres, eau et quantité de
munitions pour les canons de 75 et de DCA212, permettant à la brigade de tenir trois jours
de plus.
Les derniers jours du siège sont les plus éprouvants pour l’ensemble de la brigade,
mais également pour le bataillon qui perd son chef de corps. Le 9 juin en fin de journée,
un obus allemand vient frapper le poste de commandement du Bataillon du Pacifique,
tuant le lieutenant-colonel Broche et son adjoint, le capitaine Gaston Duché de Bricourt,
et blessant au bras son ordonnance, le soldat William Grand. La mort du « Metua » est
durement ressentie par les volontaires, par les cadres comme par la troupe. Dans leurs
207
André Snow (1905 – 1949) sera cité à l’ordre du régiment.
Questionnaire retourné par M. Jean-Claude Tranape.
209
Jean Tranape (1918 – 2012) est ensuite nommé sergent le 1er novembre 1942, puis sergent-chef le
er
1 avril 1944. Compagnon de la Libération en novembre 1944, il termine la guerre à Paris et rentre en
Nouvelle-Calédonie par le « Sagittaire ».
210
Jean Bellec, tout comme André Salvat et Benjamin Favreau, sont également Compagnons de la
Libération.
211
Questionnaire aux familles retourné par M. Jean-Claude Tranape.
212
Pierre KOENIG, Bir Hakeim 10 juin 1942, Paris, Robert Laffont, 1971, p. 309.
208
52
journaux, Édouard Magnier, Gaston Rabot et Roger Ludeau témoignent de leur tristesse
en apprenant la perte de celui que Ludeau nomme le « père du Bataillon du Pacifique »213.
Dans un entretien avec François Broche, après la guerre, Robert Hervé affirmera : « c’est
comme si j’avais reçu une décharge électrique. »214 De fait, le Bataillon du Pacifique
cesse d’exister en tant que tel dès lors que la nouvelle parvient au général Koenig, le soir
même. Le BP1 et le 1er BIM, ayant subi d’importantes pertes, fusionnent sous le
commandement du chef de bataillon Jacques Savey, qui commandait le BIM depuis juin
1941. Savey ne conserve la charge des deux bataillons que pendant un peu plus de vingtquatre heures avant d’être tué à son tour lors de la sortie de vive force. Dans la nuit du 10
au 11 juin, la brigade rompt l’encerclement et évacue la position en passant par la
« porte » du Pacifique, c’est-à-dire par l’emplacement qu’occupait le bataillon, parvenant
à sauver les deux tiers de ses effectifs et la plupart de son matériel. Avec la Légion, les
volontaires du Pacifique sortent en tête.
Le bilan du Bataillon du Pacifique pour la bataille de Bir Hakeim est assez lourd.
Quatorze soldats meurent pendant le siège, puis autant pendant la sortie, soit vingt-huit
morts au total : en se basant sur les chiffres avancés par Jean-François Muracciole pour
l’ensemble de la brigade, soit 130 morts215, le bataillon en enregistre près d’un sur cinq.
Jean-Louis Crémieux-Brilhac avance pour sa part le chiffre de 171 morts entre le siège et
la sortie216. Quoi qu’il en soit, en considérant également les quinze Pacifiens qui trouvent
la mort lorsque le navire qui les emmène en captivité en Italie est torpillé et coulé par les
Britanniques217, les morts du bataillon à Bir Hakeim représentent le quart de celles de la
brigade.
La fusion du Bataillon du Pacifique et du BIM est officiellement actée le 16 juin
1942, pour donner naissance au Bataillon d’Infanterie de Marine et du Pacifique (BIMP).
Le chef de bataillon Eugène Alessandri prend le commandement de cette nouvelle unité
pendant deux semaines avant de passer la main au chef de bataillon Roger Bouillon, sous
le commandement duquel les Pacifiens retournent en Égypte, puis combattent lors de la
213
Roger LUDEAU, Les carnets de route d’un combattant du bataillon du Pacifique, op. cit., p. 86.
François BROCHE, La cathédrale des sables, op. cit., p. 276.
215
Jean-François MURACCIOLE, Les français libres, op. cit., p. 275.
216
Jean-Louis CREMIEUX-BRILHAC, La France Libre, Paris, Gallimard, 1996, p. 363.
217
Le navire Nino Bixio est coulé le 17 août 1942 en Méditerranée. Il transportait 7000 prisonniers alliés
capturés en Lybie dont 600 Français. D’après J.F. Muracciole, « 147 Français Libres et 400 Britanniques
périrent lors de ce naufrage » (op. cit., p. 275).
214
53
seconde bataille d’El Alamein, en octobre 1942. La documentation sur la participation du
BIMP à El Alamein est assez maigre ; les carnets de route de Roger Ludeau en font
mention et indiquent notamment que le bataillon y affronte à nouveau la division
Ariete218. Jean-Christophe Shigetomi y consacre également trois pages dans Tamari’i
Volontaires et rappelle l’importance de l’implication de l’artillerie qui occasionne de
sévères pertes. Engagée jusqu’au début du mois de novembre 1942, l’unité contribue à
réduire les dernières poches de résistance et se trouve de nouveau engagée dans de durs
combats.
Si El Alamein est une victoire alliée, la brigade échoue dans sa mission de s’emparer
le plateau de l’Himeimat tenu par l’Afrikakorps, en déplorant la mort, entre autres, du
lieutenant-colonel Dimitri Amilakvari, commandant la 13e DBLE et vétéran de
Bir Hakeim. Les Français Libres sont alors un temps tenus à l’écart par le général
Montgomery, jusqu’à ce que le général Catroux menace de rapatrier ses troupes vers le
Levant. « Monty » consentit alors à ce qu’une unité soit détachée à la 12ème brigade antiaérienne britannique « pour la défense des aérodromes au fur et à mesure de leur
occupation »219, mais également pour « la protection de sa propre personne et de son étatmajor »220. Le BIMP se retrouve ainsi engagé aux côtés des Britanniques dans la poursuite
des forces de l’Axe qui se replient vers l’ouest et fait la campagne de Tunisie en étant
intégré à la Force L du général Leclerc221, faisant sa jonction avec elle le 27 avril 1943222.
Le 13 mai 1943, les forces germano-italiennes cessent les hostilités, le BIMP faisant de
nombreux prisonniers223. Le reste de la 1e DFL reste pour sa part en Égypte.
Pour ses actions en Afrique du Nord, le BIMP sera cité à l’ordre des Forces Françaises
Libres par le général de Gaulle le 15 juin 1943, employant dès lors l’expression
« bataillon d’élite »224.
218
Roger LUDEAU, Les carnets de route d’un combattant du bataillon du Pacifique, Nouméa, s.n, 1946,
p. 109.
219
Jean-Christophe SHIGETOMI, Tamari’i Volontaires, op. cit., p. 226.
220
Jean-François MURACCIOLE, Les français libres, op. cit., p. 285.
221
Étrangement, le dossier de la Force L au Service Historique de la Défense (GR 11 P 21) fait mention de
la VIIIe Armée britannique mais pas du BIMP.
222
État Signalétique et des Services de Walter Grand, archives de l’auteur.
223
Journal de guerre de Raoul Michel-Villaz, entrée du 14 mai 1943. Archives de Nouvelle-Calédonie,
1 J 44.
224
Ordre général no 14 du 15 juin 1943. Archives de l’Ordre de la Libération.
54
2.
LE BIMP EN EUROPE : LES CAMPAGNES D’ITALIE ET DE FRANCE (1944)
Si, pour les volontaires océaniens, les années 1942 et 1943 sont synonymes de
Guerre du Désert, les années 1944 et 1945 sont résolument des « années européennes ».
La présence du BIMP en Europe peut être organisée en trois phases : premièrement, sa
participation à la campagne d’Italie, à compter du printemps 1944. Deuxièmement, une
période allant d’août à novembre 1944, s’ouvrant par le débarquement en Provence et
s’achevant par la relève coloniale, à la suite de laquelle la majorité des volontaires
« pacifiens » sont dirigés sur les arrières puis envoyés au repos à Paris, libérée depuis peu
par la division Leclerc, jusqu’à la fin de la guerre. Troisièmement, entre novembre 1944
et la capitulation allemande en mai 1945, le reste du BIMP combat en Alsace et dans le
massif de l’Authion avec une partie des effectifs d’origine du Bataillon du Pacifique, qui
rejoignent par la suite leurs camarades dans la capitale. Nous nous concentrerons ici sur
les deux premières phases.
À compter du 21 novembre 1943, le BIMP se voit doté d’un nouveau chef de corps
au profil atypique : Henri Magny. Né à Villepinte en 1910 d’un père polonais et d’une
mère française disparus durant la révolution russe, il est adopté par une institutrice,
Clothilde Magny, et intègre Saint-Cyr en 1929225. Fait prisonnier pendant les combats de
l’été 1940, il s’évade pour rejoindre son unité et combat en Syrie du côté vichyste avant
de rallier les Forces Françaises Libres le 12 août 1941226,227. Sous son commandement, le
BIMP connaît une nouvelle phase d’entraînement et est réorganisé en vue de son
engagement en Italie. Composée d’un état-major et de cinq compagnie (une compagnie
de commandement, une compagnie d’accompagnement, trois compagnies de fusiliersvoltigeurs)228, l’unité compte alors 846 hommes dont 29 officiers229 et est incluse à la
4e brigade du colonel Raynal (composée du BIMP, du BM 21 et du BM 24). Avec le reste
de la 1ère DFL du général Diego Brosset, entretemps renommée officiellement 1ère
Division Motorisée d’Infanterie (DMI)230, la 4e brigade est intégré au Corps
225
Service Historique de la Défense, GR 8 YE 67444.
Ibid.
227
À noter que Jean-François Muracciole (op. cit., p. 71) en fait une biographie succincte erronée, le faisant
naître en Pologne et adopter par une Mme F. Magny, alors que le nom complet de sa mère adoptive est
Clotilde Charlotte Clémence Magny (d’après son dossier individuel d’officier au SHD, cité ci-dessus).
228
Jean-Christophe SHIGETOMI, Tamari’i Volontaires, op. cit., p. 233.
229
Ibid.
230
Malgré ce changement, les soldats de la division, fidèles à leur identité gaulliste, continueront à employer
l’ancienne dénomination.
226
55
Expéditionnaire Français (CEF) en Italie du général Alphonse Juin231. Ce dernier est pour
sa part rattaché à la Ve armée américaine du général Mark Clark232.
Embarqué à Bône233 le 17 avril 1944, le bataillon débarque à Naples trois jours plus
tard234,235. Aux fortes chaleurs et aux vents de sable succèdent la pluie et la boue, aux
étendues plates du désert les reliefs escarpés des Apennins, et la rudesse des engagements
peut contribuer à expliquer que les journaux de guerre des volontaires soient plus
réservés, voire muets sur les combats en Italie. Gaston Rabot, rapatrié sur la NouvelleCalédonie suite à ses blessures, ne participe pas à la campagne. Jean-Roy Bambridge ne
mentionne que très sporadiquement l’Italie, sans réellement parler des combats. Seuls
Raoul Michel-Villaz et Roger Ludeau en parlent plus longuement et font des descriptions
concordantes, soulignant les difficultés du terrain et la présence en face d’eux de troupes
plus aguerries et mieux armées que celles affrontées dans le désert, Ludeau allant jusqu’à
noter que, durant la bataille du Garigliano, le bataillon affronte des troupes allemandes
ayant combattu à Stalingrad236 et perd près de la moitié de ses effectifs237. Cette dernière
affirmation est plausible : en effet, les trois quarts des morts des contingents originaux du
Pacifique tombent lors des campagnes d’Italie et de France. Comme le souligne JeanFrançois Muracciole, tandis que la guerre en Afrique est « peu coûteuse en vies
humaines »238, celle en Europe est bien plus meurtrière239 : la 1ère DFL y enregistre en
effet plus des deux tiers de l’ensemble de ses morts240.
En Italie, les Pacifiens perdent également leur chef de corps pour la troisième fois,
Henri Magny étant tué d’une balle de mitrailleuse lors d’une embuscade le 16 mai 1944.
L’engagement du BIMP dans le secteur de Cassino n’en demeure pas pour autant vain, le
bataillon confirme en effet sa valeur militaire en participant à l’attaque couronnée de
231
Le CEF n’est qu’une petite partie des troupes alliées engagées en Italie, ne comptant que 4 divisions sur
21 au total.
232
Jean-Louis CREMIEUX-BRILHAC, La France Libre, coll. « Folio Histoire », vol. 2, Paris, Gallimard,
2014, p. 949.
233
Actuelle Annaba, en Algérie.
234
État Signalétique et des Services de Walter Grand. Archives de l’auteur.
235
La campagne d’Italie est en cours depuis mars 1943.
236
Roger LUDEAU, Les carnets de route d’un combattant du bataillon du Pacifique, op. cit., p. 141-142.
237
Ibid., p. 144.
238
Jean-François MURACCIOLE, Les français libres, op. cit., p. 271.
239
Ibid., p. 277. L’auteur va même jusqu’à faire un parallèle avec les « hécatombes de la Grande Guerre ».
240
Plus précisément 67,5 %, soit plus de 2400 hommes (Ibid.)
56
succès du mont Girofano241, et en se retrouvant à la pointe du CEF (lui-même à la pointe
des troupes alliées). Il contribue avec ce dernier à enfoncer les ligne Gustav et Hitler242.
Rome étant libérée le 4 juin 1944, les Français y envoient un bataillon composite décrit
par Jean-Christophe Notin :
« Un seul bataillon hérite du privilège de cantonner dans la capitale
où il représentera la France. Pour le composer sans faire de jaloux,
chacune des quatre divisions du CEF fournit une compagnie. À la DFL,
c’est le bataillon d’infanterie de marine [et du Pacifique] qui est mis à
contribution. […] Les objectifs qui leurs sont assignés le 5 juin
semblent tout droit sortis d’un guide touristique. À la section Malfettes,
le Palais Farnèse ; à celle de Pillard, la villa Médicis. Delsol hérite de
Saint-Louis-des-Français, Bellec de la villa Borghèse. Les marsouins
entrent dans Rome après 21 heures. »243
La qualité de bataillon d’élite du BIMP est ainsi à nouveau reconnue et récompensée
par le commandement français.
Le débarquement en Normandie, le 6 juin, est alors accueilli avec un grand
enthousiasme par tout le CEF. En vue du second débarquement prévu en Provence dans
le cadre de l’opération Anvil, la 1ère DFL quitte le front italien pour être intégrée à la
1ère Armée du général de Lattre de Tassigny. Embarqués à Tarente le 7 août 1944, les
Pacifiens posent le pied sur le sol métropolitain à Cavalaire (Var) le 17 août, à J+2.
Immédiatement engagé, le bataillon prend d’assaut l’hôtel du Golf, à Hyères, le 21 août.
Le bâtiment de sept étages avait été transformé en forteresse par les Allemands, et sa
capture représentait une nécessité pour ouvrir la route de Toulon aux blindés. Le capitaine
Edmond Magendie244, successeur d’Henri Magny à la tête du BIMP, mène l’attaque et
241
1600 m. d’altitude.
Les lignes Gustav et Hitler sont des séries de fortifications érigées par les Allemands, traversant l’Italie
de la mer Tyrrhénienne à la mer Adriatique.
243
Jean-Christophe NOTIN, La campagne d’Italie, 1943-1945, op. cit., p. 548.
244
Edmond Magendie (1912 – 2000) a laissé un témoignage écrit narrant la prise du Golf Hôtel :
La prise du Golf Hôtel de Hyères le 21 août 1944 racontée par le général Edmond Magendie (BIMP)
[en ligne], Amicale de la 1e DFL, s.d., consulté le 11 juillet 2019.
242
57
enlève l’hôtel et en faisant plusieurs dizaines de prisonniers, avec des pertes limitées
(3 morts et 9 blessés selon Magendie245).
La remontée du bataillon vers le nord s’effectue en longeant le Rhône puis la Saône,
le faisant passer par Toulon, Nîmes, Lyon et Belfort. Les derniers combats des volontaires
Océaniens dans leur majorité ont lieu en Saône-et-Loire et en Haute-Saône où ils libèrent
plusieurs villages, jusqu’à Linexert où ces derniers sont relevés et dirigés sur les arrières
le 5 novembre 1944, laissant leur place à de jeunes FFI. Ils quittent ainsi le front pour
aller former jusqu’à septembre 1945 la 31e compagnie de QG, affectée à la garde de la
caserne des Invalides où siège le gouverneur militaire de Paris, poste occupé depuis le
1er octobre 1944 par le général Koenig246.
245
Edmond Magendie (1912 – 2000) a laissé un témoignage écrit narrant la prise du Golf Hôtel :
La prise du Golf Hôtel de Hyères le 21 août 1944 racontée par le général Edmond Magendie (BIMP)
[en ligne], Amicale de la 1e DFL, s.d., consulté le 11 juillet 2019.
246
Dossier d’officier général de Pierre Koenig. Service Historique de la Défense, GR 14 YD 424
(dérogation du 10 février 2020).
58
Partie 2 : La construction d’un groupe social organisé
I.
Les pratiques culturelles du Bataillon du Pacifique
1.
CROYANCES, COUTUMES ET MYTHOLOGIES
Au vu de la présence de protestants aussi bien que de catholiques dans ses rangs, le
bataillon compte à son départ un aumônier protestant, le caporal-chef Alfred Maruhi247,
et un aumônier catholique, le sous-lieutenant Jean-Baptiste Podevigne248,249. Ce dernier
est remplacé en juin 1942 par le père Jean Starcky250, qui officiait précédemment au
1er BIM, et qui après-guerre prends part aux fouilles menant à la découverte des
Manuscrits de la Mer Morte et à leur déchiffrement. Le père Podevigne rejoint quant à
lui les FAFL, affecté au groupe de bombardement Lorraine dans lequel combat alors
Romain Gary, et retourne dans le Pacifique après le conflit251.
S’il est difficile d’évaluer l’influence générale de la religion dans la décision de se
porter volontaire et de dresser une vision d’ensemble, les quatre évêques catholiques du
Pacifique français (des trois territoires ralliés à l’été 1940 et de Wallis-et-Futuna252) ayant
eu chacun une position différente253, on observe dans les EFO un clivage assez marqué
entre le clergé catholique, pro-Vichy et mené par un archevêque ouvertement pétainiste
(fait guère étonnant lorsque l’on connait les rapports entretenus entre Pétain et
l’Église254), et les pasteurs protestants qui s’engagent activement en faveur de la
France Libre. Leur action eut une incidence sur la présence répandue de protestants dans
le contingent polynésien. Lorsqu’on observe l’ensemble des Français libres, force est de
constater que les minorités religieuses de Métropole, à savoir juifs et protestants,
bénéficient d’une « très forte surreprésentation »255, bien qu’étant en général issus de
247
« Note de service - Réorganisation de l’encadrement du bataillon », 15 mai 1941, Service Historique de
la Défense, 12 P 273.
248
Ibid.
249
Jean-Baptiste Podevigne est nommé sous-lieutenant le 5 mai 1941, puis capitaine le 1er août 1942.
Service Historique de la Défense, GR 16 P 482703.
250
Jean Starcky (1909 – 1988) est Compagnon de la Libération par décret du 20 novembre 1944.
251
Jean-Baptiste Podevigne (1902 – 1972) reçoit la prêtrise en février 1929 et s’embarque en novembre de
la même année pour les îles Salomon où il part en mission. Présent en Nouvelle-Calédonie en septembre
1940, il se rallie à la France Libre et rejoint le corps expéditionnaire.
252
Wallis-et-Futuna ne bascule dans le camp gaulliste qu’en 1942.
253
Jean-Marc REGNAULT et Ismet KURTOVITCH, « Les ralliements du Pacifique en 1940 », op. cit., p. 83.
254
Voir par exemple : Jacques DUQUESNE, Les Catholiques français sous l’Occupation, Paris, Grasset,
1986.
255
Jean-François MURACCIOLE, Les français libres, op. cit., p. 166.
59
classes sociales élevées256. Ainsi, un peu moins de 5 % de l’ensemble des Français libres
sont de confession protestante, proportion à mettre en comparaison avec les 1,8 % de
l’ensemble de la population française à la veille de la guerre257. Si nous ne pouvons pas
donner de chiffre précis concernant le Bataillon du Pacifique, n’ayant pu consulter
l’ensemble des dossiers individuels des volontaires des deux contingents au SHD (dans
lesquels sont inscrits leurs confessions), il nous paraît raisonnable d’avancer l’hypothèse
que la proportion de protestants au BP1 dépasse de très loin les 5 %. Cette hypothèse est
confirmée par le dossier individuel de l’aumônier protestant du bataillon au SHD : noté
par le capitaine Courant, commandant la compagnie de commandement, ce dernier
précise que ses coreligionnaires représentent le tiers de l’effectif du bataillon258. Cette
appréciation étant datée de la Saint-Sylvestre 1942, si l’on considère les pertes
enregistrées jusqu’alors par le bataillon ainsi que ses effectifs à cette date, la proportion
de protestants de l’effectif d’origine dépasse les 40 %. Par ailleurs, dans leur article sur
les ralliements dans le Pacifique, Jean-Marc Regnault et Ismet Kurtovitch notent que
« dans un premier temps, dans les colonies, la volonté de continuer la lutte, c’est pour être
aux côtés de la Grande-Bretagne et pas forcément pour soutenir le général de Gaulle »259 :
outre la proximité avec l’Australie et la Nouvelle-Zélande, dominions britanniques, il
n’est pas impossible que les similitudes religieuses avec le Royaume-Uni anglican aient
pu influer dans le cas des EFO, colonie à grande majorité protestante (en 1940, les fidèles
catholiques ne sont que 11 586260 sur une population globale d’environ 50 000
personnes). En Nouvelle-Calédonie, l’archevêque, Mgr. Bresson, publie une déclaration
« équivoque »261 où il déclare que les fidèles se doivent de « rester au-dessus et en dehors
de tous les partis »262, en dépit de son assurance d’avoir soutenu le mouvement gaulliste
dès le départ lors de son entretien avec l’amiral Thierry d’Argenlieu263, à l’arrivée de
celui-ci en Océanie.
256
Jean-François MURACCIOLE, Les français libres, op. cit., p. 166.
Ibid., p. 167.
258
Service Historique de la Défense, GR 16 P 400457.
259
Jean-Marc REGNAULT et Ismet KURTOVITCH, « Les ralliements du Pacifique en 1940 », op. cit., p. 75.
260
Francis Cheung, Tahiti et ses îles, op. cit., p. 526.
261
Jean-Marc REGNAULT et Ismet KURTOVITCH, « Les ralliements du Pacifique en 1940 », op. cit., p. 83.
262
Georges DELBOS, L’Église catholique en Nouvelle-Calédonie. Un siècle et demi d’histoire, Paris,
Desclée, 1993 p. 371.
263
Jean-Marc REGNAULT et Ismet KURTOVITCH, « Les ralliements du Pacifique en 1940 », op. cit., p. 83.
257
60
Malgré le taux élevé de christianisation observé dans les territoires français du
Pacifique jusque de nos jours264, notons que les non-Européens y ont conservé un restant
de la culture précoloniale de leurs ancêtres autochtones. Comme le rapporte
l’anthropologue Bruno Saura, « les "districts" tahitiens et les îles continuèrent à évoluer
sans changement culturels majeurs au quotidien »265 après la colonisation française à la
fin du XIXe siècle. De même, en Nouvelle-Calédonie, où la tribu apparaît comme une
entité administrative reconnue à la fin de l’année 1867266, « la christianisation fait
disparaître les pratiques "païennes" les plus manifestes, mais les usages, relevant aussi
bien de la culture populaire que du suivi du calendrier météorologiques, ont pour la
plupart perduré jusqu’à nos jours »267. Il suffit, pour s’en rendre compte, de lire cet extrait
du discours prononcé par le chef de Papenoo, Teriieroo a Teriierooiterai, le jour du départ
des volontaires tahitiens, le 21 avril 1941 : « aujourd’hui, la terre tahitienne s’anime. Les
esprits de la vallée et les esprits de la mer sont à nos côtés pour la lutte et les dieux
farouches qui hantes les montagnes de l’Aoraï et de l’Orohena sont descendus vers nous
pour nous soutenir dans la grande bataille… Le vent se lève, c’est le grand vent de guerre
des Maoris. Jusqu’à la victoire, nous ne penserons plus qu’à la guerre ! »268
L’engagement des volontaires est ainsi en partie dû au rôle joué par les chefs, dont
l’influence fut considérable. Les chefs coutumiers et les chefs de district en Polynésie (au
nombre de 97 en 1941, dont 43 dans les îles de la Société269) tiennent en effet une position
privilégiée de contact avec la population autant qu’avec les autorités ; à ce titre, il
convient de voir en eux, en quelque sorte, les garants de l’application des règles coloniales
sur le territoire. En ce 14 juillet 1940, lorsqu’Émile de Curton rencontrait les notables, les
réponses qu’il reçut des chefs de districts montrent l’idéal de bravoure et de combativité
du guerrier polynésien, qui ne peut se rendre sans avoir combattu, tout en reconnaissant
l’importance d’aller défendre la France contre l’envahisseur. « Les Prussiens n’ont pas
vaincu les Maoris…nous pouvons encore nous battre pour notre pays »270, lui avait-on
264
Voir par exemple : Yannick FER et Gwendoline MALOGNE-FER, Anthropologie du christianisme en
Océanie, Paris, L’Harmattan, 2009.
265
Bruno SAURA, Tahiti Mā’ohi : culture, identité, religion et nationalisme en Polynésie française, Pirae,
Au vent des îles, 2008, p. 54.
266
Isabelle LEBLIC, « Chronologie de Kanaky Nouvelle-Calédonie (1774-2018). Version revue et
augmentée en 2018 », Journal de la Société des Océanistes, 147-2, 2018, p. 530.
267
Frédéric ANGLEVIEL, La France aux antipodes. Histoire de la Nouvelle-Calédonie, Paris, Vendémiaire,
2018, p. 67.
268
Jean-Christophe SHIGETOMI, Tamari’i Volontaires, op. cit., p. 5.
269
Francis CHEUNG, Tahiti et ses îles, op. cit., p. 508.
270
Émile DE CURTON, Tahiti 40, op. cit., p. 56.
