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BULLETIN
DE LA SOCIETE
DES
ETUDES OCEANIENNES
N°298 • Septembre 2003
DES
BULLETIN
DE LA SOCIETE
ETUDES OCEANIENNES
(POLYNESIE ORIENTALE)
N°298 • Septembre 2003
Sommaire
Mémorial polynésien de la Légion d’Honneur (1802-2002) ........p. 2
Pierre Romain
Janvier 1903,
La Zélée aux Tuamotu après un cyclone meurtrier........................p. 48
L. V. Richard, commandant de la canonnière La Zélée
(Rapport officiel)
Photos des effets du cyclone à Raroia et à Hao ..............................p. 55
In memoriam Robert I. Levy .............................................................p. 62
Robert Koenig
Compte rendu d’ouvrage
Jean Guiart ...............................................................................................p. 64
Mémorial polynésien
de la Légion d’honneur
1802 - 2002
La Légion d’honneur est créée par la loi du 29 floréal an X (19 mai 1802) sous
le consulat, mais les premières remises d’insignes n’interviennent que le dimanche 26
messidor an XII (15 juillet 1804), pour l’anniversaire du 14 juillet, des mains de
Napoléon Ier empereur des Français, en l’église de l’hôtel des invalides.
Par qui, et à quelle date, un insigne de la Légion d’honneur avec son ruban rouge
est-il arboré, pour la première fois, dans une des îles de la future Polynésie française ?
Il est fort probable que c’est par le commandant d’un des bâtiments de guerre français
qui croisent dans ces eaux depuis 1823 (Duperrey, Dumont d’Urville, Dupetit-Thouars,
Bernard, Paris, Laplace…), et alors qu’il rend une visite protocolaire, en grand uniforme, à un roi ou à un grand chef. Cet officier avait-il été décoré avant 1815, par
Napoléon Ier empereur des Français, d’un insigne portant le profil de l’empereur et
l’aigle ? Ou entre 1815 et 1830, par Louis XVIII ou Charles X, rois de France, le profil
de Henri IV et les fleurs de lis remplaçant les motifs précédents ? Ou après 1830, par
Louis-Philippe, roi des Français, d’un insigne où deux drapeaux tricolores figurent
maintenant à la place des fleurs de lis ?
L’histoire de la Légion d’honneur en Polynésie française ne commence vraiment
qu’en 1842, avec l’instauration du protectorat sur le royaume de Tahiti et dépendances,
avec l’annexion des Marquises, et c’est dans une période douloureuse, puisqu’au cours
de la guerre franco-tahitienne (mars 1844-janvier 1847) que, pour la première fois,
des insignes de la Légion d’honneur sont remis localement ; il y en aura beaucoup
d’autres par la suite.
Alors que s’achèvent les célébrations du bicentenaire de la création de l’ordre,
faisons plus particulièrement mémoire, parmi tous les membres de la Légion d’honneur qui en ont porté l’insigne sur le fenua, des Polynésiens de naissance ou d’adoption qui nous ont quittés.
Les voici donc, cités par année de nomination dans le premier grade de la Légion
d’honneur, et, pour la même année, dans l’ordre alphabétique.
Pierre Romain
Officier de la Légion d’honneur
1844
TEIHOTUA a ARO’A dit Rava’ai 1806-1893 - chevalier de la Légion
d’honneur (1844) - issu d’une famille
de chefs, il se rallie l’un des premiers
au protectorat ; il participe dans les
rangs des troupes françaises, entre
mars 1844 et décembre 1846, à tous
les combats contre l’insurrection ; se
distingue particulièrement au combat
de Mahaena, à la suite duquel il est
nommé dans la Légion d’honneur
comme “chef taïtien”. Il est chef de
Mataeia de 1845 jusqu’à sa retraite en
1865 ; acquitté, en avril 1846, par le
conseil de guerre permanent de
Papeete, devant lequel il est traduit
pour avoir, quelques jours avant, blessé d’un coup parti accidentellement de
son fusil de chasse, le commandant en
second de la corvette à vapeur britannique Salamander qui se trouvait dans
le jardin du consul de GrandeBretagne ! Ce qui n’arrange pas les
relations, déjà difficiles, entre Français
et Anglais (Procédure conservée aux
archives du ministère des affaires
étrangères). Son beau-frère, le régent
PARAITA, cité plus loin, était chevalier
de la Légion d’honneur.
n Bien que reparti dès 1847 en France, on
peut considérer comme Polynésien d’adoption, puisque de postérité :
4
Édouard GABRIELLI de CARPEGNA
- 1816-1883 - chevalier (1844), puis
officier (1858) de la Légion d’honneur
- officier de marine, navigue dans les
eaux polynésiennes dès 1837, sur
l’Artémise puis la Reine Blanche ; à
partir de 1843, se voit confier diverses
fonctions à terre, dont celle de membre du gouvernement provisoire du protectorat ; participe aux combats de
Mahaena et de Haapape en avril et juin
1844, où il se distingue et à la suite
desquels il est nommé dans la Légion
d’honneur ; prend sa retraite en 1866
comme capitaine de frégate, se retire à
Paris où il décède ; de son union avec
TEINA a POROI descend la famille
POROI ; son arrière-petit-fils Alfred
POROI, cité plus loin, était officier de
la Légion d’honneur.
Charles SUE - 1821-1869 - chevalier
de la Légion d’honneur (1844) - arrivé
à Tahiti en janvier 1844 comme second
maître fourrier ; participe à plusieurs
combats, et particulièrement à celui de
Mahaena, à la suite duquel il est
nommé dans la Légion d’honneur
“fourrier d’infanterie de marine” ;
démobilisé en 1847, il s’établit définitivement à Tahiti et poursuit une carrière administrative dans la marine
militaire jusqu’à sa retraite en 1867 ;
participe activement à la vie économique et politique de la colonie : juge
suppléant au tribunal de Papeete en
1855, conseiller à la Cour impériale
des îles de la Société en 1859, président du Comité consultatif de commerce et d’agriculture en 1863.
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n Ces trois nominations dans la Légion d’honneur sont prononcées, parmi d’autres, par la
même ordonnance royale du 17 octobre 1844.
1845
HITOTI a MANUA - 1770-1845 - chevalier de la Légion d’honneur (1845) issu d’une famille de grands chefs, il est
un des premiers Tahitiens à se convertir
au christianisme ; grand chef de
Teaharoa (Tiarei), président de la
Haute-Cour tahitienne, il est un des
signataires de la demande de protectorat par la France de septembre 1842 ;
déchu de ses fonctions fin 1843 par les
insurgés ; participe aux combats de
Mahaena et de Haapape, en avril et juin
1844 ; il retrouve ses fonctions ;
nommé dans la Légion d’honneur
début 1845, il décède le 20 août ;
Bruat rend compte au ministre de son
décès par une lettre datée du 24 août
1845 “HITOTI, le grand chef de Tieri…
vient de mourir, à Papeiti, enlevé par
une fièvre cérébrale, au moment où il
venait d’apprendre que sa Majesté avait
daigné le nommer chevalier dans l’ordre de la Légion d’honneur… En 1842,
il avait signé et soutenu la demande du
protectorat ; depuis, en toutes circonstances, soit par sa parole dans les
assemblées, soit par sa coopération
dans les expéditions militaires, il s’était
montré le plus ferme appui du gouvernement établi”, et l’informe qu’il a
adopté sa nièce, qui habite chez lui
depuis deux jours.
1846
TERI’ITANOA a TEMAEHUATEA,
régent PARAITA - vers 1787-1865 - chevalier de la Légion d’honneur (est.
1846) - issu d’une famille de chefs,
n France, Louis-Philippe abdique et la Seconde République est proclamée. La
Légion d’honneur est maintenant décernée par le président de la République, et
l’effigie de la République remplace le profil de Henri IV sur l’insigne ; ces nouvelles dispositions ne s’appliquent pas longtemps, puisque sont promulgués, au bulletin
officiel des E.F.O. n°16 de février 1849 l’arrêté du 12 septembre 1848 signé Cavaignac,
président du Conseil, chargé du pouvoir exécutif qui, “vu l’urgence et à titre provisoire”,
modifie les modèles des médailles de la Légion d’honneur qui portent désormais le profil de “Bonaparte avec la mention Bonaparte premier Consul 19 mai 1802 République
française Honneur et Patrie”, et au bulletin officiel des E.F.O. n° 48 de décembre 1851
(édition tardive) le décret du prince président de la République du 31 décembre 1851
qui “rétablit l’aigle sur les drapeaux et insignes de la Légion d’honneur”.
A partir du 2 décembre 1852 la Légion d’honneur est décernée par l’empereur des
Français, la proclamation de l’empire n’étant connue à Tahiti que le 17 avril 1853.
Après les nominations liées aux événements de 1844 à 1846, les rares nominations
mentionnées dans le bulletin officiel des E.F.O. pendant les décennies 1850 et 1860 ne
concernent que des militaires qui, à l’exception de BONET, repartent vers la France à
l’issue de leur affectation.
Avant la nomination de ce dernier, un ancien de Tahiti revient au pays, membre de la
Légion d’honneur depuis peu.
E
5
chef de Pare, il est nommé en 1839
régent du royaume, c’est-à-dire remplaçant de la reine POMARE IV quand
celle-ci est absente de son royaume ;
premier signataire de la demande de
protectorat par la France de septembre
1842, il prend une part active dans son
instauration ; participe avec bravoure
aux derniers combats ; continue à
exercer ses fonctions de régent sous le
protectorat, jusqu’à sa mise à la retraite en 1858.
1847
TARI’IRI’I a VEHIATUA I TE MATAI
dit Pe’eueue - 1822-1889 - chevalier
de la Légion d’honneur (1847) - issu
d’une famille de grands chefs, après
avoir lutté contre le protectorat à
Mahaena et Ha’apape, il s’y rallie en
mai 1845, et est nommé chef de
Mahina ; il participe alors du côté du
protectorat à tous les combats, et en
particulier à celui de Fautaua, à la suite
de quoi il est nommé dans la Légion
d’honneur avec des militaires français,
par ordonnance royale du 3 juillet
1847 “en récompense de (leur) belle
conduite dans les combats livrés à la
fin de 1846, dans l’Océanie (affaire de
Punaroo et prise du fort de Fautahua…” ; il part en France avec Bruat
en 1847, et est présenté au roi LouisPhilippe auquel il remet le pavillon
qu’il avait pris au fort de Fautaua ;
pendant l’année 1859 il commande un
détachement de volontaires tahitiens
qui, en Nouvelle-Calédonie, participe à
la lutte contre des tribus insurgées ;
6
vice-président de la Haute-Cour tahitienne ; contresigne l’acte de donation
par POMARE V en date du 29 juin
1880.
1863
Jean TEISSIER - 1822-1894 - chevalier de la Légion d’honneur (1863) arrivé à Tahiti en 1847 comme militaire, il passe en 1848 dans le premier
détachement de gendarmerie des
E.F.O. en cours de constitution, au sein
duquel il sert dans plusieurs îles ; est
affecté en Nouvelle-Calédonie de 1859
à 1867, séjour au cours duquel il est
nommé dans la Légion d’honneur “brigadier au détachement de NouvelleCalédonie - 20 ans de service - 17 campagnes” ; fin 1867 il quitte la gendarmerie et revient à Tahiti, où il occupe
divers emplois dans l’administration
locale.
1867
Frédéric BONET - 1833-1902 - chevalier de la Légion d’honneur (1867) arrivé à Tahiti en 1860 comme officier
de marine, il occupe de nombreuses
fonctions dans l’administration locale,
dont la direction de l’arsenal de Fare
Ute au moment où il est nommé dans
la Légion d’honneur “lieutenant de
vaisseau - 13 ans de services effectifs
dont 12 à la mer” ; après son passage
en retraite en 1880 comme lieutenant
de vaisseau, il devient avocat défenseur
et participe activement à la vie politique et économique, président de la
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Chambre d’agriculture, président de la
Caisse agricole, membre du Conseil
colonial puis président du Conseil général, conseiller municipal de Papeete ;
son beau-père Alexandre HOLOZET,
cité plus loin, était chevalier de la
Légion d’honneur.
a déchéance de Napoléon III et la
proclamation de la République, le 4
septembre 1870, ne sont connues à
Tahiti que le 20 novembre 1870 ; pour la
Légion d’honneur, retour à la nomination
par le président de la République et au
modèle républicain pour l’insigne.
A noter qu’il n’y a eu aucune nomination
dans la Légion d’honneur de Polynésiens
de naissance ou d’adoption au titre des
guerres du second empire.
Interviennent alors les premières nominations dans la Légion d’honneur à titre
civil dans les E.F.O.
L
1872
Alexandre HOLOZET - 1823-1895 chevalier de la Légion d’honneur
(1872) - magistrat du cadre colonial,
originaire de la Guadeloupe ; arrive à
Tahiti avec sa famille en mars 1869
pour prendre les fonctions de procureur impérial et mettre en place un
système judiciaire français dans le protectorat ; un décret du 26 janvier 1872
le nomme conseiller à la Cour d’appel
de la Martinique et, quinze jours après,
un autre décret lui confère la Légion
d’honneur ; ce n’est qu’en mai 1873
qu’il peut quitter Tahiti, où il laisse son
fils René nommé en 1877 provisoirement commis auxiliaire du service de
l’enregistrement ; à noter que, arrivé
procureur impérial, il repart procureur
de la République ; prend sa retraite de
magistrat en 1880, nommé conseiller
honoraire ; revient à Tahiti en 1881
avec six de ses enfants et s’établit
comme avocat défenseur ; conseiller
général ; son gendre Frédéric BONET,
cité plus haut, était chevalier de la
Légion d’honneur.
Félix LAGARDE - 1825-1886 - chevalier de la Légion d’honneur (1872) engagé en 1847 dans l’infanterie de
marine, arrive à Tahiti en 1856 comme
sergent fourrier ; démobilisé en 1859,
il s’établit définitivement à Tahiti, où il
effectue une brillante carrière dans
l’administration locale, puisqu’après
avoir été directeur de l’intérieur, il est
secrétaire général par intérim au
moment de son décès. Son fils Georges
LAGARDE et sa petite fille Anna LAGARDE, cités plus loin, étaient chevaliers
de la Légion d’honneur.
Le 29 juin 1880 le roi POMARE V fait don
de ses Etats à la France, et l’annexion est
ratifiée le 30 décembre 1880.
1880
POMARE V, TERATANE, ARI’IAUE a
TU - 1839-1891 - officier de la Légion
d’honneur (1880) - proclamé roi de
Tahiti et dépendances le 24 septembre
1877, fait don de ses Etats à la France
le 29 juin 1880 ; nommé, au titre
étranger, directement officier de la
Légion d’honneur par décret du président de la République du 6 novembre
1880 ; conserve ses fonctions de chef
7
de Pare, de Afaahiti et de Arue. Son
neveu et fils adoptif, Hinoi POMARE, et
son ex-épouse Joanna MARAU, cités
plus loin, étaient chevaliers de la
Légion d’honneur.
1881
Charles CHASSANIOL - 1843-1927 chevalier de la Légion d’honneur
(1881) - arrivé à Tahiti en 1875
comme médecin militaire de marine, y
effectue plusieurs séjours, en particulier comme chef du Service de santé ;
est nommé dans la Légion d’honneur
en 1881 au cours d’un congé en
France ; s’établit définitivement à
Tahiti en 1891 comme médecin privé ;
familier de la reine MARAU.
1883
Charles VIENOT - 1839-1903 - chevalier de la Légion d’honneur (1883) arrivé à Tahiti en 1866 comme enseignant, envoyé par la Société des
Missions évangéliques de Paris qui
assure la relève de la London
Missionary Society ; fonde et anime
plusieurs établissements d’enseignement protestants, dont une Ecole normale ; est consacré pasteur pendant
un séjour en France ; président du
Conseil supérieur des Eglises protestantes des îles du Vent, est nommé dans
la Légion d’honneur fin 1883 au cours
d’un autre séjour en France ; membre
du Conseil colonial ; puis membre,
puis président du Conseil général.
8
1889
Louis (Paul Eugène) LANGOMAZINO - 1848-1893 - chevalier de la
Légion d’honneur (1889) - arrivé à
Nuku-Hiva en 1852, ainsi que sa mère
et un de ses frères, accompagnant son
père, condamné à la déportation pour
son action politique en faveur de la
République et contre le prince président Bonaparte ; suit sa famille à
Tahiti en 1854, la déportation de son
père ayant été commuée en bannissement ; commence en 1862 une carrière administrative dans la marine, est
nommé dans le corps du commissariat
de la marine en 1875 ; poursuit sa
carrière hors de Tahiti à partir de
1876 : Nouméa, Sénégal, Réunion,
Tonkin (au moment du décès de son
père en janvier 1885), Guadeloupe,
Guyane, etc. Prend sa retraite à
Marseille où il meurt.
n L’annexion de Raiatea et de Tahaa est
proclamée le 17 mars 1888, et la guerre
des îles Sous-le-Vent débute quelques
jours après.
TAMATOA TAUTU TAVANA, TERIIFAOTUA a TERIITAFIRAI dit - 18481906 - chevalier de la Légion d’honneur (1889) - son acte de décès,
transmis à la grande chancellerie de la
Légion d’honneur, mentionne “décès
le 4 février 1906 à Uturoa, âgé de 58
ans, profession chef du Premier arrondissement, domicilié à Uturoa, époux
de Tehare-tua a Maheanu’u, fils de
Teriitafirai et de Otiti, né à Taha’a” ; la
lettre de transmission du gouverneur
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précise que l’intéressé “a été fait chevalier de la Légion d’honneur au titre
étranger sous le nom de Tamatoa a
Tautu Tavana, roi de Raiatea et Taha’a,
sur proposition du ministre des affaires étrangères par décret du 18 août
1889 et en qualité de vice-roi de
Raiatea-Tahaa ; il se nommait Tamatoa a Tautu, cette appellation indiquant
la filiation dynastique des rois de
Raiatea (Tamatoa) dont il était le successeur politique” ; il figure dans
l’Annuaire des Etablissements français
d’Océanie, pour la première fois en
1891 comme vice-roi de RaiateaTaha’a ; puis ensuite comme chef du
Premier arrondissement (Uturoa,
Tefenuapoto, Avera) sous le nom de
Tavana suivi de l’insigne de chevalier
de la Légion d’honneur.
1891
FANAU’E a TI’IHIVAAROA dit TI’IHIVA - 1816-1901 - chevalier de la
Légion d’honneur (est. 1891) - issu
d’une famille de chefs, chef de Papeari
(Tahiti) de 1869 à 1898 ; contresigne
l’acte de donation par POMARE V en
date du 29 juin 1880.
1895
Teriihinoiatua POMARE a TU,
prince HINOI - 1869-1916 - chevalier de la Légion d’honneur (est 1895)
- petit-fils de la reine POMARE IV ;
chef de Arue, juge puis vice-président
de la Haute-Cour tahitienne ; son
oncle et père adoptif POMARE V était
officier de la Légion d’honneur.
1897
ARI’IOEHAU a UPOO dit TETUANUI
- 1857-1916 - chevalier de la Légion
d’honneur (1897) - issu d’une famille
de chefs, chef de Mataiea, juge à la
Haute-Cour tahitienne ; fait un séjour
en France en 1889 à l’occasion de
l’Exposition universelle de Paris ; en
décembre 1897, commande un groupe
de volontaires tahitiens qui participe
aux opérations de Raiatea ; est chef de
Mataiea au moment de son décès.
1902
Pierre NOUVEAU - 1854-1904 - chevalier de la Légion d’honneur (1902) arrivé à Tahiti en 1886 comme gendarme, est en poste aux Marquises,
Gambier et Tuamotu ; après avoir pris
sa retraite de gendarme en 1902, il
assure la fonction de brigadier de police de Papeete. Son gendre Antoine
LECA, cité plus loin, avait été fait chevalier de la Légion d’honneur à titre posthume.
1906
Victor RAOULX - 1842-1914 - chevalier de la Légion d’honneur (1906) arrivé à Tahiti en 1861 comme militaire ; démobilisé en 1863, il a de nombreuses activités dans le secteur privé :
capitaine de goélette, commerçant,
exploitant agricole, industriel, patron
de presse ; homme politique : président du Conseil colonial, membre puis
vice-président du Conseil général,
membre du Conseil d’administration,
9
président de la Chambre de commerce. Sa petite-fille Rosa Raoulx, citée
plus loin, était chevalier de la Légion
d’honneur.
archipel du 1er septembre 1892 au 10
mars 1893. A contribué enfin à l’annexion de Rimatara et de ses dépendances (6 juin 1901)”.
1911
1916
Jean-Marie CADOUSTEAU - 18551916 - chevalier de la Légion d’honneur (1911) - né à Papeete, il fait une
carrière d’interprète de l’administration locale ; conseiller privé de POMARE V ; au moment où il est fait chevalier de la Légion d’honneur au titre
indigène, avant de partir en retraite, il
est interprète principal de première
classe et adjoint au maire de Papeete ;
le mémoire de proposition du gouverneur mentionne : “a contribué à l’annexion de Tahiti et de ses dépendances
(29 juin 1880) et à celle des Gambier
et de Rapa (1881). A pris part à l’établissement du protectorat des îles
Rurutu et Rimatara (1889). A rempli
diverses missions dans l’archipel des
îles Sous-le-Vent avant son annexion
définitive (16, 17 et 19 mars 1888).
Était administrateur intérimaire de cet
Maxime LEONTIEV (LEONTIEFF) 1872-194 – commandeur de la Légion
d’honneur (1916) – général russe, il
est nommé, au titre étranger, directement commandeur de la Légion d’honneur par décret du 16 juin 1916 ; les
nombreuses nominations prononcées
par ce décret (7 commandeurs, 24
officiers, 17 chevaliers) d’officiers
généraux ou supérieurs et de fonctionnaires russes font vraisemblablement
suite à la conférence, réunie par Joffre
en décembre 1915, à Chantilly, entre
les Franco-Anglais et les Russes, et qui
a permis de décider et organiser la
convergence des actions militaires à
entreprendre à partir de l’été 1916 ; le
décret le mentionne “général-major
faisant fonctions de général quartiermaître” ; après le commandement
d’une brigade russe sur le front français,
a première guerre mondiale éclate le 3 août 1914 et, quelques jours plus tard, le
22 septembre 1914, Papeete est bombardé par une escadre allemande. Les E.F.O.
organisent leur défense, puis, après les engagés, les appelés commencent à partir
pour la guerre en Europe, en particulier au sein du bataillon mixte du Pacifique : plus
de 900 en 1916 et près de 200 en 1917 ; 300 ne reviennent pas, tombés au champ
d’honneur. Parmi les anciens combattants qui rentrent au fenua, deux officiers ont été
faits chevaliers de la Légion d’honneur à titre militaire pendant la guerre ; ils se succéderont comme maire de Papeete. Un soldat, mutilé, décède peu de temps après son
retour alors que sa nomination dans la Légion d’honneur est en cours de procédure ;
plusieurs autres anciens combattants, ayant acquis également des mérites à titre civil,
recevront la Légion d’honneur au cours des décennies suivantes. Il faut leur associer
ceux qui arrivent à cette époque à Tahiti, déjà décorés de la Légion d’honneur pendant
la guerre, et s’y établissent définitivement.
L
10
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il est attaché militaire à Athènes où il
est surpris par la révolution russe en
novembre 1917 ; participe un moment
à l’armée blanche d’Ukraine commandée par Wrangler ; vit en Tchécoslovaquie puis en France, avant d’arriver à
Tahiti en 1937, où il s’établit définitivement avec son épouse et quatre de ses
sept enfants.
Hippolyte MALARDE - 1867-1937 chevalier de la Légion d’honneur
(1916) - arrive à Tahiti en 1872 avec
ses parents qui reviennent s’y installer
définitivement ; après une carrière
militaire de 15 ans en Tunisie dans les
spahis, rentre à Tahiti ; se réengage en
1915 ; sa conduite brillante et ses
états de services antérieurs lui valent
l’attribution, le 29 décembre 1916,
pour compter du 25, de la Légion
d’honneur ; il est alors lieutenant de
réserve au 6ème régiment de chasseurs ;
il est affecté à Tahiti en juin 1918
comme commandant du détachement
local d’infanterie coloniale ; exploite
le domaine et la sucrerie d’Atimaono
dont il est propriétaire ; maire de
Papeete de 1920 à 1922. Son neveu
Yves MALARDE, cité plus loin, était
chevalier de la Légion d’honneur.
1918
Pierre (Fernand) CASSIAU - 18711934 - chevalier de la Légion d’honneur (1918) - arrivé à Tahiti en 1904
comme médecin civil de l’administration, s’y établit ; médecin aux Gambier
puis à Papeete ; engagé volontaire en
1915, il participe à la bataille de
Verdun en 1916, puis aux opérations
d’Orient ; il est fait chevalier de la
Légion d’honneur le 30 avril 1918
pour compter du 18 ; il est alors
médecin-major de 2ème classe (réserve), médecin chef des dépôts intermédiaires ; après la guerre, reprend
l’exercice de la médecine ; nombreuses activités associatives ; maire de
Papeete de 1922 à 1933. Son fils
Pierre CASSIAU, cité plus loin, était
officier de la Légion d’honneur.
Antony DOUCET - 1879-1945 - chevalier de la Légion d’honneur (1918) officier d’infanterie coloniale ; après
de nombreuses campagnes outre mer, participe à la guerre 1914 -1918
comme capitaine commandant la 10ème
compagnie du 21ème régiment d’infanterie coloniale ; il est fait chevalier de la
Légion d’honneur par arrêté de septembre 1918 pour prendre rang du 20
juillet 1918 : “S’est distingué notamment au cours des combats livrés en
mai et juillet 1917 au chemin des
dames, le 15 août 1917 s’est porté bravement à l’attaque d’une position
ennemie fortement défendue. A été
grièvement blessé au moment où il
prenait des dispositions judicieuses
pour enrayer une contre - attaque de
l’adversaire. Une citation.” En 1929 il
est capitaine 4ème régiment de tirailleurs sénégalais au Maroc ; prend sa
retraite comme capitaine et arrive vers
1930 à Tahiti, où il s’établit définitivement.
11
1919
James NORMAN HALL - 1887-1951 chevalier de la légion d’honneur (1919)
- citoyen américain ; participe à la guerre, d’abord à terre sous l’uniforme
anglais, s’engage en octobre 1916 à la
Légion étrangère française où, après une
formation accélérée de pilote de chasse,
il est affecté à l’escadrille Lafayette, puis
enfin, après l’entrée en guerre des EtatsUnis en avril 1917, dans l’aviation américaine à partir de mars 1918 ; il est
descendu en combat aérien, blessé et
fait prisonnier en mai 1918 ; nommé
dans la Légion d’honneur au titre étranger par décret du 9 avril 1919, en même
temps que 6 autres officiers pilotes américains de l’escadrille Lafayette “a fait
preuve des plus belles qualités de bravoure et de sang - froid. A abattu 4
avions ennemis” ; arrive à Tahiti en
1920 où il s’établit définitivement et vit
de sa plume ; on lui doit en particulier
“les révoltés de la Bounty”.
