B98735210105_213.pdf
- Texte
-
BULLETIN
DE M
SOCIETE
DES ETUDES
OCEKNIENNES
a
A
#
N° 213
TOME XVIII
—
N° 2 / Décembre 1980
Société des
Études
Océaniennes
Société des études océaniennes
Ancien musée de
Papeete, Rue Lagarde, Papeete, Tahiti.
Polynésie Française.
B. P. 110
Banque Indosuez
:
Tél. 2 00 64.
-
21-120-22 T
—
C.C.P. 34-85 PAPEETE
CONSEIL D'ADMINISTRATION
M. Paul MOORTGAT
Président
M. Yves MALARDE
Vice-Président
Mlle Janine LAGUESSE
Secrétaire
M.
Trésorier
Raymond PIETRI
assesseurs
Me Rudolph BAMBRIDGE
M. Henri BOUVIER
Mme F. DEVATINE
Dr. Gérard LAURENS
Me Jean SOLARI
M. Roland SUE
M. Temarii TEAI
M. Maco TEVANE
Me Eric LEQUERRE
MEMBRES D'HONNEUR
M. Bertrand JAUNEZ
R.P. O'REILLY
M. Raoul TEISSIER
Pour être Membre de la Société
Société des
se
faire présenter par un
Études
Océaniennes
membre titulaire.
BULLETIN
DE LA
SOCIÉTÉ DES ÉTUDES OCÉANIENNES
(Polynésie Orientale)
TOME XVIII
—
N° 2 / Décembre 1980
SOMMAIRE
Les 1ers documents imprimés en
tahitien de 1810 à 1834
H. coppenrath
L'Académie Tahitienne
après 6
R. Langdon
741
ans
d'existence
762
N1,es lumières et réflexions
sur
l'échouage de la caravelle
San Lesmes
772
Comptes rendus
778
Société des
Études
Océaniennes
741
Les 1ers documents
en
imprimés
tahitien de 1810 à 1834
Le patrimoine polynésien s'enrichit tous les
jours grâce aux
découvertes archéologiques, grâce aussi aux recherches
ethnologiques,
linguistiques et humaines. Il y a là un champ d'étude passionnant pour les
scientifiques et les amateurs de la Polynésie d'autrefois.
Comment les anciens polynésiens ont perçu les
temps nouveaux ?
Comment ils ont fait leur entrée dans
l'âge moderne ?
Quelle part ils ont accepté de l'apport moderne pour rester euxmêmes ?
Comment les polynésiens d'aujourd'hui garderont-ils leur identité
dans un monde de plus en plus bouleversé ?
Toutes ces questions ouvrent un champ d'étude passionnant, dans ce
temps où l'évolution semble se faire inexorablement vers l'européanisation. Dans ce choix, une prise de conscience toujours plus
impérieuse devrait se manifester parmi ceux qui portent encore en eux
toutes les richesses du passé et entrevoient les
promesses de l'avenir.
Mettre à la portée de tous toutes les données possibles est une
nécessité, afin de provoquer une saine réflexion par une étude
approfondie des faits du passé.
Nous espérons que le présent travail - traduction d'une étude en
anglais faite il y a une trentaine d'années par un grand collectionneur et
spécialiste des premiers "imprimés" en tahitien B. KROEPELIEN aidera à
faire une meilleure idée des conditions dans lesquelles s'est fait
de la langue orale à la langue imprimée. On verra quelle somme
énorme de travail il a fallu pour que des documents imprimés dans une
langue polynésienne voient le jour dès 1810 et comment ils furent
composés et imprimés à Tahiti et aux Iles de la Société dès 1817.
se
le passage
On sait que cette oeuvre est due aux premiers missionnaires
protestants de la Société des Missions de Londres. Ayant vécu de
nombreuses années dans l'intimité des insulaires, ils avaient fini par
acquérir
une
connaissance parfaite de la langue, pénétrer les
arcanes
de
sa
syntaxe et aller loin dans la connaissance de l'identité du polynésien. Ce
dernier en a gardé, depuis, un souvenir que le temps n'a pas effacé.
La
Elle
ne
première machine à imprimer fut apportée par le "Duff' en 1797.
servit jamais car elle fut détruite au moment des combats à
Matavai
en
1802.
Société des
Études
Océaniennes
742
C'est
vingtaine d'années plus tard, en 1817, que W. ELLIS
première imprimerie de la mission. Le 30 Juin 1817,
date mémorable dans les annales de Tahiti, la première page fut imprimée
par le roi POM ARE II lui-même. C'était un abécédaire en tahitien,
première langue imprimée dans les "Iles de la Mer du Sud" !
une
installa à Afareaitu la
En
1818, deux autres machines à imprimer furent installées à Tahiti.
Et peu de temps après, une autre aux Iles-Sous-le-Vent. Comme le dit
l'auteur "Les différentes presses... jouèrent un rôle très important dans
l'histoire des progrès humains, car elles sont de loin les toutes premières
dans cette
partie du monde".
meilleure compréhension du texte voici à quelles localités
correspondent les noms anglais donnés par les missionnaires à leurs lieux
Pour
de travail
une
:
WILKS HARBOURG
-
BURDER'S POINT
-
WAUGH TOWN
-
HANKEY TOWN
-
HAWEIS TOWN
-
BOGUE TOWN
-
ROBY TOWN
-
BLEST TOWN
-
ROBY'S PLACE
-
GRIFFIN TOWN
-
Papeete
Punaauia
(Pointe des Pêcheurs)
Pointe Vénus (Matavai)
Papaoa (Arue)
Papara
Mahina
-
Vairao
Tiarei
Papetoai
Papetoai (UEVA)
Afareaitu
Pasteur H. Vernier
"IMPRIMÉS" EN TAHITIEN DE
SOCIÉTÉ DES MISSIONS DE LONDRES
LES
LA
1810-1834
L'espagnol Vasco de Balboa a été, en 1513, le premier européen à
Pacifique depuis l'Isthme de Panama. Le portugais
Francisco Serrano a découvert les Moluques immédiatement après la
conquête de Malacca, en 1511, par le fameux Alphonso d'Albuquerque,
et pour éviter des contestations entre les
explorateurs venus respec¬
tivement du Portugal et de l'Espagne, le Pape Alexandre VI alloua à
chacun de ces deux pays la moitié des terres païennes
qui seraient
découvertes par l'un ou par l'autre. C'est aussi en grande partie, afin de
s'assurer à qui reviendrait les Moluques,
que Fernando de Magalhaes
(Magellan) - portugais par naissance - fut envoyé par le roi Charles V
d'Espagne. Magellan, lui-même, fut tué pendant le voyage dans un
combat avec des indigènes, mais son
capitaine Juan Sébastian del Cano
revint finalement à bord du "Victoria", le seul navire à retourner en
Europe sur les cinq qui étaient partis.
voir l'Océan
Société des
Études
Océaniennes
743
Comme
conséquence de cette première circumnavigation, plusieurs
expéditions espagnoles et portugaises furent envoyées à la découverte du
Pacifique. Des expéditions britanniques et hollandaises suivirent et c'est
en particulier la découverte de
plusieurs îles par les britanniques à la fin
de la deuxième moitié du XVIIIe siècle qui provoqua la
naissance, en
1795, de la fondation de la Société des Missions de Londres dans le but de
et d'éclairer les indigènes des ces contrées récemment
christianiser
découvertes.
Les fondateurs de la Société des Missions de Londres se deman¬
dèrent bientôt dans quelle partie du monde se ferait le point de départ de
la
propagation chrétienne et le Dr Thomas Haweis, l'un des fondateurs,
qui, dès 1787, avait eu l'idée d'envoyer des missionnaires à Tahiti, fut prié
de préparer un "Mémoire" sur ce sujet. Il concluait à la fin de ce mémoire
que les Iles de la Mer du Sud, qui peu de temps auparavant avaient été
découvertes par Wallis, Bougainville, Cook et d'autres, présentaient les
meilleures perspectives de succès et il fut décidé de commencer une œuvre
missionnaire parmi les indigènes de ces îles lointaines.
La Société procéda
l'intention d'envoyer les
Société
et aux Iles des
de choses
sur
immédiatement à l'achat d'un bateau en ayant
missionnaires aux Iles Marquises, aux Iles de la
Amis (Tonga). A cette époque, on savait très peu
les immenses étendues de
mer vers
de
l'ouest, le nord et le sud
sur les terres
l'Amérique et il existait seulement des idées très vagues
découvertes au sud et à l'est de l'Océan Pacifique.
Le bateau acheté était le "DUFF" et l'on choisit
comme comman¬
dant le
capitaine James Wilson, un homme très capable qui à tous égards
se montra de la plus grande valeur. C'est à lui qu'est due
une part non
négligeable, du succès étonnant du premier voyage missionnaire.
Avant de
Dr
Haweis
quitter Spithead,
un
un pasteur de Portsmouth avait donné au
vocabulaire manuscrit du "langage Otahetien" et un
rapport sur le pays qu'il avait obtenu d'un des révoltés de la "BOUNTY"
qui avait été ramené
comme
prisonnier
inestimable service rendu
aux
apporterait avant leur arrivée,
la "PANDORA". C'était un
l'aide qu'il leur
l'étude de la langue tahitienne encore
sur
missionnaires par
pour
inconnue.
Dans le
fameux récit,
le manteau, le "Journal de
Sa Majesté, l'Endeavour, dans
(Londres 1771) il y a "Un bref
vocabulaire du langage de Otaheite" consistant en 157 mots tahitiens, et
dans les récits de Bougainville : "Voyages autour du monde par la frégate
du Roi, La Boudeuse, et la flûte L'Étoile, en 1766, 1768 et 1769"
(Paris 1771), il est inséré un vocabulaire de 255 mots tahitiens. Il est très
probable que les missionnaires connaissaient l'un et l'autre de ces voca¬
bulaires très imparfaits, mais celui qu'ils reçurent à Portsmouth était tout
à fait différent. Il consistait en une centaine de pages pleines où les mots
étaient arrangés alphabétiquement et toutes les voyelles, accentuées. Le
vocabulaire avait été écrit par l'aspirant de marine Peter Heywood qui
imprimé
sous
voyage autour du monde, par le navire de
les années 1767, 1768, 1769, 1770 et 1771"
Société des
Études Océaniennes
744
avait
passé au moins deux ans à Tahiti et qui avait été condamné à la
peine de mort pour avoir pris part à la mutinerie de la "BOUNTY". Il lui
avait été, très rapidement par la suite, accordé un pardon complet. On ne
sait rien sur le pasteur qui avait donné aux missionnaires le vocabulaire,
ni comment il était entré en sa possession. On sait seulement que Peter
Heywood se trouvait dans la ville du Cap comme second lieutenant du
"Fox",
en
l'an 1796.
La
première mention de l'étude du tahitien par les missionnaires se
rapport sur le voyage du "DUFF", où il est dit que les
missionnaires "s'appliquaient à l'étude de la langue Otaheitienne et
donnaient des preuves évidentes de la plus grande application quant à
leur désir et aptitude à acquérir cette langue".
trouve dans le
Le 5 Mars
1797, le "DUFF' arriva à Tahiti et de nombreux tahitiens
ne semble pas que les missionnaires fussent déjà prêts à
se faire comprendre par eux-ipêmes dans la langue de l'île, mais deux
suédois, Haggerstein et Lind, qui avaient été laissés là par leur navire,
parlaient un anglais relativement correct et comme ils étaient suffisam¬
ment accoutumés à la "langue Otahetienne" les missionnaires "eurent
l'espoir qu'ils leur seraient d'un grand service".
Lorsque le "DUFF' quitta Tahiti pour visiter d'autres groupes d'îles,
Haggerstein ainsi "qu'une jeune femme du nom de Tanno Mano avec
laquelle il avait vécu quelque temps comme sa femme" se joignirent aux
missionnaires car Mr Crook pensait qu'ils seraient une aide pour leur
apprendre le tahitien. Il est aussi affirmé que Tanno Mano fut d'un grand
service pour Mr Crook et pour d'autres qui étudiaient la langue car "par
son moyen, beaucoup de corrections furent apportées à la prononciation
défectueuse du Suédois, et de meilleures explications furent données aux
vinrent à bord. Il
mots".
Le 4 Août
retourner en
1797, le "DUFF" quitta définitivement Tahiti pour
Angleterre, laissant les missionnaires seuls dans les îles.
Lorsque le "DUFF" jeta l'ancre dans la baie, toujours renommée, de
Matavai, un campement fut établi à terre et c'est là que les missionnaires
demeurèrent lorsque le Duff partit pour l'Angleterre. Il est certain qu'il ne
se passa pas beaucoup de temps avant que les missionnaires rencontrent
de sérieuses difficultés et bon nombre d'entre eux quittèrent Tahiti l'année
suivante !
Puckey écrit de Port Jackson le 21 Juillet 1799 :
là et cela fut attribué
suédois, qui en dépit
notre hospitalité se montra secrètement notre ennemi".
"Nos vies furent en grand danger à ce moment
surtout à la fausse attitude de Peter Haggerstein le
de
Clode écrit dans
une lettre datée de Port Jackson le 26
Septembre
"Peter Haggerstein, un suédois, qui a résidé dans les îles depuis
plus de 5 ans, est sérieusement mis en cause pour avoir gardé à terre les
matelots d'un bateau échoué, afin de favoriser le jeune roi Otoo dans ses
mauvais desseins d'anéantir l'équipage et de dérober les marchandises" et
"nous fûmes, nous aussi, prêts d'être tués et nous attribuons tout cela à ce
1799 que
Société des
Études
Océaniennes
745
méchant homme de suédois, et quoique nous nous soyons efforcés de lui
plaire par des présents, il se montra pourtant un grand ennemi à notre
égard..."
Ce n'est pas la place ici de faire le récit de ce qui est arrivé aux
missionnaires jour après jour et quelles furent leurs expériences, mais il
semble qu'ils firent immédiatement tous les efforts possibles pour
apprendre la langue.
Ce n'était pas seulement l'intention des missionnaires de Londres
d'apporter le salut des âmes aux autochtones, mais aussi le concours de la
civilisation européenne, et ils avaient l'intention de donner aussi
rapidement que possible la Bible traduite et imprimée en tahitien.
La traduction des différentes parties de la Bible fut entreprise
presque à leur arrivée, mais les missionnaires découvrirent vite que ce
travail entraînait des complications d'une nature excessivement difficile à
surmonter. Il n'y avait pas à Tahiti, à cette époque là, de langage écrit et le
langage parlé était celui d'un peuple primitif, qui n'avait même jamais
connu l'usage des métaux.
Les premiers explorateurs avaient indiqué que la langue était assez
facile à apprendre parce qu'elle ne comprenait que peu de mots : ils
l'avaient probablement crue facile à connaître, pour ce qui leur était
absolument nécessaire. Ils n'avaient, cependant, pas réalisé que le tahitien
était un langage riche et très difficile à cause des préfixes, suffixes et
infixes nécessaires pour exprimer les finesses de la langue et pour
expliquer avec une grande précision n'importe quelle idée venant
couramment à l'esprit des autochtones.
Les missionnaires, cependant, se rendirent compte rapidement de ces
difficultés et M. Nott comprit, un des premiers, que le travail ne pouvait
être entrepris d'une manière laissée au hasard. Leur problème était celui
de préserver pour les générations à venir, la partie classique de la langue,
d'établir sa grammaire et de créer certains mots nouveaux lorsqu'ils
seraient nécessaires dans leur travail et dans la vie de chaque jour. Le
travail était immense.
Avant
qu'ils puissent espérer faire quelques progrès dans la
Écritures, ils avaient à consigner par écrit la langue de
traduction des
Tahiti.
Puckey écrit de Port Jackson le 1er Septembre 1799 : "Mr Broomhall
Nott, ces chers jeunes gens, ont fait un rapide progrès dans la
langue et avant que vous ne receviez ceci, ils auront prêché plusieurs fois
aux autochtones. Mon frère William est en route pour l'Angleterre...
...Il est bien admis par tous les frères que sa connaissance dans le
langage otahetien était supérieure à la nôtre, lorsque nous avons quitté
et
Mr
l'Ile".
Les missionnaires essayèrent de se mettre en rapport avec des
indigènes, les plus remarquables, afin de connaître la signification exacte
de différents mots, mais ils rencontrèrent de grandes difficultés car un
simple mot peut signifier tellement de choses différentes, lorsqu'il est
énoncé avec des différences presque imperceptibles de prononciation. De
Société des
Études
Océaniennes
744
avait
passé au moins deux ans à Tahiti et qui avait été condamné à la
peine de mort pour avoir pris part à la mutinerie de la "BOUNTY". Il lui
avait été, très rapidement par la suite, accordé un pardon complet. On ne
sait rien sur le pasteur qui avait donné aux missionnaires le vocabulaire,
ni comment il était entré en sa possession. On sait seulement que Peter
Heywood se trouvait dans la ville du Cap comme second lieutenant du
"Fox",
en
l'an 1796.