61
dit. Ainsi, les chefs polynésiens en 1940 se situent dans la continuité du rôle joué par les
chefs d’autrefois, sur lesquels reposaient la décision de partir en guerre. Ce rôle
traditionnel est décrit par des travaux de chercheurs en ethnologie et en anthropologie dès
les années 1930, tels Robert Wood Williamson dans ses Essays in Polynesian
ethnology271 (dont la première édition, achevée en 1932, est parue à titre posthume en
1939), ou encore le pasteur protestant et missionnaire Maurice Leenhardt, qui publie ses
Notes d’ethnologie néo-calédonienne272 en 1930. Les travaux plus récents viennent
réactualiser ces propos, notons par exemple ceux, de premier plan, d’Alban Bensa273.
De plus, le rôle des chefs est non seulement social, mais également fortement
politique, comme le fut l’action d’Henri Naisseline en Nouvelle-Calédonie au moment
du ralliement. À Tahiti, le chef du district de Papenoo, Teriieroo a Teriierooiterai, orateur
reconnu et artisan du ralliement, se verra même décerner la Croix de la Libération par
décret du 28 mai 1943274. Une citation de John Martin rapportée par François Broche
démontre l’étendue du rôle des chefs :
« J’ai revu Walter Grand l’autre jour. Après avoir fini son service
militaire, il est parti sur une goélette. Il est rentré à pic pour apprendre
l’armistice. […] Walter a demandé au chef Teriieroo s’il connaissait le
capitaine Broche. Teriieroo lui a répondu : "Je suis sûr qu’on peut lui
faire confiance. On ne peut pas rester sans continuer la lutte, il mènera
le Tahitien là où il doit aller." Il paraît que les chefs, maintenant, font
signer des pétitions à tour de bras. Pour de Gaulle ou pour Pétain ?
C’est à la population des districts de décider. »275
La fin de la guerre apporte ainsi son lot de changements sociaux, notamment grâce
à l’engagement des volontaires autochtones dans le Bataillon du Pacifique : en NouvelleCalédonie, le travail sous contrat est aboli et le droit de vote est élargi aux femmes et à
271
Robert W. WILLIAMSON, Essays in Polynesian ethnology, 2e éd., New York, Cooper Square Publishers,
1939, rééd. 1975.
272
Maurice LEENHARDT, Notes d’ethnologie néo-calédonienne, 2e éd., Paris, Institut d’Ethnologie du
Musée de l’Homme, 1930, rééd. 1980.
273
Voir par exemple : Alban BENSA et Isabelle LEBLIC (dir.), En pays Kanak, Paris, Éditions de la Maison
des sciences de l’homme, 2000.
274
Édouard Ahnne est décoré par le même décret. Archives de l’Ordre de la Libération.
275
François BROCHE, Le Bataillon des guitaristes, op. cit., p. 98 - 99
62
certains Kanak occupant un statut particulier, tels les pasteurs, les chefs et les anciens
combattants276, premier pas vers un octroi pur et simple de la citoyenneté. Dans les EFO,
cet octroi arrive dès l’année 1945, en même temps que la création d’une Assemblée
territoriale, d’un siège de député et d’un autre de sénateur277.
Outre les coutumes et les hiérarchies traditionnelles, il est également possible que
la mythologie ait joué un rôle dans la constitution du bataillon. Sur ce point, nous
souhaitons citer le général Koenig, qui dans la préface qu’il rédigea pour Le bataillon des
guitaristes de François Broche, écrit en parlant du lieutenant-colonel Broche : « je
témoigne que [ses soldats] l’adoraient. Il était pour eux la Providence, ni plus ni moins.
Nombreux étaient ceux qui voyaient en lui la réincarnation d’un de ces dieux légendaires
de la Polynésie qui, naguère, avait entrainé leur peuple dans de lointaines aventures
guerrières… »278 La cosmogonie polynésienne est en effet marquée par la présence de
plusieurs dieux et déesses liés à l’activité guerrière, le dieu ‘Oro étant considéré comme
la plus importante divinité du panthéon tahitien279.
Rappelons cependant que ces dernières remarques concernent avant tout les
volontaires Polynésiens et Kanak, présents dans le contingent tahitien et le second
contingent néo-calédonien, le premier étant composé de Calédoniens Blancs, en d’autres
termes d’ascendance européenne. Cette part de la population calédonienne, notent JeanMarc Regnault et Ismet Kurtovitch dans leur article, se positionne globalement en faveur
du ralliement : ne pouvant élire de sénateur et de député à cette époque, elle tend en effet
à prendre ses distances avec le gouvernement, donc à refuser l’armistice280. Un manifeste
rédigé par des notables statue que la population blanche estime ainsi ne pas être liée « par
les signatures de reddition d’un parlement ou d’un gouvernement quelconque »281. Ce
statut politique particulier peut ainsi tenir lieu d’explication (parmi d’autres) de
l’engagement des Néo-Calédoniens dans la France Libre et dans les rangs du Bataillon
du Pacifique.
276
Musée de la Seconde Guerre mondiale en Nouvelle-Calédonie (Nouméa), visite du 21 septembre 2019.
Bruno SAURA, Tahiti Mā’ohi, op. cit., p. 57.
278
François Broche, Le bataillon des guitaristes, op. cit., p. II.
279
Robert D. CRAIG, Dictionnary of Polynesian mythology, Westport, Greenwood Press, 1989, p. 266.
280
Jean-Marc REGNAULT et Ismet KURTOVITCH, « Les ralliements du Pacifique en 1940 », op. cit., p. 7576.
281
Idem, citant ledit manifeste paru dans le journal Le Bulletin du Commerce du 27 juillet 1940.
277
63
Tout ce bagage cultuel et culturel que portent les volontaires fait partie intégrante
de l’identité du bataillon. Le journal de Gaston Rabot montre qu’hors des périodes de
combats, la messe a lieu tous les dimanches, tant pour les catholiques que pour les
protestants, et que les Pacifiens s’y rendent nombreux. En outre, nous reviendrons plus
loin sur les rapports et l’intérêt que portent les volontaires à la vie politique de leurs
territoires en leur absence, en tenant compte des difficultés de communication
augmentées par la guerre.
64
2.
LA MUSIQUE ENTRE IDENTITE, SYMBOLIQUE ET PROPAGANDE
Il est impossible de mener une étude du Bataillon du Pacifique sans s’intéresser à la
pratique de la musique dans ses rangs. Cette dernière lui a par ailleurs valu le surnom de
« bataillon des guitaristes » de la part des Britanniques, surnom passé à la postérité
jusqu’à nos jours, véhiculé notamment par l’ouvrage de François Broche. Les principaux
concernés étant les Tahitiens, nous nous concentrerons ici sur eux. Notons malgré tout le
fait qu’un récital donné par une quinzaine de volontaires néo-calédoniens à Paris à
l’automne 1945 fit l’objet d’un texte publié dans le second numéro du Journal de la
Société des Océanistes282.
À travers la musique, les volontaires affirment leur culture d’insulaires océaniens,
s’inscrivant dans la longue tradition orale régissant la transmission des savoirs et des
traditions. Comme le rappelle l’anthropologue Robert Craig :
« N’ayant pas de langue écrite, les anciens Polynésiens
transmettaient leurs histoires mythologiques, leurs chansons, leurs
prières, leurs histoires, leurs généalogies, leurs connaissances
astronomiques et géographiques, leurs comparaisons et autre
littérature d’une génération à l’autre à travers les chants. Ces derniers
tenaient une place vitale dans la vie quotidienne en Polynésie, et
presque tout le monde, des grands chefs aux classes les plus basses
avaient l’occasion d’en faire usage. »283
Il en est de même pour les Kanak en Nouvelle-Calédonie, malgré la plus grande
variété linguistique de l’archipel (il existe en effet 28 langues kanak284, et, si seules cinq
langues polynésiennes sont employées en Polynésie Française285, on en dénombre 25 au
total286). La musique permet également aux volontaires de créer leur propre culture
282
Patrick O’REILLY et Jean-Albert VILLARD, « Autour de la musique des Néo-Calédoniens. », Journal de
la Société des océanistes, 2-2, 1946, p. 93-107.
283
Robert D. CRAIG, Handbook of Polynesian mythology, Santa Barbara, ABC Clio, 2004, p. 230.
Il s’agit là de notre propre traduction, l’ouvrage étant rédigé en anglais.
284
Christine PAULEAU, « Le français calédonien (Nouvelle-Calédonie). Description d’un français régional,
confrontations de terrains panfrancophones », Langages, 203, 2016, p. 7.
285
Le tahitien, le marquisien, le paumotu (parlé dans les îles Tuamotu), le rapa et le mangarévien.
286
Robert D. CRAIG, Handbook of Polynesian mythology, op. cit., p. 15.
65
militaire à travers la composition, l’écriture et l’interprétation de chants inédits, créés lors
du parcours du bataillon, ou l’adaptation de chants traditionnels. Ainsi, nous pouvons
avancer trois raisons à la composition et à l’interprétation musicale chez les Pacifiens.
La première d’entre elles s’inscrit dans un contexte guerrier à proprement parler.
Les soldats jouent de la musique pour célébrer une victoire comme ce fut le cas après
l’échec de l’attaque de la division Ariete à Bir Hakeim, pour atténuer la dureté des
combats ou pour rendre hommage à un camarade, comme ce fut le cas après la mort de
Kararo Tainui, premier volontaire à être tué au combat en avril 1942. La musique permet
d’introduire de la convivialité dans la violence des affrontements, de renforcer la cohésion
et la fraternité entre les volontaires, et tend même à effacer les hiérarchies. Ainsi, le
lieutenant-colonel Broche n’avait pas hésité à inviter le général Koenig, son supérieur
direct, à le rejoindre parmi ses hommes afin de partager un repas et un moment autour
des guitares, en pleine bataille de Bir Hakeim (invitation à laquelle le général répondit
favorablement)287.
La seconde raison, intrinsèquement liée à la première, est l’expression du
patriotisme et de la volonté de combattre des volontaires, qui marquent ainsi leur
appartenance à la France Libre. L’hymne Tamari’i Volontaires, écrit et composé en 1940
le caporal-chef Pea Tutehau, laisse transparaître la motivation qui anime les volontaires
dès l’instant de l’engagement. Ce chant est aujourd’hui entré dans les traditions du
Régiment d’Infanterie de Marine du Pacifique – Polynésie (RIMaP-P), stationné à Tahiti
et l’une des deux unités avec le RIMaP-NC en Nouvelle-Calédonie héritières du BP1, qui
l’entonne lors du traditionnel défilé militaire du 14-Juillet à Papeete288. Il est également
possible d’évoquer un autre niveau d’appartenance, celle aux troupes de marine (on parle
de troupes coloniales jusqu’à la fin des années 1950). D’après Adeline Poussin, « le chant
militaire devient une référence commune à l’ensemble de l’unité, favorisant ainsi
l’identification et la cohésion de ses membres »289, dans le cadre de l’établissement de
rituels spécifiques. Dans un cadre encore plus large, le corpus de morceaux musicaux
utilisés lors des cérémonies (lors des départs de 1941 par exemple) mêle hymnes
287
François BROCHE, Le bataillon des guitaristes, op. cit., p. 294.
Nous en avons réalisé un enregistrement vidéo lors de notre voyage à Tahiti à l’été 2018.
289
Adeline POUSSIN, « Le chant militaire et sa pratique actuelle dans les Troupes de Marine », thèse de
doctorat en ethnomusicologie sous la direction de Luc Charles-Dominique et Marlène Belly, Université de
Nice Sophia-Antipolis, Nice, 2014, p. 457.
288
66
nationaux, marches militaires et chants locaux. Le jour du départ du contingent tahitien,
le 21 avril 1941, La Marseillaise est jouée en même temps que l’hymne britannique
God Save the King, la Marche Lorraine, et le chant d’adieu polynésien Te Mauruuru
Avau290,291. La Marseillaise est à nouveau jouée au départ à Nouméa292.
Tableau 1 : Paroles et traduction du chant « Tamari’i Volontaires »293
Paroles originales
Traduction
Matou teie Tamarii volontaires
O ta oe i titau mai nei
Te farii nei matou i te ture
No to tatau hau metua
Nous sommes les enfants volontaires
À qui tu as fait appel
Nous acceptons la loi
Celle de la mère patrie
Teie mai nei to mau Tamarii
O ta oe i titau mai nei
Tei nia roa tona taura
Te vahi o te pohe
Nous voici tes enfants
À qui tu as fait appel
Où se trouve sa renommée,
C’est le chant de la mort
De nombreux morceaux écrits et composés par Jean-Roy Bambridge, musicien
notable du bataillon, vont également dans ce sens. Ces derniers sont partagés et chantés
avec ses camarades ; « vous pouvez avoir la musique en demandant à tout Tahitien »294,
écrit-il dans son journal en date du 21 avril 1941. S’en suivent trois chants dont le
« Tamari’i Volontaires », et un morceau de Bambridge intitulé « Tamari’i Tahiti »
(« enfants de Tahiti »)295, véritable hymne martial appelant à « refuser la sujétion » et à
« combattre le sauvage ennemi ». Dans cette même veine patriotique, un groupe de
musiciens du bataillon, dont fait d’ailleurs partie Jean-Roy Bambridge, mène une tournée
de propagande en Afrique du Nord, qui les fait passer entre autres par le gala de l’Empire
à Alger, à Bône (actuelle Annaba), Constantine, Philippeville (actuelle Skikda), Sabratha
290
Adeline POUSSIN, « Le chant militaire et sa pratique actuelle dans les Troupes de Marine », op. cit.,
p. 162.
291
Le chant Te Mauruuru Avau est écrit et composé par l’Américain Eddie Lund (1909 – 1973), installé à
Tahiti depuis 1938 et auteur-compositeur d’un grand nombre de chansons en tahitien passées à la culture
populaire.
292
François BROCHE, Le bataillon des guitaristes, op. cit., p.169.
293
D’après un document numérique conservé au Service du Patrimoine Archivistique et Audiovisuel
(Papeete) et la traduction de Jean-Christophe Shigetomi dans son ouvrage Tamari’i Volontaires (op. cit.)
294
Journal de guerre de Jean-Roy Bambridge, 21 avril 1941.
295
Ibid.
67
(Libye), Tunis où ils jouent le 20 août 1943 aux côtés de Joséphine Baker296, Sfax et
Hammamet297. Outre le partage de la culture polynésienne, des chants et danses en faisant
partie, ces tournées sont avant tout l’occasion de sensibiliser le public à la cause française
libre.
La troisième raison est le passage du temps dans les moments d’attente ou
d’inactivité. La musique permet alors de remplir les « temps morts ». De nombreux
morceaux sont notamment écrits et composés lors des trajets réalisés en bateau,
notamment sur le Monowai, qui emmène les Tahitiens à Nouméa, et le Queen Elisabeth
qui transporte les « Pacifiens » de Sydney à Suez. Le Service Historique de la Défense à
Vincennes conserve un document sur lequel est retranscrit un chant composé par les deux
frères Piirani, réunis en une formation musicale qu’ils nommèrent les « Piirani Brothers »,
et chanté le 14 juillet 1941 :
Tableau 2 : Paroles et traduction du chant « Queen Elizabeth »298
Paroles originales
Traduction
Ua hiti terara avae
I nia Elitapeta e
Ua tapoi hia ite ata
Te ata poiri e
Ua tahirihiri noa mai
Te hupe note moana rae
Ua turorirori to tino itie
Aue hoi te aroha e
La lune s’est levée
Baignant le "Queen Elizabeth"
Par instants des nuages sombres le couvrent
De leur voile noir.
Et cependant le navire vibre
Au souffle de l’océan
Et gracieux son corps frémit à la caresse de la brise
Le jour et la nuit.
Aue te aroha o Elitapeta
I te faauraa ite toetoe
Rurutaina to tino itie
I te po ete ao
O pauvre "Elisabeth"
Ton étrave fend la mer froide
Ton corps vibre et frémit sans cesse
Le jour et la nuit
296
Sur l’engagement dans la France libre de Joséphine Baker, voir : Charles ONANA, Joséphine Baker
contre Hitler : la star noire de la France libre, Paris, Duboiris, 2006.
297
Journal de guerre de Jean-Roy Bambridge.
298
Service Historique de la Défense, GR 12 P 273.
68
Cette troisième raison concerne notamment la période allant de février à mai 1942,
entre l’installation de la brigade Koenig à Bir Hakeim et le début de la bataille. Pour citer
François Broche :
« Les Pacifiens ne se rendaient pas du tout compte de l’intérêt
stratégique de Bir Hakim. Les officiers savaient simplement que la
brigade Koenig était le dernier chaînon d’une vague ligne générale
nord-sud, la charnière la plus méridionale. […] À la solitude naturelle
du désert, s’ajoutait l’isolement relatif de la brigade dans le vaste et
lâche dispositif stratégique allié. […] Ce fut une petite vie tranquille,
jusqu’à ce que la chaleur arrive. Les hommes se réunissaient sous les
tentes et jamais peut-être davantage que dans cette période d’attente le
bataillon du Pacifique ne mérita son surnom de bataillon des
guitaristes… »299
Elle concerne également le séjour parisien, où les « Pacifiens » subissent une
fort longue attente avant la fin de la guerre et leur rapatriement. En effet, étant sur place
de novembre 1944 à septembre 1945 soit presque une année entière, les musiciens du
bataillon profitèrent de l’occasion pour courir les cabarets et les salles de concert pour s’y
produire, aux côtés de grands noms du jazz tels Django Reinhardt ou Joe Bouillon. De
même, des clichés pris par le photographe Émile Savitry300 montrent les Tahitiens jouant
de la guitare dans leurs chambres de la caserne Latour Maubourg301.
299
François BROCHE, Le bataillon des guitaristes, op. cit., p. 242-243.
Émile Savitry (1903 – 1967) est un peintre puis photographe humaniste, ayant notamment côtoyé Robert
Desnos, Django Reinhardt et Robert Doisneau. Il voyage en Polynésie en 1930.
301
Voir le dossier photographique en annexe.
300
69
II.
Un bataillon sensible à la politique
1.
LES PACIFIENS FACE A VICHY ET GIRAUD
Si les volontaires du Bataillon du Pacifique apparaissent comme peu politisés (dans
le sens où ils ne sont pas affiliés à un quelconque parti politique, comme le PCF)302, ils
n’en sont pas moins apolitiques. En effet, l’appartenance à la France Libre, en plus du
développement de comportements spécifiques dont nous parlions plus haut, induit le refus
de l’armistice (décision politique, prise par le gouvernement qui assume la défaite de
1940 et non par l’armée) et la reconnaissance de l’autorité du général de Gaulle.
D’emblée, les Pacifiens se montrent résolument hostiles au régime de Vichy ainsi
qu’aux troupes du général Giraud. La réunion théorique des FFL et de l’Armée d’Afrique,
survenue le 1er août 1943, ne vient pas mettre un terme à l’hostilité qui les oppose303. Au
Bataillon du Pacifique, unité gaulliste de la première heure composée de Français libres
convaincus, cette hostilité est avérée par les journaux de guerre des volontaires. Dès le
28 août 1941, se trouvant alors à Tripoli (Liban) avec des volontaires du 1er BIM, JeanRoy Bambridge rapporte une rencontre avec des soldats de l’Armée de Vichy : « plusieurs
officiers Vichystes sont la risée de quelques-uns d’entre nous. Ils ne peuvent rien dire car
les hommes du BIM se jettent sur eux et les traitent de boches. »304 Édouard Magnier note
pour sa part dans son journal, le 8 septembre 1943, alors que le BIMP se trouve en
Tunisie305 :
« […] si les Français de Sfax nous ont bien reçus, les Français de
l’armée Giraud ne peuvent pas nous voir. Évidemment, pour l’armée
de métier, le mouvement France Libre fut pour eux un soufflet, une
tache qui toujours restera et cela ils ne nous le pardonneront jamais.
De plus, la mentalité n’a pas changé, et la plupart des officiers de
Giraud gardent la francisque à l’intérieur du revers de leurs vestes, et
ont le cynisme de dire "si nous continuons la lutte c’est pour délivrer le
302
Jean-François Muracciole a souligné « la très faible politisation, avant comme pendant la guerre, de
l’écrasante majorité des Français libres » (Les Français libres, op. cit., p. 161).
303
Jean-François MURACCIOLE, Les Français libres, op. cit., p. 196.
304
Journal de guerre de Jean-Roy Bambridge.
305
Journal de guerre d’Édouard Magnier. Archives de Nouvelle-Calédonie, 1 J 53.
70
maréchal". De cela, j’en conclue que les Français sont murs pour la
cravache et les coups de pieds dans le cul. »
Le journal de marche et des opérations du BIMP va également dans ce sens, indiquant
à la date du 25 décembre 1942 que « les hommes et les cadres manifestent leur joie »306
à l’annonce par la radio de l’assassinat à Alger, la veille, de l’amiral François Darlan,
ministre de la Marine puis chef du gouvernement du Maréchal Pétain307.
Par cette série d’actions illustrant l’« hostilité viscérale » 308 des Français libres envers
giraudistes et vichystes, les Pacifiens continuent de démontrer que leur engagement, dans
les tous premiers mois de la France Libre, découle directement de leur refus de l’armistice
et de leur rejet de la collaboration, par opposition à des troupes retournées dans la guerre
sur le tard et plus enclines à accepter la figure de Pétain. Les Pacifiens, en plus de leur
culture océanienne marquée, revendiquent haut et fort leur identité gaulliste et refusent
avec leurs camarades le changement de nom imposé à la 1e DFL, qui devient lors de son
intégration à l’Armée d’Afrique la 1ère Division Motorisée d’Infanterie (DMI). Le nom
original de la division restera d’usage dans ses rangs jusqu’à la fin de la guerre.
Par ailleurs, l’engagement dans la France Libre induit également une exposition à la
répression vichyste. L’exemple de Félix Broche est à ce titre intéressant. D’abord
condamné à la déchéance de nationalité française par un décret daté du 4 octobre 1941309
et signé par Joseph Barthélémy, ministre de la Justice du Maréchal Pétain, il est ensuite
condamné à mort, à la dégradation militaire et à la confiscation de ses biens par un arrêt
rendu par contumace par la Cour Martiale de Saigon le 5 février 1942. Il fut réhabilité à
titre posthume par la chambre de révision de la cour d’appel de Saigon en mai 1947310.
Par la même occasion, deux lettres adressées par l’administration de Vichy à l’épouse du
« Metua », résidant à Tunis, attirent l’attention. La première, datée du 30 janvier 1941,
lui annonce la révocation de la solde souscrite pour elle par son mari, en raison du
ralliement de ce dernier au général de Gaulle. La seconde, datée du 28 mars 1941 et
306
Service Historique de la Défense, GR 12 P 273.
Voir par exemple : Arnaud DE CHANTERAC, L’assassinat de Darlan, Paris, Perrin, 1995, ou plus récent :
Bénédicte VERGEZ-CHAIGNON, Une juvénile fureur : Bonnier de La Chapelle, l’assassin de l’amiral
Darlan, Paris, Perrin, 2019.
308
Jean-François MURACCIOLE, Les français libres, op. cit., p. 196.
309
Archives de l’Ordre de la Libération.
310
Ibid.
307
71
adressée par le secrétariat d’État à la guerre à Vichy, est plus intrigante, à plusieurs égards.
Comme le souligne Sylvain Cornil, rédacteur en chef de la revue de la Fondation de la
France Libre311, la lettre porte l’en-tête « République Française » au lieu de « État
Français » (nom officiel du régime de Vichy), emploie l’expression « capitaine » et non
« ex-capitaine » comme pour les décrets de condamnation que nous évoquions plus haut,
ainsi qu’une formule de politesse contrastant fortement avec le caractère laconique
présenté par d’autres correspondances312. Sylvain Cornil note cependant que « la
personnalité du signataire explique, il est vrai, cette surprenante appréciation : ancien des
Scouts de France, le capitaine de Chabot fait partie de ces officiers de l’armée de
l’armistice opposés à la collaboration, non gaullistes mais résolus à préparer la revanche,
qui grossiront plus tard les rangs de l’Organisation de résistance de l’armée (ORA) »313.
Les condamnations par le régime de Vichy des chefs et des cadres de la France
Libre, via son appareil judiciaire, place ainsi Félix Broche aux côtés de nombreux hauts
gradés de la France Libre314, mais également d’acteurs des ralliements des colonies du
Pacifique. Sur le décret le condamnant à la déchéance de nationalité figurent également
les noms d’Émile de Curton, gouverneur des EFO de novembre 1940 à juin 1941, du
lieutenant de vaisseau Jean Gilbert qui prit la tête de la Marine sur place, du lieutenant
Jacques Ravet, et de Marcel Sénac, administrateur aux îles Tuamotu depuis 1936,
également acteur du ralliement. En Nouvelle-Calédonie, le gouverneur Henri Sautot et le
chef indigène Henri Naisseline sont également condamnés pour leur participation aux
événements ayant mené au ralliement de leur archipel315, de même que plusieurs
volontaires calédoniens du Bataillon du Pacifique : le capitaine Raymond Perraud, le
soldat Marcel Kollen, les sergents Victor Brial et Adolphe Unger, l’adjudant
Jules Demaret et le lieutenant Tom Hagen316.
Si Jean-François Muracciole souligne le fait que « les nombreuses condamnations à
mort prononcées par les tribunaux civils ou militaires de Vichy à l’encontre des Français
311
La justice de Vichy et les Français libres : le cas de Félix Broche [en ligne] Fondation de la France
Libre, 2011, consulté le 3 février 2020. http://www.france-libre.net/justice-vichy-felix-broche/.
312
« Avec tous mes regrets, je vous prie d’agréer, Madame, l’expression de mes respectueux hommages. »
À l’inverse, la lettre du 30 janvier, plus sobre, s’achève par ces mots : « Veuillez agréer, Madame,
l’assurance de ma considération distinguée. »
313
La justice de Vichy et les Français libres : le cas de Félix Broche [en ligne], op. cit.
314
Tels les généraux de Gaulle, Leclerc, Legentilhomme, et l’amiral Muselier, entre autres.
315
Musée de la Seconde Guerre mondiale en Nouvelle-Calédonie (Nouméa), visite du 26 septembre 2019.
316
Idem.
