B98735210103_123.pdf
- Texte
-
BULLETIN
DE
LA
SOCIÉTÉ DES ÉTUDES OCÉANIENNES
N° 123
-
TOME X
JUIN
Anthropologie
Histoire
—
(N° 10)
1958
Ethnologie
—
Philologie
Institutions et Antiquités des Population. Mao iss
Li îérature
AsîroJiomle
-
PAPEETE
-
et
OcéaEiographie
Folklore
—
Fciences natyrefles.
IMPRIMERIE DU GOUVERNEMENT
Conseil d'Administration
Président
.
M. H.
.
JACQUIER.
Vice-Président
M. JAUNEZ
Secrétaire-Archiviste
Melle LAGUESSE.
Trésorier
M. LIAUZUN.
Assesseur
M.
Cdt. PAUCELLIER.
Assesseur
M.
Rudolphe RAMBRIDGE.
Assesseur
M. Terai BREDIN.
Assesseur
*
M. Martial
.
IORSS.
Assesseur
M. Siméon KRAUSER.
Assesseur
M.
Secrétaire-Bibliothécaire
Pour être reçu
un
du
Yves
Musée
Membre de la Société
se
MALARDE.
Mlle
NATUA.
faire présenter par
membre titulaire.
Bibliothèque.
Le Bureau de la Société informe ses membres que
ils peuvent emporter à domicile certains livres de la
que en
signant
rendraient pas
une
leurs
cas
présentera la formule à signer.
Bibliothèque est
invités
en
le livre emprunté à la date fixée.
Le Bibliothécaire
La
reconnaissance de dette
désormais
Bibliothè¬
où ils ne
tous
les
ouverte
aux
jours,
de
membres de la Société et à
14 à 17 heures, sauf le
Dimanche.
La salle de lecture
14 à 17 heures.
est
ouverte
au
public tous les jours de
Musée.
Le Musée est ouvert tous les
heures. Les
jours, sauf le lundi de 14 à 17
jours d'arrivée et de départ des courriers : de 9 à
11 heures et de 14 à 17 heures.
BULLETIM
DE LA
SOCIÉTÉ D'ÉTUDES OCÉANIENNES
(POLYNÉSIE ORIENTALE)
TOME X
N° 123.—
(N° 10 )
JUiN
1958
SOMMAIRE
Pages
Histoire foca&e
Les
Informations
«
»
du
Messager de Tahiti (J.L.)
.
.
.
779
.
792
Histoire
Jean
Baptiste Rives, de Bordeaux, Aventurier hawaïen
Divers
Observations
de
Nay
l'année
scientifiques faites à Tahiti à l'occasion
géophysique internationale 1957-58 ( Gdt
)....*
Société des
813
Études
Océaniennes
HISTOIRE
LOCALE
LES " INFORMATIONS DU MESSAGER DE TAHITI
EN 1860
(J. L.)
REGLEMENTATION DE LA CIRCULATION
EQUESTRE.
Dans le but de prévenir les accidents pouvant résulter de
l'imprudence des personnes qui laissent galoper leurs chevaux,
nous
pensons utile de reproduire ici les articles suivants de
l'arrêté local portant règlement de police.
« Il
est défendu aux personnes à cheval de galoper dans
l'enceinte de Papeete depuis l'espace compris entre le camp
de l'Uranie et le pont de la rivière de Pape-aua sur la route
de Papaoa ».
« Les
contrevenants seront passibles de vingt francs d'a¬
mende sans préjudice de dommages intérêts envers toute par¬
tie civile s'il y a lieu ».
EN 1860 TAHITI AVAIT DEJA UN CONSUL DU CHILI.
Jeudi 28
juillet à 2 heures, Mr Gibson Andrès, négociant
Papeete, s'est présenté devant le Commissaire Impérial, en
conseil d'administration de la colonie, pour recevoir de ses
mains son exéquatur de Consul de la République du Chili à
à
Tahiti.
Mr le Commissaire Impérial, après
Gibson combien le choix de sa personne
avoir exprimé à Mr
lui était personnelle¬
ment agréable et l'avoir entretenu des intérêts généraux et
des relations naturelles qui existent entre la République Chi¬
lienne et nos Etablissements français de l'Océanie, a reçu les
remerciements de ce consul qui a pris congé du Commissaire
Impérial, en l'assurant de son concours dévoué dans les rela¬
tions nouvelles qui allaient exister entre le Chili et les Iles
de la Société.
QUELQUES REFLEXIONS SUR LA SITUATION DE TAHITI
EN 1860.
La
frégate 1'
«
Isis
»,
arrivée de France le samedi 4 août
103 jours, nous apporte des détachements de Gendarmerie
d'Artillerie et d'Infanterie de Marine. A peine mouillée, elle
en
—
780
—
été suivie du transport 1' « Infatigable » venant de la Nou¬
velle Calédonie, de la goélette anglaise le « Staghound » et du
a
barque du 'Protectorat le « Sultan ».
dans une même journée paraissent
avoir fait fuir le mauvais sort jeté sur Papeete, car depuis le
4 août de nouveaux navires viennent chaque jour mouiller dans
notre port. Qui donc a pu désespérer de l'avenir de Tahiti ?
Un moment de repos, d'inaction, a-t-ii jamais été considéré
comme l'anéantissement, comme la mort ? non, Tahiti ne peut
que sommeiller, pour se réveiller plus brillante que jamais.
Fille adoptive de la France, elle ne saurait être oubliée par sa
mère, sa protectrice, chaque fois que de nouveaux besoins,
de nouvelles aspirations vers le progrès se feront sentir chez
elle, elle trouvera toujours ses dé-sirs prévus et souvent accom¬
plis avant qu'elle n'ait eu le temps de les exprimer.
Privée d'industrie et d'agriculture, elle compte sur le Gou¬
vernement qui la protège. Elle a raison mais elle doit savoir
aussi que la sagesse des nations a dit : « aide-toi le ciel
t'aidera ». Cette maxime, ce proverbe, comme on voudra l'ap¬
peler, est et sera certainement vrai, et s'applique aussi bien
à un peuple qu'à une individualité. Grâce aux mesures bien¬
veillantes prises par S.E. le Ministre de l'Algérie et des Co¬
lonies, Tahiti se trouve à même de correspondre avec tous les
autres pays au moyen des voies rapides de Suez et de Panama.
Avant peu, nous l'espérons, une nouvelle route lui sera ouverte,
celle de San Francisco. Depuis le 1er janvier 1860, il est entré
à Papeete 75 navires donnant un tonnage de 6.945. La valeur
des importations s'est élevée à 1.938.338 fr 30 et il est sorti
de notre port 85 navires jaugeant 8.210 tonnes, les exporta¬
trois-mâts
Ces
quatre arrivages
tions ont
été
de
1.623.789
fr
75.
Certes
ces
chiffres
ne
dé¬
point une grande activité mais ils prouvent qu'avec
un peu de bon vouloir de
la part de nos négociants et de
nos
colons notre commerce pourrait facilement prendre une
extension qui mettrait Tahiti à la hauteur où elle doit cher¬
noncent
cher à
arriver.
Déjà quelques entreprises ont été tentées en agriculture.
Tahiti, le pays d'où toutes nos autres colonies ont tiré leurs
meilleures cannes à sucre, vient enfin de produire quelques
milliers de cette précieuse denrée. Une caféirie tenue avec
soin nous fournit du café qui peut rivaliser avec celui de
Costa Rica, la vanille sans aucun frais de culture, offre un
large aliment au commerce de l'île. Plusieurs plantations sont
déjà faites, quelques unes ont donné des produits assez abon-
Société des
Études
Océaniennes
—
dants, et nul
liane
mes
ne
781
—
doute qu'il n'y ait dans la culture de cette
brillant avenir pour le pays. Les quelques kilogram¬
recueillis jusqu'à ce jour ont atteint un prix moyen de
un
16o frs.
Le
peuple tahitien est
encore
dans l'enfance de la civilisa¬
tion. Il commence à vouloir marcher et il trouve dans le
chef
la France lui a envoyé pour l'instruire, le protéger et le
diriger vers le bien, tous les conseils, tout l'appui qu'il était
en
droit d'en attendre. Vous marchez à grands pas vers le
progrès, Tahitiens, vos représentants à l'assemblée législative
de 1860 ont prouvé que vous compreniez fort bien les inté¬
rêts de votre pays, continuez à parcourir la même voie, que
quelques insuccès ne vous arrêtent pas, vous trouverez toujours
derrière vous, la grande nation qui vous protège et qui, com¬
me une mère, regarde attentivement vos premiers pas, et est
toujours prête à écarter de vous toutes les aspérités, tous les
dangers qui pourraient rendre difficiles vos progrès dans l'a¬
que
venir.
PETITION A MONSIEUR LE COMMISSAIRE IMPERIAL
avril
(1er
1860)
Monsieur le Commissaire
Impérial,
aujourd'hui de notoriété publique que les ressources
près nulles pour solder le comp¬
te de retour exigé par la consommation du pays ; qu'une gêne
générale se fait sentir dans toutes les affaires et que les pro¬
duits agricoles sont devenus les seuls qui peuvent rétablir
l'aisance et la prospérité. Mus par la conviction profonde qu'ils
trouveront dans votre hante sagesse un puissant appui à leur
demande, les soussignés ont l'honneur de soumettre à votre
appréciation les motifs pour lesquels ils viennent solliciter au¬
jourd'hui la suppression de la vaine pâture, si ce n'est partout,
du moins dans une partie de l'île de Tahiti, comme nuisible
à l'agriculture.
Attendu que malgré les dépenses énormes et des efforts cons¬
tants, le cultivateur ne peut arriver à préserver sa plantation
des animaux errants et que la faim pousse chaque jour à
briser ou franchir les clôtures qu'il a élevées.
Attendu que la désolante obligation d'élever des clôtures qui
en principe est attentoire au droit de propriété, a eû non seu¬
lement pour résultat de chasser et renvoyer du pays des per¬
sonnes qui y étaient venues se livrer à l'agriculture mais enIl
est
monétaires à Tahiti son(t à peu
Société des
Études Océaniennes
—
782
—
obligé les plus audacieux à cesser un travail constam¬
quoique entrepris à grands frais ;
Attendu que l'envahissement du sol par le goyavier est dû
principalement au parcours des bestiaux et qu'il est du plus
haut intérêt de mettre un terme à cette rapide production ;
Attendu qu'aux portes de Papeete, sur les routes, on ren¬
contre jour et nuit des bestiaux et qu'il peut en résulter des
accidents fâcheux pour la sécurité publique ; considérant que
core
a
ment
les
infructueux
animaux
errants, en cherchant leur nourriture finissent
intercepter l'écoulement des eaux en comblant les passes,
qu'ils détruisent les culées des ponts, qu'ils défoncent les
routes et qu'ils obligent l'Etat à un entretien onéreux et cons¬
par
tant.
