B98735210103_154-155.pdf
- Texte
-
BULLETIN
DELA
Société des Ëtudes Océaniennes
N°*
154,
155
-
MARS
Anthropologie
—
-
TOME
JUIN
Ethnologie
Histoire Ancienne et
1966
Sociologie
et
-
IMPRIMERIE
Société des
—
Linguistique
Folklore
Physiques et Naturelles
PAPEETE
( N- 5, 6 )
Contemporaine de la Polynésie
Littérature
Sciences
—
XIII
Études
—
Océanographie.
OFFICIELLE
Océaniennes
Conseil d'Administration
Trésorier
M. Henri JACQUIER.
M. Bertrand JAUNEZ.
Melle Janine LAGUESSE.
M. Yves MALARDE.
Assesseur
M. Cdt PEAUCELLIER.
Assesseur
M. Cdt Pierre JOURDAIN.
Assesseur
M.
M.
M.
M.
M.
Président
Vice-Président
Secrétaire
Assesseur
Assesseur
Assesseur
Assesseur
Pour être reçu Membre
membre titulaire.
Rudolphe BAMBR1DGE.
Terai BREDIN.
Martial IORSS.
Siméon KRALSER.
Raoul TEISSIER.
de la Société se faire présenter par
un
Bibliothèque.
membres
qu'ils
domicile certains livres de la Bibliothèque
en
signant une reconnaissance de dette au cas où ils ne ren¬
draient pas le livre emprunté à la date fixée. Les autres peu¬
Le
Conseil
d'Administration
informe
ses
peuvent emporter à
vent
La
être consultés dans la Salle de lecture
du Musée.
Bibliothèque et la salle de lecture sont ouvertes aux
jours, de 14 à 17 heures, sauf
membres de la Société tous les
le Dimanche.
Musée.
Le Musée est ouvert tous les
jours, sauf le dimanche de 14
à 17 heures.
Société des Études Océaniennes
BULLETIN
DE LA
SOCIÉTÉ D'ÉTUDES OCÉANIENNES
(POLYNÉSIE ORIENTALE)
TOME XIII
No
154, 155
—
—
(N° 5, 6)
JUIN
MARS,
1966.
SOMMAIRE
Pages
LE MUSEE GAUGUIN
Inauguration du musée Gauguin
Discours du Professeur
TAHITI
—
....
Roger Heim
611
.
Discours du Gouverneur Jean Sicurani
Discours
du
Député John Teariki
Discours de M. Martial Iorss
français
Études
621
.
629
.
.
Discours de M. Martial Iorss tahitien
Société des
605
.
.
Océaniennes
635
639
INAUGURATION
Le
15
DU
MUSEE GAUGUIN
Juin
1965•
Le
15 juin 1965 était inauguré à Papeari le
Musée, plus exactement le mémorial, élevé à lagloire de Paul Gauguin par la Fondation Singer.
Polignac. A cette occasion des discours furent
prononcés par le Professeur Roger HEIM, membre
de l'Institut et président de la Fondation,
par
Mr.
SICURANI, Gouverneur de la Polynésie Fran¬
çaise, par Mr.
le Député TEARIKI et par Mr.
tial
Mar¬
IORSS, professeur de langue tahitienne.
sont ces discours que nous reproduisons dans
numéro.
Ce
ce
on peut s'en
rendre compte, chacune de
personnalités a évoqué, selon ses fonctions
et selon son inclination,
à travers l'homme dont
on
célébrait la mémoire,
l'artiste prestigieux,
le génie,
la gloire nationale, le défenseur des
Polynésiens ou simplement le polémiste. Tous ont
rendu hommage à celui qui avait habité durant
quelque temps vers 1892 à Mataiea non loin du
lieu où s'élève aujourd'hui la magnifique réali¬
sation consacrée à sa renommée.
Comme
ces
O'Reilly s'ouvrit à moi du¬
Paris d'un projet - fort mo¬
deste d'ailleurs
qu'il avait élaboré afin de
commémorer le souvenir de Gauguin à Tahiti je
l'avais félicité,
et vivement encouragé.J'avais
en effet
eu l'occasion de
déplorer, étant prési¬
dent du Syndicat d'Initiative,
l'absence de tout
monument rappelant ici l'homme qui avait fait
beaucoup pour le prestige de Tahiti et, ce n'est
pas une inscription à Punaauia,
le nom donné à
une
rue
de Papeete ainsi qu'à un établissement
scolaire qui pouvaient suffire à satisfaire la
Lorsque
rant
l'été
le
R.P.
1959
à
-
curiosité
des
touristes
Société des
de
Études
passage.
Océaniennes
—
606
-
Lorsque la Fondation Singer-Polignac décida
d'adopter le projet du R.P. O'Reilly,en lui don¬
nant une ampleur que son auteur n'aurait osé es¬
pérer, je fus chargé par son Président du choix
délicat d'un emplacement pour l'édification du
monument. Ma première idée fut pour l'endroit de
Punaauia où Gauguin avait autrefois construit sa
maison et où il
avait peint certaines de ses
toiles célèbres,
en particulier,
celle intitu¬
lée :
"D'où venons-nous, qui sommes-nous, où al¬
lons-nous". Il fallut cependant y renoncer ;
ce
terrain venait en effet d'etre découpé et vendu
en
lotissement par son dernier propriétaire. Cet
endroit qui,
jusqu'à ces dernières années n'a¬
vait guère été plus habité que du temps de Gau¬
guin, était devenu une sorte de banlieue de Pa¬
peete où on ne pouvait guère imaginer faire re¬
vivre l'ame du peintre tourmenté.
Il fallait
décidément chercher ailleurs un lieu suffisam¬
ment retiré et,c'est à ce moment que notre choix
se
porta sur la pointe de Manaiatea où se trou¬
vent les ruines du plus grand marae de Tahiti,
malheureusement, totalement dévasté aujourd'hui.
Le site était grandiose et de plus,
le terrain
étant domanial,
permettait d'espérer un accord
le gouvernement et l'Assemblée Territoria¬
avec
le. Divers examens pratiqués sur les lieux avec
l'aide d'un géomètre du service du cadastre fi¬
rent apparaître des inconvénients et des diffi¬
cultés insoupçonnés au premier abord. La route
d'accès par exemple qui, sur le plan cadastral
portait six mètres de largeur,n'en avait en réalité que trois, ce qui interdisait le croisement
des véhicules sur toute sa longueur. De meme les
limites de la propriété domaniale ne correspon¬
daient pas exactement au plan dressé quarante
ans
auparavant. Dans son état actuel ce terrain
était trop exigu pour y édifier une construction
importante et il etlt été nécessaire de l'agran¬
dir en achetant
une
autre portion à l'un des
propriétaires
limitrophes.
Pour diverses raisons ces pourparlers
traî¬
nèrent en longueur et on n'en voyait guère la
fin lorsque j'eus l'idée de m'adresser à Mr.Cor¬
nélius CRANE,
riche industriel américain qui
s'était rendu acquéreur de la très belle pro-priété de Motu Ovini à Papeari.Le précédent pro-
Société des
Études
Océaniennes
—
607
—
Harrisson SMITH ancien professeur
de Harvard avait consacré ses
dernières années à faire de cet endroit un véri¬
table jardin botanique que Mr.
CRANE continuait
d'entretenir sans pourtant y habiter. Je déci¬
dais donc de présenter notre requete en la fai¬
sant appuyer par un ami commun et en y joignant
l'historique et les statuts de la Fondation Singer-Polignac. Un mois plus tard nous recevions
l'acquiescement à cette demande ; le propriétaire
demandait simplement à la Fondation de délimiter
l'espace qui lui serait nécessaire pour sa cons¬
truction, espace qu'il offrait gracieusement, je
n'ai guère besoin de le préciser.
Il était né¬
cessaire maintenant d'obtenir l'autorisation du
Territoire, étant donné qu'aux termes de l'acte
de vente il était spécifié qu'au décès de Mr.
CRANE la portion de la propriété située au bord
de mer lui revenait.