1920
Paul GRAFFE - 1873-1948 - Chevalier
de la Légion d’honneur (1920) - boursier de la colonie en France, il est
admis au concours d’entrée à l’Ecole
coloniale ; fait une carrière d’administrateur des colonies, principalement
an Afrique ; le décret de sa nomination dans la Légion d’honneur mentionne “a assuré dans des conditions
tout à fait remarquables le recrutement
des troupes noires pendant la guerre”;
prend sa retraite en France.
12
Auguste HUGON - 1862-1928 - chevalier de la Légion d’honneur (1920) arrive à Tahiti en 1894 comme gendarme, en poste dans de nombreuses îles
jusqu’en 1904, date à laquelle il rejoint
une affectation en France avec son
épouse polynésienne ; en 1907, il est à
nouveau affecté en Polynésie où il sert
à Tubuai, Makatea puis Moorea
jusqu’à sa retraite de la gendarmerie
en 1921 ; continue d’exercer diverses
fonctions comme agent contractuel de
l’administration. Son fils Claude
HUGON, cité plus loin, était chevalier
de la Légion d’honneur.
Louis ROLLIN - 1887-1972 - chevalier (1920), officier (1947) puis commandeur (1957) de la Légion d’honneur - après des études de médecine,
participe comme médecin aide-major
à la guerre 1914-18, blessé, 5 fois cité,
il est fait chevalier de la Légion d’honneur pour compter du 16 juin 1920 ;
arrive à Tahiti la même année comme
médecin de la C.F.P.O. à Makatea ; à
partir de 1923, exerce comme médecin de l’administration aux Marquises
où il a une action déterminante, puis
aux îles Sous-le-Vent, à Tahiti et aux
Australes ; chargé de la léproserie
d’Orofara ; engagé volontaire à 53 ans
au bataillon du Pacifique comme
médecin-lieutenant, il sert en Syrie et
en Irak ; rentre à Tahiti en 1944 pour
raisons sanitaires et occupe diverses
fonctions jusqu’à sa retraite en 1954 ;
s’intéresse à l’histoire et à l’ethnographie de la Polynésie et publie divers
ouvrages et articles dans ce domaine ;
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secrétaire archiviste de la Société des
Etudes océaniennes pendant de nombreuses années ; relève en 1960 et
préside jusqu’en 1965 la section locale
de la Société d’entraide des membres
de la Légion d’honneur (SEMLH) qui
prend la suite de la section locale de la
Société de la Légion d’honneur, nom
initial de la SEMLH, en sommeil depuis
plusieurs années.
Alfred SOLARI - 1868-1935 - chevalier (1920), puis officier (1926) de la
Légion d’honneur - fait un premier
séjour à Tahiti de 1915 à 1918 comme
secrétaire général ; après avoir rempli
les fonctions de résident de France par
intérim aux Nouvelles-Hébrides, puis
de secrétaire général à Pondichery
dans les Comptoirs français de l’Inde,
il revient à Tahiti en 1923 comme
secrétaire général, et assure l’intérim
du gouverneur de janvier 1927 à avril
1928, avant de prendre sa retraite sur
place ; préside jusqu’en 1934 la section des Etablissements français
d’Océanie de la Société de la Légion
d’honneur, nom initial de la SEMLH.
Son père Jean-Baptiste SOLARI avait
été fait chevalier de la Légion d’honneur en 1886, et son fils René SOLARI,
cité plus loin, était chevalier de la
Légion d’honneur.
TAU a TENAPA (TAU a REU) - 18961921 - chevalier de la Légion d’honneur (1920 par décret rétroactif de
1925) - né le 12 août 1896 à Teavaro
(Moorea) de Teupoo et Tenapa ;
connaît de sérieux ennuis avec la justice,
d’abord en juin 1912, puis en juin
1915, avant de s’engager le 1er février
1916 au bataillon mixte du Pacifique,
semble-t-il sous le nom de Tau a Reu
(patronyme d’un enfant né pratiquement en même temps que lui et décédé
sous le nom de Tau a Tupuai à l’âge de
6 mois…) ; sa conduite sous l’uniforme est excellente puisque l’arrêté lui
conférant la médaille militaire mentionne “soldat (active) au bataillon
mixte du Pacifique : très bon soldat,
courageux et d’une belle attitude au
feu” ; il est grièvement blessé le 5 août
1918 et perd l’œil droit ; il est décoré
de la médaille militaire et de la croix
de guerre avec palme par arrêté du
ministre de la guerre du 11 janvier
1919 pour prendre rang du 15 août
1918 (Journal officiel du 15 janvier
1919 page 552) ; il est réformé avec
pension de retraite de 1ère classe et
libéré du service le 26 novembre
1919 ; rentré en Polynésie, il vit dans
les Tuamotu et décède à Fangatau le 9
mars 1921, à 24 ans ; une première
procédure pour sa nomination dans la
Légion d’honneur au titre de mutilé à
100%, lancé de son vivant sous le nom
de Tau a Reu, butte sur des obstacles
administratifs liés à l’état-civil, et ce
n’est que lorsqu’elle est reprise sous le
nom de Tau a Tenapa qu’elle aboutit
avec le décret du 28 mars 1925 qui, en
le nommant chevalier de la Légion
d’honneur pour prendre rang du 16
août 1920, apporte une conclusion
posthume à ce destin tragique (dossier
L 2571052 aux Archives nationales)
13
1922
Alfred DEMAY - 1881-1971 - chevalier de la Légion d’honneur (1922) après une carrière dans l’infanterie
coloniale au cours de laquelle il participe à 15 campagnes, en particulier
pendant la guerre 1914-1918 au
Cameroun allemand et en France, il est
en poste à Nouméa en 1920 quand il
prend sa retraite comme capitaine ;
arrive en 1921 à Tahiti où il s’établit
définitivement ; agent contractuel de
l’administration dans les fonctions de
contrôleur de la police, il est nommé
en août 1934 chef de la Sûreté des
Etablissements français d’Océanie.
1923
Léonce BRAULT - 1858-1933 - chevalier de la Légion d’honneur (1923) arrive à Tahiti en 1881 comme imprimeur de l’administration ; fonde sa
propre imprimerie en 1887, reprend
le Messager de Tahiti, puis devient
avocat défenseur à partir de 1899 ;
membre, puis à deux reprises secrétaire de la Chambre de commerce ;
membre et secrétaire du Conseil général ; délégué des Marquises au Conseil
privé du gouverneur ; conseiller
municipal puis premier adjoint au
maire de Papeete ; membre de la
Caisse agricole. Son petit-fils Guy
BRAULT est chevalier de la Légion
d’honneur depuis 1997.
Alain GERBAULT - 1893-1941 - chevalier (1923), puis officier (1929) de la
Légion d’honneur - ingénieur ; participe
14
à la guerre 1914-1918 comme aviateur, 2 fois cité, ce pourquoi il est fait
chevalier de la Légion d’honneur “lieutenant au 3ème régiment d’aviation” ;
effectue en 1923 la première traversée
de l’Atlantique en solitaire sans escale
sur un voilier de 11 mètres, le
Firecrest ; à partir de 1925, sur le
même voilier, il effectue le tour du
monde en solitaire, au cours duquel il
visite les Gambier, les Marquises, Tahiti
et Bora-Bora ; à son retour en France
en 1929, il est promu officier de la
Légion d’honneur pour ce nouvel
exploit ; revient en Polynésie en 1933
sur un nouveau voilier et navigue dans
ses eaux jusqu’en septembre 1940 où,
en désaccord avec le ralliement des
E.F.O. à la France libre et n’étant plus
mobilisable, il repart ; après diverses
escales, il arrive, épuisé, à Timor où il
meurt fin 1941 ; conformément à son
souhait, son corps, rapatrié en 1946
par le Dumont d’Urville, repose à
Vaitape (Bora-Bora).
Armand HERVE - 1888-1936 - chevalier de la Légion d’honneur (1923) engagé à 20 ans, il est capitaine au
22ème régiment d’aviation début 1923,
quand il est fait chevalier de la Légion
d’honneur pour “15 ans de services, 5
campagnes, blessé et cité, 2 périodes
d’entraînement aérien volontaire “ ;
quitte le service et arrive à Tahiti en
1924 où il s’établit comme commerçant ; président de la Chambre de
commerce, conseiller privé, mis en
cause pendant l’année 1935 dans l’affaire de la société Kong Ah, il décède
N°298 • Septembre 2003
en janvier suivant à l’âge de 47 ans.
Son neveu Robert HERVE, cité plus
loin, était commandeur de la Légion
d’honneur.
1924
Joanna MARAUTAAORA TEPAU a
TATI - 1861-1935 - chevalier de la
Légion d’honneur (1924) - épouse de
POMARE V de 1875 à 1887 ; faite chevalier de la Légion d’honneur en 1924
“ex-reine de Tahiti - services dévoués
rendus à la cause française”. Son exmari POMARE V, cité plus haut, et son
fils Ernest SALMON, cité plus loin,
étaient officiers de la Légion d’honneur ; sa fille Teriinui POMARE, citée
plus loin, était chevalier de la Légion
d’honneur.
Emile VERNAUDON - 1882-1977 chevalier de la Légion d’honneur
(1924) - après un début de carrière
civile à Tahiti, engagé en 1904 dans l’artillerie coloniale où il devient officier
d’arme, puis officier d’administration ;
le décret de sa nomination dans la
Légion d’honneur mentionne “officier
d’administration de 1ère classe au 310ème
régiment d’artillerie coloniale - 21 ans
de services - 11 campagnes” ; affecté
une deuxième fois en Chine, il y prend
sa retraite vers 1935, et y monte et
exploite une affaire d’importation ; surpris par le changement de régime en
Chine alors qu’il est en congé en famille
à Tahiti début 1949, il retourne en
Chine mais ne peut éviter la spoliation ;
s’installe alors à Tahiti, où il mène une
nouvelle carrière civile comme directeur dans plusieurs sociétés commerciales. Son beau-père PETITJEAN était
chevalier de la Légion d’honneur ; son
fils Jean VERNAUDON est chevalier de la
Légion d’honneur depuis 1990.
1925
André-Etienne HERMEL, Mgr 1873-1932 - chevalier de la Légion
d’honneur (1925) - ordonné prêtre
chez les Picpuciens en 1897, arrive à
Tahiti en 1903 ; curé de la cathédrale
de Papeete, évêque coadjuteur en
1905, puis, à la démission de son prédécesseur en 1908, vicaire apostolique
du vicariat de Papeete (l’actuel diocèse
de Papeete plus les îles Cook jusqu’en
1922) ; aumônier militaire du groupe
de défense de Tahiti pendant la guerre
1914-1918 ; fondateur du Semeur et
du Vea katorika ; il décède alors qu’il
est en fonctions.
Noël ILARI - 1897-1985 - chevalier
(1925), puis officier (1947) de la
Légion d’honneur - engagé volontaire à
17 ans en 1915 ; il est fait chevalier de
la Légion d’honneur fin 1925 “lieutenant au 10ème régiment d’artillerie - 10
ans de services, 5 campagnes - titres
exceptionnels : entraîneur d’hommes
- très brave au feu - beaux faits de guerre - a été blessé” ; après une carrière
civile en France, il fait un premier
voyage à Polynésie début 1935 au
bénéfice de la Compagnie française de
Tahiti ; il y revient fin 1935 pour y monter aux Australes une affaire personnelle
15
d’exportation de café et de coprah ;
capitaine de réserve, il rejoint la
Métropole à ses frais fin 1939, et participe à la campagne de France ; après
l’armistice, il est membre du cabinet
de Borotra, ministre de la jeunesse du
gouvernement de Vichy ; cherche à
revenir à Tubuai via les Antilles et les
Etats-Unis, mais se retrouve de 1941 à
1946 en Indochine, où il participe à la
lutte contre les Japonais, ce qui lui vaut
d’être promu officier de la Légion
d’honneur en janvier 1947 ; arrive
enfin à Tahiti début 1947, où il apprend sa promotion et est décoré ; mêlé
peu après à l’affaire du comité
Pouvana’a, il est inculpé, incarcéré
puis acquitté, mais assigné en résidence surveillée à Tubuai fin 1947 ; élu
conseiller territorial et vice-président
de l’Assemblée territoriale en janvier
1953 sur la liste RDPT, il est élu président en octobre de la même année, en
remplacement du titulaire mis en
minorité sur un projet de départementalisation ; exerce la présidence
jusqu’en juin 1955, date à laquelle il
doit s’en retirer en même temps qu’il
quitte le RDPT, mais reste conseiller
territorial ; non réélu aux élections territoriales de novembre 1957, il vit alors
retiré à Tubuai jusqu’à son décès.
1927
François HERVE - 1875-1939 - chevalier de la Légion d’honneur (1927) arrive à Tahiti fin 1904, via San
Francisco d’où il convoie un petit voilier qu’il y a fait construire, comme
16
capitaine au long cours, pour commander la flottille locale d’une société
commerciale ; suite à une invalidité
accidentelle, est affecté en 1906 au service commercial de l’entreprise : professeur d’hydrographie à Papeete en
1907, il s’implique fortement dans la
vie locale puisque, à partir de la même
année, il est 1er adjoint au maire de
Papeete et président de la Caisse agricole jusqu’en 1913 ; à cette date il
monte un armement maritime local,
sur les goélettes duquel il commande
occasionnellement, et surtout, entreprend des recherches sur la perliculture dans un laboratoire et une station
d’élevage qu’il construit sur le motu
Nutima d’Apataki ; mobilisé en 1915,
il navigue sous l’uniforme sur des navires du commerce jusqu’en 1918 ; en
1925, alors qu’expire le contrat qui le
lie à la société concessionnaire des
lagons de Scilly et Mopelia, et suite à
un rapport du congrès national des
industries de la pêche tenu en 1924 à
Boulogne, il est sollicité par le gouverneur pour continuer ses travaux dans
le cadre de l’administration ; il est
alors nommé chef du Service d’ostréiculture d’Apataki et, provisoirement,
administrateur des Tuamotu et juge de
paix avec compétence correctionnelle ;
en 1927, ses fonctions de chef du laboratoire d’Apataki sont étendues, sous
contrat de 5 ans renouvelable, à celle
de chef du Service d’ostréiculture et
des pêches, et il lui est demandé de
transférer le laboratoire le long de la
passe, ce qu’il fait à ses frais ; en
1934, son ouvrage “l’huître perlière et
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la perle dans les lagons des Tuamotu”
est édité par le ministère des colonies ;
la même année, il assure en plus l’intérim du chef du Service de l’enregistrement, du domaine et de la topographie ; début 1935, son poste à la perliculture est supprimé par les Délégations économiques et financières, mais
il est confirmé dans ses fonctions de
commandant de la circonscription
administrative des Tuamotu ; en 1937,
à l’expiration de son contrat avec l’administration, il cesse toute activité
administrative et monte un bureau de
commission à Papeete, au service en
particulier des producteurs de coprah
individuels ou coopérateurs, et fonde
un journal en tahitien destiné aux
Paumotu, Torea. Son gendre Jacques
BOULLAIRE était chevalier de la Légion
d’honneur.
1928
Joseph (Octave) MORILLOT - 18781931 - chevalier de la Légion d’honneur
(1928) - arrivé à Tahiti en 1901 comme
officier de marine ; démissionne
comme lieutenant de vaisseau et s’établit définitivement en 1905 ; exploitant
agricole à Taha’a ; peintre de talent, il
expose deux fois à Paris ; reprend du
service sur place de 1914 à 1917. Son
fils Roland MORILLOT, cité plus loin,
était chevalier de la Légion d’honneur.
1930
Pascal MARCANTONI - 1862-1935 chevalier de la Légion d’honneur
(1930) - arrive à Tahiti en 1879
comme mousse ; s’établit très tôt à
Huahine où il épouse une fille de la
famille royale de l’île ; élu chef de district de Atupi, puis Maeva (Huahine), il
œuvre efficacement pour le rattachement de Huahine à la France (1888) ;
membre de la Société des Etudes océaniennes, il écrit sur l’histoire de
Huahine.
1931
Pierre PEAUCELLIER - 1898-1979 chevalier (1931), puis officier (1946)
de la Légion d’honneur - officier de
marine, fait un premier séjour à Tahiti
de 1936 à 1938 comme commandant
de la Zélée ; rentré en France, il participe à la guerre 1939-40, est fait prisonnier en 1940, occupe divers postes
avant de quitter la marine nationale en
1946 ; s’établit la même année à Tahiti
où il remplit diverses fonctions dans le
secteur privé : chef du Service maritime de la Compagnie française des
phosphates de l’Océanie, directeur de
la SEGTI à Papeete ; membre du
bureau de la Société des études océaniennes de 1946 à 1965. Son père
Henri PEAUCELLIER était chevalier de
la Légion d’honneur, et son beau-père
Jean-Marie MATIVAT officier de la
Légion d’honneur.
1932
Emilie BANZET - 1853-1941 - chevalier de la Légion d’honneur (1932) arrivée à Tahiti en 1885 comme institutrice, envoyée par la Société des
Missions de Paris, elle est la première
17
femme dans ce cas ; est rapidement
nommée directrice de l’Eco-le protestante de langue française de jeunes
filles ; se dévoue pendant plus de 50
ans, et bien au-delà de sa retraite, à
l’enseignement et à l’éducation des
jeunes Polynésiennes ; décède à Tahiti.
Teriitanairohotu a MATAITAI 1869-1943 - chevalier de la Légion
d’honneur (1932) - instituteur à partir
de 1891, puis nommé en 1895 chef du
district de Afareaitu ; très actif dans la
conduite de son district, il œuvre efficacement à son aménagement, à la
pratique de l’hygiène, et au développement des activités sportives ; décoré
pour “40 ans 6 mois de services aux
colonies”…
Paul VERNIER - 1870-1956 - chevalier de la Légion d’honneur (1932) pasteur missionnaire protestant ; né à
Tahiti, il exerce son ministère aux
Marquises, aux îles Sous-le-Vent puis à
Papeete jusqu’à sa retraite et son
départ en France en 1932. Son frère
Charles VERNIER, cité plus loin, était
chevalier de la Légion d’honneur.
Pierre-Marie LE CADRE, Mgr 1875-1952 - chevalier (1934), puis
officier (1950) de la Légion d’honneur
- ordonné prêtre en 1900 chez les
Picpuciens ; arrivé aux Marquises en
1900, y exerce son ministère jusqu’à
son décès ; d’abord affecté à Hiva Oa
et Tahuata, il conduit la communauté
catholique des Marquises comme
administrateur apostolique à partir de
1912, puis comme évêque, vicaire
apostolique, à partir de 1920 ; il développe l’enseignement et la desserte
catholique dans son vicariat.
Octave MOREAU - 1872-1936 - chevalier de la Légion d’honneur (1934) pasteur protestant - arrive à Tahiti en
1904 comme missionnaire de la
Société des missions de Paris, pasteur
à Moorea puis Papeete ; participe à la
guerre 1914-1918 comme directeur
d’hôpital ; revient à Tahiti en 1920 où
il exerce son ministère jusqu’à son
décès ; président du Conseil supérieur
des Eglises tahitiennes et de l’Ecole
pastorale à partir de 1924 ; un des
fondateurs de la léproserie d’Orofara.
1934
1935
Alcide FAUGERAT - 1887-1973 - chevalier de la Légion d’honneur (1934) arrivé à Tahiti en 1912 comme fonctionnaire des finances ; receveur de
l’Enregistrement jusqu’à sa retraite,
assure également la fonction de juge ;
s’occupe ensuite de la gestion de ses
affaires (domaine d’Outumaoro et
Grand hôtel).
Edouard AHNNE - 1867-1945 - chevalier de la Légion d’honneur (1935) arrive à Tahiti en 1892 comme enseignant missionnaire protestant ; adjoint
au directeur, puis à partir de 1903 et jusqu’à 1935 directeur de l’Enseignement
protestant ; s’intéresse à tout ce qui
concerne la civilisation polynésienne :
langue, histoire, culture, il préside la
18
N°298 • Septembre 2003
Société des Etudes océaniennes à de
nombreuses reprises entre 1923 et
1945 et publie de nombreux articles
dans son Bulletin ; très engagé dans
la vie sociale et politique, il est successivement conseiller général, membre
du Conseil d’administration, conseiller
privé du gouverneur, président de la
Caisse agricole, président de la
Chambre d’agriculture ; il est un des 5
membres du gouvernement provisoire
créé en septembre 1940 lors du ralliement des E.F.O. à la France libre ; fait
Compagnon de la libération en mai
1943 ; établi définitivement à Tahiti où
il décède. Son fils Frédéric AHNNE, cité
plus loin, était chevalier de la Légion
d’honneur.
Julien NOUAILLES, Mgr - 18761937 - chevalier de la Légion d’honneur (1935) - ordonné prêtre chez les
Picpuciens en 1899 ; arrive à Tahiti en
1899, exerce son ministère dans les
Tuamotu qui subissent les terribles
cyclones de 1903 et 1906 ; nommé
vicaire apostolique de Tahiti en 1932,
il décède 5 ans plus tard.
TERIIEROO a TERIIEROOITERAI 1875-1952 - chevalier (1935), puis
officier (1946) de la Légion d’honneur
- facteur, moniteur, instituteur, adjoint
aux Travaux publics ; nommé chef du
district de Papenoo en 1901 ; membre
de la Chambre d’agriculture et des
Délégations économiques et financières, il est un des 5 membres du gouvernement provisoire créé en septembre
1940 lors du ralliement des E.F.O. à la
France libre ; fait Compagnon de la
libération en mai 1943 ; conseiller
privé suppléant du gouverneur ; fatigué, il démissionne en 1946 de toutes
ses fonctions.
1936
Paul MAZE, Mgr - 1885-1976 - chevalier (1936), officier (1949), puis
commandeur (1962) de la Légion
d’honneur - ordonné prêtre chez les
Picpuciens en 1910 ; arrivé à Tahiti en
1910, exerce son ministère aux îles
Cook, alors rattachées au vicariat
apostolique de Papeete, puis dans les
Tuamotu ; nommé vicaire apostolique
en 1939, puis archevêque de Papeete
en 1966, la circonscription ecclésiastique étant érigée en archidiocèse ;
développe l’enseignement catholique ;
démissionne en 1973.
1937
Georges LAGARDE - 1867-1946 chevalier de la Légion d’honneur
(1937) - fonctionnaire territorial, chef
du Service des douanes et contributions quand il prend sa retraite en
1932 ; conseiller privé du gouverneur,
il est un des 5 membres du gouvernement provisoire créé en septembre
1940 lors du ralliement des E.F.O. à la
France libre. Son père Félix LAGARDE,
cité plus haut, était chevalier de la
Légion d’honneur, ainsi que sa fille
Anna LAGARDE, citée plus loin.
19
1938
Ernest SALMON - 1888-1961 - chevalier (1938), puis officier (1949) de la
Légion d’honneur - ancien combattant
de la guerre 1914-18 ; fait carrière de
magistrat, d’abord dans le cadre colonial, puis dans le cadre national où il
est le premier Polynésien en fonctions ;
prend sa retraite en 1959 comme premier président de la Cour d’appel de
St-Denis de la Réunion, auteur de
divers ouvrages sur la Polynésie. Sa
mère la reine MARAU et sa sœur
Teriinui POMARE, citées plus haut,
étaient chevaliers de la Légion d’honneur.
e 3 septembre 1939, la France entre
dans la seconde guerre mondiale.
Commence alors une longue suite d’événements : campagne de France 19391945, guerre du Pacifique, conflits
d’Indochine et d’Algérie, au cours desquels de nombreux Polynésiens s’illustrent et se voient distingués, immédiatement ou au cours des décennies suivantes, par nomination ou une promotion
dans la Légion d’honneur.
L
1940
Albert ARNOULD - 1900-1993 - chevalier (1940) puis officier (1949) de la
Légion d’honneur - après une carrière
militaire commencée comme engagé
en 1918 et achevée comme colonel, au
cours de laquelle il participe aux campagnes de France, d’Afrique du nord et
d’Indochine, arrive en 1954 à Tahiti où
il s’établit définitivement ; secrétaire
général de la Chambre de commerce et
d’industrie de 1954 à 1973 ; membre du
Conseil d’administration de la section
20
locale de l’Office national des anciens
combattants ; président de la section
locale de la Société d’entraide des
membres de la Légion d’honneur de
1965 à 1988.
1941
Laurent LE BIHAN - 1905-1983 chevalier de la Légion d’honneur
(1941 - brevet de 1952) - après avoir
participé comme pilote à la croisière
noire de 1934 du général Vuillemin à
travers l’Afrique, fait un séjour à Tahiti
de 1936 à 1937 comme chef pilote et
chef mécanicien de l’aéronautique
navale, dont une base est implantée à
Fare Ute avec 3 hydravions ; participe
à la guerre 1939-1945, cité 2 fois ;
commande une unité de maquisards
créée en Bretagne en juin 1944 ; quitte la marine nationale en 1947 et vient
s’établir à Tahiti où il développe diverses affaires commerciales dont la
société Gaz de Tahiti ; commissaire
d’avaries maritimes et expert Veritas
pour l’aéronautique ; conseiller municipal puis adjoint au maire de Papeete.
1944
Robert HERVE - 1910-1999 - chevalier (1944), officier (1951), puis commandeur (1968) de la Légion d’honneur - arrivé à Tahiti en 1934 pour participer aux affaires commerciales de
son oncle ; engagé volontaire au
bataillon du Pacifique, il participe aux
combats de Libye avant d’être fait prisonnier à Bir-Hackeim en juin 1942 ;
s’évade trois fois en septembre 1943 et
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reprend du service au bataillon ; participe aux campagnes d’Italie, Provence,
Vosges, Alsace, blessé, plusieurs fois
cité, décoré de la Légion d’honneur dès
1944 et fait Compagnon de la libération
en mai 1945 ; nommé au commandement du bataillon, il rentre à Tahiti à sa
tête en 1946 ; reprend et développe
ses activités dans le commerce, l’armement et l’assurance maritimes, et dans
l’exploitation agricole ; président de la
Chambre de commerce et d’industrie,
président du Port autonome de Papeete ;
conseiller privé du gouverneur. Son
oncle Armand HERVE et son beau-père
Albert (Charles) LEBOUCHER, tous
deux cités plus haut, était chevalier de
la Légion d’honneur.