Considérant
si la vaine pâture n'avait pas lieu dans
Tahiti, les propriétaires de bestiaux
trouveraient dans la nécessité de proportionner le nombre
leurs animaux au pâturage destiné à les nourrir, et que
que
toute l'étendue de l'île de
se
de
animal excédant serait livré à la consommation ; résul¬
qui doit amener forcément une diminution du prix de la
viande aujourd'hui trop élevé ;
Considérant enfin que les colons se plaignent chaque jour
de soustraction ou de vol d'animaux commis à leur préjudice
dans les vallées ; que cet état de choses entretient le dé¬
sordre et l'immoralité parmi les indigènes et que par la sup¬
pression de la pâture l'autorité porterait au moins un remède
partiel au mal qui gangrène la population tahitienne.
Vu les attendus et considérants qui précèdent les soussignés
osent espérer que Monsieur le Commissaire Impérial voudra
bien prendre leur demande en sérieuse considération et ordon¬
ner la suppression de la vaine pâture, de quelque nature que
soit l'animal, dans au moins une portion de l'île de Tahiti,
laquelle portion sera réservée à l'agriculture et l'autre laissée
au
parcours des bestiaux de manière à protéger les intérêts
tout
tat
de
tous.
Confiants dans le puissant concours et les
intentions de Monsieur le Commissaire Impérial,
Les
ses
soussignés ont l'honneur d'être
avec un
bienveillantes
profond respect
très obéissants serviteurs.
Le 1er avril 1860.
Louis Picard et ses trois fils,
Emile Nollemberger, J.B. Mattai,
Vaublon, Belvert, Durand,
P. Bonnefin, Robin, G. Me
Lean, L. Marie, Brémond, Milbert, Labbé, G. Hall, Salles Pater,
Société des
Études
Océaniennes
—
783
—
Artigues, A. Cebert, Vallès, Sentenac, Bellais, Rouge, J.A.
Johanston, Rouffi, G.B. Orsmond, Maliverney, T. Janssen,
Guillasse, Francis, Laurent, Feuardant, Morand, Ch. Sue.
FETE
DU
29
NOVEMBRE
1860
OFFERTE
PAR
S.M.
LA
REINE POMARE IV A L'AMIRAL LARRIEU ET A SA
FEMME A L'OCCASION DE LEUR DEPART DE TAHITI.
lieu le 29, la veille de ce jour, je fus me pro¬
plage de 3 à 5 heures, je vis arriver quelques
districts. Figurez-vous des radeaux ayant la forme d'un grand
navire d'une longueur de 30 à 40 mètres et d'une largeur
de 2 à 3 mètres, solidement installés et festonnés, couverts
en
feuilles symétriquement travaillées en forme de tente,
soutenue par une charpente simulée avec des bambous, et vous
aurez une idée de la chose. Chaque radeau contenait les fa¬
milles indigènes, puis était remorqué par deux pirogues,
montées par les meilleurs nageurs, amarrées en sens parallèle.
C'était vraiment beau à voir. Lorsque les radeaux et les
pirogues furent arrivées aux divers débarcadères, les indigènes
La fête
mener
a
sur
eu
la
enlevèrent les tentes et allèrent les installer sur la Place du
Gouvernement. Cet enlèvement fut fait avec un ensemble
bruit du tambour qui marchait en
jour-là, la musique du vaisseau
amiral exécutait quelques morceaux sur la place et était en¬
tourée d'une nombreuse population animée d'une gaieté folle.
Le lendemain, jour de la fête, les autorités civiles et mi¬
vraiment
remarquable,
au
tête et des chants indiens. Ce
se
réunirent et allèrent s'asseoir sur les chaises et
fauteuils qui avaient été préparés d'avance pour les recevoir
devant l'habitation de la Reine.
litaires
placées à droite et les messieurs à gauche.
premières places et près de la Reine, à sa droite Mme
Larrieu, Mme de la Richerie, puis d'autres dames. A gauche
de la Reine, Mr de la Richerie, Mr l'Amiral Larrieu, son
chef d'Etat-Major puis les officiers. Tout ce beau monde fut
installé dès 7 heures du matin et reçut successivement chaque
Les dames furent
Aux
district.
Chaque district
se
présenta dans
un
ordre parfait, drapeau
tête, conduit par son chef qui, prenant la
parole à une distance respectueuse, adressa son discours à la
du Protectorat
en
Après chaque discours prononcé avec beaucoup d'é¬
nergie et pas mal d'aplomb, vinrent les chants, puis les dan¬
ses, pleines d'ensemble et d'originalité ; cela fait les femmes
Reine.
—
784
—
s'avancèrent,
se dépouillèrent d'un vêtement postiche fait en
de coco, pia, burao et ripes de cocotier, le jetèrent
décemment avec leurs couronnes aux pieds de la Reine en
bourre
saluant et
rent
se
retirant
autant. Ainsi
avec
assez
d'ordre. Les hommes
en
fi¬
défilèrent tous les districts, au nombre de
30 à
35, et tous couverts de vêtements postiches de différentes
couleurs, produisant un effet assez romanesque.
Quelques-uns s'avancèrent ayant en tête de leurs colonnes
des animaux postiches, tels que chevaux, bœufs, requins et
chien. Les requins et le chien furent présentés les premiers et
placés en face de nous, ce qui ne laissa pas d'attirer mon atten¬
tion. Figurez-vous un chien énorme de la grandeur et de la
grosseur d'un cheval ordinaire, ayant une grande queue et
parfaitement redressée comme celle de l'épagneul et le poil
très bien imité du même animal, montrant d'énormes dents,
puis les requins, dont l'un ayant une grande gueule ouverte
et le plus petit la gueule entièrement fermée, le tout perché
sur des bambous et
planches à roulettes, et vous aurez un des
tableaux de la fête. Ces animaux postiches restèrent ainsi
exposés pendant tout le temps de la cérémonie.
Une scène assez originale fut celle d'un indigène portant
triomphalement un cochon lié par les quatre pattes, puis
l'exposant par terre, prenant une pose en face de la Reine
et de l'Amiral, il fit un discours très chaleureux à propos de
son
offre. Il était beau, bien beau et avait l'air de dire à
son cochon : c'est moi qui te livre. Après
le discours et les
gestes sans nombre de ce brave, le malheureux cochon fut
enlevé, grognant toujours et porté dans la cour de la Reine.
La musique tahitienne composée d'une trentaine d'indigènes,
habillés en blouses bleues, ceintures, pantalons blancs et cas¬
quettes à cuves, façon anglaise, puis d'un chef habillé en
commandant de vaisseau anglais, fut placée sur des planches
superposées sur une maçonnerie et exécuta des morceaux
d'une originalité sans pareille.
Les instruments de cette musique sont en bambou et pro¬
duisent un son aigrelet assez assommant ; un tambour très
bruyant sert à l'accompagner. C'est une musique incroyable.
Le défilé dura jusqu'à 9 heures et demie. Nous eûmes de la
pluie deux heures après, elle cessa à une heure. A cette heurelà, les autorités civiles et militaires, invitées la veille, se
rendirent à bord du « Cassini » pour assister aux joutes qui
eurent lieu avec une entente et une vigueur extraordinaires.
La Reine y assista et fut saluée par 21 coups de canon à son
Société des
Études
Océaniennes
—
785
—
bord. La musique de l'Amiral exécuta plusieurs
pendant tout le temps que durèrent les joutes. Parmi
pirogues, j'en remarquai deux montées par une quarantaine
femmes festonnées d'étoffes jaunes et de couronnes de
arrivée
à
morceaux
les
de
feuilles. Elles allèrent avant de
commencer
la lutte demander
restèrent un bon bout
de temps. Ce qu'elles y firent, je l'ignore mais elles en sor¬
tirent toutes rayonnantes de joie.
je
ne
sais quoi à bord du vaisseau et
y
Les
indigènes luttèrent et montrèrent leur énergie, ils ra¬
dextérité et un ensemble admirables. Les joutes
furent terminées à 4 heures, la Reine se retira et fut de nou¬
veau saluée par 21 coups de canon tirés à bord.
ment avec une
Ce jour-là on fit une distribution de pain et de vin aux
indigènes. Le soir, quelques édifices publics furent illuminés
et la Place du Gouvernement le fut dans presque tous les sens.
Les danses inndiennes allèrent de l'avant, c'était un brouhaha
extraordinaire. Nos soldats et quelques matelots étaient mêlés
dans la fouie, s'amusant avec elle sans occasionner la plus pe¬
tite rixe. Il y avait là plus de 5.000 personnes en mouvement.
Un bal fut donné par
Mr Gaultier de la Richerie, Commis¬
Impérial, les toilettes y étaient très belles, très fraîches,
et de bon goût, j'y vis quelques dames anglaises très élégantes.
Plusieurs jolies dames tahitiennes puis quelques chefs de dis¬
tricts y assistèrent. Mme de la Richerie, disposant toujours de
la grâce et de la bonté qui la caractérise, fit les honneurs
saire
de la soirée à la satisfaction de tout
Mme
Larrieu,
gracieuseté
res
sans
son
monde.
au regard doux et aimable, fut aussi d'une
égale. Les danses durèrent jusqu'à deux heu¬
du matin.
trois heures des indigènes donnèrent plu¬
représentations amusantes, puis j'en vis une vingtaine
sortir de chez la Reine, habillés en amiraux et commandants
de vaisseau ayant plusieurs décorations. Les épaulettes, la
passementerie et les décorations étaient imités dans le goût de
la perfection et lorsqu'ils apparurent je me demandai si c'était
bien de l'imitation ou du vrai, mais un Européen à qui je
m'adressai, me dit que tout était fait en cocotier et bourre
du même arbre. Les indigènes ainsi habillés allèrent se pro¬
mener
dans la ville en affectant le genre anglais avec un
certain chic et m'amusèrent beaucoup.
Le lendemain à
sieurs
Les
divertissements
continuèrent
Société des
Études
comme
la veille
Océaniennes
et
tout
—
786
—
dans l'ordre habituel le lundi
faite à la Reine.
rentra
après la visite d'adieu
COURONNEMENT DE LA REINE DE BORABORA.
Le 26
juillet dernier, la goélette
«
Manu Païa » emportait
la Reine Pomare,
le Prince
Ariifaite, son époux, deux Re leurs enfants et leur 6uite com¬
posée de Tahitiens des deux sexes. Le terme du voyage était
Borahora. Les dernières volontés de Tapoa, roi de cette île
et de celle de Maupiti, qu'une mort prématurée venait de ra¬
vir à l'amour et à la vénération de ses sujets, désignaient pour
le remplacer sur le trône son enfant d'adoption, la princesse
Teriimaevarua, fille de S.M. Pomare. C'était pour assister à
la réalisation de ce désir, qu'avait sanctionné le vote de tout
vers
les
Iles Sous-le-Vent
S.M.
peuple, que la famille royale de Tahiti avait entrepris ce
La traversée fut heureuse et, après une courte relâche
à Raiatea, où règne son second fils Tamatoa Y, S.M. la Reine
débarquait à Borabora le lundi 30 juillet vers les onze heu¬
un
voyage.
res
du soir.