72
libres n’ont pas été, pour la plupart, suivies d’effet »317, il ne faut pas oublier que les
personnes citées plus haut se trouvaient hors d’atteinte de Vichy, soit en territoire Français
libre (dans les colonies ralliées), soit au combat contre les forces de l’Axe, rendant
l’exécution des sentences rendues impossible. Néanmoins, on peut émettre l’hypothèse
qu’une condamnation par Vichy peut apparaître, pour quelqu’un entré en « dissidence »,
comme une espèce de reconnaissance de son engagement et ajouter à son aura, en cela
qu’elle acte la rupture avec le régime du Maréchal Pétain et l’armée de Vichy, mais aussi
avec la vie ordinaire. En effet, « la rébellion qui caractérise l’engagement dans la France
Libre finit par devenir un style de vie. »318
En résumé :
« L’hostilité réciproque entre gaullistes et giraudistes n’est rien
d’autre que la continuation de l’affrontement entre Vichy et la France
libre. Avant de reposer sur des arguments politiques, l’affrontement, au
niveau des combattants, s’est d’abord traduit par une série d’actes
inamicaux. Après le retour de l’armée d’Afrique dans la guerre, les
relations entre les deux armées demeurent, sauf exception, globalement
détestables. »319
317
Jean-François MURACCIOLE, Les français libres, op. cit., p. 290.
Ibid., p. 236.
319
Ibid., p. 196.
318
73
2.
LES PACIFIENS ET LA POLITIQUE DANS LE PACIFIQUE
En plus d’être sensibles aux clivages entre Français libres d’une part et vichystes et
giraudistes d’autre part, les Pacifiens s’intéressent de très près aux événements qui
surviennent dans leurs territoires d’origines en leur absence. En dépit de la distance et des
difficultés de communications encore augmentées par le conflit, les troubles et tractations
qui secouent les EFO et la Nouvelle-Calédonie en 1941-1942, découlant directement des
ralliements, trouvent en effet un écho parmi les soldats, d’autant plus que certains
volontaires ont pris une part active dans le ralliement de leur colonie. L’étude des sources
laisse apparaître qu’une certaine confusion règne autour de la transmission des nouvelles
lorsqu’il s’agit des questions d’ordre politique, confusion dont découle une certaine
inquiétude. La dimension « peu politisés mais pas apolitiques » prend ici une dimension
accrue, puisque tous les volontaires se retrouvent concernés.
Peu de temps après leur départ, le gouverneur général des colonies Richard
Brunot320, ancien gouverneur du Cameroun, envoyé dans le Pacifique en mission
d’inspection par de Gaulle, arrive à Papeete. Après s’être autoproclamé gouverneur et
attribué des pouvoirs qu’il n’avait pas, il fit arrêter, interner et juger Émile de Curton,
gouverneur depuis novembre 1940, ainsi que plusieurs de ses collaborateurs, également
gaullistes de la première heure. Ce que Jean-Louis Crémieux-Brilhac nomme à juste titre
ses « graves abus de pouvoirs »321 passent également par l’éviction du consul anglais sans
avoir au préalable consulté les autorités britanniques et lui valent un conflit ouvert avec
Henri Sautot dont il demanda, en secret, le rappel à Londres. Leurs échanges énergiques
par télégrammes de la fin de l’été 1941 figurent en annexes du Bataillon des guitaristes
de François Broche. Le général de Gaulle envoya ainsi le capitaine de vaisseau Georges
Thierry d’Argenlieu en Océanie avec deux bâtiments de guerre, la fonction de HautCommissaire de la France Libre dans le Pacifique et la mission, entre autres, de « mettre
un terme à la mission de Brunot »322. L’ordre rétabli à Tahiti, Brunot et de Curton partent
320
Richard Brunot (1883 – 1958) se rallie à la France Libre dès août 1940 et arrive à Tahiti le 6 juin 1941
après un passage à Nouméa, où il se trouve le jour du départ du bataillon. Voir dossier photographique en
annexes.
321
Jean-Louis CREMIEUX-BRILHAC, La France Libre, vol. 1, Paris, Gallimard, 2014, p. 385.
322
Télégramme du général de Gaulle à l’amiral Thierry d’Argenlieu du 4 août 1941 : « Brunot n'avait
aucunement qualité pour enfermer un gouverneur nommé par moi, et surtout pour prendre sa place sans
aucune autorisation de ma part. En outre, la conduite et les allégations de Brunot à l'égard de Sautot,
membre du Conseil de défense de l'Empire, sont inadmissibles. La première chose à faire par vous sera de
74
pour l’Angleterre où de Curton rejoint les FFL323, remplacé par Georges Orselli au
gouvernement des EFO, et Brunot est mis d’office à la retraite. Entretemps promu contreamiral, d’Argenlieu rejoint ensuite Nouméa.
Cependant, loin d’amener le calme, d’Argenlieu entre également en conflit tant avec
les Américains qu’avec le gouverneur Sautot. L’arrivée des forces américaines en
Nouvelle-Calédonie au printemps 1942, commandées par le général Patch324, vise à en
faire une base arrière contre les Japonais. Les Américains autant que Sautot bénéficient
du soutien de la population et de la milice civique, commandée par le capitaine Georges
Dubois, que Patch a rattaché à son état-major, tandis que d’Argenlieu se montre de plus
en plus méfiant envers eux. Pour citer Crémieux-Brilhac : « Sautot conteste plus
généralement "la hauteur et la raideur" de l’Amiral dans ses rapports avec la population ;
l’Amiral incrimine, en revanche, son bongarçonnisme radical-socialiste qui plaît aux
Caldoches comme aux Américains. Et ceux-ci accusent l’Amiral de faire passer le
prestige français avant la menace japonaise. Bref, dès le 31 mars, d’Argenlieu demande
à ce que de Gaulle de rappeler Sautot »325. Les frictions vont ainsi crescendo jusqu’à ce
que le 5 mai, l’Amiral fasse embarquer Sautot de force vers la Nouvelle-Zélande et arrêter
plusieurs personnalités ayant pris part au ralliement (non sans rappeler les actions de
Brunot à Tahiti), entraînant dès le lendemain une grève générale qui dure cinq jours et
tourne rapidement à l’insurrection : les broussards326 effectuent une descente sur
Nouméa, la milice civique arrête d’Argenlieu, son chef d’état-major est violenté, et les
Américains refusent de s’impliquer dans ce qu’ils considèrent comme une « querelle
entre Français »327.
mettre un terme à la mission de Brunot. […] » (François BROCHE, Le bataillon des guitaristes, op. cit.,
annexe no 9, p. 362.)
323
Le dossier d’Émile de Curton au SHD indique qu’il quitte Papeete le 8 octobre 1941, arrive à Liverpool
le 4 janvier 1942 et s’engage dans les FFL le 4 juillet suivant. Il est entretemps promu médecin-commandant
le 25 juin 1942.
Service Historique de la Défense, GR 16 P 164200.
324
Alexander Patch (1889 – 1945) succédera ensuite au général Clark à la tête de la 7e Armée et débarquera
avec elle en Provence le 15 août 1944.
325
Jean-Louis CREMIEUX-BRILHAC, La France Libre, vol. 1, op. cit., p. 387-388.
326
Le terme de « broussards » désigne les populations vivant dans les espaces ruraux de NouvelleCalédonie, la « brousse ».
327
Jean-Louis CREMIEUX-BRILHAC, La France Libre, vol. 1, op. cit., p. 389.
75
Ainsi, par deux occasions, des courriers furent adressés à la hiérarchie afin de
demander des éclaircissements. Le premier fut envoyé par Félix Broche au général de
Gaulle le 3 septembre 1941 et débute ainsi :
« Les Tahitiens ont appris avec beaucoup d’étonnement le
remplacement de leur gouverneur et l’emprisonnement de quelques
fonctionnaires et militaires, dont certains étaient leurs chefs au moment
de leur départ de Papeete, en avril dernier. Ces nouvelles graves et
déconcertantes ont causé une assez fâcheuse impression, et tous
désireraient savoir exactement ce qui s’est passé dans leur petit et
lointain pays. »328
Une réponse se voulant rassurante lui fut apportée par le général Petit, commissaire
par intérim à la Guerre329, lui indiquant le départ de Brunot et l’envoi de la mission
d’Argenlieu.
Le second de ces courriers fut envoyé le 4 août 1942 au général Koenig, en
conséquence de la grève générale de Nouméa. Le trouble ainsi semé dans les rangs est à
nouveau tel que le chef de bataillon Roger Bouillon écrit :
« La plus grande inquiétude règne parmi les militaires du Pacifique
qui ne comprennent plus ce qui se passe. Le renseignement qui leur est
parvenu, par sa forme laconique, facilite la confusion et surtout laisse
courir les imaginations. Certains émettent l’avis que les Américains
sont à la base de ces graves événements ; ils insistent sur le fait que les
mesures prises par la Mission330 ont rencontré le désaveu général de
toute la population. […] Quoi qu’il en soit, des événements de cette
nature prennent toujours une importance beaucoup plus grande dans
une petite colonie où tout le monde se connaît et se solidarise. Leur
écho et l’incertitude de ce qui se passe dans leur pays ont déclenché
parmi tous les gens du Pacifique une vague d’inquiétude. […] Pour
328
François BROCHE, Le bataillon des guitaristes, op. cit., p. 219-220.
Ibid., p. 220.
330
« La Mission » désigne la mission de l’Amiral d’Argenlieu en Océanie.
329
76
l’instant, j’ai demandé aux gradés influents de mettre en garde leurs
camarades plus émotifs contre la diffusion de nouvelles de ce genre,
dont l’imprécision quelquefois voulues ne reflète pas toujours l’entière
vérité et en exagère les effets. J’ai accueilli leurs doléances en leur
promettant d’associer le commandement à leur désir d’être
renseignés. »331
Si une réponse lui a été apportée, et il est extrêmement probable que ce fut le cas,
nous n’en avons pas eu connaissance.
En observant ces réunions de volontaires, il convient de se rappeler que l’engagement
au sein du Bataillon du Pacifique sert pour beaucoup de soldats à porter une revendication
politique, notamment soutenue également par le chef néo-calédonien Henri Naisseline, à
savoir le désir d’accéder à la citoyenneté française pleine et entière après la guerre, dont
nous parlions en première partie à la lumière de l’article d’Anne-Christine Trémon332.
Plus encore, les volontaires kanak du second contingent n’hésitent pas à afficher
clairement leurs revendications, dès le printemps 1943. À l’automne 1945, ils rédigent
avec leurs compatriotes des FNFL un document intitulé « Exposé des vœux et doléances
des indigènes de la Nouvelle-Calédonie et Dépendances »333, dans lequel ils réclament la
fin du régime de l’indigénat. Ils bénéficient alors du soutien de Maurice Lenormand, futur
député de la Nouvelle-Calédonie et premier élève de Maurice Leenhardt à l’EPHE334, qui
remet le document accompagné d’une lettre à Jacques Soustelle, fraîchement nommé
ministre des colonies. Cette mobilisation porte ses fruits puisque comme le notent Isabelle
Merle et Adrian Muckle, « le ministère de la France d’outre-mer ne peut ignorer la portée
des Vœux et doléances qu’il reçoit en novembre 1945, pas plus qu’il ne peut ignorer
l’impatience croissante de ses sujets indigènes en Nouvelle-Calédonie. »335 Elle contribue
ainsi à ce que le régime de l’indigénat soit officiellement aboli par décret du 22 décembre
1945, qui entre officiellement en vigueur le 14 février 1946336. Diverses mesures seront
331
Service Historique de la Défense, GR 12 P 273.
Anne-Christine TREMON, « Citoyens indigènes et sujets électeurs », op. cit.
333
Voir : Isabelle MERLE et Adrian MUCKLE, « Le cas de l’Exposé des Vœux et doléances des indigènes
de la Nouvelle-Calédonie et Dépendances », dans L’indigénat. Genèses dans l’Empire français, pratiques
en Nouvelle-Calédonie, Paris, CNRS Éditions, 2019, p. 384 – 389.
334
Isabelle MERLE et Adrian MUCKLE, L’indigénat, op. cit., p. 384
335
Ibid., p. 389.
336
Ibid., p. 390.
332
77
progressivement prises pour permettre l’entrée des Kanak dans la vie de la cité337, bien
que ce processus fût fort long, le suffrage universel n’étant instauré de manière générale
qu’en 1957.
L’engagement des volontaires polynésiens aboutit également à un projet de décret,
dès septembre 1944, visant à étendre la citoyenneté à l’ensemble des habitants des EFO,
alors que celle-ci n’était jusqu’alors accordée qu’aux seuls habitants de l’ancien royaume
des Pomaré, correspondant aux îles de Tahiti, Moorea, à l’archipel des Tuamotu et une
partie des îles Australes338, qui devint une colonie française en 1880. Le décret est signé
puis entre en vigueur quelques mois plus tard. Une copie sans date est conservée aux
Archives Nationales d’Outre-Mer339, cependant, celle-ci est signée par Paul Giacobbi,
ministre des colonies, et François de Menthon, Garde des Sceaux ; les deux hommes étant
en même temps au gouvernement provisoire entre novembre 1944 et mai 1945, le décret
fut signé à cette période.
Il est ainsi aisé de comprendre l’intérêt accru des volontaires pour la vie politique de
leurs archipels, intérêt qui représente un moyen de plus de garder un lien avec ces
territoires, en plus des correspondances privées. De même, des inquiétudes communes,
un intérêt commun pour les événements survenus au pays, où, comme le rappelle le
commandant Bouillon dans sa lettre d’août 1942, « tout le monde se connaît et se
solidarise », ne peut que renforcer la cohésion entre les volontaires.
Enfin, si certains historiens tels que Jean-Louis Crémieux-Brilhac parlent d’une crise
néo-calédonienne, il convient à notre sens d’évoquer une crise océanienne, dans la mesure
où celle-ci concerne aussi bien la Nouvelle-Calédonie que les EFO, que les deux
territoires communiquent étroitement entre eux et que les protagonistes de cette crise
œuvrèrent aussi bien dans l’un comme dans l’autre territoire.
337
Voir : Isabelle MERLE et Adrian MUCKLE, L’indigénat, op. cit., p. 451.
Anne-Christine TREMON, « Citoyens indigènes et sujets électeurs », op. cit., p. 29.
339
Archives Nationales d’Outre-Mer, 3800 COL 136.
338
78
III.
1.
Loisirs et distractions
« NOUS AVONS FAIT UN COUP DE PECHE A LA DYNAMITE »
Si jouer de la musique, chanter et danser représentent la distraction par excellence
chez les volontaires du Pacifique, leur culture océanienne est également exprimée à
travers d’autres pratiques. Grâce à elles, ces derniers tentent de rythmer leur quotidien
hors des permissions, lorsqu’ils ne peuvent se rendre dans les grandes villes à proximité,
et hors des combats et des patrouilles (où, comme nous l’évoquions plus haut, les
« Pacifiens » se distinguent par leur sens de l’orientation découlant de leur expérience de
la navigation). De janvier 1942 à avril 1944, avant l’embarquement pour l’Italie puis la
France où l’âpreté des combats laisseront moins de temps et de possibilités, cette culture
pourra se développer un peu plus grâce à leurs contacts réguliers avec la mer. En effet,
les interminables parties de cartes (bridge et poker en tête) laissent la place, à la moindre
occasion, aux bains dans la Méditerranée. De façon plus originale, les volontaires
s’adonnent à une expérience pour le moins singulière, à savoir la pêche aux explosifs, qui
apparaît jusque dans les documents officiels : le journal de marche du BIMP fait en effet
mention d’une « pêche miraculeuse de la 1ère Compagnie : 100 kgs de poisson avec deux
pétards »340 à la date du 31 décembre 1942. Édouard Magnier note pour sa part dans son
journal, le 22 septembre 1943 :
« Cet après-midi, 2 hommes et moi nous sommes allés à la plage de
Nabeul. Nous y avons fait la connaissance de deux dames, femmes de
gendarmes. Nous avons fait un coup de pêche à la dynamite. Ces braves
dames en furent stupéfaites. Nous leur avons offert notre pêche, environ
5 kg, puis nous les avons ramenés avec leurs enfants à la gendarmerie,
où nous avons bu un coup de pichet. »341
Tous les moyens sont en effet bons au BP1 pour diversifier les repas, tout aussi
monotones que chez leurs camarades de la 1ère DFL. Jean-François Muracciole a consacré
dans son étude sur les Français Libres un chapitre sur les distractions en temps de guerre,
340
341
Service Historique de la Défense, GR 12 P 273.
Archives de Nouvelle-Calédonie, 1 J 53.
79
comportant une partie intitulée « une obsession : boire et manger »342, dans laquelle il
note :
« Dans les témoignages recueillis comme dans les ouvrages de
mémoire, l’obsession de la nourriture revient de façon saisissante. […]
Alors qu’encadrés par une armée régulière, ils n’ont jamais vraiment
souffert de la faim, sauf dans quelques circonstances opérationnelles
très particulières, le boire et le manger semblent pourtant avoir été leur
souci premier. »343
Sans aller jusqu’à parler d’obsession, les Pacifiens n’ont effectivement pas à se
plaindre de leurs repas outre mesure, sauf peut-être lors de la traversée de Sydney à Suez,
où le commandant Broche s’était adressé à la hiérarchie pour faire ajuster les quantités
jugées insuffisantes et apporter un peu de diversité dans les assiettes, en obtenant gain de
cause.
Il est ainsi possible de voir en la pêche le retour à l’océan des volontaires, renouant
ainsi avec leurs racines insulaires et océaniennes, de même qu’en la navigation aux
instruments dans le désert, la pratique de la musique et les bains de mer. Le poisson entre
en effet dans la composition de nombreux plats océaniens, à commencer par le poisson
cru, cuisiné à Tahiti avec du lait de coco frais. À défaut de trouver des cocotiers dans le
Sahara, les volontaires se retrouvent ainsi à concilier les traditions culinaires du Pacifique
et les pratiques militaires, en faisant avec ce qu’ils ont à disposition. Du reste, ils
n’hésitent pas non plus à introduire de nouveaux mots dans leurs langues d’origines, tels
que le corned-beef, formant la base des repas militaires, devenant « punu pua’atoro » en
tahitien344 (signifiant littéralement « bœuf en boîte »345). C’est également en tentant de
diversifier un peu plus leur alimentation que les volontaires se retrouvent à chasser la
342
Jean-François MURACCIOLE, « Une obsession : boire et manger » dans Les Français Libres, op. cit.,
p. 247 – 251.
343
Ibid., p. 247.
344
Jean-Christophe SHIGETOMI, Tamari’i Volontaires, op. cit., p. 202.
345
« Punu » signifie « boîte en métal », « pua’atoro » signifie « bœuf » (source : Académie Tahitienne).
80
gazelle à la mitrailleuse lors des patrouilles, comme le décrivent Raoul Michel-Villaz346
et Gaston Rabot347 dans leurs journaux de guerre.
Pour peu que les patrouilles aient la chance de rencontrer des troupeaux de gazelles
ou que les volontaires au repos disposent d’étendues d’eau, de tels événement contribuent
à remonter le moral des troupes. Les journées dans le désert se ressemblent en effet bien
souvent par leur monotonie, et les vents de sables, fréquents, se révèlent très pénibles et
envahissants. L’uniformité des repas, d’ordinaire composés de boîtes de « singe »
(bœuf en conserve), est cependant quelques fois rompue, permettant de manger plus varié
et en plus grande quantité. Les centaines de colis envoyés par Mme Hagen, présidente du
Comité de Gaulle de Koné (Nouvelle-Calédonie) et dont le neveu Thomas Hagen est
sous-lieutenant au BP1, arrivent à bon port et lui valent une réponse de Félix Broche datée
du 15 mai 1942, reproduite par François Broche dans le Bataillon des guitaristes :
« Je viens de vous adresser un radio de remerciements : "Reçu deux
cents colis collectifs, plus nombreux individuels, remerciements
unanimes Broche", qui vous aura rassurée sur la bonne arrivée de ces
précieux colis. […] Les colis étaient magnifiques et je vous assure que
les menus habituels ont pâli devant les ripailles enfin possibles, poulet
en gelée, pâtés, confitures, bananes sèches, langues, légumes ont
suscité un enthousiasme de bon aloi. Tout cela nous a changé du
"singe" réglementaire et monotone, malgré l'ingéniosité que chacun
déploie pour en varier la préparation. »348
Les ravitaillements peuvent également s’avérer plus providentiels ; en témoigne la
« prise » décrite par Édouard Magnier le 11 janvier 1942 :
« Quelques hommes du LAD vont faire un tour à la mer distante de
7 km pour chercher du bois (épaves rejetées sur la côte). Ils en
ramènent un bon tas, et aussi quelque chose de plus précieux :
25 à 30 kg de patates trouvée dans un tas d’ordures ainsi que plusieurs
346
Entrées du 20 et du 23 février 1942. Archives de Nouvelle-Calédonie, 1 J 44.
Gaston RABOT, Journal de guerre, op. cit., p. 213, p. 225 & p. 226.
348
François BROCHE, Le bataillon des guitaristes, op. cit., p. 247 – 248.
347
81
choux, déchets de Mrs les Anglais (sic), qui paraît-il n’aiment guère les
patates et les choux. Ce fut pour nous l’occasion de manger
d’excellentes patates frites, et une bonne soupe aux choux. »349
Point intéressant, un extrait d’un reportage publié dans le Courrier des E.F.O. et
reproduit dans le 6e volume du Mémorial Polynésien350 reproduit un témoignage non daté
et non signé mais présenté comme l’œuvre d’un volontaire du Bataillon du Pacifique,
vraisemblablement un Néo-Calédonien. Ce volontaire y fait état d’une grande variété de
denrées alimentaires, d’origines tout aussi diverses, provenant surtout de dominions et de
territoires de l’Empire Britannique (Canada, Union sud-africaine, Nouvelle-Zélande,
Ceylan, Australie, …), mais également des États-Unis, d’Argentine, ou de contrées plus
proches tels que le Liban et la Palestine, distribués par l’Intendance britannique.
Outre les questions d’alimentation et de tourisme, les Pacifiens se passionnent très
tôt pour la pratique des sports. L’engouement des volontaires pour le sport trouve son
origine, à notre sens, dans l’implantation et le développement croissant des sports dans
les colonies à partir du début du XXe siècle. Francis Cheung a ainsi dédié dans son
ouvrage sur les EFO entre 1919 et 1945 tout un chapitre aux « exercices physiques et
[aux] sports »351, dans lequel il évoque la fondation d’une « Association Sportive des
Jeunes Tahitiens » dès 1913352, suivie par d’autres groupements dans l’entre-deuxguerres, et l’entrée des enseignements d’éducation physique à l’École Centrale de Papeete
le 2 juin 1919353. Ces derniers s’étendent ensuite à d’autres établissements scolaires. Dans
leur Histoire du sport à Tahiti, Bernard Robin et Patrick Pons font pour leur part arriver
le football en Polynésie quelques années plus tôt, joué dès 1906 à l’École des Frères354,
et mentionnent la naissance de la Fédération Océanienne de Sports Athlétiques en mars
1932355, encadrant les compétitions sportives dans le Pacifique. Plusieurs futurs
volontaires sont ainsi des sportifs reconnus dès avant la guerre, tels les boxeurs
calédoniens Édouard Smith et Georges Champion, ce dernier portant bien son nom
349
Archives de Nouvelle-Calédonie, 1 J 53.
Encart « La vie quotidienne pendant la guerre du désert ». Jean-Marie DALLET et al., Le Mémorial
polynésien, vol. 6, op. cit., p. 140.
351
Francis CHEUNG, Tahiti et ses îles, op. cit., p. 464 – 480.
352
Ibid., p. 468.
353
Ibid., p. 465.
354
Bernard ROBIN et Patrick PONS, Histoire du sport à Tahiti, Tahiti, Édisport, 1978, p. 100.
355
Ibid., p. 101.
350
82
puisqu’il fut champion d’Australie dans la catégorie mi-lourds avant la guerre. Les
volontaires montrent dans leur ensemble un intérêt accru pour la boxe, sport également
très populaire en Polynésie en cela qu’il rappelle la lutte telle que pratiquée de façon
traditionnelle dans le Tahiti ancien356. Les Pacifiens se montrent ainsi assidus dans leur
participation aux différents tournois organisés aussi bien en Australie que sur le Queen
Elizabeth et en Syrie, puis sur le chemin du retour.
En plus de cela, les hommes de la CAICT sont dotés en 1939-1940, avec Félix
Broche, d’un commandant « soucieux de la forme corporelle de ses soldats »357. En effet,
« dès sa prise de commandement, il organise, pendant 3 jours, des grandes manœuvres
consistant à traverser l’île par les montagnes ; il fait également restaurer les terrains de
sport de la caserne, incite ses hommes à jouer des matches de football contre des
formations civiles (en récompense, il accorde des permissions à condition d’avoir
gagné). »358 Ainsi, Raymond Perraud devient l’officier des sports du bataillon dès le
départ du corps expéditionnaire. Les volontaires forment une équipe de football359,
comprenant aussi bien des Tahitiens que des Calédoniens, qui affronte par deux fois une
équipe australienne (sans que l’on ait plus de précisions sur cette dernière), puis une
équipe syrienne à Alep avant de remporter sa plus large victoire contre l’équipe du
1er Bataillon de Légion Étrangère le 15 mars 1943 par 6 buts à 0. Un autre match le
8 décembre de cette même année la voit s’incliner face à l’équipe de la 103e Compagnie
Auto Renforcée par 6 buts à 4. À l’échelon supérieur, l’équipe de la 1ère BFL compte trois
soldats du BIMP et arrive en finale de la coupe du Xe corps d’armée britannique360.
356
Bernard ROBIN et Patrick PONS, Histoire du sport à Tahiti, op. cit., p. 54.
Francis CHEUNG, Tahiti et ses îles, op. cit., p. 467.
358
Ibid., p. 467 – 468.
359
Une photographie de l’équipe de football du bataillon, prise à Alep, figure dans les annexes.
360
Pendant la Guerre du Désert, la 1ère DFL est intégrée au Xe corps britannique, constitutif de la
VIIIe Armée.
357
83
2.
PERMISSIONS ET TOURISME
La question des distractions des volontaires ne serait pas complète sans que ne leur
soient accordées des permissions. Tout comme pour leurs aînés de 14-18, « à travers la
permission, c’est aussi toute la question de la condition combattante et de la rétribution
du sacrifice qui est posée. »361 Cependant, à leur inverse, les permissions accordées aux
Français Libres ne leur permettent pas de retrouver les leurs. C’est également le cas des
Pacifiens pour des raisons de distance évidentes. Seuls les blessés, malades et pères de
famille rapatriés sur l’Océanie à compter de la fin 1943 ont cette possibilité, quittant
définitivement l’unité et les théâtres d’opérations.