La
première mention de l'étude du tahitien par les missionnaires se
rapport sur le voyage du "DUFF", où il est dit que les
missionnaires "s'appliquaient à l'étude de la langue Otaheitienne et
donnaient des preuves évidentes de la plus grande application quant à
leur désir et aptitude à acquérir cette langue".
trouve dans le
Le 5 Mars
1797, le "DUFF' arriva à Tahiti et de nombreux tahitiens
vinrent à bord. Il ne semble pas que les missionnaires fussent déjà prêts à
se faire comprendre par eux-ipêmes dans la langue de l'île, mais deux
suédois, Haggerstein et Lind, qui avaient été laissés là par leur navire,
parlaient
anglais relativement correct et comme ils étaient suffisam¬
"langue Otahetienne" les missionnaires "eurent
l'espoir qu'ils leur seraient d'un grand service".
Lorsque le "DUFF' quitta Tahiti pour visiter d'autres groupes d'îles,
Haggerstein ainsi "qu'une jeune femme du nom de Tanno Mano avec
laquelle il avait vécu quelque temps comme sa femme" se joignirent aux
missionnaires car Mr Crook pensait qu'ils seraient une aide pour leur
apprendre le tahitien. Il est aussi affirmé que Tanno Mano fut d'un grand
service pour Mr Crook et pour d'autres qui étudiaient la langue car "par
son moyen,
beaucoup de corrections furent apportées à la prononciation
défectueuse du Suédois, et de meilleures explications furent données aux
un
ment accoutumés à la
mots".
Le 4 Août
retourner en
1797, le "DUFF" quitta définitivement Tahiti pour
Angleterre, laissant les missionnaires seuls dans les îles.
Lorsque le "DUFF'jeta l'ancre dans la baie, toujours renommée, de
un campement fut établi à terre et c'est là que les missionnaires
demeurèrent lorsque le Duff partit pour l'Angleterre. Il est certain qu'il ne
se passa
pas beaucoup de temps avant que les missionnaires rencontrent
de sérieuses difficultés et bon nombre d'entre eux quittèrent Tahiti l'année
Matavai,
suivante !
Puckey écrit de Port Jackson le 21 Juillet 1799 :
en grand danger à ce moment là et cela fut attribué
surtout à la fausse attitude de Peter Haggerstein le suédois, qui en dépit
de notre hospitalité se montra secrètement notre ennemi".
"Nos vies furent
Clode écrit dans
une lettre datée de Port Jackson le 26 Septembre
"Peter Haggerstein, un suédois, qui a résidé dans les îles depuis
plus de 5 ans, est sérieusement mis en cause pour avoir gardé à terre les
matelots d'un bateau échoué, afin de favoriser le jeune roi Otoo dans ses
mauvais desseins d'anéantir l'équipage et de dérober les marchandises" et
"nous fûmes, nous aussi, prêts d'être tués et nous attribuons tout cela à ce
1799 que
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Études
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méchant homme de
suédois, et quoique nous nous soyons efforcés de lui
plaire par des présents, il se montra pourtant un grand ennemi à notre
égard..."
Ce n'est pas la place ici de faire le récit de ce qui est arrivé aux
missionnaires jour après jour et quelles furent leurs expériences, mais il
semble qu'ils firent immédiatement tous les efforts possibles pour
apprendre la langue.
Ce n'était pas seulement l'intention des missionnaires de Londres
d'apporter le salut des âmes aux autochtones, mais aussi le concours de la
civilisation européenne, et ils avaient l'intention de donner aussi
rapidement que possible la Bible traduite et imprimée en tahitien.
La traduction des différentes parties de la Bible fut entreprise
presque à leur arrivée, mais les missionnaires découvrirent vite que ce
travail entraînait des complications d'une nature excessivement difficile à
surmonter. 11 n'y avait pas à Tahiti, à cette époque là, de langage écrit et le
langage parlé était celui d'un peuple primitif, qui n'avait même jamais
connu l'usage des métaux.
Les premiers explorateurs avaient indiqué que la langue était assez
facile à apprendre parce qu'elle ne comprenait que peu de mots : ils
l'avaient probablement crue facile à connaître, pour ce qui leur était
absolument nécessaire. Ils n'avaient, cependant, pas réalisé que le tahitien
était un langage riche et très difficile à cause des préfixes, suffixes et
infixes nécessaires pour exprimer les finesses de la langue et pour
expliquer avec une grande précision n'importe quelle idée venant
couramment à l'esprit des autochtones.
Les missionnaires, cependant, se rendirent compte rapidement de ces
difficultés et M. Nott comprit, un des premiers, que le travail ne pouvait
être entrepris d'une manière laissée au hasard. Leur problème était celui
de préserver pour les générations à venir, la partie classique de la langue,
d'établir sa grammaire et de créer certains mots nouveaux lorsqu'ils
seraient nécessaires dans leur travail et dans la vie de chaque jour. Le
travail était immense.
Avani
qu'ils puissent espérer faire quelques progrès dans la
Écritures, ils avaient à consigner par écrit la langue de
traduction des
Tahiti.
Puckey écrit de Port Jackson le 1er Septembre 1799 : "Mr Broomhall
Nott, ces chers jeunes gens, ont fait un rapide progrès dans la
langue et avant que vous ne receviez ceci, ils auront prêché plusieurs fois
aux autochtones. Mon frère William est en route pour l'Angleterre...
...Il est bien admis par tous les frères que sa connaissance dans le
langage otahetien était supérieure à la nôtre, lorsque nous avons quitté
et
Mr
l'Ile".
Les missionnaires essayèrent de se mettre en rapport avec des
indigènes, les plus remarquables, afin de connaître la signification exacte
de différents mots, mais ils rencontrèrent de grandes difficultés car un
simple mot peut signifier tellement de choses différentes, lorsqu'il est
énoncé avec des différences presque imperceptibles de prononciation. De
Société des
Études
Océaniennes
746
même, il leur prit beaucoup de temps pour distinguer les différentes
gutturales brèves qui sont communes en tahitien et ou une
prononciation inexacte peut rendre une phrase incompréhensible.
Pendant l'année 1805, l'étude de la langue fut poursuivie énergiquement ; il ne faut jamais oublier que ce travail était la première tentative
par une mission de mettre par écrit une langue vernaculaire, et que cette
tentative était faite par des hommes qui n'avaient jamais été formés pour
intonations
un
tel travail.
Dans les rapports de la mission, il est
réunion s'est tenue dans laquelle il a
consigné que le 11 Mars 1805,
été "proposé que les lettres de
l'alphabet anglais ou romain devraient être utilisées et qu'on leur
donnerait des noms tahitiens pour une présentation plus facile et plus
naturelle au milieu des autochtones. Un alphabet fut établi et acquiescé à
la majorité ; il était composé des lettres qui étaient supposées exister dans
la langue. Il faut observer, cependant, que nos jugements dans ce
problème délicat (c'est-à-dire les lettres existant dans la langue)
différaient beaucoup".
Le 9 Avril 1806, les rapports consignent "que notre collection se
monte à 2100 mots, en dehors de 300 noms d'arbres, de plantes,
d'oiseaux, d'insectes, etc. Il semble bien que la langue tahetienne ait été
très mal comprise par les européens en général. Tous les vocabulaires que
une
nous
avons
vu
sont
fondamentalement déficients et erronés,
non
seulement dans la
prononciation et la signification des mots, mais jusque
dans les principes fondamentaux de la langue. Celle-ci a été signalée
(comme une langue) extraordinairement facile à acquérir, mais nous en
savons le contraire après une longue expérience".
En 1851, "Un dictionnaire tahitien et anglais" fut imprimé sur les
Presses de la Société Missionnaire de Londres, à Tahiti. Il est assez
étonnant dans la préface de trouver ce qui suit :
"Après l'arrivée des missionnaires, un grand travail fut entrepris
pendant les premières années de leur résidence dans les îles, pour collecter
les matériaux d'un dictionnaire, lequel fut finalement composé avec un
soin considérable et envoyé en Angleterre pour y être imprimé par les
Directeurs de la Société des Missions de Londres ; mais comme les
missionnaires n'étaient pas, à cette époque, pleinement d'accord entre eux
au sujet de l'orthographe, les Directeurs recommandèrent un délai pour
son impression afin de voir par la suite quel genre de modifications il
serait souhaitable de faire. Le présent dictionnaire fut mis en ordre par le
Revd. John Davies de Papara, et il était prêt pour l'impression voici déjà
plus de 12 ans ; une partie en avait alors été publiée par le Revd. D.
Darling à Punaauia, mais le manque de caractères d'imprimerie et
d'autres inévitables circonstances, interrompirent l'avance du travail. La
courte grammaire qui suit est une deuxième édition avec des corrections
et des additions de celle qui fut publiée en 1823".
D'après la dernière observation, il semble très probable que
différents travaux aient été poursuivis pendant les premières années,
concernant la traduction des Évangiles et des Écritures ; un manuscrit de
Société des
Études
Océaniennes
747
la
prière du Seigneur en tahitien, datant de cette période, existe toujours.
De très grandes difficultés surgirent pour les missionnaires lorsque la
guerre civile éclata à Tahiti en 1802.
Hassel écrit de Paramatta le 5 Août 1802
:
"Le
capitaine Bunkier qui a apporté la lettre me dit que les frères sont
dans une situation misérable, n'ayant rien qu'ils puissent encore dire leur
appartenir car le district de Matavai a été occupé et ils s'attendent, entre
Pomare et un autre chef, à une guerre qui verra l'anéantissement de la
mission..."
"Peu de temps
après l'"Amiral" et le "Porpoise", un bateau de guerre
quitta Port Jackson se rendant directement vers Otaheite, à la recherche
de conserves de porc pour le gouvernement. Son excellence, le
Gouverneur King, m'envoya chercher et me demanda d'aller avec le
Capitaine pour aider au troc des marchandises, ce que j'acceptai, pensant
que je pourrai voir l'état véritable de la Mission et avoir un moyen de
ramener de cette île ces onze "errants"
qui avaient causé une si grande
inquiétude aux frères".
Le point le plus avancé de la civilisation, en ce temps là, était Port
Jackson
avait
Nlle-Galles du Sud où la Société des Missions de Londres
station à Paramatta. Une très volumineuse correspondance
en
une
entre les
stations à Tahiti et Paramatta est classée dans les archives de la
Société des Missions de Londres et on y trouve également un grand
nombre de lettres envoyées directement. A travers ces lettres, on peut se
faire une image très exacte de ce qui s'est passé à Tahiti.
En
1803, le Roi Pomare I meurt et il
est
remplacé
par son
fils.
Hassel écrit de Paramatta le 10 Mars 1804 :
"Les dernières nouvelles que nous avons reçu d'Otaheite datées
Matavai le 2 Septembre 1803 ne sont pas très réjouissantes.
de
Le
Revd. Mr Youl nous écrit : "J'aimerai avoir la joie de vous dire que la
Parole de Dieu a été acceptée par chacune des personnes avec lesquelles
nous vivons ; les indigènes sont en rapide diminution
et nous nous
demandons avec anxiété quelle sera la fin. Il nous apparaît que c'est la
nourriture qui est la cause de la mort de ces gens et aucun de ceux qui ont
la fièvre n'a été
affection fatale
vu se
rétablir... Le roi de Tiaraboo
est
décédé de la même
qui en a emporté tant et depuis, certains ont même dit que
nos prières étaient la cause de la mort du Roi !... Le frère
Shelley
m'informe que le jour où le "Dart" a quitté Matavia (ce même bateau qui
a apporté les dernières lettres de Tahiti) notre ami Poomara conduisait un
chargement de cochons, etc. vers le navire, lorsqu'il a été terrassé par la
mort ; transporté hors du canot, il est mort en un instant".
Les missionnaires n'avaient pas confiance pour recommencer avec
Pomare II mais il donna la preuve d'un désir sincère d'apprendre et
montra un vif intérêt pour l'écriture.
La guerre civile continua avec quelques interruptions et en 1808,
Pomare fut battu et se retira à Eimeo. Les missionnaires quittèrent
Tahiti au même moment, certains restant dans les îles environnantes,
certains allant en Australie et d'autres rentrant en Angleterre. Dans
Société des
Études
Océaniennes
748
l'ouvrage de Horne "l'Histoire de la Société des Missions de Londres", il
dit qu'au moment des troubles à Tahiti "les maisons des missionnaires
furent brûlées complètement, les outils et les caractères d'imprimerie
convertis en balles de fusils et armes de guerre". La seule indication que
l'on peut trouver dans les comptes rendus de la S.M. de Londres sur le fait
qu'une presse à imprimer avait été reçue par les missionnaires à ce
moment là, est une référencé à ce qui est appelé "Une machine à copier" et
aussi à ce qui est nommé "du matériel à imprimer". Ces deux colis furent
inclus dans la cargaison du "DUFF' lors de son premier voyage. Aussi
loin qu'il m'a été donné de faire des recherches, aucun imprimé n'est
jamais sorti de cette machine.
est
Une lettre de
dit ceci
R.
Campbell datée de Paramatta le 4 Mars 1809
:
"Par le brick "Persévérance" qui est arrivé ici le 21 du mois dernier,
j'ai reçu la lettre ci-jointe des missionnaires de Otahaitie qui, à ce qu'il
paraît, ont été contraints d'abandonner cette île par suite d'une guerre
redoutable qui a éclaté au milieu des indigènes et ils sont partis pour
Huahine où ils ont été conduits sains et saufs par Mr Hans Kurumgaard,
le patron du navire sus-mentionné, le 12 Novembre. Ils lui ont fourni les
obligations ci-inclus, afin d'indemniser le propriétaire, en tirant sur vous
pour la somme que vous voudrez bien considérer comme compensation.
Malgré ces circonstances de détresse Mr Kurumgaard ne peut se
dispenser de réclamer ces obligations... Il s'excuse de vous demander ces
quelques frais".
Un rapport de Mr Davies daté de Sydney le 2 Février 1810 contient
aussi une quantité d'informations concernant Tahiti où "la rebellion
ouverte a
éclaté dans le district de Matavai dans la nuit du 6 Novembre
(1808) et s'est vite répandue tout autour de l'île". Les frères Davies,
Tessier et Warner se sont échappés alors que les frères Hayward, Nott,
Scott et Wilson sont restés avec le roi et finalement sont
partis avec lui
pour Moorea. Haggerstein, le suédois qui avait été de quelque utilité pour
les missionnaires dans les débuts, a joué un grand rôle dans la révolte et
les missionnaires dans leurs lettres parlent
de lui d'une manière plutôt
méprisante.
Lorsque Bicknell quitte Tahiti le 29 Mai 1808, il emporte sans doute
Londres, le manuscrit complet d'un abécédaire (syllabaire) préparé par
John Davies qui devait être le
premier livre imprimé dans une langue de
l'Océanie et aussi le premier livre édité par la Société des Missions de
à
Londres.
C°
-
C'est le "Te Aebi no Taheiti" imprimé par Towsend, Powell et
Londres 1810. Il a été rendu compte de ce livre dans "The Eclectic
Review, Vol. VI, Part 1, Juin-Juillet 1810, page 417.
Le journal "The Christian Observer", Vol.
VII, page 204, Mars 1808
écrit
:
"Des nouvelles ont été reçues
grammaire,
un
vocabulaire,
un
Société des
de cette île (Otaheite)... Une
catéchisme, etc. dans la langue de
Études
Océaniennes
749
Otaheite
ont été
envoyés dans le pays. Nous nous réjouirons sincèrement
la persévérance de ces missionnaires qui, demeurés dans cette île
malgré leurs nombreuses causes de découragements soit, à la fin, suivie
de
ce
que
d'un heureux effet".
The Christian Observer, Vol IX, page
les informations suivantes
assidu à Otaheite depuis
:
646 du 7 Octobre 1810 donne
"Mr Bicknell, qui a été un serviteur fidèle et
le début, est arrivé voici peu de temps en
Angleterre. Il a quitté Otaheite en Mai 1808 et s'est arrêté à Port Jackson
avec l'espoir de trouver une
compagne adaptée à la vie dans cette station ;
mais n'ayant pas réussi, il est venu au
pays et s'est marié depuis à une
pieuse jeune femme avec laquelle il navigue sur le "Canada", un navire
expédié par le gouvernement avec une centaine de femmes condamnées à
la relégation. Mr et Mme Bicknell sont
accompagnés par quatre autres
femmes pieuses en route, maintenant, pour Port Jackson... Un abécédaire
(syllabaire) dans la langue tahitienne, envoyé de là-bas par les frères, a été
imprimé à Londres et Mr Bicknell en a emporté avec lui quelques
centaines d'exemplaires".