L'Assemblée Territoriale
consentit à cet effet à la Fondation Singer-Polignac un bail de longue durée
moyennant un
loyer de principe ; ce bail ne devant prendre
effet qu'au décès de Mr
Cornélius CRANE, lequel
se
produisit d'une manière inattendue quelques
mois plus tard. Le Territoire prenait donc pos¬
session des lieux et s'occupait de construire
une
route d'accès macadamisée ainsi que d'agran¬
dir le jardin botanique créé autrefois par Har¬
risson SMITH.On ne pouvait guère souhaiter trou¬
ver à
Tahiti un endroit aussi idéal pour y éle¬
ver
le monument qu'on admire aujourd'hui.
priétaire,
à
Mr.
l'université
l'a fait remarquer avec hu¬
le Gouverneur SICURANI dans
son discours,
on aurait fort étonné Gauguin luimême,
"cet ennemi des lois et ce contempteur de
l'ordre établi",si on lui avait décrit à l'avan¬
ce
la cérémonie
qui devait se
dérouler en ce
lieu quelque soixante dix années plus tard.
Il
faut bien reconnaître que si l'artiste fut assez
méconnu en Europe, il le fut totalement à Tahiti
et cela,
à tous les degrés de l'échelle sociale;
le procès-verbal de la vente aux enchères qui
eut lieu à Papeete après sa mort en fait suffi,
samment foi. Les possesseurs à Tahiti de toiles
maintenant célèbres
des portraits pour la plu¬
part commandés au peintre "par charité" ou exécùSans
mour
et
doute,
à
comme
propos
Mr.
-
Société des
Études
Océaniennes
—
608
-
tés
lui en remerciement, les cédèrent aux
par
premières sollicitations du marchand de tableaux
Edouard DRUET et, rappelons qu'une porte vitrée,
peinte également par Gauguin à Mataiea.y demeura
en
toute quiétude jusqu'en 1922 date à laquelle
l'écrivain Somerset MAUGHAM l'acquit pour une
somme
dérisoire et l'emporta. Ce manque de flair
à défaut de sens artistique est peut-Stre morti¬
fiant on ne peut que le constater et cette cé¬
rémonie représentait donc un hommage tardif mais
sincère de Tahiti à celui qui avait contribué à
sa
renommée pour une grande part.
Henri
Société des
Études
JACQUIER
Océaniennes
Photo
A.
SYLVAIN
Société des Etudes Océaniennes
DISCOURS
PROFESSEUR
DU
du
d'Histoire
Président
l'Institut,
de
Membre
Directeur
de
ROGER HEIM,
Muséum National
Naturelle et
la
Fondation
Singer-
Polignac.
jour,le seul regret que nous éprouvons,
ne point retrouver ici M.
André Malraux
qui devait inaugurer avec nous le Musée Gauguin
aujourd'hui. M. le Gouverneur Sicurani vous dira
combien M.
le Ministre des affaires culturelles
a
été désolé de devoir tenir compte d'obliga¬
tions impérieuses qui l'ont retenu à Paris. Mais
le Gouvernement de la République est en ce jour
présent, et le conseil de la Fondation SingerPolignac lui en exprime, par vous, Monsieur le
Gouverneur, sa gratitude.
Pour vous aussi, car
nous
savons que nous vous devons déjà beaucoup.
Et nous voudrions aussi remercier l'amiral Thabaud de son accueil si spontané, si cordial.
En
ce
c'est
de
réalisation, elle est le résultat de
ininterrompus, inspirés d'une même vo¬
lonté de la réussir sans faille, marquée de la
vigilance commune et je dirai acharnée de ceux
qui y ont été associés. La Fondation remercie
avec
un double
sentiment, de reconnaissance et
d'admiration, celui qui en fut à la fois l'ini¬
tiateur et le constant inspirateur,
le R. P. O'¬
Reilly, qui jeta la semence et la fit fructi¬
fier.
Sans lui le Musée ne serait sans doute pas
encore dans
son germe.
Sa pensée obstinée a con¬
quis successivement le Président, le Conseil de
la Fondation,
son Contrôleur financier - ce qui
était fort important - et les étapes difficiles
de la détection et du rassemblement des objets.
Il a fallu une perspicacité rare, une compétence
Cette
concours
exceptionnelle, une insistance exemplaire pour
mettre à la disposition de l'entreprise les ri¬
chesses réunies ici. Depuis le petit croquis co-
Société des
Études
Océaniennes
—
612
—
votre imagination et votre témérité
dessiné, il y a peu d'années, mon Père,
un
comme
phantasme de rêve,le chemin était long.
Mais il a été rapidement franchi. Nous réalisons
ce
que peut être en ce jour la satisfaction pro¬
fonde que cet achèvement et cette réussite vous
procurent. Vous l'avez bien méritée, l'intensité
de cette joie .' Mais il a fallu aussi le cadre.
Nous l'avons trouvé ici,
ensemble, avec M. Henri
Jacquier dont l'infinie complaisance, les judi¬
cieux conseils,
les interventions répétées, ont
tant servi la cause de cette oeuvre.
La généro¬
sité du très regretté M.
Crane nous
ouvrit la
porte de ces lieux enchanteurs : que sa mémoire
lorié
que
avaient
reçoive l'hommage d'une gratitude
générosité.
qui mesure sa
Mais c'est grace à M.
Claude Bach, premier
prix de Rome, et à son imagination créatrice, à
ce
concept architectural très aéré dans son élé¬
gante originalité, où les inspirations française
et japonaise se retrouvent dans le décor de la
nature polynésienne,
que s'érige cette remarqua¬
ble construction qui fera parler d'elle et de
son
créateur.
Véritablement, la chance devait
continuer à nous servir :
M. René Dessirier don¬
nait une
fois de plus aux dimensions de son
grand talent de maftre décorateur les limites
qui atteignent une sorte de perfection de l'a¬
gencement, de l'équilibre intérieur, des éclairs
de couleurs,
des lavis délicats et des plus vifs
contrastes, avec une sensibilité qui n'exclut
jamais 1'efficient.De ce Musée il a été le pres¬
tidigitateur du décor. Mais il fallait sur place
le conducteur,
constamment sur la brèche,à cha que instant prêt à intervenir,
dont les respon¬
sabilités allaient
jusqu'aux initiatives les
plus judicieuses : l'édification de ce Musée lui
doit beaucoup,il en a été aussi le maftre d'oeu¬
vre,
j'ai nommé M. Rodolphe weinmann. Un grand
patron lui apportait son incessant concours : ce
fut M.
Vincent, qui fait honneur à la S.E.T.I.L.
Nous n'oublierons pas M.
Atger, l'entrepreneur,
qui avait à accomplir une tache difficile, et
qui l'a conduite avec maîtrise. M. Lagrange a
été fort attentif dans ce domaine délicat qui
est le sien, celui des peintures. Comment remer¬
cier M.
Maclet, directeur du jardin botanique,
Société des
Études
Océaniennes
-
613
—
cordialité dans un voisinage dont nous
et qu'il enrichit constamment,
et pour sa participation effective au décor vi¬
vant qui nous entoure.
pour
sa
nous
félicitons
Quant à M. Porcher, directeur de l'Office des
Postes, nous lui devons la phase ultime et vic¬
torieuse de cette naissance des trois timbres
dessinés par M.Dessirier à la gloire du Musée et
de celui que nous honorons en ce jour. Nous vou¬
drions aussi remercier tous ceux qui modestement
mais avec élan ont aidé à 1'oeuvre,marquée ainsi
la convergence des appuis, des encourage¬
ments, des aides journalières: j'entends le chef
et la population meme du district de Papeari et
leur gentillesse incessante,
sans oublier les
Travaux Publics qui se sont employés avec dili¬
gence à la construction de la route nouvelle qui
épargnera les arbres précieux de ce jardin bota¬
nique, conservatoire de nature tropicale, auquel
reste associée la mémoire
du grand botaniste
américain, Harrison Smith.Nos remerciements vont
aussi à la presse locale qui a déjà servi fort
heureusement la cause de ce Musée dont l'éclai¬
rage est
do aux soins de M. Marc
Dumont. Notre
jeune et ardent conservateur, M. Gilles Artur, a
pris dans ses fonctions un départ aussi accélé¬
ré, aussi prometteur - et déjà efficace - qu'un
coursier sur la toile du maître.Entre ses mains,
la Maison sera bien servie.