1945
Jean GILBERT - 1907-1942 - chevalier de la Légion d’honneur à titre posthume (1945) - officier de marine
pilote de l’aéronautique navale, fait un
premier séjour à Tahiti en 1934
comme pilote de l’hydravion de l’aviso
Amiral-Charner ; quitte la marine
nationale et vient s’établir à Tahiti en
1935 ; en juin 1940 conduit à Londres
un groupe de marins tahitiens qui rallient les Forces navales françaises libres ; participe à la bataille d’Angleterre comme pilote de chasse ; en
1941, est nommé commandant de la
marine nationale en Nouvelle-Calédonie et officier de liaison avec les forces
alliées dans le Pacifique ; tué le 8 juin
1942 en service commandé dans un
accident d’avion en Nouvelle-Zélande,
il est fait Compagnon de la libération à
titre posthume en août 1942. Son
beau-père Emile MARTIN et son beaufrère Yves MARTIN, cités plus loin,
étaient chevaliers de la Légion d’honneur.
1947
Emile (Gaspard) COPPENRATH 1917-1982 - chevalier (1947), puis
officier (1981) de la Légion d’honneur
- engagé dans les fusiliers-marins, se
retrouve en Egypte au moment de l’armistice, rallie le 1er groupe marin du
lieutenant de vaisseau d’Estienne
d’Orves des Forces françaises libres en
Syrie ; participe aux campagnes de
Libye (Bir-Hackeim), Egypte, Tunisie,
Italie (blessé au Garigliano) et de
France, où il est blessé une deuxième
fois ; 3 fois cité ; après la guerre, il est
attributaire en Tunisie d’un lot agricole
domanial qu’il exploite quelques
années ; rentre en 1962 à Tahiti où il
s’occupe de restauration. Son oncle
Clément COPPENRATH, cité plus loin,
était chevalier de la Légion d’honneur.
Ses cousins germains Gérald COPPENRATH et Michel COPPENRATH sont
respectivement officier depuis 1990 et
commandeur depuis 1996, de la
Légion d’honneur.
Charles HAMBLIN - 1882-1966 chevalier (1947), puis officier (1963)
de la Légion d’honneur - instituteur
puis agent du service des Travaux
publics jusqu’en 1938 ; chef, puis président du Conseil de district de Vairao.
21
1948
Jean-Henri LIAUZIN - 1890-1970 chevalier de la Légion d’honneur
(1948) - fonctionnaire du Trésor en
Guyane ; arrivé à Tahiti en 1928 où il
s’établit et termine sa carrière en 1953
comme trésorier-payeur général ;
expert près des tribunaux en comptabilité ; trésorier de la Société des
Etudes océaniennes de 1954 à 1960.
Son épouse Germaine LIAUZIN, citée
plus loin, était chevalier de la Légion
d’honneur.
Tahiti ; conseiller privé suppléant ; un
des initiateurs du ralliement des E.F.O.
à la France libre, il est un des cinq
membres du gouvernement provisoire
de septembre 1940 lors du ralliement
des E.F.O. à la France libre. Son fils
Yves MARTIN et ses gendres René
SOLARI et Jean GILBERT étaient chevaliers de la Légion d’honneur, ses gendres Emile MASSAL et Freddy FOURCADE officiers de la Légion d’honneur,
tous cités plus haut ou plus loin.
1950
Emile MASSAL - 1908-1998 - chevalier (1950), puis officier (1976) de la
Légion d’honneur - fait un premier
séjour à Tahiti comme médecin militaire détaché auprès du Service de santé
territorial de 1933 à 1938 ; participe à
la guerre 1939-1940 comme médecin
militaire ; revient à Tahiti de 1943 à
1945 comme médecin-chef du Service
de santé des E.F.O. ; ayant été nommé
professeur agrégé du Service de santé
des troupes d’outre-mer, il dirige pendant 10 ans la section santé à la
Commission du Pacifique sud ; revient
à Tahiti comme directeur de l’Institut de
recherches médicales de Papeete de
1959 à 1963 ; participe ensuite à la
direction du groupe MARTIN qu’il développe considérablement ; longtemps
président, en alternance, de la Caisse de
Prévoyance sociale ; président de plusieurs organisations patronales.
Emile MARTIN - 1879-1959 - chevalier de la Légion d’honneur (1950) industriel et commerçant, il développe
Etablissements MARTIN (dont est issue
Electricité de Tahiti) et Brasserie de
Charles VERNIER - 1883-1966 - chevalier de la Légion d’honneur (1950) pasteur missionnaire protestant ; né à
Tahiti, y revient en 1912 et exerce son
1949
Antoni (Antony) BAMBRIDGE 1895-1964 - chevalier (1949), puis
officier (1959) de la Légion d’honneur
- ancien combattant de la guerre 191418, blessé à Verdun, cité ; commerçant, exploitant de salles de cinéma,
exploitant agricole ; participe au ralliement des E.F.O. à la France libre ;
conseiller privé du gouverneur ; bienfaiteur de la léproserie d’Orofara. Son
neveu Jean-Roy BAMBRIDGE et son
petit-neveu par alliance Yves MARTIN,
cités plus loin, étaient tous deux chevaliers de la Légion d’honneur ; son
neveu John MARTIN est officier de la
Légion d’honneur depuis 1989.
22
N°298 • Septembre 2003
ministère pendant près de 40 ans aux
îles Sous-le-Vent et à Papeete : pasteur, directeur de l’Ecole pastorale de
Hermon, président des Eglises tahitiennes ; représentant des E.F.O. à la première Assemblée constituante de 1945.
Son frère Paul VERNIER, cité plus haut,
était chevalier de la Légion d’honneur.
1951
Georges BARRAL - 1910-1998 - chevalier de la Légion d’honneur (1951
par décret rétroactif de 1953) - participe comme officier de la marine
nationale à la guerre dans le Pacifique ;
s’établit à Tahiti en 1942 ; fonctionnaire au Port autonome de Papeete puis
dans l’administration territoriale.
Marc DARNOIS - 1923-1984 - chevalier de la Légion d’honneur (1951) ayant rallié la France libre depuis Paris
via l’Espagne où il est interné 5 mois
en 1943, il est désigné pour le
bataillon du Pacifique ; participe dès
lors à ses campagnes ; blessé une première fois en mai 1944 en Italie, il est
très grièvement blessé en octobre
1944 dans les Vosges ; arrive à Tahiti
en 1946 avec le bataillon du Pacifique
et s’y établit ; navigue en Polynésie,
s’intéresse à la musique locale ; directeur de Radio Tahiti, du Service des
informations puis du Service des affaires culturelles.
Marie GUILLEMET - 1881-1960 chevalier de la Légion d’honneur
(1951) - professe dans la Congrégation
de St Joseph de Cluny sous le nom de
sœur Jean ; arrive à Tahiti en 1903
comme enseignante, elle y exerce pendant 47 ans.
Charles (Albert) LEBOUCHER 1888-1954 - chevalier de la Légion
d’honneur (1951) - commerçant, armateur ; praticien populaire de l’homéopathie et de l’acupuncture ; participe
activement à la vie économique et politique : membre puis président de la
Chambre de commerce, conseiller puis
vice-président de l’Assemblée territoriale ; conseiller municipal de Papeete.
Ses gendres Robert HERVE, cité plus
haut, et Emile LE CAILL, cité plus loin,
étaient respectivement commandeur et
chevalier de la Légion d’honneur et son
beau-frère Henri HOPPENSTEDT, cité
plus loin, était également chevalier de la
Légion d’honneur.
1952
Paul BERNIERE - 1895-1979 - chevalier de la Légion d’honneur (1952) fonctionnaire, puis entrepreneur, puis
exploitant agricole ; président du
Conseil de district de Mataiea, conseiller territorial.
Marie DAUDET - 1868-1955 - chevalier de la Légion d’honneur (1952) professe dans la Congrégation de St
Joseph de Cluny en 1888 sous le nom
de sœur Lydia ; arrivée aux Marquises
en 1888, elle y enseigne avec un
dévouement extrême pendant 67 ans,
jusqu’à son décès.
23
Alfred POROI - 1906-1994 - chevalier
(1952), puis officier (1961) de la
Légion d’honneur - directeur de sociétés ; conseiller territorial de 1962 à
1972 ; sénateur-maire de Papeete ; son
arrière-grand-père Édouard GABRIELLI
de CARPEGNA, cité plus haut, était officier de la Légion d’honneur.
Emmanuel LEVEQUE - 1909-1967 chevalier de la Légion d’honneur
(1952) - militaire de carrière, est
affecté à Tahiti de 1931 à 1936 ; après
de nombreuses campagnes outre-mer,
prend sa retraite comme capitaine ;
s’établit définitivement à Tahiti en 1957
et y fait carrière dans le secteur privé.
Guy NAY - 1911-1985 - chevalier de la
Légion d’honneur (1952) - officier de
marine ; fait un premier séjour à
Tahiti de 1937 à 1940 ; participe à la
guerre 1939-1940 et à la guerre
d’Indochine ; à nouveau affecté en
Polynésie début 1947 comme commandant de la Zélée et chef de la
Mission hydrographique dans les
Tuamotu ; après sa retraite en 1963,
s’établit définitivement à Tahiti comme
secrétaire de l’Union patronale puis
comme représentant de Total, fournisseur des armées et de l’aviation civile
en produits pétroliers.
1953
Taataroa a Moe MAONI - 1894-1970
- chevalier (1953), puis officier
(1964) de la Légion d’honneur (1952)
- appelé en 1914-1918 ; instituteur,
24
puis directeur d’école de Mataiea ;
doyen des instituteurs tahitiens, il
forme de nombreux instituteurs ; en
retraite en 1955, il est élu vice-président du Conseil de district de Mataiea.
Haamenu TAPAO - 1889-1978 - chevalier (1953), puis officier (1964) de
la Légion d’honneur - consacré pasteur protestant en 1917 ; il exerce son
ministère pendant 48 ans dans diverses paroisses de Moorea ; membre du
Conseil supérieur de l’Eglise, président
du Troisième arrondissement ; prédicateur lors des cérémonies d’autonomie
de l’Eglise évangélique de Polynésie
française, à la préparation de laquelle
il a participé.
Raymond VARNEY - 1918-1953 chevalier de la Légion d’honneur à titre
posthume (1953) - engagé volontaire
comme sergent au bataillon du
Pacifique, il participe à toutes ses campagnes ; poursuit une carrière militaire, fait plusieurs campagnes en
Indochine ; promu sous-lieutenant, il
est tué au combat le 23 février 1953 ;
nommé dans la Légion d’honneur à
titre posthume par décret du 30 juillet
1953 ; inhumé au cimetière de
l’Uranie.
Paul-Emile VICTOR - 1907-1995 chevalier (1953), officier (1962), commandeur (1976), grand officier
(1989), puis grand croix (1992) de la
Légion d’honneur - explorateur pionnier des régions polaires ; chef des
Expéditions polaires françaises ; s’éta-
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blit définitivement à Bora-Bora en 1974
où il décède.
1954
Frédéric AHNNE - 1899-1970 - chevalier de la Légion d’honneur (1954) ancien combattant de la guerre 19141918, engagé volontaire en 1917 ;
commence une carrière de fonctionnaire de l’Etat, qu’il achève comme
administrateur de la France d’Outremer, au cours de laquelle il est chef
des circonscriptions Tuamotu-Gambier
et Australes ; son père Édouard
AHNNE, cité plus haut, était chevalier
de la Légion d’honneur, et son gendre
Paul JOQUEL est officier de la Légion
d’honneur depuis 1997.
Pierre CASSIAU - 1906-1983 - chevalier (1954), puis officier (1969) de la
Légion d’honneur - participe en 1927,
comme engagé, aux opérations de
Syrie-Liban ; termine ses études médicales et revient à Tahiti en 1936 pour
s’établir comme médecin, président du
Conseil de l’ordre en 1958 ; conseiller
privé du gouverneur en 1949 ; œuvre
beaucoup pour le développement du
sport, président de la Fédération générale des sociétés sportives du
Territoire de 1947 à 1972. Son père,
Fernand CASSIAU, cité plus haut, était
chevalier de la Légion d’honneur.
Henri HOPPENSTEDT - 1895-1964 chevalier de la Légion d’honneur
(1954) - avocat défenseur ; 1er adjoint
au maire de Papeete, membre des
Délégations économiques et financières ; vice-président de la Chambre
d’agriculture.
TUNUI a HANAHANA dit PERE 1891-1974 - chevalier de la Légion
d’honneur (1954) - consacré pasteur
protestant en 1921, il est nommé pasteur
de la paroisse d’Avera (Raiatea), où il
exerce son ministère jusqu’à sa retraite.
1955
Ernest AUBRY - 1876-1958 - chevalier de la Légion d’honneur (1955) boulanger et apiculteur ; président du
Conseil de district de Faa’a de 1918
jusqu’à son décès ; catéchiste catholique dévoué, il avait obtenu l’implantation en 1950 d’une école des sœurs
missionnaires de Notre-Dame des
Anges dans son district.
Philippe BERNARDINO - 1915-1965
- chevalier de la Légion d’honneur
(1955) - effectue son service militaire
à Tahiti à partir de 1936, s’engage en
1937 pour 4 ans, puis en 1940 pour la
durée des hostilités ; après un entraînement en Angleterre où il arrive en 1941
via Noumea et l’Australie, rejoint le
bataillon du Pacifique dont il participe à
toutes les campagnes : Bir-Hakeim,
Tunisie, Italie, Provence, Alsace ; fait
Compagnon de la libération par décret
du 16 octobre 1945 ; rentre à Tahiti en
1946 avec le bataillon du Pacifique ;
s’engage à nouveau et fait campagne en
Indochine où il est adjudant-chef et fait
chevalier de la Légion d’honneur en tant
25
que “sous-officier en activité de service
et pour services exceptionnels de guerre en Extrême-Orient” ; rentré à Tahiti,
il mène une carrière civile à la Brasserie
de Tahiti.
Auguste JUVENTIN - 1898-1963 chevalier de la Légion d’honneur
(1955) - ancien combattant 1914-18 ;
typographe, directeur de l’Impri-merie
officielle à partir de 1945.
William ROBINSON - 1902-1988 chevalier de la Légion d’honneur
(1955) - citoyen américain, constructeur naval et navigateur, écrivain, s’établit à Tahiti en 1945 ; président fondateur de l’Association antifilarienne, il
contribue efficacement, en particulier
sur le plan financier, à la création de
l’Institut de recherches médicales de
Papeete inauguré en 1950.
René (Marcel) TIXIER - 1887-1960
- chevalier de la Légion d’honneur
(1955) - après divers emplois dans le
secteur privé, il monte sa propre affaire à Uturoa (Raiatea) ; maire de
Uturoa de 1945 à 1958 ; conseiller
territorial. Son gendre Gaston ALLAIN,
cité plus loin, était chevalier de la
Légion d’honneur et son petit-fils Joël
ALLAIN est chevalier de la Légion
d’honneur depuis 2002.
1956
Pierre d’ANGLEJAN CHATILLON 1924-1977 - chevalier (1956), puis
officier (1976) de la Légion d’honneur
26
- officier de marine, fait un premier
séjour à Tahiti comme commandant de
la Zélée ; participe à la guerre
d’Indochine ; s’établit à Tahiti où il
monte une affaire de gaz industriels
filiale d’un grand groupe industriel
français, dont il assure ensuite la
représentation en Asie du sud-est ;
promu officier de la Légion d’honneur
au titre du ministère des affaires étrangères ; assassiné à son domicile à
Punaauia le 27 août 1977.
Henri BREMOND - 1901-1969 - chevalier de la Légion d’honneur (1956) pasteur protestant de la paroisse de
Mahina et aumônier dévoué de la
léproserie d’Orofara ; participa au ralliement des E.F.O. à la France libre.
Maadi GOBRAY - 1909-1980 - chevalier (1956) puis officier (1967) de la
Légion d’honneur - infirmière de formation ; s’engage en 1942 dans les
Forces françaises libres, participe aux
campagnes de Syrie, Afrique du nord et
Provence, et termine la guerre comme
sous-lieutenant du Service de santé
avec une citation et croix de guerre ;
devient infirmière-major à l’Hôpital de
Papeete, puis chargée des Services
sociaux.
1957
Gaston ALLAIN - 1914-1987 Chevalier de la Légion d’honneur
(1957) - fonctionnaire de l’Etat, il est
chef de cabinet du gouverneur de 1952
à 1954, puis affecté en Côte française
des Somalis et en Mauritanie, avant de
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revenir en Polynésie comme chef de la
circonscription des Australes ; est
promu chef de division de la France
d’outre-mer. Son beau-père René
TIXIER, cité plus haut, était chevalier
de la Légion d’honneur et son fils Joël
ALLAIN est chevalier de la Légion
d’honneur depuis 2002.
Antoine COEROLI - 1913-1983 chevalier de la Légion d’honneur
(1957) - militaire de carrière dans
l’Infanterie coloniale ; participe à de
nombreuses campagnes, blessé, cité ;
arrive à Tahiti en 1946 dans les fonctions de suppléant, pour les
Etablissements français du Pacifique,
de l’intendant militaire des troupes du
Pacifique ; passe dans la réserve
comme capitaine ; successivement
gestionnaire de l’Hôpital territorial,
directeur de la Prison territoriale, puis
attaché au Service des affaires économiques ; participe à la création de la
Caisse de retraite des maîtres de l’enseignement privé qu’il préside pendant
10 ans ; secrétaire-trésorier de la section locale de la Société d’entraide des
membres de la Légion d’honneur jusqu’à son décès.
William GRELET - 1902-1964 - chevalier de la Légion d’honneur (1957) agriculteur et commerçant ; chef de
district de Fatu-Hiva, conseiller territorial de 1962 à son décès ; œuvre activement contre l’alcoolisme et développe le sport aux Marquises.
Louis LUSSAN - 1913-1984 - chevalier de la Légion d’honneur (1957) officier du Service du matériel de l’armée de terre (cadre des ingénieurs),
participe à la guerre 1939-1945 dans
la 2ème DB, cité, puis reçoit diverses
affectations ; ingénieur électricien,
arrive à Tahiti en 1961 pour être
responsable du réseau électrique aux
Etablissements Martin dont est issue
Electricité de Tahiti.
Tavaea TEVAEARAI - 1892-1975 chevalier de la Légion d’honneur
(1957) ; ancien combattant du
bataillon mixte du Pacifique 19161918 ; président du Conseil de district
de Tautira. Son fils adoptif, Tutaha SALMON, cité plus loin, était chevalier de
la Légion d’honneur.
1958
Louis GATIEN - 1904-1986 - chevalier de la Légion d’honneur (1957) infirmier de formation, exerce des
fonctions administratives dans les
Tuamotu, s’occupe des lépreux des
Tuamotu, Marquises et Australes, puis
achève sa carrière comme infirmier en
chef à l’Hôpital de Papeete.
Antoine LECA - 1901-1958 - chevalier de la Légion d’honneur à titre posthume (1958) - préposé du Trésor,
mort en service commandé le 19
février 1958 dans un accident d’hydravion à Uturoa. Son beau-père Pierre
NOUVEAU, cité plus haut, était chevalier de la Légion d’honneur.
27
Yves MARTIN - 1908-1960 - chevalier
de la Légion d’honneur (1958) - ingénieur électricien de formation ; participe au ralliement des E.F.O. à la France
libre, puis s’engage en 1941 dans les
Forces françaises combattantes, au sein
desquelles il combat, comme sous-lieutenant du génie, en Syrie et au Liban ;
dirige les affaires familiales ; conseiller
territorial. Son père Emile MARTIN, et
plusieurs de ses beaux-frères, étaient
membres de la Légion d’honneur.
René PASSARD - 1911-1958 - chevalier de la Légion d’honneur à titre posthume (1958) - adjoint technique au
Service des travaux publics, mort en
service commandé le 19 février 1958
dans un accident d’hydravion à Uturoa.
1959
Louis CARLSON - 1897-1959 - chevalier de la Légion d’honneur (1959) après un apprentissage maritime,
passe son brevet de capitaine au cabotage en 1922 ; commande une goélette d’un armement privé, puis diverses
goélettes administratives ; pilote du
port de Papeete de 1948 à sa retraite
en 1957. Son gendre François VALLAUX
est officier de la Légion d’honneur
depuis 1973.
André JACQUEMIN - 1893-1964 chevalier de la Légion d’honneur
(1959) - ancien combattant de la guerre 1914-1918, comme sergent, il est
deux fois blessé, cité ; fait prisonnier
en mars 1918 ; occupe un premier
28
emploi en Espagne ; arrivé à Tahiti en
1923 comme directeur d’un comptoir
commercial, il est chargé en 1931 de
la direction locale de la Compagnie française des phosphates d’Océanie ; président de la Chambre de commerce ; président des premières Délégations économiques et financières.
Teri’inui POMARE princesse
Teri’inui o Tahiti - 1879-1961 - chevalier de la Légion d’honneur (1959) décorée “pour d’innombrables services rendus à la France”, elle reçut peu
après, à son domicile, la visite du
général de Gaulle venu la remercier
pour son attitude pendant la guerre
1939-45. Sa mère la reine MARAU et
son frère Ernest SALMON, cités plus
haut, étaient respectivement chevalier
et officier de la Légion d’honneur.
Joseph POMMIER - 1914-1994 chevalier de la Légion d’honneur
(1959) - arrivé à Tahiti en 1938
comme mécanicien volant de l’aéronautique navale, il participe au ralliement des E.F.O. à la France libre, puis
combat comme pilote dans les forces
aéronavales de la France libre ; cité,
médaille militaire en 1946 ; prend sa
retraite comme maître pilote de l’aéronautique navale et s’établit à Tahiti ;
effectue la première liaison NouméaPapeete par hydravion Catalina en
1947 ; commandant de bord sur la
ligne Nouméa-Port-Vila-Santo-Papeete
(TRAPAS) à partir de 1950 ; devient
ensuite fonctionnaire de l’aviation civile.
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Koringo POO dit PUTU - 1906-1973
- chevalier de la Légion d’honneur
(1959) - consacré pasteur protestant
en 1941, vicaire puis pasteur de la
paroisse de Paofai, vice-président puis
co-président du Conseil supérieur des
Eglises protestantes tahitiennes ; délégué à la Conférence des églises du
Pacifique à Lifou en 1966.
René PORCHER - 1911-1983 - chevalier de la Légion d’honneur (1959) arrive à Tahiti en 1963 comme directeur de l’Office des postes et télécommunications de Polynésie française et
s’y établit.
Rose (Rosa) RAOULX - 1908-1970 chevalier de la Légion d’honneur (1959)
- présidente du Conseil de district d’Arue
pendant près de 30 ans, conseiller territorial de 1962 à 1967 ; présidente du
Groupement de solidarité des femmes de
Tahiti. Son grand-père Victor RAOULX, et
son beau-frère Hippolyte MALARDE,
cités plus haut, étaient chevaliers de la
Légion d’honneur.
Louis TIRILLY, Mgr - 1912-2002 chevalier de la Légion d’honneur
(1959) - ordonné prêtre chez les
Picpuciens en 1937 ; arrive aux
Marquises en 1938 ; missionnaire à
Tahuata jusqu’en 1952 ; nommé vicaire apostolique en 1953 puis évêque
des Marquises en 1966 ; développe
les écoles catholiques et en particulier
les internats ; démissionne en 1970 et
rentre en France après 32 ans de
sacerdoce aux Marquises.
Eugène TRIFFE - 1885-1969 - chevalier de la Légion d’honneur (1959) arrivé en 1919 comme gendarme, il est
en poste dans divers archipels ; initiateur du ralliement des Marquises à la
France libre. Le mari de sa fille adoptive, Max NOBLE, cité plus loin, était
chevalier de la Légion d’honneur.
1960
Pierre OLIVIER - 1896-1974 - chevalier (1960), puis officier (1973)
de la Légion d’honneur - ordonné
prêtre chez les Picpuciens en 1920
sous le nom de père Calixte ; arrive
à Tahiti en 1920, exerce son ministère à Tahiti, aux Australes, comme
curé de Papeete de 1943 à 1951,
puis aux Tuamotu.
1961
Taura FAUA - 1888-1967 - chevalier
de la Légion d’honneur (1961) ancien combattant 1914-1918 ; président du Conseil de district de Tiarei
pendant 24 ans.
Alfred (Freddy) FOURCADE, HOUQUES dit - 1907-1978 - chevalier
(1961) puis officier (1971) de la
Légion d’honneur - après une carrière
d’administrateur de la France d’outremer, s’établit à Tahiti où il participe à
la direction des affaires de son beaupère : Brasserie de Tahiti et Etablissements Martin (dont est issue Electricité de Tahiti) et dirige son propre
cabinet d’assurances.
29
Teuira MARUHI - 1907-1962 - chevalier de la Légion d’honneur (1961) pasteur protestant, aumônier militaire,
avec le grade d’adjudant-chef, du
bataillon du Pacifique qu’il suit dans
toutes ses campagnes ; pasteur à
Punaauia.
Philibert MONTARON - 1884-1975 chevalier de la Légion d’honneur
(1961) - arrive en 1909, occupe divers
emplois jusqu’en 1914 ; combattant de
la guerre 1914-1918 comme sergent ;
reprend ses activités aux Tuamotu pendant 20 ans, puis rentre dans la direction des affaires MARTIN auxquelles il
est associé ; conseiller privé du gouverneur de 1942 à 1953. Son fils Alfred
MONTARON et sa fille Louise MONTARON sont chevaliers de la Légion d’honneur depuis 1998 et 2001.
Teremai PUTOA - 1895-1965 - chevalier de la Légion d’honneur (1961) ancien combattant de la guerre 191418, engagé volontaire en 1914, participe aux combats sur le front d’Orient,
hospitalisé à Salonique ; s’engage à
nouveau à 47 ans en 1942 au bataillon
du Pacifique dont il fait toutes les campagnes ; fait une carrière d’ouvrier
d’art au Service des Travaux publics.
Robert RAIMBAULT - 1927-1961 chevalier de la Légion d’honneur à titre
posthume (1961) - engagé en 1947
dans l’armée de terre, fait campagne
en Indochine où il est plusieurs fois
cité ; arrive à Tahiti en 1951 en repos
puis en affectation, s’y marie ; continue
30
sa carrière au Niger comme sous-officier méhariste, puis en Algérie où, sergent-chef, il est mortellement blessé au
combat le 1er avril 1961 ; est fait chevalier de la Légion d’honneur à titre
posthume. Sa veuve, Simone RAIMBAULT née FERRAND, élève leurs trois
garçons qui sont Pupilles de la nation,
et est membre du bureau de la Société
d’entraide des membres de la Légion
d’honneur au sein de laquelle elle est
très active dans le domaine social. Son
père Joseph RAIMBAULT était chevalier
de la Légion d’honneur à titre militaire.
Raymond TUMAHAI - 1912-1984 chevalier de la Légion d’honneur
(1961) - ancien combattant au bataillon du Pacifique dont il fait toutes les
campagnes ; fonctionnaire territorial,
il prend sa retraite comme chef du
Service des finances ; conseiller de
gouvernement de 1962 à 1967 ;
secrétaire général de l’Office des
anciens combattants de Polynésie française. Son cousin germain Etienne
TUMAHAI est chevalier de la Légion
d’honneur depuis 1993.