Ainsi, à défaut de pouvoir retrouver leurs foyers, les Pacifiens profitent de leur
présence dans des contrées leurs étant jusqu’alors inconnues pour s’adonner volontiers
au tourisme tout au long de leur parcours. Pour ces soldats qui avant la guerre n’avaient
quasiment jamais quitté l’Océanie, rappelons-le, le désir d’aventure représente une
motivation essentielle à l’engagement, et la découverte de nouveaux horizons, de
nouvelles régions, de nouvelles villes, de nouveaux peuples qui jusqu’alors leurs étaient
totalement ou quasiment inconnus est largement mise à profit. Les Pacifiens se rendent
ainsi en nombre à Sydney lors de leur séjour australien ; au Levant, ils visitent Damas,
Alep, Jérusalem et ses lieux saints (menés par leur aumônier catholique, le
Père Podevigne, qui organise la visite), Beyrouth et Tripoli (Liban) ; en Afrique du Nord,
ils découvrent Le Caire, Alexandrie, Tripoli (Libye), Nabeul, Tunis, Bône et Alger. En
Europe, malgré la dureté des combats, les moments de répit leur permettent de se rendre
à Rome, à Naples, à Lyon et enfin à Paris. Nous reviendrons plus en détail sur le séjour
parisien en troisième partie.
Cette pratique répandue du tourisme revêt un caractère de cohésion essentiel, et
comme les permissions en 14-18, permet de maintenir le moral des soldats. Dans son
ouvrage sur les Permissionnaires dans la Grande Guerre, Emmanuelle Cronier fait de la
permission un « remède à la nostalgie »362, autrement dénommée la « maladie du pays ».
À défaut de pouvoir retourner chez eux, les permissionnaires du BP1 puis du BIMP vont
361
362
Emmanuelle CRONIER, Permissionnaires dans la Grande Guerre, Paris, Belin, 2013, p. 398.
Ibid., p. 289.
84
se distraire au contact des populations civiles, leur permettant de quitter temporairement
le cadre strictement militaire, notamment lors d’occasions spéciales telles qu’à Nouvel
An 1944 où la moitié des effectifs du BIMP est envoyé en permission à Tunis363. Ainsi,
peu à peu, avec l’abandon de la séparation des Calédoniens et des Tahitiens en
compagnies séparées et l’expérience du conflit, les liens entre les soldats se resserrent,
effaçant progressivement les animosités présentes au départ.
À Sydney, les Tahitiens fréquentent régulièrement le Polynesian Club, fondé en
1915 par un Australien francophone à la suite de sa rencontre avec des soldats du
Bataillon mixte du Pacifique364. Par ailleurs, les volontaires dans leur ensemble cumulent
les invitations à dîner chez des familles françaises ou francophones, les événements
sportifs (notamment les matchs de football) et les rencontres galantes. Pour citer François
Broche : « le fait est que leurs uniformes leur ouvraient presque toutes les portes, souvent
sans bourse délier, et leurs valaient de touchantes marques d’amitié de la part des
Australiens. Jeannot Bambridge365 sortit beaucoup avec une grande brune, qui s’appelait
Cora, et son meilleur ami, Lucien Parent, élut une grande amie de celle-ci, Ivy. Thomas366,
lui, au piano du Polynesian Club, n’avait que l’embarras du choix. »367 Raoul MichelVillaz fait également mention de plusieurs rencontres faites au bal, écrivant par exemple :
« Enfin, je reste encore un moment avec ma danseuse, puis, vers 11 heures où la salle
devait fermer, elle s’offre de m’accompagner jusqu’au camp. Nous marchons assez vite
pour commencer et ensuite il y a eu une panne car je suis rentré au camp à 2 heures du
matin. Inutile de vous raconter ce qu’il s’est passé. Tout a été à merveille. »368 Dans son
rapport du jeudi 15 mai 1941, le chef du bataillon appela ainsi à la plus grande correction
de la part des militaires, quelle que soit l’occasion, en particulier « avec les jeunes filles
et dames rencontrées en ville »369, afin de cultiver la meilleure image possible des
Français auprès des locaux. Ce même rapport indique que les permissionnaires sont
363
Service Historique de la Défense, GR 12 P 273.
Jean-Christophe SHIGETOMI, Tamari’i Volontaires, op. cit., p. 175.
365
Surnom du caporal Jean-Roy Bambridge.
366
Thomas Bambridge (1914 – 1942).
367
François BROCHE, Le bataillon des guitaristes, op. cit., p. 176.
368
« Enfin, je reste encore un moment avec ma danseuse, puis, vers 11 heures où la salle devait fermer, elle
s’offre de m’accompagner jusqu’au camp. Nous marchons assez vite pour commencer et ensuite il y a eu
une panne car je suis rentré au camp à 2 heures du matin. Inutile de vous raconter ce qu’il s’est passé. Tout
a été à merveille. » Journal de Raoul Michel-Villaz (12 mai 1941), archives de Nouvelle-Calédonie, 1 J 44.
369
Rapport du 15 mai 1941, Service Historique de la Défense, GR 12 P 273.
364
85
invités à se présenter à l’infirmerie située à l’entrée du camp, « au départ pour percevoir
un préservatif, et au retour pour une injection prophylactique. »370
Au Levant et en Afrique du Nord, outre l’accueil enthousiaste reçu de la part des
populations locales tant arabes qu’européennes, en reconnaissance de leurs engagements
contre les forces de l’Axe (Jean-François Muracciole note en effet que, au lendemain de
la bataille de Bir Hakeim, lorsque la 1e DFL repasse en Égypte, « impossible alors à un
Français de payer dans un restaurant ; on accourt dans les boutiques pour les servir en
premier ; leurs calots s’arrachent comme des reliques »371), les volontaires préservent ce
lien avec le Pacifique anglo-saxon. Ce dernier se poursuit en effet par la sympathie
réciproque entretenue avec les troupes australiennes et néo-zélandaises au gré des
rencontres avec celles-ci, justement en raison de cette appartenance commune aux îles
des mers du sud. Jean-Roy Bambridge raconta en effet, à l’arrivée du bataillon en Syrie :
« Nous avons failli nous rentrer dedans avec les Australiens, car,
pour eux, tous les Français sont des salauds. Mais ceux qui étaient avec
nous, sur le Queen Elizabeth, leur ont expliqué que nous n'avons rien à
voir avec les troupes de Dentz372, que nous venons du Pacifique. Alors
ils nous sont tombés dans les bras. Southern islands ? Pacific ? C'était
merveilleux... »373
Notons cependant qu’aucune trace de contacts du Bataillon du Pacifique avec le
28e bataillon néo-zélandais, dit « bataillon Māori » (Māori Battalion), ni avec le
100e bataillon d’infanterie américain (dit bataillon d’Hawaii) ne nous sont parvenus, fait
étonnant puisque les trois unités suivent un parcours assez similaire374.
370
Rapport du 15 mai 1941, Service Historique de la Défense, GR 12 P 273.
Jean-François MURACCIOLE, Les français libres, op. cit., p. 253.
372
Le général Henri Dentz (1881 – 1945) commande les troupes vichystes lors de la campagne de Syrie. Il
se retrouve ainsi opposé aux Australiens, aux Britanniques et aux Français Libres avant de demander et
d’obtenir un armistice, signé à Saint-Jean-d’Acre en juillet 1941.
373
François BROCHE, Le bataillon des guitaristes, op. cit., p. 231.
374
Le bataillon Māori combat à El Alamein et en Italie ; le « bataillon d’Hawaii » combat également à
Monte Cassino après un court passage en Afrique.
371
86
Enfin, les permissions sont l’occasion, pour les volontaires, de s’alcooliser à souhait.
Si Francis Cheung évoque les « proportions inouïes »375 que prend l’alcoolisme dans les
EFO durant la période coloniale (1880 – 1945)376 et l’impuissance des autorités à y
remédier comme il se doit, il ne faut pas oublier les liens très étroits existant de longue
date entre alcool et monde militaire, liens faisant l’objet de plusieurs travaux, notamment
sociologiques377. En soulignant les figures occupant l’imaginaire social de nos jours (le
poilu de 14-18 attendant dans sa tranchée ou le troupier napoléonien, par exemple), la
sociologue Emmanuelle Prévôt, dans son article sur le lien entre alcool et sociabilité
militaire, fait la remarque suivante :
« Diverses représentations fondent ces images, mais la prégnance
du contexte guerrier demeure : on boit dans sa perspective angoissante,
pour surmonter son imminence et s’exalter avant d’affronter l’ennemi,
on s’enivre pour fêter la victoire ou encore pour oublier l’horreur des
combats, enfin on se grise pour s’occuper en son absence. Les
illustrations historiques ne manquent pas et la guerre apparaît comme
un filtre commode pour comprendre l’alcoolisation des militaires »378
La cohésion autour de l’alcool se matérialise ainsi à de nombreuses occasions, tant
lors des permissions que lors des commémorations propres au bataillon, à savoir le
21 avril et le 5 mai (correspondant aux départs de Papeete puis de Nouméa), ou aux dates
anniversaires des ralliements à la France Libre (les 2 et 19 septembre). Édouard Magnier
note ainsi dans son journal que « tout le bataillon a pris la cuite » le 19 septembre 1943,
troisième anniversaire du ralliement de la Nouvelle-Calédonie379, et laisse deviner que
lors du séjour du BIMP en Tunisie en 1943-1944, longue période de « temps mort »380
ponctuée de permissions à Tunis et à Enfidaville (actuelle Enfida), les volontaires se
375
Francis CHEUNG, Tahiti et ses îles, op. cit., p. 436.
Le dernier roi de Tahiti, Pōmare V (1839-1891), qui règne de 1877 à 1880, est ainsi mort d’alcoolisme.
377
Voir : Adeline POUSSIN, « Le vin rouge : un élément essentiel de la ritualité au sein des Troupes de
Marine », Civilisations, 1-66, 2017, p. 195-207 ; et : Emmanuelle PREVOT, « Alcool et sociabilité militaire :
de la cohésion au contrôle, de l’intégration à l’exclusion », Travailler, 18-2, 2007, p. 159-181
378
Ibid. (Emmanuelle PREVOT), p. 159.
379
Journal de guerre d’Édouard Magnier. Archives territoriales de Nouvelle-Calédonie, 1 J 53.
380
Nous entendons par « temps mort » l’absence de combat alors même que les volontaires portent toujours
l’uniforme et sont toujours en guerre, entre deux campagnes.
376
87
livrent volontiers à « de la belle soûlographie »381. Pour autant que l’ingestion d’alcool
fasse partie intégrante du processus de cohésion dans l’armée, celle-ci ne fut pas sans
occasionner certains incidents qui ne demeurèrent pas sans conséquences. Dès 1941, au
Moyen-Orient et en Égypte, de nombreux volontaires tahitiens (appartenant surtout à la
troupe ou au corps des sous-officiers), pris de boisson, se retrouvent impliqués dans des
rixes qui leur valent des peines de prison, parfois même d’être rétrogradés. L’adjudant
Lucien Parent sera ainsi cassé pour avoir causé la destruction d’un camion après avoir
fait la « bringue » en compagnie de Thomas Bambridge382. De même, les accidents sont
également fréquents : le sergent Raymond Lehartel sera pour sa part rétrogradé comme
simple 2e classe après s’être accidentellement blessé à la cuisse en manipulant son
revolver en état d’ivresse, à l’été 1943383.
Globalement, les incidents liés à l’alcool sont concentrés sur les longues périodes
d’attente. Comme le note Emmanuelle Prévôt, l’alcool permet aux militaires, entre autres
choses, de tromper l’ennui en attendant les combats. Sans cesser de consommer de
l’alcool en permission, il apparaît que les volontaires semblent globalement gagner en
discipline avec le temps et avec l’expérience du combat. Les incidents et les
condamnations sont en effet de moins en moins nombreux, demeurant concentrés sur
l’année 1941, et les cas comme celui du sergent Lehartel en viennent à constituer
l’exception384.
381
Il note également, le 12 avril 1943 : « Quartier libre. Nos hommes, principalement les Tahitiens,
prennent des cuites royales. »
382
Jean-Christophe SHIGETOMI, Tamari’i Volontaires, op. cit., p. 182.
383
Service Historique de la Défense, GR 16 P 357703.
384
Raymond Lehartel retrouvera à la fin de la guerre le grade de caporal (Le Bulletin du Commerce du
10 avril 1946 comporte une liste prévisionnelle des militaires classés par grade devant embarquer sur le
« Sagittaire » à destination du Pacifique ; archives municipales de Nouméa).
88
Partie 3 : fin et sortie de guerre pour les Pacifiens
I. Dix-huit mois d’attente : novembre 1944 – mai 1946
1.
LE SEJOUR PARISIEN : QUELLES EXPERIENCES, QUELS CADRES ?
Le 25 août 1944, Paris est libérée par les chars de la 2e Division Blindée du
général Leclerc, ouvrant ainsi pour la capitale une période nouvelle mêlée de
foisonnement intellectuel intense, d’échanges et de tractations politiques et
diplomatiques, de procès et d’épuration385. C’est dans une ville en plein
bouillonnement, destination privilégiée des soldats alliés en permission (notamment
américains), que débarquent les « Pacifiens » fraîchement relevés et envoyés au repos,
remplacés au sein du BIMP par des engagés métropolitains et des FFI. Ils seront
cantonnés à la caserne Latour-Maubourg, dans l’enceinte des Invalides, où ils forment
une nouvelle unité : la compagnie de QG no 31, commandée par le lieutenant Pierre
Pannetier386,387, forte de 263 hommes388. Le reste des effectifs d’origine se partage entre
les 156 morts (76 Tahitiens et 80 Calédoniens), les quelques rares mutés dans d’autres
unités et les nombreux rapatriés avant la fin du conflit, notamment pour cause de
blessure (tels que William Grand, blessé à Bir Hakeim389), de maladie
(Gaston Rabot390, Paul Courtot391, etc.) et pour les pères de familles nombreuses
(Auguste Bénébig, Édouard Magnier392, etc.). Ari Wong Kim fait à nouveau figure
d’exception puisqu’il n’est pour sa part rapatrié à Tahiti qu'en janvier 1947393, interné
suite à une altercation avec un officier394. Le BIMP continue quant à lui les combats en
385
Voir : Anthony BEEVOR et Artemis COOPER, Paris libéré, 1944 – 1949, trad. fr. Frank STRASCHITZ,
Paris, Perrin, 2004.
386
Pierre Pannetier (1914 – 1984) s’engage dans le 1er contingent calédonien en septembre 1940 et suit le
Bataillon du Pacifique puis le BIMP lors de toutes leurs opérations. Il est fait Compagnon de la Libération
le 16 octobre 1945.
387
Robert Hervé, ayant le grade supérieur, ne commande pas la compagnie : combattant en Alsace, il rejoint
les Pacifiens à Paris avant de repartir vers le front des Alpes, toujours comme officier de liaison avec la
brigade. Son dossier d’officier au SHD indique qu’il « rejoint bénévolement le BIMP sur le front des Alpes
pour participer à l’affaire des forts de l’Authion. » Il retourne Paris après la capitulation allemande.
Service Historique de la Défense, GR 2000 Z 207 10507.
388
Liste nominative de la Compagnie de QG 31. Archives de la Nouvelle-Calédonie, 31 J 9.
389
État Signalétique et des Services de William Grand, archives de l’auteur.
390
Gaston RABOT, Journal de guerre, op. cit.
391
État Signalétique et des Services de Paul Courtot. Archives de Nouvelle-Calédonie, 31 J 19.
392
État Signalétique et des Services d’Édouard Magnier. Service Historique de la Défense, GR 16 P
383335.
393
Service Historique de la Défense, GR 16 P 604230.
394
Entretien avec Ari Wong Kim, 22 février 2019. Son dossier 16 P ne le mentionne pas.
89
Alsace puis dans l’Authion, toujours dirigé par le commandant Magendie secondé par
le capitaine Roudaut.
Le séjour parisien des volontaires du Pacifique est ainsi placé sous le signe de trois
grandes thématiques, la première d’entre elle étant la grande liberté dont ils bénéficient,
et dont ils profitent largement. Leur arrivée à Paris inaugure ce que Jean-Christophe
Shigetomi appelle à très juste titre un « régime de permission permanente »395. En effet,
« il leur suffit de franchir le poste de police de la caserne de la Tour-Maubourg pour se
retrouver directement dans la rue au contact des populations parisiennes »396, et pour
découvrir la capitale lointaine du pays pour lequel ils se sont battus, grande métropole
sans comparaison aucune avec les communes et villages du Pacifique, pas même
Papeete ni Nouméa. Les volontaires intensifient leur pratique du tourisme, visitent
l’école des Beaux-Arts, Notre-Dame, le Trocadéro, le Louvre (où ils admirent la
tapisserie de Bayeux), la gare d’Orsay, le Palais de Justice et la Sainte Chapelle, le
Sacré Cœur, multiplient les balades, les rencontres, les achats, les repas chez
l’habitant397. Le séjour parisien revêt ainsi ce double aspect d’antichambre du retour à
la vie civile et d’élargissement du champ des possibles, ouvrant ainsi la voie à de
nouvelles expériences rendues envisageables par la mobilité qui leur est accordée. Il
leur est en effet permis de se rendre régulièrement en permission chez l’habitant, tant
en ville qu’en province398. Plus significatif encore, un certain nombre de volontaires
nouent des unions à Paris avant de rentrer dans le Pacifique avec leurs compagnes ;
c’est notamment le cas de John Martin, qui épouse l’A.F.A.T. Simone Rouchon à la
mairie du 7e arrondissement le 17 juillet 1945, et de Raymond Lehartel, dont la fille
aura Walter Grand pour parrain.
La seconde de ces thématiques est celle du divertissement. Les onze mois de vie
de caserne constituent une expérience nouvelle pour les volontaires, sensiblement
différente des divers casernements connus par les Pacifiens en Australie et en Syrie,
marquée par une temporalité nouvelle semblable à celle du temps de paix. Les Pacifiens
395
Jean-Christophe SHIGETOMI, Tamari’i Volontaires, op. cit., p. 276.
Ibid., p. 275.
397
« Nos indigènes, volontaires du Bataillon du Pacifique, en promenade à Paris », Le Bulletin du
Commerce no 3519, mercredi 11 juillet 1945. Archives municipales de Nouméa.
398
Édouard BERGE, « Les "Volontaires du Pacifique" à Paris », Journal de la Société des Océanistes, 1-1,
1945, 133.
396
90
se retrouvent ainsi dans un cadre idéal pour pratiquer la musique, aussi bien entre eux
que devant le public parisien. Leur rencontre avec Django Reinhardt, célébrissime
guitariste de jazz manouche, est relatée par Jean-Christophe Shigetomi :
« Le Paumotu399 Octave Neri et son ami Robert Pihahuna montent
un petit groupe de musique tahitienne, la société parisienne étant alors
très friande de mode hawaiienne. Neri, avec sa guitare de marque
Gibson achetée à un soldat américain qui avait déparqué à Cavalaire
en Provence, accompagné de ukulele, se produit avec son groupe dans
de petits cabarets tahitiens. […] Le gitan Django Reinhardt qui
découvre le groupe tahitien est interpellé par la façon paumotu de
jouer, consistant à pincer les cordes avec trois doigts sur une rythmique
tambourinante, mais surtout par la Gibson de Neri. […] Neri qui refuse
de se débarrasser de l’instrument concède néanmoins son prêt à
Django et acquiert de ce dernier le privilège de l’accompagner dans
ses tournées avec son groupe des îles. Django permet ainsi aux
Tamari’i Volontaires de se produire dans les cabarets de la capitale,
du Moulin Rouge au Lido, et d’accompagner des artistes en vogue
comme Stéphane Grappelli, les sœurs Étienne ou le jazziste
Joe Bouillon, marié à la chanteuse et danseuse américaine
Joséphine Baker. »400
Les volontaires bénéficient par ailleurs de l’assistance et de la solidarité des
Océaniens de Paris, certes relativement peu nombreux mais ayant réussi à se réunir en
un comité d’accueil créé pour l’occasion de leur arrivée, dès octobre 1944401. Avec leur
concours, les volontaires se rendent à de nombreuses réunions organisées en leur
honneur, celle du 10 décembre 1944 se déroulant en présence du ministre des
colonies402. Édouard Bergé, Calédonien résidant à Paris et membre fondateur de
l’Amicale des Calédoniens de la capitale en 1922403, s’investit grandement dans les
activités du comité d’accueil et permet qu’un détachement de volontaires se rende à
399
« Paumotu » est le gentilé des îles Tuamotu, un des cinq archipels de la Polynésie française.
Jean-Christophe SHIGETOMI, Tamari’i Volontaires, op. cit., p. 277.
401
Édouard BERGE, « Les "Volontaires du Pacifique" à Paris », op. cit., p. 132.
402
Ibid., p. 133.
403
Isabelle MERLE et Adrian MUCKLE, L’indigénat, op. cit., p. 381.
400
91
Créteil le 12 avril 1945 pour y être reçu à la mairie404 et visiter ses installations
maraîchères405. Le procès-verbal de la séance du 27 juin 1946 du conseil municipal de
Nouméa fait ainsi état d’un échange avec le conseil municipal de Créteil406, ayant
adressé à son homologue nouméen un extrait du livre d’or de la commune407.
Édouard Bergé s’évertue également à faire connaître la Nouvelle-Calédonie auprès du
public parisien et métropolitain, en prenant la parole à la radio pour évoquer le parcours
du bataillon408 ; son allocution fut ensuite reproduite dans la presse calédonienne409.
Enfin, la troisième et dernière thématique est celle de la reconnaissance. En dépit
du fait que la présence des Pacifiens à Paris relève en premier lieu d’une vague de
« blanchiment » des troupes, cette mise au repos peut également apparaître comme un
geste supplémentaire en faveur des soldats engagés dans les Forces Françaises Libres
parmi les tout premiers, ayant quitté leurs territoires depuis plus de trois années et
parcouru la moitié du globe pour affronter l’ennemi sur les champs de bataille. Il est
ainsi intéressant de noter que Paris n’était pas la destination envisagée en premier lieu
par le commandement pour les Pacifiens. Dès la mi-octobre 1944, il fut question de les
envoyer dans le Midi, dans la région de Toulon, en unité constituée destinée à être
intégrée au 18e régiment de tirailleurs sénégalais et redéployée en Extrême-Orient410.
Ils furent finalement retirés du front et dirigés sur la capitale pour des raisons qui ne
sont pas mentionnées dans nos archives ; notre hypothèse étant que les Pacifiens se
virent finalement accorder un repos bien mérité après trois ans de campagnes en
attendant d’être dirigés vers leurs foyers. C’est ainsi qu’ils sont affectés, aux Invalides,
à la garde du gouverneur militaire de Paris, ce qui les place au premier rang de toutes
404
L’ancien bâtiment de la mairie de Créteil (place Henri Dunant) accueille aujourd’hui la Maison du
Combattant.
405
Mené par René Pètre, le détachement compte 24 hommes au total dont Raoul Michel-Villaz,
Tetuahira Teaupahere, Cyprien Braïno (du second contingent calédonien) et Victor Gazengel.
406
Créteil est libérée par les Américains le 30 août 1944.
407
Archives municipales de Nouméa. Consulté le 5 septembre 2019.
Le document conservé par les Archives municipales de Nouméa n’est qu’une reproduction manuscrite
intégrée au PV de la séance. Nous avons pu obtenir des Archives municipales de Créteil une copie
numérisée du document original.
408
Édouard Bergé (1898 – 1973), soucieux de l’avenir de la Nouvelle-Calédonie, commence par approcher
le gouvernement de Vichy et à écrire des articles pour « rappeler aux métropolitains l’existence de la
Nouvelle-Calédonie et "son âme française" » (Merle & Muckle, p. 381). Il entrera ensuite en contact avec
les Alliés, « usant d’une stratégie opportuniste […] lorsque [leur] victoire se dessine » (Ibid.)
409
« Causerie sur le Bataillon du Pacifique et la Nlle-Calédonie au micro de Radio-Paris », Le Bulletin du
Commerce no 3525, mercredi 1er août 1945.
410
Lettre du général de Lattre de Tassigny au général Brosset, 18 octobre 1944. Service Historique de la
Défense, GR 12 P 273.
92
les cérémonies et de toutes les réceptions officielles (chefs d’État et généraux alliés,
etc.) organisées dans la capitale en 1944–1945.
Le temps des cérémonies s’achève pour les Pacifiens en septembre 1945, dans les
derniers jours de leur présence à Paris, parachevant la reconnaissance qui leur est
accordée par les plus hautes autorités : le 18 septembre, ils sont passés en revue par le
successeur du général Koenig au poste de gouverneur militaire de Paris, le général
Legentilhomme411. La cérémonie comporte également le dépôt d’une gerbe sur la tombe
du Soldat Inconnu par le capitaine Hervé, ainsi qu’un défilé sur les Champs Élysées et
sous l’Arc de Triomphe412. Le 20 septembre, ils sont passés en revue aux Invalides par le
général de Gaulle qui leur fait ses adieux413. Ils quittent Paris ce même jour.
411
Le général Paul Legentilhomme (1884-1975) devient gouverneur militaire de Paris en juillet 1945, tandis
que Koenig reçoit le commandement de la zone d’occupation française en Allemagne.
412
La cérémonie est photographiée ; voir dossier photographique en annexes.
413
Idem.
93
2.