Malgré cette heure avancée, une foule enthousiaste encom¬
rivage et témoignait sa joie par ses acclamations ;
brait le
des salves d'artillerie
saluaient l'arrivée de la Reine et
une
députation composée des grands chefs, des grands juges, des
notables des deux îles, après avoir reçu et complimenté Sa
Majesté, lui servait d'escorte pour l'accompagner à la de¬
meure
royale. La princesse Teriimaevarua et la veuve de
Tapoa, attendaient leur parente sur le seuil du palais et l'y
tinrent longuement embrassée : toutes trois se laissaient aller
à la joie de se retrouver réunies après une longue séparation.
Mais bientôt après ce premier sentiment en succéda un autre
d'une nature opposée ; la mort de Tapoa était trop récente
pour avoir tari toutes les larmes et la nuit entière s'écoula
en
pleurs et en gémissements ; quand le jour parut, les reines
et les familles royales se mettaient en route pour accomplir
un pieux
pèlerinage au tombeau du roi.
Sous les cocotiers du rivage, non loin de la case royale,
s'élève un petit monument sous lequel est exposée la dépouille
mortelle de Tapoa 1er, petit-fils et dernier descendant d'un
conquérant illustre. Des plantes aromatiques, des résines odo¬
riférantes, employées d'après certaines recettes indigènes, ont
permis de soustraire aux horribles lois de la décomposition
le corps du souverain. Il est là, couché sur un lit de parade,
revêtu du manteau royal et le visage découvert. Chaque jour,
Société des
Études
—
787
—
peuple qui bénit sa mémoire, peut contempler ce visage
vénéré qui, maintenant flétri, était, quand la vie l'animait,
le reflet fidèle des heureuses qualités, des vertus qui distin¬
son
guèrent Tapoa et firent de lui un prince chéri de ses
redouté mais estimé de
sujets,
rivaux, de son pays, un des plus
tous ceux des Iles Sous-le-Vent.
ses
sagement administrés de
Enfin, la Reine, jetant un dernier regard sur celui qui
son premier
époux et le père d'adoption de sa
fille, donna d'une voix émue le signal du retour et tous re¬
prirent silencieusement le chemin de la demeure royale.
avait été et
celle-ci, tous les habitants s'occupaient sans re¬
apprêts de la fête du lendemain ; c'était surtout
aux abords du temple
qui devait en être le théâtre que se
pressait la foule des travailleurs ; chacun voulait faire quelque
chose pour contribuer à l'ornementation de l'intérieur et sur¬
tout mettre la main à l'érection du trône où devait s'asseoir
leur jeune reine, la fille chérie de Tapoa. La nuit vint mettre
un terme à ces divers travaux, alors retentirent de toute part
des himenes et des chants de circonstance qui retraçaient les
divers événements de cette journée, de celle qui l'avait précé¬
dée et tous les plaisirs qu'on se promettait pour celle du len¬
Autour de
lâche
aux
demain.
Le 3 août les premiers rayons du soleil levant, inondant de
clarté un ciel sans nuages, éclaire un splendide tableau : au
loin du côté de la mer, les hauts sommets de Raiatea à demi
noyés dans les vapeurs bleuâtres du matin ; plus près cette
riche guirlande de bouquets de cocotiers, et d'arbres de fer,
ceinture verdoyante de Borabora, rejoints entre eux par la
ligne blanche d'écume de la vague qui se brise sur les coraux ;
du côté de la terre, au-dessus des collines boisées, la masse
imposante du mont Perea se dresse majestueuse comme un
de ^ces gigantesques châteaux fortifiés du moyen âge avec ses
tours et ses créneaux, et découpe toutes les sinuosités de son
front de granit sur le bleu si pur du ciel des tropiques ; sur
la plage, sous l'ombre des grands arbres, une population en
habits de fête, contient à peine le délire de sa joie, et regarde
les splendeurs de cette matinée comme un heureux présage
pour
le règne qui va commencer.
L'heure si ardemment désirée
arrive enfin
;
â travers une
double haie de soldats le cortège se dirigeant vers le temple
où doit s'accomplir la cérémonie solennelle, s'avance dans
l'ordre suivant :
Société des
Études Océaniennes
—
788
—
Les
étrangers de toute nation,
grand chef Teriri, portant le Livre des Lois,
Tetauira, grand chef de Maupiti, portant l'Epée de l'Etat,
Fariuriu, portant la Bible,
Le grand chef Tefaarora portant le
Sceptre,
Le jeune Tapoa (Teriitapunui, fils de S.M.
Pomare) portant
l'Huile Sainte,
Ariihuhaopa (Ariifaite, mari de la Reine) portant la Cou¬
Le
ronne,
Les
deux
et
ministres
protestants,
les Révérends MM. Platt
Barff,
La future Reine
Teriimaevarua, vêtue de noir, couverte de
(manteau royal) placé sous un dais de velours
cramoisi frangé d'or, que portent huit des
plus jeunes
chefs. Douze autres chefs, armés comme aux
temps an¬
ciens, lui forment une garde d'honneur,
S.M. la Reine Pomare, la veuve de Tapoa et les familles
royales,
Les chefs et grands chefs,
Les juges et grands juges,
Les membres de l'église,
Les enfants des écoles,
La masse du peuple.
Les Reines, les familles royales, les grands chefs et la
plus
grande partie de l'assistance avaient revêtu des habits de
l'Orooro
deuil.
A
entrée dans le temple, Teriimaevarua prit place sur
qui lui avait été dressé, ayant à sa droite, sa mère
la Reine de Tahiti et à sa gauche, le Révérend M. Platt.
Celui-ci se lève et, présentant la jeune reine à l'assemblée :
Peuple de Borabora, peuple de Maupiti, acceptez-vous pour
reine Teriimaevarua, descendante de la branche
royale de
Tahiti et fille adoptive de votre feu roi
Tapoa 1er ? »
Un murmure d'assentiment court dans les rangs de l'assem¬
blée ; puis Haapoua,
grand chef de Borabora et Taero, grand
chef de Maupiti, répondent au nom des habitants de ces îles :
Tel est le désir unanime ! Que Teriimaevarua IV soit
son
le trône
«
«
couronnée et sacrée Reine de
Le
service
religieux
nos
commence
d'un discours prononcé par
Société des
Etats
alors
M. Barff,
Études
».
par
sur ce
un
himene suivi
texte du livre de
Océaniennes
—
789
—
David : « Que celui qui est le dominateur des hommes soit
juste et qu'il règne dans la crainte de Dieu ».
N'oubliez jamais ô Reine, dit l'orateur en terminant, la
parole de Dieu que vous trouverez écrite à chaque page du
livre sacré qui va vous être confié. Là, vous puiserez les
nobles sentiments qui font les grands souverains et l'exemple
des vertus que doivent pratiquer les vrais serviteurs de Je«
hovah...
»
grand chef Teviri, portant le Livre des Lois, s'avança
Le
alors
vers
la Reine
:
Teriimaevarua, je vous présente ce livre, dépôt
des lois de notre pays : consentez-vous à gouverner vos
îles Borabora et Maupiti, selon la parole inviolable ? »
sacré
deux
Oui, répond la jeune Reine d'une voix ferme, et que
Dieu
«
«
me
0
soit
en
aide
».
Tetouira,, tenant l'Epée de l'Etat, lui
paroles
adresse ensuite
ces
:
« Je
vous présente cette épée
ô Teriimaevarua, comme un
symbole du pouvoir que vous allez exercer sur nos deux îles ;
promettez-vous de la tenir d'une main ferme pour faire res¬
pecter les lois, trembler les méchants et protéger ceux qui ne
seront point rebelles à vos décrets et aux saintes lois de
l'Evangile ? »
Je le promets, répond la Reine et que Dieu me vienne
«
aide
en
».
Fariuriu lui
présente alors la Bible :
je vous offre
ce livre sacré ;
qu'il soit la boussole qui vous conduise dans votre vie et
l'étoile qui vous dirige à l'heure de votre salut. L'acceptezvous comme la lumière qui vous éclairera dans les affaires de
votre gouvernement et voulez-vous être affermie par elle de
la bénédiction de Dieu, le père de toute grâce excellente et
de tout don parfait ? »
Je la reçois et je l'accepte comme unique guide et je
prie Dieu qu'il daigne me bénir et me venir en aide ».
Alors au bruit des salves d'artillerie, le Révérend M. Platt,
prend l'huile sainte des mains du jeune Tapoa, oint le front
de Teriimaevarua et prononce ces paroles :
Au nom de Jéhovah, la Trinité divine, au nom du Roi des
Rois, au nom du Seigneur des Seigneurs, je vous sacre ô
Teriimaevarua ; que l'esprit du Dieu trois fois saint descende
«
Au
nom
de tous ô Reine,
«
«
Société des
Études Océaniennes
—
790
—
jour solennel, qu'il vous bénisse, voup et vos
sujets et qu'il vous réserve dans l'éternité la place qu'il a
promise à ses élus. Ainsi soit-il ».
Le sceptre est alors présenté à la nouvelle Reine par Tefaaova, chef de Maupiti :
« Recevez
ô Teriimaevarua, ce sceptre, signe de votre pou¬
voir, symbole de votre royauté ; recevez-le et que Jésus ré¬
pande ses bénédictions sur vous et sur votre règne. Amen ».
vous
sur
on
ce
Ariihuhaopoa remet au Révérend M. Platt la couronne
royale ; celui-ci la pose sur le front radieux que l'huile
sainte vient d'arroser, puis, imité par toute l'assistance, il
se met à
genoux. Après une courte prière à laquelle chacun
s'associe ardemment
en
demandant à Dieu de soutenir cette
jeune Reine et de guider ses premiers pas dans la nouvelle
carrière qui s'ouvre pour elle, les chants d'action de grâces
éclatent de toute part, interrompus par les cris mille fois
répétés de : « Maeva te Arii ! » (Vive la Heine).
cortège revient dans le même ordre h la case royale,
religieux qu'on observait à son premier pas¬
sage a fait place aux bruyantes manifestations de l'allégresse
qui remplit tous le3 cœurs et qui, longtemps comprimée pen¬
dant la solennité, s'épenchc maintenant sans contrainte.
Le
mais le silence
DU DISTRICT DE
POPULATION
RECENSEMENT DE LA
PARE.
Le conseil de district de Pare,
prévient les Indiens que le
population océanienne commencera pour le
de Pare mardi prochain 12 février 1861.
recensement de la
district
l'Océa(hommes, femmes, enfants) habitant le district de Pare,
depuis six mois, devront assister à ce recensement et se rendre
Tous les Indiens du Protectorat et des autres îles de
nie
aux
heures et lieux
désignés ci-dessous
:
1° Devront se réunir, mardi 12 février, à 2 heures du soir,
près du pont de Pirae, les Indiens qui habitent Taaone, Pirae,
Arahiri et
2°
Vaipoa.