Le succès de cette
cérémonie et des manifestations qui l'accompa¬
gnent suffit à le prouver.
par
salue avec une profonde satisfac¬
ici présents du Conseil de la
Fondation : mon éminent confrère M.
le Profes¬
seur
Robert Courrier, M. le Président Jean Hourticq, eux aussi tant attentifs à tout ce qui tou¬
che notre maison,
le Prince Louis de Polignac
dont le nom familial résonne une
fois de plus
sur
les mers du Sud, et notre contrôleur finan¬
cier, M. Roger Brian, toujours si compréhensif à
l'égard des intérêts et des entreprises de la
je
Enfin,
tion
les
membres
Fondation.
Nous
à
inaugurons
Papeari,
mais
aujourd'hui
le Musée
c'est surtout Gauguin
Société des
Études
Océaniennes
Gauguin
lui-meme
—
614
—
nous célébrons,
j'entends non seulement le
peintre, mais l'homme, car il n'est pas d'oeuvre
qui soit autant que celle-ci le prolongement, ou
plutôt l'éclatement, la transfiguration, du tem¬
pérament d'un homme dans son art, d'un homme, et
pour mieux dire,
d'une ame.
que
cette musculature de
auront raison, s'ache¬
vant sur ce visage multiforme comme découpé au
couteau, dans un assemblage où les antécédents
espagnols et incas s'ajoutent dans leur impétuo¬
sité à la délicatesse du Val de Loire, son lan¬
gage rude,
mais jamais vulgaire, les formules de
son
verbe qui cravachent, traduisant tour à tour
le cynisme et la franchise,
la vanité et la dis¬
crétion, la volonté et la faiblesse, sa bruta¬
lité mais sa douceur,
sa sécheresse mais sa ten¬
dresse, l'élan mais souvent le découragement qui
le brise,
qui l'annihile, l'enthousiasme s ' ou¬
vrant vite sur le pessimisme qui lui fait rumi¬
ner
ses
insuccès en s'appretant à lui créer de
nouvelles défaites, qu'il livrera à ses accès de
violence,son égoîsme mais son désintéressement;
enfin, la pire sensualité faite du trop-plein de
bouffées passionnelles, mais aussi les plus
ses
méritoires retenues et, faisant vibrer cet écheveau
de contrastes,
l'aspiration continuelle,
irascible et implacable, en une justice des hom¬
mes,
jusqu'à chercher pour sa part toujours à
mieux souffrir afin de se forger une plus sûre
raison de leur lancer à la face ses reproches :
Son
corps
fut
tel
Ce
vidu
de
dont
matelot,
colosse,
ses
excès
l'homme.
que
nous
célébrons
d'exception
en
tant
aussi, c'est cet indi¬
puissance révoltée,
que
personnification libérée, libérée des chaî¬
forgées par les disciplines, les modes, les
snobismes, les morales. Nous célébrons ce que ce
tempérament de feu et d'escarbilles a été, mais
aussi, à coté du peintre, et parce que peintre ;
que
nes
le
poète.
Poète, bien sOr,et c'est pourquoi il fut Gau¬
guin dont l'imagination laisse le pas à la sen¬
sibilité. C'est-à-dire sachant tirer des choses
Société des
Études
Océaniennes
—
bl5
—
leur substance secrète,
des etres leur sens ca¬
ché, de la Nature sa signification profonde, in¬
terne, primitive, telle qu'un Dieu qu'il invec¬
tive mais en qui il croit encore lui apparaît le
créateur. Il est parti à la recherche de l'éden
terrestre, et il le trouvera enfin à Tahiti et
aux Marquises.
Poète de la Nature, mais non pas
d'un parc ratissé, non pas d'un espace vert comme
le XXème siècle nous en livre l'ersatz ;
non :
la Nature telle qu'elle s'est ouverte aux hom¬
mes, celle d'un Dieu,pour lui symbole de la beau¬
té et du reve, qui lui évite d'assimiler "l'idée
de la mort à une aventure absurde dans un chaos
où tout ne serait que désordre et prolifération
inutile".
Et
d'une
nature
qui
n'est
pas
celle que les
C'est de
peuples, de Tahiti comme de Bretagne,
qu'il a été le traducteur passionné.Il en a été,
par
la parole comme par ses toiles le vision¬
naire. Car il n'y a pas de vie méritée sans poé¬
sie.
Celle-ci
est
l'interprétation des etres
d'élite dont la sensibilité bruisse comme l'écu¬
l'arete d'une vague.
me
sur
Ecoutez-le, quand,
au
soir, devant Moorea, là où nous sommes, il
entend une feuille sèche qui tombe,
"faisant le
bruit d'un frôlement d'esprit". Dans Gauguin,
il
n'y a non seulement du poète mais du devin,comme
du pire et du sacré,
du cloaque et de la pureté.
humains
1'âme
ont
construite
sur
les
cendres.
des
ainsi que partout où l'ont transpor¬
impulsions.il a cherché à se mettre d'ac¬
cord avec lui-môme,
à Panama dans la sueur et
l'effort, aux Antilles dans la chaleur des tro¬
piques et la douceur d'une nostalgie résignée,
dont la placidité marque
pour lui une escale
vers
Tahiti, à Arles près de Von Gogh où il me¬
au
contraire ce qui lui manque,à Pont-Aven,
sure
sa
plus productive étape avec celle de la Poly¬
nésie, où selon lui, l'oeuvre peinte ne doit pas
suggérer mais etre capable d'affirmer,
où le
trait n'est que moyen d'imprimer sa pensée.PontAven, le Pouldu. Il y cueille frénétiquement tout
ce
que le pays breton lui apporte
de pareil à
lui-meme,
où le légendaire prend la place du
charme, où
le cadre est sévère à l'image des
ajoncs hostiles, mais d'un jaune qui aveugle ou
Et
té
c'est
ses
Société des
Études
Océaniennes
616
—
qui
dans
—
christ,
où les
braqués
vers
semblent un décor schématique et
annonciateur, où sur les landes solitaires, les
chapelles de granit, les lourds calvaires, purs
dans leur masse et leur primitivité,
règne l'ame
d'une race solide qui aime rêver sans complai¬
sance
ni sensiblerie,
mais dans l'inquiétude du
mystère jailli du surnaturel et dans le chucho¬
tement de l'invisible ;
une race qui vit dans la
comme
secoue
haies
vives
le ciel
son
chenes
aux
un
pays
effilochés
et
sobriété
du yerbe et dans la discrétion du sen¬
timent. N'y aurait-il pas quelque trait obscur
mais réel qui
rattachât la Bretagne à ce
que
Gauguin
trouvé ici auprès de ce qui oppose ?
c'est là que s'affirme, devant la
sincérité, son opposition picturale au procédé,
à l'article,
au divisionnisme d'un Seurat,
aux
gens
du petit point comme Signac. L'art
le
sien
c'est la seule chose, nous dit-il, qui ne
nous
trahit pas. Et déjà sa propre méthode s'af¬
firme :
il tire des seules couleurs du prisme
les moyens suffisants pour peindre,
affirmant
qu'il n'est pas nécessaire de les dégrader, de
les fondre sur sa toile pour les faire parler.
Il y est parvenu,
et il continuera, dans la vé¬
rité telle qu'il la découvre à travers, non pas
ses
yeux,
mais le tréfonds de lui-même.
Il y a
En
tout
a
cas,
-
-
en
lui
et
en
l'halluciné,
réel.