RAPATRIEMENT PAR LE « SAGITTAIRE » ET RETOURS AU PAYS
Le 16 septembre 1945, la Compagnie du Pacifique est créée de toutes pièces,
destinée à assurer le rapatriement des volontaires survivants vers la Polynésie, les
Nouvelles-Hébrides et la Nouvelle-Calédonie. Le capitaine Hervé, arrivé à Paris le 12
mai, en prend le commandement. La grosse majorité de ses soldats sont des vétérans du
Bataillon du Pacifique, issus de la compagnie de QG 31, auxquels sont adjoints d’autres
volontaires rapatriables sur le Pacifique ayant appartenu à d’autres unités de la
France Libre tels que le capitaine Georges Dubois, chef de la Milice Civique de NouvelleCalédonie passé en 1943 à la 2e DB puis au service de géodésie des FFL au Levant, ainsi
que Raymonde Teyssier, engagée dans le Corps des Volontaires Françaises414 ayant servi
à Londres, en AEF, à Alger puis à l’Assemblée consultative à Paris415. Le procès-verbal
de création de l’unité mentionne un effectif s’élevant à 313 personnes, dont onze officiers
et deux aspirants416. La compagnie compte également un sergent-major417, grade peu
commun dans les FFL mais dont la présence démontre la visée purement administrative
de l’unité, s’agissant d’un grade purement administratif418 (il le devient après la guerre de
1870), dont les attributions sont notamment de s’occuper de la comptabilité de la
compagnie. L’esprit du Bataillon du Pacifique n’en disparaît pas pour autant, au contraire,
son empreinte et son héritage demeurent encore très forts : d’une part à travers la
composition de la compagnie (uniquement des volontaires rapatriables vers l’Océanie),
d’autre part grâce au prestige dont bénéficie encore le bataillon, malgré trois années
passées sous une autre appellation : en effet, la fiche matriculaire de la caporale
Raymonde Jore419, conservée aux archives territoriales de Nouvelle-Calédonie420,
continue d’utiliser l’appellation « bataillon du Pacifique » pour désigner son affectation
à compter du 1er août 1945. La presse du Pacifique continue également de se référer au
« bataillon du Pacifique », présent sur les unes des quotidiens calédoniens Le Bulletin du
414
Voir : Sébastien ALBERTELLI, Elles ont rejoint de Gaulle. Histoire du Corps des Volontaires françaises,
Paris, Perrin, 2020.
415
Fiche matriculaire de Raymonde Jore. Archives territoriales de Nouvelle-Calédonie, 31 J 20.
416
Procès-verbal de formation de la Compagnie du Pacifique. Service Historique du Pacifique,
GR 12 P 273.
417
Le grade de sergent-major est compris entre le sergent-chef et l’adjudant.
418
Les grades [en ligne] Ministère des Armées, 2011, consulté le 28 juillet 2020. defense.gouv.fr/terre/blocles-essentiels/les-grades.
419
Raymonde Jore, ép. Teyssier (1917 – 1995) est avec Raymonde Rolly la seule Calédonienne enrôlée
dans le Corps des Volontaires Françaises. Elle se retrouve ainsi successivement à Sydney, Londres,
Brazzaville, Alger (où elle se marie) puis Paris.
420
Archives de Nouvelle-Calédonie, 31 J 20.
94
Commerce du 1er août 1945 et La France Australe du 13 mai 1946421, bien que ce soit
plutôt, selon nous, pour des raisons évidentes de familiarité avec cette appellation, en
vigueur lors du départ de mai 1941 que les mêmes quotidiens avaient alors couvert.
Malgré la fin du conflit, l’attente sera encore longue avant de pouvoir embarquer
vers le Pacifique. Les liaisons maritimes tardent à se remettre en place. La compagnie ne
quitte Paris qu’en septembre 1945 alors que la guerre est finie depuis mai, et connaît de
nouveau la vie de caserne à Saintes de septembre à décembre 1945, puis à Saint-Laurentdu-Var jusqu’en février 1946, et enfin à Marseille. Ce n’est que le 14 mars 1946 que le
premier navire effectuant la liaison avec l’Océanie quitte la cité phocéenne avec les
volontaires à son bord. Cette période de plusieurs mois, entre le départ de Paris et
l’embarquement sur le « Sagittaire » est complètement absente de l’historiographie, de la
littérature grise, des témoignages et des sources, à l’exception des dossiers individuels de
certains soldats n’indiquant que les dates d’arrivée et de départ, parfois également le nom
des casernes. Seules quelques rares photographies de la traversée nous sont parvenues,
prises à bord du bateau et à l’arrivée à Tahiti422. En revanche, cette dernière ainsi que
celle à Nouméa sont relatées par Jean-Christophe Shigetomi423 et largement couvertes par
la presse locale424.
À Marseille, se mêlent aux volontaires du BP1 d’autres volontaires polynésiens et
calédoniens engagés aux FNFL, aux FAFL, aux commandos SAS (parmi lesquels les
calédoniens Paul Klein425, qui donnera son nom à la base aérienne 186426, et Paul
Robineau, auteur d’un témoignage publié427, ainsi que le Tahitien Albert Colombani), qui
feront avec eux la traversée vers le Pacifique. Le « Sagittaire », d’ordinaire destiné à
accueillir deux cents passagers, se retrouve surpeuplé, puisque ce sont près de deux mille
personnes qui y embarquent428. Outre les problèmes d’intimité et d’hygiène ainsi posés,
421
Archives municipales de Nouméa.
Jean-Marie DALLET, Christian GLEIZAL et Jean-Louis SAQUET, « L’épopée du bataillon du Pacifique »,
dans Le Mémorial polynésien, vol. 6 : 1940-1961, Papeete, Hibiscus éditions, 1977, p. 125-175.
423
Jean-Christophe SHIGETOMI, « Les retours » dans Tamari’i Volontaires, op. cit., p. 285-294.
424
Extraits du « Bulletin du Commerce » et de « La France Australe ». Archives municipales de Nouméa.
425
Paul Klein (1909 – 2010) s’était porté volontaire auprès de Félix Broche, mais en précisant son désir de
servir comme pilote de chasse. Il suit les cours d’aspirant à Damas en 1941 avant d’être affecté à la
1ère compagnie d’infanterie de l’air.
426
La base aérienne 186 est située sur l’aéroport international de Nouméa – La Tontouta.
427
Paul ROBINEAU, Paras calédoniens de la France libre, Nouméa, Éditions du Cagou, 1989.
428
Jean-Christophe SHIGETOMI, Tamari’i Volontaires, op. cit., p. 281.
422
95
le capitaine Hervé doit également faire face à des problèmes de discipline, provoqués par
des soldats dont la démobilisation effective n’arrivera qu’à leur arrivée mais qui célèbrent
déjà leur retour. Par ailleurs, dans leurs bagages, les vétérans emportent quantité d’armes
et de munitions en tous genre, qui seront notamment utilisées lors de l’escale technique
du navire dans les Caraïbes, en Martinique puis en Guadeloupe, sous l’emprise de l’alcool
(surtout du rhum blanc). La « belle soûlographie » rapportée par Édouard Magnier dans
son journal429 lorsqu’il se trouvait avec ses camarades en Tunisie se poursuit ainsi sur le
chemin du retour, occasionnant, cette fois encore, de violentes rixes430.
Du reste, les volontaires passent le temps de la traversée comme ils savent le faire,
au gré des matchs de boxe, des jeux de carte, des chants et des danses, des conférences et
des échanges entre volontaires du BP1, marins, aviateurs et commandos, qui n’avaient
souvent pas eu l’occasion de se connaître avant la guerre et qui échangent leurs histoires.
Pendant ce temps, en prévision de leur arrivée à Tahiti, le gouverneur des EFO JeanCamille Haumant431 institue par décret une « commission en charge de l’établissement
des cérémonies et réjouissances »432 pour accueillir et célébrer les Tahitiens de retour et
les Calédoniens de passage. Lorsqu’à l’aube du 5 mai 1946 le « Sagittaire » se présente à
l’entrée de la rade de Papeete, une foule considérable (surtout au vu de la population de
la colonie), s’est déjà massée sur les quais, prête à accueillir les volontaires. Ce 5 mai
1946 marque véritablement la fin de la guerre pour ces derniers. Plus que les allocutions
prononcées par le gouverneur Haumant et le capitaine Hervé, ce sont les plusieurs jours
de grandioses célébrations dont les deux premiers sont officiellement rendus fériés qui
marqueront durablement les esprits. Il suffit de lire le témoignage du SAS calédonien
Paul Robineau, extrait de son témoignage publié en 1989, pour en prendre la mesure :
Il s’agit là des chiffres donnés par John Martin. Le SAS calédonien Paul Robineau avance quant à lui le
chiffre de 723 militaires (il ne mentionne ni les fonctionnaires envoyés dans le Pacifique ni les épouses
accompagnant leurs maris) pour une capacité de 100 à 120 passagers. Ibid., p. 281-282.
429
Journal de guerre d’Édouard Magnier. Archives territoriales de Nouvelle-Calédonie, 1 J 53.
430
Jean-Christophe Shigetomi rapporte en effet que lors de l’escale caribéenne, « des lieux de boisson
seront ainsi saccagés par des tirs vengeurs ». Jean-Christophe SHIGETOMI, Tamari’i Volontaires, op. cit.,
p. 282.
431
Jean-Camille Haumant devient gouverneur des EFO le 13 décembre 1945, succédant à Georges Orselli,
en poste depuis le 1er octobre 1941 (il avait succédé au gouverneur général Brunot, qui lui-même avait pris
la place du Dr de Curton).
432
Jean-Christophe SHIGETOMI, Tamari’i Volontaires, op. cit., p. 287.
96
« L’escale à Papeete est titanesque, hors du commun et pour tous
restera le vrai symbole de la fin de la guerre et de notre retour. En effet,
les Tahitiens rentrent chez eux après, pour certains, plus de quatre
années d’absence. Toutes les îles sont là pour les recevoir. […] Le
navire, après un laborieux accostage, est pris d’assaut avant même que
soit fixée la coupée. Les embrassades, les rires, les pleurs, les chants se
mêlent, les fleurs jonchent les ponts, les salons, le quai, la mer. Durant
une semaine, nuit et jour, les îles organisent de fantastiques
ma’a (repas) gratuits, et danses folkloriques en grands costumes, des
réceptions permanentes, officielles aussi bien que privées. […] Cette
immense kermesse est incroyable, prenante, endiablée ; d’ailleurs on
en parle encore comme de la plus grande fête jamais organisée en
Polynésie française et croyez-moi, ce n’est pas peu dire. »433
Ce faste et cette longueur des célébrations sont typiquement polynésiens. On les
retrouve encore de nos jours lors des fêtes du tiurai (ou fêtes de juillet434, inaugurées par
la fête de l’autonomie le 29 juin435), célébrées pour la première fois en 1881436. Ces fêtes
sont ponctuées de compétitions sportives, de danses, de chants. Les himene, chants
polyphoniques polynésiens en langue tahitienne à l’exécution fort difficile, peuvent pour
leur part réunir jusqu’à plusieurs centaines de chanteurs. Ainsi, à leur arrivée, les
volontaires renouent pour de bon avec leurs racines, ils sont accueillis par l’essence même
de la culture tahitienne, qui ne les avait jamais réellement quittée, et qu’ils avaient
entretemps tenté de conjuguer avec la culture militaire. Un groupe de chanteurs du district
de Mataiea437 composera même un himene spécialement entonné pour l’arrivée du
« Sagittaire »438. Un autre chant à six voix, également en tahitien, rappelle l’engagement
du Bataillon du Pacifique à Bir Hakeim439.
433
Extrait de Paul ROBINEAU, Paras calédoniens de la France libre, Nouméa, Éditions du Cagou, 1989,
cité dans Jean-Christophe SHIGETOMI, Tamari’i Volontaires, op. cit., p. 283.
434
Le mot tahitien tiurai signifie juillet, il est dérivé de l’anglais july (Académie Tahitienne).
435
La fête de l’autonomie, fériée en Polynésie Française, célèbre l’annexion du royaume Pōmare par la
France le 29 juin 1880.
436
Les fêtes de Tiurai : 133 ans d’histoire [en ligne] Tahiti Infos, 4 juin 2014, consulté le 31 juillet 2020.
https://www.tahiti-infos.com/Les-fetes-du-Tiurai-133-ans-d-histoire_a102590.html.
437
La commune de Mataiea se situe au sud-est de la partie principale de l’île de Tahiti, entre Papara et
Papeari.
438
Le texte de ce himene est conservé aux archives territoriales de Polynésie Française (SPAA, fonds 48W)
et reproduit dans Jean-Christophe SHIGETOMI, Tamari’i Volontaires, op. cit., p. 292.
439
Idem, reproduit dans ibid. p. 293.
97
Aussi, au vu de l’ensemble des célébrations organisées à Tahiti, il est aisé de
comprendre l’amertume des Calédoniens à leur retour à Nouméa, le 21 mai 1946, malgré
le rassemblement de la foule sur le quai, le déploiement des drapeaux dans les rues, les
réceptions et discours officiels en leur honneur, et les retrouvailles avec les familles et les
proches. Certes, l’accueil fut digne d’un retour de volontaires après cinq ans d’absence,
cependant, cela n’empêche pas Jean Tranape de souligner que :
« Le retour au Caillou ne fut pas exubérant. L’accueil fut plutôt froid
par rapport à Tahiti. Là-bas, les pirogues étaient venues au-devant du
bateau, et il y avait des groupes de chanteurs et la musique qui nous
attendaient sur le quai. »440
En tous cas, des deux côtés du Pacifique, en dépit de la ferveur des retours, les
réjouissances seront de courte durée. En effet, les volontaires connaîtront une réinsertion
difficile dans la vie civile, marquée par la déception et la subsistance de comportements
coloniaux en voie de disparition mais toujours présents.
440
Jean-Christophe SHIGETOMI, Tamari’i Volontaires, op. cit., p. 282.
98
II. La sortie de guerre du BP1
1.
DESTINEES D’APRES-GUERRE
Dans son article sur les « générations résistantes à l'épreuve de la sortie de guerre »441,
l’historien de la résistance Guillaume Piketty souligne le fait que « les voies et moyens
par lesquels les résistants français de l’intérieur sont progressivement revenus à la vie du
temps de paix ont rarement été étudiés en tant que tels. »442 Tout en excluant de son
propos les membres de la résistance extérieure, il pose la question de l’existence d’une
« génération résistante », concept que nous pensons être applicable aux volontaires du
Pacifique. Il écrit notamment :
« De fait, un "événement fondateur de grande amplitude"
susceptible de constituer les résistants en "génération" est aisément
identifiable : la série d’humiliations de juin-juillet 1940, quand bien
même les conséquences en furent-elles vécues différemment de chaque
côté de la ligne de démarcation. En outre, les résistants partagèrent des
codes, des mots et des références. La sensation, aussi, d’être "jeunes"
car ils vivaient intensément au service d’une grande cause, sensation
qui autorisa par exemple Pierre Brossolette à qualifier la France
combattante de "long dialogue de la jeunesse et de la vie". La joie, à
terme, d’avoir vaincu et de pouvoir beaucoup espérer. »443
Le retour à la vie civile des volontaires de la France Libre crée ainsi bon nombre
d’espoirs parmi eux, espoirs encore plus grands et plus forts pour les soldats coloniaux
que sont les Pacifiens. Comme les résistants de l’intérieur, ils partagèrent des codes,
les marqueurs de leur culture océanienne, comme eux ils vécurent un « événement
fondateur de grande amplitude », les ralliements de leurs territoires à l’été 1940 (la
distance les empêchant de vivre la débâcle du mois de juin). Et comme eux, leur
réinsertion dans la vie civile fut difficile et fortement marquée par la guerre. Si celle de
leurs camarades Français libres métropolitains fut marquée par « l’hostilité conjointe des
441
Guillaume PIKETTY, « Générations résistantes à l’épreuve de la sortie de guerre », Revue historique,
641-1, 2007, p. 151-163.
442
Ibid., p. 151.
443
Ibid., p. 155.
99
communistes et des anciens vichystes »444, la leur les verra confrontés à une société
coloniale dont le déclin est amorcé mais qui demeure en place encore un temps. Certes,
la citoyenneté est généralisée à l’ensemble des habitants des colonies dès 1946, toutes
ethnies confondues ; certes, de nouvelles institutions voient le jour, telles que
l’Assemblée Territoriale dans les EFO, et la possibilité nouvelle d’élire des représentants
(députés et sénateurs) leur est accordée, cependant, les mentalités et les rapports
coloniaux ne disparaissent pas immédiatement pour autant, et les anciens combattants
dans leur grande majorité connaissent des difficultés pour trouver un emploi. Si les
officiers bénéficient de facilités et accèdent à des postes de responsabilité (on retrouve
ainsi Robert Hervé négociant, président de la chambre de commerce et d'industrie de
Polynésie Française et du conseil d’administration du port de Papeete, puis consul
honoraire du Danemark445), il en va différemment pour les sous-officiers et les hommes
de troupes qui, globalement, se maintiennent dans les mêmes classes sociales qu’avantguerre. Certains vont même jusqu’à retourner se fixer en France, tels qu’Ari Wong Kim,
dont le retour à Tahiti fut « catastrophique »446 ; il fut employé au Bon Marché. Jean
Tranape en fera de même : dessinateur aux travaux publics de Nouméa avant la guerre, il
sera après celle-ci embauché comme dessinateur industriel aux Entreprises Boussiron, à
Paris447. Seule une poignée de volontaires choisit de demeurer dans l’armée, c’est le cas
de Philippe Bernardino qui combat de nouveau en Indochine avec le grade d’adjudantchef448 aux côtés de ses compatriotes Brix Etilage, Taero Taerea et Raymond Varney, tué
le 14 août 1952 à la tête de sa section.449
Plus encore, ce n’est pas exagérer que de parler de désillusion. Polynésiens comme
Calédoniens font face à une pénurie d’emploi, en dépit des promesses données par
l’administration. La situation mène à la création par les anciens combattants, à Tahiti, de
l’Union des Volontaires, qui se mobilisent afin de faire valoir leurs droits à l’emploi.
Cette mobilisation aboutit notamment en l’affaire dite du Ville d’Amiens
(juin – novembre 1947), lorsque trois fonctionnaires sont envoyés de métropole450.
444
Jean-François MURACCIOLE, Les français libres, op. cit., p. 298.
Ordre de la Libération.
446
Questionnaire retourné par son neveu, M. Georges Buisson.
447
Questionnaire retourné par son fils, M. Jean-Claude Tranape.
448
Les aspirants André Salvat et Jean Bellec suivent également une carrière de militaire, le premier
atteignant le grade de colonel et le second celui de général de brigade. Le commandant Edmond Magendie,
dernier chef de corps du BIMP, finira également général.
449
Jean-Christophe SHIGETOMI, Tamari’i Volontaires, op. cit., p. 296.
450
Le Ville d’Amiens est le navire ayant acheminé les trois fonctionnaires vers Papeete.
445
100
Estimant que les postes qu’ils viennent occuper pouvaient être attribués à des locaux,
l’Union organise une manifestation visant à empêcher le débarquement des
fonctionnaires. La manifestation est menée conjointement avec le Comité Pouvanaa,
fondé par Pouvanaa a Oopa451, vétéran de 14-18, grande figure politique polynésienne,
député et futur sénateur. Fait étonnant, ils vont également jusqu’à s’allier avec
Noël Ilari452 : également vétéran de la Grande Guerre, capitaine de réserve arrivé à Tahiti
en 1934, il entre en conflit avec les autorités en raison de ses opinions d’extrême-droite.
Il retourne à ses frais en métropole pour combattre en 1940 et entre au service du
Maréchal Pétain, au ministère des sports et de la jeunesse. Après avoir passé la guerre en
Indochine occupée, il retourne en Polynésie en 1946453, devient exploitant agricole aux
îles Australes et entame une carrière politique qui l’amènera à devenir président de
l’Assemblée Territoriale de 1953 à 1955. Il est ainsi intéressant de voir que les anciens
combattants sont prêts à s’allier à l’ennemi de la veille pour protester contre
l’administration coloniale et ses promesses non tenues. Pour citer l’historien Jean-Marc
Regnault, si, à travers Ilari, « c'est la protestation classique de l'extrême-droite contre
l'administration franc-maçonne et affairiste qui s'exprime »454, l’alliance avec les anciens
Français libres demeure malgré tout possible « tant il est vrai que dans les É.F.O., ceux
qui ont été ennemis hier peuvent faire aujourd'hui de solides alliés. »455 À l’issue des
manifestations, trente-quatre personnes sont arrêtées, et les meneurs ainsi que plusieurs
manifestants, dont des anciens volontaires du Bataillon du Pacifique (Ernest Drollet,
Marcel Oopa, Calixte Jouette, …) et des FFL (dont le SAS Benjamin Colombani) seront
jugés, puis acquittés en novembre 1947456.
La fin de la guerre et le retour des volontaires seront ainsi le moteur de la carrière
politique de nombre d’entre eux. En effet, certains entameront des carrières
parlementaires et/ou œuvreront dans la représentativité de leurs territoires, surtout chez
451
Voir : Bruno SAURA, Pouvanaa a Oopa : père de la culture politique tahitienne, Pirae, Au vent des îles,
2012 ; et : Jean-Marc REGNAULT, Te metua : l’échec d’un nationalisme tahitien, 1940 – 1964, Pirae,
Polymages, 1996
452
Noël Ilari (1897 – 1985) est l’auteur de mémoires : Noël ILARI, Secrets tahitiens : journal d’un popaa
farani, 1934 – 1973, 2e éd., Paris, Debresse, 1978.
453
Envoyé en Polynésie en 1941, le gouverneur Émile de Curton lui refuse l’entrée sur le territoire.
454
Jean-Marc REGNAULT, « La survivance des institutions coloniales après 1945. L’exemple du Conseil
Privé du Gouverneur des établissements français d’Océanie : l’occasion manquée de 1947 », Outre-Mers.
Revue d’histoire, 86-324, 1999, p. 299.
455
Ibid., p. 300.
456
L’affaire du Ville d’Amiens [en ligne] Histoire de l’Assemblée de Polynésie française, s.d., consulté le
1er août 2020. http://histoire.assemblee.pf/articles.php?id=48.
101
les Tahitiens : pour ne nommer qu’eux, Walter Grand devient conseiller municipal de
Papeete et est élu à l’Assemblée Territoriale de Polynésie Française dès 1951, assemblée
dont il fut président de 1955 à 1958457 ; Marcel Oopa, fils de Pouvanaa a Oopa, succédera
à son père comme député en 1960, et John Martin deviendra quant à lui adjoint au chef
de la Délégation de la Polynésie Française, boulevard Saint-Germain à Paris, et servira
aux affaires économiques du territoire. Parmi les Calédoniens, Édouard Magnier et
Émile Limousin entreront au Conseil général, Tom Hagen s’engagera également en
politique, et Roger Gervolino sera pour sa part élu premier député de l’archipel. Caporal
au Bataillon du Pacifique, il est appelé à siéger à l’Assemblée Consultative à Alger dès
1943 et est élu député le 21 octobre 1945. Réélu deux fois, il siègera jusqu’en 1951458.
Du reste, à l’inverse de la « promotion sociale » que Jean-François Muracciole
observe chez une majorité de Français libres après 1945, notant que « à peine 26 % des
Français libres d’origine populaire sont demeurés paysans ou ouvriers, alors qu’une
proportion égale (25,9 %) a réalisé, en une seule génération, un véritable bond social en
accédant aux catégories supérieures »459, avec une prédisposition pour les postes dans la
filière nucléaire, comme officiers généraux, artistes, ministres460 et autres hauts
fonctionnaires, il semblerait que les volontaires du Bataillon du Pacifique aient choisi des
reconversions modestes, si ce n’est discrètes. Il est en effet raisonnable d’estimer que la
proportion de volontaires s’étant maintenue dans les classes sociales populaires ou
moyennes, retrouvant leurs emplois d’avant la guerre, entrant dans l’administration ou
devenant petits fonctionnaires dépasse de très loin les 26 %. Les exemples individuels
sont nombreux : ainsi, William Grand devient agent de police après quelques années
passées comme chef de port dans les Tuamotu, Max Noble entre au service d’hygiène de
Polynésie, Philippe Bernardino sera à son retour d’Indochine employé à la Brasserie de
Tahiti461, Gaston Rabot tiendra un restaurant avant de devenir docker au port de Nouméa,
Auguste Bénébig œuvrera comme mécanicien-garagiste jusqu’à sa retraite en 1975462 ; à
cette liste très loin d’être complète s’ajoutent ceux retournés en France pour s’y établir
457
Walter Grand succède à Noël Ilari à la présidence de l’Assemblée Territoriale. Il accueille durant son
mandat le général de Gaulle en septembre 1956 et se rend en métropole pour évoquer l’application en
Polynésie de la loi-cadre de Gaston Defferre avec ce dernier.
458
Assemblée Nationale (en ligne).
459
Jean-François MURACCIOLE, Les français libres, op. cit., p. 303.
460
Jean-François Muracciole en recense pas moins de 34, « un gouvernement au complet » (Ibid., p. 308).
461
Questionnaire retourné par sa fille, Mme Dolorès Chan.
462
Ordre de la Libération.
102
définitivement (Jean Tranape, Ari Wong Kim, Louis Kasni Warti, …), où ils répondent
également au même schéma. Il semblerait ainsi que le retour à la vie civile, à la vie
d’avant, soit marqué par les discriminations exercées à l’encontre des populations
coloniales qui prévalaient avant la guerre. Les changements politiques et sociaux qui
surviennent à partir de 1945-1946 ne sont, dans un premier temps, que formels : même
s’ils signifient beaucoup et ouvrent une ère nouvelle, les changements de mentalités chez
les Européens du Pacifique ne changent que progressivement463.
Pour clore son chapitre sur les destinées d’après-guerre des Français libres, JeanFrançois Muracciole émet trois hypothèses pour expliquer le fort taux d’ascension social
à partir de 1945464 : à travers les réseaux de solidarité et d’amitié entre anciens FFL, grâce
à l’état d’esprit qui les caractérise, marqué par l’ouverture et l’aventure, ou, enfin, par la
prédisposition, « par leurs origines sociales et leur haut niveau d’études »465. Puisque les
volontaires du Pacifique appartiennent globalement aux milieux populaires466 et qu’ils
s’y maintiennent par la suite, et puisque la majorité écrasante des Français Libres provient
à l’origine des classes sociales hautes tout en connaissant une ascension sociale aprèsguerre, il semblerait que la troisième hypothèse soit de mise, en tous cas au moins en ce
qui concerne les Pacifiens.
Nous pensons ainsi pouvoir considérer les anciens Français libres du Pacifique
comme formant une génération résistance à part entière, avec sa propre culture (et sa
propre culture de guerre), ses propres codes et ses propres références, faisant face à une
sortie de guerre comparable à celle des autres résistants par sa difficulté mais qui leur est
néanmoins spécifique, en raison de la différence sensible de contexte entre la métropole
et les colonies du Pacifique.
463
Jacques Tallec, gouverneur de Nouvelle-Calédonie de 1944 à 1947, avait par exemple adressé un
télégramme en décembre 1945 réclamant le rétablissement de l’indigénat, fraîchement aboli
(Merle & Muckle, p. 451).