Devront
se
réunir
mercredi
13 février
a
.8 heures du
matin, chez le juge Tamato, les Indiens qui habitent
et
Taunoa
Fautaua.
3° Devront se réunir mercredi 13 février à 2 heures du
soir, chez le Toohitu Imihia, les Indiens qui habitent Vaininiiore, Mamao et Orae.
Société des
Études Océaniennes
—
791
—
jeudi 14 février à 2 heures du soir,
Ariipaea, les. Indiens qui habitent le terrain dé¬
veloppé de la mer aux fortifications de l'est, entre la rue de
la Petite Pologne et la rue Bruat prolongée par la rue des
4°
Devront
se
réunir
chez le chef
Beaux Arts.
réunir vendredi 15 février
chef Ariipaea les Indiens qui
rain s'étendant de la mer à la montagne et
5°
Devront
se
à 8 heures du
habitent le ter¬
compris entre le
terrain indiqué précédemment et la rue Sainte Amélie prolon¬
gée d'une part jusqu'à la montagne et de l'autre jusqu'à la
mer.
Il est bien entendu que les Indiens de la vallée Sainte
Amélie sont compris dans cette division.
matin chez le
réunir vendredi 15 février à 2 heures du soir
district de Pare les Indiens qui habitent le
terrain s'étendant de la mer à la montagne et compris entre
le terrain indiqué précédemment et la limite du district de
Faaa.
6°
Devront
se
dans l'école du
Tout Indien du district de Pare qui sans motif valable,
manquerait à ce recensement sera poursuivi conformément aux
lois indigènes. Mais le conseil espère que les Indiens ne
manqueront pas à un appel qui est fait pour leur intérêt.
Tous les autres districts de Tahiti et de Moorea ont déjà
fourni
un
recensement très
exact.
( à suivre )
Société des Études Océaniennes
792
—
—
HISTOIRE
Jean "Baptiste
RIVES, de Bordeaux
aventurier hawaïen
( 1793
Au
cours
de
nos
-
1833 )
lectures océaniennes
nous avons
souvent
ren¬
contré
Jean-Baptiste Rives, de Bordeaux, plus ou moins complaisamment cité par les nombreux navigateurs du début du
XIXème siècle, de Freycinet à Duhaut-Cilly, d'Arago à Le
Netrel.
Nous
à
allons,
des pages suivantes, essayer d'esquisser,
fresque de la vie aventureuse de ce pitto¬
au cours
grands traits,
une
resque gascon.
*
*
%
A) Origines présumées de 3.B. Rives.
qu'il y paraisse, Jean-Baptiste Rives, serait bien né,
effet, à Bordeaux, en 1793. Ce renseignement coïncide avec
les origines de notre héros, abondamment données par Arago,
et aussi avec son acte de décès, daté de 1833, recueilli à la
chancellerie de Mexico, où il est dit « âgé de quarante ans ».
Autant
en
Voici
d'ailleurs
présumé de naissance: «est né
jour dix-huit Juin 1793, à quatre heures du matin, chez
son
père, Jean-Baptiste Rives, Capitaine de navires, et de
Catherine Thérèse Bergerac, son épouse, rue Sainte-Eulalie,
n° 44, ainsi qu'il nouis a été déclaré par son père, qui l'a pré¬
senté, assisté de Marie Bergerac, tante à l'enfant ; veuve Hinard, rue du Palais Gallien n° 121, et de Anne Poinsellier,
épouse de Jean-Baptiste Despujo's, Capitaine de navires, Cours
Sainte-Eulalie, n° 19 (1).
Nous voyons donc que le jeune Rives appartenait à une
famille de navigateurs marchands. Peu de temps après la
naissance de Jean-Baptiste, nous retrouvons son père, passé
dans la «Marine Nationale», en qualité d'Enseigne de vais¬
seau, puis promu Lieutenant de vaisseau.
son
acte
ce
ces renseignements aimablement communiqués par Mon¬
Beder, Conservateur des Archives municipales de Bordeaux.
(1) Tous
sieur
Société des
Études
Océaniennes
793
—
Il
fils
—
figure avec ce grade sur l'acte de naissance de son second
Jean-Baptiste Théodore Rives, (9 Messidor An IV).
Nous connaissons aussi les aïeux de notre
héros.
grand-père Jean-Baptiste Rives, époux en 1764 de BerOlivier, docteur en médecine, semble avoir exercé son
art à Langon
(en 1760) et Blaye (en 1772). Il était, luimême, fils d'un chirurgien Pierre Rives, fixé à la Grave
d'Ambarès, en 1764, puisque c'est là qu'est né son fils JeanBaptiste, (1), le père de notre héros.
Nous connaissons donc bien les origines de Jean-Baptiste
Rives : appartenant à un milieu bourgeois de médecins et capi¬
taines au long cours, il avait dû recevoir, dès son plus jeune
âge, une bonne éducation, habitué à évoluer dans un milieu de
navigateurs, à regarder en compagnie d'autres enfants les
manœuvres
savantes de voiliers accostant ou appareillant du
quai des Chartrons, rien d'étonnant à ce qu'il eut acquis, dans
ce milieu, le
goût, l'attirance de la mer, et qu'il ait un jour
d'ailleurs venu très tôt dans sa vie, répondu à son appel ; en
effet, si nous en ci'oyons Arago, dont la faconde égale, ou
dépasse même celle du gascon le mieux doué, la carrière
maritime de J,B. Rives se serait dessinée comme suit (2).
Son
narde
*
*
*
Né à Bordeaux », dans une petite chambre de cet hé¬
micycle admirable des Chartrons, se pavanant sur les bords
de la Garonne, il avait onze ans à peine, quand lui vint à
l'esprit (Je veux dire dans la tête) la passion des voyages,
impérieuse, dominatrice, l'emportant sur toutes craintes, sur
le triste présage des plus terribles catastrophes. Rives y suc¬
«
comba...
la rivière emprisonnée son
pont propre comme un miroir, lançait à l'air ses mâts élégants
et flexibles et ses cordages si variés et si gracieux ; Rives ne
perdait pas de l'œil la maison flottante, dont quatre ou cinq
voyages heureux attestaient la marche hardie : le matin, le
soir, jouant aux billes avec une demi douzaine de sales polis¬
sons de son âge et de son acabit, la nuit couché sur son grêle
lit de sangles, nouveau Colomb, il pensait aux pays lointains
Un navire américain
étalait
sur
qu'il aurait voulu découvrir ou du moins visiter. Cette
(1) Arago, Journal d'un Aveugle, Tome III, pages
(2) Arago, Souvenirs d'un Aveugle, pages
Société des
...
Études Océaniennes
soif
209 et suivantes.
794
—
—
ardente
des voyages qui le brûlait, altérait sa santé et ses
parents alarmés lui demandèrent enfin la cause de la tristesse
qui le rongeait...
Qu'as-tu mon petit dit sa mère d'une voix tremblante.
Hélas, Maman, je m'embête à Bordeaux, je voudrais cou¬
«
«
rir le monde.
Où
«
donc désirerais-tu aller ?
Loin, loin, loin, plus loin
antipodes pour marcher la tête
«
Mais
«
tu
tomberais
mon
encore,
en
je voudrais être
aux
bas.
enfant... etc
Tenez mère, vous voyez ce beau trois mâts américain sur
lequel les matelots portent un joli chapeau de paille et des
chemises rouges (1) et bien je désire m'embarquer là-dessus
«
filer...
et
»
Bref le soir de cette belle conversation Rives fut
aurait
ou
été
embarqué à bord de la Belle Caroline (2) en qualité de
mousse.
Et le lendemain il glissait, devant Blaye ou devant
Pauillac et deux jours après il voguait en pleine mer ie cap
sur
les Açores, libre, indépendant... C'est-à-diie indépendant
des
étrivières
de
sa
mère
si
tendre
et
libre de
son
maître
d'école mais
ser
occupé, le pauvret pendant toute la journée à tres¬
cordes, à grimper au haut des mâts, et à aider le coq
la fonction de l'exécrable pitance offerte quotidiennement
voracité des quinze hommes de l'équipage de la « Belle
des
dans
à la
Caroline
».
Le
Cap Horn fut doublé et l'on relâcha au Chili, puis à
Rives était épuisé, exténué; il demanda la permission
de descendre à terre, pour essayer la conquête de quelques
nobles Péruviennes. (3) Le maître lui fit cadeau d'un éner¬
gique coup de pied au derrière ; le Bordelais bondit sans 1e
vouloir et, rouge de colère, monta sur la grand'Iiune...
Lima.
(1) Oui déjà ; revenues à la mode zazou, en 1957.
(2) On trouve bien trace dans « l'Indicateur de Bordeaux » (18041805) des passages répétés à Bordeaux d'un certain brick américain
de 100 tonneaux « la Caroline » de Boston, capitaine Bouwer, signale,
en particulier le 25
Septembre 1805, comme venant sur l'est de Lis¬
bonne. Son départ est annoncé pour le 20 Novembre 1805. S'adresser
à
Mme
Rives, 27 Quai des Chartrons. Rives aurait
(3) Il aurait
eu
douze
ans,
d'après
son acte
Études
Océaniennes
âmes bien nées
Société des
eu
douze
de naissance, mais
ans.
« aux
795
—
—
Cependant ia relâche fut courte; la « Belle Caroline » leva
l'ancre, et selon les ordres des armateurs elle devait
aller à Manille, puis en Chine, toucher Calcutta, mouiller à
Maurice et effectuer son retour par le Cap de Bonne Espéran¬
ce. Ainsi ne le voulurent pas les destins, un vent contraire pous¬
sa le beau trois-mâts loin de la route tracée, et bien heureux
fut-il, de trouver à « Kayaka-koach » au sein d'une affreuse
bourrasque une rade sûre, pour se ravitailler et réparer quel¬
ques avaries...
bientôt
Rives débarque
B) J.B.
aux
lies Sandwich (Owehywehee).
Rives descendit à terre, ou l'exiguité même de sa taille
liliputienne le fit la risée des naturels. Le brave garçon prit
pour des témoignages d'affection les rires moqueurs dont il
était l'objet, et le voilà rêvant de hardis et larges projets,
bien disposé à dire adieu à ses compagnons de course et à
s'installer dans une île dont il espérait, peut-être, un joui",
faire
se
Le
roi.
nommer
jour du départ le drôle manqua à
l'appel... On
envoya
matelots à sa recherche, on ne le trouva pas...
blotti qu'il était dans la bouche de quelque idole, ou sous une
feuille de chou caraïbe,... le navire continua sa route délesté
du citoyen de la « Gironde », tout fier de son heureuse escapa¬
quatre ou cinq
de
alors dix
Rives avait
:
«
Le
drôle
»
s'installa
ans...