1962
Jules MILLAUD - 1894-1980 - chevalier de la Légion d’honneur (1962) participe à la guerre 1914-18 avec le
bataillon mixte du Pacifique, cité ; fait
carrière au sein de la Banque de
l’Indochine, à Papeete, Nouméa, Hanoï,
Pondichéry, puis de nouveau à Tahiti
comme sous-directeur ; conseiller
N°298 • Septembre 2003
privé du gouverneur de 1953 à 1958.
Son fils Daniel MILLAUD est chevalier
de la Légion d’honneur depuis 2000.
René SOLARI - 1902-1990 - chevalier
de la Légion d’honneur (1962) monte une affaire commerciale ;
engagé volontaire au bataillon du
Pacifique, il est rapatrié pour raisons
sanitaires et ne peut donc participer à
ses campagnes ; président de la
Chambre de commerce, il participe à
ce titre au développement économique
et à l’équipement de Tahiti ; son
grand-père Jean SOLARI était chevalier
de la Légion d’honneur, et son père
Alfred SOLARI cité plus haut, officier
de la Légion d’honneur ; son beaupère Emile MARTIN et plusieurs de ses
beaux-frères, cités plus haut, étaient
membres de la Légion d’honneur.
Maurihau TAMATA - 1918-1981 chevalier de la Légion d’honneur
(1962) - engagé volontaire au bataillon du Pacifique, participe à toutes ses
campagnes, est grièvement blessé ; fait
ensuite carrière dans l’administration
des douanes ; décoré de la Légion
d’honneur à titre militaire avec attribution de la croix de guerre avec palme.
Tutea VAIHO - 1904-1968 - chevalier
de la Légion d’honneur (1962) consacré pasteur protestant en 1928 ;
pasteur de la paroisse d’Utu-roa ; président des Eglises protestantes des îles
Sous-le-Vent.
1963
Choi Cheong A MIN - 1896-1962 chevalier de la Légion d’honneur
(1963) - engagé volontaire en 1916 ;
grièvement blessé le 3 août 1918 au
pont du Bois Roger, est amputé du bras
gauche ; décoré de la médaille militaire et de la croix de guerre avec palme
le 8 août 1918 ; nommé chef du district de Papeari en octobre 1919, exerce cette fonction jusqu’en 1945, date à
laquelle il est élu au Conseil de district
de Papeari ; agent du Service des
Travaux publics de 1939 à 1952 ; il
décède le 14 août 1962, alors que la
procédure pour sa nomination au
grade de chevalier de la Légion d’honneur est en cours, le décret sortant le 3
mai 1963 ; début 1964, l’amiral
Thabaud, commandant le Centre d’expérimentations du Pacifique, apporte à
sa veuve, à son domicile de Papeari, la
croix de la Légion d’honneur que son
mari n’avait pu recevoir ; c’est le premier Polynésien d’ascendance chinoise décoré de la Légion d’honneur.
Clément COPPENRATH - 1888-1966
- chevalier de la Légion d’honneur
(1963) - ancien combattant de la guerre
1914-18, participe aux combats sur le
front d’Orient ; directeur d’établissements commerciaux ; membre de la
Chambre de commerce, assesseur au
tribunal de commerce ; conseiller
municipal de Papeete. Son neveu Emile
dit Gaspar COPPENRATH, cité plus haut,
était officier de la Légion d’honneur ;
ses fils Gérald COPPENRATH et Michel
31
COPPENRATH sont respectivement officier depuis 1990 et commandeur
depuis 1996 de la Légion d’honneur.
René DROLLET - 1921-1989 - chevalier de la Légion d’honneur (1963) engagé volontaire en 1940 au bataillon
du Pacifique dont il fait toutes les campagnes, deux fois blessé, cité ; fait une
carrière dans la police nationale à
Papeete.
Claude HUGON - 1916-1971 - chevalier de la Légion d’honneur (1963) engagé volontaire au bataillon du
Pacifique, participe à toutes ses campagnes, blessé à Monte-Cassino, cité ;
fait ensuite une carrière de douanier ;
son père Auguste HUGON, cité plus
haut, était chevalier de la Légion
d’honneur.
Anna LAGARDE - 1906-1999 - chevalier de la Légion d’honneur (1963) fait carrière à l’Office des postes et
télécommunication ; chef de la
Section féminine de la légion Valmy en
août 1941 ; adjoint au maire de
Papeete. Son grand-père Félix LAGARDE,
et son père Georges LAGARDE, cités
plus haut, étaient chevaliers de la
Légion d’honneur.
Jacques LAIGRET - 1919-1991 - chevalier (1963) puis officier (1979) de la
Légion d’honneur - médecin militaire
des troupes de marine ; fait un premier
séjour à Tahiti de 1956 à 1959 comme
directeur de l’Institut de recherches
médicales de Papeete, puis un deuxième
32
de 1963 à 1967 dans les même fonctions,
cumulées avec celles de chef de Service
de pédiatrie ; revient définitivement à
Tahiti en 1972 comme chef du Service
de santé et, à nouveau, directeur de
l’Institut, fonction qu’il occupe jusqu’à
sa retraite en 1982.
Francis SANFORD - 1912-1996 chevalier de la Légion d’honneur
(1963) - instituteur, chef de poste administratif aux Tuamotu, puis aux Gambier
qu’il rallie à la France libre, et où il rassemble des volontaires ; représentant
du gouverneur auprès du commandement américain à Bora-Bora, chargé de
mission au cabinet du gouverneur ;
premier maire de Faa’a de 1965 à 1977,
député de 1967 à 1977, conseiller territorial de 1967 à 1973 et de 1982 à
1985, vice-président du Conseil de gouvernement de 1977 à 1982. Membre de
l’Académie tahitienne.
André TEIKITUTOUA - 1922-1976 chevalier de la Légion d’honneur (1963)
- agriculteur ; chef du district puis maire
de Ua Pou, conseiller territorial.
1964
Jean (Jean-Roy) BAMBRIDGE 1922-1979 - chevalier de la Légion
d’honneur (1964) - engagé volontaire
en 1940, ancien combattant du
bataillon du Pacifique dont il fait toutes
les campagnes ; entrepreneur ; conseiller municipal puis premier adjoint au
maire de Papeete ; élu conseiller territorial en 1967, il est nommé conseiller
N°298 • Septembre 2003
de gouvernement, fonction qu’il exerce
jusqu’en 1968.
plus loin, était chevalier de la Légion
d’honneur.
France ROUGNANT - 1897-1985 chevalier de la Légion d’honneur
(1964) - professe dans la Congrégation de St Joseph de Cluny sous le nom
de sœur Emmanuelle ; arrivée à Tahiti
en 1931 comme enseignante, exerce
son service à Tahiti et aux Marquises
pendant 54 ans.
Henri PAMBRUN - 1904-1988 - chevalier de la Légion d’honneur (1965) fonctionnaire territorial, chef du
Service de l’enregistrement et du
domaine ; après sa retraite, directeur
du Golf d’Atimaono.
1965
Martial IORSS - 1891-1966 - chevalier de la Légion d’honneur (1965) instituteur, puis occupe divers emplois
dans le secteur privé avant d’être
nommé en 1929 greffier en chef des
tribunaux ; inquiété en 1940 à cause
de ses origines allemandes, doit quitter
ses fonctions et reprend une activité
dans le privé ; rétabli dans ses droits ;
conseiller territorial en 1953, président
de la Commission permanente en
1954-1955 ; professeur de langue
tahitienne et président du Comité de
toponymie ; président de la Société
hippique, du Yacht-club et de la Société
de la Jeunesse tahitienne. Son gendre
Philippe MAZELIER, cité plus loin, était
chevalier de la Légion d’honneur.
Alexandre LEGAYIC - 1913-1987 chevalier de la Légion d’honneur
(1965) - navigateur, instituteur puis
directeur d’école ; conseiller territorial et vice-président de l’Assemblée
territoriale de 1962 à 1967. Son épouse Tuianu LEGAYIC née CONROY, citée
Guillaume VALLONS - 1911-1986 chevalier (1965) puis officier (1980)
de la Légion d’honneur ; citoyen
belge ; ordonné prêtre chez les
Picpuciens en 1936 sous le nom de
père Victor ; arrive à Tahiti via l’Italie
en 1941 comme missionnaire dans les
Tuamotu où il exerce son sacerdoce
jusqu’à son retour en Belgique en
1979 ; en plus de son activité sacerdotale et d’instituteur, se dépense pour le
développement économique des atolls
de son ressort en créant et animant
une société coopérative agricole à
laquelle on doit 350.000 cocotiers
plantés entre 1950 et 1980.
1966
Marcel HART - 1909-1969 - chevalier
de la Légion d’honneur (1966) - entrepreneur de travaux publics et armateur ; maire d’Uturoa - conseiller territorial, vice-président de l’Assemblée
territoriale.
Robert HUCK - 1913-1989 - chevalier de la Légion d’honneur (1966) médecin militaire, participe à la guerre
1939-1944 (campagnes d’Italie, France
33
et Allemagne), puis à la guerre
d’Indochine ; arrive à Tahiti en 1951,
s’y établit comme médecin libéral.
Roland MORILLOT - 1917-2001 chevalier de la Légion d’honneur
(1966) - ancien combattant de la guerre 1939-1945, évadé et résistant ;
exploitant agricole à Tahaa. Son père
Octave MORILLOT, cité plus haut, était
chevalier de la Légion d’hon-neur.
Teivitau PITO - 1892-1975 - chevalier de la Légion d’honneur (1966) ancien combattant de la guerre 191418 ; blessé le 7 octobre 1918 dans
l’Aisne ; conseiller territorial de 1962
à 1967, doyen d’âge de l’Assemblée.
1967
Samuel RAAPOTO - 1921-1976 chevalier de la Légion d’honneur
(1967) - consacré pasteur protestant
en 1951, est pasteur des paroisses de
Mahaena, puis de Makatea avant d’aller
étudier en France pendant un an ;
secrétaire général de l’Eglise de 1959 à
1963, il joue un rôle important dans la
préparation de sa constitution et de son
autonomie ; après la proclamation de
celle-ci en 1963, il est élu président de
l’Eglise évangélique de Polynésie française et le reste jusqu’à son décès ;
membre de l’Académie tahitienne.
1969
Walter GRAND - 1917-1983 - chevalier de la Légion d’honneur (1969) engagé volontaire comme sergent au
34
bataillon du Pacifique, il participe à
toutes ses campagnes, décoré de la
croix de guerre à Bir-Hakeim ; importateur ; conseiller territorial, président de l’Assemblée territoriale en
1955-1956.
1970
Yves MALARDE - 1908-1984 - chevalier de la Légion d’honneur (1970) directeur de sociétés commerciales ;
très actif dans la vie associative : président du Groupement des exportateurs de coprah, membre du bureau
de la Société des Etudes océaniennes,
vice-président fondateur du Lion’s club
de Papeete. Son oncle Hippolyte MALARDE, cité plus haut, était chevalier
de la Légion d’honneur.
1972
Alain COLAS - 1943-1978 - chevalier
de la Légion d’honneur (1972) - navigateur de course au large ; fait chevalier de la Légion d’honneur après sa
victoire dans la course transatlantique
Plymout-Newport de 1972 ; s’établit à
Tahiti où il base le quatre-mâts
Manureva rebaptisé Club Méditerranée ; disparu en mer le 16 novembre 1978 au cours de la “Route du
rhum”.
Auguste (Moe) VAN BASTOLAER 1903-1980 - chevalier de la Légion
d’honneur (1972) - infirmier à
Moorea, y crée plusieurs associations
sportives ; conseiller territorial ; bienfaiteur de l’Eglise évangélique de Polynésie
N°298 • Septembre 2003
française qui conserve son brevet de
membre de la Légion d’honneur.
1974
André DROLLET - 1895-1989 - chevalier de la Légion d’honneur (1974) ancien combattant de la guerre 19141918 ; fait chevalier de la Légion
d’honneur à titre militaire, médaille
militaire, cité et blessé ; fonctionnaire
territorial. Son neveu Jacques-Denis
DROLLET est officier de la Légion
d’honneur depuis 1996.
Calixte JOUETTE - 1915-1977 - chevalier de la Légion d’honneur (1974) engagé au bataillon du Pacifique dont
il fait toutes les campagnes ; conseiller
territorial de 1952 jusqu’à son décès ;
disparu en mer le 25 mai 1977 au
cours de la campagne électorale pour
les élections territoriales.
Temarii a TEAI - 1899-1994 - chevalier (1974), puis officier (1985) de la
Légion d’honneur - ancien combattant
engagé volontaire dans les Forces
navales françaises libres 1942-1945 ;
fonctionnaire territorial, commande
de nombreux navires en Polynésie, y
compris de l’administration ; conseiller municipal de Papeete.
1975
Max NOBLE - 1922-1984 - chevalier
de la Légion d’honneur (1975) - engagé volontaire au bataillon du Pacifique,
il participe à toutes ses campagnes ;
président de l’Amicale des Anciens du
bataillon. Son beau-père Eugène TRIFFE, cité plus haut, était chevalier de la
Légion d’honneur.
Frantz VANIZETTE - 1927-2001 chevalier (1975), puis officier (1990)
de la Légion d’honneur - engagé dans
la marine nationale, arrive à Tahiti en
1945 sur le Dumont d’Urville, quitte
la marine nationale et s’établit à Tahiti ;
travaille à la Chambre d’agriculture ;
secrétaire du syndicat CFTC ; participe
à la création en 1956 de la Caisse de
prestations familiales, devenue Caisse
de Prévoyance sociale en 1968, dont il
est nommé directeur ; rentre en politique en 1958 en étant élu conseiller
territorial, mandat dans lequel il est
reconduit à de nombreuses reprises ;
président de l’Assemblée territoriale
ou de sa Commission permanente plusieurs fois entre 1961 et 1981 ; promoteur du journal Les débats puis fondateur du Canard tahitien en 1963.
1976
Henri FULACHIER - 1923-1984 chevalier de la Légion d’honneur
(1976) - participe à la guerre 19391945 comme pilote dans US Air Force ;
arrive à Tahiti aux commandes du premier DC 8 à se poser à Faa’a le 5 mai
1961 ; commandant de bord TAI puis
UTA à Tahiti, où il s’établit.
1977
Francis FULLER - 1920-1997 - chevalier de la Légion d’honneur (1977) -
35
sous-officier de carrière, participe aux
guerres d’Indochine et d’Algérie ;
agent du Trésor ; secrétaire général de
l’Office des anciens combattants.
1978
Patrick (FARELLE) O’REILLY 1900-1988 - chevalier (1978), puis
officier (1987) de la Légion d’honneur
- ordonné prêtre chez les Pères maristes ; ethnologue et historien, s’intéresse beaucoup à la Polynésie sur laquelle
il écrit de nombreux ouvrages dont
une Bibliographie et un répertoire de
biographies ; animateur de la Société
des Océanistes à Paris ; créateur, avec
la fondation Singer-Polignac, du Musée
Gauguin de Tahiti, et coresponsable de
la salle Tenete du Musée de Tahiti et
des îles.
Marurai UTIA - 1925-1992 - chevalier de la Légion d’honneur (1978) consacré pasteur protestant ; pasteur
des paroisses de Rimatara, Makatea,
puis après un stage en France, de
Pirae ; vice-président du Conseil supérieur de l’Eglise évangélique de Polynésie française, il est élu président
après le décès de Samuel RAAPOTO.
1979
Emile LE CAILL - 1919-1985 - chevalier de la Légion d’honneur (1979) engagé volontaire début 1945 dans
l’armée de Lattre de Tassigny, participe
à la campagne d’Allemagne, rentre à
Tahiti avec le bataillon du Pacifique ;
36
constructeur et armateur de goélettes ;
plusieurs fois adjoint au maire de
Papeete ; ministre du gouvernement en
1959 ; conseiller de gouvernement de
1972 à 1977. Son beau-père CharlesAlbert LEBOUCHER, cité plus haut, était
chevalier de la Légion d’honneur.
1980
Rosa KLIMA née PEREZ - 19192002 - chevalier (1980), puis officier
(1990) de la Légion d’honneur conseillère municipale de Papeete de
1959 à 1966 ; première adjointe au
maire d’Arue de 1972 à 1989, elle y
crée le premier ramassage scolaire ;
membre de l’Académie tahitienne dès
sa création en juillet 1974 ; cofondatrice en 1961 du Mouvement de solidarité des femmes de Tahiti ; très attachée
à l’Eglise évangélique en Polynésie
Française, elle y fonde en 1962 le
Foyer de jeunes filles et en préside le
comité, et en 1978 le Comité des femmes de l’EEPF qu’elle préside jusqu’en
1995.
1981
Paul ZEGULA - 1927-1983 - chevalier
de la Légion d’honneur (1981) - adjudant chef à la Légion étrangère, arrive
à Tahiti en juillet 1963 avec le premier
détachement de légionnaires précurseur du Centre d’expérimentations du
Pacifique ; prend sa retraite à Tahiti en
1968, s’y établit définitivement, et
mène une carrière civile dans la
banque jusqu’à son décès.
N°298 • Septembre 2003
1982
Hélène FIRIAPU née TEARIKI 1910-1987 - chevalier de la Légion
d’honneur (1982) - directrice d’école,
président de Conseil de district à
Moorea.
Germaine LIAUZUN née FOUGEROUSSE - 1912-2002 - chevalier de la
Légion d’honneur (1982) - anime pendant près de 50 ans la section locale de
la Croix rouge qu’elle préside à partir
de 1947. Son mari Jean-Henri LIAUZUN, cité plus haut, était chevalier de
la Légion d’honneur.
1983
Henri MARAETEFAU - 1928-1984 chevalier de la Légion d’honneur
(1983) - sous-officier de carrière dans
l’infanterie de marine, participe aux
guerres d’Indochine et d’Algérie, cité,
médaille militaire ; termine sa carrière comme adjudant-chef au RIMAP.
1984
Fareura (Léo) BORDES - 1920-1999
- chevalier de la Légion d’honneur
(1984) - engagé volontaire au
bataillon du Pacifique, participe à toutes ses campagnes ; fait une carrière
de fonctionnaire territorial au Service
des Travaux publics.
1986
Tuianu LEGAYIC née CONROY 1922-1995 - chevalier de la Légion
d’honneur (1986) - enseignante,
directrice d’école ; maire de Papara,
conseiller territorial de 1972 à 1987,
présidente de l’Assemblée territoriale.
Son mari Alexandre LEGAYIC, cité plus
haut, était chevalier de la Légion
d’honneur.
1989
Philippe MAZELLIER - 1928-1998 chevalier de la Légion d’honneur
(1989) - après un premier séjour à
Tahiti en 1951 chez son épouse, s’y
établit en 1961 ; fonde en 1963 le
Journal de Tahiti propriété de Antony
BAMBRIDGE, puis en 1964 la Dépêche
de Tahiti pour son propre compte ;
écrit ou édite plusieurs ouvrages sur la
Polynésie. Son beau-père, Martial
IORSS, cité plus haut, était chevalier de
la Légion d’honneur.
1990
Simone HINTZE née SALMON 1924-1997 - chevalier de la Légion
d’honneur (1990) - institutrice, se
spécialise, après un stage en France,
dans la direction des écoles maternelles, dirige une école pilote ; longtemps membre du bureau de la section
locale de la Croix rouge, elle en est
présidente de 1989 à 1996. Son cousin
Tutaha SALMON, cité plus loin, était
chevalier de la Légion d’honneur.
Tuhata SALMON - 1925-2002 - chevalier de la Légion d’honneur (1990) entrepreneur ; président du Conseil
de district puis maire de Tairapu - est
de 1960 à 2001 ; conseiller territorial
37
de 1972 à 2001 ; député de 1982 à
1986 ; son père adoptif Tavaea TEAVERAI et sa cousine Simone HINTZE, cités
plus haut, étaient chevaliers de la
Légion d’honneur.
Henriette WINKLER née TETUANUI-HUNTER - 1935-2002 - chevalier
de la Légion d’honneur (1990) - enseignante ; une des figures les plus représentatives de la chanson polynésienne.
1991
Aurora NATUA - 1909-1992 - chevalier de la Légion d’honneur (1991) bibliothécaire, archiviste et linguiste ;
secrétaire-bibliothécaire de la Société
des Etudes océaniennes à Papeete, et
responsable de son musée.
1992
Hyacinthe ALINE - 1925-2000 - chevalier de la Légion d’honneur (1992) homme d’affaires, il développe plusieurs sociétés commerciales et industrielles ; président de la Section régionale des conseillers du commerce
extérieur de la France ; président de la
section locale de l’Association nationale des membres de l’Ordre national du
mérite et vice-président de la section
locale de la Société d’entraide des
membres de la Légion d’honneur.
I
a Société des Etudes océaniennes remercie Alfred Grand
qui lui a offert fort généreusement sa collection des
Editions Perspectives maohi, “Le sauvage de Taïti aux
Français” de Nicolas Bricaire de la Dixmérie (réédition de l’ouvrage de 1770 avec des commentaires et des illustrations) ainsi
que “Omai, ambassadeur du Pacifique” de E. H. Mc Cormick
(traduction V. D. Bénard, préface de José Garanger).
Tous ces ouvrages sont mis en vente au siège de la Société.
L
38
Références des décisions de nomination
ou promotion
dans la Légion d’honneur,
et de leur publication officielle
n
n
n
n
n
n
n
AHNNE
AHNNE
ALINE
ALLAIN
A MIN
ARI’ IOEHAU
a UPOO
ARNOULD
n
AUBRY
n BAMBRIDGE
n
BAMBRIDGE
BANZET
n BARRAL
n
Edouard
Frédéric
Hyacinthe
Gaston
Choi-Cheong
ch. 02.01.1935
ch. 17.09.1954
ch. 31.12.1992
ch. 08.06.1957
ch. 03.05.1963
dit Tetuanui
Albert
ch. 19.06.1897 1
ch. 05.09.1940 (TS)
of. 06.10.1949
ch. 28.07.1955
ch. 29.12.1949
of.18.06.1959
ch. 10.04.1964
ch. 12.08.1932
ch. 12.08.1953
p.c. du 31.12.1951
ch. 07.07.1955
ch. 13.02.1952
ch. 28.12.1867
Ernest
Antoni (Antony)
Jean (Jean-Roy)
Emilie
Georges
n
BERNARDINO Philippe
BERNIERE
Paul
n BONET
Frédéric
n
n
BORDES
BRAULT
n BREMOND
n CADOUSTEAU
n CARLSON
n
Fareura (Léo)
Léonce
Henri, pasteur
Jean-Marie
Louis
ch. 13.07.1984
ch.12.08.1923
ch.03.08.1956
ch.18.01.1911 2
ch.18.06.1959
15.01.1935
22.09.1954
01.01.1993
12.06.1957
08.05.1963
p.
p.
p.
p.
p.
459
9032
35
5865
4143
09.09.1940
29.10.1949
02.08.1955
31.12.1949
03.07.1959
14.04.1964
20.08.1932
23.08.1953
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
4939
10787
7723
12555
6627
3341
9149
7460
13.07.1955
15.02.1952
M 30.12.1867
BOEFO 1868 n°4
14.07.1984
17.08.1923
18.08.1956
p. 7026
p. 1933
p. 1644
p. 2275
p. 8135
p. 7902
03.07.1959
p. 6627
1 ARI’ IOEHAU - décret non publié au JORF – le dossier L 0059057 aux Archives nationales ne comprend
que la lettre du ministre des colonies au grand chancelier de la Légion d’honneur n°441 du 05.04.1916 l’informant du décès et rappelant la date du décret de nomination.
2 CADOUSTEAU - décret non publié au JORF – le dossier L 0403006 aux Archives nationales comprend le
mémoire de proposition du gouverneur.
39
n
n
CASSIAU
CASSIAU
n
CHASSANIOL
n
COEROLI
COLAS
n COPPENRATH
n COPPENRATH
n
n
D’ANGLEJAN
CHATILLON
n
Pierre (Fernand) ch.30.04.1918 (T.S)
Pierre
ch.10.02.1954
of. 05.04.1969
Charles
ch. 18.01.1881
01.05.1918
16.02.1954
10.04.1969
19.01.1881
p.
p.
p.
p.
3788
1574
3492
308
Antoine
Alain
Clément
Emile (Gaspard)
10.11.1958
31.12.1972
02.01.1964
22.01.1947
19.04.1981
p.
p.
p.
p.
p.
368
13844
3341
1658
1121
20.06.1956
14.07.1976
16.12.1951
30.07.1952
12.07.1922
2.10.1918
10.02.1974
08.05.1963
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
5630
4224
12353
7748
7286
8606
1546
4139
ch.est. 1981 3
ch. 03.05.1961
ch. 20.10.1934
05.05.1961
26.10.1934
p. 4148
p. 10721
ch.06.01.1982
07.01.1982
p. 200
ch.03.05.1961
of.24.12.1971
ch.29.12.1976
ch.07.04.1977
05.05.1961
01.01.1972
01.01.1977
10.04.1977
p.
p.
p.
p.
Pierre
ch.16.06.1956
of.09.07.1976
Marc
ch.13.12.1951
Marie, sœur Lydia ch. 25.07.1952
Alfred
ch. 10.07.1922
Antony
ch. 28.9.1918 (T.S)
André
ch.07.02.1974
René
ch.03.05.1963
DARNOIS
DAUDET
n DEMAY
n DOUCET
n DROLLET
n DROLLET
n FANAU’E a
TI’IVAARI’ITOA
n FAUA
Taura
n FAUGERAT
Alcide
n FIRIAPU
née TEARIKI Hélène
n FOURCADE
(HOUQUES dit) Alfred
n
n
FULACHIER
Henri
FULLER
Francis
n GABRIELLI de
CARPEGNA
Edouard
n
ch. 23.12.1957
ch.22.12.1972
ch. 30.12.1963
ch.08.01.1947
of.17.04.1981
4148
7
33
2126
ch.17.10.1844 4
of. 14.08.1858 5
3 FANAU’E - décret non publié au JORF - apparaît pour la première fois avec la Légion d’honneur sur
l’Annuaire des EFO de 1891 - les procès verbaux des séances du conseil général des EFO de 1898 mentionnent “il avait été fait chevalier de la Légion d’honneur en 1891” - le Bulletin de la SEO n° 202 mentionne page
12 “chevalier de la Légion d’honneur en 1891”.
4 GABRIELLI de CARPEGNA chevalier - ordonnance non publiée au Moniteur universel -figure sur l’annuaire
de la Légion d’honneur de 1852 avec la date du décret de nomination comme chevalier.
5 GABRIELLI de CARPEGNA officier - décret non publié au Moniteur universel - le dossier L 1049013 aux
Archives nationales ne comporte qu’une lettre sur son décès et rappelant la date du décret de promotion au
grade d’officier de la Légion d’honneur.