464
Jean-François MURACCIOLE, Les français libres, op. cit., p. 334.
465
Ibid., p. 334.
466
Voir le présent mémoire, p. 29.
103
2.
LA COHESION PAR LA MEMOIRE
Après les retours au pays des anciens combattants du Bataillon du Pacifique, outre les
associations à but politique telles que l’Union des Volontaires, ceux-ci fondent deux
associations de vétérans pour perpétuer la cohésion les reliant et à des fins d’entraide
mutuelle : l’Association des Anciens Combattants (à Tahiti), et l’Association des
Français Libres (à Nouméa). Les archives de cette dernière, présidée par le lieutenant
Tom Hagen pendant plusieurs décennies467, sont conservées aux archives territoriales de
Nouvelle-Calédonie dans le fonds 31 J, qui constitue l’essentiel des documents que nous
y avons consultés en septembre 2019. Aussi, quatre cartons contenant des dossiers
individuels et nominatifs regroupent la correspondance qu’ont entretenu ces volontaires
avec l’association calédonienne. Il en ressort qu’un très grand nombre de dossiers que
nous avons consulté (presque tous) contiennent des lettres de demande de prêt adressées
à l’association, pouvant aller de 40 000 à 125 000 francs. Ces fonds, destinés par exemple
à l’achat d’une maison, de matériel professionnel ou au financement du voyage de retour
en Nouvelle-Calédonie d’anciens volontaires se trouvant en France. René Delessert,
sergent du premier contingent, écrivit ainsi à Tom Hagen en novembre 1953 depuis sa
résidence de Saint-Ouen, en région parisienne :
« Je t’avais demandé un prêt de trois cent cinquante mille francs
métro468 croyant que cela t’était possible. Pour mon retour et l’achat
de quelques outillages qui m’auraient été nécessaires. Mais je
comprends que cela était chimérique. Aussi je te renouvelle ma
demande en te priant que de pourvoir (sic.) au coût de mon voyage de
rapatriement qui s’élève à la somme de cent vingt-cinq mille francs
métro. […] J’espère que ceci pourrait se faire avant l’hiver car il s’agit
pour moi d’une question de vie ou de mort et j’aime assez la vie. Je
t’écris de mon lit (malade) pensant que tu feras diligence nécessaire
pour que je sois bientôt parmi vous au caillou469. »470
467
Un document atteste qu’il préside toujours l’association le 1er octobre 1979.
La distinction est à faire entre le Franc métropolitain, ou Franc « métro », et le Franc Pacifique (toujours
en usage aujourd’hui).
469
De même que les Tahitiens font référence à leur île en l’appelant le fenua (« pays » en tahitien), les
Calédoniens surnomment leur archipel le « caillou ».
470
Archives territoriales de Nouvelle-Calédonie, 31 J 19.
468
104
Ces nombreuses demandes d’aide découlent de la faiblesse des pensions d’anciens
combattants qui leurs sont versées, et de celle leurs salaires (lorsqu’ils en ont un). Leurs
revenus bas ou moyens ne leur permettent ainsi pas de survenir à l’ensemble de leurs
besoins. Cela montre, entre autres choses, le peu de considération accordée par les
autorités métropolitaines aux vétérans coloniaux. Il semblerait en effet qu’en ce qui les
concerne, un assez fort antagonisme existe entre le temps de guerre, celui de la gratitude,
et le retour au temps de paix, celui de l’inattention471. L’accord du droit de cité à
l’ensemble des sujets polynésiens et kanak et la possibilité d’élire des représentants,
locaux comme nationaux, ne représentent qu’un début de reconnaissance. Ils serviront de
tremplin aux anciens combattants pour porter leurs revendications en termes d’emploi et
de pensions. Bon nombre d’entre eux se rallieront ainsi à Pouvanaa a Oopa, leader
politique polynésien et fondateur du Rassemblement des Populations Tahitiennes
(RDPT), parti politique classé à gauche et de mouvance autonomiste, dominant la vie
politique polynésienne jusqu’en 1958.
Aussi, face aux aléas des relations entre territoires et pouvoir central, la mémoire
demeure un moyen efficace de perpétuer la cohésion entre les anciens combattants, audelà de 1945-1946, et de s’affirmer face à la métropole. En effet, si la mémoire du
Bataillon du Pacifique demeure très vive jusque de nos jours en Polynésie et en NouvelleCalédonie, perpétuée par les volontaires eux-mêmes puis par leurs descendants (pour des
raisons évidentes d’attachement à l’histoire des territoires de la part de leurs habitants et
des liens familiaux), elle est quasiment inexistante en métropole. Le bataillon est absent
de la mémoire collective et très largement inconnu du grand public métropolitain. Très
peu nombreuses sont les personnes avec lesquelles nous avons pu échanger sur notre sujet
qui le connaissaient, ou qui avaient simplement entendu parler du Bataillon du Pacifique.
Cette absence se ressent également dans l’espace public : alors que la France
métropolitaine ne compte qu’une place du Bataillon du Pacifique dans le
12e arrondissement de Paris (à la sortie du métro Bercy)472, une rue du lieutenant-colonel
Broche à Remoulins (Gard) où il grandit, une esplanade Jean Tranape à Rueil-Malmaison
471
Voir par exemple : Julien FARGETTAS, « Du tirailleur à l’ancien combattant », dans Les Tirailleurs
sénégalais. Les soldats noirs entre légendes et réalités 1939 – 1945, Paris, Tallandier, 2012, p. 295-316.
472
La place du Bataillon du Pacifique a été inaugurée en 1986 par Jacques Chirac, alors maire de Paris
(Archives de l’Ordre de la Libération).
105
où il passa les dernières années de sa vie et une rue du capitaine Perraud à La Garde où il
fut tué au combat, on recense à Nouméa et Papeete une multitude de rues, d’avenues et
de places faisant référence au bataillon et à ses volontaires, aux figures locales de la
France Libre et aux autres branches des FFL. La capitale calédonienne a ainsi honoré à
travers sa toponymie les volontaires Auguste Bénébig473, Raymond Perraud474,
Tom Hagen, Jean Tranape, Félix Broche, Raymonde Jore, Georges Champion, et le
gouverneur Henri Sautot475, de même que le bataillon du Pacifique476 et la bataille de
Bir Hakeim477. La capitale tahitienne a quant à elle nommé des rues d’après le
bataillon478, Philippe Bernardino, le chef Teriieroo, Édouard Ahnne et le maire Georges
Bambridge479. Alors que les territoires honorent leurs enfants, engagés dans leur grande
majorité au Bataillon du Pacifique, la population métropolitaine aura plutôt tendance à
célébrer les résistants de l’intérieur et les grandes figures de la Résistance (Charles de
Gaulle, Philippe Leclerc, Jean Moulin, Pierre Brossolette, …) plutôt que les soldats
coloniaux.
Aussi, les associations politiques et les associations d’entraide revêtent toutes
également un aspect mémoriel non négligeable, en cela qu’elles virent s’investir en
nombre les anciens combattants du Bataillon du Pacifique pour rappeler leur engagement
et maintenir une certaine cohésion comme sous les drapeaux, tout en portant un message.
De même, il convient de ne pas oublier la création d’une association mémorielle à
proprement parler, l’Amicale du Bataillon du Pacifique, fondée par le sergent-chef
Max Noble à Papeete.
Ces organisations ayant été fondées par les anciens combattants et en premier lieu
pour les anciens combattants, il semblerait cependant qu’après la disparition des derniers
d’entre eux vivant encore sur les territoires du Pacifique, ces associations et celles ayant
succédé à l’Union des Volontaires et au RDPT aient quelque peu perdu de leur souffle.
Le Tāvini huira'atira, parti politique indépendantiste se réclamant de l’héritage de
473
La plaque toponymique que nous avons photographié rue Auguste Bénébig indique la mention erronée
de « Compagnon de la Liberté » au lieu de « Compagnon de la Libération ».
474
Rue du capitaine Perraud, dans le quartier du Faubourg Blanchot.
475
Rue du gouverneur Sautot, dans le centre-ville.
476
Rue du Bataillon du Pacifique, à la sortie de Nouméa vers la commune de Dumbéa.
477
Place Bir Hakeim, dans le centre-ville.
478
Rue du Bataillon du Pacifique, dans le quartier de Paofai.
479
Avenue Georges Bambridge, dans le quartier de Manuho’e.
106
Pouvanaa a Oopa (que de nombreux vétérans avaient rallié au lendemain de la guerre
pour réclamer l’autonomie du territoire), ne réalise plus que de faibles scores aux
élections. Éric Noble, fils de Max Noble ayant repris l’Amicale à la suite de son père, a
remarqué ce déclin, en soulignant le manque d’intérêt de la part de l’État et du Pays480
envers une association rappelant une unité de la France Libre des plus précoces et des
plus reconnues481. John Martin, dernier ‘aito482 vivant à Tahiti et « porte-parole » du BP1,
décédé en décembre 2012, avait également fait le même constat peu avant de disparaître.
Comme le note Jean-Christophe Shigetomi, qui avait étroitement travaillé avec lui dans
l’élaboration de son ouvrage Tamari’i Volontaires : « sensible à la valeur de ses frères
d’armes et au service héroïque qu’ils avaient rendu par amour pour leurs deux patries,
John Martin paraissait navré de voir ceux qu’il considérait comme sa seconde famille
négligés par les nouvelles générations. »483 Aussi, il semblerait que la mémoire du
Bataillon du Pacifique ait surtout été entretenue par ses survivants, et qu’elle l’ait été
comme un moyen de continuer à exister comme un groupe social à part, bien constitué,
comme une « génération résistante » dont la sortie de guerre fut une épreuve à surmonter.
480
La Polynésie Française a acquis le statut de Pays d’outre-mer au sein de la République par loi organique
no 2004-192 du 27 février 2004 (source : Légifrance).
481
Questionnaire retourné par M. Éric Noble.
482
En tahitien, « ‘aito » signifie « guerrier » (Académie Tahitienne). Les vétérans polynésiens tant du BP1
que des autres unités étaient désignés ainsi, surtout par les générations suivantes.
483
Jean-Christophe SHIGETOMI, Tamari’i Volontaires, op. cit., p. 298.
107
Conclusion
Lorsque les volontaires du Bataillon du Pacifique s’en retournèrent dans leurs
foyers, l’unité était déjà devenue l’une des plus emblématiques de la France Libre : par
sa précocité, par ses origines (ses soldats venaient de territoires ralliés parmi les
premiers), par ses engagements reconnus à Bir Hakeim et dans toutes les campagnes ayant
suivi jusqu’à la capitulation allemande. Ses actions ont valu au BIMP d’être l’une des
dix-huit unités Compagnon de la Libération484 ; parmi les Pacifiens, à titre individuel, ce
sont dix-huit militaires qui ont reçu la prestigieuse décoration, dont huit à titre
posthume485. Très tôt, le Bataillon du Pacifique fut reconnu et cité comme un bataillon
d’élite. Même après leur départ vers Paris, les volontaires du Pacifique continuent de
marquer le BIMP qui ne change pas d’appellation, conservant le « P » de Pacifique en
leur honneur. La citation à l’ordre de l’armée attribuée au BIMP le 28 mai 1945, lui
conférant la Croix de Guerre486, fait explicitement mention des volontaires du Pacifique
et du lieutenant-colonel Broche. De même, ce sont plus d’une centaine de volontaires tant
polynésiens que calédoniens qui reçoivent la Médaille de la Résistance en avril 1946, par
un décret commun487.
Aussi, il est aisé de comprendre la déception des volontaires, après quatre années
de guerre et de sacrifices et cinq années d’absence, face aux difficultés de réinsertion dans
la vie civile, au manque d’emplois, au désintérêt (voire au mépris488) leur étant opposé en
tant que soldats coloniaux. Les anciens combattants se serviront alors de leur engagement
comme d’une force politique, avec la suppression du statut de colonie par la constitution
de 1946 instituant la IVe République que les volontaires se plaisaient déjà à imaginer dans
les sables de Bir Hakeim489. Au lendemain de la guerre, deux grands courants politiques
émergent tant dans les EFO qu’en Nouvelle-Calédonie : les indépendantistes, réclamant
484
Le BIMP a reçu la Croix de la Libération par décret du 28 mai 1945 (archives de l’Ordre de la
Libération).
485
Voir annexes.
486
Archives de l’Ordre de la Libération.
487
Décret du 24 avril 1946, Archives Nationales. Ce même décret attribue la Médaille de la Résistance à
plusieurs centaines de personnes.
488
Dans le questionnaire qu’il nous a retourné, M. Jean-Claude Tranape note en évoquant son père :
« certains collègues de travail le traitaient avec mépris, jusqu'au jour où ils apprirent ce qu'il avait fait pour
la France ».
489
« La vie quotidienne pendant la guerre du désert », Jean-Marie DALLET et al., Le Mémorial polynésien,
vol. 6, op. cit., p. 140.
108
l’indépendance en bonne et due forme de leurs territoires, et les autonomistes, partisans
d’un maintien dans la France tout en souhaitant une autonomie suffisante pour gérer les
affaires locales. Dans les deux territoires, tout en conservant la défiance envers les
autorités qui découle de la déception qu’ils connaissent à leur retour, les vétérans de la
France Libre seront globalement en faveur de l’autonomie. Ils conservent en effet un fort
patriotisme jusqu’après la guerre, lors de laquelle ils combattent pour la France et pour
sa libération, ainsi qu’un certain attachement au général de Gaulle, leur ancien chef
(surtout à partir de 1958 et son accession à la Présidence de la République). L’idée
d’échanges réciproques entre les territoires et la métropole, l’idée d’appartenance à la
France même à seize mille kilomètres de distance continuent de prévaloir. Aussi, les deux
territoires bénéficient de prérogatives de plus en plus importantes et de remaniements
significatifs au niveau de leurs institutions et voient naître leurs propres assemblées
délibérantes : l’Assemblée Territoriale de la Polynésie française en 1946, et l’Assemblée
Territoriale de Nouvelle-Calédonie en 1957, devenue le Congrès de Nouvelle-Calédonie
en 1985. Il faut également compter sur la majorité de Calédoniens Blancs dans le
Bataillon du Pacifique par rapport aux combattants Kanak (près de 300 contre 170), les
combattants d’ascendance européenne étant plus enclins à conserver des liens avec la
métropole que les populations kanak, parmi lesquelles on observe jusqu’à nos jours de
très fortes convictions indépendantistes.
L’engagement politique des Kanak en faveur de l’indépendance débute pour sa part
dès 1946 avec la fondation du Parti Communiste Calédonien, puis de l’Union
Calédonienne en 1953. La seconde moitié du XXe siècle en Nouvelle-Calédonie sera ainsi
dominée par l’émergence de nombreux partis politiques, rassemblés à partir de 1984 au
sein du FLNKS (Front de Libération Nationale Kanak et Socialiste), et de la figure du
leader indépendantiste Jean-Marie Tjibaou, assassiné le 4 mai 1989. Les accords de
Matignon conclus en 1988, puis l’accord de Nouméa dix ans plus tard permettent à
l’archipel de voir se tenir un référendum, le 4 novembre 2018, à l’issue duquel 56,4 %
des suffrages exprimés le sont contre l’indépendance490, score certes majoritaire mais
néanmoins moindre que ce qui était attendu491.
490
Nouvelle Calédonie : après le Non à l'indépendance, une consolidation française en Océanie ? [en ligne]
France Culture, 5 novembre 2018, consulté le 5 août 2020. https://www.franceculture.fr/emissions/lesenjeux-internationaux/nouvelle-caledonie-apres-le-non-une-consolidation-francaise-en-oceanie
491
Ibid.
109
Ce n’est que plusieurs décennies après la guerre, sur le tard et après avoir quelque peu
sombré dans l’oubli à compter de leur retour au printemps 1946, que les anciens
combattants du Pacifique bénéficient d’un regain d’intérêt et de reconnaissance (dans
lesquels les travaux de Jean-Christophe Shigetomi depuis le début des années 2010 ont
été pour beaucoup). Un soldat du BIMP tombé à El Alamein, le caporal-chef
Antonin Mourgues, avait certes été inhumé dans la crypte du mémorial de la France
Combattante au Mont Valérien la veille de son inauguration le 18 juin 1960, mais il faisait
à l’origine partie du 1er BIM et non du BP1492. Ari Wong Kim, dernier volontaire tahitien
toujours en vie, n’a ainsi été fait chevalier de la Légion d’Honneur que le
31 décembre 2019, après « 79 ans de service »493 (la remise d’insigne, prévue aux
Invalides le 5 avril 2020, ayant été retardée en raison de l’épidémie de Covid-19494). La
presse polynésienne note à juste titre, à cette occasion, qu’Ari Wong Kim « a un temps
été perdu dans les limbes de l’Histoire, car jusque récemment il était admis qu’il n’y avait
plus de survivants du Bataillon du Pacifique. »495 Les trois autres anciens polynésiens
combattants du second conflit mondial toujours en vie sont des vétérans des FNFL :
Matthew Chapman, Starr Teriitahi, et Maxime Aubry, présenté à tort comme ayant
également fait partie du BP1, âgé de 103 ans en 2020496. Avec Louis Kasni Warti, dernier
volontaire calédonien du Bataillon du Pacifique, centenaire depuis novembre 2019, ils
sont les derniers anciens Français Libres originaires d’Océanie. Alors que la place du
Bataillon du Pacifique n’est enseignée (dans le secondaire) qu’en Polynésie française et
en Nouvelle-Calédonie, il nous semble que la mémoire et la reconnaissance accordées à
l’unité, que nous n’avons traitées que brièvement, pourraient constituer un champ
d’investigations des plus fertiles, de même que la manière dont se perpétue la mémoire
des volontaires jusque de nos jours.
492
Dossier individuel d’Antonin Mourgues. Service Historique de la Défense, GR 16 P 435007.
Décret du 31 décembre 2019 portant promotion et nomination dans l'ordre national de la Légion
d'honneur (Légifrance).
494
75 ans après l’armistice, Ari Wong Kim devra encore patienter pour recevoir la Légion d’Honneur
[en ligne] Radio 1, 8 mai 2020, consulté le 5 août 2020. https://www.radio1.pf/75-ans-apres-larmistice-ariwong-kim-devra-encore-patienter-pour-recevoir-la-legion-dhonneur/
495
Ibid.
496
Maxime Aubry, vétéran du Bataillon du Pacifique, fête ses 103 ans [en ligne] Polynésie la 1ère, 30 mai
2020, consulté le 5 août 2020. https://la1ere.francetvinfo.fr/polynesie/tahiti/faaa/maxime-aubry-veterandu-bataillon-du-pacifique-fete-ses-103-ans-837708.html
493
110
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® Éric WITTERSHEIM, Des sociétés dans l’État : anthropologie et situations
postcoloniales en Mélanésie, Montreuil, Aux lieux d’être, 2006.
123
X. Histoire de l’Océanie et du Pacifique
® Frédéric ANGLEVIEL, La France aux antipodes. Histoire de la NouvelleCalédonie, Paris, Vendémiaire, 2018.
® Dominique BARBE, Histoire du Pacifique : des origines à nos jours, Paris, Perrin,
2008.
® Alban BENSA et Jean-Claude RIVIERRE, Le Pacifique. Un monde épars, Paris,
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® Salvador BERNABEU ALBERT, El Pacífico ilustrado. Del lago español a las
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® Éric CONTE (dir.), Une histoire de Tahiti, Pirae, Au vent des îles, 2019.
® Jean-Marie DALLET, Christian GLEIZAL et Jean-Louis SAQUET, Le Mémorial
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® Bengt DANIELSSON et Christian GLEIZAL, Papeete 1818 – 1990, Papeete, Mairie
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® Paul
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DECKKER, Jean-Yves FABERON, Chantal LE GUILLOU et Luc
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® Orso FILIPPI (dir.), Le Mémorial de Nouméa, 1859 – 1999, Nouméa, Planète
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® Philippe GODARD, Le Mémorial Calédonien, 1940 – 1953, Nouméa, Éditions
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® Adrian MUCKLE, « The “Chief without Power” ? Téâ Antoine Katélia and the War
of 1917-18 in New Caledonia », The Journal of Pacific History, 41-3, 2006,
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® Nicholas THOMAS, Océaniens. Histoire du Pacifique à l’âge des empires, trad. fr.
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® Éric WITTERSHEIM, Après l’indépendance : le Vanuatu, une démocratie dans le
Pacifique, La Courneuve, Aux lieux d’être, 2006.
XI. Histoire politique, diplomatique et religieuse
® Raoul AGLION, De Gaulle et Roosevelt : la France libre aux États-Unis, Paris,
Plon, 1984.
® Arnaud BAUBEROT, « Les associations d’enseignants protestants face à la laïcité
scolaire (1929 – 1959) », Histoire de l’éducation, 110, 2006, p. 141-165.
® Emmanuel FUREIX, Le siècle des possibles, 1814 – 1914, Paris, PUF, 2014.
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BERU, Paris, Seuil, 2019.
® G. E. MAGUIRE, Anglo-American policy towards the Free French, Londres,
Palgrave Macmillan, 1995.
® Philippe MOREAU DEFARGES, Les États-Unis et la France : la puissance entre
mythes et réalités, Paris, Institut français des relations internationales, 1999.
® Daniel PIERREJEAN, De Gaulle face aux Américains : 1940 – 1969, Tours,
Éditions Sutton, 2017.
® Jean-Marc REGNAULT, « Les Établissements Français d’Océanie après-guerre : il
y a cinquante ans, la colonie devenait un territoire d’outre-mer », Bulletin de la
Société des Études Océaniennes, 269/270-5, 1996, p. 82-96.
® Jean-Marc REGNAULT, Te metua : l’échec d’un nationalisme tahitien,
1940 – 1964, Pirae, Polymages, 1996.
® Bruno SAURA, Pouvanaa a Oopa : père de la culture politique tahitienne, Pirae,
Au vent des îles, 2012.
® Jean-François SIRINELLI, Le siècle des bouleversements : de 1914 à nos jours,
Paris, PUF, 2014.
125
XII. L’Océanie dans les guerres mondiales
® Bruno ALGAN, Le bataillon d’Hawaii : des combattants du Pacifique aux côtés
des Alliés durant la Seconde guerre mondiale. Hawaii, Tahiti-Nouméa et
Nouvelle-Zélande., Paris, L’Harmattan, 2018.
® Chantal ANTIER, « Le recrutement dans l’empire colonial français, 1914-1918 »,
Guerres mondiales et conflits contemporains, 230-2, 2008, p. 23-36.
® Sylvette BOUBIN-BOYER, Révoltes, conflits et guerres mondiales en NouvelleCalédonie et dans sa région, Paris, L’Harmattan, 2008.
® Sylvette BOUBIN-BOYER, « De la première guerre mondiale en Océanie : Les
guerres de tous les Calédoniens », thèse de doctorat en Anthropologie historique
sous la direction de Paul de Deckker, Université de Nouvelle Calédonie, Nouméa,
2001.
® Didier DESTREMEAU, Septembre 1914, jours de guerre à Tahiti. Les fausses notes
du clairon, Paris, Les Éditions du Pacifique, 2014.
® Sarah MOHAMED-GAILLARD, « L’Océanie et la Grande Guerre », dans Histoire
de l’Océanie de la fin du XVIIIe siècle à nos jours, Paris, Armand Colin, 2015,
p. 117-127.
® Sarah MOHAMED-GAILLARD, « L’Océanie et la Seconde Guerre mondiale », dans
Histoire de l’Océanie de la fin du XVIIIe siècle à nos jours, Paris, Armand Colin,
2015, p. 141-148.
® Kim MUNHOLLAND, Rock of Contention : Free French and Americans at War in
New Caledonia, 1940 - 1945, New York, Berghahn, 2005.
® Kim MUNHOLLAND, « Yankee Farewell : The Americans leave New Caledonia,
1945 », Proceedings of the Meeting of the French Colonial Historical Society, 16,
1992, p. 181-194.
® Kim MUNHOLLAND, « The Trials of the Free French in New Caledonia, 19401942 », French Historical Studies, 14-4, 1986, p. 547-579.
® Corinne RAYBAUD, Les Établissements Français de l’Océanie pendant la
Première Guerre Mondiale (1914-1918), Papeete, Mémoire du Pacifique, 2011.
126
XIII. Musicologie et ethnomusicologie
® Claude ABROMONT, Petit précis du commentaire d’écoute, Paris, Panama, 2008.
® Claude ABROMONT et Eugène
DE
MONTALEMBERT, Guide de la théorie de la
musique, Paris, Fayard & H. Lemoine, 2001.
® Raymond AMMANN, Kanak dance and music, Londres, Kegan Paul International,
1997.
® Laurent
AUBERT,
La
musique
de
l’autre :
les
nouveaux
défis
de
l’ethnomusicologie, Genève, Georg, 2012.
® Thierry BOUZARD, « Sexualité et chansons de soldats », Inflexions, 38-2, 2018,
p. 11-21.
® Thierry BOUZARD, « Les chants militaires français d’origine étrangère »,
Inflexions, 34-1, 2017, p. 61-77.
® Claude LIAUZU et Josette LIAUZU, Quand on chantait les colonies : colonisation
et culture populaire de 1830 à nos jours, Paris, Syllepse, 2002.
® Marie-Anne PAVEAU, Images de la militarité dans les chants de l’Armée de terre
française, Paris, PUF, 1999.
® Adeline POUSSIN, « Le chant militaire et sa pratique actuelle dans les Troupes de
Marine », thèse de doctorat en ethnomusicologie sous la direction de Luc CharlesDominique et Marlène Belly, Université de Nice Sophia-Antipolis, Nice, 2014.
XIV. Romans
® Romain GARY, La promesse de l’aube, Paris, Gallimard, 1960.
® Patricia GRACE, Le Bataillon Māori, trad. fr. Jean ANDERSON et France
GRENAUDIER-KLIJN, Pirae, Au vent des îles, 2010.
XV. Vichy
® Alya AGLAN, La France à l’envers. La guerre de Vichy (1940 – 1945), Paris,
Gallimard, coll. « Folio Histoire », 2020.
127
® Jean-Pierre AZEMA et François BEDARIDA, Vichy et les Français, Paris, Seuil,
1992.
® Marc-Olivier BARUCH, Servir l’État français. L’administration en France de
1940 à 1944, Paris, Fayard, 1997.