(1)
dans la demeure
d'un chef qui le
soigne un sapajou, ou un perroquet... à dix
soigna
ans
une langue s'apprend vite Rives parla bientôt le
« sandwichien » mieux que vous et moi ; il mangeait de la « poe »,
pâte presque aussi délicieuse que de la mélasse aigrie ; il
jouait au fuseau (jeu favori des eandv/ichiens). Il se prosternait
comme on
grâce devant un « morai », il dansait assis, dormait une
partie de la journée et ne se plaignait plus de son sort, tant
il était devenu Sandwichien. Mais vivre pour le présent, seul,
n'allait pas à l'ambition du petit Rives ; il songea à l'avenir
et après deux ans de séjour à Owyhee (donc vers 1806 (2),
il s'adonna à la médecine (3). Etonnez-vous donc de voir ces
avec
(1) Il aurait
âmes
eu
bien nées
douze
ans,
d'après
(2) Il faudrait d'après ce qui
Rives
aurait
eu
son acte
de naissance, mais « aux
»...
précède lire 1807 au lieu de 1806.
quatorze ou quinze ans.
(3) Réminiscences ancestrales ou caractères
Société des
acquis d'hérédité.
Études Océaniennes
—
796
—
îles si
dépeuplées. Rives visita des malades, il fit certaines
grimaces, il donna le suc de certaines racines, il pratiqua
même avec la pointe d'un canif quelques déchirures à la
peau ; bref, il traita les sandwichiens en véritables compatriotes.
Et comme au milieu de ces tentatives, quelques-unes réussi¬
rent (le hasard est un dieu si bizarre) il se fit une sorte de
réputation et reçut en récompense une « case » proprement
bâtie, une douzaine de cocotiers, une centaine de pieds de
terrain et un grand nombre de brasses d'étoffe, utile appen¬
dice à ses pantalons de mousse, depuis longtemps en lambeaux.
Quand la cour de Tamahamata était à Kaïrooab, Rives rôdait
sans
cesse, comme un caniche, autour des demeures royales,
mais l'habitude des princes n'était pas de regarder toujours si
bas, et le pauvre Rives glissait inaperçu, au milieu des poules,
des porcs et des domestiques de l'île. Son amour propre de
médecin
en
souffrait cruellement.
Cependant, l'épouse favorite du grand roi, saisie un jour,
coliques, appela, auprès d'elle, les charlatans de
l'endroit, qui, tous, échouèrent, et furent renvoyés avec menaces
de châtiment. Une dernière ressource restait au prince : il avait
entendu parler de l'imperceptible européen et dans son déses¬
poir, il l'envoya quérir. Rives arriva le cœur gonflé de vanité,
s'agenouilla près de la reine, tâta son pouls, fit quelques gri¬
maces, prononça à boix basse deux ou trois phrases mystérieu¬
ses, et sortit en annonçant son retour prochain. Il rentra chez
lui dans une agitation extrême et bouffi des plus gigantesques
idées de fortune et de grandeur. «Voici donc le moment de
me faire un sort rapidement, se
dit-il ; je joue le tout pour
le tout ; ma bonne étoile me guidera, et au surplus, puisque
les autres médecins n'ont pas réussi, je ne cours comme eux,
que le risque de quelques coups de pied au derrière ; je sais
ce
que c'est ». Cela dit, Rives arracha quelques touffes du
gazon qui bordait sa hutte, les pila, en exprima le suc, le
délaya dans un verre d'eau, jeta le tout dans une petite cale¬
basse, et s'achemina tout palpitant vers la demeure de la reine,
dont des gémissements retentissaient, plus douloureux et plus
éclatants encore. Rives entra, recommença les singeries qu'il
savait en usage, présenta le vase à la reine, la força d'avaler la
potion et se retira pâle et muet, comme s'il venait de commet¬
de violentes
tre
un
assassinat.
Une heure après, deux gardes se précipitent vers sa cabane.
Ils y pénètrent, saisissent Rives par les épaules et le portent
plutôt qu'ils
ne
le traînent
Société des
au
palais. Le pauvret
Études
Océaniennes
se
crût arrivé
—
797
—
sa dernière heure, et il récitait déjà son «
la reine elle-même lui tendit la main avec
à
lui
permit de l'embrasser,
In
un
manus »
quand
doux sourire,
l'autorisant à s'asseoir sur une
plus. Tamahamaha lui donna un
manteau de plumes, signe de sa dignité, deux fusils, un casque,
cinq ou six éventails, plus de cent brasses de riches étoffes
de palma-christi; et la reine lui présenta enfermés dans une
petit boîte deux magnifiques perles pêchées à Pah un des plus
beaux mouillages de Wahoo...
de
nattes
ses
elle
:
ne
en
souffrait
étoffes et de ses curiosités, plus riche encore
admirables perles, Rives ne voulut pas s'arrêter
en si beau chemin et résolut de profiter de sa bonne fortune.
Avec la permission du prince et sous la promesse formelle
Riche de
de
ses
deux
ses
d'un
prochain retour, il partit deux mois après, pour Kanton,
ses perles, et d'acheter des médicaments. Muni
de ces nouveaux trésors, il revint exercer sa profession à
Owyhee, et toujours souple et rampant, courtisan adroit et rusé,
menteur et fripon, il suivait la cour dans toutes ses évolutions
hormis quand elle allait combattre. Rives avait trop besoin de
afin de vendre
repos.
Le vieillard Young (1), dont je vous parlerai plus tard,
m'avait raconté cette histoire. Rives, à qui j'en demandais la
confirmation, n'y trouva que très
Nous
peu
de choses à retoucher...
devons, toutefois, ajouter un détail important. Rives
avait été marié, sans doute par les soins du roi, à deux jeunes
filles charmantes, touchant, paraît-il, à la famille royale. Il ne
descendance que de l'une d'entre elles
celle-ci eut deux filles jumelles : 1° Thérésa
Owana qui épousa un veuf Laanui et eut deux enfants, Elisa¬
beth Kékaanauokalani, qui épousa Francis Pratt, d'où descen-
semble
avoir
de
eu
Iloolau II, et par
venu dans le pays avant
avait fait souche. Il jouissait
confiance du souverain, et avait exercé longtemps les
(1) Young était
1789. Ancien
de
toute
la
«
un
vieux marin anglais,
Conseiller
»
du roi il
y
importantes fonctions de gouverneur d'Owahu. Il devait participer
avec
Rio-Rio, au voyage en Grande-Bretagne (1824). La petite-fille
de
Young deviendra la fameuse
(2) Cet événement
aurait
eu
19
ans
ne
«
Reine Emma
».
peut guère se retenir avant 1812
,
Société des
Études
Océaniennes
—
Rives
798
—
—
(1) Gédéon Kaïlipalaki Qkékéananoui. La mère mourut
son fils... 2° Virginia Koa qui épousa Henry
Aucurs Peirce, un riche négociant américain venu de Boston.
dance
à la naissance de
Nous
aux
jeunes épouses, sous peu, dans la suite
humoristique, faite par Ârago, de son voyage
retrouverons ces
de la narration
îles Sandwich.
C) Passage de V «Uranie
»
aux
Iles Sandwich (Août 1819)
En Août 1819, le Capitaine de frégate de Saulces de Freycinet, commandant de 1' « Uranie », relâche aux Iles Sand¬
wich. Cet archipel avait été reconnu en 1778 par l'illustre
«
Captain Cook». Il y avait même trouvé une fin déplorable :
à la suite d'une rixe avec les indigènes, il avait été tué par
eux, et mangé en partie.
fâcheux accident, divers navigateurs étaient allés
nous nous contenterons de citer
les noms, déjà connus, de John Henry Cox, commandant du
Mercury » (1790) navigant — on s'en souvient — (2) sous
pavillon suédois ; de Vancouver, et de notre illustre compatriote
Lapérouse (1788).
Depuis
dans
ces
ce
îles. Parmi ceux-ci,
«
A la suite des deux séjours de Vancouver dans ces îles (17921794) et du débarquement accidentel de certains matelots
anglais, tels Davis et Young, elles subissaient fortement l'in¬
fluence britannique.
Les
Français y étaient bien passés, sous l'Empire, avec
capitaine Bourayne », commandant de la « Ca¬
nonnière » mais son voyage n'avait pas laissé de traces.
le
«
brave
Les
eux
Russes, avaient,
aussi
—
un temps —, médité de s'établir,
(3). Hagmeister, à cette époque le chef de leurs
(1) Elisabeth Pratt,
une descendante de cette famille, a écrit l'his¬
celle-ci, sous le titre de : « Histoire de Kalani-kupuapa-ilalanui », ancêtre des rois d'Hawaï et ses descendants, avec des notes
sur
Kaméha-méha, premier roi de l'archipel hawaïen. Honolulu 1920.
(Aimablement communiqué par le Bishop Muséum 1956).
toire
de
(2) Voyage du « Mercury ». Voir
de la S.E.O., n°3 94, 100, 110.
mes
articles
parus
dans le Bulle¬
tin
(3) Campbell — Voyage round the world p. 117 à 200. Cette ten¬
sera
reprise un peu plus tard par le fameux docteur Scheffer.
tative
Société des
Études
Océaniennes
—
comptoirs américains,
noncé (1).
Ces
douze
îles
à
y
799
—
avait finalement, provisoirement,
re¬
la
population relativement importante,
la suite, pour les missions religieuses
un
champ d'évangélisation idéal. Missionnaires protestants amé¬
ricains, débarqués dès 1820, et britanniques s'y rencontrent
vers 1822-23. Les
catholiques n'y débarqueront qu'un peu plus
tard (1827). Leur action, ou plutôt les réactions que leur arri¬
vée suscitera, nous amèneront, à plusieurs reprises, à intervenir
auprès du Roi des lies Sandwich, de 1836 à 1843.
Taméhaméha « le Napoléon des mers du Sud », venait de
devaient
constituer,
par
mourir le 19 Mai 1819. Son
son
successeur
était le roi
«
Rio-Rio
»
fils.
Dès que
le peuple fut assemblé, Rio-Rio arriva de l'inté¬
temple ; il était vêtu d'une étoffe rouge, du manteau
de plumes héréditaire avec un diadème qui venait d'Angleterre
sur la
tête, et il avait à ses côtés des chefs qui portaient les
Kahihis » (plumeaux montés sur de longues cannes) et les
crachoirs. Rio-Rio était superbe ce jour-là (2).
Rio-Rio, en signe d'indépendance, commence par se libérer
de la règle religieuse du «tabou» (ou Kapii)... —
Arago (3), avec sa verve coutumière nous dépeint comme
suit, son arrivée à Owyhee (Hawaï), et sa rencontre à Kaoiai
(Kauai) avec J.B. Rives, notre héros. (3)
«
rieur du
«
«
nous
Le lendemain de notre arrivée à
mettre à
table,
nous
ICoiai, et
vîmes venir à nous
de
double pi¬
au moment
une
chose, qui, de loin, présentait une cer¬
homme. C'en était un, ou à peu près.
Monsieur Rives, le Français dont nous avait parlé à Kyakakooah s'empressait de nous faire sa visite, et quand la pirogue
accosta, le héros gascon (car Bordeaux était sa patrie) nous vit
tous sur le pont, prêts à fêter un enfant égaré.