40
N°298 • Septembre 2003
n
n
n
n
GATIEN
GERBAULT
GILBERT
GOBRAY
n
GRAFFE
GRAND
n GRELET
n GUILLEMET
n HALL
n HAMBLIN
n
n
n
HART
HERMEL
n
HERVE
HERVE
n HERVE
n
Louis
Alain
ch.08.06.1957
ch.24.10.1923
of. 02.07.1929
Jean
ch.27.08.1945
Maadi
ch.03.08.1956
of.08.07.1967
Paul
ch.20.10.1920
Walter
ch.26.12.1969
William
ch.23.12.1957
Marie, mère Jean ch.09.07.1951
James-Norman
ch.09.04.1919 6
Charles
ch.29.12.1947
of.20.04.1963
Marcel
ch.12.07.1966
André, Mgr
ch.10.07.1925
12.06.1957
24.10.1923
27.07.1929
27.09.1945
18.08.1956
14.07.1967
22.10.1920
01.01.1970
28.02.1957
11.07.1951
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
5865
10146
8489
752
7902
7072
16282
11
2296
7372
31.12.1947
24.04.1963
14.07.1966
12.07.1925
p.
p.
p.
p.
12639
3773
6077
6523
Armand
François
Robert
ch. 24.03.1923
ch. 05.08.1927
ch. 21.11.1944
of. 22.08.1951
co. 10.07.1968
ch. 1845 7
30.03.1923
10.08.1927
10.12.1944
24.08.1951
14.07.1968
p.
p.
p.
p.
p.
3161
8592
97
9022
6726
ch. 13.07.1990
ch. 13.02.1872
ch. 27.02.1954
ch. 25.02.1966
ch. 11.07.1920
ch. 03.05.1963
ch. 22.12.1925
of. 15.01.1947
ch. 26.04.1965
ch. 01.07.1959
ch. 09.04.1974
ch. 25.10.1955
14.07.1990
16.02.1872
05.03.1954
01.03.1966
12.07.1920
08.05.1963
25.12.1925
19.01.1947
27.04.1965
03.07.1959
14.04.1974
28.10.1955
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
8343
1106
2223
1735
9861
4139
12342
794
3261
6628
4100
10640
n
HITOTI a MANUA
HINTZE
née SALMON Simone
n HOLOZET
Alexandre
n HOPPENSTEDT Henri
n HUCK
Robert
n HUGON
Auguste
n HUGON
Claude
n ILARI
Noël
n
n
IORSS
JACQUEMIN
n JOUETTE
n JUVENTIN
n
Martial
André
Calixte
Auguste
6 HALL - décret non publié au JORF mais conservé aux archives du ministère des Affaires étrangères.
7 HITOTI - ordonnance non publié au Moniteur universel - copie de la lettre de Bruat au ministre de la marine
n°233 du 24 août 1845 conservée aux archives des Affaires étrangères (nouvelle série - fonds Océanie - volume CP 27 page 112).
41
n
KLIMA
née PEREZ
ch. 11.07.1980
of. 31.12.1990
n LAGARDE
Anna
ch. 20.04.1963
n LAGARDE
Félix
ch. 16.10.1872
n LAGARDE
Georges
ch. 12.08.1937
n LAIGRET
Jacques
ch. 30.10.1963
of. 05.07.1979
n LANGOMAZINO Louis (Eugène)
ch. 03.05.1889
n LE BIHAN
Laurent
ch. 01.02.1941
n LE BOUCHER Charles (Albert) ch. 18.04.1951
n LECA
Antoine
ch. 31.07.1958
n LE CADRE
Pierre-Marie, Mgr ch.12.08.1934
of. 24.06.1950
n LE CAILL
Emile
ch.11.04.1979
n LE GAYIC
Alexandre
ch. 30.12.1965
n LE GAYIC
née CONROY Tuianu
ch. 31.12.1986
n LEONTIEV
(LEONTIEFF) Maxime
co. 16.06.1916 8
n
LEVEQUE
LIAUZUN
née
FOUGEROUSSE
n LIAUZUN
n LUSSAN
n MALARDE
n MALARDE
n MAONI
n
n
Rosa
1765
16
3773
6562
9267
9855
1648
2111
3920
7431
8646
6933
881
5
01.01.1987
p. 14
Emmanuel
ch. 08.07.1952
10.07.1952
p. 6889
Germaine
Jean
Louis
Hippolyte
Yves
Taataroa a Moe
ch. 13.07.1982
ch. 29.08.1948
ch. 23.12.1957
ch. 29.12.1916 (T.S)
ch.31.03.1970
ch.09.07.1953
of. 30.12.1964
14.07.1982
29.08.1948
09.01.1958
03.01.1917
04.04.1970
16.07.1953
01.01.1965
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
2246
8523
308
61
3225
6313
9
ch. 11.03.1924
ch. 01.07.1983
ch. 11.08.1930
ch. 26.07.1950
ch. 12.04.1958
ch. 03.05.1961
ch. 06.02.1950
of. 14.04.1976
12.03.1924
05.07.1983
15.08.1930
27.07.1950
19.04.1958
05.05.1961
17.02.1950
18.04.1976
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
2434
2041
9513
7992
3737
4148
1906
2382
MARAUTAAROA Joanna, reine
TEPAU a TATI Marau
n MARAETEFAU Henri
n MARCANTONI Pascal
n MARTIN
Emile
n MARTIN
Yves
n MARUHI
Teuira, pasteur
n MASSAL
Emile
n
13.07.1980
p.
01.01.1991
p.
24.04.1963
p.
19.10.1872
p.
15.08.1937
p.
06.11.1963
p.
07.07.1979
P.
05.05.1889
p.
brevet du 12.02.1952
18.04.1951
p.
07.08.1958
p.
15.08.1934
p.
29.06.1950
p.
15.04.1979
p.
01.01.1966
p.
8 LEONTIEV - décret non publié au JORF mais conservé aux archives du ministère des Affaires étrangères.
42
N°298 • Septembre 2003
n
Teri’itanairohotu ch. 02.08.1932
Paul, Mgr
ch. 07.08.1936
of. 02.08.1949
co. 29.12.1962
n MAZELLIER
Philippe
ch. 12.07.1989
n MILLAUD
Jules
ch. 14.04.1962
n MONTARON
Philibert
ch. 03.05.1961
n MOREAU
Octave, pasteur ch. 05.01.1934
n MORILLOT
Joseph (Octave) ch. 10.10.1928
n MORILLOT
Roland
ch. 12.07.1966
n NATUA
Aurora
ch. 12.07.1991
n NAY
Guy
ch. 07.07.1952
n NOBLE
Max
ch. 07.05.1975
n NOUAILLES
Amédée, Mgr
ch. 08.08.1935
n NOUVEAU
Pierre
ch. 16.03.1902
n OLIVIER
Pierre,
père Calixte
ch. 12.12.1960
of. 12.07.1973
n O’REILLY
Patrick, père
ch. 23.03.1978
of. 31.12.1987
n PAMBRUN
Henri
ch. 12.07.1965
n PASSARD
René
ch. 31.07.1958
n PEAUCELLIER Pierre
ch. 01.07.1931
of. 20.06.1946
n PITO
Teivitau
ch. 30.12.1966
n POMARE V
roi
of. 06.11.1880
n POMARE
Teri’inui o Tahiti,
princesse Teri’inui ch.18.06.1959
n POMARE
Teri’ihinoiatua,
prince Hinoi
ch. est. 1895 10
n
n
n
MATAITAI
MAZE
POMMIER
POO
Joseph
ch.13.11.1959
Koringo, pasteur ch.18.06.1959
05.08.1932
09.08.1936
19.08.1949
01.01.1963
14.07.1989
21.04.1962
05.05.1961
07.01.1934
12.10.1928
14.07.1966
14.07.1991
10.07.1952
10.05.1975
10.08.1935
16.03.1902
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
8598
8571
8197
6
8881
4156
4148
166
11085
6077
9242
6877
4716
8780
1961
20.12.1960
p.
14.07.1973
p.
26.03.1978
p.
01.01.1988
p.
14.07.1965
p.
07.08.1958
p.
04.07.1931
p.
15.10.1946
p.
01.01.1967
p.
BOEFO de 1881 n°4 9
11427
7653
1330
21
6060
7431
7253
8691
5
03.07.1959
p. 6627
19.11.1959
03.07.1959
p. 11081
p. 6627
9 POMARE V - décret non publié au JORF mais est mentionné sur le “registre des décrets de Légion d’honneur d’étrangers” conservé aux archives du ministère des Affaires étrangères (série protocole - décorations
- 1345) avec le 6 novembre 1880 pour la date du décret - le fichier manuel étrangers de la grande chancellerie
de la Légion d’honneur porte 5 novembre 1880 comme date du décret - le BO EFO n°4 de 1881 mentionne
24 novembre 1880 ; on a retenu pour la date du décret le 6 novembre.
10 HINOI - décret non trouvé au JORF - apparaît pour la première fois avec la Légion d’honneur sur l’annuaire
des EFO de 1895 - le dossier L 2193026 aux Archives nationales ne comporte que la lettre du ministre des
colonies au grand chancelier n°740 du 9 juin 1916 l’informant du décès, et mentionnant “le prince était chevalier de la légion d’honneur”.
43
n
n
PORCHER
POROI
n
PUTOA
RAAPOTO
n RAIMBAULT
n RAOULX
n RAOULX
n ROBINSON
n ROLLIN
n
n
ROUGNANT
n
SALMON
n
SALMON
SANFORD
n SOLARI
n
n
SOLARI
SUE
n TAMATA
n TAMATOATAUTU
n
n
n
TAPAO
TARI’IRI’I a
VEHIATUA
René
Alfred
ch.19.06.1959
ch. 13.02.1952
of. 28.12.1961
23.06.1959
15.02.1952
31.12.1961
p. 6181
p. 1934
p. 12366
Teremai
Samuel, pasteur
Robert
Rose (Rosa)
Victor
William
Louis
ch. 03.05.1961
ch. 27.04.1967
ch. 30.08.1961
ch. 08.09.1959
ch. 16.01.1906
ch. 27.05.1955
ch. 09.11.1920 (T.S)
of. 15.01.1947
co. 09.12.1957
05.05.1961
30.04.1967
03.09.1961
16.09.1959
19.01.1906
09.06.1955
09.11.1920
19.01.1947
10.12.1957
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
4148
4405
8229
9042
374
5823
17930
794
11242
14.07.1964
10.03.1938
01.01.1950
15.04.1990
02.01.1964
16.01.1920
20.01.1926
01.01.1963
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
6261
2830
10
4653
7
860
820
6
12.07.1962
p. 6816
ch. 09.07.1953
of. 30.12.1964
16.07.1953
01.01.1965
p. 6313
p. 9
ch. 03.07.1847 13
BOEFO n°3 de 18
48
Marie-Françoise,
sœur Emmanuelle ch. 11.07.1964
Ernest
ch. 28.02.1938
of. 31.12.1949
Tutaha
ch. 14.04.1990
Francis
ch. 30.12.1963
Alfred
ch. 15.01.1920
of. 19.01.1926
René
ch. 29.12.1962
Charles
ch. 17.10.1844 11
Maurihau
ch. 09.07.1962
Tavana
Haamemu,
pasteur
dit Pe’eueue
ch. 18.08.1889 12
11 SUE - ordonnance non publiée au Moniteur universel - figure sur l’annuaire de la Légion d’honneur de
1852 avec la date du décret de nomination comme chevalier.
12 TAMATOA - TAUTU - décret non publié au JORF - la date du décret est celle portée sur le « registre des
décrets de la Légion d’honneur d’étrangers » conservée aux archives du ministère des Affaires étrangères le dossier L 2565086 conservé aux Archives nationales ne comporte que l’acte de décès et une lettre d’accompagnement du gouverneur de février 1906.
13 TARI’IRI’I - ordonnance non publiée au Moniteur universel mais publiée au BO EFO n°3 de 1848 - figure
sur l’annuaire de la Légion d’honneur de 1852 avec la date de l’ordonnance de nomination comme chevalier.
44
N°298 • Septembre 2003
n
TAU a TENAPA
n
TEAI
Temarii
TEIHOTUA a
AROA
dit Rava’ai
n
n
TEIKITUTOUA André
TEISSIER
Jean
n TERIIEROO a
TERIIEROITERAI
n
n
TERI’ITANOA
a TEMAEHUATEA régent Paraita
n
TEVAEARAI
TIRILLY
n TIXIER
n TRIFFE
n TUMAHAI
n TUNUI a
HANANA
n
n
n
n
n
p. 3417
01.01.1975
14.07.1985
p. 15
p. 7970
ch. 30.12.1963
ch. 13.08.1863
02.01.1964
M 15.08.1863
p. 7
p. 1061
ch. 31.03.1935
of. 11.04.1946
04.04.1935
14.04.1946
p. 3854
p. 3149
ch. 17.10.1844 14
ch. est. 1846 15
ch. 07.08.1957
ch. 01.07.1959
ch. 25.10.1955
ch. 01.07.1959
ch. 03.05.1961
10.08.1957
03.07.1959
28.10.1955
03.07.1959
05.05.1961
p.
p.
p.
p.
p.
pasteur
ch. 13.10.1954
13.10.1954
p. 9600
UTIA
Marurai, pasteur ch. 12.07.1978
14.07.1978
p. 2813
VAIHO
VALLONS
Tutea, pasteur
Guillaume,
père Victor
ch.29.12.1962
01.01.1963
p. 7
ch. 30.12.1965
of. 30.12.1980
ch. 28.03.1972
ch. 27.03.1975
of. 31.12.1990
ch. 30.07.1953
ch. 28.12.1924
ch. 24.06.1950
ch. 21.10.1932
01.01.1966
01.01.1981
30.03.1972
30.03.1975
01.01.1991
04.08.1953
30.12.1924
29.06.1950
22.10.1932
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
p.
VAN BASTOLAER Auguste
VANIZETTE
Frantz
VARNEY
VERNAUDON
n VERNIER
n VERNIER
n
04.04.1925
Tavaea
Louis, Mgr
René (Marcel)
Eugène
Raymond
n
n
ch. 28.03.1925
p.c. du 16.08.1920
ch. 27.12.1974
of.13.07.1985
Raymond
Emile
Charles, pasteur
Paul, pasteur
7917
6628
10641
6628
4148
7
10
3228
3424
16
6828
11464
6933
11329
14 TEIHOTUA RAVAAI - ordonnance non publiée au Moniteur universel - figure sur l’annuaire de la Légion
d’honneur de 1852 avec la date de l’ordonnance de nomination comme chevalier.
15 PARAITA - pas de mention trouvée au Moniteur universel ni au JORF ou de l’Empire - apparaît pour le première fois avec la Légion d’honneur sur l’Annuaire des EFO de 1862 ; ne figure pas sur l’annuaire de la
Légion d’honneur de 1852 ; pas de mention trouvée sur le “registre des décrets de Légion d’honneur d’étrangers” sur lequel il devrait être mentionné s’il avait été nommé au titre étranger avant 1880 - la date de
1846 donnée pour la nomination par le Bulletin de la SEO n° 202 n’est donc pas confirmée.
45
n
n
VIENOT
VICTOR
n
Charles, pasteur
Paul-Emile
WINKLER
née TETUANUI Henriette
n ZEGULA
Paul
ch. 29.12.1883
ch. 01.09.1953
of. 13.07.1962
co. 14.04.1976
go. 12.07.1989
gc. 31.12.1992
30.12.1883
04.09.1953
14.07.1962
18.04.1976
14.07.1989
01.01.1993
p.
p.
p.
p.
p.
p.
6780
7856
6920
2382
8873
25
ch. 14.04.1990
ch. 15.03.1981
15.04.1990
15.03.1981
p. 4653
p. 792
Observation : Selon l’époque, les nominations et promotions dans la Légion
d’honneur ont été prononcées par ordonnance royale, décret impérial ou décret
du président de la République ; toutefois, pendant la guerre 1914-1918 et jusqu’en 1920, La Légion d’honneur à titre militaire fut attribuée par arrêté du
ministre de la guerre ou de la marine portant inscription au tableau spécial (TS)
institué par le décret du 3 août 1914, ensuite par la loi du 15 juin 1920 ; toutes
les nominations ainsi prononcées ont été ratifiées par la loi de régulation du 26
février 1921. Pour la guerre 1939-1940, les mêmes dispositions ont été instituées
par le décret-loi du 5 septembre 1939.
Les insertions ont été faites au Moniteur universel (M), puis dans le Journal officiel
impérial puis de la République, à partir de 1865, sauf pour les nominations au
titre étranger quand le bénéficiaire ne réside pas sur le territoire national et, à
certaines époques, pour les nominations au titre indigène qui étaient publiées au
Bulletin officiel local (BOEFO).
46
Les photos du cyclone de 1903 à Raroia
et à Hao proviennent de l’album de la Zélée
“Campagne du Pacifique,
Marseille 18 mai 1902 - 20 août 1904 le Hâvre”
(S.E.O. - 48/15B 2077)
JANVIER 1903
la Zélée aux Tuamotu après un
cyclone meurtrier
Le 28 janvier je longeais la côte nord d’Anaa, qui n’a subi aucun
dégât appréciable. Le 29 janvier à 11 h 30 du matin, j’étais devant
Hikueru, après avoir reconnu Reitoru, lagon inhabité et d’ailleurs relativement épargné. À Hikueru, M. Brunati, médecin des troupes coloniales et Administrateur p.i. vint à bord. Pendant notre entretien, le rôle de
la Zélée se précisa dans mon esprit, : j’avais du charbon, une vitesse
supérieure à celle de la Durance, mais peu de vivres. Dans ces conditions le mieux à faire était de courir la poste : visiter les lagons, donner
les premiers secours, contribuer toujours à l’évacuation d’Hikueru et
ensuite chercher la Durance pour lui donner tous les renseignements
recueillis. A 3 h. 15, je quittais Hikueru après avoir remis à terre 5
hamacs et quelques vivres que la Durance devait compléter dès le lendemain. Selon les indications de M. Brunati je devais visiter Marokau,
Motutunga, Raroia, Rekareka, Tauere, Amanu et revenir à Hikueru. Je
rapatriais 13 indigènes de Raroia. A 6 h. 45 du soir, toujours le 29 janvier, la Zélée arrivait devant l’endroit où fût le village de Marokau (à la
pointe N.-E.) La yole chercha inutilement à franchir la barre. La mer
était dure et la côte, complètement modifiée par le cyclone, déconcertait
M. Brander, notre excellent pilote. À terre deux indigènes crièrent que
les habitants s’étaient réfugiés dans le Sud du lagon. Je me décidais à
abandonner provisoirement Marokau ; j’y reviendrais plus lard. Mieux
valait voir de suite Motutunga, lagon très bas, très exposé, et où 270 indigènes se trouvaient rassemblés le 15 janvier. Le 30 janvier, à midi, la
Zélée se trouvait devant Motutunga. L’île a relativement peu souffert, sauf
à la pointe Nord. Les indigènes (habitants de Katiu en majorité) veulent
y rester pour réparer leurs embarcations. L’état sanitaire est bon ; pendant le cyclone 3 personnes seulement ont été contusionnées et sont
guéries aujourd’hui. Le lagon est encore trouble et l’on ne peut savoir si
la nacre a souffert, réponse qui me sera faite partout. Ils ont recueilli de
l’eau de pluie. Enfin, le 29 janvier, un cotre de Tahanea est venu les visiter. J’ai ainsi des nouvelles rassurantes de cette dernière île qui a très
peu souffert. Un cotre seulement y a été perdu. On ne signale aucun accident de personne. Après avoir remis quelques vivres aux indigènes de
Motutunga, je me dirige sur Katiu, eu longeant la côte Est de Tepoto et la
côte Ouest de Tuanake. Ces îles inhabitées paraissent avoir très peu souffert. Il en est de même pour Katiu dont je longe les côtes S.-O. et Ouest.
À la pointe N.-O., nous rencontrons le croiseur italien Calabria qui avait
offert de participer à la reconnaissance des îles Tuamotu. M. Réveil,
Inspecteur des Colonies, qui vous représentait sur ce croiseur, vint à
bord de la Zélée. Je fus ainsi renseigné sur la situation de toutes les îles
Tua motu situées au N.-O. de Faaite-Katiu. D’après M. Revel, le Calabria
a eu des nouvelles de tous ces lagons où les dégâts ont été très modérés,
sauf à Raraka. Aucun accident de personne n’a été signalé.
Le 31 janvier, à 8 heures, nous arrivions devant Raroia où nous
attendait une cruelle surprise. Cette île était dévastée, ravagée, méconnaissable. Je n’osai pas donner dans la passe, qui avait pu être modifiée,
et la yole dû franchir la barre. Au point de vue matériel, le désastre de
Raroia est du même ordre que celui d’Hikueru. Les trois quarts des
cocotiers sont brisés et gisent sur le sol, pêle-mêle avec les débris des
maisons, avec des goélettes et des cotres qui ont été transportés à 200
mètres du rivage. Les murs en pierre de l’église catholique, de la prison,
du presbytère sont restés debout. Les toitures ont été enlevées ; 12 indigènes ont été tués. En outre, j’apprends qu’à Takume le désastre, plus
grand encore, a fait 15 victimes. Une soixantaine d’indigènes s’y trouvent
dépourvus d’eau, dans la misère la plus complète, attendant, depuis 15
jours, le moyen de revenir ici. Au même instant arrive l’Excelsior.
J’envoie à bord un officier, qui revient un instant après, sans nouvelle
intéressante. l’Excelsior a seulement longé la côte Sud de Fakarava qui
n’a pas souffert. J’embarque le gendarme de Raroia et M. Paea Salmon
qui, ce soir, me pilotera dans le lagon de Raroia. Et, à 10 h 15, je fais
route, à toute vitesse, pour Takume où je trouve, à 1 h 15, cinquante
indigènes réunis sur un motu de la côte Ouest. La yole franchit la barre.
pendant que nos embarcations attendent au large les passagers ainsi
astreints à un double transbordement. Ce procédé est rapide ; je l’ai
50
Raroia, transporté à 200 mètres dans les terres…
d’ailleurs employé pour tous les mouvements importants. A 2 h 30 tous
sont à bord, les embarcations sont hissées, et je continue à explorer la
côte pour y trouver 5 indigènes partis le matin pour chercher des porcs.
Je les trouve enfin. Ils passent à la nage la barre qui, pour la yole, est
infranchissable à cet endroit, et, à 3 h 25, je suis en route pour Raroia
où, grâce à l’habileté remarquable de M. Paea Salmon je mouille à 6 h
15 dans des conditions extrêmement délicates. Avant de franchir la passe
nous croisons l’Excelsior qui fait route sur les Marquises. Je l’arrête je
lui remets une réquisition pour visiter Napuka. Il n’en résultera pour lui
qu’un retard insignifiant et je gagne ainsi 24 heures. Au mouillage de
Raroia je trouve la goélette Papeete ; j’envoie aussitôt un officier interroger son capitaine. Cette goélette vient de Fakahina ou elle a trouvé, le
21 janvier, un subrécargue abandonné à terre, au début du coup de vent,
par la goélette Léon. Le village de Fakahina n’a pas souffert. Du côté de
l’Ouest, quelques cases à coprah ont été enlevées. Il y a eu aucun accident de personne. Le 22 janvier la Papeete se trouvait devant Fagatau où
la mer trop dure a empêché l’accostage. L’île paraît peu endommagée.
Depuis, on est sans nouvelles de la goélette Léon. À 7 h du soir tous nos
passagers étaient débarqués. J’allai à terre voir l’épouvantable désastre.
Le 1er février, sur ma demande, il y eut messe solennelle dite, dans
une case délabrée, par le missionnaire catholique, j’y assistai et une allocution concertée à l’avance fut faite aux indigènes. Ensuite je me rendis
parmi les protestants Kanitos, Mormons, tous rassemblés autour du diacre protestant. Je le priai de parler aux indigènes dans le même sens que
le missionnaire catholique, de leur dire la sympathie profonde des
Français de France pour leurs frères, les Français des Tuamotu. Ce qui
fut fait et bien fait. Ensuite tous les vivres disponibles furent débarqués.
À ce rapport est joint, un état donnant à cet égard tous les renseignements possibles. L’état sanitaire est satisfaisant à Raroia ; de nombreux
cas de rougeole ont été guéris par le cyclone. Deux complications sont
cependant survenues et ont été mortelles. En ce moment il semble que
la rougeole reprend. À midi 15 j’appareillais. Parti le 1er février à midi
15, j’étais à 5 h 30 devant Nihiru que les habitants de Raroia m’avaient
particulièrement recommandé de visiter. Je trouvai l’île assez sérieusement éprouvée. Une vingtaine d’indigènes (habitants de Taenga et de
52
Raroia, février 1903…
Raroia, sortie de la messe…
Raroia pour la plupart) s’y trouvaient pour faire une récolte de coprah
désormais bien compromise. Ils me demandèrent seulement de l’eau
qui leur faisait défaut. A 6 h. 25 du soir je faisais route pour Tauere. Le
2 février, à 5 heures du matin, je reconnaissais la petite île de Tauere
véritable forêt de cocotiers. Les dégâts me parurent faibles et les indigènes ne nous firent aucun signal d’appel. À 10 h 30 j’étais devant Amanu
Le cyclone y a fait 3 victimes. Les cocotiers ont été violemment secoués.
Mais en somme, les dégâts sont faibles, malgré les plaintes exagérées des
indigènes qui me demandèrent avec insistance leur transport aux
Gambier. Je les fis rassembler à la fare hau, leur parlai dans le sens que
vous savez, et je partis à midi 30 après avoir laissé quelques vivres.
Amanu est moins intéressant que Hao, bien moins intéressant que
Raroia. Cependant je me permets de signaler à votre bienveillante attention l’état de la citerne de ces indigènes. Récemment construite par eux,
elle sera achevée sitôt que votre Administration pourra fournir les tôles
et le ciment qu’ils m’ont dit leur avoir été promis. À 4 heures je mouillais
à Hao, ou jamais un navire de guerre à vapeur n’était entré. Le village a
subi des dégâts sérieux. Les maisons sont déplacées et des crics ou des
vérins seraient nécessaires pour remédier à cet état de choses. Les cocotiers ont souffert. Mais le dénuement des habitants ne peut se comparer
à celui des indigènes d’Hikueru, de Raroia, de Takume, de Marokau. Le
mal véritable n’est pas là ; il est dans la réduction considérable de la
population. Ils étaient 500 ; ils ne sont plus que 230 : 78 hommes, 82
femmes, 102 enfants ont trouvé la mort à Hikueru, 5 ont été tués à Hao.
Les survivants sont tristes, découragés. Je les ai encore rassemblés dans
leur fare hau ; je leur ai tenu mon langage habituel ; je leur ai promis
de revenir les voir. De leur côté ils m’ont demandé d’apporter ici les
gens de Marokau, me promettant de leur donner des maisons et des
propriétés aujourd’hui sans maîtres. Ils m’ont prié de rester avec eux 24
heures de plus afin de les aider à chasser l’affreux souvenir du 25 janvier. Bien à contrecœur, j’ai dû résister à cette dernière sollicitation.