La Gazette de Sydney écrit le 4 Mars 1815 : "Le premier livre
imprimé dans la langue de Taheite ou Otaheite est un abécédaire
(syllabaire) ; de nombreux exemplaires en ont été faits, en Angleterre, à
partir d'une copie transmise par les missionnaires, mais comme il est
nécessaire de faire réviser les épreuves par ceux-là même qui ont la
connaissance de la langue et que le livre est susceptible de contenir de
nombreuses imperfections orthographiques, les
indigènes doivent
maintenant les déceler et les corriger avec bonne humeur et familiarité..."
Une lettre à la
Société, datée d'Eimeo le 13 Août 1816, signée par
missionnaires y compris Henry Bicknell affirme : "Les livres
(syllabaires) qui ont été imprimés à Londres et dont nous avons eu, nous
pensons environ 700 (exemplaires), sont épuisés depuis longtemps".
tous les
Henry Bicknell, au moment du voyage du "DUFF", est décrit
homme âgé de 29 ans et demi et "charpentier, scieur et charron
de profession". Il est mentionné qu'il a été le premier à offrir ses services à
la Société des Missions et a été le premier à débarquer du Duff sur la terre
comme un
de Tahiti, en 1797.
Au
de
d'Angleterre, Bicknell et sa femme, une nièce,
William Scott et sa femme trouvèrent
un
passage depuis Port Jackson en Juin 1811 et arrivèrent dans l'île de
Moorea quelques semaines plus tard. Ils furent les premiers de ceux qui
étaient partis en 1808 et 1809, à revenir (à Tahiti). Bicknell demeura
quelque temps à la station de Papetoai, à Eimeo puis s'établit à Matavai
jusqu'au début de 1818, puis avec Samuel Tessier, il ouvrit une nouvelle
station dans le district très peuplé de Papara au sud-ouest de Tahiti. C'est
là qu'il mourut le 7 Août 1820.
une
cours
son
retour
certaine Miss Christie ainsi que
Société des
Études
Océaniennes
750
En
1809, le roi Pomare revint à Tahiti et des jours meilleurs
la mission. Henry écrit de Paramatta le 17
commencèrent pour
Juin 1813 :
"Vous verrez par nos correspondances que nous avons des raisons
manifester aussi bien la miséricorde que le jugement. Le récit de
conversion du roi
de
la
au christianisme remplira sans doute vos
de tout véritable chrétien, de reconnaissance...
Le roi demeure de nouveau à Otaheite avec la perspective
encourageante d'être restauré paisiblement dans sa souveraineté au milieu
de cette île. Il n'y a pas de raison de douter qu'il est, non pas "le", comme
je pourrai m'aventurer à le dire, mais "un" des plus grands miracles de la
Grâce jamais offerte sur la scène de ce monde".
Après que le roi se fut converti au Christianisme, il prit plus d'intérêt
dans la traduction de différentes parties de la Bible en tahitien. Il avait
déjà, en 1802, appris à lire et à écrire et à son retour à Tahiti il passa une
bonne partie de son temps dans la petite île du port de Papeete, appelée
Motu Uta, travaillant à la traduction. En dépit des mauvaises langues de
l'époque disant qu'une certaine quantité de rhum était nécessaire pour le
mettre au travail, il aida incontestablement les missionnaires.
cœurs, et
les
Pomare
cœurs
"Mr Nott, entre autres curiosités, m'a montré une
de la traduction de l'Évangile de St Luc, exécutée par le
copie manuscrite
roi Pomare d'une
écriture fine et très nette. C'est à partir de cette copie que la première
édition de cet Évangile fut imprimée", écrit Tyerman dans "Journal des
Voyages et Traversées par les Revd. Daniel Tyerman et Georges Bennett
Esq." Londres 1831, Vol. I, page 66.
Le 21 Juin 1814, S. Marsden écrit de Paramatta
:
"Ils m'ont maintenant
envoyé l'Histoire de l'Ancien Testament afin
de la leur imprimer, ce que j'aurai à faire immédiatement. C'est un
événement magnifique que les Écritures, ou du moins certaines parties
importantes, puissent être imprimées en peu de temps dans la langue
naturelle des Iles de la Mer du Sud. Je vous en enverrai un exemplaire
par
le premier bateau qui partira d'ici pour l'Europe".
L'Histoire de l'Ancien Testament fut probablement imprimée en
1815, mais "Te Parou no Tahiti" fut le premier livre à être réimprimé en
tahitien à Sydney.
George HUGHES fut le premier imprimeur en Australie et les
premières impressions datent de Novembre 1795. La machine à imprimer
utilisée était une petite presse en bois, apportée, avec des caractères
d'imprimerie par la première flotte du Gouverneur PHILIP. Elle avait été
laissée inoccupée jusqu'à ce que le Gouverneur HUNTER découvre
George HUGHES parmi les nouveaux venus et il annexa au Palais du
Gouvernement une imprimerie où étaient publiées ses ordonnances
administratives.
Georges HOWE, fut le deuxième imprimeur en Australie. (Il avait
appris ce métier dans l'atelier d'imprimerie de son père, puis à Londres.
En 1800, il est en Australie où il est
imprimeur du Gouvernement. Il lance
Société des
Études
Océaniennes
751
en
1803
un
journal "The Sydney Gazette"... Son fils R. HOWE lui
succéda).
Le premier livre en tahitien imprimé par HOWE ne porte pas de
date, mais tout porte à croire qu'il fut imprimé en Décembre 1813. A
partir de cette date et jusqu'en 1815, HOWE imprima un total de 7 livres
en tahitien pour le compte de la L.M.S. et ces livres ont un
égal intérêt
aussi bien pour ceux qui étudient les débuts historiques de Tahiti que
pour ceux qui étudient l'histoire de l'Australie. Ces livres sont de toute
façon excessivement rares.
C'est à la "Sydney Gazette" qu'est dû l'essentiel de ce que l'on connaît
sur les livres imprimés à Sydney et cette information se trouve donnée
pour chacun des livres séparément.
On ne peut trouver qu'une seule raison sérieuse pour que le tahitien
ait été imprimé par R. HOWE, fils et successeur de Georges HOWE, c'est
le Rapport daté de Raiatea le 18 Octobre 1821.
Les livres imprimés à Sydney ne recevaient pas l'approbation entière
des directions de Londres. Il y avait ceux qui pensaient que le premier
devoir des missionnaires était de donner aux autochtones les textes
mêmes de la Bible dans leur propre langue. Certains des missionnaires
avaient pourtant trouvé que ce n'était pas la meilleure façon de débuter.
Ils avaient préféré commencer avec un syllabaire, un catéchisme abrégé,
et un résumé
des faits
principaux de l'Ancien Testament, mais quelquesn'approuvaient pas que les missionnaires fassent de
telles sélections et de telles compilations des Écritures. La vérité était que
les traductions de la parole de Dieu dans cette langue encore peu
travaillée apparaissaient aux missionnaires comme une oeuvre très
délicate et ils avaient peur que par suite de leur manque d'assurance (dans
la connaissance de la langue) il soit donné une transcription dénaturée de
la Parole de Dieu sous le nom de traduction. En composant un résumé
comme l'Histoire Biblique,
les passages difficiles seraient évités et ce que
l'on penserait facile à traduire serait utilisé ; on laisserait les endroits
difficiles jusqu'à ce qu'on ait une plus grande connaissance de la langue et
de ses particularités, ce qui résoudrait certaines des difficultés actuelles.
C'est ce qui par la suite fut trouvé être le cas.
uns
des Directeurs
Le
secrétaire, Mr BURDER, écrit de Londres le 15 Décembre 1815
"Les Directeurs désirent
recommander très sérieusement
:
d'imprimer
les textes mêmes des Écritures plutôt que toute autre rédaction humaine
composée à partir d'elles. Ils pensent que c'est de loin la chose la meilleure
et qu'ainsi les autochtones pourront avoir l'authentique Parole de Dieu.
A cela, les missionnaires répondent avec beaucoup de justesse qu'ils
pensent eux aussi de la même façon, mais que les Directeurs semblent
oublier les raisons et les circonstances qui les poussent à la compilation.
Les Directeurs semblent penser que c'est par un choix délibéré qu'ils ont
entrepris cette méthode. Les missionnaires envisagent les choses très
différemment. C'est un respect de conscience pour la Parole de Dieu qui
les a empêché d'entreprendre trop vite la traduction d'un livre particulier,
de peur qu'ils le déforment par une mauvaise transcription et ils sont
vous
Société des
Études
Océaniennes
752
pleinement convaincus que cela aurait été plus ou moins le
traductions faites trop tôt et trop hâtivement.
cas, pour
des
■Le missionnaire W.P. CROOK qui vivait à Sydney, en 1814, étudia
l'imprimerie dans l'atelier de HOWE avec l'intention de revenir à Tahiti
pour installer une imprimerie sur la station. Le 1er Décembre 1814, il écrit
au
bureau central
:
"Nos chers
frères, à la date de leurs lettres, attendent journellement et
impatiemment les livres qu'ils ont envoyés ici pour être imprimés, mais
hélàs, il y a de bonne raison de croire qu'ils ne les recevront pas avant
douze mois... Je suis en train d'étudier la pratique du travail de
l'imprimerie et Mr G. HOWE, notre imprimeur, me promet que je serai
bientôt suffisamment compétent pour imprimer quelques petits travaux
que les tahitiens pourront désirer faire faire. J'ai été conduit à
entreprendre cela par suite des lettres des frètes DAVIES, NOTT et
TESSIER et il paraît bien qu'ils ne peuvent rien faire sans avoir une
imprimerie.
Si la Société des Missions voulait
matériel et le papier nécessaire,
tout le
nous
envoyer une
je serai qualifié
imprimerie avec
pour en
prendre la
responsabilité avant qu'elle arrive..."
Le 17 Décembre 1814,
il écrit
:
"Je m'exerce constamment à la
pratique de l'imprimerie sur la Presse
du Gouvernement autant que mes travaux itinérants le permettent... et je
serai qualifié pour toutes sortes de petits travaux d'impression qui seront
demandés dans les îles, et j'espère être apte à en former d'autres. —
L'Histoire du Nouveau Testament est toujours ici, ainsi que cents livres
de cantiques. Le Catéchisme envoyé par le dernier transport est sous
presse et il sera terminé dans quelques semaines. J'ai beaucoup de
sympathie pour les frères DAVIES et TESSIER qui sont obligés de
veiller tard et de copier les leçons pour leurs étudiants".
W.P. CROOK aida probablement HOWE à l'imprimerie en 1814 et
grande partie de 1815 car le 29 Juin 1815, il écrit de nouveau de
Sydney :
"...Combien a été précieuse mon aide et combien il fut reconnaissant
pour quelques cantiques en tahitien que j'ai imprimés et lui ai envoyés en
lui disant qu'une imprimerie et un missionnaire connaissant le métier
serait d'une incalculable valeur pour la mission.
C'est dans ce but que j'ai fait des efforts pour me qualifier pour un
plein emploi dans les îles, et avec l'amabilité de M. GEO. HOWE,
l'imprimeur officiel du Gouvernement, j'ai vite appris la façon d'installer
une petite imprimerie et imprimer de
petites choses qui sont utiles à
Tahiti. Dans le même temps, j'ai écris au Revd. S. TRASY...
Que la Société veuille bien nous envoyer une presse et du matériel à
imprimer selon un inventaire que m'a fourni M. HOWE, l'imprimeur".
une
—
Il
n'y
semble-t-il, aujourd'hui, pour connaître l'ordre
imprimés de Sydney sont sortis. Quoique aucun
a aucun moyen
dans lequel certains des
Société des
Études
Océaniennes
753
des
exemplaires ne mentionne le lieu d'impression, il n'y a pas de doute
pourtant sur le fait qu'ils aient été imprimés à cet endroit.
Les "Leçons de lectures" (Reading lessons) semblent être le
dernier livre en tahitien imprimé par George HOWE et selon la "Gazette
de Sydney" les livres en stock ont été pratiquement tous expédiés à Tahiti
par T'Active" au début de l'année 1816. Plus tard dans l'année, il est
mentionné qu'un millier d'exemplaires de "Te Aebi no Tahiti" a été
envoyé vers les îles, mais après cette date aucune information ne peut être
—
trouvée
les Imprimés de Sydney.
1816, le Bureau central de la Société des Missions de Londres
envoya une presse à imprimer avec des caractères et du papier à la
Mission de Tahiti. La Presse y fut amenée par le brik "Queen Charlotte"
qui jeta l'ancre dans la baie de Taloo le 13 Février 1817. Il y avait à bord
William ELLIS qui avait été soigneusement formé comme imprimeur, sa
femme et une fille née pendant le voyage depuis Londres.
Peu de temps après l'arrivée d'ELLIS, il fut décidé qu'une nouvelle
station missionnaire serait installée à Afareaitu, de l'autre côté de l'île de
Moorea par rapport à Papetoai et juste en face de Tahiti.
En conséquence, ELLIS et deux autres missionnaires avec leurs
familles ainsi que les colis contenant l'imprimerie quittèrent Papetoai le
sur
En
25 Mars et arrivèrent
Dans le livre
sans
difficulté à Afareaitu le
jour suivant.
"Polynesian Researches" (1), publié
pour la première
1829, on trouve un charmant récit de l'installation de la station à
Afareaitu, de la construction de l'atelier d'imprimerie, de la mise en place
de la machine à imprimer et de la composition, le 10 Juin 1817, des
premières pages qui furent dans leurs formes définitives tirées par le roi
POMARE en personne, le 30 Juin. ELLIS dit :
"Quand on considérera que les bienfaits que les tahitiens tirent déjà
de l'éducation, et de la circulation des livres, ainsi que les avantages
grandissants dont les futures générations bénéficieront, dérivent de
l'installation de cette presse, on ne pourra regarder l'introduction de
l'imprimerie que comme un événement de bon augure. Le 30 Juin 1817
fut, pour cela un jour important dans les annales de Tahiti et il n'y a pas
dans la vie de POMARE... un acte dont il faudra se souvenir avec plus de
reconnaissance que le moment de l'impression de la première page du
premier livre publié dans les Iles de la Mer du Sud".
Le 5 Décembre 1817, D A VIES écrit d'Afareaitu au Revd. G.
fois
en
BURDER à Londres
"Je
vous
:
envoie ci-inclus la
première feuille imprimée de l'Évangile
de Luc ; je vous l'envoie comme à une personne particulière car les frères
n'ont pas l'intention d'en envoyer tant que le livre n'est pas achevé
complètement,
ce
qui j'espère
sera
fait dans
peu
de mois. En l'examinant,
pourrez remarquer que nous avons utilisé des "points" dans le but de
noter des mots complémentaires au texte car nous ne possédons pas
vous
d'"italiques". Nous
été obligés d'adopter et d'introduire un grand
d'autres mots étrangers, en les adaptant et
certains d'entre eux, afin de les conformer au génie
avons
nombre de mots grecs et
modifiant quelque peu
Société des
Études
Océaniennes
754
tahitien, chaque mot et chaque syllabe de chaque mot devant
toujours se terminer par une voyelle. Nous avons
remplacé le mot "Christ" partout où il apparaît par "Mesia" (Messie), ce
dernier mot ayant exactement la même signification et étant plus
facilement prononcé par les gens, du fait qu'il leur est impossible de
du
invariablement et
prononcer
"Christ" sans le modifier totalement et ainsi de détruire
entièrement
son
identité".
rapport de Davies, Crook et Ellis daté d'Afareaitu Eimeo, le
il est dit :
"Nous avons monté la presse à imprimer et commençons à imprimer,
Dans
un
2 Juin 1817,
vous le verrez par notre journal. Nous nous proposons
d'imprimer 2600 exemplaires d'une troisième édition de notre syllabaire
qui est maintenant amélioré par l'addition de plusieurs passages des
Ecritures, etc., et lorsque ceci sera terminé de continuer par 2000
catéchismes avec peut-être certains chapitres de la Genèse et de l'Exode en
complément. Nous imprimerons cela sur du papier indien acheté par le
frère Ellis dans la Colonie (Australie) sur le compte de la Société. Nous
nous proposons d'imprimer aussitôt que possible l'Évangile de Luc, sur
du papier qu'il a apporté avec lui d'Angleterre. Au moment où cela sera
terminé, nous serons tout près d'avoir épuisé notre stock de papier. Nous
pensons donc nécessaire de vous demander que nous soit envoyé, dès que
possible, une plus grande quantité de papier. Comme il faudrait une
longue période avant que nous recevions ce papier d'Angleterre, nous
pensons demander au Revd. M. Mardsen d'en acheter pour nous dans la
Colonie (Australie) si le prix est raisonnable".
comme
Apôtres et de l'Évangile de Matthieu
préparation et nous espérons qu'elles seront terminées
sous peu, si rien n'intervient entre temps. Les affaires dont nous avons
besoin pour la presse, les livres, les reliures, etc..., seront mentionnées
dans une liste finale. N'ayant qu'un seul type de caractères d'imprimerie,
une certaine quantité de formes "italiques" sont nécessaires pour
imprimer les mots complémentaires aux textes des Écritures, etc... Nous
n'avons pas les moyens de nous procurer quoique ce soit pour relier les
livres qui durent beaucoup plus longtemps s'ils sont cartonnés ; nous vous
avons donc écrit pour nous procurer des peaux à meilleur marché que
celles achetées dans la Colonie (Australie) et qui sont de meilleure qualité.