C'est
cient.
rage
Et
de
son
à
l'antre
c'est
ce
de l'halluciné,
mais
Pont-Aven, est au bord du
oeuvre
éclos
du
vrai
qu'il
au
sein
découvrira
du
Ainsi, en ce jour, 15 juin 1965,
ressusciter, non pas seulement
qui séparée de son esprit et de son
chêne
le
mi¬
Tahiti.
nous
voulu
serait
subcons¬
dans
comme
un
fleuve
sans
source,
son
avons
oeuvre
caractère
comme
un
racines, mais bien Gauguin en tant
que titanesque personnalité.
Autour de lui, au¬
jourd'hui, votre rassemblement lui apporte une
nouvelle gloire.
Vous
l'avez rendu vivant, ce
qui veut dire éternel.
sans
Vous, Tahitiennes
la sincérité de
de
la
ses
et
Tahitiens, qu'il a aimés
tendresse, la profondeur
ses
élans, vous- saurez, et vous savez servir
cause
de son génie. Mais pour donner écho à*
voeux
d'outre-tombe, faites que Tahiti, dans
avec
Société des
sa
Études
Océaniennes
—
l'aube
d'un
617
—
matériel inéluctable et sou¬
siècle qui n'est qu'un siè¬
cle et
une
ère nouvelle comme le di¬
sent nos clercs d'un moment ou nos prospecteurs
de l'avenir,
que
Tahiti reste encore et avant
tout Tahiti, que ce mot lumineux n'implique au¬
cun
triste destin, qu'il ne devienne pas,
comme
ailleurs, une caricature du passé,
un lieu de
banalité dans lequel celui-ci se serait dissout
à tout jamais.Faites que votre esprit y demeure,
que
son cadre s'obstine à durer,
plus fort que
la loi d'un progrès en partie factice.
progrès
haitable,
mais en
non
point
ce
encore que Gauguin,à Papeari,
du Pacifique, c'est aussi la
présence de ce que la France a trouvé de meil¬
leur à vous confier.
Gauguin, c'est le silence
des nuits tahitiennes et le scintillement de la
mer
sur
le lagon qui nous entoure,
c'est un che¬
val blanc qui galope sous l'ombre bleue des co¬
cotiers, c'est votre terre,
vos cimes et votre
lumière ; c'est la douceur muette et ardente de
vos
vahinés
;
Gauguin, c'est aussi ce que la
France vous a donné,
et ce qu'elle seule pouvait
Conservez ici son esprit et son ame
vous
donner.
de meme que Hiva-Oa garde sa dépouille.
En ce
lieu il reprend sa place pour toujours.
Et fai¬
tes, en harmonie avec les Français venus à Tahi¬
ti, qu'il demeure aussi l'image de la France,
aujourd'hui plus que jamais présente dans le Pa¬
cifique, et qui le sera demain mieux encore et
également par ses ingénieurs, ses savants, ses
artistes, ses agronomes1, ses marins, et, comme
hier, avant tout, par la signification cultu¬
relle de son destin et par sa volonté. Et le Mu¬
sée Gauguin en est la preuve et le symbole.
Ce
que la France représente ici,
par son existence
océanienne, c'est l'humanisme traditionnel, mais
aussi l'humanisme de demain, qu'elle entend dé¬
fendre contre les impérialismes strictement mé¬
canisés de la technocratie moderne. Que le génie
de Gauguin,
fait de tant de paillettes étincelantes et polychromes,
trouve dans ce Musée,
grace à ceux qui l'ont conçu, édifié et enrichi,
un
temple que la Fondation Singer-Polignac con¬
fie à notre commune amitié et que plane à tout
jamais sur vos pics et sur vos cotes, et le soir
comme
auprès des aréoîs resurgis dans le silen-
Mais
ici
dites-vous
même,
au
sein
Société des
Études
Océaniennes
—
le plein
prits, et de
d'un peuple
ce,
civilisation
-
618
—
accord de deux races, de deux es¬
deux langues dont l'une est celle
le votre - et l'autre celle d'une
sans
frontières, qui appartient à
1 ' Universel.
D'où venons-nous
? rejoints ici de môme
De
sont
que
deux poles
Gauguin a
qui
su
se
vous
découvrir.
Que
sommes-nous
qu'associent
Où
d'un
?
.
Des
la confiance
hommes et des
et l'amitié.
femmes,
allons-nous ? Je veux croire, à l'image
sculpté de Paul Gauguin, sur une route
bois
heureuse.
Société des
Études
Océaniennes
—
Société des
619
—
Études
Océaniennes
Photo
A.
SYLVAIN
Société des
Études
Océaniennes
DISCOURS
PAR M.
Chef
LE
du
PRONONCE
GOUVERNEUR JEAN SICURANI,
Territoire
de
la
Polynésie
Française.
Monsieur
le
Président,
Messieurs,
Mesdames,
Si
l'ame
assemblée
de
et
si
GAUGUIN flotte au-dessus de cette
les esprits,dans l'au-delà,
gar¬
dent
quelque chose encore des
mouvements hu¬
cet esprit-là ne doit pas contempler sans
un
peu de surprise ce cérémonial où tout l'or¬
dre social se retrouve pour honorer solennelle¬
ment un ennemi des lois
et un
contempteur de
mains,
l'ordre
Eh
établi.
bien
au-dessus
.'
de
il
nous
faut
accepter
ce
sourire
tStes, et meme garder bon¬
ne
conscience, puisque le génie,tout grand qu'il
soit, a cette faiblesse d'aspirer à la gloire,
c'est-à-dire à la consécration du reste des mor¬
nos
tels.
Cette
consécration,
cherchée si pas¬
j'imagine qu'il
goûte maintenant le miel dans le séjour des es¬
prits, cette consécration, pourtant, il y man¬
quait qhelque chose encore pour etre tout à fait
parfaite. Il manquait à ce grand mort un tombeau
sionnément
de
son
qu'il
vivant
a
dont
dont son
poète maudit, un
temple dressé dans le pays meme où il a atteint
la plus haute expression de son génie,
dans ce
pays auquel il
s'est identifié, au point qu'on
ne
peut pas parler de Gauguin sans évoquer Tahi¬
ti et de Tahiti sans évoquer Gauguin.
à sa mesure,
ami Mallarmé
ce
(tel
et
saluait
Société des
qu'en lui-mSme)
un
autre
Études
Océaniennes
—
622
—
C'est
l'honneur de la Fondation Singer-Polid'avoir édifié ce mémorial de l'admiration
et de la piété.
Puisqu'il m'est donné aujour¬
d'hui de représenter à la fois le Gouvernement
et le Territoire,
je suis heureux, Monsieur le
Président, de vous exprimer le double mouvement
de gratitude qui va vers vous et vers tous ceux
dont vous avez cité les noms, poètes d'une belle
idée et architectes de formes harmonieuses,
qui,
en
rendant hommage à Gauguin sur la terre poly¬
nésienne, ont exprimé une rencontre qui prend la
haute valeur d'un symbole.
gnac
Vous avez traduit,
tout à l'heure, en termes
admirables, la signification de ce symbole : ce¬
lui d'un accord, peut-Stre unique au monde,
en¬
tre deux races et deux esprits,
d'un échange
nourricier où chacun donne et reçoit tour à tour
d'une harmonie si vraie qu'elle en devient sen¬
sible, qu'il semble qu'on la respire dans l'air
et que,
dès le premier moment, l'étranger en éprouve le charme à l'égal de celui qui émane de
la nature polynésienne.
Et
un
tés
changements,apparemment,n'y font rien:
vigoureux assimile toutes les nouveau¬
demeure accordé à la terre et au ciel.
les
génie
et
En sera-t-il ainsi toujours? Vous venez d'ex¬
primer à haute voix les craintes et les voeux
que toutes les âmes sensibles nourrissent en se¬
cret.
Des exemples sont là.
en effet,
pour nous
montrer
duire
à
quelles
tristes
qui
réussites peut
nourrit
con¬
de luimSme.