J’avais hâte de visiter une seconde fois Marokau. À Hao, l’état sanitaire
est médiocre ; de tous côtés on y entendait tousser. Le 3 février, à 8 heures du malin, la Zélée appareillait, après avoir laissé du lait concentré et
quelques vivres, heureusement complétés par les provisions apportées
54
Raroia, les cocotiers après le cyclone…
par M. Brander. J’ai inutilement offert à ce négociant de les lui rembourser. À 4 heures du soir je passais dans le chenal qui sépare Ravahere de
Marokau, cherchant en vain à voir les indigènes, le Sud de Marokau a
relativement peu souffert. Le Nord de Ravahere est dévasté ; une bande
de roches marque seule l’emplacement, des nombreux cocotiers disparus le 15 janvier. Après avoir franchi ce chenal, la Zélée longea la côte
Ouest de Marokau et, à 5 heures, j’allais renoncer à y trouver les indigènes, lorsque, à la pointe N -0., j’aperçus un pareu rouge. La yole partit
aussitôt et revint à 6 heures avec les nouvelles suivantes : Au nombre de
84, les indigènes avaient reçu la visite de la Durance et des vivres. À 10
heures du soir la Zélée arrivait devant Hikueru. La yole franchissait la
barre et revenait à minuit. M. Brunati me demandait de le conduire à
Tahiti en passant par Taenga, afin d’achever l’évacuation d’Hikueru (ses
habitants exceptés). Je partis au large pour attendre le jour. Le 4 février,
à 6 h du matin, j’étais revenu devant le campement actuel d’Hikueru. À
6 h 30 commençait rembarquement des passagers : l’Administrateur M.
Brunati, l’agent spécial M. Drollet, MM. Narii Salmon, T. Brander, 21
indigènes destinés à Taenga, 46 Tahitiens dont 1 blessé grièvement.
L’embarquement fut lent, malgré mes procédés habituels accompagnés
de coups de sifflet et même d’un coup de canon destiné à montrer mon
impatience. Enfin, à 11 h 30, j’étais en route pour Taenga où j’arrivai à
7 h 30 du soir. Le débarquement se fit, comme toujours en pareil cas, à
la lueur de notre projecteur. M. Brunati descendit à terre, trouva peu de
dégâts et me pria d’y envoyer simplement trois fûts, dont un plein d’eau
douce, ce qui fût fait. À 8 h 50 j’étais en route. Le 5 février, après avoir
reconnu la côte Est de Kauehi qui ne paraît pas dévastée. Je mouillai à
Rotoava (lagon de Fakarava). Je voulais seulement y laisser des renseignements pour la Durance. Mais j’appris que nous avions été devancés.
Dès lors, je n’avais plus qu’à rentrer à Papeete, où je mouillais le lendemain soir, après avoir rencontré la Durance sous la pointe Vénus et lui
avoir signalé les renseignements les plus intéressants.
L. V. Richard
(Document extrait des Archives Territoriales de la Polynésie française)
56
L’église de Raroia…
Un groupe de rescapés, les cases de fortune à Raroia…
Un lépreux à Hao…
Dans le village de Hao…
La place du village à Hao…
Une case à Raroia…
La famille Paea Salmon à Raroia…
In memoriam
Robert I. Levy
La mort d’un ami est toujours un déchirement…
Nous avions rencontré Bob Levy en 1974 – grâce à Marie-Thérèse et
Bengt Danielsson. Il était venu à Tahiti plusieurs fois, d’abord en juillet
1961 à l’initiative de Douglas Oliver qui, avec Paul Kay, Ben Finney,
Anthony Hooper, Richard Moench et d’autres, avait fondé un petit groupe de recherches pour l’étude de l’organisation des relations sociales à
Tahiti et les îles. Robert Levy, d’abord médecin, puis psychiatre et enfin
psychanalyste, avait relevé le défi d’ajouter à tous ces travaux anthropologiques vus de l’« extérieur » la description de quelques aspects du
vécu tahitien, de l’intérieur.
Pour ce faire, R. Levy avait d’abord commencé à étudier la langue tahitienne (étude qu’il avait approfondie ici avec Ralph White) – une langue
qu’il aimait et savourait et qu’il a maîtrisé jusqu’à la fin de sa vie. Il a
aussi basé ses recherches sur le « vocabulaire psychologique », sur les
1.600 termes du Dictionnaire de Davies de la London Mission Society
du début du XIXe siècle et qu’il a liés au vocabulaire contemporain. Il
s’est appuyé enfin sur les nombreux écrits des premiers découvreurs.
Tout cela lui a permis d’être attentif aux variables et aux invariants de la
manière d’être et de penser tahitien.
C’est alors seulement qu’il a mené ce qu’il nommait ses psychodiagnostic interviews, en particulier à Papeete et à Huahine – au moment
même la modernité bouleversait la société et la culture des îles.
Robert Levy a écrit ainsi sinon la bible de la psyché tahitienne, du moins une
fascinante et précieuse étude de la représentation du corps, des sentiments,
N°298 • Septembre 2003
des émotions et de soi, du besoin de se définir et
d’être reconnu et de tous ces liens qui se tissent avec
ce qui se passe autour de soi – inclusif et exclusif…
Après ses Tahitians, mind and experiment in the
Society islands, R. Levy a changé radicalement
d’horizon et même d’altitude. Mescosm, Hinduism
and the organisation & of a traditional Newar city
in Nepal est l’étude du cosmos culturel d’une communauté de la vallée de
Katmandou, « peut-être le livre
le plus important publié sur
l’Asie de Sud depuis homo hierarchicus de Dumont » ou
comment peuvent exister et
évoluer les formes religieuses
traditionnelles (de l’hindouisme) et l’urbanisation
moderne, en de nouvelles
formes de représentation
d’un nouvel ordre symbolique. Il avait beaucoup apprécié alors le
Tintin au Tibet que nous lui avions offert et qui était très fidèle
à ce qu’il avait pu voir dans les montagnes himalayennes.
Nous nous étions rencontrés dans les montagnes tahitiennes et autrichiennes — le charme de l’homme et de sa conversation, son extraordinaire curiosité et ce qu’il faut bien nommer sa culture à la fois si
méthodique et si éclectique, son amour pour la musique, la poésie et la
peinture manqueront désormais à jamais.
A son épouse Nerys, la Société des Etudes océaniennes présente toute sa
sympathie.
Robert Koenig
63
COMPTE-RENDU D’OUVRAGE
Sahlins, Marshall, 1985, Des îles dans l’Histoire, Hautes Etudes,
Gallimard, Le Seuil, Paris, 189 p., Traduction de Islands of History,
University of Chicago Press, 1985.
J’ai toujours été défavorable à l’édition de traductions de l’anglais. En ce
siècle de communications de plus en plus rapides et où l’anglais domine, les
chercheurs se doivent de pratiquer cette langue et de ne pas être réduits à
se pencher sur des traductions toujours aussi approximatives aux points
essentiels. Trop de mots et d’expressions sont en réalité intraduisibles en
français. Et encourager les étudiants à ne pas faire l’effort de lire l’anglais
dans le texte est tout simplement s’assurer de générations de chercheurs de
médiocre qualité, parce qu’ils n’auront pas acquis les instruments intellectuels nécessaires, que la littérature spécialisée en français ne peut leur
apporter seule.
Le choix des ouvrages à traduire n’est souvent pas le bon. Malgré la
notoriété ambiguë de l’auteur, celui-ci ne valait pas la peine d’être publié en
français. Le nombre d’erreurs de méthode, et d’erreurs tout court, y est
inhabituellement élevé. La critique de cet ouvrage sera fondée sur une expérience longue (plus d’un demi-siècle) de la Mélanésie orientale, dont celle
des îles Loyalty, où les sociétés apparaissent comme les plus proches des
descriptions classiques des sociétés fijiennes et de Polynésie occidentale, et
sur une connaissance personnelle de Fiji et de la Polynésie orientale.
Cette étude, structurée en trois essais, se veut pour une grande part une
océanisation et une modernisation des idées de sir James Frazer sur le roi
divin. Le titre ne concorde pas avec le contenu. Il n’est pas le moins du
monde question d’Histoire, c’est-à-dire de faits vérifiables, mais d’interprétations d’événements dont l’historicité est prise dans l’acception la plus
large, sans la moindre critique des sources, ni même tentative d’établir quel
a été l’événement.
Le problème de l’auteur n’est pas de démontrer, mais d’affirmer une interprétation ne souffrant aucune contradiction, et pour cela justement ne se
référant pas à des données pouvant nourrir une démonstration scientifique.
64
N°298 • Septembre 2003
Les textes hawai’iens sont utilisés en
traduction anglaise et pas à partir du texte
original, ce qui rend l’opération problématique, tant les traductions disponibles
à ce moment-là étaient encore pénétrées
d’interprétations romantiques ou poétiques à la mode occidentale. Ces traductions
auraient dû être revues et
vérifiées mot à mot, avant
toute tentative de ce genre. Marcel Mauss s’imposait personnellement cette
discipline, qui n’a pas fait
école ici.
L’ouvrage débute par ce
qui se veut une analyse
renouvelée de la royauté
hawai’ienne. Là, les questions
de méthodologie fusent à
chaque pas. L’auteur néglige
entièrement le fait que les textes hawai’iens classiques, sur
lesquels il se fonde, et qui sont
aussi extraordinairement intéressants qu’attachants, ont tous été rédigés
par des auteurs proches de la cour des Kamehameha, et sont de ce fait déjà
colorés par la réinterprétation du passé hawai’ien dans un contexte de
contact européen brutal et de christianisation de la deuxième génération. La
Mission protestante américaine avait partie liée avec la cour royale, de
même que les gens formés par elle et qui sont les auteurs des textes en
cause.
Le même phénomène s’est produit un siècle plus tard à Tonga, où les
anthropologues ont longtemps décrit la société tongienne du seul point de
vue de la dynastie des Tubou.
Parler de royauté hawai’ienne en empruntant de fait le concept aux missionnaires, et tout autant aux Kamehameha qui l’ont utilisé pour manipuler
les Occidentaux à leur profit, consiste en quelque sorte à faire ses choux
gras de formes intéressées du romantisme du XIXe siècle transporté dans
le Pacifique Nord. C’est remplacer l’analyse méthodique et précautionneuse
par un souci prédominant de la formule, de formules peu originales en définitive, puisqu’empruntées à Frazer.
65
Une autre faute grave, bien mise en évidence par la regrettée Annette
Weinert dans un compte rendu de la revue Oceania, consiste à fermer à demi
les yeux sur des sociétés où l’on sait que les femmes pouvaient y jouer des
rôles politiques de premier plan. Le fameux mariage incestueux hawai’ien en
est la démonstration, puisque l’épouse était alors l’égale absolue de son
époux, en mana émanant de sa personne, de par sa naissance, et en importance du tapu qui la protégeait. Cette égalité politique des sexes, au rang le
plus élevé, n’est que la conséquence d’une tendance présente partout dans
la région, où les hommes tiennent le discours politique, mais n’ont jamais
seuls le privilège de la décision, et souvent pas du tout, selon la naissance,
si leur épouse est une fille première-née, même si d’aventure ils prétendent
le contraire. L’écriture de Sahlins passe ce fait sous silence, comme s’il était
lui aussi sous l’influence des missionnaires qui désapprouvaient cette liberté
féminine. Robert-Louis Stevenson était de ce point de vue mieux informé
que lui.
La partie hawai’ienne de l’ouvrage nécessiterait, pour la critique et à
chaque phrase, un gros appareil de notes et de commentaires, de l’ordre en
volume de l’ouvrage lui-même. Cela se fera de soi-même, tant le discours
apparaît en dehors du temps, proposant une utopie qui n’a d’hawai’ienne
que le nom.
Le chapitre portant sur Fiji est plus évidemment artificiel, nourri de références constantes à la Rome antique et aux thèses de Dumézil. Ce dernier
s’étant fondé, au point de départ de son analyse, sur les populations du
Caucase de tradition linguistique indo-européenne, on se demande ce qu’il
vient faire là et par quelle extraordinaire imprudence méthodologique
Sahlins se lance dans un tel pot-pourri.
L’intronisation du “roi”
Parmi les affirmations les plus inattendues pouvant être relevées, on
peut citer celle qui prétend établir que l’intronisation du Tui Nayau, chef prééminent des îles Lau du Sud à Fiji, en l’espèce le père de Ratu Sir Kamisese
Mara, précédent président de la République de Fiji, et alors premier ministre,
comporte le simulacre de l’empoisonnement du roi avant de le sacraliser.
Cette information inédite proviendrait en partie du carnet de notes d’un
anthropologue anglais présent, mais le texte même de ces notes n’est pas
fourni. La description de l’événement est donnée en fin d’ouvrage.
Une telle affirmation aurait dû poser problème à l’auteur. En effet, malgré
les déclarations des missionnaires, à la recherche constante de péchés à
imputer aux païens, et d’un nombre incommensurable de déclarations
66
N°298 • Septembre 2003
d’Européens coloniaux, il n’apparaît nullement certain que les Océaniens
aient eu la connaissance des poisons végétaux, ni qu’ils en avaient le
concept, sinon pour étourdir les poissons (technique de connaissance masculine) ou pratiquer avortements et stérilisations (techniques de connaissance féminine), alors qu’Asiatiques et Européens l’appliquaient si facilement à la solution des querelles dynastiques.
Le mot “ poison “, dans sa version anglaise, a été introduit au début du
XIXe siècle pour qualifier la “sorcellerie”, d’apport extérieur (apportée par les
équipages lascars des navires de la Compagnie britannique des Indes orientales), et non le poison végétal classique. Les flèches dites empoisonnées,
là où elles le sont, sont trempées dans des cadavres en putréfaction et agissent ainsi par le recours à des toxines animales.
Le mot poison est passé ainsi dans le vocabulaire utilisé vis-à-vis des
Blancs, accompagné de cette ambiguïté. Ce n’est pas le seul vocable qui
puisse ainsi induire en erreur l’observateur non averti d’un tel piège.
Hocart, s’il a parlé d’empoisonnement, a lui aussi été trompé par ce vocable. Chercheur remarquablement intelligent et bien informé, ce n’était pourtant
pas un anthropologue partageant la vie quotidienne des gens, et sa dépendance par rapport aux mots utilisés par ses partenaires fijiens était totale. D’autant
que, fonctionnaire colonial, il avait connaissance des textes répressifs prévoyant justement des peines de prison pour les cas d’empoisonnement et de
sorcellerie, textes repris tels que de l’arsenal judiciaire d’autres colonies de la
Couronne, ce qui ne le portait pas au doute. Comme dans tous les autres cas,
ses informations doivent être confrontées ici à ce qu’on a appris depuis de
sociétés beaucoup plus fluides qu’on ne l’imaginait alors 1.
Peu de gens de sa génération, en dehors de l’explication psychologique
de la baisse démographique, explication favorisée par W. H. Rivers, se sont
posé le problème de l’existence réelle d’empoisonnements dont la réalité ne
pouvait être démontrée. Il n’y a pas de cas d’analyse de viscères d’un
Océanien, et l’on sait d’ailleurs la valeur très relative des moyens de vérification de l’époque. Comme pour la sorcellerie, le dossier de l’empoisonnement en Océanie est fait d’accusations, jamais de certitudes.
Les cas connus ces dernières décennies, en Nouvelle-Calédonie ou au
Vanuatu, d’empoisonnement, ont utilisé des molécules chimiques d’introduction européenne (insecticides pour des meurtres, Nivaquine pour des
suicides).
1 Un des plus lucides de l’époque, Hocart nous présente un discours constamment normatif et hors du temps.
Ses informations doivent donc être réanalysées, lieu par lieu, de façon à rétablir une présentation diachronique
dans toute la mesure du possible, le XIXe siècle fijien étant une période de compétition politique intense utilisant les moyens matériels apportés par les Blancs, et où les informations étaient toujours livrées dans un
contexte de rivalités. On ne saurait les reprendre telles quelles à la seule intention de nourrir un argument.
67
Dans le cas des îles Lau, on se demande ce qui a pu amener pareille
interprétation. Une hypothèse explicative, proposée prudemment, se fonde
ici sur une expérience personnelle de la différence entre les effets physiologiques du kava consommé vert, et celui de la racine sèche, dont l’usage sera
privilégié par la Mission méthodiste depuis les débuts de son implantation.
La consommation de la racine verte s’est maintenue à Fiji en dehors de
la zone contrôlée par l’administration britannique et de celle des chefferies
ayant passé un accord politique avec la Mission au milieu du siècle dernier.
Il est concevable que, pour une intronisation, on ait continué à recourir au
breuvage ancien, non influencé par les pressions blanches et qui avait pu
conserver une valeur de sacralisation et de lien avec le monde des morts
divinisés, et que des témoins aient interprété l’état de stupeur temporaire
provoqué par l’ingestion de kava vert, ou la description imagée de cet effet,
comme un empoisonnement devenu symbolique par la grâce de l’anthropologue. Cet état second (l’engourdissement saisit le patient au bout de vingt
minutes, le sommeil s’installant dans l’heure qui suit) pourrait être interprété
comme amenant personnellement le nouveau chef à entrer en contact avec
ses ancêtres afin de recevoir leur bénédiction, ce qui un peu partout une des
fonctions essentielles de boire le kava à la tombée de la nuit…
À la page 104, Sahlins confirme implicitement ce point de vue par une
analyse cursive du terme utilisé pour décrire l’état dans lequel on peut être
mis par l’ingestion du yanggona (kava) vert, à savoir le mot mate, et non
mateni, ni étant la marque du génitif. Ce terme est pratiquement universel
en Océanie (mac, mec, etc.). Il signifie non la mort, mais un état différent de
la norme physiologique, et tout état de maladie, le sens spécifique de mort
étant apporté par la postposition d’un qualificatif supplémentaire indiquant
l’achèvement, hors la présence duquel la traduction proposée par Sahlins
constitue un contresens. Il ne s’agit ainsi là en aucune façon d’un empoisonnement, ni dans la réalité, ni conceptuellement2.
À la page 103, mâcher la racine de kava préparée pour l’intronisation
d’un chef est transformé par Sahlins en rite cannibale de manducation d’un
jeune enfant. L’idée que ce kava soi-disant empoisonné ait poussé sur le
corps d’un jeune enfant lépreux n’est pas acceptable. La lèpre est d’introduction récente à Fiji, à partir de la venue, à la fin du siècle dernier, de travailleurs
chinois de la région de Canton. Elle n’a aucune existence traditionnelle et ne
peut être utilisée pour l’interprétation de rites d’intronisation anciens. Cook a
désigné l’île d’Aoba, au nord Vanuatu, comme l’île des Lépreux, uniquement
sur la base de la couleur claire de la peau de ses habitants.
2 Cf. le Do Kamo de Maurice Leenhardt (Gallimard, 1947), qui insiste sur la différence des deux états de ce
vocable : maladie et non mort, puis mort en achèvement de la maladie.
68
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Un autre aspect du sophisme du discours portant sur la royauté divine
océanienne relève d’une remarque aussi simple que fondamentale. Il n’y a
pas que les “rois morts” qui seraient “divinisés” en Océanie. Tous les morts
le sont, comme l’a établi Codrington à la fin du siècle dernier pour le nord
du Vanuatu et les îles Salomon et plus tard Leenhardt pour la NouvelleCalédonie, ainsi que Malinowski pour les îles Trobriand et Fortune pour les
îles de l’Amirauté. Par conséquent l’argument premier de l’ouvrage perd tout
fondement.
Le chef ne fait que bénéficier des privilèges de tout le monde. Toutes les
têtes d’aînés, de tout lignage et quel que soit son rang, sont sacrées, c’est-àdire ne sauraient être touchées, sans différence particulière entre les cas, sinon
au travers du renforcement par la théâtralisation de ce qui touche au chef.
À la page 91, Sahlins fait état, comme d’une découverte de première
importance théorique, de l’usurpation devenant le principe de légitimité.
Avec le pragmatisme né de vingt années de contact constant avec un terrain
parcouru à cheval dans tous les sens, Maurice Leenhardt se référait, pour
expliquer le phénomène, évitant de parler d’usurpation et de légitimité,
concepts juridico-politiques occidentaux utilisés pourtant avec enthousiasme par les missionnaires de toutes obédiences il y a un siècle et demi, au
modèle fourni par les mythes où le cadet pouvait être plus intelligent que
l’aîné et de ce fait préféré à ce dernier par la faveur populaire3.
J’ai décrit le cas de la chefferie Nejê de la basse vallée de Houaïlou, où
la lignée cadette avait pris le dessus, la lignée aînée réduite à bouder dans
un coin sous un autre nom, ne cessant de protester sans effet contre l’injustice qui lui avait été faite. Le même cas se présente à la chefferie du pays de
Gaica, dans l’île de Lifou, où l’opposition récente au cadastre des terres du
village de Hapetra était directement liée à à la présence d’une ancienne
lignée aînée ayant perdu la chefferie et se voulant autonome, après que son
ancêtre a été vaincu au cours d’une amorce de guerre civile pour tenter de
maintenir ses droits.
Le mythe fondateur de la chefferie Bula du pays de Lösi, dans la même
île, expose que ce sont les lignées aînées qui ont perdu la “grande chefferie”,
au profit d’une lignée cadette, parmi les cinq chefferies (autant que les
doigts d’une main), dont les ancêtres étaient deux sœurs, les lue jajiny,
comme les deux sœurs à l’origine de la chefferie d’Omarakana aux îles
Trobriand.
3 Cf. Maurice Leenhardt, 1947, Do Kamo, p. 85 ss. pour l’étranger choisi comme chef, et Guiart, 1963,
Structure de la chefferie en Mélanésie du Sud aux chapitres traitant des îles de Maré, Lifou et Ouvéa, et les
chapitres complétés sur Ouvéa et Lifou du même titre réédité en 1992.
69
Le pays de Wetr, dans la même île, comporte la tradition du meurtre d’un
“grand chef” par Sineweny, dont la lignée aurait été maudite de ce fait et qui
se serait éteinte sans descendance. La vérification apporte la surprise que
les descendants de Sineweny se retrouvent dans un village proche, ayant été
simplement obligés de changer de nom. La lignée aînée de la chefferie a été
de même obligée de s’exiler au pays de Gaica, à Hapetra, changeant aussi
de nom, la position de chef suprême du pays ayant été attribuée à un cadet
qu’on est allé chercher auprès la chefferie Aju au pays de Fayawe sur l’atoll
voisin d’Ouvéa, chefferie elle-même originaire de Lifou selon sa tradition
propre. L’historicité des événements relatés apparaît donc très incertaine, la
seule part objectivement confirmée de la tradition étant faite des déplacements dans l’espace et des changements de noms. Le meurtre n’a créé
aucune légitimité, pas plus qu’il n’est remémoré au cours des cérémonies
d’intronisation de la chefferie Sihaze, parce que cela porterait malheur.
La tentative présentée comme encore plus ancienne, des mêmes lue jajiny passées ensuite à Lösi, de se faire reconnaître la chefferie sur le pays de
Wetr, se serait aussi traduite par un déplacement dans l’espace en conséquence de son échec.
On peut mettre ainsi bout à bout toutes les chroniques de succession
des chefferies océaniennes, et pas seulement polynésiennes. On rencontrera
tous les cas possibles et l’on pourra mettre en évidence toutes les oppositions structurales logiquement envisageables : étranger (et donc mariage
uxorilocal)/autochtone ; cadet/aîné ; descendance d’un ancêtre masculin/
descendance d’une femme ; meurtre ou exil du titulaire/adoption d’un
enfant ou d’un adulte par une lignée en déshérence ; descendance privilégiée d’une épouse plutôt que d’une autre, etc. L’exil effectif d’une lignée
accompagnée du changement de nom traduit commodément le meurtre
symbolique du premier titulaire.
L’image complexe offerte par Sahlins pour légitimer les “rois divins” qu’il
pense exclusivement polynésiens, par une vision simpliste au possible de la
Mélanésie, celle de la création première d’un chaos, d’un désordre originel,
avant de pouvoir créer à nouveau l’ordre au profit d’une nouvelle lignée, est
d’une inspiration philosophique de Bas Empire romain.
Cela n’a rien à voir avec la conception océanienne de la société, qui n’envisage jamais le désordre, mais des ordres successifs établis pour maintenir
la paix dans le périmètre géographique et social concerné (les systèmes différents destinés au maintien d’une situation de paix sont fort divers et nullement exclusifs les uns des autres). Ces ordres successifs sont présentés
en séries de plus en plus complexes, tenant compte à chaque fois de nouveaux facteurs sociaux (arrivée d’immigrants, lignées se segmentant en
deux ou en trois branches autonomes). Les nouveaux venus peuvent être
70
N°298 • Septembre 2003
intégrés au sommet, comme chefs, mais avec des pouvoirs considérables
maintenus aux lignées anciennes sous différentes formes (spécialisations
assumées de façon autonome, liens avec le monde de l’au-delà), soit placés
au centre, soit à la base ou encore en les situant aux marges du système en
place, mais alors aussi en position autonome.
Le remplacement d’un ordre par un autre a été entrevu par le R. P.
Dubois pour l’île de Maré, par ce qu’il désigne du nom de “massacre des
Elètok”, ces derniers étant les maîtres anciens de la terre tués par les immigrants de façon à se saisir de leurs terres. Or ces Elètok ont parfaitement
survécu. On les retrouve ailleurs, ayant eux aussi changé de noms, mis dans
l’obligation de ne plus se réclamer de leurs “patronymes” et de leur statut
social premiers.
Le sort dévolu aux plus anciens habitants d’une île, ou d’une vallée dans
une grande île, se révèle extrêmement variable, épuisant toutes les variantes
logiques concevables. Le seul moyen de les mettre en évidence est de se
pencher sur les plus petits détails concevables, de façon à voir surgir des
matériaux le véritable système local dans son fonctionnement concret, et
pas une norme sociale affirmée globalement, et qui pourrait ne pas avoir
d’existence ailleurs que dans le discours imaginé au bénéfice de l’enquêteur.
Pour aboutir à connaître la réalité empirique, il n’est d’autre moyen que de
conjuguer une couverture généalogique avec un relevé foncier parcelle par
parcelle. Ce que j’ai réalisé en quelques points de l’espace mélanésien, mais
que bien peu d’autres ont entrepris.
Le contresens fondamental de Sahlins est de comparer le Latium antique
à la Polynésie, c’est-à-dire une économie fondée sur la culture de plantes
sexuées, les céréales, permettant de disposer de surplus alimentaires et
donc de stocks pour lesquels la société doit imaginer les moyens de leur
gestion, avec une situation insulaire fondée sur une agriculture de légumes
racines, produisant des clones de tubercules ne se conservant à l’air libre
que quelques jours (le taro, qui se conserve plus longtemps dans le sol et
dont la culture est répartie tout au long de l’année), ou quelques mois pour
des cultures saisonnières (les diverses variétés d’ignames).