Le frère Ellis a amené d'Angleterre une paire de chassis (pour imprimer)
ce qui
n'est pas suffisant pour avoir des formats de différentes tailles
comme nous aimerions ; nous avons donc pris la liberté d'en commander
deux autres paires, le frère Ellis en a trouvé une paire dans la Colonie
(Australie), mais, ils sont si mal faits que c'est inutile d'en parler"... Dans
un P.S., il est
indiqué que 5650 casiers pour les lettres ordinaires, 670
pour les lettres capitales et 350 pour les lettres accentuées sont demandées
ainsi que de la peau de brebis, de veau et des emboîtages à relier.
"Les traductions des Actes des
sont
maintenant
en
Le 22
Septembre 1817» Davies écrit
"Nous
avons
au
mentionné que nous avons
Société des
Études
Revd. G. Burder :
imprimé une édition d'un
Océaniennes
755
syllabaire dont un exemplaire est joint ici, nous espérons dans un ou deux
jours achever une édition de 2300 de nos catéchismes tahitiens, auxquels
un nombre de textes intéressants des Écritures ont été
ajoutés. De ces
textes qui couvrent 16 pages, nous avons imprimé 1 100 exemplaires de
plus, leur utilisation est déjà prévue pour les catéchismes déjà existants,
1000 catéchismes imprimés précédemment dans la Colonie (Australie) se
trouvant en circulation dans la population.
Nous espérons continuer sans délai l'impression de Luc pour lequel
le papier amené d'Angleterre a été réservé. On peut le supposer suffisant
pour en faire 1000 exemplaires, ce qui est une quantité bien insuffisante
pour ceux qui ont déjà appris à lire : nous aimerions qu'il y ait
suffisamment de papier pour 5 à 6000. Lorsque Luc sera terminé, nous
espérons être capable d'aller de l'avant et d'imprimer l'Évangile de
Matthieu, car plus des deux tiers en sont traduits, mais cela dépendra de
la quantité adéquate de papier que nous recevrons. Nous désirons de tout
cœur pouvoir
envoyer au pays un ou deux exemplaires imprimés de
l'Évangile de Luc, car, ainsi, nous estimons que les directeurs pourront
faire plus facilement appel à l'aide de la Société Biblique, qui l'accordera
sans doute généreusement. Nous avons
appris que du papier avait été
accordé pour le travail de la mission, mais, nous ne savons pas s'il a été
envoyé ou non ; si c'est le cas, nous espérons que c'est le même genre de
papier que celui qui a été apporté par le frère Ellis et que nous avons
réservé pour l'Évangile de Luc. Vous vous apercevrez par notre journal
que les travaux de la mission sont encore troublés, mais nous espérons
avoir une autre occasion avant longtemps de vous écrire
plus longuement".
Le premier exemplaire du précieux volume de St Luc qui fut prêt, fut
envoyé à Henri Nott à Papetoai et le second "relié en rouge maroquin" au
roi Pomare.
Jusqu'à
ce moment là, les petits livres avaient été donnés gratuitement,
mais, il fut sagement décidé de demander quelque chose en échange d'un
exemplaire de l'Évangile. L'huile de coco étant une chose facile à se
procurer et d'une certaine valeur marchande fut choisie pour cela et les
livres, furent échangés contre des bambous remplis de cette huile.
L'Évangile de St Luc fut suivi par un livre de cantiques dont certains
étaient originaux et d'autres traduits de l'anglais. Ce dernier livre devient
très populaire à cause du plaisir que les autochtones prennent à des
récitations poétiques, leurs traditions et leur histoire étant exprimées de
cette
façon.
Les missionnaires écrivaient
Afareaitu le 6 Décembre 1817
au
Revd. G. Burder à Londres
depuis
:
"Lorsque T'Active" arriva, l'Évangile de Luc était sous presse et les
premières feuilles déjà imprimées ; à la réception du papier si
gracieusement offert par la "Société Biblique Britannique et Étrangère",
nous résolûmes sur le champ de porter le nombre d'exemplaires, de 1500
prévus selon nos réserves totales de papier à 3000, une quantité plus
adaptée au grand nombre de gens qui savaient lire. Il y a en effet un grand
Société des
Études
Océaniennes
756
que la lecture puisse se généraliser dans ces lies. Nous avons écrit à
la Société Auxiliaire des Missions de Nouvelle-Galles du Sud pour avoir
espoir
des peaux, etc..., pour relier les livres ; il n'est guère utile en effet
mettre entre les mains des autochtones sans qu'ils soient fortement
de les
reliés.
Nous espérons que vous pourrez nous envoyer des réserves de cartons
minces, de peaux, etc... pour relier les autres livres à imprimer.
En ce qui concerne les traductions, l'Évangile de Matthieu est près
d'être achevé et les Actes des Apôtres sont en route. Nous avons écrit à la
Société Auxiliaire des Missions de N.S.W. pour du papier, afin
d'imprimer l'Évangile de Matthieu, ce qu'elle obtiendra, nous l'espérons,
de la Société Biblique Auxiliaire, de N.S.W. Comme la Société Biblique a
si généreusement et abondamment pris en charge des travaux de cette
sorte, vous aurez peut-être le moyen de faire apj>el à elle pour du papier
afin d'imprimer les Actes et d'autres parties des Écritures ; comme nous le
souhaitons, la traduction des Livres Saints sera dorénavant poursuivie
sans interruption. Le papier que nous recevrons de la Société Biblique
sera totalement et exclusivement réservé à imprimer les Écritures sans
notes, ni commentaires. Nous faisons particulièrement appel à vous pour
du papier, pour l'impression de livres élémentaires, etc... pour l'usage des
Écoles".
1818, il fut décidé que les missionnaires poseraient des jalons
réoccuper leurs stations primitives à Tahiti et garderaient la station
d'Afareaitu à Eimeo (Moorea) ; ils en ouvriraient aussi une nouvelle à
En
pour
Huahine aux "Iles Sous-le-Vent".
Les "Iles-Sous-le-Vent" doivent leur
vent de Tahiti ; elles furent appelées dès
nom du fait qu'elles sont sous le
le début Iles de la Société par le
Capitaine Cook en honneur pour la Société Royale de géographie sous la
recommandation de laquelle les premiers voyages avaient été entrepris.
Il ne semble pas que les missionnaires furent d'accord autant qu'on
l'aurait souhaité. Il n'y eut pas de contestation, mais certaines
correspondances montrent bien qu'il dut y avoir de sérieux différends.
Henri écrit d'Eimeo
en
Mai
1822
:
1821, qui est maintenant entre mes mains, je
vois qu'il est fait mention, en ce qui me concerne, d'avoir été employé un
certain temps à la composition d'une grammaire tahitienne ; et lorsque ce
fut terminé, j'aurai projeté de commencer la traduction de quelques
passages des Écritures Saintes, et que les premières portions vers lesquels
se dirigèrent mes premiers essais
furent probablement le livre d'Ésaï et
l'Épître aux Éphésiens ! Avant ce moment là, vous devez savoir qu'à la
place des livres précités, j'avais déjà pris en charge les livres de Josué et
des Juges (les frères Barff et Ellis ne connaissant pas mes intentions
avaient, eux, entrepris les livres d'Esaï) et que je fus parfois aidé par mes
collègues. Il n'y a pas encore beaucoup de travail de fait dans la
traduction de ce dernier livre (Juges), mais le premier sera, je l'espère
bientôt prêt pour l'imprimerie. En ce qui concerne la grammaire, j'ai un
peu honte de vous informer de son destin. Alors, que je l'avais à peu près
achevée, constatant que le frère Nott et le Roi, dans la traduction qu'ils
avaient en cours, n'avaient pas encore renoncé, dans l'alphabet tahitien et
"Dans le rapport pour
Société des
Études
Océaniennes
757
dans la
langue, non seulement aux lettres W et Y, mais, encore au b et au
(lettres que j'ai toujours considérées aussi nécessaires en tahitien que
dans notre langue) et entendant dire que le frère Crook avait fait de même
dans le vocabulaire qu'il établissait, je fus quelque peu désappointé et
vexé, imaginant que ce qu'ils étaient en train de faire, serait par
conséquent inutile, au moins en ce qui concerne l'orthographe ; aussi par
dépit, et dans une sorte d'irritation, je jetai ma grammaire au feu, celle là
même pour laquelle j'avais peiné si souvent, trouvant que les frères des
Iles-Sous-le-Vent, tout autant que la majorité des frères ici même, étaient
d'avis qu'on garde le b et le d au moins ; à cause de cela je conservai ma
traduction actuelle. Quoique ces lettres ne fussent pas employées dans le
manuscrit de la traduction de Jean, faite par Nott, pourtant le frère Ellis
dans l'impression de l'édition des Iles-Sous-le-Vent, et le frère Bourne
dans l'impression de l'édition des Iles du Vent les ont employé à bien des
endroits où elles devaient se trouver peut-être pas partout. J'espère que
le frère Darling les introduira dans les Actes qui est aussi, près d'être
imprimé. Il serait très préjudiciable à la langue d'exclure ces lettres. Si il
d
-
est
et
décidé de terminer la traduction actuellement
si aucun des frères n'a encore projeté un tel
reprendrai peut-être de
nouveau
en cours
travail
la grammaire".
des livres sacrés
par
devers lui, je
Les missionnaires
Wilks
furent
qui quittèrent (Moorea) pour Tahiti, s'établirent à
Harbourg, et les premiers livres qui portent l'ex-libris tahitien
imprimés à cet endroit. En 1819, une nouvelle station fut ouverte à
Burder's Point de l'autre côté de l'île. Là aussi, les missionnaires durent
avoir des déboires, car en 1822, Bourne partit de là pour Tahaa, sans
donner de raisons apparentes.
Darling écrit de Burder's Point le 25 Juillet 1822 :
de raisons suffisantes pour s'en aller,
particulièrement lorsque nous considérons qu'il a rejoint une mission où il
était imprimeur et qu'il l'a quittée sans laisser d'imprimeur. Le frère
Bourne ne semble pas penser que sa connaissance de l'imprimerie devrait
avoir un grand poids dans la balance, autrement je crois et je pense que la
plupart des frères feraient la même chose. Si, en ce qui concerne le travail
sur la station, un seul est suffisant s'il est en bonne santé, par contre les
travaux de la station et les affaires de l'imprimerie sont beaucoup trop
pour le travail d'un seul. Aussitôt, que j'ai su que M. Bourne était décidé à
quitter la mission des Iles du Vent, je me suis senti plus responsable des
affaires de l'imprimerie. L'atelier d'imprimerie a été construit, les presses
installées à cette station-ci et personne pour s'en occuper, c'est pourquoi
j'ai décidé, avec la force du Seigneur, d'essayer de faire ce qui m'était
possible, ayant ou non la connaissance suffisante de cet art pour
entreprendre l'impression des Écritures etc... Et maintenant je me réjouis
et je rends grâce d'avoir réussi quelque peu.
Le frère Bourne est parti en Février, à peine avais-je imprimé les
premières leçons pour les écoles et pour les autres îles, ainsi qu'un système
d'arithmétique et des tables chronologiques. Je viens tout juste de
terminer la composition de notre rapport pour 1821, qui n'avait pas
"Frère Bourne n'a pas
Société des
Études
Océaniennes
758
imprimé jusqu'ici et le tiers des pages des Actes des Apôtres.
le Seigneur me permettra de terminer les Actes. Notre
rapport pour l'année 1822 est aussi sous presse, mais ne sera pas prêt pour
1-e prochain départ. Je trouve que de m'occuper des affaires de
l'imprimerie prend beaucoup de mon temps, mais j'ai la conviction que le
peuple en bénéficiera et que Dieu sera glorifié à travers les Écritures
imprimées dans la langue ; je donne allègrement mon temps pour cet
objectif'.
"Le frère Bourne ayant pris tous les caractères d'imprimerie pour les
emmener avec lui aux Iles-Sous-le-Vent, il n'y a seulement ici que la
moitié de ce que la députation a amené avec elle et qui a été laissé à Tahiti,
c'est-à-dire deux sortes de caractères, le Long Prima et la petite taille deux
et le pica.
encore
été
J'espère
que
Les lettres "u" et "i" du "Long Prima" sont trop courtes pour la
composition des Actes, et je suis obligé d'utiliser des "n" à la place de "u"
pour les agrandir. J'aimerai qu'un plus grand nombre de ces deux lettres
me soient envoyées ainsi que des lettres capitales de différentes sortes
pour des petites feuilles et les livres de lecture car bien peu ont été laissés à
Tahiti. Je n'avais pas conscience que j'en aurai besoin lorsque M. Bourne
est parti, car alors je me serai opposé à ce qu'il prenne un type unique de
caractère sachant que les Iles Sous-le-Vent en avaient davantage
autrefois".
Bien que
Bourne fut Pimprimeur expérimenté à Burder's Point,
Darling devait avoir plus d'expérience d'après ses propos, que ce qu'il dit
dans
sa
lettre.
Apôtres" fut probablement le premier livre
Darling à Burder's Point et dans une lettre datée de Tahiti le
1er Octobre 1823, nous voyons qu'il est devenu expert pour la direction de
l'imprimerie. D'après le rapport de la station à Burder's Point en 1822, on
a vu qu'il avait commencé et déjà imprimé la première moitié des épreuves
de la grammaire de la langue tahitienne, "que j'espère être capable de vous
envoyer, aussi bien que les Épîtres de St Paul, mentionnées dans le
rapport, par le premier courrier, si toutefois ma santé se poursuit, car tout
Le livre des "Actes des
imprimé
par
dépend de cela".
"J'ai
travail
d'impression sous ma direction et j'ai à faire toute
composition et les corrections etc... pour me perfectionner, ce qui me
prend tout le temps que j'employais précédemment pour la traduction
lorsque M. Bourne avait la charge de l'imprimerie. J'ai traduit les 3
Épîtres de Jean et celle de Judes et d'autres passages, avant que
M. Bourne quitte Tahiti, mais convaincu que ce qui est traduit ne peutêtre en bénéfice au peuple s'il n'est pas imprimé, cela me conduit à laisser
tout le
la
la traduction
aux
autres
frères
et à tourner mon
attention
sur
le service de
l'imprimerie".
En
étaient arrivées d'Angleterre. L'une
Harbourg et l'autre fut placée à Burder's
Point. Lorsque Bourne se déplaça à Tahaa, il laissa la presse qu'il avait
utilisée à Burder's Point, mais dès qu'il se fut établi à Tahaa, il se mit
1818, deux nouvelles
presses
d'elles avait été installée à Wilks
Société des
Études Océaniennes
759
d'accord
Tahaa.
Barff pour qu'une presse de Huahine soit transportée
avec
à
Il semble bien que
Bourne ait écrit en 1822, une lettre aux directeurs,
soit jamais arrivée car elle fut envoyée par le
"Westmoreland" qui disparut. En Mars 1824, il écrivit une nouvelle lettre,
sans doute à la demande des directeurs, dans
laquelle il explique les
raisons de son départ de Tahiti. Il n'est pas intéressant ici de connaître ces
raisons ; mais, dans cette lettre il confirme
que, avant son départ, il a
donné à Darling toutes les instructions possibles concernant le service de
l'imprimerie et que ce dernier a fait de grands progrès avant son départ.
Cela pourtant n'a pas l'air d'être tout à fait conforme avec le
point de vue
mais, qu'elle
de
ne
Darling.
En
Septembre 1823, Bourne écrit qu'il a imprimé 5000 exemplaires
Apôtres et en Mars 1824, il travaille sur les livres de Daniel,
des Actes des
Esther et Ruth.