Les craintes ne sont donc pas vaines,
les
sont pas superflus.
voeux
ne
Car cette fois le
changement est immense. Le monde auquel il faut
s'adapter est proprement un autre monde, qui a
changé plus vite en vingt ans qu'il ne l'avait
fait en vingt siècles. Un monde aussi qui s'est
imposé à la Polynésie avec la force d'une intru¬
sion.
Jusqu'ici les apports de l'extérieur étaient faibles,
ils se faisaient lentement,de
manière presque insensible. Soudain, c'est une
espèce de torrent jjui menace de tout recouvrir.
Aurons-nous la force de le contenir ?
Réussiraun
progrès
Société des
ne
se
Études
que
Océaniennes
—
t-u..
à
623
—
préserver ce bel équilibre qui donne à la
son originalité,sa grace et
son prix ?
Polynésie
Ou
plutôt trouvera-t.on un nouvel équilibre ?
l'irruption du monde extérieur a bouleversé
le corps social.
Pour vivre à l'heure du siècle,
pour gonter aux
fruits étonnants de l'arbre de
la science, pour en assurer sa part à l'avide
jeunesse qui grandit dans l'esprit des temps
nouveaux,
il faut produire et produire encore.
Le ciel n'avait pas fait Tahiti pour produire,
mais pour donner de la beauté.
Il est vrai qu'on
peut faire marché aussi de la beauté, l'offrir
au plus
grand nombre et au meilleur prix. Terri¬
ble pente,où pourtant tout concourt à nous pous¬
ser,
et jusqu'à la griserie qui natt du mouve¬
Car
ment
lui-meme.
griserie,
Nous
la
connaissons
bien
cette
qui sommes chargés du soin de la
cité et à qui la technique donne sur les choses
un
pouvoir chaque jour plus grand...
de
nous
Comment résister
marche ?
au
vertige,
rester
mattres
notre
Nous le pouvons,!e crois,
si nous savons
la conscience en éveil.
Car les raisons
voir confiance ne manquent pas.
Elles sont
der
gar¬
d'a¬
pré¬
l'apport de ces deux cultures,dont
la rencontre a fait la Polynésie française et
qui s'appellent humanisme et art de vivre. Sous
ce
ciel, l'esprit de méthode, la volonté occi¬
dentale de rationnalité et d'efficacité prennent
je ne sais quelle inflexion qui en adoucit la
rigueur. Ici le temps s'écoule encore au rythme
de la nature.
Il nous faut préserver cette harmonie, vouloir que le développement matériel de¬
meure
accordé à l'âme des choses, se compose avec
cette liberté humaine dont les racines plon¬
gent aux profondeurs de la terre et du sang.
cisément
dans
plans d'avenir, nous
à la cul¬
ture, à la double culture par laquelle s'exprime
la Polynésie :
la culture maorie - langue, musi¬
que,
danse, arts plastiqués - dont il raut fixer
l'expression ancienne, qu'il faut sauver de la
Voilà pourquoi,
voulons
réserver
dans
une
Société des
nos
place privilégiée
Études
Océaniennes
—
624
—
corruption, du pillage ou de l'oubli, non pas
simplement pour conserver les formes du passé,
mais pour nourrir une tradition créatrice et le
style de vie dans lequel elle s'épanouit ; la
culture
française,
c'est-à-dire assurément cet
de méthode, qui s'applique à mettre de
l'ordre dans les pensées pour pouvoir en mettre
dans le monde, mais aussi l'ironie qui garde de
la démesure,
cette curiosité des autres et ce
sens
de l'universel auxquels on a donné le beau
nom
d'humanisme. C'est dans ce couple de forces
et dans cette alternance qu'est la vérité de la
Polynésie. Nous voulons y demeurer. Et nous le
Car si le progrès nous entraîne d'un
pouvons.
pas
soudain plus rapide sur la voie de l'enri¬
chissement matériel,il nous donne en même temps,
avec
la m6me variété et avec la mSme puissance,
les moyens d'enrichir aussi les esprits, moyens
immenses de communication,d'information,
de dif¬
fusion, par quoi nous pouvons aider l'homme à
demeurer égal à son destin.
esprit
voudrions davantage encore, et il
la Polynésie est l'expression d'une
réussite humaine, nous voudrions faire que cette
expérience puisse rayonner au-delà de ses limi¬
tes.
Au milieu du Pacifique,
à la frontière de
deux mondes que leur masse mSme voue à l'affir¬
mation de soi et à la volonté de puissance,
ce
petit pays peut donner l'image de la générosité,
de la tolérance et de la communication entre les
est
Mais
vrai
nous
que
hommes.
Oui,
je propose cette
ambition à la Polynésie
française et je la propose à la France.
Président, au milieu des satis¬
goOtons à l'occasion de cette
grande journée,vous avez exprimé un seul regret:
celui que le gouvernement ne soit pas représenté
aujourd'hui par M. André MALRAUXTCe regret, nous
le ressentons tous,et moi plus vivement que qui¬
conque.
Et d'abord, parce que plus loin que ma
voix, cette grande voix inspirée eut portée jus¬
qu'aux extrémités du monde la naissance du Musée
Gauguin et le nom de la Polynésie. Mais aussi
parce que l'action culturelle,
qui est pour pe
pays la condition d'un développement harmonieux,
Monsieur
factions
que
le
nous
Société des
Études
Océaniennes
625
—
souhaité
—
le Ministre des
qui en ouvrît
ici les perspectives et, par sa présence même,
nous
apportât l'assurance que les ressources ne
nous
manqueront pas pour donner à cette action
l'ampleur dont nous rêvons.L'occasion était bel¬
le aujourd'hui et Gauguin un sujet bien aigne de
l'auteur du "Musée imaginaire" et de "La méta¬
morphose des dieux". Mais d'autres occasions se
présenteront, cette année même je l'espère, de
donner à nos projets la haute caution dont ils
ont besoin pour voir le jour.
Et si le succès
d'un voeu peut dépendre de l'ardeur qu'on met à
l'exprimer, celui-là est de ceux qui devraient
avions
nous
affaires
exaucés.
être
.
ce
que
culturelles
en
fut
personne
.
voulons le croire, l'in¬
surgir ici les grands
équipements qui sont le support de l'action cul¬
turelle
musée, centre des arts et des sciences
humaines., théâtre, bibliothèque, salle de con¬
grès
alors l'initiative privée pourra y pren¬
dre appui, se fortifier et s'épanouir dans une
unanime où toutes les activités de l'es¬
oeuvre
prit se retrouveront et se feront écho. La Fon¬
dation Singer-Polignac nous donne l'exemple des
concours
désintéressés que la Polynésie est ca¬
pable de susciter. La création que nous inaugu¬
rons
aujourd'hui enrichit le pays d'un précieux
instrument de culture. Le Musée Gauguin, en ef¬
fet, veut être et doit être autre chose qu'un
objet de curiosité pour les touristes : un des
ferments de la vie profonde du territoire.
Il
est là pour nous ouvrir à la connaissance d'une
oeuvre
forte et belle, pour exalter en nous la
conscience d'une rencontre
privilégiée entre
deux mondes,
il est là aussi pour nous proposer
l'énigme d'une vie perdue et sauvée. Une vie qui
semble prendre à son tour la signification exem¬
plaire d'un symbole.
Si
demain,comme
de
tervention
nous
l'Etat
fait
-
-,
Le portrait que vous avez tracé de Gauguin,
Monsieur le Président,
avec ses traits pleins,
ombres et ses lumières crues, ses violets et
ses
ses
jaunes,
le portrait
de cette nature puissan¬
trop humain, mais où
dévorant, on dirait
lui-même,
ce combat avec
le
où l'humain est souvent
divin brQle comme un feu
un
tableau
te,
de
Gauguin
Société des
Études
Océaniennes
—
626
—
qu'il a représenté sur la lande bretonne,
la sortie du pardon, devant ces paysannes qui
penchent leurs coiffes apeurées sur leurs mains
en
prière. L'Ange aux ailes d'or fait plier les
genoux au Révolté,
comme le génie exigeant de
Gauguin courbait sur la toile l'homme de désor¬
l'Ange
à
dre
et
de
faiblesse.
et ces gouffres ne sont pas pour
ordinaires, et ce n'est pas à une
imitation que nous convie le Musée Gauguin.Puisse-t-il simplement nous maintenir en éveil.'Puisse
l'esprit de Gauguin allumer en chacun de nous
pour défendre
le bien dont nous avons la garde,
un peu
de sa passion et de son exigence .'