À la page 96, Sahlins fait de son roi de la mer, qui est non seulement un
étranger, mais un homme venu de Tonga, un “cannibale”, alors que les
populations installées, i taukei ou i vanua, ne le seraient pas. Rien ne dit que
les habitants des îles des Amis, qui n’avaient pas plus que d’autres le
respect de la vie d’autrui, ont été cannibales, en dehors des affirmations
répétitives des premiers missionnaires, venus dans le Pacifique avec cette
idée bien ancrée. Les Océaniens aiment assez à faire passer des frissons dans
le dos de leurs interlocuteurs européens et leur raconter des histoires d’anthropophages. J’ai vu Ratu Mara, plus jeune, s’y amuser en public. Cette accusation de cannibalisme des autres était une tradition au Moyen-Âge vis-à-vis
71
de toute nation vivant au-delà des frontières de l’Europe connue. Elle est
devenue une institution coloniale permanente.
L’affirmation, à la page 87, de la connotation divine du double statut de
guerrier victorieux et de cannibale renvoie en fait aux nombreuses traditions
d’un ogre dépeuplant une île et tué par un héros civilisateur qui ramène à la
vie les hommes et femmes mangés par lui. Sahlins ne sait pas que ces ogres
peuvent aussi être partiellement des héros civilisateurs et de façon parfaitement positive, ou que sous le même nom, ils peuvent être ogres ici et pas
là. Les ogres ou non ogres de la tradition relèvent chacun de l’appropriation
par une lignée implantée localement et ont chacun, qu’ils soient ogres ou
non, un autel où l’on vient leur déposer des offrandes au moment des prémices de la récolte d’ignames.
Toutes les nations du monde racontent à leurs enfants que les guerriers
ennemis sont des ogres. On le disait des Allemands à partir de 1870, ce qui
n’a pas empêché que mon père nouveau-né se fît donner le biberon par un
soldat wurtembergeois qui avait pris ses quartiers chez mes arrière-grandsparents. On dira de même aux îles Lau que les Tongiens vainqueurs sont des
ogres.
Mrs Hadfield, épouse de missionnaire, a parlé de l’ogre Cainyö, dans le
pays de Gaica à Lifou. Il s’agissait en réalité de la lignée des Api Cainyö,
lignée s’affirmant guerrière, c’est-à-dire chargée de protection physique de
la chefferie Zeula, et relevant de la descendance du même ancêtre
Wawanama. L’ogre est ici, comme aux Fiji, une image de la valeur guerrière
imposant la crainte à l’adversaire (Hadfield, Emma, 1920, Among the
Natives of the Loyalty Group, Macmillan, Londres).
Pour Fiji, comme pour Hawai’i, Sahlins traite de l’ensemble de l’archipel
comme s’il constituait un tout cohérent, ce qui est une position méthodologiquement ancienne, remontant aux années vingt, et ne tenant aucun compte de la démonstration constante, partout, que l’on n’est jamais qu’en présence de variantes localement implantées, liées logiquement dans ce que
Claude Lévi-Strauss appelle un “système de transformations” et qui contient
plus ou moins toutes les formes concevables, opposables les unes les autres, d’une institution, d’un mythe, etc. Cela permet à l’auteur de transférer,
sans le dire expressément, un “trait culturel” de tout point de l’archipel à une
vision globale constituée par des choix dont les critères scientifiques ne
sont pas apparents. C’est là l’erreur méthodologique de nombreux spécialistes des années de l’entre-deux guerres, erreur à laquelle Maurice Lenhardt
n’a pas échappé, sous la pression de Marcel Mauss — ce dernier traitant
déjà les Inuit comme un tout cohérent — pas plus d’ailleurs que les auteurs
discourant alors sur la culture maorie de Nouvelle-Zélande.
72
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À la page 96 aussi, Sahlins relève à bon droit l’opposition entre le chef,
personnalisation fréquente du monde masculin — du moins quand ce n’est
pas une femme qui assume la chefferie, ce qui arrive plus souvent qu’on ne
le dit, en particulier en Polynésie — et les longueurs extraordinaires d’étoffe
d’écorce battue, masi, sur laquelle il marche au cours de son intronisation,
étoffe qui est l’œuvre des femmes. Mais il ne dit pas que le même privilège
est réservé aux jeunes époux, ce qui change la portée de son discours. Il
oublie de rappeler que toute la vie sociale est structurée par des comportements techniques sexués et présentés comme complémentaires, y compris
les gestes fondamentaux de la vie agricole, en plus du fait qu’un nombre
important d’objets fabriqués constitue le mariage d’éléments fabriqués par
les femmes à partir de matériaux apportés par les hommes, ou vice-versa.
À la page suivante vient s’inscrire un passage imaginatif où le neveu utérin devient dieu parce qu’il aurait le privilège de manger les offrandes réservées à la divinité protectrice du groupe de son oncle maternel.
L’interprétation est celle de l’auteur. Aucun texte fijien ne vient la soutenir.
Manger les offrandes présentées aux dieux et aux morts divinisés est fréquent dans la région. On offre aux personnages issus du monde invisible,
ceux dont on a le droit de demander la présence et celui de s’adresser à eux,
qui n’ont pas de corporéité matérielle et solide, et dont les aliments sont tout
autres (à savoir ce que les humains ne sauraient manger : des lézards, des
roseaux, des excréments, des racines sauvages non comestibles), une
image de la prospérité alimentaire de leurs descendants (prospérité due à la
bénédiction des dieux et des morts), puis on mange tranquillement cette
nourriture entre ceux qui en ont le privilège, hors la présence des femmes.
Cette manducation a lieu après cuisson sur place, dans la maison des
hommes, et aucune part n’est apportée aux familles à l’extérieur. La nourriture mise à la disposition d’une divinité et à laquelle nul ne touchera est celle
placée à son autel au moment des rites des prémices de la récolte de l’igname. Elle consistera, selon les îles, en un tubercule ou un coq blanc attaché
par les pattes, posé sur une pierre et qui sera laissé là.
Dans le premier cas, l’affaire se place au jour de l’appel des morts, en
novembre, dix jours après l’arrivée du palolo (Centre nord du Vanuatu,
Polynésie occidentale) ou de la floraison des érythrines (NouvelleCalédonie). Dans le second, c’est en avril ou mai, selon la latitude. De quel
rite s’agit-il ? Quelle est l’offrande censée être mangée par le neveu utérin
fijien, par extension du droit de vasu ? Cela s’expliquerait facilement dans
le premier cas. Dans le second, on serait obligé de mettre en doute la valeur
de l’information.
Le seul auteur fijien traité de brillant et cité, fugitivement, dans le texte,
est Rokowaqa, dans une écriture normative qui est celle spontanée des
auteurs océaniens (les auteurs blancs ne leur ont jamais enseigné d’autre
73
façon d’écrire), et qui nous dit que : “tous les clans royaux sont d’ascendance féminine”. Outre qu’ici le terme “royal” est un faux-sens évident pour
traduire un terme fijien, Sahlins pourrait se souvenir que Malinowski avait
montré que les chefferies des Trobriands étaient d’ascendance féminine, de
même que celles du pays de Lösi à Lifou, de même que tant de chefferies
polynésiennes, répondant à la place privilégiée des filles premières-nées
dans les généalogies de la région. Mais Sahlins préfère nous renvoyer au
Latium d’avant la république de Rome.
L’image du peuple ancien comme constituant les “aînés”, et des lignées
de chefferies comme les “enfants” de ces derniers, n’est pas que fijienne.
Elle fait le tour des discours cérémoniels dans l’ensemble du Pacifique Sud,
au moins dans les sociétés côtières, celles qui ont si souvent bâti des systèmes complexes pour accommoder des partenaires de différentes origines.
Comme la tradition de la venue du chef Hwenegei à Ouvéa (Iai), le mythe de
fondation de la chefferie Hnaisilin sur l’île de Maré comporte une variante
présentant l’ancêtre comme un bel enfant, à la peau claire, venu de l’intérieur
de l’île se promener au bord de mer. Celui de la chefferie Bahit au nord
d’Ouvéa décrit ses ancêtres comme des enfants sortis d’une grotte.
La phrase : “La relation est celle d’enfant à ancêtre telle qu’elle a été
instituée par le don d’une femme” consiste à enfoncer une porte largement
ouverte. Les relations sociales entre groupes se fondent depuis toujours sur
des échanges de femmes, qui peuvent se transformer en échange d’hommes quand le mariage est, ou se transforme en, mariage uxorilocal.
L’étranger s’installe partout en épousant sur place. Cela n’a rien de spécifiquement fijien, ni même d’Océanien. Les Européens le pratiquent entre eux
depuis des lustres. De plus, il n’existe jamais de preneurs de femmes qui le
soient exclusivement. Le B, A, BA de l’anthropologie est que chaque groupe
est tour à tout preneur et donneur de femmes, puisqu’à la femme prise doit
théoriquement correspondre, immédiatement (pour le mariage avec échange de sœurs si souvent privilégié), ou à une génération suivante, une femme
donnée.
Sahlins ne semble pas imaginer le rôle potentiel des filles premièresnées, ni leur capacité de choisir elle-même leur époux, se lançant dans des
aventures où l’étranger pouvait tirer profit, parce qu’il était porteur d’un
mystère et d’un prestige particulier et nouveau. Les Européens établis au
XIXe siècle sur les côtes du Pacifique Sud ont largement bénéficié de cette
ouverture. L’étranger n’a d’ailleurs pas toujours le choix. On a vu en 1943 les
jeunes femmes célibataires de l’île de Makura, au Vanuatu central, placées
devant l’équipage d’une pirogue de Tikopia qui avait dérivé jusque-là, se
réunir entre elles et se partager les quatre jeunes hommes de l’équipage,
une fois ceux-ci remis sur pied par des soins attentifs.
74
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Sahlins suit constamment une ligne analytique ancienne, privilégiant les
comportements aristocratiques — les autres étant censés ne pas présenter
d’intérêt — et de ce fait incapable de comprendre les déclarations au deuxième degré. Il prend les mots dans leur valeur absolue, si tant est qu’ils en
aient une, alors qu’ils sont constamment déclinés accompagnés de possessifs postposés. Les formes absolutives existent, mais elles sont rares et il ne
les connaît pas.
Le chef qui affirme que les noms successifs des diverses divinités territoriales, pages 97-98, et dont les desservants appartiennent aux lignées
établies sur place avant la sienne, et avec lesquelles ses ancêtres se sont
intermariés pour justifier leur établissement sur place, sont aussi ses noms,
ne fait que manifester une pratique constante. Les noms des personnes, des
lieux-dits et des dieux s’organisent en systèmes parallèles et complémentaires, à divers niveaux de complexité et de confidentialité, et sont utilisés
comme synonymes les uns des autres dans le langage poétique et cérémoniel. Cela n’a rien de spécifiquement fijien. Douglas Oliver, entre autres, l’a
montré pour les Siuai de Bougainville, A. Elkin pour les Dieri et le Kimberley
australien, moi-même pour les îles Loyalty, la Nouvelle-Calédonie et une
bonne part du Vanuatu. La même démonstration, à peu de choses près, a
été faite par A. Bensa et J.-C. Rivierre dans leurs Chemins de l’Alliance.
À partir du moment où il y a territorialisation des dieux, ce que l’école
anglo-saxonne d’anthropologie sociale a montré en Océanie dès avant 1945,
révérés chacun en un point précis par un “prêtre” appartenant au groupe
assumant le droit privilégié aux lieux cultuels et aux lieux sacrés cités dans le
mythe4, la superposition des noms de divers ordres fait partie intégrante du
personnage bénéficiant de la primauté cérémonielle. On pourra s’apercevoir
dans un second stade que le même chef est parfaitement impuissant à mobiliser le pouvoir du dieu sans passer par les desservants qui équilibrent ainsi
à leur profit son pouvoir théorique (cf. à Fayawe d’Ouvéa, la relation complexe, et jamais directe, entre la chefferie Hwenegei et le dieu Kong Hulup, qui
lui-même s’identifie au dieu Apubwakwè de Canala sur la Grande Terre voisine), alors que Sahlins interprète cette situation comme renforçant le pouvoir
4 Le terme de “mythe de fondation”, ou “mythe fondateur”, se révèle comme étant impropre, le sens de ce
vocable impliquant qu’il soit antérieur à l’institution dont il relate l’origine. L’anthropologie britannique et australienne de l’entre-deux guerres avait la conscience claire que ces mythes avaient été inévitablement forgés
après la fondation et la marche de l’institution, pour la justifier, et qu’ils n’en étaient pas un modèle antérieur
que celle-ci illustrerait. Il n’y a aucune raison scientifique de changer là de point de vue, cf. en particulier la
collection du périodique Oceania, publié à Sydney sous l’égide de Radcliffe-Brown, puis d’Augustus Elkin.
Le mythe du héros civilisateur Roy Mata, sur Efate au Centre Vanuatu, a été montré par J. Garanger comme
ayant une origine historique. Il a donc été construit après la mort de l’intéressé, l’institution du mariage indirectement matrilinéaire, confirmée par un système d’appartenances symboliques tirées de la part de la nature
environnante utile ou domestiquée, ayant été mise sur pied avant la construction de ce mythe, et non après,
cf. Garanger, 1972, Archéologie des Nouvelles-Hébrides, Contribution à la connaissance des îles du Centre
et J. Guiart, et alii, 1973, Systèmes des Titres aux Nouvelles-Hébrides du Centre, d’Efate à Epi.
75
du chef. Une trop faible expérience du terrain (quatre mois sur Moala)
explique cette prise au sérieux des envolées déclamatoires, lesquelles ne traduisent jamais un système figé de droits et de devoirs, mais des situations
fluctuantes nécessitant, pour être interprétées, une connaissance approfondie de la situation locale au cours de plusieurs générations successives.
Le privilège du lien avec les personnages hantant l’au-delà est réservé à
Lifou aux alalu (ceux qui vont par deux), dits aussi tren adro (ceux qui se
tiennent debout sur la terre), privilège qui les rend “dangereux” à fréquenter
(cérémoniellement du moins). Leurs offrandes d’ignames ne sauraient
pénétrer directement à la chefferie, à la cour d’Angajoxu (les : collectif ;
chefs) — cour dite hag, entourée d’une palissade monumentale constituée
de troncs imputrescibles entiers accolés — mais doivent passer par l’intermédiaire de chefferies particulières dites angatresi (angatr sine haze, hommes, côté, dieux), dont on dit dans une première approximation qu’elles
contrôlent les divinités de la terre.
On s’aperçoit à l’expérience que le discours normatif affichant un certain
mode de prestige et d’autorité affirmés recouvre une réalité assez différente.
Les prêtres de chaque divinité n’agissent à son autel dans le sens désiré que
s’ils le veulent bien. La “grande chefferie”, angajoxu (doku hmaiai à Maré, than
in than à Ouvéa) peut se heurter à ce niveau à une impossibilité si elle prétend
imposer sa volonté. Elle doit prévoir et négocier, ce qui se fait par intermédiaires, les angatresi (Lifou) et les acania (Maré) étant là pour cela. Les hiérarchies
apparentes comportant dans le langage déclamatoire la captation à leur profit
des dieux anciens ne correspondent qu’à une très faible part de la réalité. La
chefferie peut se prévaloir de la possibilité d’un désir respecté en cascade, du
sommet vers le bas apparent, si elle agit en tant que porte-parole d’un consensus reconnu. Sinon, c’est l’inverse qui se produira et l’on viendra éventuellement en cortège rappeler au chef la réalité de sa fonction : “Qui t’a fait chef ?”
Une illustration de cet état de choses sera la christianisation du pays de
Wetr à Lifou, qui s’est réalisée majoritairement sous la houlette des pasteurs
samoans de la London Missionary Society, et à l’appel de l’atresi (pluriel et
de respect : angatresi) Upinu Waleweny, à la suite d’une vision, contre la
volonté exprimée de la grande chefferie Sihaze.
La “guerre civile” du pays de Lösi (1848-1852), dans la même île, entre
les chefferies dites angete Lösi de la côte sud et les chefferies angahaetra
(aînées) de l’intérieur et de la côte orientale, retardant de plus de quatre
années la conversion de l’ensemble du peuple, se traduira par une diminutio
capitis du pouvoir de l’angajoxu Bula sur l’ensemble du pays. Les chefs dits
Bula (parce que descendants de Wahemunemè, le cinquième fils des lue
janiny par la sœur cadette), tenteront de compenser cette usure géographique de leur pouvoir par des moyens indirects : envoi de lignées cadettes
s’établir aux frontières du district, en particulier à Hnase, et l’acceptation au
76
N°298 • Septembre 2003
site de la chefferie, à Mou, d’autres lignées cadettes venues représenter les
chefferies aînées, établies sur le plateau intérieur, dont elles dépendaient.
La résistance de ces chefferies angahaetra continue à se manifester par
toutes sortes d’incidents, dès lors qu’un chef Bula, souvent dans sa jeunesse, imagine d’imposer directement son point de vue par l’application d’une
vision occidentalisée de son pouvoir théorique. Certaines chefferies aînées,
en particulier celles des Xetriwaan d’Inangoj et de Wasany, se sont enfermées dans une indépendance sourcilleuse et pour cela sont devenues catholiques, comme les chefferies Sihaze de Wetr et Zeula de Gaica, qui cherchaient ainsi à se préserver une part d’autonomie d’action. Ce qui n’empêche les retournements d’alliance, comme à l’occasion des troubles fonciers
à Wé en 1994, où les Wahnyamala de Kejany étaient restés dans une position d’opposition aux Bula, tandis que leurs cousins Haeweng de Jozip s’étaient ralliés à l’action de ces derniers contre les spoliations foncières envisagées par la mairie de Lifou au nom du “développement”, sous l’influence
d’un homme d’affaires vietnamien. Le maire sera expulsé manu militari de
l’île, faillit y laisser la vie, perdra la mairie aux élections organisée pour calmer le jeu, et de ce fait passera du camp indépendantiste au camp opposé.
Malgré son manque de formation linguistique — il n’avait pu l’acquérir
ni de Leslie White à Seattle, ni de Margaret Mead à New York (Université de
Colombia), ses maîtres — Sahlins se met à parler de permutation structurale et aboutit à cette remarquable invention des femmes crues et des hommes cuits… De tels errements pouvant tenter de jeunes chercheurs, il
convient de pousser l’analyse critique au plus près.
Toute “structure” est incomplète, sinon l’évolution deviendrait impossible, ce qui nierait la relation constamment dialectique entre synchronie et
diachronie (cf. la leçon des “cases vides” de la structure phonologique,
selon l’école praguoise du prince Troubetzkoy, école dont l’introduction en
France est due à André Martinet, pour les langues indo-européennes et à
André Haudricourt, pour les langues non européennes, dont les langues à
tons asiatiques, et l’adaptation de ces leçons aux données particulières de
l’ethnologie à Claude Lévi-Strauss).
Sahlins prétend présenter des structures finies, complètes. Aucune permutation ne serait alors possible entre leurs éléments. Une permutation est
une opération dynamique faisant évoluer la structure et ouvrant un autre
manque ailleurs, ce que Sahlins, au départ tenant d’un évolutionnisme
mécanique comme celui de Leslie White, n’a évidemment pas compris. La
permutation qu’il nous décrit n’a aucune existence objective par elle-même.
C’est une opération intellectuelle surgie tout armée de son esprit, pas de
l’une ou l’autre des cultures fijiennes.
77
Tout ceci nous ramène, toujours et encore, à l’intronisation du roi fijien.
Sahlins devrait savoir qu’il n’y a pas de roi fijien. Non seulement parce qu’il
n’y a pas de “roi”, concept occidental apporté dans les bagages missionnaires, mais parce que présupposer un modèle unique pour les îles Fiji est faire
table rase du dernier siècle de conquêtes intérieures à coups de fusils et de
canons des divers protagonistes locaux du XIXe siècle, mais aussi d’une
autre conquête difficile, mais pacifique cette fois, celle d’une connaissance
toujours plus rigoureuse des cultures et des sociétés de la région, connaissance à laquelle s’opposaient ceux qui avaient tiré les marrons du feu par le
moyen d’une prise de possession britannique négociée avec ceux qui se
présentaient alors comme les chefs et représentants légitimes de l’ensemble
de l’archipel, revendication alors au moins partiellement erronée. Il y a par
ailleurs autant d’intronisations et de systèmes symboliques à l’existence
déclamée que de cas attestés.
La présence affirmée d’offrandes humaines, présentées par le chef intronisé, ici le vunivalu (racine de la guerre) de Bau (qui n’est d’ailleurs pas le
seul chef à Bau), aux anciens maîtres du pays, pose deux problèmes. Le
concept des “anciens maîtres du pays” n’est déjà pas ici vraiment convaincant, Bau étant un îlot de construction artificielle, gagné progressivement
sur le platier récifal. L’ancienneté de telles pratiques, encouragées par les
Européens de sac et de corde installés dans l’archipel et qui vivaient de fournitures militaires aux guerres intestines, n’est pas démontrée. “Cannibal
Jack”, cité par Sahlins, n’a jamais mangé de chair humaine que dans l’imagination de ceux qui l’ont affublé de ce nom. Lui-même interprétait ce sobriquet comme celui qui “pourchasse” les cannibales, encore fallait-il qu’il y en
eût. Les auteurs cités par Sahlins appartiennent à l’époque où le cannibalisme océanien allait de soi.
Les îles Lau, christianisées à partir de Tonga, n’ont certainement jamais
fourni l’exemple de victimes humaines à une intronisation de chef. Ce qui
oblige Sahlins à sauter de Lau à Bau. Or, malgré la campagne constante,
aujourd’hui heureusement terminée, orchestrée depuis la prise de possession britannique, pour faire croire que la tradition de Bau était la quintessence de la tradition fijienne, toute information ayant Bau pour origine est
suspecte.
La prééminence de Bau s’est fondée exclusivement sur un monopole de
la fourniture d’armes européennes. Sa puissance de feu, y compris embarquée sur sa flotte de grandes pirogues de haute mer, ndrua, a réussi à établir
un pouvoir nouveau à la place de l’ancienne alliance entre Viwa, plus au
nord-ouest (dont la flotte avait été détruite par un navire de guerre français
pour venger le massacre de l’équipage de l’Aimable Joséphine), Bua à la
pointe occidentale de Vanua Levu, et Cakaudrove, pays du regretté président
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de la République Ratu Sir Penaia Ganilau, Tui Cakau, dans la moitié sud de
la même île. Bau a depuis réinterprété, imaginé et fabriqué de toutes pièces
des rites ayant pour vocation de correspondre à cette prééminence née de
la faveur des Blancs et non issue de la tradition. La mention des victimes
humaines est là pour faire croire aux Blancs, en particulier de tradition missionnaire, à l’authenticité et à l’ancienneté de ces rites.
Les Fiji sortent ainsi aujourd’hui de plus d’un siècle de manipulations
culturelles redoutables, exercées à partir de Bau et cherchant à occulter tout
système autonome et original le long des côtes de Viti Levu. On voit ressurgir, depuis les deux premiers putschs militaires, organisés par un tenant de
la chefferie de Cakaudrove, le colonel Rabuka, des nuances qui étaient tues
au temps du British Raj.
Les premières années de l’indépendance avaient été placées sous le
signe d’une alliance entre Bau, c’est-à-dire Ratu Sir George Cakobau, vunivalu de Bau, gouverneur général pour la reine, et les îles Lau, représentées
par Ratu sir Kamisese Mara, Tui Nayau, premier ministre. Cette alliance s’est
usée au fur et à mesure de la réévaluation inévitable des équilibres traditionnels, qui fera sorti de l’ombre Bua et Cakaudrove, et bien d’autres sur le versant occidental de Viti Levu. La tradition moderne des Cakobau, rois constitutionnels de Fiji, a peu à peu perdu de son vernis. En particulier, la chefferie et la population de la grande vallée de Rewa, proche de Suva, ont d’autant plus relevé la tête, que le Tui Rewa, dit aussi Tui Dreketi, est Adi Lady
Lala, fille première-née et détentrice du titre principal de cette chefferie,
épouse du président de la République Ratu Sir Kamisese Mara, qui a succédé à la tête du pays, après l’intermédiaire et le décès de Ratu sir Penaia
Ganilau, au gouverneur général des Fiji Ratu Sir George Cakobau, dont il
avait obtenu de la reine Elizabeth la mise à la retraite. Le général commandant l’armée fijienne était récemment le fils aîné de Ratu Penaia Ganilau, qui
était aussi devenu le titulaire présent du titre de Tui Cakau à Vanua Levu. Le
président de la république actuel, installé par l’armée après le dernier
putsch, est Joseph Iloilo, Tui Ba, c’est-à-dire chef de Bua, tenant lui aussi de
l’ancienne alliance.
Avant sa mort, George Cakobau en avait été réduit à s’allier aux hommes
politiques hindous contre ses adversaires fijiens, ce qui précipitera les
putschs militaires, qui n’étaient pas seulement dirigés contre les Hindous
quoiqu’on en ait dit.
Pourquoi les femmes sont-elles dites “crues” en cette affaire. ? La seule
justification fournie par Sahlins est qu’il y a des hommes “cuits”, et que par
conséquent les femmes sont “crues”. La fondation de la confédération, fédération ou État selon les auteurs, ou matanitu, vocable fijien moderne et non
terme archaïque, à partir de prestations cannibales, n’est pas mieux établie.
79
On avait réussi, grâce à l’école d’anthropologie sociale britannique et à
sa tradition de coller au terrain et aux données recueillies, à peu à peu s’abstraire des théories imaginées en cabinet. La réalité océanienne est toujours
plus élaborée et plus complexe que les supputations des théoriciens. Elle
prend constamment en compte les contradictions apparentes, s’en arrange
très bien, et en ajouterait même tant elle adore les subtilités impénétrables
aux observateurs blancs, mais qui font le bonheur des insulaires. Dépourvu
de l’expérience du terrain qui lui permettrait de coller à cette réalité, Sahlins
opère pour l’essentiel dans un imaginaire particulier aux sciences humaines.
Il enchaîne les interprétations les unes aux autres, la dernière étant aussitôt
considérée comme un fait avéré de façon à soutenir la suivante. La lecture
de cet ouvrage demande une succession d’actes de foi de la part du lecteur.
Incapable aussi de pratiquer la critique des sources — aucune information
n’est située dans son contexte — Sahlins choisit dans l’information inégale
disponible ce qui l’arrange et laisse de côté tout le reste.
Le dieu qui meurt
La dernière partie de l’ouvrage interprète la mort du capitaine James
Cook sur Hawai’i comme “le dieu qui meurt”.