Le voilà, il nous salue en ces termes « Messieurs et Dames,
(avec cet accent que vous savez) j'ai l'honneur de vous offrir
mes
très humbles et très respectueux hommages ».
rogue, portant quelque
taine analogie avec un
(1) Voir
et
mes
«
Voyages de Mac Carthy » Tome
: Océanie
dans le bulletin de la S.R.O. n°
travaux parus
(2) Ka Mooololo Hawaï
.
.
.
.
p.
.
.
.
,
.
p. 133.
Voyage d'un Aveugle, Tome III, pages 143 et suivantes.
(4) Une des îles les plus occidentales de l'archipel Sandwiehien.
(3) Arago
:
—
800
—
Sa taille était de 4 pieds 2 pouces au
plus. Il avait un
vif, l'autre l'était un peu moins, un nez pointu, une bouche
rieuse, des pommettes saillantes, un menton anguleux, et sur
ses
tempes deux chèvres honteusement tatouées, étaient à demicachées par des cheveux longs et bouclés. Les
doigts de Mon¬
sieur Rives étaient piqués à la mode sandwichienne, et
quoique
nous vissions
point son torse racorni, nous le supposâmes, avec
raison, à l'épreuve du tatouage.
«
œil
Le Bordelais était vêtu d'un habit
trop
de 5
pieds 10
grand
pour un
homme
et le brave Gascon le relevait un peu de
ses deux mains : un
pantalon retroussé d'en haut et d'en bas,
flottait sur des bottes qui eussent été trop
larges pour les
jarrets énormes de Yial (1) et d'un gilet panaché qui voilait
pouces,
pectoral. Monsieur Rives en eut pu fabriquer un karrick
passablement étoffé. Nous avions besoin de tous nos efforts
pour ne pas rire de ce grotesque personnage, mais les matelots,
moins scrupuleux, s'en donnèrent à cœur
joie...
Cependant, il s'avança d'un pas rapide et sautillant, vers
le gaillard d'arrière, pressa la main du
commandant, nous
présenta les siennes, se dit le favori de Rio-Rio, nous offrit
des porcs, des poules, des bananes et des cocos à
profusion,
nous
supplia d'accepter, nous assurant qu'il en avait une quan¬
son
tité
immense.
Il y avait quinze
dans ces îles le jour
ans que Rives prétendait avoir débarqué
de notre arrivée, (donc 1819 — 15 = 1804).
Chacun de
nous
répondit le mieux du monde à des politesses
empressées, si franches, et comme nous étions bien aisés de
lui rappeler la cuisine française, nous l'invitâmes à
dîner, es¬
pérant qu'il nous raconterait sa vie aventureuse. A l'appétit
avec lequel il dévora nous
commençâmes à douter de la valeur
de ses offres... Hélas, nous avions malheureusement
trop bien
auguré de notre auguste visiteur.
Après dîner, Monsieur Rives parcourut le navire ; il fit à
chacun des politesses désintéressées, et nous
emprunta, pour ne
plus nous les rendre, des mouchoirs, des serviettes, des che¬
mises et quelques vêtements que nous étions
trop courtois pour
lui refuser. Peu d'instants après, il quitta le bord, fort satisfait
de nous, en nous assurant qu'à terre il allait tout bien
disposer
pour nous accueillir...
Rives ménage, alors, aux navigateurs une visite au Roi et
si
(1) Vial,
un
matelot de l'Uranie.
Société des
Études
Océaniennes
801
—
Princesses
aux
terre
(1),
avec
:
«
—
le Gascon vint
me
saluer à
mou
arrivée à
des manières tout à fait gracieuses et me con¬
Requin, et Duhout, dans l'appartement où
duisit ainsi à MMrs
les
de
veuves
mollesse et
Tamehameha
consumaient
leur
vie
dans
une
oisiveté
qui feraient honte à nos chanoines. Là,
donner une idée de sa faveur et de son crédit, il
s'approcha, bénignement, de la favorite du défunt et lui donna
de légers coups du dos de la main sur la joue, ce qui ne sem¬
blait pas trop l'amuser.
Mais comme après ces caresses, il lui tàtait le pouls, et
faisait certaines grimaces de charlatan, nous nous empressâmes
de lui demander s'il exerçait aussi les fonctions de médecin de
la Cour. Et dès qu'il nous eut répondu que c'était lui qui avait
traité Tamehameha, nous ne fûmes plus surpris d'une mort si
une
pour nous
fatale à
ces
îles.
Le malheureux
ne savait absolument rien : armé de
il donnait l'ipécacuanah, et la scille
à ceux qui avaient du rhume, et prodiguait le séné, la manne
et la casse, aux infortunés qui auraient dû vomir... Revenons
aux
princesses royales. L'une d'elles, une délicieuse favorite,
exprima à Àrago le désir de se voir tatouer, sur le postérieur
sa
«
(Rives)
boîte à médicaments,
un
cor
de chasse
».
Arago s'empressa, avec la joie que l'on devine, de dessiner
musique sur la peau délicate de la favorite...
Ce dessin devait ensuite être piqué par un opérateur indigène
et Arago était convié à venir — en petit comité — juger, le
lendemain, du résultat de ses travaux... il ne se fit pas prier...
Rives marié à deux jolies Sandwichiennes fait quelques
difficultés pour les laisser voir à ses compatriotes.
« Hélas le
pauvre Rives jaloux comme un Européen vantard,
délicat et susceptible comme un Gascon aimait tant la bonne
chère, qu'on lui faisait faire à bord, il y vint si souvent, si
souvent, que ses deux gentilles épouses qui l'aimaient comme
on n'aime pas, le supplièrent de ne nous quitter que fort rare¬
ment, tant elles étaient heureuses d'écouter les détails pleins
d'intérêt, qu'il s'amusait à leur donner sur notre vie intérieure...
De notre côté, comme nous avions de plus graves études à
faire à terre que sur la corvette, nous ne rentrions pas toutes
les nuits, et l'hospitalité étant une vertu sandwichienne, l'on
comprend nous ne couchâmes jamais à la belle étoile.
l'instrument de
(1) Itienzi océanie, tome II,
Société des
page
75.
Études
Océaniennes
—
Au
leux
802
—
surplus, les nattes du sybarite Rives avaient un moel¬
égal à celui de la couche de Rio-Rio lui-même... »
Bref Rives
sacrifiait, dans toute son ampleur, à
et fidèlement respectée
moiieresque bien établie,
une
par
tradition
les navi¬
gateurs.
Àrago, toujours sareastique, ajoute ce trait : « Je vous ai dit,
je crois que Monsieur Rives avait quatre pieds et deux ou trois
pouces ; eh bien je l'ai grandi, je l'ai « appollonisé », sa taille
exacte est de trois pieds onze
pouces cinq lignes, ni plus, ni
moins...
»
Rose de
Freycinet, femme du commandant,
note plus simple¬
Rives. On relève, dans son « Journal »
les deux passages suivants (1) concernant notre Gascon :
ment, la rencontre
avec
Louis a reçu ce matm une députation de la
part de Sa
Majesté Sandwichienne... l'un de ses membres était un prince,
frère de John Adams, d'une taille aussi
gigantesque que la
sienne, l'autre est un français, Gascon qui a pris, ici, en cette
qualité, probablement, et qui parait être bien à la Cour »...
«
Puis
«
Le
que
le
un
peu
plus loin (2)
Commandant
(son mari) vient d'acquérir la preuve
Rives, qui, lui servit d'interprète à Koai-Haï,
est un
impudent fripon. Par bonheur il n'avait pas reçu
d'avance, le prix des cochons qu'il se vantait de nous faire
livrer par ses prétendues propriétés à Maui, où il n'a
pas un
pouce de terre, ni quoique ce soit, si ce n'est la réputation
bien méritée, dit-on, d'être un
intrigant »...
Quoiqu'il en soit, au cours de cette courte relâche, Kalanimokou, alors premier ministre et son frère Boki, instruits,
parait-il, dans la religion catholique (sans aucun doute par les
soins de J.B. Rives) avait été solennellement
baptisés par
l'Aumônier de 1' « Uranie », l'abbé de Quelen.
gascon
Ce succès flatteur pour les catholiques avait dû attirer sur
Rives la bienveillante reconnaissance de cet Aumônier, dont
un
très
hautes
Dans
cet
proche parent était appelé, bientôt, à
charges écclésiastiques en France.
un
moment
auteur nous
où
apprend
exercer
de très
Arago fait preuve de plus de sérieux,
que la carrière de Rives à la cour de
(1) et (2) Rose de Freycinet
1927, pages 101 et 106.
Société des
:
Journal du Voyage autour de Paris
Études
Océaniennes
—
803
—
Tamehameha, avait dû être entravée par sa petite taille, les
n'ayant de respect que pour les hautes statures,
ce
qui n'était évidemment pas le cas de notre minuscule Gascon.
Sandwichiens
Il
de
fait
qu'il perdit, assez rapidement, son crédit,
merveilleuse, et quasi-miraculeuse qu'il avait
effectuée sur la personne de la Reine, à une date demeurée,
d'ailleurs, inconnue (!)...
En 1809 William Campbell (2) cite, un jeune Américain du
nom de
Moxley, comme interprète du Roi...
En 1816 on trouve (3) un Portugais, Elliot de Castro, quali¬
est
après la
fié de
«
cure
favori
et
médecin du Roi
»...
Sandwich tout à fait au début de
nom prédestiné — mais sans au¬
cun rapport avec J.B. Rives, ne nous parle pas un instant du
célèbre gascon. Par contre, il nous précise bien que le secré¬
taire particulier du Roi Rio-Rio, était, à cette époque, un
pseudo-Anglais (en fait Lusitanien) du nom d'Elliot (4), détail
qui confirme que Rives n'exerçait nullement cette charge, à
titre permanent à la Cour. Il semble, qu'en réalité, Rives ait
Roquefeuil, passé
1819
avec
«
aux
le Bordelais
»
—
confiné, de très bonne heure, dans la tâche utile, mais
plus obscure de teneur de livres, et de statistiques, pour les
douanes locales (c'était avant le fameux Douanier Rousseau, une
autre gloire méconnue de cet honorable Corps).
été
Comme
de
et
l'avions
déjà dit, on n'a pas encore réussi à
aux Sandwich du brave commandant
Rourayne vers 1808 (Coïncidence curieuse — cet officier,
le père de J.B. Rives se connaissaient sûrement. Ce fait
trouver
nous
trace du
voyage
(1) Mais voisine de 1812,
(2) Campbell
:
«
d'après divers recoupements.
Voyage round the world
»,
page
139.