Ces
les
sommets
natures
à
Société des
Études
Océaniennes
Société des
Études
Océaniennes
Photo
J.
SCHMITTER
Société des
Études
Océaniennes
DISCOURS
PRONONCE
PAR M.
JOHN
TEAR IKI,
Député de la Polynésie Française,
15
juin 1965) lors de l'inauguration
officielle
du Musée
GAUGUIN,
à Papeari,
le
de
Ile
TAHITI.
Monsieur
le
Gouverneur,
Monsieur
le
Prince
Messieurs
Polignac,
Professeurs,
Révérend Père,
Mon
Mesdames,
Il
si
quoi
de ma part, de prétendre asoit aux hommages officiels
qualifiés que Paul Gauguin aura
ce
aujourd'hui,
et
Je
vain,
que
hautement
reçus,
vie
Messieurs,
serait
jouter
et
les
de
à
son
Musée consacré
ce
à
sa
ni
suis
ne
en
oeuvre.
critique d'art, ni historien.
ma qualité de représentant
je tiens à apporter, ici, à
témoignage de notre fierté, de notre
de notre reconnaissance.
Ce n'est donc qu'en
des Polynésiens que
Gauguin, le
admiration,
Nous
tistes
dans
rent
notre
ner
sommes
pays
son
fiers
qu'un
des
plus
grands
les
musées
pour
y
du
mOrir
monde
son
entier,
ait
talent" et
y
pour
choisi
couron¬
oeuvre.
lui, nous admirons non seulement le génie
lui permet de pénétrer jusqu'à l'essence,
mieux les exalter, la beauté de nos iles et
En
qui
ar¬
français dont les chefs-d'oeuvres figu¬
Société des
Études
Océaniennes
—
l'ame
de
630
-
notre
race,mais encore le courage exem¬
l'homme et sa profonde humanité qui,
après
avoir dicté le sacrifice total
à sa
vocation artistique,
l'amenèrent à s'identifier
si complètement à nous qu'il put écrire :
"Nous,
les Marquisiens."
plaire
de
n'était
pas
là une affirmation gratui¬
reprises, Gauguin prouva son amour
Polynésie et prit la défense des Polyné¬
Et
te.
de
lui
ce
maintes
A
la
siens.
arrivée à Papeete, as¬
Roi Pomare V, la lai¬
deur du tombeau royal lui arrache ce cri d'indi¬
gnation :
"Là, se dressait un monument indes¬
criptible qui faisait avec l'atmosphère et le
"décor végétal le plus terrible contraste :
amas
"informe de pierres de corail reliées par du cide
Peu
sistant
temps
après
son
funérailles
aux
du
"ment."
On
rait
peut
penser
d'hui,
non
imaginer,d'après cela, ce qu'il pour¬
et dire de ce que l'on voit, aujour¬
loin de là...
La conclusion de son récit ne laisse aucun
doute à ce sujet,la voici :
"Et tout rentra dans
"l'ordre habituel.
Il n'y avait qu'un roi de
lui, disparaissaient les derniers
des habitudes et des grandeurs ancienAvec lui,
ces.
la tradition maorie était morte.
"C'était bien fini. La civilisation, hélas .',
"triomphait : soldatesque, négoce et fonction¬
narisme.
Une
tristesse profonde
s'empara de
"moins.
Avec
"vestiges
"moi."
En relisant ce passage de
"Noa Noa", on
peut s'empôcher de penser que la sensibilité
grands artistes les apparente aux prophètes.
ne
des
Mais, comme l'écrit Gauguin lui-meme quelques
lignes plus loin.il n'était pas homme à se lais¬
ser
aussi facilement abattre et, peu de temps
après,
il trouvait, dans la paix édénique de son
"fare" de Mataieav le fil d'or qui devait, peu à
peu,
le conduire à sa complète initiation au-x
choses et aux Êtres d'Océanie.
Société des
Études
Océaniennes
—
631
—
Alors, se nouent, entre Gauguin et la Polyné¬
sie, les liens spirituels qui, d'année en année
plus forts et plus profonds, lui permirent d'at¬
teindre au sommet de son art et d'exprimer,comme
aucun peintre ne
l'avait fait et comme aucun ne
le fit depuis,les mystérieuses harmonies de l'u¬
océanien.
nivers
Qu'il traite des scènes de la vie quotidienne
qu'il évoque l'Olympe polynésien,la m6me joie
cette joie qui
grave émane de toute son oeuvre,
lui fit oublier les misères de sa vie matérielle
et nommer sa case marquisienne :
"La Maison du
ou
Jouir".
aux Marquises,
Gauguin se trouve con¬
de tristes réalités.A cette époque, les
Marquisiens étaient en pleine décadence physique
et morale. Les maladies et les vices introduits
depuis un siècle continuaient de faucher cette
race
naguère si fière et si belle. Et Gauguin
souffrit de voir cette agonie indignement ex¬
Mais,
fronté à
certains représentants de l'Adminis¬
gendarme était roi et souvent in¬
conscient de ses responsabilités humaines. Entre
lui et l'artiste,
ce fut bientôt la guerre.
ploitée
tration.
Pour
révélant
par
Le
avoir voulu défendre les Marquisiens en
en
haut lieu certaines exactions, Gau¬
guin, condamné à l'amende et à la prison, ne put
supporter ce coup.Sa santé était minée,son coeur
malade.
Ces derniers soucis le tuèrent et c'est
en
cette terre polynésienne qu'il avait tant ai¬
mée qu'il trouva enfin le repos.
Aujourd'hui, toutes querelles apaisées, Gau¬
guin reste le plus grand artiste que la France
ait donné à la Polynésie. Son oeuvre a contribué
à
notre
gloire commune.
souhaitable qu'après avoir
de Papeete et au premier
lycée du territoire, la Polynésie française pos¬
sède un mémorial culturel dédié à l'oeuvre de
Il
donné
Paul
était
son
juste
nom
à
et
une
rue
Gauguin.
Société des
Études
Océaniennes
—
a
632
—
Nous devons au Révérend Père O'Reilly, qui en
le promoteur et à la Fondation Singer-Po-
été
lignac, qui en a permis la réalisation,
ture, aujourd'hui, de ce Musée Gauguin.
l'ouver¬
Qu'ils soient, avec tous ceux qui ont colla¬
à cette oeuvre,
assurés de la profonde re¬
connaissance de la Polynésie Française.
boré
Société des
Études
Océaniennes
—
Société des
633
—
Études
Océaniennes
Photo
A.
SYLVAIN
Société des
Études
Océaniennes
PRONONCEE PAR M.
ALLOCUTION
à
de
l'occasion
PAUL
Mes
très
Avant
1rinauguration
à Papeari.
du
IORSS
FARE
GAUGUIN
chers
de
MARTIAL
vous
Amis,
je vous
exposer
le
but
salue
de
.'
cette
céré¬
à laquelle nous assistons aujourd'hui, je
voudrais glorifier le Tout-Puissant qui a permis
cette magnifique réalisation en cette place ap¬
monie
pelée
ancien
Vaiari,
Voici
Vaiari .'
l'ancienne
du district
nom
désignation
du
de Papeari.
district
de
Il commence à Teruamoo et s'étend jusqu'à Màtà, Puraha est le nom de la montagne qui le do¬
mine, Taunoa est le nom de la pointe qui s'étend
dans la mer,son marae est Farepuà,son Chef s'ap¬
pelle Maheanuu et Panee est le nom de son ora¬
teur.
Bienvenue
.'
Bienvenue
à
RANI,
le
Chef
et
Salut
vous
qui
terres françaises
ment les diverses
.'