Sahlins prétend établir un parallélisme entre le mythe de Lono (le Rongo
maori), dieu de la terre et des plantes cultivées, qui meurt et renaît, pour
assimiler le meurtre du capitaine Cook par les Hawai’iens comme le sacrifice
du dieu vivant dont on attendrait qu’il renaisse. Encore une atmosphère de
Bas-Empire romain !
Tout ceci est à la fois fort habile et fort suspect, à la fois chez les
Hawai’iens de contamination chrétienne en ce qui concerne Lono, et pour
Sahlins de mélange avec les messianismes méditerranéens fondés sur des
agricultures saisonnières de céréales.
La culture majoritaire du taro, dont la récolte se répartit aisément tout au
long de l’année, ne se prête pas à être le support du mythe d’un dieu qui
meurt et renaît. La réalité du support religieux de l’interprétation de Sahlins
est fort incertaine, et il ne s’est pas donné, par absence totale de critique des
sources, les vrais moyens de la vérifier.
Le capitaine Cook, dont on a tant vanté l’humanité, était un officier de
marine d’origine non aristocratique et fort compétent. Ses comportements
étaient déterminés par une attitude constamment pragmatique et une expérience rarement aussi diversifiée sur les “sept mers”. Il a fait tirer, comme
d’autres, mais plutôt moins souvent et avec plus de retenue, chaque fois que
son évaluation du danger potentiel lui en indiquait la nécessité.
80
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À son retour à Hawai’i, partiellement démâté après une tempête, il a agi
pour obtenir de repartir avec de nouveaux mâts avant que les Hawai’iens ne
puissent profiter de la faiblesse passagère de son navire. A-t-il commis,
dans la presse de l’action, une erreur de jugement. Comment l’affirmer, mais
aussi comment ne pas l’envisager ?
Contrairement à ce que pense Sahlins, les Hawai’iens n’avaient aucune
raison de prendre Cook pour un dieu. Ils avaient déjà eu des contacts avec
d’autres peuples, dont des contacts avec l’Amérique pour en obtenir la patate douce, avec les jonques japonaises en dérive5 et avec les toutes premières
entreprises cosaques à partir de la Sibérie orientale, à l’époque où elles n’étaient pas encore accompagnées de fonctionnaires du tsar. Les Tahitiens
avaient vite, sinon presque immédiatement, observé la nature humaine des
équipages anglais de Wallis et de Cook. Cela n’est pas venu par des relations
sexuelles, mais bien avant par celle de l’observation du jeu des fonctions
naturelles. Là où l’on n’a jamais vu de Blancs, on envoie les enfants regarder
les déjections des étrangers. Les hommes de Port-Sandwich au sud-est de
Malekula au Vanuatu ont offert aux marins de Cook des poissons ballons à
la chair facilement toxique de façon à avoir une preuve expérimentale de leur
nature humaine ou non. Le navire leva l’ancre trop tôt pour qu’ils aient eu la
satisfaction d’avoir eu raison.
On sait aujourd’hui que Cook avait quitté les îles Tonga peu avant le jour
fixé pour l’attaque de ses navires. Les Hawai’iens avaient toutes sortes de raisons de vouloir se saisir des navires et des armes qu’ils portaient. L’attaque
du navire corsaire britannique le Port-au-Prince, à Lifuka, sur les ordres de
Finau Ulukala, quelques années plus tard, montrera comment les insulaires
seront capables de descendre l’artillerie du bord et d’obliger les marins épargnés à leur en enseigner le maniement. Si l’on y ajoute que les arbres les plus
aptes à fournir des mâts pouvaient être sur la côte, le plus près du bord, dans
des endroits qui pouvaient aussi être d’accès interdit, on avait là les ingrédients d’un affrontement, comme celui qui a coûté, à la même époque, dans
la Baie des îles de l’île du Nord de la Nouvelle-Zélande, la vie à une part de
l’équipage du Français Marion du Fresne. Les tireurs d’élite des guerres de
ces derniers siècles ont toujours visé les chefs. Ce que les Hawai’iens ne
connaissaient pas était la solidité et l’adaptabilité de la hiérarchie navale britannique ayant à sa disposition des équipages bien commandés, et sa capacité de réagir dans le moment pour éviter la panique des hommes.
5 Les autorités shogunales interdisaient aux embarcations japonaises de pêche littorale la possession de
gouvernails de haute mer. Les jonques prises dans les typhons étaient de ce fait souvent désemparées et
dérivaient jusqu’en Amérique du Nord, où les tribus indiennes de la côte nord-ouest prenaient les survivants
en esclaves. Certains de ces survivants, rachetés, seront rapatriés par le commodore Perry au Japon, pour
adoucir le contexte de son ultimatum d’ouverture des ports japonais au commerce américain. Une association japonaise des descendants de ces marins cultive la mémoire de ces aventures.
81
La théâtralisation de l’événement, sur laquelle Sahlins prétend se fonder,
est la marque d’un comportement général dans la région, où il existe partout des formes de combat mises en scène et s’apparentant à une danse.
Interpréter tout comportement formalisé et d’apparence cérémonielle
comme étant liturgique, était une hypothèse aventurée de la part des compagnons de Cook, qui ne parlaient ni le tahitien et bien sûr pas le hawai’ien,
mais est encore plus aventureux de la part de Sahlins, alors que nous avons
deux siècles aujourd’hui d’expérience des formes d’expression corporelle
destinées à honorer l’hôte, si l’on a décidé de choisir ce comportement, sans
que cela implique de le considérer comme un dieu. Sahlins aurait dû savoir,
s’il avait lu Maurice Leenhardt, et s’il avait mieux lu Firth, que les rites religieux les plus nombreux ont une apparence de simplicité, sinon même bon
enfant, tandis que les rites laïques, assurant au moins la neutralisation provisoire et réciproque des personnes de rang en compétition, prenaient les
aspects solennels et lents que les Occidentaux assimilent à des comportements religieux.
Se jeter sur le chef des adversaires à terre pour l’achever est par contre
un comportement quasi universel. S’il y avait eu théâtralisation rituelle dans
tout cela, les protagonistes eussent été chefs et (ou) prêtres. Or, si l’on a pas
demandé aux meurtriers, ou aux aspirants meurtriers, leur état-civil — bien
des événements de l’histoire coloniale sont impossibles à interpréter
lorsque l’on ne sait pas exactement qui en sont les acteurs — leur nombre
semble exclure que ce soit une affaire montée par les prêtres seuls, si tant
est que les chefs hawai’iens toléraient que des prêtres puissent prendre de
pareilles initiatives.
Plutôt que le meurtre rituel d’un dieu, à savoir Cook, ne peut-on penser
que la révélation de sa nature humaine faillible ait joué dans les circonstances ? Les Hawaiiens savaient parfaitement d’expérience ce qu’impliquait un
démâtage en haute mer.
Sahlins aurait dû se pencher sur tous les cas d’assassinats d’Européens
de la première génération du contact avant de décider que celui de James
Cook était aussi spécifique. Celui auquel il ressemble le plus, à savoir les
échauffourées successives avec les Maoris des marins de Marion du Fresne
prétendant couper les troncs de pins kaori les plus proches du rivage, mais
poussant dans un lieu sacré, et se saisir de femmes de haute naissance sous
interdit, au lieu des femmes esclaves qu’on leur avait désignées par précaution, n’est même pas cité.
Bien sûr, le Rongo maori n’est pas censé mourir pour renaître annuellement, et s’il a eu l’honneur de servir de prétexte aux interprétations de Sir
James Frazer, c’est à partir d’interprétations européennes romantisées (celles de Colenso), qui ne sont confirmées ni par les érudits maoris, ni par les
textes publiés sous la responsabilité propre de ces derniers. Bien entendu,
82
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Rongo est d’une certaine façon la patate douce et alors consommée quotidiennement, de même que les ignames sont en Mélanésie orientale la chair
des ancêtres.
Sahlins va se fonder sur un obscur témoignage utilisé par sir James
Frazer, savant de cabinet dont les interprétations, par moments géniales, à
d’autres farfelues, s’appliquent mieux à une Afrique plus proche de ses
modèles méditerranéens antiques qu’à une Océanie vue presque exclusivement à l’époque à travers le prisme déformant des idées missionnaires, c’està-dire un ensemble de références inconscientes prises aux textes bibliques.
On a voulu en particulier trouver chez les Océaniens aussi bien la trace
d’un dieu unique (marotte catholique), qu’une tradition messianique (interprétation plutôt protestante). Dans la mesure où cette tradition existerait, et
les mouvements prophétiques qui émaillent les deux siècles de contacts
pourraient le faire penser, prennent-ils cette forme par contamination chrétienne, ou par réapparition brutale (brutale pour nous) d’une tradition préalablement non enregistrée par les érudits et savants occidentaux au travers
des écrits de leurs correspondants ?
J’ai eu à faire personnellement à un nombre non négligeable de ces
mouvements au cours de la période de l’immédiat après-guerre, ainsi qu’à
des aires culturelles qui en ont été curieusement dépourvues, et j’ai fréquenté leurs leaders, que j’ai plus d’une fois tiré des geôles où ils croupissaient
pour atteinte à l’ordre public. On pouvait mettre en évidence chez eux ce qui
pouvait être mimétisme du christianisme, essentiellement dans des formulations ou des discours de présentations visant le public européen local,
qu’ils cherchaient à provoquer ou à neutraliser. L’observation sur place des
comportements, dans leur contexte, et l’enregistrement des justifications
mythiques fournies à l’intérieur du mouvement, racontait une tout autre histoire, dépourvue alors de mimétisme christologique et qui se référait tout
naturellement en tout premier à la collectivité des morts.
Les divinités avec lesquelles on a voulu me mettre en contact, et en particulier Karapènmun et Mwatiktiki à Tanna, Moshtektek ou Mauitikitiki en
d’autres lieux, n’étaient pas mises à mort pour renaître (la version maorie de
la mort de Maui n’était pas acceptée ici), mais venaient d’échapper au temps
de latence où il était interdit de parler d’eux à cause des missionnaires, quoiqu’on pût leur apporter en secret des offrandes, ce qui fait que les seuls lieux
où le culte de Mauitikitiki soit encore pratiqué sont à Emae, aux îles Shepherd
(chez les Mélanésiens et pas dans la minorité voisine de langue polynésienne
à Makata) et sur Tanna (à Port Résolution), chez d’autres Mélanésiens.
Le Mauitikitiki maori meurt en conclusion de sa tentative ratée de donner l’immortalité aux humains. Le Mauitikitiki mélanésien s’est contenté
d’œuvres tout aussi pies, quoique moins dangereuses, pêcher les îles avec
un véritable hameçon (et pas avec la mâchoire inférieure de son grand-père
83
maternel), à partir d’une balançoire et non d’une pirogue, ainsi que faire
échapper l’eau salée de la mer du trou où elle était emprisonnée.
Les traditions messianiques relevées, aussi bien en Australie d’ailleurs
qu’en Mélanésie, se réfèrent souvent au départ vers l’est, quoique pas toujours, d’un héros civilisateur positif qui reviendra un jour, souvent confondu
au XIXe siècle avec le personnage biblique de Noé, à qui l’on attribue alors le
déversement de la mer dans les océans.
Le messianisme océanien est plus souvent collectif et a trait au retour
des morts et des dieux, habitants du même univers souterrain, sous-marin
ou céleste, divinités vivantes de toute éternité et morts qui ne le sont pas à
notre sens du mot, mais qui vivent de la mémoire de leurs descendants, perdant leur puissance6 et disparaissant sans appel lorsqu’ils sont oubliés
(Efate) ou chassés par ces derniers (Amirautés).
Avant de se lancer dans une entreprise aussi périlleuse, Sahlins aurait dû
se poser le problème du contenu océanien du concept de la mort, au lieu de
vouloir établir dans le Pacifique Nord l’idée messianique proche-orientale
qui s’était tardivement implantée à Rome. Il aurait appris que les dieux qui
n’ont jamais été des hommes, selon la formule de Codrington, ne meurent
jamais réellement pour la simple raison qu’ils sont là de toute éternité,
même s’ils se rattachent les uns les autres par une généalogie formelle, ce
qui n’est courant qu’en Polynésie orientale et dans le discours des prêtres.
Cette généalogie ne revêt aucune signification de réalité biologique, mais
permet d’orienter les déplacements dans l’espace des personnages et donner à leurs pérégrinations un ordre chronologique approximatif. Il s’agit
beaucoup plus de procédés littéraires que de conceptions théologiques, à
ceci près que ce qui compte est l’orientation dans l’espace et la relation entre
eux des points topographiques cités dans chaque version appropriée par un
groupe de descendance. Il n’existe nulle part de théologie unique, même si
des spécialistes européens ont cru l’entrevoir, et cette conception même est
en contradiction avec les faits connus. Pourtant les interprétations en ce
sens d’observateurs occidentaux ne manquent pas, d’autant que personne
ne se serait levé à l’époque pour les contredire.
À la page 66, la conception du “mythe praxis” proposé sans faire référence à Maurice Leenhardt et son “mythe vécu” manque de rigueur intellectuelle. C’est du simple pillage. Sahlins cite sir George Grey, qui cherche à
comprendre les allusions poétiques et oratoires qui émaillent les discours
6 Devenus anonymes, ils se fondent, dans une grotte sans fond, dans une masse gélatineuse qui est celle de
tous les morts oubliés (Efate, cf. Macdonald, 1894, Etymological dictionary of the language of Efate) ou
errent au soleil et à la pluie, pour se ratatiner et se transformer en fin de compte en holothuries (Manus, cf.
Fortune, 1935, Manus religion : an ethnological study of the Manus natives of the Admiralty islands).
84
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des chefs polynésiens. Le corpus de Grey est aussi intéressant pour l’époque qu’il est notoirement mal fait et trop souvent biaisé aux dépens des
opposants à la domination coloniale.
À la page 68, les Maoris comprendraient toute action comme la répétition d’un événement mythique (alors que comme tous les Océaniens, ils y
font référence pour les catégoriser, après l’action, se conservant des options
ouvertes et ne répétant jamais plus que d’autres les événements passés).
Hone Heke abattant le mât portant l’Union Jack — mât que Sahlins veut
comprendre comme porteur d’une valeur cosmique, le mât soutenant le ciel
(prenant ainsi la place de Tane faisant l’arbre fourchu). Cela ne pourrait se
comprendre que pour les églises dissidentes et prophétiques successives
de Pai Marire (dites aussi par dérision Hauhau) et de celle du prophète et
chef de guérilla Te Kooti Rikirangi, où un mât est effectivement au centre du
rituel, mais Sahlins ne semble pas être au courant.
Notre auteur passe d’ailleurs sous silence que Hone Heke, courtisé par
la Church Mission et son fondateur le révérend Marsden, était allé plusieurs
fois visiter Sydney et même Londres (d’où il était revenu avec une cargaison
d’armes à feu). Hone Heke connaissait le lien (occidental et ici britannique)
entre l’érection d’un mât pour hisser le pavillon national et la prise de possession d’un territoire. Il avait assisté, à Sydney et à Londres, au cérémonial
du lever des couleurs. Abattre le mât du pavillon était le moyen le plus simple de faire parvenir le message du refus de la conquête et de la prise de
possession. Il n’y avait là rien de cosmologique.
Sahlins semble ainsi refuser aux Océaniens le bon sens et le savoir technique. Ils se sont pourtant révélés d’excellents tacticiens et de très remarquables ingénieurs militaires. Le meilleur stratège militaire maori, Hongi
Hika, avait réorganisé l’ordre de bataille des guerriers Ngapuhi en une sorte
de phalange mobile armé de mousquets. Les Maoris ont inventé les tranchées couvertes, les fortifications en terre, la protection des civils contre les
shrapnells en les abritant dans des cavités profondes recouvertes de troncs
de pins kaori. La ligne fortifiée barrant la vallée de la Waikato n’a pu être
prise d’assaut par les troupes britanniques et a dû être tournée en créant une
route dans un marais que les Maoris ne croyaient pas franchissable.
La plupart des auteurs, dont Sahlins, se complaisent à raconter indéfiniment des histoires de cannibalisme et de sacrifices humains, répétant le discours des missionnaires de la London Missionary Society sur le navire qui
les amenait, avant même d’avoir touché Tahiti. Ils lisent par conséquent les
déclarations et les textes polynésiens au premier degré, alors qu’il s’agit de
discours émaillés de symboles, où la mort infligée est le plus puissant peutêtre, mais n’a nul besoin d’être réalisée pour obtenir l’effet recherché. La
confusion constante entre le verbe et l’action, entre la mort annoncée et la
mort réelle, entre la transformation théorique de l’ennemi en viande et sa
85
perte de mana parce que, l’ayant vaincu, on en a décrété ainsi sans même
l’avoir jamais passé au four, n’est pas comprise par les observateurs, qui
ajoutent foi aux histoires les plus romantiques et les plus sanglantes, sans
en vérifier le moindre point. On ne trouve jamais les monceaux de cadavres
annoncés, alors que les descendants des massacrés se promènent allégrement sous les cocotiers.
Certains de ces observateurs ont été soigneusement entourés de façon
à ce qu’ils ne puissent rien vérifier du discours normatif qui leur avait été
savamment présenté (cf. Gifford publiant sur Tonga la version reçue personnellement de la reine Salote Tubou in : 1929, Tongan Society). Les descriptions romantiques n’ont en effet de longtemps pas gêné les chefs polynésiens, ou autres, qui y trouvaient de sérieux avantages politiques. Le pouvoir
absolu qu’on leur a si gratuitement attribué leur a permis d’organiser à leur
propre profit ces monopoles commerciaux, le bois de santal à Hawai’i, le
commerce de porcs à Tahiti, qui ont nourri l’essor militaire des
Kamehameha et des Pomare.
À cela Sahlins n’ajoute qu’une seule technique intellectuelle identifiable,
celle de l’association d’idées, association des seules idées qui l’arrangent,
sans jamais la moindre tentative, ni de vérification, ni de démonstration
scientifique. Cette étude est un faux-semblant. La connaissance des sociétés
fijiennes et hawai’iennes n’a pas avancé d’un cheveu.
Addenda
J’ai rencontré Marshall Sahlins en 1956. J’avais été lire à la bibliothèque
de l’Université de Colombia sa thèse en manuscrit, dont on disait le plus
grand bien dans le milieu universitaire new-yorkais. Je me suis trouvé en
présence d’affirmations qui ne pouvaient correspondre à la réalité. Sahlins,
qui n’était jamais encore sorti des Etats-Unis, y affirmait que les sociétés
complexes s’étaient constituées en Polynésie sur la base d’une agriculture
développée et sur les Îles volcaniques hautes, alors que les îles basses, les
atolls, ne pouvaient supporter que des sociétés peu développées.
Il oubliait entièrement la présence d’anciens atolls surhaussés, dont
Makatea en Polynésie française, mais aussi Tongatapu, le site de la cour du
Tui Tonga, ainsi que les trois îles Loyalty au large de la Nouvelle-Calédonie
(Ouvéa, Lifou et Maré), îles coralliennes qui supportaient des sociétés parmi
les plus complexes et les plus diversifiées de la région (Guiart, Jean, 1963,
Structure de la chefferie en Mélanésie du Sud, Institut d’Ethnologie, Paris,
réédition partielle revue et augmentée en 1992).
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Il partait en réalité d’une erreur ancienne des géographes européens, qui
ont toujours considéré les îles volcaniques comme étant par nature les plus
fertiles, ce qui est tout à fait inexact lorsqu’il s’agit de sols volcaniques jeunes et non évolués, comme le sont les pentes de Tahiti par exemple, où rien
ne pousse facilement sinon par un grand effort d’apport de bonne terre,
d’engrais et beaucoup d’arrosage.
La réalité dans les îles dites hautes de Polynésie orientale est que les
sols fertiles se rencontrent sur la dune côtière, du fait des conséquences de
l’habitat humain sur la longue période, et sur les terres basses immédiatement en arrière, du moins si la nappe phréatique n’est pas trop près de la
surface du sol, comme dans une partie de la côte orientale de Tahiti. La fertilité de ces terres est due au mélange d’éléments alluvionnaires, venant de
la montagne et d’éléments marins, le plus lorsque l’on y trouve, comme en
différents points de la région, de la pierre ponce expulsée par les points
chauds sous-marins. Par contre, ce qu’ignorait entièrement Sahlins, les sols
sur calcaire corallien surélevé sont parmi les plus fertiles de la région, et
comprennent des sols qui présentent les caractéristiques chimiques et physiques les plus favorables à l‘habitat humain, ce qui était facile à vérifier.
J’ai voulu rencontrer Sahlins et je le lui ai dit. Il m’a demandé une bibliographie. Je l’ai renvoyé aux spécialistes américains des sols, qui étaient parfaitement au courant, en particulier ceux qui avaient pu travailler pour l’administration américaine de la Micronésie. Il n’a pas dû faire l’effort, puisqu’il
a écrit plus tard que son travail sur le terrain, aux îles Fiji, lui avait entièrement confirmé son analyse en cabinet. Ce qui dans tous les cas est impossible. Aucune analyse en cabinet ne saurait jamais correspondre exactement
à la réalité de terrain.
Rusiate Nayacakalou, issu d’une famille catholique du sud de Viti Levu
— et non de l’aristocratie orientale qui domine encore Fiji — et dont le père
avait été mêlé, comme tous les gens de sa région, au mouvement Apolosi
de l’entre-deux guerres, avait acquis une maîtrise d’anthropologie sociale de
l’université d’Auckland, suivie par un doctorat préparé à la London School
of Economics sous l’autorité de Raymond Firth. Le texte de sa maîtrise portait sur le système de parenté et matrimonial fijien (Nayacakalou Rusiate,
1955-1957, “The Fijian system of kinship and marriage”, Journal of the
Polynesian Society vol. 64-66, Wellington). Il y montrait, dans des termes
qui auraient plu à Claude Lévi-Strauss, qu’on s’y mariait non pour avoir une
épouse, mais pour acquérir une belle-mère, image forte du contenu théorique aussi bien que pragmatique de l’alliance. Rusiate Nayacakalou eut la
surprise, pendant son temps à Londres, de découvrir qu’un manuscrit
envoyé pour lecture à Firth démarquait sur certains points ses matériaux sans
en citer l’origine. Une lettre courtoise du maître recommandant de donner la
87
référence ne provoqua, dans la publication de l’ouvrage par Marshall
Sahlins, qu’une note in fine, expliquant que s’il y avait parallèle, il était entièrement dû au hasard.
Ce travail (Sahlins Marshall D., 1962, Moala. Culture and Nature on a
Fijian island, University of Michigan Press, Ann Arbor) repose sur quatre
mois de terrain et s’est arrêté brutalement par un brusque retour aux EtatsUnis — je passais à New York, à la Columbia University, au moment de ce
retour inopiné, qui défrayait les conversations dans le milieu professionnel
local. Ces quatre mois constituent le stade où, d’expérience plutôt générale,
tend à s’installer justement le sentiment que le terrain commence à ressembler à un piège, crise psychologique que l’on doit surmonter. Il vaut mieux
alors retirer le chercheur provisoirement et lui permettre de retourner un peu
plus tard. Celui-là n’est jamais retourné. Les informations recueillies correspondent à la durée du séjour. Quand elles lui manquent, l’auteur passe à
une analyse globale de la société fijienne, intelligemment faite et qui apporte
quelques lumières nouvelles, et une ombre. C’était du moins là le jugement
équilibré que portait Rusiate Nayacakalou lui-même.
L’explication fournie par Sahlins n’est pas totalement crédible. Le chapitre incriminé commence par un résumé exact, imprimé en petits caractères,
des positions de Rusiate Nayacakalou p. 273, résumé qui n’avait pas sa
place normalement dans l’exposé, puisqu’on ne voit pas sa raison d’être s’il
ne se réfère pas à un autre texte existant, et non cité :
“In Ego’s generation, siblings are merged with parallel cousins and distinguished from cross-cousins. In the first descending generation, parents
terminologically merge with the siblings of the same sex, while parents
siblings of the opposite sex are distinguished. In the first descending generation, there are only two terms, one for “child” (of either sex), and the other
for “child of sibling of the opposite sex”. The latter term is the same as that
used for cross-uncles, and own and their spouses, thus there is reciprocal
references for a man and his sister’s children or a woman and her brother’s
children. The term for child is extended to children of siblings of the same
sex, children of parallel cousins of the same sex, and children of cross-cousins of the opposite sex. The term for “child of siblings of the opposite sex”
is extended to children of parallel cousins of the opposite sex and those of
cross-cousins of the same sex. In grand-parents generation, there are but
two terms which distinguish sex. In grandchild’s generation, there is one
term for all relatives” (Moala, p. 154). Egalement : “The importance of the
classificatory principle is that it is at the same time a self expanding kinship
mechanism and a self enclosing one”. Ces deux lignes résument l’apport
particulier de Rusiate Nayacakalou et c’est la phrase où Sahlins reconnaît un
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N°298 • Septembre 2003
parallèle (Moala, p. 154 et note en fin de volume). De même correspond à
l’analyse de Rusiate, p. 158 de Moala : “The terminology of address also
more or less faithfully distinguishes between close and distant relatives of
given types”.
On ne voit d’ailleurs pas pourquoi Marshall Sahlins agit ainsi. Ce n’était
pas un texte inconnu issu de ce qu’on nomme la littérature grise, mais une
série de deux articles dans un des meilleurs périodiques anthropologiques
au monde. N’importe quel lecteur intéressé, connaissant la littérature spécialisée portant sur l’archipel fijien, pouvait repérer le parallèle. Marshall
Sahlins se serait honoré de donner en référence le travail du premier anthropologue océanien.
Il peut s’agir là tout simplement d’un exemple de cette arrogance intellectuelle qui consiste à penser que les Océaniens, ou les Africains, ou d’autres, ont pour vocation d’être des informateurs, à la limite des érudits
locaux, mais pas des chercheurs.
Cette affaire sera la perte, non de Marshall Sahlins, qui poursuivra une
carrière brillante marquée par aussi peu de travail de terrain que celle de
Radcliffe-Brown, mais de Rusiate qui se mettra à boire, abandonnera toute
idée de carrière anthropologique, rejettera tout ce qu’il avait adoré et deviendra de plus en plus anti-Blanc. Il aurait dû se battre et protester, mais les collègues à l’Université de Sydney l’en avaient découragé. La bienveillance de
Ratu sir Penaia Ganilau, le futur président de la République de Fiji, lui vaudra
de prendre la direction du Fijian Land Trust Board, fonction qu’il illustrera en
mettant en route des lotissements sociaux à la périphérie de Suva, mais l’abus d’alcool le mettra tôt dans la tombe, amer jusqu’au dernier jour de penser qu’il avait été trompé par la collectivité scientifique blanche à laquelle il
avait confié son destin, et qui, dans son esprit, lui avait refusé son soutien.
Jean Guiart
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L’effet du raz-de-marée
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Fait partie de Bulletin de la Société des Études Océaniennes numéro 298