® Jacques CANTIER et Eric JENNINGS, L’empire colonial sous Vichy, Paris, Odile
Jacob, 2004.
® Jacques DUQUESNE, Les Catholiques français sous l’Occupation, Paris, Grasset,
1986.
® Pierre GIOLITTO, Histoire de la jeunesse sous Vichy, Paris, Perrin, 1991.
® Jean-Paul JEAN (dir.), Juger sous Vichy, juger Vichy, Paris, La Documentation
Française, 2018.
® Eric JENNINGS, Vichy sous les tropiques : la révolution nationale à Madagascar,
en Guadeloupe, en Indochine, 1940 – 1944, Paris, Grasset, 2004.
® Pierre LABORIE, Penser l’événement : 1940 – 1945, Paris, Gallimard, 2019.
® Pierre LABORIE, Le chagrin et le venin. Occupation. Résistance. Idées reçues.,
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® Pierre LABORIE, L’opinion française sous Vichy, Paris, Seuil, 2001.
® Robert O. PAXTON, L’armée de Vichy. Le corps des officiers français,
1940 – 1944, trad. fr. Pierre DE LONGUEMAR, Paris, Tallandier, 2004.
® Robert O. PAXTON, La France de Vichy, 1940 – 1944, trad. fr. Claude BERTRAND,
2e éd., Paris, Seuil, 1997.
® Virginie SANSICO, La justice déshonorée, 1940 – 1944, Paris, Tallandier, 2015.
128
Sources
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portraits, Nouméa, Archives territoriales de Nouvelle-Calédonie, 1997.
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des Océanistes, 1-1, 1945, p. 132-133.
® Marc BLOCH, L’Étrange défaite, Paris, Gallimard, 1990.
® Jean-Matthieu BORIS, Combattant de la France Libre, Paris, Perrin, 2012.
® Frédéric CHASTENET DE GERY, Les derniers jours de la Troisième République à
Tahiti, 1938 – 1940, Papeete, Société des Études Océaniennes, 1974.
® Gérald COPPENRATH, Les Chinois de Tahiti : de l’aversion à l’assimilation, 1865
– 1966, Paris, Musée de l’Homme, 1967.
® Daniel CORDIER, Alias Caracalla, Paris, Gallimard, 2009.
® Émile
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CURTON, Tahiti 40 : récit du ralliement à la France libre des
Établissements français d’Océanie, Paris, Société des Océanistes, 1973.
® Émile DE CURTON, Tahiti, terre française combattante, Londres, Publications de
la France combattante, 1942.
® Jean-Paul FAIVRE, « Le ralliement à la France Libre des colonies du Pacifique »,
Journal de la Société des océanistes, 1-1, 1945, p. 67-80.
® Benjamin FAVREAU, Compagnon de la Libération, Paris, Geste, 2011.
® Georges FLEURY, Le Neuvième compagnon, Paris, Grasset, 1990.
® Charles
DE
GAULLE, Mémoires de Guerre, 3 vol., Paris, Plon, 1954-1956-1959,
rééd. 1994.
® Noël ILARI, Secrets tahitiens : journal d’un popa’a farani, 1934 – 1973, 2e éd.,
Paris, Debresse, 1978.
® Pierre KOENIG, Bir Hakeim 10 juin 1942, Paris, Robert Laffont, 1971.
® Roger LUDEAU, Les carnets de route d’un combattant du bataillon du Pacifique,
Nouméa, s.n, 1946.
® Patrick O’REILLY et Jean-Albert VILLARD, « Autour de la musique des NéoCalédoniens. », Journal de la Société des océanistes, 2-2, 1946, p. 93-107.
129
® Gaston RABOT, Journal de guerre d’un caporal du bataillon des guitaristes,
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® Paul ROBINEAU, Paras calédoniens de la France libre, Nouméa, Éditions du
Cagou, 1989.
® Henri SAUTOT, Grandeur et décadence du gaullisme dans le Pacifique,
Melbourne, F. W. Cheshire, 1949.
® W.-B. Kennedy SHAW, Patrouilles du désert : opérations en Libye de 1940 à
1943, trad. fr. Guy GAVREL, Paris, Berger-Levrault, 1949.
® Jean-Christophe SHIGETOMI, « Journal du caporal-chef Jean-Roy Bambridge »,
Bulletin de la Société des Études Océaniennes, 346, 2018, p. 83-147.
® Susan TRAVERS, Tant que dure le jour, trad. fr. Hélène PROUTEAU, Paris, J’ai Lu,
2003.
II. Service Historique de la Défense (Vincennes)
Sous-série GR 16 P : dossiers de résistants
® Dossiers individuels de soldats, sous-officiers et officiers du BP1 et du BIMP
Sous-série GR 8 YE : dossiers d’officiers supérieurs et subalternes (1940 – 1961)
® Dossiers individuels d’officiers du BP1 et du BIMP
Sous-série GR 14 YD : généraux de division et de brigade (depuis 1965)
®
14 YD 424 : dossier du général Pierre Koenig (consulté sur dérogation du 10 février 2020)
Sous-série GR 11 P : divisions et brigades (1940 – 1952)
® 11 P 21 : Force L
® 11 P 250 : 1ère Brigade Française Libre
Sous-série GR 12 P : petites unités (1939 – 1955)
® 12 P 270 : 1er Bataillon d’Infanterie de Marine
® 12 P 273 : Bataillon du Pacifique, BIMP, Compagnie Autonome du Pacifique
130
Sous-série GR 12 H : présence française dans le Pacifique (1872 – 1970)
® 12 H 4 : Correspondances relatives à l'organisation militaire et à la situation
militaire en Nouvelle-Calédonie (1940 – 1945)
® 12 H 5 : Organisation de la milice civique en Nouvelle-Calédonie, ralliement de
Tahiti à la France Libre, etc.
III. Archives de l’Ordre de la Libération (Paris)
Dossiers individuels de Compagnons de la Libération
Dossier du BIMP, unité Compagnon
Fonds photographique
Fonds muséal
IV. Archives Nationales (Pierrefitte-sur-Seine)
Base Léonore (en ligne) : dossiers de récipiendaires de la Légion d’Honneur
décédés avant 1977, déposés par la Grande Chancellerie de la Légion d’Honneur.
Décret du 24 avril 1946 attribuant la Médaille de la Résistance à des survivants
du Bataillon du Pacifique.
V. Archives Nationales d’Outre-Mer (Aix-en-Provence)
Série 3701 : Nouvelle-Calédonie
® 3701 COL 168 : Correspondances et télégrammes officiels (1944), premiers
retours de volontaires (1944)
Série 3800 : Établissements Français d’Océanie
® 3800 COL 136 : Situation militaire à Tahiti (1945 – 1953), octroi de la
nationalité française à tous les originaires des EFO (1944 – 1945)
® 3800 COL 153 : Bataillon du Pacifique (1943 – 1945), correspondances et
télégrammes officiels (1940 – 1945)
131
VI. Archives territoriales de Nouvelle-Calédonie (Nouméa)
Série 31 J : archives de l’Association des Français Libres
® 31 J 9 : Listes nominatives.
® 31 J 19 : Dossiers d’ex-volontaires contenant leur correspondance avec
l’Association des Engagés Volontaires de la France Libre et autres pièces,
1946 – 1985.
® 31 J 20 : idem, 1946 – 1987.
® 31 J 21 : idem, 1944 – 2003.
® 31 J 22 : idem, 1946 – 1994.
® 31 J 27 : Revue de presse et objets divers.
® 31 J 31 : Photographies.
1 Ph 11 : Fonds photographique Jean Tranape.
1 J 44 : Journal de guerre et livret militaire de Raoul Michel-Villaz.
1 J 53 : Journal de guerre d’Édouard Magnier.
1 Num 30 : Télégrammes australiens relatifs au ralliement de la Nouvelle-Calédonie
à la France Libre.
1 J 164 : Mémoire de Master 1 en Histoire militaire, défense et politiques de sécurité
de Laurent Babin, « La présence militaire alliée en Nouvelle-Calédonie durant la seconde
guerre mondiale (1942 – 1946) sous le regard de la presse locale », sous la direction de
Jean-François Muracciole, Université Paul Valéry, Montpellier III, 2011 – 2012.
VII. Archives municipales de Nouméa
Extraits de presse issus de « La France Australe » (1941 – 1954) et « Le Bulletin
du Commerce » (1944 – 1970).
Procès-verbaux du Conseil Municipal de Nouméa, séances du 27 juin 1946 et du
2 octobre 1946.
132
VIII. Service du Patrimoine Archivistique et Audiovisuel (Papeete)
Fonds privé J-012 : fonds Jean-Christophe Shigetomi
® Paroles et traduction du chant « Tamari’i Volontaires »
Fonds privé J-0051 : fonds Cordonnier
® Listes des combattants aux deux guerres mondiales
Fonds 48 W : fonds historique des gouverneurs
IX. Entretiens
27 novembre 2018 : entretien avec M. Louis Kasni Warti.
22 février 2019 : entretien avec M. Ari Wong Kim.
X. Questionnaires
Nous avons adressé aux familles des volontaires des questionnaires sur
l’engagement de leurs parents au sein du Bataillon du Pacifique. Sur 24 personnes
contactées, 4 nous ont retourné leur questionnaire (16,7 %).
XI. Archives privées
Archives de l’auteur
® États Signalétiques et des Services de William et Walter Grand
® Photographies
Archives de M. Jean-Claude Tranape
® Photographies
® Entretiens avec Jean Tranape (en ligne) : env. 2h20 d’enregistrements.
133
Archives de Mme Dolorès Chan
® État Signalétique et des Services de Philippe Bernardino
® Coupures de presse
® Photographies
XII. Sitographie sélective
® La justice de Vichy et les Français libres : le cas de Félix Broche [en ligne]
Fondation de la France Libre, 2011, consulté le 17 avril 2020.
http://www.france-libre.net/justice-vichy-felix-broche/
® La prise du Golf Hôtel de Hyères le 21 août 1944 racontée par le général Edmond
Magendie (BIMP) [en ligne] Amicale de la 1ère DFL, s.d., consulté le
17 avril 2020.
http://1dfl.fr/La-prise-du-Golf-Hotel-de-Hyeres-le-21-aout-1944racontee-par-le-general-Edmond-MAGENDIE-BIMP.html
® Un conte de François Garbit (BM 3) : "Horrifiques chroniques de l’est du pays de
Tchad en la guerre de Érythrée…" [en ligne] Amicale de la 1ère DFL, s.d., consulté
le 17 avril 2020.
http://1dfl.fr/un-conte-de-Francois-GARBIT-BM-3-Horrifiqueschroniques-de-l-Est-du-Pays-de-Tchad-en-la-guerre-de-Erythree.html
® Le Bataillon d’Infanterie de Marine et du Pacifique [en ligne] Ordre de la
Libération, s.d., consulté le 9 mai 2020.
https://www.ordredelaliberation.fr/fr/armee-de-terre#bimp
® Le général de Gaulle félicite le Bataillon du Pacifique [en ligne] Les Archives
du Monde, 1945, consulté le 9 mai 2020.
https://www.lemonde.fr/archives/article/1945/09/20/le-general-degaulle-felicite-le-bataillon-du-pacifique_1855470_1819218.html
® 75 ans après l’armistice, Ari Wong Kim devra encore patienter pour recevoir la
Légion d’Honneur [en ligne] Radio 1, 2020, consulté le 28 mai 2020.
https://www.radio1.pf/75-ans-apres-larmistice-ari-wong-kim-devraencore-patienter-pour-recevoir-la-legion-dhonneur/
134
® L’appel du 18 juin 1940 a-t-il été entendu à Tahiti ? [en ligne] Maison de la
Culture, 2020, consulté le 28 mai 2020.
https://www.maisondelaculture.pf/n1-lappel-du-18-juin-1940-a-t-il-entendua-tahiti/
® Chants des Tahitiens du bataillon du Pacifique [en ligne] Fondation de la France
Libre, 2015, consulté le 28 mai 2020.
http://www.france-libre.net/chant-des-tahitiens-du-bp/
® En Nouvelle-Calédonie, un non en trompe-l’œil [en ligne] Le Monde, 2018,
consulté le 5 août 2020.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/11/24/en-nouvelle-caledonieun-non-en-trompe-l-il_5387903_3232.html
XIII. Vidéographie
® Valérie BATY, Mémoires de soldats, CDP-NC / ONAC-VG, 2014, 52 min.
® Éric BEAUDUCEL, Le bataillon des guitaristes, ECPAD, 2005, 100 min.
® Denys DE LA PATELLIERE, Un taxi pour Tobrouk, Gaumont, 1961, 95 min.
® Charles-Antoine DE ROUVRE, À l’autre bout de la guerre, France TV, 2018,
90 min.
® Matthieu LE BARBIER, Sur les traces du passé : les Calédoniens dans la Grande
Guerre, NCTV, 2015, 30 min (part. 1), 28 min (part. 2).
® Timothy MILLER, Bir Hakeim 1942, quand la France renaît, Cinétévé / Fondation
de la France Libre, 2012, 59 min.
® Jacques NAVARRO, Aux armes Tahitiens, Polynésie 1ère, 2015, 90 min.
135
Annexes
I. Liste des chefs de corps du Bataillon du Pacifique et du BIMP
Grade
Commandement
Nom
Observations
Début
Fin
Félix BROCHE
29 avril 1941
9 juin 1942
Tué à Bir Hakeim
Chef de bataillon
Jacques SAVEY
9 juin 1942
11 juin 1942
Tué à Bir Hakeim
Chef de bataillon
Eugène ALESSANDRI
16 juin 1942
3 juillet 1942
Chef de bataillon
Roger BOUILLON
4 juillet 1942
20 novembre 1943
Chef de bataillon
Henri MAGNY
- Capitaine (1938)
- Chef de bataillon (1940)
- Lieutenant-colonel (1941)
21 novembre
1943
16 mai 1944
Tué en Italie
- Par intérim
Capitaine
Constant ROUDAUT
16 mai 1944
19 mai 1944
- Adjoint de
H. Magny puis de
E. Magendie
- Capitaine (1941)
- Chef de bataillon
Edmond MAGENDIE
20 mai 1944
Fin des hostilités
(septembre 1944)
Commande la
Capitaine
Robert HERVE
16 septembre
1945
Arrivée à Tahiti
Compagnie
Autonome du
Pacifique
136
II. Les 18 Compagnons de la Libération du Bataillon du Pacifique
Engagés ou affectés à l’unité entre le 2 septembre 1940 et le 16 juin 1942
(ayant donc appartenu au BP1 à proprement parler, avant sa fusion avec le 1er BIM).
1.
TABLEAU
Engagés à Tahiti
Tahitiens
Philippe
BERNARDINO
Européens affectés au bataillon
Engagés en Nouvelle-Calédonie
au Moyen-Orient
Européens de
Calédoniens d’origine
Européens de
Néo-
Tahiti
européenne
Nlle Calédonie
calédoniens
Félix BROCHE *
Robert HERVE
Auguste BENEBIG
Marcel KOLLEN *
Georges LE CARROUR *
Raymond PERRAUD *
René PETRE
Charles PORCHERON *
Pierre
PANNETIER
Français de Métropole
Jean TRANAPE
Jean BELLEC
Gaston DUCHE DE BRICOURT *
Benjamin FAVREAU
Pierre BLANCHET *
Pierre LAFON *
Jean PILLARD
André SALVAT
* : décoration à titre posthume
2.
DATES DES DECRETS D’ATTRIBUTION
7 mars 1941 : André Salvat
9 septembre 1942 : Jean Bellec, Benjamin Favreau, Auguste Bénébig
29 mars 1943 : Marcel Kollen
11 mai 1943 : Félix Broche, Pierre Lafon
27 mai 1943 : Gaston Duché de Bricourt
20 novembre 1944 : Raymond Perraud, Pierre Blanchet, Charles Porcheron, Jean Tranape
24 mars 1945 : Georges Le Carrour
16 octobre 1945 : Robert Hervé, Pierre Pannetier, René Petre, Philippe Bernardino
27 décembre 1945 : Jean Pillard
À noter que parmi les chefs de corps, outre Félix Broche et Robert Hervé, sont
également
Compagnons
de
la
Libération :
Jacques
Savey
(11 mai 1943),
Constant Roudaut (2 juin 1943), Edmond Magendie (7 mars 1945) et Henri Magny
(7 août 1945).
137
III. Chronologie
4 juillet 1939 : arrivée de Félix Broche à Tahiti.
2 septembre 1939 : déclaration de guerre de la France et le Royaume Uni contre
l’Allemagne nazie.
10 mai 1940 : l’armée allemande attaque la Belgique, les Pays Bas, le Luxembourg et la
France.
17 juin 1940 : discours du maréchal Pétain demandant la fin des combats.
18 juin 1940 : discours du général de Gaulle sur les ondes de la BBC appelant à les
poursuivre.
22 juin 1940 : signature de l’armistice.
14 juillet 1940 : discours d’Émile de Curton devant des chefs et des notables ; première
mention connue de l’idée de monter un Bataillon du Pacifique
20 juillet 1940 : ralliement des Nouvelles-Hébrides à la France Libre sous l’impulsion
du gouverneur Henri Sautot.
1er septembre 1940 : référendum organisé à Tahiti et Moorea : 5564 voix exprimées en
faveur de la poursuite de la guerre aux côtés des Britanniques et du ralliement à la France
Libre, 18 voix contre.
2 septembre 1940 : le gouverneur des EFO démissionne et est remplacé par un
gouvernement provisoire qui proclame le ralliement à la France Libre.
19 septembre 1940 : Henri Sautot débarque à Nouméa, remplace le gouverneur et rallie
la Nouvelle-Calédonie à la France Libre.
24 septembre 1940 : Félix Broche reçoit un télégramme du général de Gaulle qui le
nomme commandant en chef des troupes dans le Pacifique et l’envoie à Nouméa, où il
arrive le 21 octobre.
21 avril 1941 : le corps expéditionnaire tahitien embarque sur le « Monowai » et quitte
Papeete, commandé par le lieutenant Jacques Ravet.
29 avril – 5 mai 1941 : escale à Nouméa, jonction des contingents polynésien et néocalédonien. Le 5 mai 1941 marque ainsi la naissance du bataillon qui embarque ce jourlà sur le « Zélandia ».
9 mai 1941 : le bataillon arrive à Sydney et est dirigé vers Liverpool Camp pour un
entraînement qui dure 45 jours.
27 juin 1941 : le bataillon embarque à Sydney sur le « Queen Elisabeth » à destination
du Moyen-Orient.
138
31 juillet 1941 : le bataillon débarque à Suez.
1er au 20 août 1941 : le bataillon stationne au camp de Qastina (Palestine), où se
regroupent toutes les forces terrestres des Forces Françaises Libres.
20 août au 31 décembre 1941 : le bataillon stationne en Syrie, d’abord à Katana, puis à
Damas, Alep, et enfin Lattaquié.
1er au 5 janvier 1942 : le bataillon traverse l’Égypte.
5 janvier 1942 : le bataillon arrive en Lybie.
16 février 1942 : le bataillon prend position à Bir Hakeim avec le reste de la 1ère Brigade
Française Libre et mène des patrouilles de harcèlement et de reconnaissance.
27 mai au 11 juin 1942 : bataille de Bir Hakeim.
9 juin 1942 : le lieutenant-colonel Félix Broche est tué par un obus qui touche son abri,
dans lequel se trouvent également son adjoint, le capitaine Gaston Duché de Bricourt, tué
sur le coup, et son ordonnance, William Grand, blessé au bras gauche. Le général Koenig
confie le commandement d’un bataillon formé par la fusion du Bataillon du Pacifique et
du 1er BIM au chef de bataillon Jacques Savey.
Nuit du 10 au 11 juin 1942 : la 1ère BFL rompt l’encerclement et parvient à rejoindre les
lignes anglaises. Jacques Savey est tué.
16 juin 1942 : Le commandement du Bataillon d’Infanterie de Marine et du Pacifique
(BIMP) est confiée au chef de bataillon Eugène Alessandri.
4 juillet 1942 : le chef de bataillon Roger Bouillon prend le commandement du BIMP.
Octobre 1942 : le BIMP combat à la seconde bataille d’El Alamein.
11 mai 1943 : décret no 1007 attribuant la Croix de la Libération à Félix Broche, à titre
posthume.
13 mai 1943 : les forces de l’Axe en Afrique du Nord déposent les armes.
17 juin 1943 : le second contingent néo-calédonien est incorporé au BIMP.
21 novembre 1943 : le chef de bataillon Henri Magny prend le commandement du BIMP.
17 avril 1944 : embarquement du BIMP à Bône (Algérie).
20 avril 1944 : le bataillon débarque à Naples (Italie).
5 mai 1944 : début des opérations du bataillon en Italie.
Mai – juin 1944 : bataille du Garigliano (secteur du Mont Cassin).
16 mai 1944 : mort au combat d’Henri Magny. Son adjoint, le capitaine Constant
Roudaut prend le commandement par intérim du BIMP.
20 mai 1944 : le chef de bataillon Edmond Magendie prend la tête du BIMP.
30 juillet 1944 : arrivée du BIMP à Tarente.
139
7 août 1944 : embarquement à Tarente sur le « MV Empire Pride ».
17 août 1944 : débarquement à Cavalaire (Var).
21 août 1944 : le BIMP prend d’assaut le Golf Hôtel, à Hyères, transformé en forteresse
par les Allemands, et fait de nombreux prisonniers.
30 août 1944 : le BIMP est à Nîmes.
2 septembre 1944 : le BIMP est à Lyon.
20 septembre 1944 : le BIMP est à Villargent (Haute-Saône).
22 septembre 1944 : le BIMP combat à Étroite Fontaine (Haute-Saône).
30 septembre 1944 : le BIMP est à Frédéric-Fontaine (Haute-Saône).
5 novembre 1944 : relève coloniale. Le BIMP est dirigée sur les arrières.
16 novembre 1944 : un détachement océanien arrive à Paris et est cantonné à la caserne
Latour-Maubourg, dans l’enceinte des Invalides.
9 avril 1945 : le BIMP reçoit la Croix de la Libération.
8 mai 1945 : capitulation sans conditions de l’Allemagne nazie.
16 septembre 1945 : création de la Compagnie Autonome du Pacifique.
18 septembre 1945 : la Compagnie Autonome du Pacifique défile à Paris et passe
notamment par l’avenue des Champs-Élysées et la place de l’Étoile, sous l’Arc de
Triomphe. Il est passé en revue par le général Legentilhomme.
19 septembre 1945 : la Compagnie Autonome du Pacifique est passé en revue par le
général de Gaulle.
20 septembre 1945 : la Compagnie Autonome du Pacifique quitte Paris pour Saintes.
16 octobre 1945 : par un décret commun, le capitaine Robert Hervé, le lieutenant
Pierre Pannetier, le sous-lieutenant René Pètre et l’adjudant Philippe Bernardino sont
faits Compagnons de la Libération.
25 décembre 1945 : le détachement arrive à Saint-Laurent-du-Var.
19 février 1946 : le détachement arrive à Marseille.
14 mars 1946 : le détachement embarque à Marseille sur le « Sagittaire ».
29 mars 1946 : escale en Guadeloupe.
5 mai 1946 : le « Sagittaire » arrive à Tahiti.
19 mai 1946 : le « Sagittaire » arrive à Port-Vila.
21 mai 1946 : le « Sagittaire » arrive à Nouméa.
140
IV. Organisation du bataillon au 15 mai 1941
Document inédit
Service Historique de la Défense, GR 12 P 273
NOTE DE SERVICE
Réorganisation de l’encadrement du bataillon
(Suite au paragr. 1 du Rapport du Bataillon du 15.5.41)
État-Major du bataillon
-
Chef de bataillon : Chef de bataillon BROCHE
Capitaine adjoint : Capitaine ARDANT
Officier de détails chargé de l’approvisionnement et du ravitaillement :
Adjudant DEMARET
Aumônier catholique : Sergent-chef PODEVIGNE
Aumônier protestant : Caporal-chef MARUKI497
Section de commandement du bataillon
o 1er groupe : secrétariat et petit E.M.
-
Chef de section : Adjudant DEMARET
Chef de groupe 1er secrétaire et vaguemestre : Sergent ARMAND
Secrétaire-interprète : Caporal-chef PAYONNE
Dactylo-interprète : 2e classe FROUIN
Ordonnance chef de bataillon : 1e classe GRAND
Ordonnance officier adjoint : 1e classe STUART
Chauffeur-planton : 1e classe BLANCHET
Motocycliste-planton : Caporal MARTIN
1er secrétaire O.D. : Caporal OFFLAVILLE
2e secrétaire O.D. : 2e classe TRAVAIN
Garde-magasin : Caporal PUTOA
o 2e groupe : services
497
Sergent d’ordinaire adjoint à l’O.D. pour les approvisionnements et les
ravitaillements : Sergent CLOOS
Caporal d’ordinaire : Caporal-chef SANDFORD
1er cuisinier :
2e cuisinier :
3e cuisinier : 2e classe POILLOT Pierre
4e cuisinier : 2e classe BEYNEY Henri
5e cuisinier : 1ère classe TERAIEFATAIR
6e cuisinier : 2e classe MAHUATI
Le nom d’Alfred Maruhi est mal orthographié dans le document original.