(3) Mac Carthy
Choix de Voyages, Tome IX, p. 45 à 49 Kotzebue emmena
Bodëga, trois Russes et un Portugais nommé Jean
Elliott de Castro, qui s'était trouvé sur le navire russe, en qualité
de subrécargue, et qui avait été aussi emprisonné. Il fut, par la suite
très utile à Monsieur de Kotzebue, ayant résidé quelques temps dans
les îles Sandsvicb, en qualité de médecin et de favori du Roi Tameameah qui lui avait même donné des terres à Owyhee.
:
de la
(4) Un jeune homme blanc nommé « Cook » établi dans l'île depuis
quelques années, leur servit d'interprète (dans une de leurs visites au
Roi en 1816)... En fin Septembre 1817, ils sont reçus dans les mêmes
conditions par Tamea-meah.
Société des
Études
Océaniennes
—
804
—
résulte de la confrontation de leurs
Il aurait pu nous donner le nom du
embarquements respectifs).
favori du Roi à cette épo¬
que.
Par contre, en 1822, MMrs
Tyerman et Bennett, en voyage
d'inspection pour le « London Church Missionary » ne nous
parlent absolument pas de Rives. A la rigueur pourrait-on le
comprendre dans une phrase assez dédaigneuse, où ces Mes¬
sieurs parlent avec
quelque hauteur des Européens ou Améri¬
cains, de tout poil, végétant sur ces îles. « Au dîner public
donné le 4 Juillet,
apparut uu groupe singulier de convives :
Américains, Anglais, îliens des Sandwich, Africains et Espa¬
gnols des Colonies. Nous fûmes invités et traités avec grand
respect, mais nous nous retirâmes dès la fin du service » (1).
Kotzebue, consulté à son tour, ne dit mot de Rives, dans
aucun
vers
de
ses
deux voyages
effectués, l'un,
1825.
vers
1816, l'autre
Evidemment Kotzebue n'est passé à
Owyhee qu'en Août 1825,
c'est-à-dire qu'un an et demi avant le
départ de Rives pour
l'Europe. Cependant, s'il avait rempli un emploi marquant
auprès du Roi, avant son départ, Kotzebue, en historien, ou du
moins, en narrateur fidèle, n'aurait pas manqué de le citer.
Pour toutes ces raisons,
Rives tant à la cour de
n'a été
peut conclure que le rôle de
on
Tamea-meah, qu'à celle de Rio-Rio,
qu'épisodique, et en quelque sorte éphémère. Son action
n'a laissé aucune
d'un Davis, d'un
deste Elliott de
empreinte tant soit
peu
comparable à celle
Young, d'un Bingham, voire même d'un
mo¬
Castro.
*
*
*
D) Voyage du Roi des Sandwich
en
Grande-Bretagne (1823-
1824)
A
l'instigation des Anglais déjà résidant aux Sandwich, et
principalement des missionnaires de passage dans cet archipel,
et aussi à la suite de la remise d'un
joli navire tout équipé,
qui leur avait été gracieusement envoyé par le Roi Georges IY,
les souverains des Sandwich
en
se
décident à aller faire
Europe et particulièrement,
en
un
tour
Grande-Bretagne, où ils
comptaient demander au Roi confirmation de la protection qui
leur avait été généreusement
octroyée autrefois à titre pro(1) Tyerman et Bennett
:
Voyages
Société des
.
Études
.
Tome I,
page
Océaniennes
469.
805
—
visionnel
—
Vancouver avec promesse formelle, — d'ail¬
— d'un envoi prochain de missionnaires.
On rapporte que lorsque le roi Rio-Rio et la Reine, accom¬
pagnés d'un certain nombre de chefs (1) prirent passage à bord
de 1' «Aigle», (27 Novembre 1823), navire
de commerce an¬
glais, Capitaine Starbùck frété pour les porter en Europe,
leurs,
ils
par
non
tenue,
emmenèrent
interprète
avec
eux
J.B.
Rives
«
comme
conseiller
et
».
Mais, en fait, les choses se passèrent beaucoup moins sim¬
plement. Il paraîtrait qu'une intrigue assez compliquée, et bien
dans le style océanien se serait alors déroulée, à ce
sujet, avant
l'appareillage de « l'Aigle ».
Voici les renseignements, encore peu connus en
France, que
nous avons
pu recueillir sur ce point particulier. (2)
« Une
bonne part de mystère s'attache au dernier membre
de l'escorte royale. Il semble s'être
désigné lui-même, peutêtre avec l'aide du capitaine Starbùck. Il
s'agit du Français
«Jean Rives» ou «John Rives»
Il avait été surnommé par les
comme il finit par être connu.
Hawaïens « Luahiné » (c'est-àdire vieille femme), et d'après la
description qu'en a faite
Arago, il justifiait entièrement, par son aspect physique, ce
surnom.
Il n'est
signalé dans
aucun
des comptes-rendus contemporains
ayant été invité à se joindre à la mission, bien qu'il
fût à Lalabaina, dans le cercle de la Cour, et il
partit avec
comme
ce
capitaine quand « l'Aigle » appareilla pour Honolulu. Néan¬
moins, il semble qu'il ait été accepté par le Roi, et qu'il lui ait
servi de secrétaire et d'interprète. D'après certains autres
renseignements il aurait embarqué à bord, secrètement.
(1) Voici les personnes qui partirent avec lui : deux de ses tantes,
trois gardiens, deux favoris, deux
domestiques, deux étrangers
dont l'un était de France (f) et l'autre moitié
étranger, moitié ha¬
waïen, douze en tout (Ka Mooolèlo Hawaï, page 203). L'auteur Jules
Rérny ajoute en note (f). Le matelot Rives de Bordeaux ! qui s'était
fixé et marié dans les îles où il n'a laissé
qu'une réputation douteuse.
avec
(2) Aimablement communiqués, en Août 1957, par Miss Clare G.
Murdoch, du Bishop Muséum d'Honolulu (Section d'Hawaï et du Pa¬
cifique) d'après un « Essai » sur ce voyage historique, lu par Frank
Lester Pleadwell, en juin 1952 lors d'un
congrès — sans doute tenu
à Honolulu
et par le
dépouillement de plusieurs numéros du
journal local « Polynésian ».
—
Société des
Études Océaniennes
—
806
—
Jean Rives appartenait à
une respectable famille vivant
près
possédait seulement les rudiments d'une bonne
éducation avant qu'il ne prit la mer ; il
débarqua aux Hawaï
vers 1801
(1). Ayant acquis une certaine pratique pour parler
et écrire le
hawaïen, il fut employé par le Roi, comme secré¬
taire et interprète, mais un
peu plus tard, fut supposé avoir,
perdu la faveur de Rio-Rio (2).
de Bordeaux. Il
Pendant les nombreuses années de sa
résidence, il avait reçu
en cadeaux.
Quand le navire fran¬
çais « l'Uranie » capitaine de Freycinet, relâcha dans ces îles
de certains chefs des terrains
(1819) Rives servit d'interprète
Dans
«
son
«
Journal
impudent fripon
»
ce
au
Roi.
commandant cite Rives
comme
un
(rascal), petit de taille mais large d'idées.
L'acceptation de Rives sur « l'Aigle » semble liée au rejet par
Starbiick, de William Ellis (3) et de sa femme en qualité de
passagers. Mrs Ellis se trouvait, alors, malade, et son époux
désirait, très vivement, la ramener en Angleterre. Rio-Rio
souhaitait jouir des services d'Ellis
; Kalanimoku
(4) et les
»
autres chefs
désiraient aussi, qu'il
accompagnât le Roi. Starbiick
donna comme raison de son
refus, qu'il manquait de place à
bord ; mais lorsque le docteur
William, le médecin de « l'Ai¬
gle
offrit de leur céder sa chambre, cela ne changea rien,
lorsque le Roi eût accepté de payer grassement le passa¬
ge de ces voyageurs supplémentaires.
Cette privation des services d'un conseiller et
interprète capa¬
ble, devait avoir de sérieuses répercussions en Angleterre,
à la
»,
même
(1) Cette date de
1801 parait erronnée :
Arago rapporte qu'en
1819, Rives se trouvait dans les îles
depuis 15 ans ; d'autre
part, Rives en Octobre 1824, confiait au baron de Damas,
qu'il avait,
à cette
époque, déjà passé dix-huit ans aux Sandwich. Il faut ajouter
à cette résidence au moins un an de
navigation, plus deux ans de
séjour en Europe, ce qui donne vingt-et-un ans depuis son
départ de
France, soit 1804. Enfin, d'après sa biographie, relatée
par Arago,
il aurait bien quitté
Bordeaux vers 1804.
Août
(2)
Inexact. Le
surtout
cKefs
conférencier
exercé l'art du
«
taoté
du pays.
»
semble
avoir ignoré que Rives a
(médecin indigène) auprès des grands
(3) Ellis, pasteur protestant, auteur des célèbres « Polynésians re»
et d'un
remarquable livre sur les Iles Hawaï.
(4) Kalanimoku, Ministre, plus tard surnommé « Pitt », converti
searches
au
catholicisme par
l'abbé de Quelen.
Société des
Études
Océaniennes
—
mort du Roi. Les
807
chefs de la suite
—
royale
se
méfiaient,
en
effet,
de Rives.
Peu de temps
après le décès de Rio-Rio, Boki (1) le renvoya,
mauvaise conduite répétée ». Il passa alors, en France,
(2) raflant, incidemment, la montre en or du Roi, mais les
autorités britanniques, réussirent alors à la récupérer (3).
En
France, il se fit passer pour un riche propriétaire installé
aux
Ilawaïs, et entra en pourparlers, qui furent regardés com¬
me assez douteux
(4) puis Rives quitta la France. Quand les
chefs rentrèrent dans les îles ils décidèrent, à l'unanimité,
de
lui retirer les terres qui lui avaient été octroyées.
pour «
On suppose que
Rives est mort à Mexico en 1833.
Après avoir doublé le Cap Horn « l'Aigle » traversa l'Atlan¬
tique.
Il fit escale à Rio-de-Janeiro où ils furent
paraît-il
aimablement reçu par l'Empereur du Brésil Don Pedro
fort
(5).
Tandis qu'il se trouvait à Rio, Jean Rives exerça les fonc¬
tions d'interprète auprès du Consul Britannique, et des autres
personnalités officielles. Quand le Consul Britannique découvrit
que James Young était capable de remplir les mêmes fonctions,
il eut recours à lui, et ne s'occupa plus de Rives. C'est pour
cette raison que Rives devint jaloux de Young, et conspira pour
se débarrasser de lui. Un
jour qu'il était à terre, on tendit à
Young une note du Roi, lui prescrivant de ne plus revenir à
«
(1) Boki, premier ministre,
après la mort de Rio-Rio.
(2) Le
Monsieur Rives
pour
la
direction
de
l'Ambassade
du 19 Juillet 1824 porte cet entrefilet :
se
rendre en France, cette semaine,
régler quelques affaires relatives à sa Défunte Majesté.
«
Morning Herald
prend
»
l'intention de
a
(3) D'après le texte de James Young, Rives mit cette montre en
à Londres. En Janvier 1851, James Young écrivit à Robert C.