Les éditions imprimées à Tahaa semblent être
beaucoup plus
importantes que les autres éditions en général, et c'est sans doute la raison
pour laquelle les livres portant la marque de Tahaa ne sont pas aussi rares
aujourd'hui que les autres.
Neuf livres furent imprimés sur cette presse entre 1823
et 1827,
années où la mauvaise santé de Mme Bourne força à fermer la station à
Tahaa et à ramener le matériel d'imprimerie à Huahine.
William, Ellis et quelques autres missionnaires quittèrent Afareaitu
le 18 Juin 1818 et s'établirent à Huahine amenant avec eux une
presse à
imprimer. Ellis prit un grand intérêt à ce travail jusqu'au moment où il
quitta Huahine en Décembre 1822 pour rejoindre la mission américaine
aux Iles Hawaii, sans
jamais revenir aux Iles-Sous-le-Vent.
Lorsque Ellis en 1818, transporta la presse depuis Afareaitu vers
Huahine, ce fut en dépit de fortes protestations du roi Pomare et des
autres missionnaires qui soutenaient que Huahine était
trop éloignée.
Dans une lettre datée de Huahine le 7 Août 1819, Ellis dit qu'il est
heureux d'apprendre que l'exemplaire du "Petit Livre" a été reçu et que
ceux qui ont déjà été envoyés sont aussi arrivés. Cela se
rapporte au livre
imprimé à Moorea avant la séparation des missionnaires de 1818.
Le premier livre imprimé à Huahine fut une édition de cantiques
tahitiens. Huit d'entre eux avaient été composés par Ellis, un par William,
un par Orsmond et le reste
par Davies. L'édition fut limitée à 600
exemplaires, imprimés sur du papier à lettre que l'on pu collecter parmi
les missionnaires, car le papier pour l'imprimerie était depuis
longtemps
épuisé. La rareté du papier est aussi la raison pour laquelle Ellis demanda
des caractères d'imprimerie d'une plus petite dimension afin d'économiser
le
papier.
En Août
"En
ce
1819, Davies écrit dans
qui
une lettre depuis Huahine :
les traductions, nous avons la satisfaction de
les autres Évangiles sont traduits, ainsi que les
concerne
signaler maintenant
que
Société des
Études
Océaniennes
760
Actes des Apôtres et le livre des Psaumes. L'Édition de Luc est
complètement épuisée et il y a une forte demande pour davantage
d'exemplaires. Nous espérons mettre sous presse Matthieu immédia¬
tement, quant aux Actes et à Jean, nous pensons qu'ils seront imprimés à
Tahiti. Nous avons imprimé ici même une édition de plusieurs centaines,
d'un petit livre de cantiques tahitiens et plus de 4000 exemplaires d'un
abrégé du syllabaire tahitien.
Bourne actionnait la presse de Tahaa, le rendement de
laissée par Barff à Huahine ne fut pas très important, mais, il
augmenta beaucoup après le départ de Bourne de Tahaa (et son retour à
Pendant que
la presse
Huahine).
La presse
de la mission des Iles Sous-le-Vent à Huahine ne rivalisa
en importance et en capacité de production avec celle de la mission
des Iles du Vent, établie à Burder's Point, et qui fut la plus importante
jamais
Iles de la Société.
aux
Société des Missions de Londres envoya à Huahine une
à imprimer moderne en fer. A son arrivée, la vieille presse en bois
fut expédiée vers un autre archipel, et vers 1834, lorsque la nouvelle presse
fut mise en action, la. période des pionniers que relate cette présente
monographie prend fin.
En 1832, la
presse
Les différentes presses à imprimer de la Société des missions de
Londres à Tahiti et dans les Iles de la Société jouèrent un rôle très
important dans l'histoire des progrès humains,
toutes premières dans cette partie du monde.
A
car
elles sont de loin les
date très
précoce, des presses à imprimer furent placées dans
possessions espagnoles au-delà des mers. Des livres furent
régulièrement imprimés à Mexico-City vers 1540. Aux Philippines et à
Lima au Pérou, des presses furent à l'œuvre à la fin du 16e siècle. Les
Jésuites portugais au Japon imprimèrent des livres à Katsusa en 1591, à
Amakusa en 1596 et à Macao encore plutôt. La première presse en
Australie fut fondée en 1795, mais dans le vaste espace entre ces différents
endroits, il n'y en eut pas jusqu'à ce que William Ellis monta la première
presse missionnaire à Afareaitu à Moorea en 1817. En 1822, Ellis partit
pour Honolulu et la première presse à imprimer des Iles Hawaiiennes fut
installée cette année là ; au même moment un grand nombre de livres
avaient déjà vu le jour à Moorea, Tahiti et Huahine.
une
les différentes
En
Californie, la première imprimerie fut ouverte à Monterey
en
1832.
Les
premières presses à imprimer à Tahiti et dans les Iles de la
jamais été de très grande importance en dehors des champs
qu'elles avaient à couvrir. Les imprimeurs étaient des missionnaires dont
les connaissances en imprimerie demeuraient très insuffisantes. Les
caractères d'imprimerie et le matériel utilisés étaient déficients, et
Société n'ont
Société des
Études
Océaniennes
761
pourtant ces premières presses sont à mettre à un rang très élevé par suite
l'importance qu'elles ont eu sur les populations de ces îles.
de
Le but de cette
souvenir de
ainsi,
ce
ces
but
petite publication est de préserver de l'oubli, le
les noms de ceux qui y sont attachés. S'il en est
presses et
sera
atteint.
The Tahitian Imprints
of the London Missionary Society
1810
La
-
Traduction Henri Vernier
1834
by George L. Harding and Bjarne Kropelien
coquille qui chante Oslo (1950)
Société des Etudes Océaniennes
762
L'Académie Tahitienne
après 6 ans d'existence
a été créée par délibération du 2 Août 1972
le 2 juillet 1974 que le Gouverneur Daniel VIDEAU en
présidait la séance inaugurale.
L'Académie tahitienne
mais,
ce
n'est
que
Un si long délai entre l'existence sur le papier et l'existence réelle
aurait pu être interprété comme un présage de mauvais augure. Ce projet
était-il vraiment sérieux ? Les autorités du Territoire qui avaient mis tant
de temps à adopter le projet de création de cette société savante, allaientelles vraiment soutenir cette institution ? Il est probable qu'il n'a pas
manqué de citoyens avertis de la bonne ville de Papeete pour saluer la
naissance de la nouvelle compagnie d'un sourire sceptique. N'était-ce pas
là le vieux rêve de quelques sympathiques utopistes qui se matérialisait un
court instant pour bientôt rejoindre au cimetière des associations, une
foule innombrable de sociétés, groupements, amicales, comités, etc... qui
n'ont guère survécu à la parution de leurs statuts au Journal Officiel ?
Mais, à l'heure où nous écrivons, l'Académie tahitienne vit toujours ; elle
se porte même assez bien. C'est ce que nous allons essayer de montrer
brièvement.
-
BRÈVE HISTOIRE DE 6 ANS D'EXISTENCE
-
plusieurs mois, l'Académie tiendra ses séances dans une
lui prête l'Église Évangélique à son siège de PAOFAI. C'est
l'époque où elle s'attelle à la rédaction de ses statuts et où elle commence
ses premiers travaux linguistiques, dans la plus grande confusion...
Pendant
salle que
En
effet, chacun
a son
idée
sur
la mission de l'Académie, des
convictions bien arrêtées sur la manière d'orthographier le tahitien, des
certitudes absolues sur ce qui est correct et ce qui ne l'est pas et des
illusions naïves sur le volume de travaux que peut entreprendre un groupe
de 20 personnes
dont toutes les décisions doivent être prises collégiale-
Bien peu parmi les nouveaux "immortels" ont une expérience
sérieuse du travail intellectuel en équipe et encore moins ont des
ment.
connaissances
linguistiques plus étendues que les notions de grammaire
apprises en classe, il y a souvent bien longtemps.il faudra plusieurs mois
pour descendre du domaine du rêve à la prosaïque réalité et pour
apprendre à travailler ensemble.
Société des
Études
Océaniennes
763
Les statuts
rédigés et acceptés
par
l'Assemblée Territoriale, le bureau
définitif peut être élu le 28 février 1975, et, quelques semaines
plus tard,
l'Académie s'installe dans des locaux qui sont mis à sa disposition dans
l'immeuble du Conseil de Gouvernement, avenue BRUAT. Elle
commence à faire figure d'institution officielle.
Mais,
l'adoption du nouveau statut du Territoire, il lui faut
vice-présidence et, en septembre 1977, émigrer au
Grand Hôtel, où elle se trouve toujours. Au deuxième étage
de cet
immeuble, elle dispose d'environ 120 m2 : la grande salle tout juste assez
vaste cependant pour contenir la table où
siègent 20 académiciens, deux
salles pour les bureaux de secrétariat, une salle d'attente et une petite salle
d'archives. L'escalier d'accès est assez raide pour les jambes
fatiguées,
mais on est récompensé de l'effort fourni par une
magnifique vue sur le
céder
ces
avec
locaux à la
port.
A
plusieurs reprises, le système de cooptation prévu par les statuts
pourvoir aux sièges vacants a fonctionné. La première occasion fut
malheureusement le décès du regretté Président de l'Église Évangélique, le
Pasteur Samuel RAAPOTO. Avec lui, notre Compagnie a perdu
un
connaisseur très sûr de la langue tahitienne, mais aussi, un sage et un
homme de haute valeur spirituelle. Comme remplaçant, l'Académie lui a
pour
choisi Monsieur Victor TERIIEROOITERAI. Le Pasteur RAAPOTO
était aussi assesseur au "To'ohitu" ; son
siège a été attribué à
Monsieur John DOOM, secrétaire général de l'Église Évangélique. C'est
le seul
changement
28 février
1975
a
survenu
dans le "To'ohitu". En effet, le bureau élu le
été reconduit chaque année dans ses fonctions.
Un peu plus tard, le Vice-Président SANFORD, trop absorbé par ses
responsabilités politiques, démissionnait pour laisser sa place à un
homme moins occupé. En même temps, Monsieur KIMITETE, sculpteur
bien connu, qui avait des projets d'expatriation, renonçait, lui aussi, à
faire partie de l'Académie. Ils furent remplacés par Monsieur Myron
MATAOA, chef du bureau de traduction de la Mission
Madame Jessie POROI, infirmière retraitée.
mormone et
par
Enfin, notre doyen d'âge, Monsieur Paul LANGOMAZINO,
son remplacement
pour des raisons de santé et c'est le jeune
pasteur de Mahina, Monsieur Paparai ARAPARI qui fut choisi pour lui
sollicitait
succéder.
-
TRAVAUX DE L'ACADÉMIE
I
-
-
Grammaire
Depuis 5 ans, nous travaillons à la rédaction d'une grammaire plus
complète et plus exacte que les ouvrages existants.
Les
2/3 du livre ont déjà paru sous forme de fascicules polycopiés.
estimer que l'année 1981 verra l'achèvement de cet ouvrage
intitulé "PRÉCIS DE GRAMMAIRE TAHITIENNE", bien qu'en
version polycopiée, il remplira déjà près de 600 pages.
On peut
Société des
Études
Océaniennes
764
La lenteur de ce travail s'explique par la difficulté à trancher
beaucoup de points, qui, même pour des gens ayant la réputation de bien
parler le tahitien, restent incertains.
Toutefois, lorsqu'il aura été imprimé et mis en vente, on ne pourra
plus dire qu'il n'est pas possible d'enseigner le tahitien parce que cette
langue n'est pas encore normalisée. En effet, la Commission de la Langue
n'a jamais escamoté les difficultés, en passant sous silence ce qui
n'apparaissait
pas
sûr au premier abord et elle s'est
enquêtes pour trouver la
II
-
livrée à de difficiles
solution des problèmes qu'elle rencontrait.
Dictionnaire tahitien-français
d'un groupe de correspondants des Iles-Sousdictionnaire tahitien a été commencé. Ce travail a dû être mis
en veilleuse pour ne pas freiner des travaux plus urgents.Les quelques 50
pages qui ont été rédigées permettent cependant de se faire une idée de ce
que pourrait être un véritable dictionnaire tahitien. Un tel dictionnaire
comprendrait tous les mots existants dans Tepano JAUSSEN et
DAVIES, plus un nombre important de mots oubliés et de mots
nouveaux. La prononciation serait indiquée (sauf pour un certain nombre
de mots dont la prononciation est maintenant perdue). Des exemples
viendraient étayer les significations fournies.
Avec la collaboration
le-Vent,
un
Nous
espérons bien pouvoir un jour reprendre ce
III
-
travail.
Création de termes nouveaux
premier de ses statuts donne pour mission à l'Académie de
sauvegarder et enrichir la langue tahitienne. En réalité, la sauvegarde
nécessite l'enrichissement, car, si une langue manque des termes
nécessaires pour échanger des idées dans les principaux domaines de la
vie moderne, elle risque d'être petit à petit délaissée ou de s'encombrer de
trop nombreux mots étrangers, comme c'est actuellement le cas du
rarotongien. Cette détérioration de la langue étant certainement une
phase préparatoire à la disparition.
L'article
L'expérience montre qu'il ne faut pas laisser au hasard cet
enrichissement mais former systématiquement un vocabulaire adéquat,
comme l'ont fait les premiers missionnaires.
Après avoir réfléchi à la manière d'opérer cet
enrichissement du
services officiels la
dans leur relation avec le public
ils souhaiteraient une traduction
tahitienne. De très nombreux services ont répondu à cette demande. A
l'exception du PORT AUTONOME, ils ont été davantage demandeurs
que fournisseurs, la liste des termes fournie étant beaucoup plus courte
que celle des termes demandés. Certains services s'étaient aussi risqués à
proposer une traduction pour certains termes. Les demandes d'un certain
nombre de services ont d'ores et déjà été honorées : SOCREDO, PORT
AUTONOME, MÉTÉO, SERVICE DE SANTÉ, etc... Un nombre
vocabulaire, l'Académie s'est décidée à demander aux
liste des termes spécialisés qu'ils utilisent
ainsi que la liste des termes français dont
Société des
Études
Océaniennes
765
important de listes attendent
Par
encore
leur approbation
en
séance plénière.
ailleurs, l'Académie a vu la nécessité de trouver les termes
certaines réalités qui sont souvent nommées dans la vie
tahitiens pour
moderne.
Grâce à la radio,
beaucoup de mots préconisés par l'Académie sont
utilisés et sont compris de tous. Citons au hasard
maintenant largement
"VAHINE TURU
TUATAHI
mes
leur
UTA'A
=
assistante sociale" ; HA'API'IRA'A
École du premier degré"
=
; etc...
Je profite de l'occasion qui m'est donnée, pour remercier au nom de
collègues les journalistes tahitiens de FR 3, pour leur collaboration et
discipline.
Ces mots
nouveaux
a) Emprunt à
Cette méthode
sont créés à
une
partir de quatre
langue étrangère
non
sources
possibles
:
polynésienne
été
largement utilisée dans le passé. Les mission¬
naires, par exemple, ont beaucoup puisé dans le Grec, l'Hébreu et le Latin
pour créer des mots nouveaux.
a
Beaucoup de Tahitiens d'aujourd'hui ignorent sans doute que des
= Loi", "METEPARA =
désert" sont des mots
d'origine hébraïque. L'usage populaire a aussi forgé d'innombrables mots
à partir de l'anglais. Le français a été une mine moins exploitée, parce que
les contacts avec la langue française ont été plus tardifs, mais, il a
cependant apporté un contingent non négligeable.
mots comme "TURE
L'emprunt
langues étrangères est une des lois du développement
langue. Il n'est besoin que de consulter un dictionnaire
français pour le constater. Mais, actuellement, les mots formés par
tahitianisation d'un terme étranger sont assez mal accueillis dans le
public, aussi, évitons-nous généralement d'utiliser ce système.
et de la
aux
vie d'une
b) Emprunt à
Il est
une
langue polynésienne
peu commun qu'un mot, qui n'existe pas en tahitien,
puisse être trouvé dans une autre langue polynésienne, sinon sous une
forme dérivée de l'anglais. Cela peut cependant se trouver. Ainsi, pour
traduire le mot français "CLIMAT", on s'est inspiré du mot maori :
"K.AHU A RANGI" (littéralement : le vêtement du ciel) et le mot tahitien
proposé est " 'AHURA'I ", qui sonne mieux que " 'AHUARA'I " qui
aurait été plus logique.