Monsieur le Gouverneur SICUdétient les pouvoirs sur ces
de Polynésie
Je salue égale¬
personnalités qui sont présen¬
tes ici sous votre ombre .' Je salue aussi les
Chefs des services administratifs, du grade le
plus élevé au moins élevé .' Je te salue, Chef de
ce
district de Papeari, avec ton conseil et ta
population, pour votre si bel accueil .' Je salue
aussi tous les invités venus en grand nombre re¬
hausser cette commémoration du peintre français
célèbre Paul Gauguin .' Que le salut nous englobe
tous en cette rencontre heureuse et source de
joie supreme, organisée pour glorifier le nom de
Paul Gauguin. Bienvenue et Salut .'
Société des
Études
Océaniennes
—
J'en
ai
—
terminé
avec
les salutations, je vous
présent ce que fut la vie de celui
célébrons aujourd'hui.
exposerai
que
636
nous
à
Gauguin, dont le nom est célèbre
entier,qui a fait connaître le nom
et l'image de notre pays aux extremes limites de
toutes les nations.
Tous
les peuples du monde
ont pu ainsi admirer le Tahitien,
la délicatesse
de la Tahitienne et le port noble des habitants
de notre Océanie. Paul GAUGUIN est né à Paris en
1840.
d'une mère espagnole originaire du Pérou.
Il a habité le Pérou jusqu'à l'âge de huit ans.
Il fut ensuite envoyé à Paris pour suivre ses
études à l'école d'Orléans.Il quitta cette ville
à l'âge de 17 ans pour s'engager comme marin en.
tre le Havre et l'Amérique.
Il navigua durant
six années,
à la suite desquelles il retourna à
Paris pour chercher une autre activité.
Il s'y
maria et à la naissance de son quatrième enfant,
il fréquentait les cercles de peintres célèbres.
C'est ainsi qu'il décida de faire de la peinture
son
gagne-pain. Il décida de venir à Tahiti. Il
y vint par le navire français,la "VIRE" qui tou¬
cha Papeete le 8 juin 1891.
C'était un homme de
haute stature, portant une coiffure de velours
noir et des chaussures d'hiver,
et, on ne s'en
étonnera pas,
il avait le verbe haut. Les gens
de Papeete le regardaient avec curiosité.Il vint
s'établir à Mataiea et il a habité durant deux
années en face du Temple. Il a peint là un grand
nombre de tableaux,
et, en raison de l'ignorance
des personnes de cette époque,
ses peintures
n'ont pas plu et ne se sont pas vendues.Les gens
n'ont pas apprécié les arbres peints en rouge,
les personnages peints en vert, et les personnes
bien pensantes de cette époque ne lui ont pas
fait confiance. Comme les peintures expédiées à
paris ne se vendaient pas.il décida de s'y
ren¬
dre lui-meme,
peut.etre alors pourrait-il assu¬
C'est
dans
rer
le
une
arrivée
Paul
monde
meilleure
vente
de
ses
tableaux.
A
son
Prance.il apprit le décès d'un membre
de sa famille qui laissait un petit héritage.
Se
trouvant à la tete d'une importante somme d'ar¬
gent, il put revenir à Tahiti en 1895. Il put
s'acheter un terrain à crédit à Punaauia.Ce lieu
est aujourd'hui marqué par un panneau placé aoi
bord de la route que l'on peut lire en traveren
Société des
Études
Océaniennes
—
637
—
Cependant, il n'avait plus son
début, il était affaibli par les
soucis nombreux et par la déception que lui don.
naient ses peintures ;
il tenta de se suicider.
Et c'est à cette époque qu'il réalisa ses meil¬
sant
ce
district.
dynanisme
leurs
du
tableaux.
Mécontent de lui-même,il décida de partir aux
Marquises en pensant qu'il n'y avait pas là d'Eu
ropéens et que les Marquisiens y vivaient à l'é¬
tat sauvage.
Il vendit donc sa terre de Punaauia
et se rendit à Hiva-Oa.Dès son arrivée à Atuana,
il s'étonna de la présence d'un pretre catholi¬
que et
d'un gendarme au débarcadère pour l'ac¬
Il en fut contrarié.
Son trouble le
belliqueux. Il fut aussitôt verbalisé et
sanctionné par le gendarme. A la suite de ses
nombreux déboires et de sa maladie,
il s'étei¬
gnit le 8 mai 1903, Agé seulement de 50 ans.
cueillir.
rendit
Il
vre
nous
a
demeure,
quittés, il
vous
avez
est parti, mais son oeu¬
entendu parler des
tous
fabuleux que l'on paie pour ses peintures,
qui avaient été méprisées à son épo¬
que.
Ses tableaux se paient aujourd'hui des prix
astronomiques. Certains valent aujourd'hui des
millions de francs,d'autres des millions de "ta¬
ra".
Ce qui a été curieux en lui,
c'est qu'il
n'aimait pas la fréquentation des Européens ;
il
se
plaisait à vivre parmi les gens du pays. Il a
donné des noms maoris à ses oeuvres comme :
"Maprix
les
memes
(Pensée de revenants) - "Va¬
femme à la fleur) - "Navenave
mahana (Journée délicieuse)- "Matamoe"(Yeux
de reve) - "Otahi" (Le premier)
ainsi que tant
nao
hiné
no
no
te
te
tupapau"
tiare"
(La
d'autres.
Mais nous n'aurions pas eu aujourd'hui l'oc¬
casion de glorifier Paul Gauguin si la Fondation
Singer-Polignac n'avait pas financé la construc¬
tion de ce musée que nous venons de visiter.
C'est grace au Prince Polignac et à son épouse
née Singer que cette cérémonie a pu etre réali¬
sée.
Il nous appartient donc d'unir nos remer¬
ciements à cette Fondation représentée ici m6me
à Vaiari aujourd'hui. Qu'elle soit ici saluée .'
Société des
Études
Océaniennes
—
638
—
me
dois aussi de vous signaler le nom du
O'Reilly pour l'associer à nos louanges,
il a été le grand organisateur de cette f6-
Je
R.P.
car
Rendons
te.
et
à
vous,
Je
graces
à
son
de notre
Père O'Reilly.
son
amour
viens
Gauguin.
Grace de
de
vous
courage,
pays,
exposer
Je vous salue tous
notre Seigneur.
Société des
Études
à
sa
Tahiti.
sagesse,
Merci
à
l'histoire de Paul
présent par la
ici
Océaniennes
ORERO TOMORAA
hoa
E
FARE PAUL GAUGUIN
te
no
Hou
ino
o
vau
tairururaa
i
te
ta
fataa'tu
ai
i
tumu
te
no
teie
tatou,e mata na vau i te fahosanna
tei faatupu i teie opuaraa faahia-
tatou
Teie
te
i
nia
i
faatara
moti
te
Puraha
te
na
ora
teie
tahua
Vaiari
no
oia
Papeari.
no
E
la
e,
a
ta
Manahope
hia
hoi
ma
Papeari
i
marae
heanuu
i
te
no
Teruamoo
mouà
tuiroo
to'na
i
nia,
ra
haere
e
no
ai
roa
Vaiari
:
Màtà.
o
i
Taunoa te outu i tai, o
Farepuà to'na marae, o Ma.
o
Panee to'na auvaha pao
no
Tavana
mataeinaa
e
r au.
.'