141
- 7e cuisinier : 1ère classe DROLLET
- 8e cuisinier : 2e classe ROCHETTE
- Cuisinier du mess : 2e classe CHAPDEVILLE
- Cuisinier du mess : 2e classe GALLAUD
- Serveurs du mess : 2e classe DERVAUX + 2e classe CATATA
- Chef de groupe et chef de groupe sanitaire : Adjudant DAVEZAC
- Cuisinier mess officiers :
- Caporal infirmier : Caporal LANTEIRES
- 1er infirmier : 2e classe MAYET
- 2e infirmier : 2e classe REVEILLON
- 3e infirmier : 2e classe BERNARDINO
- 4e infirmier (interprète) : 2e classe BAMBRIDGE Tom
Les brancardiers (deux par compagnie) seront désignés ultérieurement
o 3e groupe : Liaison et Transmissions
- Sergent clairon : Sergent MERER
- Caporal radio : Caporal DREMOND
Le personnel des Transmissions sera désigné ultérieurement
Encadrement des unités
o 1ère Compagnie
-
-
-
-
Commandant de compagnie : Lieutenant GUILLAUMET
Secrétaire : Caporal-chef UNGER
Adjudant de compagnie : Adjudant POUZOLS
Chefs de sections : Adjudant POUZOLS
Sergent-chef BERNUT
Sergent-chef MEYER
Sergent-chef LACROIX
Sous-officiers adjoints : Sergent-chef ST-MARTIN
Sergent THOMAS
Margis-chef GEORGET
Margis-chef LENEZ
Chefs de groupe : Sergent LEVY
Margis DURAND
Caporal-chef ROUSSEAU
Margis HERVOUET
Caporal-chef DAUPHIN
Caporal-chef CHARBONNEL
Sergent LIMOUSIN
Caporal-chef SIMON
Caporal-chef SAVOIE
Sergent LAVIGNE
Caporal-chef ROUX
Caporal-chef CHAMPION
Caporaux adjoints : Caporal KLEIN
Caporal GASTALDI
Caporal AGEZ
142
Caporal NICOL
Caporal ADAM DE VILLIERS
Caporal NUGUES
Caporal SALAÜN
Caporal HAGEN
Caporal RIVAL
Caporal COLONNA
Caporal FLOTTAT
Caporal SURGET
Déficit : 4 caporaux V.B.
o 2e Compagnie
-
Commandant de compagnie : Lieutenant PERRAUD
Secrétaire : 2e classe ROLLAND
Adjudant de compagnie : Sergent-chef MAGNIER
Chefs de section : Sergent-chef MAGNIER
Sergent-chef MORNAGHINI
Sergent-chef PANNETIER
Sergent-chef PETRE
- Sous-officiers adjoints : Margis-chef BENEBIG
Sergent LE CARROUR
Sergent PORCHERON
Sergent GRISCELLI
- Chefs de groupe : Sergent BRIAL
Caporal-chef LEGRAND
Caporal-chef MILLOT
Margis MONNIER
Sergent PANNETIER
Caporal-chef O’DONOGHUE
Caporal-chef NEUGY
Caporal-chef CHAUTARD
Caporal-chef CHITTY
Caporal-chef HUBERT
Caporal-chef GUILBAUD
- Caporaux adjoints : Brigadier GRAVINA
Caporal ANGER
Caporal LECONTE
Caporal LE BOUHELLEC
Caporal TRANAPE
Caporal SONG
Caporal MERDEGHEN
Caporal LESSON
Caporal MONNIER
Caporal BARRERE
Caporal BOISSERY
Caporal RAGOT
Déficit : 4 caporaux V.B.
143
o 3e Compagnie
-
Commandant de compagnie : Lieutenant DESPRES
Adjoint : Sous-lieutenant HERVE
Secrétaire : Sergent HINTZE
Adjudant de compagnie : Sergent-chef PARENT
Chefs de section : Sergent-chef PARENT
Sergent-chef LECLERE
Sergent BLEU
Sergent SOLARI
- Sous-officiers adjoints : Sergent TOOMEAREU
Sergent BERNARDINO
Sergent GRAND
Sergent GRAFFE
- Chefs de groupe : Sergent HOLOZET
Sergent TEIRIA
Sergent VARNEY
Caporal-chef BREDIN
Caporal-chef LE CARROUR
Caporal-chef RIVIERE
Caporal POULET
Caporal PUAIRAU
Caporal CORDIER
Caporal TAEREA
- Caporaux adjoints : Caporal WOHLER
Caporal GARET
Caporal TIXIER
Caporal JOUETTE
Caporal BARFF
Caporal VIDAL
Caporal BAMBRIDGE
Caporal PIETRI
Caporal DOUCET
Déficit : 4 caporaux V&B. et 5 caporaux adjoints
o 4e Compagnie
-
-
Commandant de compagnie : Sous-lieutenant GIBERT
Secrétaire ; Sergent POISBEAU
Adjudant de compagnie : Margis-chef HOLLANDE
Chefs de section : Margis-chef HOLLANDE
Sergent-chef VERNIER
Sergent-chef BROUSTE
Sergent-chef NICOLAS
Sous-officiers adjoints : Sergent AMIOT
Sergent TUMAHAI
Sergent LEHARTEL
Sergent BONNET
144
-
Chefs de groupes : Sergent FULLER
Sergent GALLENON
Sergent ALLAUME
Caporal-chef LETIERCE
Caporal-chef DAUMAS
Caporal FROGIER
Caporal NIMAU
Caporal DAVID
- Caporaux adjoints : Caporal NOBLE
Caporal ASMUS
Caporal SPITZ
Caporal ARIIHORO
Caporal TEAMEAMEA
Caporal MARTIN John
Caporal TEROROTUA
Caporal TUAIRAU
Caporal SALVANAYAGAM
Caporal SUHAS
Caporal MARIASSOUCE
Déficit : 4 caporaux V&B et 5 caporaux adjoints
Liverpool, 15 mai 1941
Le Chef de Bataillon BROCHE
Commandant le 1er Bataillon du Corps
Expéditionnaire Français du Pacifique
F. BROCHE
145
V. Cartographie
Carte 1 : parcours général
Fonds de carte : © histgeo.ac-aix-marseille.fr
Encart : voir carte no 2 (page suivante).
146
Carte 2 (détail) : opérations et campagnes
Fonds de carte : © histgeo.ac-aix-marseille.fr
147
VI. Compagnie Autonome du Pacifique
La Compagnie Autonome du Pacifique est créée de toutes pièces le 16 septembre
1945, avec un but précis : assurer le rapatriement des volontaires survivants dans le
Pacifique. Si aucune liste nominative précise n’a été établie, le PV de formation de la
compagnie donne les renseignements suivants :
1. Les officiers de la compagnie sont les suivants, le capitaine Robert Hervé étant
l’officier commandant :
GRADE
NOM
PRENOM
Capitaine
Hervé
Robert
Capitaine
Dubois
Georges
Lieutenant
Pannetier
Pierre
Lieutenant
Hagen
Thomas
Lieutenant
Dedeyn
Jacques
Lieutenant
Baudoux
Georges
Lieutenant
Artus
Roger
Sous-lieutenant
Lozach
Lucien
Sous-lieutenant
Petre
André
Sous-lieutenant
Petre
René
Sous-lieutenant
Bonneaud
Louis
2. La compagnie comptait dans ses rangs une A.F.A.T. (Auxiliaire Féminine de
l’Armée de Terre498), Raymonde Teyssier (née Jore).
498
Voir : Sébastien ALBERTELLI, Elles ont rejoint de Gaulle, op. cit.
148
3. La répartition des effectifs par grade est la suivante :
GRADES
EFFECTIFS
Capitaines
2
Lieutenants
5
Sous-lieutenants
4
Aspirants
2
Adjudants-chefs
4
Adjudants
9
Sergents-Majors
2
Sergents-Chefs
19
Sergents
24
Caporaux-Chefs
26
Caporaux
40
Soldats de 1ère classe
154
Soldats de 2ème classe
20
AFAT
1
Soit :
® Officiers : 11
® Aspirants : 2
® Sous-officiers : 58
® Soldats, caporaux et caporaux-chefs : 240
® AFAT : 1
® Effectif total : 312
149
VII. Dossier photographique
1.
ARCHIVES ET CLICHES DE L’AUTEUR
William Grand (1918 – 1973), soldat de 1e classe tahitien, ordonnance de Félix Broche puis de Roger
Bouillon, 1941.
© Archives de l’auteur.
Debout à l’arrière, deux marins néo-zélandais du « Monowai ». Assis, René Drollet et William Grand.
Avril 1941.
© Archives de l’auteur.
150
L’adjudant Walter Grand (1917 – 1983) et le sergent-chef John Martin (1921 – 2012).
Paris, hiver 1944-1945.
© Archives de l’auteur.
Walter Grand, vers 1944.
© Archives de l’auteur.
151
Jean-Roy Bambridge (1922 – 1979), sous-officier tahitien et auteur de carnets de guerre.
© Archives de l’auteur.
Thomas Bambridge (1914 – 1942), demi-frère de Jean-Roy Bambridge, mort à Bir Hakeim.
© Archives de l’auteur.
152
Groupe de volontaires tahitiens du Bataillon du Pacifique et leurs familles, printemps 1941.
Debout : Raymond Lehartel (1er à gauche), René Drollet (2e à gauche), William Grand (4e à gauche),
Charles Frogier (au centre), Jean-Roy Bambridge (3e à droite), Thomas Bambridge (2e à droite).
Au premier plan, accroupi : Charles Spitz.
© Archives de l’auteur.
Plaque commémorative en hommage aux soldats du Pacifique, apposée en 1945 sur l’enceinte des
Invalides au niveau du 51 bis boulevard de La Tour Maubourg (Paris 7e).
Photographie prise le 2 octobre 2018.
© Cliché de l’auteur.
153
Plaque toponymique sur la Place du Bataillon du Pacifique (Paris 12e).
Photographie prise le 21 août 2019.
© Cliché de l’auteur.
Détail du monument aux morts de Papeete (Tahiti), avenue Pouvanaa a Oopa (ex-avenue Bruat)
Partie dédiée aux Forces Françaises Libres.
Photographie prise le 14 juillet 2018.
© Cliché de l’auteur.
154
Défilé du Régiment d’Infanterie de Marine du Pacifique – Polynésie (RIMaP-P), héritier des traditions
du Bataillon du Pacifique conjointement avec le RIMaP-NC. Les militaires portent les fourragères de la
Croix de la Libération et de la Médaille Militaire.
Capture d’écran d’une vidéo prise par l’auteur à Papeete le 14 juillet 2018, montrant les soldats
entonnant le chant « Tamari’i Volontaires ».
© Cliché de l’auteur
Case construite dans l’aire coutumière créée au sein du camp Broche à Plum (Nouvelle-Calédonie),
cantonnement principal du RIMaP-NC. On reconnaît les traits du Lt-Col. Broche sur les piliers à l’entrée
et sur la flèche faîtière.
À l’intérieur sont disposées des plaques recensant les morts du Bataillon du Pacifique et du BIMP.
Photographie prise le 2 septembre 2019.
© Cliché de l’auteur.
155
Croisement des rues Félix Broche et Auguste Bénébig à Nouméa (Nouvelle-Calédonie).
Photographie prise le 20 septembre 2019.
© Cliché de l’auteur.
Détail du monument aux Forces Françaises Libres.
Baie de l’Orphelinat, Nouméa (Nouvelle-Calédonie).
Photographie prise le 7 septembre 2019.
© Cliché de l’auteur.
156
Insigne du Bataillon du Pacifique, celui-ci ayant appartenu à Jean Tranape.
Musée de l’Ordre de la Libération (Paris), 26 août 2019.
© Cliché de l’auteur
Sépulture du caporal-chef Antonin Mourgues, volontaire du BIMP inhumé dans le caveau no 16 de la
crypte du Mémorial de la France Combattante au Mont Valérien (Suresnes).
Photographie prise le 24 juin 2020
© Cliché de l’auteur.
Reproduit avec l’aimable autorisation de M. Jean-Baptiste Romain, directeur des hauts lieux de la
mémoire nationale d’Île-de-France.
157
2.
FONDS DE L’ORDRE DE LA LIBERATION
Les photographies appartenant au fonds de l’Ordre de la Libération ci-après
reproduites font l’objet d’une convention d’utilisation entre l’auteur et l’Ordre.
Jacques Savey (1910 – 1942), chef de corps du 1er BIM puis du BIMP, mort à Bir Hakeim.
© Musée de l’Ordre de la Libération.
Henri Magny (1910 – 1944), chef de corps du BIMP du 21 novembre 1943 à sa mort au combat en Italie
le 16 mai 1944.
© Musée de l’Ordre de la Libération.
158
Edmond Magendie (1912 – 2000), successeur d’Henri Magny à la tête du BIMP et dernier chef de corps
de l’unité en temps de guerre. Il termine sa carrière militaire au grade de général de division.
© Musée de l’Ordre de la Libération.
Robert Hervé (1910 – 1999), engagé volontaire à Tahiti dès septembre 1940. Capitaine à la fin de la
guerre, il commande le détachement du Pacifique sur le chemin du retour.
© Musée de l’Ordre de la Libération.
159
Raymond Perraud (1913 – 1944), magistrat, acteur du ralliement de la Nouvelle-Calédonie et engagé
volontaire au premier contingent, il commande la 2e compagnie du corps expéditionnaire. Il participe à
toutes les campagnes du bataillon et meurt au combat en Provence.
© Musée de l’Ordre de la Libération.
André Salvat (1920 – 2017), affecté au Bataillon du Pacifique à l’automne 1941 à sa sortie de l’école des
aspirants du camp Colonna d’Ornano et après avoir fait la campagne de Syrie avec le 1er BIM. Il est chef
de section jusqu’à la fin de la guerre qu’il termine au grade de lieutenant. Il achève sa carrière militaire
en 1973 au grade de colonel.
© Musée de l’Ordre de la Libération.
160
Jean Bellec (1920 – 2002), étudiant lorsque la guerre éclate, suit également les cours d’aspirant avant
d’être affecté au BP1. Il termine la guerre dans l’Authion avec le grade de lieutenant. Poursuivant une
carrière militaire après-guerre, il sert en AEF, en Indochine, à Madagascar et en Algérie. Il prend sa
retraite en 1973 avec le grade de général de brigade.
© Musée de l’Ordre de la Libération.
Le capitaine Gaston Duché de Bricourt (1914 – 1942) fut l’adjoint du lieutenant-colonel Broche à
Bir Hakeim. Il meurt touché par le même obus.
© Musée de l’Ordre de la Libération.
161
Auguste Bénébig (1915 – 1993), engagé volontaire au premier contingent néo-calédonien, dirigé sur les
arrières en octobre 1943 et rapatrié en Nouvelle-Calédonie où il arrive en juillet 1944.
© Musée de l’Ordre de la Libération.
Marcel Kollen (1912 – 1942), acteur du ralliement à la France Libre de la Nouvelle-Calédonie,
engagé volontaire au premier contingent néo-calédonien. Il meurt au combat à Bir Hakeim le
1er juin 1942.
© Musée de l’Ordre de la Libération.
162
René Pètre (1908 – 1957), acteur du ralliement de la Nouvelle-Calédonie à la France Libre, engagé
volontaire au premier contingent néo-calédonien, il termine la guerre au grade de sous-lieutenant.
© Musée de l’Ordre de la Libération.
163
3.
FONDS JEAN TRANAPE
Les clichés suivants sont reproduits avec l’aimable autorisation de M. Jean-Claude
Tranape.
Exercice de DCA à Héliopolis (Égypte). Debout : les sous-lieutenants Jean Bellec et André Salvat, et le
capitaine Raymond Perraud.
15 septembre 1942.
© Fonds Jean Tranape.
Raymond Perraud au centre ; Jean Bellec à sa droite et André Salvat à sa gauche, le bras tendu.
Héliopolis (Égypte), 15 septembre 1942.
© Fonds Jean Tranape.
164
Volontaires calédoniens à l’entraînement à Bir Hakeim. Les soldats étaient disposés de façon similaire
durant les attaques.
Printemps 1942.
© Fonds Jean Tranape.
À noter que Jean-Christophe Shigetomi décrit l’armement visible sur le cliché ci-dessus de façon très
précise dans son ouvrage « Tamari’i Volontaires » (p. 195).
L’équipe de football du Bataillon du Pacifique en Syrie, 1941.
Philippe Bernardino, sous-officier tahitien, est assis au premier rang à l’extrême gauche. Au-dessus de
lui, Raymond Perraud, officier des sports du bataillon.
© Fonds Jean Tranape.
165
Groupe de soldats du Bataillon du Pacifique au bord de la mer après la sortie de Bir Hakeim.
Allongé au premier rang à gauche : Jean Tranape. Assis juste derrière lui : Daniel Milne, volontaire
néo-hébridais.
Juin 1942.
© Fonds Jean Tranape.
Pot organisé par le capitaine Perraud (au centre) pour la nomination de l’aspirant Bellec au grade de
sous-lieutenant, fin juin 1942.
© Fonds Jean Tranape.
166
Défilé de la section tahitienne de la Compagnie Autonome du Pacifique sur l’avenue des ChampsÉlysées (Paris 8e).
18 septembre 1945.
© Fonds Jean Tranape.
Volontaires du Pacifique au pied de l’Arc de Triomphe, attendant leur passage en revue par le
général Legentilhomme.
Au premier plan, de profil : Jean Tranape, porte-drapeau du bataillon.
Paris, 18 septembre 1945.
© Fonds Jean Tranape.
167
Le capitaine Robert Hervé et le général de Gaulle passent les « Pacifiens » en revue.
Le premier soldat que l’on reconnaît sur la droite est le caporal-chef Roger Ludeau (1920 – 2016), néocalédonien auteur de carnets de guerre
Paris, 20 septembre 1945
© Fonds Jean Tranape
Le général de Gaulle faisant ses adieux au Bataillon du Pacifique. Derrière lui, André Diethelm,
commissaire à la Guerre, et le capitaine Robert Hervé.
Caserne Latour Maubourg, Paris.
20 septembre 1945.
© Fonds Jean Tranape.
168
De gauche à droite : Louis Kasni Warti, Jean Tranape et un soldat Kanak.
Paris, 18 septembre 1945.
© Fonds Jean Tranape.
169
4.
FONDS ÉMILE SAVITRY
Les photographies qui suivent furent prises par le photographe humaniste
Émile Savitry. Elles sont exposées sur le site internet www.emilesavitry.com499 et
reproduites avec l’aimable autorisation de Mme Sophie Malexis.
De gauche à droite : Teina Taie, Teriitemoehau Pihahuna, Marama Tiaihau, Fareaiti Tuiho et Pierre
Marmouyet, photographiés dans la chambre de John Martin (auteur du dessin de paysage polynésien sur
le mur, sur la droite de l’image) à la caserne Latour Maubourg.
Paris, début 1945.
© Fonds Émile Savitry
499
Voir aussi : Sophie MALEXIS, Émile Savitry, un photographe de Montparnasse, Paris, Les 5 Continents,
2011.
170
Les soldats Marama Tiaihau, Fareaiti Tuiho et Teriitemoehau Pihahuna à la caserne LatourMaubourg, début 1945.
© Fonds Émile Savitry
De gauche à droite : Frédéric Tefaafana, Teriitemoehau Taoa, Teriitemoehau Pihahuna, Marama
Tiaihau et Revatua Teupootahiti.
Caserne Latour Maubourg, début 1945.
© Fonds Émile Savitry
171
Le soldat tahitien Teriitemoehau Pihahuna dans sa chambre à la caserne Latour Maubourg.
Début 1945.
© Fonds Émile Savitry
172
5.
AUTRES FONDS
Le chef de bataillon Félix Broche (1905 – 1942).
Moyen-Orient, 1941.
Cliché reproduit avec l’aimable autorisation de M. François Broche.
© Archives privées (coll. Broche).
Le sergent-chef Philippe Bernardino (1915 – 1963), arborant la Médaille Militaire.
10 août 1942.
Cliché reproduit avec l’aimable autorisation de Mme Dolorès Chan.
© Archives privées (coll. Chan).
173
Ari Wong Kim (né en 1924), dernier volontaire tahitien du Bataillon du Pacifique toujours en vie.
Reproduit avec l’aimable autorisation de M. Georges Buisson.
© Archives privées (coll. Buisson)
Démobilisation partielle de la CAICT, le 10 août 1940.
Félix Broche est au second rang au centre, le Dr Louis Rollin immédiatement à sa droite, Robert Hervé
6e à sa gauche, en costume.
William Grand est au troisième rang sur la droite
Cliché reproduit avec l’aimable autorisation de M. Éric Noble.
© Fonds de l’Amicale du Bataillon du Pacifique.
174
Le caporal André Doucet jouant de la guitare, entouré de ses camarades du BP1.
Afrique du Nord, vers 1942.
Cliché reproduit avec l’aimable autorisation de Mme Florence Roumeguère.
© Site web de l’Amicale de la 1e DFL (www.1dfl.fr).
Au centre, le caporal Jean-Roy Bambridge jouant de l’accordéon. Il avait recueilli l’instrument dans une
tranchée italienne à El Alamein.
Afrique du Nord, vers 1943.
Cliché reproduit avec l’aimable autorisation de Mme Florence Roumeguère.
© Site web de l’Amicale de la 1e DFL (www.1dfl.fr).
175
Le chef de bataillon Edmond Magendie et le capitaine Raymond Perraud, devant le Golf Hôtel, après
l’assaut mené par le BIMP, le 21 août 1944. Le capitaine Perraud est tué deux jours plus tard.
Cliché reproduit avec l’aimable autorisation de Mme Florence Roumeguère.
© Site web de l’Amicale de la 1e DFL (www.1dfl.fr).
Au premier plan, de gauche à droite : le maire de Nouméa Ernest Massoubre (en civil), le gouverneur
général Richard Brunot, le gouverneur de la Nlle-Calédonie Henri Sautot et le capitaine Félix Broche.
Au second plan, les volontaires tahitiens sont à gauche de l’image et les néo-calédoniens à droite.
Nouméa, 3 mai 1941.
Reproduit avec l’aimable autorisation de Mme Véronique Defrance.
© Musée de la ville de Nouméa (coll. Kollen).
176
Le gouverneur Henri Sautot (1885 – 1963), au centre, faisant ses adieux aux volontaires embarquant sur
le « Zélandia » à destination de l’Australie.
Nouméa, 5 mai 1941.
Reproduit avec l’aimable autorisation de Mme Véronique Defrance.
© Musée de la ville de Nouméa (coll. Dupont).
Le capitaine Félix Broche à Nouméa, mai 1941.
Reproduit avec l’aimable autorisation de Mme Véronique Defrance.
© Musée de la ville de Nouméa (coll. Dallstein).
177
Henri Sautot (en uniforme blanc à droite) lisant un discours à Nouméa. À sa droite, Michel Vergès
(1898-1964), notaire, chef d’un des « comités de Gaulle » du territoire. Au second plan, portant un
chapeau, Raymond Pognon (1873-1959), influent notable calédonien ayant également participé au
ralliement de la colonie. Tous les trois sont Compagnons de la Libération.
Mai 1941.
Reproduit avec l’aimable autorisation de Mme Véronique Defrance.
© Musée de la ville de Nouméa
Le lieutenant néo-calédonien Tom Hagen
Libye, 1942.
Cliché reproduit avec l’aimable autorisation de M. Ismet Kurtovitch
© Archives territoriales de la Nouvelle-Calédonie (coll. privée – droits réservés)
178
La CAICT recevant son nouveau fanion le 11 novembre 1939
Photographie annotée par Félix Broche : « Papeete, le 11 novembre 1939. Je présente à la CAICT son
nouveau fanion brodé par les dames de la Croix Rouge »
Reproduit avec l’aimable autorisation de M. Jean-Christophe Shigetomi
© Maison de la Culture de Tahiti (fonds Broche)
Raymonde Jore (1917 – 1995), AFAT Néo-Calédonienne affectée à la Compagnie Autonome du
Pacifique pour son rapatriement à la fin de la guerre.
© Service Historique de la Défense, GR 16 P 311304
179
Le chef de bataillon Roger Bouillon (1903 – 1993), chef de corps du BIMP de juillet 1942 à
novembre 1943.
Il combat avec son bataillon à El Alamein en octobre 1942.
© Service Historique de la Défense, GR 16 P 78983.
Le capitaine Jean-Baptiste Podevigne (1902 – 1972), aumônier catholique du BP1 puis du BIMP
jusqu’en 1943. Il sera ensuite remplacé par le père Jean Starcky.
© Service Historique de la Défense, GR 16 P 482703
180
Édouard Magnier (1912 – 1999), sous-officier néo-calédonien auteur d’un journal de guerre
© Service Historique de la Défense, GR 16 P 383335
Georges Champion, volontaire calédonien du 1er contingent natif de Maré, champion d’Australie de
boxe.
Cliché reproduit avec l’aimable autorisation de M. Gilles Mehaut.
© Archives privées (coll. Mehaut).
181
Le général Pierre Koenig (1898 – 1970), commandant la 1ère Brigade Française Libre, puis gouverneur
militaire de Paris en 1944-1945.
Vers 1942
Reproduit avec l’aimable autorisation de M. Sylvain Cornil.
© Fondation de la France Libre
Georges Bambridge (1888 – 1942), maire de Papeete d’août 1933 à juin 1941, acteur du ralliement des
EFO à la France Libre et membre du gouvernement provisoire en septembre 1940. Ses neveux Thomas et
Jean-Roy Bambridge s’engagent au Bataillon du Pacifique.
Cliché reproduit avec l’aimable autorisation de M. Christian Gleizal.
© Assemblée Territoriale de la Polynésie Française.
182
Un autre exemple de l’expression de la culture océanienne dans le désert : des soldats du
28th Māori Battalion néo-zélandais font un Haka à l’occasion d’une visite du roi de Grèce à
Helwan (Égypte), le 24 juin 1941.
Bibliothèque Nationale de Nouvelle Zélande, réf. DA-01229-F.
Reproduit avec l’aimable autorisation de M. David C. Retter.
© Alexander Turnbull Library, Wellington (Nouvelle-Zélande)
Édouard Bergé (1898 – 1973), Calédonien de Paris, assureur de formation et vétéran de 14-18, il
accueille les volontaires à leur arrivée dans la capitale en 1944-1945.
Reproduit avec l’aimable autorisation de Mme Marie Bergé.
© Archives privées (coll. Bergé)
183
Note : liste des volontaires du 1er contingent
Nous avons pu établir une liste des volontaires du premier contingent du Bataillon
du Pacifique, en nous basant sur le catalogue de la sous-série GR 16 P du Service
Historique de la Défense, sur la liste des Français Libres établie par Henri Écochard500
(lui-même ancien combattant de la 1ère DFL, décédé le 3 avril 2020), sur des documents
et listes nominatives conservées par l’Ordre de la Libération, les archives municipales de
Nouméa, les archives territoriales de Nouvelle-Calédonie et de Polynésie Française, et
publiées dans la presse de l’époque. Cependant, celle-ci étant assez longue, nous ne la
reproduirons pas ici, ne souhaitant pas encombrer nos annexes d’une vingtaine de pages
supplémentaires.
500
Les Français Libres [en ligne] 2020, http://www.francaislibres.net/liste/liste.php.
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Pour contacter l’auteur :
yacine.benhalima@gmail.com
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Fait partie de Du lagon au désert : le Bataillon du Pacifique dans la Seconde Guerre mondiale (1940 – 1946)