Nous
assez
sommes
toujours heureux quand
nous avons
la bonne fortune
de faire de telles découvertes.
c) Utilisation d'un terme tahitien tombé
Il arrive
peu ou pas
en
désuétude
parfois qu'un mot existe déjà en tahitien, mais ce mot est très
du tout connu des locuteurs modernes. Ainsi, pour traduire le
Société des
Études
Océaniennes
766
français : JUS DE FRUIT, on utilise habituellement le mot "PAPE", qui,
en tahitien çnoderne, signifie également : EAU.
ce terme est parfois ambigu ; comment par exemple distin¬
JUS DE CITRON et CITRONNADE ? Or, il existe un mot
tahitien : "VAIHARO" qui désigne toute espèce de jus (de fruit... de
légume... et de viande). Il suffit de réintroduire ce mot.
Mais,
guer :
Dans les langues européennes, le vocabulaire scientifique fait
largement appel au grec et au latin, d'où sont tirés une foule de mots
savants. Mais, nous avons déjà signalé, qu'à l'heure actuelle, les mots
dérivés des langues étrangères sont assez mal accueillis.
exemple des problèmes qui peuvent être résolus en
vieux mots tahitiens : le terme habituellement utilisé pour
traduire "MICROBE" est "MANUMANU" (littéralement : petite bête),
Voici
un
recourant aux
mais, ce terme est tout à fait insuffisant dès que l'on atteint un certain
degré de technicité. Faut-il proposer "MITOROPIA" ? Il y a de fortes
chances que la plupart des gens préféreront employer le mot français
"MICROBE" qui est assez connu, quitte à l'écorcher plus ou moins.
L'Académie a préféré puiser dans les termes assez nombreux signifiant
"très petit" et dont la plupart sont inconnus de l'immense majorité des
locuteurs modernes. Le terme proposé est "OREORE".
Ainsi, le vieux tahitien constitue
puiser les racines des mots nouveaux.
une
véritable mine où l'on peut
d) Mots composés
composés ont été très largement utilisés jusqu'ici pour
nouveaux et il est difficile d'échapper à cette ressource.
Elle n'est cependant pas sans inconvénient ; les mots composés devenant
vite des mots sur-composés (exemple : MANUREVA TUTUHA AUAHI
Les mots
former des termes
=
AVION A
RÉACTION).
déjà mis au point par l'Académie approchent maintenant
avons pensé qu'il était temps de les grouper en un lexique
français-tahitien et tahitien-français. Nous espérons pouvoir faire paraître
ce lexique avant la fin de l'année 1980.
Les termes
du millier. Nous
IV
Examens et
-
concours
l'Académie a été chargée de la préparation
épreuves aux concours administratifs de
recrutement. Si l'on sait que le nombre des concours peut atteindre
jusqu'à une vingtaine par an et que les candidats dépassent parfois la
centaine, on comprend que cette responsabilité n'est pas une sinécure.
Depuis près de deux
et
ans,
de la correction des
V
-
Concours littéraire
organise chaque année un concours littéraire qui attire
dizaine de concurrents. Parmi les oeuvres qui nous sont
soumises, il y a généralement 3 ou 4 ouvrages ayant de réelles qualités.
L'Académie
parfois
une
Société des
Études
Océaniennes
767
Seules
les œuvres originales, comprenant
dactylographiées, sont acceptées.
Étant donné le
coût de
minimum de 50
un
pages
l'impression, les candidats, à l'exception d'un
seul, n'ont pas pu faire imprimer leurs œuvres jusqu'à présent ; ce qui fait
perdre
au concours une
grande partie de
son
utilité.
Aussi, souhaitons-nous, à l'occasion de l'année du patrimoine,
publier un recueil de morceaux choisis. Cette petite anthologie pourra
rendre de grands services dans l'enseignement du tahitien et elle montrera
la valeur de certaines pages de cette littérature débutante.
VI
-
Fête annuelle
Ses statuts obligent l'Académie à tenir chaque année une séance
publique annuelle. Grâce à l'imagination de certains de nos collègues,
avons réussi à faire de cette séance annuelle une véritable fête de
l'Académie. A cette occasion, nous débordons le domaine de la langue
nous
pour attirer, chaque année, l'attention sur un aspect particulier
culture tahitienne : artisanat, techniques, chants, danses, etc...
Certaines de
ces
fêtes ont remporté un très
VII
-
de la
vif succès.
Manuels scolaires
En collaboration avec le bureau pédagogique de l'Enseignement
Territorial, une commission a rédigé les manuels scolaires des classes de
CE 2, CM 1, CM 2. Les quatre premiers fascicules, qui correspondent aux
classes de CE 2 et CM 1, ont déjà paru et ont reçu un bon accueil de la
part des maîtres qui les utilisent. Les fascicules 4 et 6, qui correspondent à
la classe de CM 2, restent encore à paraître.
L'imprimerie du service de l'Enseignement Territorial a réalisé un
travail très soigné et ce fut une récompense pour l'Académie de voir
l'attention qui a été accordée à l'impression de ces ouvrages scolaires, fruit
de
plusieurs années de travail, à raison d'un après-midi de réunion
hebdomadaire.
grammaire, d'un dictionnaire, de manuels scolaires,
Ces titres permettent de se rendre compte
que les travaux de l'Académie se situent sur le plan de l'action pratique.
L'Académie ne peut s'énorgueillir d'une bibliothèque prestigieuse, elle
n'organise pas de savantes conférences, elle ne publie pas d'articles de
hauts niveaux scientifiques. Mais, elle n'est pas devenue (comme le
craignait un orateur de l'Assemblée Territoriale, qui intervenait dans le
débat du 1er août 1972 sur la création d'une Académie Tahitienne), "le
conservatoire d'une langue morte". Son action se situe plutôt dans la ligne
que décrivait ce même orateur : "donner aux Polynésiens d'aujourd'hui le
meilleur instrument d'acculturation au monde moderne dans lequel ils
vivent, c'est-à-dire, une langue qui établit un pont solide entre leur passé
et leur avenir, en leur permettant d'assimiler, selon leur propre sensibilité,
Rédaction d'une
création de mots
nouveaux...
Société des Etudes Océaniennes
768
selon leur propre
mode de pensée, tout ce que le monde moderne leur
apporte".
MÉTHODES DE TRAVAIL
-
Le bureau de
-
l'Académie, le "TO'OHITU", administre l'Académie en
rendant compte, chaque mois, de ses principales décisions. Ainsi,
membres sont associés assez étroitement, à l'administration.
tous les
Une ou plusieurs séances plénières se tiennent chaque mois. Une
partie de ces séances est consacrée à examiner les listes de mots nouveaux
qui sont proposés par la commission ad hoc.
Trois commissions fonctionnent
régulièrement à l'Académie.
langue se réunit trois fois par mois. Actuellement,
exclusivement à la rédaction du "Précis de grammaire"
la Commission de la
-
elle
se consacre
dont il
a
été
parlé plus haut.
se réunit quatre fois par mois pendant les
périodes scolaires. Elle rédige les manuels scolaires.
-
la Commission scolaire
Les académiciens permanents, c'est-à-dire, quelques collègues qui ont
accepté de travailler 20 heures par semaine pour l'Académie, constituent
un petit groupe à qui est confiée la préparation et la correction des
épreuves des concours administratifs, certaines traductions demandées à
l'Académie et surtout, la préparation des listes des mots nouveaux qui
sont ensuite soumis à l'approbation du "TO'OHITU", puis de l'Assem¬
blée plénière. Actuellement, ils travaillent aussi à la préparation d'une
anthologie.
-
Deux secrétaires à plein temps sont employés principalement à
dactylographier et à ronéotyper tous les documents de travail, aux
différents stades d'élaboration.
Après la confusion des premiers débuts, une collaboration
exemplaire s'est progressivement instaurée au sein de l'Académie. Chacun
a pris conscience de ses limites propres et compris que c'est dans la
coopération qu'il pourra produire quelque chose de valable. De science
brillante et sans lacunes, il n'en est pas parmi nous et c'est seulement dans
la mesure où chacun accepte d'apporter humblement et sans arrière
pensée ce qu'il sait ou ce qu'il sait faire, à un travail qui reste anonyme,
que l'Académie pourra faire œuvre utile.
Cet esprit de collaboration s'est étendu aux quelques personnes,
principalement des enseignants, qui ont accepté de participer aux travaux
de la Commission de la langue ou de la Commission scolaire.
la sagesse de maintenir son action à
politique. Elle s'est vouée exclusivement à
sa mission statutaire : "sauvegarder et enrichir la langue tahitienne". Sans
doute, cette détermination explique-t-elle, en partie, les appréciations
Par
ailleurs, l'Académie
a eu
l'écart de toute contamination
Société des
Études Océaniennes
769
acides que son
action a, parfois, recueillies dans certains milieux, mais elle
étrangère à l'autorité que petit à petit, elle a acquis
n'est pas non plus,
dans le public.
-
BILAN DE 6
ANNÉES D'EXISTENCE
-
Les académiciens ont conscience d'avoir travaillé
lentement
lentement, trop
peut-être, mais consciencieusement et sérieusement.
Certes, les publications de notre Compagnie restent
du public.
encore peu
nombreuses et peu connues
En six ans, nous avons enregistré une progression très notable de
l'intérêt suscité dans le public par la langue tahitienne et du respect qu'on
lui accorde. Mais, on ne peut pas dire que le travail fourni ait provoqué
un essor
positions
spectaculaire de la langue, qui se contente de se maintenir sur les
- à vrai dire, assez solides - qu'elle occupait avant la création de
l'Académie.
Le travail de l'Académie est-il donc
effets
pratiques ? Si, car,
les actions entreprises n'ont pas encore eu le temps de porter
pleinement leurs fruits et d'autre part, ce travail prépare le terrain à des
actions nouvelles qui nécessitent des bases de départ sûres et bien
aménagées. Ces actions, se sont essentiellement :
sans
d'une part
La généralisation de l'expérience actuelle d'enseignement du
CE2, CM1 et CM2 et l'introduction progressive de cet
enseignement à d'autres niveaux.
1°)
-
tahitien
en
Il y a maintenant quatre ans que l'expérience tentée au niveau des
CE2, CM1, CM2 est .commencée, elle a porté sur plusieurs milliers
d'enfants. Au niveau CE2 et CM1, les manuels ont été rédigés,
expérimentés et révisés. La méthode a été rôdée, des tests de toutes sortes
ont été pratiqués sur les élèves. Le seul obstacle sérieux qui est invoqué
pour retarder la phase de généralisation est l'état d'impréparation des
maîtres. Nous pensons personnellement que certains ne seront jamais
prêts tant qu'ils n'auront pas commencé à enseigner. Par contre, la
généralisation ne serait-ce que dans la seule classe de CE2, aura un effet
psychologique considérable.
hypothèse, ce qu'il est intolérable d'entendre maintenant,
qu'il n'est pas possible d'enseigner le tahitien "parce que le tahitien
pas encore une langue normalisée".
En toute
c'est
n'est
2°)
-
La reconnaissance officielle du tahitien comme seconde langue
officielle.
Une telle proposition a peut-être, pour certains, une résonnance
politique. Dans notre esprit, elle est surtout une mesure égalitaire et
sociale. L'égalité des citoyens est souvent bien théorique, principalement,
pour ceux qui sont gouvernés par des lois qu'ils ne peuvent pas lire,
doivent entrer en relation avec des administrations et des services qui
s'adressent à eux en une langue inintelligible, leur font remplir des
Société des
Études
Océaniennes
770
incompréhensibles et les renseignent par des circulaires non
incompréhensibles.
formulaires
moins
que
Certes, il y a longtemps que les tribunaux disposent d'interprètes et
les différents services s'efforcent de traduire leurs formulaires et leurs
circulaires.
Mais, il faut bien reconnaître que les moyens dont ils disposent sont
insuffisants, faute d'un principe qui obligerait l'Administration toute
entière et tous les services à se structurer d'une autre manière en recrutant
de véritables interprètes et traducteurs et en organisant une véritable
formation pour ces
fonctionnaires.
bien placés, à l'Académie, pour apprécier les
pareille révolution et pour reconnaître qu'elle ne peut
être que progressive. D'ores et déjà, cependant, le travail de normalisation
grammaticale et l'enrichissement du vocabulaire spécialisé préparent la
Nous
sommes
difficultés d'une
voie.
Ainsi, l'Académie, après avoir doublé le cap des 6 ans d'existence,
sa route à petite vitesse. Elle sait qu'il faut aller loin et donc
marcher à une allure économique. Elle a aussi appris que travailler pour
la survie et la vitalité de la langue tahitienne, c'était affronter bien des
oppositions : les adversaires discrets mais efficaces, les partisans
indisciplinés et maladroits, c'était se heurter sans cesse à une gigantesque
continue
inertie.
Heureusement, elle a aussi appris à mesurer la puissance des forces
qui montent du tréfonds de l'âme tahitienne et qui poussent ceux qui ont
entendu parler le tahitien dès leur plus jeune âge à lui rester fidèle.
Quelque chose lui dit que ces forces seront finalement plus puissantes que
les oppositions et les résistances.
P. Hubert
Coppenrath
de l'Académie Tahitienne
Société des
Études
Océaniennes
771
ACADÉMIE TAHITIENNE
FARE VANAA
Nom
-
Prénom
-
1975-1979
-
Fonction
TEVANE Marc (Maco)
SALMON Elie
(Nédo)
MARTIN John
LAGARDE
-
-
Directeur
Chancelier
Secrétaire
-
Willy
-
Trésorier
Mme CLARK-CADOUSTEAU Geneviève
R.V.
Père COPPENRATH Hubert
DOOM John
-
(Fifi)
-
Assesseur
-
Assesseur
Assesseur
Mme DEVAT1NE Flora
Mme PENI Antonina
HOLOZET Aritana
PIETRI
HUR1 Mehao
Mme POROI Jessie
Raymond
Mme KLIMA Rosa
PREVOST Paul
LEMAITRE Yves
SUE Roland
MATAOA
Myron
TERIIEROOITERAI Victor
PAPARA1
Arapari
Mme Yvette OOP A
-
Secrétaire
Société des
LAI Hubert
Études
Océaniennes
-
Secrétaire
772
Nlles lumières et réflexions
sur
l'échouage
de la caravelle San Lesmes
Lorsqu'en 1975, je publiai mon livre "The Lost CaraveL (Pacific
Publications, Sydney), je n'avais pas de détails spécifiques sur une
question qui me préoccupait beaucoup bien qu'étant sans grand intérêt
dans le contexte du livre lui-même. La
question était la suivante :
comment les deux vieux canons de fer, base de la théorie
que j'avance
dans le livre, avaient-ils été récupérés sur le récif d'Amanu, dans
l'archipel
des Tuamotu ?
Au cours des deux
ou trois dernières années, des
plaques, rédigées en
anglais, ont été apposées sur les canons, indiquant qu'ils
avaient été "perdus en 1526 sur le récif d'Amanu
par J. S. Elcano, pilote
de Magellan et premier
circumnavigateur du globe". Cette indication
n'est pas tout à fait exacte, ou tout au moins, elle l'est au sens
figuré.
Elcano n'était pas le capitaine du navire dont les canons furent
perdus, ni
le commandant de l'expédition dont faisait
partie le navire, mais
seulement le commandant en second. Ceci dit, il était sans aucun doute le
personnage central de l'expédition et il eut effectivement l'honneur d'être
le premier homme à faire le tour du monde.
Aussi, à l'époque ou la
prospérité de Tahiti dépend pour une large part du tourisme, peut-être
est-il justifié de souligner le lien qui existe entre les canons et un
personnage aussi célèbre qu'Elcano.
français et
en
Les faits
historiques sont les suivants : Elcano, un basque, fut celui
Espagne, en 1522, le navire de Magellan, le Victoria après
que ce dernier eut été tué aux Philippines. A bord du Victoria se trouvait
une
cargaison d'épices qu'Elcano s'était procuré aux Indes Orientales.
Cette cargaison avait une telle valeur que le
monarque espagnol décida
d'organiser une nouvelle expédition pour aller chercher d'autres
cargaisons semblables, expédition dans laquelle Elcano aurait un rôle
important. Craignant toutefois qu'Elcano ne profitât de la situation s'il
était nommé commandant, le poste fut donné à un
terrien, Garcia Jofre
de Loaisa. L'expédition de Loaisa était constituée de
sept navires. Quatre
d'entre eux passèrent dans le Pacifique le 26 Mai 1526
après avoir traversé
le détroit de Magellan, à destination des Indes Orientales. Six
jours plus
tard, ils furent séparés dans une tempête et l'un des navires, la caravelle
San Lesmes ne fut plus
jamais aperçue par des yeux européens. A ce
qui
ramena en
moment
là, la caravelle avait probablement de 50 à 70 hommes à bord.
des basques, comme Elcano,
Beaucoup d'entre eux étaient certainement
qui les avait recrutés.