Mae va
Maeva
upoo
la
tiatia
atoa
i
ia
mana
.'
nei
te
la
e
oe
ora'toa
iti
.'
la
no
Papeari,
ta
outou
te
mau
hoi
ora
ta
farii
oe
e
oe
rave
ia
to
te
maru
.'
la
ora
tae noa'tu
Tavana mataeinaa
e
to oe huiraatira no
e
matou
rahi
oe
rahi
te
e
apooraa
maitai
manihini
mai
Hau
te
no
i
aè
raro
Sicurani, te
no Polynesia
fenua teie e
o
farani
fenua
huimana
te
faatere
mau
rahi
Tavana
mau
i
nei
anaè
te
te
e
teie
no
.'
ora
.'
tei
la
ora
atoa hoi
i teie
faaunauna
haamanaoraa i te taata farahi tuiroo no te
hohoa o Paul Gauguin
to'na ioa .' E ia ora
atoa hoi tatou paatoa i teie farereiraa oaoa e
te mauruuru hau è.
tei opua hia no te faahanahana
i te ioa no Paul Gauguin, Maeva e la ora .'
oroà
peni
Ua
outou
oti
i
te
nia
i
parau
te
no
tumu
Société des
te
no
aroha,
teie
Études
e
oroà
aratai au
ta tatou.
Océaniennes
ia
640
—
—
Paul Gauguin ia taata tei paroo te ioa na
basileia'toa no teie nei ao,
tei hopoi i
ioa e te hohoa no to tatou fenua maohi na te
0
te
mau
te
otia'toa
mau
taitai
te
fenua
tera
no
mau
nunaa'toa
tera
e
te
no
i
ao
fenua.
te
Ua
huru
ma-
no
te
taata
Tahiti, te tapairu no te vahine Tahiti e i
te tupu unauna no te mau maohi no Oteania nei,
I
Paris to Paul
Gauguin fanauraa i te matahiti
1840 no te vahine Paniora no Peru.
Ua noho oia i
Peru e tae noa i te vaùraa o to'na matahiti.Faahoihia
i
te
mai
matahiti
haere
oia
i
maha
i
ioto
i
Paris
to'na
reira
te
te
ua
oia
Orleans
to'na
o
no
reira
faaOi
ra
tamarii
i
i
oire
miti
area
oia
atu
haere
hituraa
ma
te
te
no
te
no
ahuru
ona
Haaipoipo
o
tetahi
Paris
te
matahiti
ono
api.
i
I
i
ihitai
E
ai
ohipa
te
oia
faarue
ua
ei
Marite.
hoi
nei
haapiiraa.
roto
i
no
te
Havre
e
ohipa
i
tetahi
te roaaraa mai
amuimui atu ra oia i
i
taata
hohoa tuiroo. E i reira
oia i opua ai e
i te ohipa parai peni ei
imiraa faufaa na'na.
I reira hoi ona i opua ai e
tere mai i Tahiti nei. Na nia mai oia i te pahi
farani ra o Vire te taeraa mai i Papeete i te 8
no
tiunu 1891E maa taata rahi, taupoo terevete
ereere,
tiaa mahanahana e, eiaha e maerehia, e
taata vaha rahi. Ua hio maere te feia no Papeete
ia'na.
Ua haere mai nei oia i Mataiea aéra te
faaearaa e ua piti matahiti o to'na nohoraa i
noa
mua
aè i te fare pureraa.
Ua rau e ua rau o
ta'na hohoa i parai i reira e no te ite ore e te
poiri o te mau taata
reira anotau aita
no te
ta'na
hohoa
mau
aha hoi
auhia
ei
aita
e
roa
i
riro
i
te
peni uteute to te tumu raau,
peni matie hoi to te mau taata, aita te feia
hoo.
e
peni
haapao
mau
E
mataitai
hoo
opua
ino
tiaturi
e
o
iho
e
a,
ta'na
faahou ei hohoa maitai. No te
hohoa i hapono i Paris ua
mau
oia e hoi
ra
taata
taeraa
naa.
i
Tera
i
te
hoo
Farani
ra,
rohirohihia
mauruuru ore
i
ua
ua
i
i
Farani
ta'na
e
riro paha ia te
mau
hohoa.
ra
tetahi
I to'na
metua o
to'na ma te vaiiho mai i tetahi moni na'na.
Ua
faufaa faahouhia iho oia e ua hoi mai nei i Ta¬
hiti i
te matahiti 1895Ua hoo tarahu iho ra
oia i tetahi fenua no'na i Punaauia.
Ua faatiahia i reira tetahi tapao i te pae purumu ta outou e taio noa ia horo otou na te reiraa mataeimau
pohe
iho
aita faahou to'na itoito matamua,
oia no to'na tapitapi, e no to'na
ta'na mau hohoa i parai, ua tama-
Société des
Études
Océaniennes
—
ra
oia i te
te reira mau
hohoa maitai
iho
ta
nuia. I
mau
na
inaha,
E
iho
tere
e
—
ia'na, aita ra i mai parai ai oia i ta'-
faaaau
anotau
aè.
roa
to'na inoino
no
oia
ra
641
i
ia'na iho,
Nuuhiva
ua
faaea
e
ai
manao
mai
te
reira fenua e te vai
etene noa ra ea te mau taata Nuuhiva. Ua hoo atu
oia i to'na fenua no Punaauia e fano atu ra i
ra
Hivaoa.
I to'na taeraa i Atuana,
ua maere oia i
te mea e,
e perebitero tatorita e,
e mutoi farani to tahatai no te farii ia'na.
Aita roa ona i
mauruuru
i te reira farereiraa e ua rahi roa o
to'na peapea e to'na mai. Ua riro oia i te reira
taime ei taata haorea e te faatupu ino e te haapeapea.
Ua papaihia iho ra oia e te mutoi farani
e
ua
faautuahia iho ra oia. No te rahi o to'na
mau peapea
e to'na mai,
ua faarue roa oia i te 8
no Me
1903.e pae noa iho ahuru o to'na matahiti.
manao
aita
e,
mau
ohipa
maoti
teie
lioni
i
ra
te
parai,
moni
to te
papaa
ia, ua faarue roa mai oia, area o ta¬
te vai faahiahia noa ra ia. Ua ite
outou i te moni rahi o ta'na mau hohoa i
Oia
na
e
hohoa
mau
huru
moni
te
o
o
tei
hoo
o
haavahavahahia ra.
E
te
i
anotau. E milioni farane
tara hoi i vetaitahi. E
reira
i
te
hohoa
mau
vetahi,
vahi
e,
mi-
e
maere
e
te
teie
taata, aita roa e au i te papaa ; i
rotopu noa iho a oia i te taata maohi e faaea
ai, e noho noa oia i rotopu i te taata no te fe¬
nua.
Ua topa oia i te
ioa maohi i nia i ta'na
mau
hohoa e rave rahi. :
Manao no te tupapau
Vahine no te tiare
Navenave mahana
Matamoe
au
-
-
Otahi
hia
.
E
te
vai
Area ra e
e
tatou i
rahi
homa,
teie
-
atu
eita
o
mahana
-
ra.
Paul Gauguin e
ahini eiaha te
rautitaiete
i turu mai i te faatia raa i
Singer-Polignac
teie fare haaputuraa peu faahiahia ta tatou i
mataitai aènei.
Na te tamaiti arii o Polignac e
ta'na vahine tei fanau Singer i horoa mai i te
tauturu
ia
i
no
amuitahi
reira
te
nei
i
teie
teie
no
tatatou.
faataeraa i
oroa
te
taiete
mahana.
o
la
Société des
tei
tia
ora'toa
Études
E
tia
to
ia
tatou
tino
ratou
mai
.'
Océaniennes
ia
tatou
mauruuru
i
Vaiari
—
642
—
iaù ia faahiti taaè atu i te
O'Reilly i roto i teie mau arueraa
i te mea e o ona mau te tahuà rahi i teie
oroa.
Auaa to'na itoito,
to'na paari, e to'na
here i to tatou fenua o Tahiti.
E mauruuru atoa
ia oe e O'Reilly tane.
tia'toa
E
ioa
te
o
oti
Ua
i
te
roa
aai
aè
hoi
Père
e
no
hoa ino
Gauguin
i roto
i
ma,
te aroha
Société des
o
tane.
taù auvaharaa ia outou
Ia ora na outou e hope
i te Patu.
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TOUS LES Jeunes Membres de la Société.
TOUS CEUX
qui, quittant Tahiti, s'y intéressent quand
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Société des
Études
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Fait partie de Bulletin de la Société des Études Océaniennes numéro 154-155