Société des
Études
Océaniennes
773
En
1929, 4 siècles environ après la disparition de la caravelle,
François Hervé, administrateur français des Tuamotu, découvrait 4
de fer anciens solidement incrustés dans le corail, sur le récif Est
de l'atoll d'Amanu, à environ 500 milles dans l'Est de Tahiti. A
l'époque,
un de ces canons fut
récupéré, amené à Tahiti et
canons
peu
de temps après
-
probablement
deuxième Guerre Mondiale
préoccupé de savoir quelle
-
il
en
présenté au Musée. Mais
de la période troublée de la
sans que personne ne se soit
au cours
disparut
était l'origine. Les deux
qui se
j'aie
eu pris connaissance de brefs
compte-rendus sur les découvertes d'Hervé,
et je fis un
exposé dans le Pacific Islands Monthly de Janvier 1968,
intitulé : "Des européens vivaient-ils au seizième siècle dans le
Pacifique
Oriental ?". Quelques détails sur les événements
qui amenèrent la
récupération de ces canons me. furent donnés par le commandant de
Marine Hervé le Goaziou, officier de la Marine
Française qui était
stationné à Hao, île la plus voisine
d'Amanu, lorsque l'opération de
récupération eut lieu. Ces détails furent publiés dans le Lost Caravel
(p. 19). Toutefois, à l'époque, tout ce que je savais de l'opération ellemême était que le canon avait été
dégagé "sans difficulté" par un ami de
Le Goaziou, le commandant de Marine Claude Maureau.
trouvent actuellement à la Pointe Vénus furent
canons
récupérés, après
que
Les éléments qui me manquaient m'ont été fournis
depuis, par
Maureau lui-même, devenu maintenant l'un des
principaux directeurs
d'une compagnie française d'aéronautique. Ayant
appris par Le Goaziou
il se donna la peine de venir me trouver à
Canberra et me fit part de son rôle dans l'affaire d'Amanu. Il me donna
également des photos de l'opération, (reproduites dans l'article original).
Ainsi que je l'explique plus loin, deux des photos me semblent constituer
de nouveaux éléments dans la préhistoire de la
Polynésie.
que
je m'intéressais
Maureau
me
aux canons,
raconta
qu'en 1968-69, il était affecté à Hao,
comme
commandant du groupement d'aéronautique navale en
Polynésie et il
commença à envisager la possibilité de découvertes archéologiques
intéressantes après que Le Goaziou lui eut montré mon article du Pacific
Islands Monthly ayant trait à la découverte d'Hervé en 1929. La
présence
de
plusieurs hélicoptères sur la base lui permit de faire une reconnaissance
systématique du récif Est d'Amanu, pour retrouver les trois canons
qu'Hervé était supposé y avoir laissé. La reconnaissance permit de situer
deux canons près de l'extrémité Nord de l'atoll. Ils
gisaient à petite
profondeur à environ quinze mètres de l'extérieur du récif. Cependant, il
n'y avait pas trace du troisième canon, et ce qu'il en advint, après
qu'Hervé l'eut découvert, demeure un mystère.
Environ trois semaines après avoir repéré les canons, Maureau
dirigea une équipe de sauvetage sur les lieux. C'était à marée basse, l'eau
parvenant à mi-jambe, alors qu'elle aurait atteint la ceinture à marée
haute. Trois hélicoptères furent utilisés pour l'opération. L'un
déposa
l'équipe sur le récif, tandis que les deux autres se tenaient au-dessus de
l'emplacement. Après avoir, à coups de marteau, dégagé les canons du
corail, des filets furent glissé sous les canons pour être ensuite soulevés à
Société des
Études
Océaniennes
774
raison d'un
par hélicoptère. Le troisième hélicoptère récupéra alors
l'équipe, et les hommes et leur butin furent ramenés à Hao après une
mission'qui n'avait pas duré plus de dix minutes. Plus tard, une équipe de
plongeurs explora le récif extérieur jusqu'à une vingtaine de mètres de
fond, à la recherche d'épaves analogues. Les motu voisins furent
également explorés, mais sans résultat.
La récupération des deux canons, le fait de les dater du début du
seizième siècle, et l'absence de tout autre vestige de la même
époque sur
l'île d'Amanu me fournit le point de départ de la théorie émise dans le
Lost Caravel, à savoir que l'équipage du navire
ayant abandonné les
quatre canons aperçus par Hervé avaient joué un rôle significatif et
jusqu'alors insoupçonné dans la préhistoire polynésienne. On peut
canon
considérer que les canons avaient
caravelle
sans
aucun
espagnole San Lesmes, étant donné
doute appartenu à la
que
l'on n'avait
aucune
connaissance d'un navire se trouvant dans le
Pacifique Oriental ou
étant perdu, avant que ces canons n'aient cessé d'être utilisés en
s'y
Europe,
c'est-à-dire vers 1550. De plus, étant donné qu'on n'avait trouvé
récif rien d'autre que les canons eux-mêmes et quelques pierres
boulets primitifs - cela voulait dire que le San Lesmes
le
des
sur
-
n'y avait pas fait
naufrage. Bien au contraire, cela signifiait que la caravelle y avait réussi à
dégager le navire en se délestant des quatre canons. Restait alors une
question : qu'était-il advenu de la caravelle et des cinquante à soixante dix
hommes d'équipage ? Rassemblant un faisceau de
circonstances, j'en
déduisis qu'après leur mésaventure les espagnols s'étaient rendus à
Hao,
pour voir si leur coque avait besoin de réparations, puis à Anaa, à 250
milles dans l'Ouest ou quelques hommes avaient
débarqué, et enfin
jusqu'à Raiatea, dans l'archipel de la société. Là, probablement en raison
du mauvais état de leur navire, ils avaient établi une base et
entrepris de
construire un nouveau navire pour poursuivre leur voyage aux Indes
Orientales. Entre temps, ils s'unirent à des polynésiennes dont ils eurent
une progéniture mi-polynésienne.
Lorsque, beaucoup plus tard, leur
navire fut terminé, les hommes durent convenir que leur
voyage aux Indes
Orientales était devenu sans objet, car les autres vaisseaux
ayant fait
partie de l'expédition devaient être depuis longtemps rentrés en Espagne
par la route qui leur semblait le plus praticable, c'est-à-dire dans le Sud
Ouest jusqu'à la latitude du Cap de Bonne
Espérance, longer cette
latitude jusqu'au Cap et après l'avoir doublé, faire route au Nord dans
l'Atlantique. Apparemment, quelques uns n'étaient pas d'accord avec ce
projet et décidèrent de rester à Raiatea.
Ceux
qui restèrent furent à l'origine de dynasties HispanoPolynésiennes qui essaimèrent dans toutes les îles de la Société et
parvinrent jusqu'à l'époque de Cook. Il en fut de même pour ceux qui
avaient quitté le San Lesmes à Anaa. Leur influence se
répandit dans
toutes les Tuamotu. Pendant ce
temps, quelques espagnols, ou en partie
espagnols de Raiatea parvinrent d'une manière ou d'une autre jusqu'à
Raivavae, et de là des gènes et des éléments de culture espagnols
parvinrent jusqu'à l'île de Pâques. Quant aux espagnols qui tentèrent de
Société des
Études
Océaniennes
775
rentrer en Espagne avec leurs femmes polynésiennes et leur progéniture
demi-espagnole, ils n'allèrent pas plus loin que la Nouvelle-Zélande. Là,
pour une raison quelconque, ils abandonnèrent leur voyage et s'instal¬
lèrent à Kawhia sur la côte Ouest de l'île du Nord. Leur arrivée et leurs
activités ultérieures furent, d'après moi, amplement attestées par les
nombreuses traditions et généalogies rattachées à la "pirogue" Maorie
Tainui. Pour résumer, le Lost Caravel estimait que l'arrivée du San
Lesmes dans les Tuamotu avait
eu des conséquences d'une grande portée
préhistoire polynésienne ; que son équipage avait laissé une
empreinte à la fois génétique et culturelle sur un bon nombre d'îles de
Polynésie, depuis l'île de Pâques à l'Est jusqu'à la Nouvelle Zélande à
l'Ouest. Le Lost Caravel comprenait également un chapitre dans lequel
étaient donnés les noms des autres navires espagnols perdus dans le
Pacifique au cours du seizième siècle ; il y était présenté quelques
arguments envisageant la possibilité d'autres naufragés de ces navires, sur
d'autres îles, avec des conséquences semblables à celles indiquées pour le
sur
la
San Lesmes.
Il me parait difficile de dire que la thèse avancée pour le San Lesmes
improbable en soi. Les navires dont il est question étaient de véritables
navires avec de vrais équipages ; et vu la ténacité avec laquelle les hommes
s'accrochent à la vie, il est a priori fortement improbable que tous ces
équipages aient été engloutis en mer sans laisser de traces. Et pourtant,
sauf pour Hawai'i, aucun auteur avant moi n'avait pensé que des
naufragés espagnols auraient pu, au seizième siècle, jouer un rôle
quelconque dans la préhistoire polynésienne. Il était donc inévitable que
malgré les arguments présentés en sa faveur, ma thèse ait hérissé le poil de
tous ceux qui sont convaincus que les polynésiens d'avant Cook étaient,
depuis des siècles, purs de toute contamination par les gènes ou les idées
est
du monde extérieur.
15 mois avant la publication de mon livre et bien avant que je ne l'aie
terminé, j'eus pour la première fois une idée de la colère ou de l'irritation
que mon livre allait susciter dans certaines sphères. En Mars 1974, une
personnalité bien connue de Honolulu publia dans un journal local une
virulente attaque basée sur une annonce de l'éditeur avant publication.
Ma thèse était "si grotesque", écrivait-il que cela ne vaudrait même pas la
peine de la réfuter, si ce n'était que les "théories bizarres" avaient
adoptées. Le premier compte-rendu qui
parution fut tout à fait différent. L'auteur, Olaf Ruhen, écrivain
connu des Mers du Sud, écrivait entre autres :
tendance à être promptement
suivit
bien
sa
l'époque ou ce livre n'était qu'une rumeur, j'étais persuadé qu'il ne
pourrait être pris au sérieux. Je me rétracte entièrement et avec
humilité. Contrairement à mon opinion antérieure, j'accepte, non
pas tous, mais beaucoup de ses arguments".
Une quinzaine de jours plus tard, Peter Corris, qui venait d'obtenir son
diplôme Ph. D. d'Histoire du Pacifique, à l'Australian National
University déclarait dans The Australian que le Lost Caravel exerçait un
attrait semblable au Chariots of the Gods d'Erich Von Daniken :
"A
Société des
Études
Océaniennes
776
"Une étonnante
proposition est énoncée et une abondance
d'arguments apparemment convaincants mais, en définitive sujets à
caution, est présentée pour la soutenir
Langdon partage avec Von
Daniken une curieuse répugnance à accorder aux sociétés anciennes,
antérieures à l'écriture, leurs accomplissements culturels apparents"..
Les compte-rendus de Ruhen et Corris furent suivie de près de trois
douzaines d'autres. Avec le recul, je constatai que leurs auteurs pouvaient
être répartis en trois catégories bien distinctes ; il y avait ceux qui
acceptaient toutes, plusieurs ou quelques-unes de mes théories. Puis ceux
qui faisaient l'éloge du livre, mais évitaient d'émettre une opinion sur la
valeur de ses théories. Il y avait ceux, enfin, qui s'opposaient avec
véhémence à tous mes dires, déclarant que j'étais obsédé par les espagnols
ou que j'étais un raciste refusant d'accorder aux polynésiens ce qui
leur
revenait, que mes théories étaient vraiment trop fantastiques, ou encore
que je faisais un sort bien trop important à de petits groupes de naufragés.
Parmi les critiques de la première catégorie, il s'en trouvait comme Oscar
Spate et Hugh Laracy qui pensaient que les arguments rassemblés pour
justifier mon hypothèse n'étaient pas uniformément valables, mais que
tous méritaient d'être pris en sérieuse considération. Spate, par exemple,
écrivait
:
saurait être question de rejeter purement et simplement le livre
prétexte qu'il est trop tiré par les cheveux ; Langdon a rassemblé
une énorme quantité d'arguments provenant d'un
peu partout : récits
de voyages, génétique et liguistique, types d'embarcations et mythes
océaniens ; il a fait son travail méticuleusement".
De son côté, Laracy écrivit que mon livre tentait d'expliquer : "une
accumulation d'anomalies pour lesquelles il ne semble pas y avoir d'autre
explication
C'est maintenant aux savants d'infirmer les conclusions de
Langdon, s'ils ne les aiment pas".
Depuis, l'agitation provoquée par le Lost Caravel s'est calmée et
plusieurs livres sur la préhistoire de la Polynésie ont paru ; on aurait
raisonnablement pu s'attendre à ce que ces auteurs aient étudié le
problème essentiel discuté dans mon livre, à savoir l'arrivée, archéologiquement prouvée, d'un chargement d'espagnols du seizième siècle
dans les Tuamotu. Ces livres parus sont : The Polynesians de Peter
Bellwood (Londres, 1978) ; son beaucoup plus ambitieux Man's
Conquest of the Pacific (Auckland, 1978) ; Maori Origins and Migrations
de M.P.K.. Sorrenson (Auckland, 1979) ; et un ouvrage édité par Jesse D.
Jennings, The Prehistory of Polynesia (Canberra, 1980) avec des
"Il
ne
sous
contributions d'une douzaine d'auteurs. De
ces
livres, seul The
Polynesians mentionne le problème du San Lesmes et seulement pour
l'écarter en déclarant que ma théorie sur l'influence étendue de l'équipage
est : "curieuse mais injustifiable".
Bien entendu, Bellwood, Sorrenson, Jennings et autres sont libres de
penser ce qu'ils veulent en ce qui concerne la préhistoire de la Polynésie.
Mais, je doute que tout le monde soit d'accord pour estimer qu'ils ont
résolu de façon adéquate la question espagnole en l'écartant sommaire¬
ment, en l'ignorant ou en prétendant qu'elle n'existe pas. Les cinquante à
Société des
Études
Océaniennes
777
soixante-dix espagnols qui armaient le San Lesnies n'étaient pas un
produit de mon imagination. Ils étaient de véritables marins, capables
d'envoyer par-dessus bord plusieurs canons pesant jusqu'à six cents kilos
chacun. Ils étaient en effet, parmi les marins les plus habiles et robustes de
l'époque et avaient accompli, contre les éléments, presque la moitié du
lorsqu'ils parvinrent aux Tuamotu. De plus, le lieu où
leur caravelle s'échoua était loin d'être dangereux, ainsi que le montrent
tour de la terre,
produisit au milieu de
de l'année
pourquoi, si les préhistoriens de la Polynésie veulent conservpr
bien les photographies, et si l'on pense que cela se
l'hiver^ période la plus calme et la plus agréable
C'est
doivent faire face à la question de savoir ce qu'est
leur crédibilité, ils
équipage. Il ne suffit pas de souhaiter, ainsi
le fit Bellwood dans un compte-rendu, que les polynésiens soient en
quelque sorte, "préservés du sort ignominieux de devenir des orphelins
culturels de l'Espagne du seizième siècle". Et il ne suffit pas non plus de
prétendre "qu'on a toutes les raisons de croire" que tout l'équipage de la
caravelle fut mangé par les cannibales des Tuamotu sans donner de
raisons, ainsi que le fait Bengt Danielsson dans un livre récent (Le
Mémorial Polynésien, 1521-1833, édité par Philippe Mazellier, Papeete,
Editions Hibicus, 1978). Les souhaits et les affirmations non fondées ne
sont pas suffisants. Si les préhistoriens sont en mesure de démontrer ou de
produire des arguments valables, pour estimer que tous les membres de
l'équipage du San Lesmes moururent ou furent tués avant d'avoir rien pu
faire de ce que je leur attribue, alors nous pourrons reprendre l'idée que
les habitants de la Polynésie Orientale vécurent dans une espèce
d'isolement culturel et génétique jusqu'à l'arrivée des européens, il y a un
peu plus de deux siècles. Si par contre, ils n'ont pas d'arguments à
présenter, alors, qu'ils le veuillent ou non, ceux qui s'intéressent à la
préhistoire polynésienne devront s'accommoder du genre de scénario que
j'ai envisagé.
devenu le San Lesmes et
son
que
Traduction B. Jounez
Pacific Studies
The Institute
-
Spring 1980
for Polynesian Studies
Robert Langdon
Research School of Pacific
Studies
Australian National University
Canberra
sponsored by the Polynesian Culturel Center
and the Brigham Young University - Hawaï Campus
Société des Etudes Océaniennes
778
Comptes rendus
MISSION PLURIDISCIPLINAIRE
DIRIGÉE
PAR LE PROFESSEUR HATANAKA A REAO
Faisant suite à
ses
importants travaux réalisés depuis près de 20 ans
professeur Hatanaka de l'université de
Japon, a organisé cette année une mission pluridis¬
l'atoll de Reao, à laquelle le Département Archéologie a
dans les Tuamotu de l'Est, le
Kanazawa,
ciplinaire
participé.
I
au
sur
Compte-rendu de mission à Takaroa
du 2 au 18 juillet avec Mr. Nitta EIJI
imposés au déplacement de la mission dirigée par le
professeur Hatanaka sur Reao nous permirent de nous rendre pour une
brève période sur l'atoll de Takaroa, dans le NW des Tuamotu. Deux
jours furent utilisés à des visites de sites à Takapoto.
C'est la découverte à Reao par le professeur Sinoto en 1976, de
marae du type de ceux rencontrés aux Tuamotu de l'ouest, et notamment
Takapoto et Takaroa qui inspira cette mission. Elle avait pour but
d'étudier de près les structures de marae et les aménagements de leurs
environs, afin de les comparer aux structures et aux vestiges rencontrés à
Les délais
Reao.
La zone de Matitimarumaru, au NE du village actuel, où plusieurs
sites, avaient été observés en 1930 par Emory fut particulièrement étudiée.
deux marae livra de nombreux vestiges, des
que des hameçons. Un four cérémonieux,
cité par la tradition orale, situé à proximité, le "kopihe", fut étudié par
sondages. Un très grand nombre d'os de tortues et humains plus ou moins
brûlés ou carbonisés, furent également mis au jour. La stratigraphie du
four indique des réutilisations fréquentes de ce grand four mesurant 5 m
par 4 m, et des charbons ont été prélevés à des fins de datation.
Un
os
décapage de surface
et des dents
sur
humaines, ainsi
Les déchets alimentaires
ou
de travail de la
nacre
recueillis dans les
sondages réalisés à l'intérieur et à la périphérie des marae montrent que
des activités très différenciées s'y déroulaient.
Société des
Études
Océaniennes
779
Des prospections de surface, dans la partie ouest de l'atoll, ont livré
matériel coquillier assez important (plus de 100 pièces au total),
constitué d'hameçons et de nacre travaillée. De nombreux déchets de
taille et de fabrication ont été aussi récoltés qui permettront de mieux
un
expliquer la technologie de la fabrication des hameçons.
Deux autres marae ont été également visités. L'un d'entre-eux, le
marae Mahine-i-te-ata, qui est décrit comme le
prototype des marae des
Tuamotu de l'ouest, a malheureusement subi un saccage important par
des chercheurs de trésor*....
II Mission à Reao
Au
de notre mission à
Reao, nous avons effectué des
archéologiques dans le cadre des thèmes proposés par le
professeur Hatanaka. Nous nous sommes intéressés à la localisation et à
l'étude des sites d'occupation anciens afin d'accroître nos connaissances
sur les
processus de migration dans les Tuamotu de l'Est. Les vestiges des
structures religieuses et des divers lieux d'habitation et d'activités
domestiques ont donc été particulièrement observés.
La tradition orale recueillie auparavant devait permettre de préciser
les secteurs géographiques sur lesquels orienter plus particulièrement nos
travaux. C'est ainsi que les secteurs de Gake et de Taramahiti, l'un au
Sud-Est, l'autre sur la côte Est de l'atoll, ont été principalement
prospectés et étudiés. Des prospections ont également été faites sur l'île de
Tupaku et son îlot voisin, ainsi qu'autour du village actuel de Tapuarava
(voir carte).
A Gake, c'est surtout la présence de fosses de culture (appelées
Kauwei en Reao) dont les dimensions sont beaucoup plus grandes que
dans le reste des Tuamotu, ainsi que la forte probabilité d'y trouver des
niveaux d'occupation enfouis, qui ont attiré nos travaux.
cours
recherches
Secteur
Sud-Est/Gake
Dans cette zone, nous avons
voulu étudier de front l'ensemble formé
les structures religieuses (marae et annexes), les sites d'occupation
possibles ou potentiels et les zones de fosses de culture.
Tout d'abord, un ensemble de plusieurs structures religieuses, déjà
par
localisé lors de la mission de
1976
a
été totalement débroussé et le
professeur Nitta y a entrepris des travaux qui mirent au jour des
alignements de squelettes de tortue, placés devant des plates-formes à
offrandes.
En l'absence de tout
m
X 1
m
vestige de surface repérable, vingt sondages de 1
réalisés, à proximité de ces structures pour déterminer
type d'activités qui s'y rattachent. Ces sondages ont localisé
de combustion (fours et amas de déblais charbonneux) et
ont été
l'étendue et le
des structures
livré des déchets alimentaires et ou cérémonieux. De nombreuses arêtes et
écailles de poisson, ainsi que de très nombreux fragments d'os de tortues
plus
*
Le
ou
moins brûlés ont été récoltés. Des éléments de squelettes de tortue
marae
Tamatie visité lors de cette même mission à
Société des
Études
Takapoto
a
Océaniennes
subi
un saccage
identique.
780
mis
jour à la périphérie des cours des trois marae qui ont été dégagés,
indiquent des dépôts rituels bien organisés. Ils semblent correspondre
parfaitement aux ultimes descriptions des cérémonies qui se déroulaient
sur le marae comme le retranscrit K.P. Emory dans Tuamotuan Religions
structures and ceremonies (BP. Museum Bull. n° 191).
Trois grandes zones de fosses de culture ont été mesurées et
cartographiées. Le total des 200 fosses répertoriées couvre une surface au
sol d'environ 75 000 m2 et correspond à au moins 25 000 m2 de sol
aménagé pour la culture des tubercules (taro, tarua, kape).
Deux de ces fosses qui révélaient des niveaux d'occupation enfouis
sous les déblais, ont été partiellement fouillés et étudiés.
Plusieurs pelles en os de tortues (sur un total de 20 récoltées) ainsi
que deux herminettes en bénitier ont été trouvées en stratigraphie.
Sur le bord du lagon, dans une bande large au maximum de 50 m, de
nombreuses zones présentent en surface des amas de combustion et de
l'outillage coquillier qui a été collecté.
En outre, 6 fosses de culture, situées à proximité du village de
Tapuarava, ont révélé plusieurs niveaux d'occupation enfouis antérieurs
au
creusements des fosses.
La fouille de ces niveaux, sur quelques mètres carrés, a
nombreux déchets alimentaires (poisson, tortue) ainsi que du
aux
livré de
matériel
osseux original, notamment un outil destiné semble-t-il à décharner les
bénitiers (kakaro pa'ua) en deux exemplaires.
Taramahiti
Cette zone,
depuis longtemps citée par la Tradition orale (et par P.H.
correspondant à une occupation ancienne nous a été
indiquée par le professeur Hatanaka. Cinq sondages de 1 et 2 m2 ont été
effectués aux environs du Marae Hitiagateata. En outre, les coupes de
cinq jauges à cocotier, ont été ravivées sur une vingtaine de mètres de
long.
Trois d'entre eux, en bord de lagon montrent une couche d'occu¬
pation unique, épaisse de 10 à 25 cm. L'extrémité de la cour du marae et
les alentours sont très riches en amoncellements d'os de tortues, ainsi
qu'en amas de combustion étendus. Le trou à déchets déjà localisé par
K.P. Emory, a été sondé et s'est révélé très riche en os de poissons et de
tortues- Autour d'une niche constituée par trois pierres plantées sur
chant, un carroyage de 2 m X 3 m a livré une très grande quantité d'os de
tortues. Plus de 300 os, souvent en connexion, ont été dégagés dans la
niche sur une profondeur de 30 cm. A l'extérieur, un squelette de tortue,
avec la tête orientée selon l'axe longitudinal du marae a été dégagé et
Buck)
comme
relevé.
En bord du
lagon, en face des amas coquilliers, la prospection a livré
bénitier et les sondages réalisés montrent que le soussol n'est, là-aussi, formé que d'une seule couche d'occupation charbon¬
neuse épaisse de 25 à 30 cm.
plusieurs outils
en
Conclusion
Les
quelques trente sondages'réalisés entre Taramahiti et Gake,
Société des
Études
Océaniennes
sur
781
le côté Est de l'atoll, confirment la présence d'une couche
d'occupation
unique, et ce, exclusivement en bordure de lagon. Ceci indique que si
l'occupation a été discontinue, elle n'a pas laissé de traces apparentes.
L'absence, ou la faible concentration en vestiges archéologiques (outils et
mobilier), ne permet pas à l'heure actuelle de mettre une chronologie
nettement en évidence. Il semble de
plus, que les vestiges de marae du type
de l'Ouest soient en fait les
reliques de petits marae de l'Est, démontés
pour faire des parcs à poissons.
Les niveaux enfouis étudiés, sont tous antérieurs à
l'aménagement
des dernières fosses de culture et peuvent
correspondre à des occupations
assez anciennes, que les datations
par le C 14 détermineront.
L'étude de l'important matériel osseux
recueilli, ainsi que de sa
répartition sur et à proximité des marae, confirme et complète dès à
présent les derniers récits des rites relatifs au culte de la tortue pratiqués
par les Polynésiens des Tuamotu de l'Est.
En ce qui concerne les fosses de culture, l'étude de leur
morphologie
et des données obtenues en fouilles confirment
l'importance accordée
autrefois à l'agriculture sur ces atolls. La dimension des surfaces
aménagées et leur extrême densité montrent que la production vivrière et
donc, la population de l'atoll, ont été élevées.
Corrélativement, l'organisation sociale et l'entraide que ces travaux
ont impliqué sont remarquables, et une mission
complémentaire est dès à
présent prévue à Reao pour compléter ces observations. La spécificité des
atolls périphériques de l'Est des Tuamotu se traduit
par des différences
linguistiques et archéologiques importantes qu'il est nécessaire de mieux
expliquer.
Jean-Michel Chazine
TAHITI DANS LES ARCHIVES DANOISES
Nous
les yeux un ouvrage intitulé : "Sources of the
History of North Africa, Asia and Oceania in Denmark", publié par The
avons eu sous
Danish National Archives, K.G. Saur, Munich - New-York, 1980, 842 p.,
('Conseil International des Archives, Guide des Sources de l'histoire des
Nations, 3eme série, vol. 3).
Voici
Française
quelques données intéressantes concernant la Polynésie
:
1°) Archives publiques.
De 1845-1847, la corvette Galathea exécute un tour du monde, qui
compte un certain nombre de scientifiques parmi son équipage. Ils
prennent des photographies de mollusques et de poissons de Tahiti, de
Motu-Iti et Bora-Bora, en décembre 1846. On photographie également
Société des
Études
Océaniennes
782
des sites et des paysages aux
îles Tuamotu (3 décembre), à Tahiti (5
décembre), à Raiatea, Tahaa (12 décembre), à Bora-Bora (15 décembre),
à Rufutu (22 décembre).
Les archives des Affaires Étrangères du Danemark possèdent les
"Rapports" des consuls, de 1856 à 1909, et les "Archives du Consulat", de
1872 à 1894. On trouve, daps ces archives, des œuvres (peintures, dessins
aquarelles) de Paul August Plum exécutées en décembre 1846. Sous le
: "un portrait de Manu" ; le n° 141 représente un "Girl with child" ;
le n° 142 : "French camp near Punaavia" ; le n° 143 : "Fille à Tahiti ;
homme des Marquises" ; le n° 144 : "Case à Tahiti" ; le n° 145 : "Femme
ou
n° 140
de Bora-Bora" et les nos
146-155, de nombreux autres personnages :
hommes, femmes et enfants.
Rasmus Rask recueille des échantillons linguistiques : "Notes on the
language of the South Sea Islanders, with a vocabulary of tahitian (partly
in german), c. 1805.
Dans le même fonds "Vues prises au cours de la- croisière de la
Galathea 1845-1847" : Society Islands. The Tahiti Group, with Tahiti and
Raiatea (décembre 12, 1846) 21 clichés d'un grand format (30,8 X 22,6
cm).
Les archives ethno-musicales possèdent également : "Tahiti
Enregistrements de Jens Bjerre, effectués de 1950 à 1960".
On trouve encore : "Portrait de la reine Pomaré et de sa parenté"
offert
au
Cdt H. G. Olrik
en
1860.
L'expédition océanographique autour du monde de la Fondation
Carlsberg (1928-1930) contient la liste des échantillons recueillis à Tahiti
et aux îles Marquises.
Clichés stéréoscopiques de Tahiti antérieurs à 1914.
2°) Archives privées
"Journal" de bord de Niels
Philipsen Hay (1814-1901) tenu au
de 1850 à 1854. Passe en janvier 1852 à Tahiti.
"Souvenirs" de ma vie de marin, 1916 par le capitaine P. H.
Clausen, commandant le brig Conrad, lors de son voyage HambourgTahiti-Hambourg en 1888.
Dossier d'assurance maritime concernant le naufrage, à Tahiti, en
octobre 1897, du Schooner Ameta venant de Montevideo.
-
cours
de
son
voyage
-
-
Philip et Waine Stefanie, The people from the Horizon. An illustrated
history of the Européens among the South Sea. Islanders. Oxford, Phaidon
Press, 1979, 296 p., ill. en noir et en couleur, portraits, cartes, bibl., 28 cm.
Snow,
Philip Snow est l'auteur de savantes compilations sur certains archipels du
Pacifique. Jadis, avec quelques autres érudits de son acabit, nous avions formé,
par manière de plaisanterie, une confrérie des "Bibliographes du Pacifique". Voilà
Société des
Études
Océaniennes
783
que
notre petite société s'honore
en voyant un de ses membres passer de la
grande histoire. Tous les amis de l'Océanie seront heureux de
savoir que les îles des Mers du Sud ont trouvé leur
chroniqueur. Ils possèdent
maintenant la possibilité, en moins de 300
pages - il est vrai qu'il s'agit d'un grand
in-quarto carré ! - de s'informer de la vie dans le Pacifique depuis que, voici quatre
cents ans et plus, Balboa, Magellan,
Mendanoa, Quiros et consorts qui
découvraient ces archipels, les faisaient entrer dans la vie du monde occidental.
documentation à la
On discutera
populations et si
longtemps
pour
savoir si cet impact fut favorable à ces
une grande
nous sommes venus faire leur bonheur. C'était
aventure, en tout cas, avec les bons et les mauvais côtés de toutes les aventures
:
les
sociétés ébranlées, des valeurs
indigènes bousculées à mort, le primat de l'Europe
imposé parfois brutalement. Car il n'y eut pas que la boussole, l'électricité,
l'imprimerie, la liberté, la justice et la tolérance ; il y eut aussi la poudre et les
armes, les épidémies sournoises et les grippes espagnoles décimantes des "diables
étrangers" que nous étions. Et tout cela avait été accompagné ou précédé par des
beachcombers de tous poils et des santaliers sans vergogne, des
naufragés
indésirés et indésirables, des commerçants malhonnêtes, pillards ou rançonneurs.
Car il n'y eut pas, hélas, que de bons missionnaires et de sages administrateurs, de
secourables médecins et des infirmiers compatissants. Ce livre, dont certaines
pages horrifient, réchauffe le coeur par d'autres, d'un souffle plus chrétien.
On admirera l'abondante et
parfaite illustration. Des gravures de Schouten et
Horn, Wallis et Futuna et dont les illustrations
présentent les indigènes d'un trait précis et pittoresque jusqu'aux photographies
en couleur des dernières
pages, on trouvera, là, choisies d'une main experte, les
images essentielles de l'iconographie du Pacifique.
Le Maire découvrant les îles
C'est avec satisfaction qu'on revoit les fameuses aquateintes de Cleverly, les
meilleures pages des carnets de croquis de Louis Le Breton, l'artiste qui
accompagnait Dumont d'Urville, les délicates aquarelles de Mrs Constance
Gordon Cummings et les peintures de Gauguin. Et les écrivains aussi ont trouvé
leur place : voici Robert-Louis Stevenson avec la si belle photographie
qui nous le
montre, entouré de sa famille et de sa maisonnée, sous la véranda à Vailima, sur
une colline de Samoa dominant la mer. Et encore Herman Melville l'aventurier,
Rupert Brooke le poète, Pierre Loti le romancier, Jack London le conteur...
Quelle pléiade internationale réunie par un commun amour des Mers du Sud.
Vraiment un très, très beau livre qui fait honneur à Philip Snow et à sa fille,
Stéfanie Waine qui appartient à l'état-major du British Museum et que je
soupçonne
d'avoir mis ia main à l'œuvre de
documentation
son
père
pour
la recherche de
iconographique.
Patrick O'Reilly
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