Wyllie qu'il n'avait pas eu connaissance de la dernière position de
gage
cette
montre.
affirmation paraît contestable : Rives réussit, tout au
de son séjour en France, à faire grande impression
sur
le Ministre des Affaires Etrangères, le Baron de Damas. Il lui
remit plusieurs rapports, sortes de mémoranda. Nous les citerons, en
partie. Il devint suspect à certains armateurs, par ses hâbleries, mais
il réussit, auprès de certains autres.
(4) Cette
moins
au
début
(5) De Varigny
:
Quatorze années
aux
Sandwich,
p.
56...
—
bord.
Boki,
808
—
la suite, expliqua que Rives et Starbiick
instigateurs de cette note
en
conséquence
Young fut « laissé au sec » lorsque « l'Aigle » appareilla.
Cependant Young réussit à prendre passage sur un autre
navire cinglant vers
l'Angleterre et rejoignit ses associés à
Londres : mais il ne semble
pas qu'il ait été de nouveau reçu
par le Roi Rio-Rio. Ce qu'il pourrait y avoir,
au juste, à la
base de toute cette
intrigue n'a jamais été mis en lumière d'une
façon satisfaisante, mais James Jarves était convaincu que
le
refus du capitaine Starbiick de recevoir
William Ellis comme
passager avait quelques rapports avec les coffres-forts du Roi.
Ce capitaine désirait s'assurer le
règlement de toutes les dé¬
par
avaient été les
—
penses en cours de route, saus avoir à recourir à l'assistance
de qui qe ce fût, si ce n'était celle de
Rives.
Ellis, naturellement,
n'aurait voulu
tremper dans aucune
plus d'ailleurs qu'aucun des chefs
indigènes, sans en exclure Young ».
Jarves pense donc que
Starbiick, et Rives avaient poussé le
Roi à reprendre ses habitudes de buveur et de
joueur de cartes,
et ainsi exerçaient une sorte de contrôle
sur lui
(car ils étaient
ses
partenaires) contrôle que nos deux conspirateurs désiraient
étendre à ses coffres-forts. Il est
significatif de rappeler que
lorsque ces coffres-forts furent ouverts à la banque d'Angleterre,
on eut la
surprise de constater qu'ils contenaient seulement dix
mille dollars en
espèces. Or, ils étaient supposés avoir contenus
vingt cinq mille dollars lors du départ des îles. Il y avait bien
eu des
dépenses à Rio pour solde de distractions
les plus
diverses
puis d'autres dépenses pour aller de Porsmouth à
Londres. Starbiick avait déclaré
qu'il avait dépensé à Rio trois
mille dollars. Ce compte
— plus ou moins
fantastique — lais¬
sait encore un découvert de douze mille
dollars, non justifié,
différence que nul ne semblait
capable (ou désireux) d'expli¬
combinaison
louche,
pas
—
—
quer.
*
Le
reçus
*
*
Roi, la Reine, et leur suite furent aussi très courtoisement
à Londres ; ils descendirent, paraît-il, à « L'Osborne
Hôtel»
(1).
La Société leur fit fête.
Malheureusement le couple royal attrapa la
rougeole. Les
(1) De Yarigny
:
Quatorze années
Société des
aux
Études
Sandwich,
Océaniennes
p.
56.
—
chefs
hawaïens
en
furent
rapidement. Il n'en fût
La
Reine
mourut
la
pas
809
—
aussi
atteints, mais se rétablirent
de même pour leurs Souverains.
première, le 8 Juillet. Le Roi allait
lui, une grave re¬
(1824) —.
mieux. Cette triste nouvelle provoqua, chez
chute. Il mourut à son tour le 14 Juillet —
Georges IV n'avait pas encore eu le temps de les recevoir et
protection qu'ils venaient solliciter.
de leur accorder la
Quelques jours avant la mort de Rio-Rio, Rives, à la de¬
Roi, avait préparé un testament, mais il ne fut signé
que quelques heures avant le décès du souverain. Boki, à la
demande du Roi attesta la volonté de celui-ci, parce qu'il était
si faible qu'il ne pouvait tenir sa plume, mais
après que Rives
eut expliqué au Roi que le document ne serait
pas valable s'il
n'était pas signé de la main propre du testateur, le Roi
prit la
plume et avec l'aide des témoins apposa sa signature sur ce
document, fait qui fut certifié par le Docteur Ley, par Mon¬
sieur Peregrine, Boki, et le reste de la suite.
On peut penser que Rives avait obtenu en temps voulu une
délégation écrite du Roi pour le représenter en France, ou qu'il
avait su extorquer une signature du Roi à cet effet.
Le Roi Georges IV fixa au onze Septembre 1824 le jour de
l'entrevue qu'il réservait à Boki et à ses compagnons au
Château de Windsor. Ils furent conduits à la Résidence Royale
par « l'Honorable Mr Byng ».
James Young qui avait succédé à « John Rives » comme in¬
terprète, fut placé le plus près de Sa Majesté ; ensuite venait
Boki, et puis les autres, par ordre de préséance »...
mande du
On trouve
une indication intéressante sur le
passage de Rives
Grande-Bretagne dans le Journal de Mrs Arbuthnot (18201832) (1) « le trente Mai 1824 j'étais allée, la nuit précédente
chez Monsieur Canning, pour voir le Roi et la Reine des Iles
Sandwich, qui sont arrivés tout dernièrement en Angleterre.
Je me demande Dieu pourquoi car ils ne
comprennent pas un
mot d'anglais et qu'ils ont un très mauvais
interprète (ce très
mauvais interprète était, alors, vraisemblablement, Jean-Baptiste
Rives, James Young d'après la date citée, n'était pas encore
arrivé du Brésil)...
en
(1) Mrs Arbuthnot, jeune amie de "Wellington, femme du monde
La Comtesse de Boigne la cite dans ses Mémoires
Tome I,
312. Elle aurait eu des prétentions au cœur du Général.
connue.
p.
—
Société des
Études
Océaniennes
810
—
Le
—
mystère qui n'a cessé de planer sur ce voyage des îles
en
Grande-Bretagne a suscité de nombreux commen¬
Sandwich
taires.
Une
enquête officielle a été ouverte à ce sujet, en 1851,
auspices de Robert G. Willie, Ministre des Affaires
Etrangères du Royaume d'Hawaï.
sous
les
A la suite de huit questions précises, posées à James Young,
Ganéhoa, Gouverneur de Maui (ce même Young qui avait
accompagné le Roi en Grande-Bretagne (1823-1824), on peut
trouver dans le
journal d'Hawaï, le « Polynésian » les réponses
suivantes faites aux dites questions :
Palais du
Cher
Gouverneur, Lahaina, le 31 Janvier 1851.
Monsieur,
J'ai l'honneur de
tre du 27 courant et
à
vos
questions
sur
le
accuser réception de votre let¬
permettrai de répondre comme suit
vous
me
:
1°) J'ignore la
Roi
je
exacte embarquée pour les besoins du
l'Aigle ». S.E. Kekuanaoa, Gouverneur
savoir davantage que moi-même sur cette
somme
navire
«
d'Gahu, pourrait en
question.
2°) J'ignore quelle somme d'argent fut dépensée, si ce n'est
que le capitaine Starbuck et « John Rives » dépensèrent des
sommes considérables, mais (je
n'ai aucune idée de leur chiffre
exact), à Rio-de-Janeiro pour ravitailler le navire.
John Rives, d'après ce que j'ai entendu dire aurait mis en
gage une montre en or, avant mon arrivée dans cette ville. Ce
qu'il est advenu de celle-ci, je n'en sais rien.
3°) Je ne connais pas les ordres que le roi a pû donner à
Boki avant sa mort, ni les pouvoirs qu'il a pû lui conférer,
n'ayant pas été présent à cette entrevue.
4°) Je ne sais si quelqu'un a donné des ordres à John Rives
pour se rendre en France, après le décès du Roi. Il alla là-bas,
parait-il, pour voir des amis (d'après ce que j'ai compris).
trône après
(le Roi actuel).
6°) Le différend qui s'est élevé entre Rives et moi n'a pas
eu lieu à Londres, mais à Rio : il était suscité par la
jalousie
de Rives. Rives exigeait du Roi, à Rio, qu'il me défendit de
parler Anglais. Quand le Consul britannique découvrit que je
5°) Boki répondit
sa
mort serait
au
Roi
que son successeur au
Kakaui Kaouli
—
811
—
parlais anglais il n'accorda plus aucune attention à Rives,
dant le temps que je restais avec le Roi.
pen¬
7°) Boki ne donna jamais aucune raison particulière au su¬
jet de la confiscation des terres ayant été attribuées à Rives
(antérieurement) et reprises à celui-ci, au retour de « La Blon¬
de » à Hawaï (1825) : la seule raison qui put être invoquée
était « la mauvaise conduite », tenue par Rives pendant son
séjour à Londres.
A Rio-de-Janeiro, un
fut envoyé au nom du Roi,
repartir avec le navire : ceci me
Boki, comme ayant été provoqué
message
m'enjoindre de ne
fût, plus tard, expliqué
par Rives et Starbiick.
pour
pas
par
Ma propre opinion et celle des chefs accompagnant le Roi
était que la jalousie de ces deux hommes (contre moi) pro¬
venait de ma connaissance de la langue anglaise : ils désiraient
garder le Roi entièrement
sous
leur
propre
influence.
À mon arrivée à Londres le Roi était,
dernière maladie : je ne fus pas autorisé
fus-je informé
que par
alors, atteint de
à le voir, aussi,
Boki de l'influence de Rives.
sa
ne
Après la mort du Roi et le départ de Rives pour la France,
un interprète, et sachant que
je n'avais pas quitté Londres, me firent rechercher et ils me
trouvèrent et toujours, depuis ce moment, jusqu'à leur arrivée
(aux îles Sandwich) je restai avec eux. Au sujet de ma sé¬
paration avec le Roi, depuis Rio jusqu'à sa mort je ne sais rien
(si ce n'est par oui-dire) de sa manière d'agir (1).
les chefs étant désireux d'avoir
James
était
Young Kanahoa mourut
arrivé
été maître
un
en
Octobre 1851
îles Sandwich antérieurement à 1790,
aux
(2). Il
ayant
d'équipage d'un navire anglais (3), avant de devenir
favori de Tameameah.
Les
réponses précédentes projettent quelque lumière sur les
agissements de Rives au cours du voyage du couple royal.
La corvette
fut
chargée
«
la Blonde
par
» commandée par le capitaine Byron,
le Roi Georges IV, de reconduire l'Ambassade
Sandwichienne à
sa
destination...
(1) Polynésian
:
Samedi 11 Octobre 1851,
page
86.
(2) Polynésian
:
Samedi 14 Octobre 1851,
page
82.
(3) Mac Carthy
:
Choix de
voyages,
Tome IX (Océanie).
Société des Études Océaniennes
—
Le 4 mai
Lahaina
De
suivant
(1825)
812
«
—
la Blonde
»
mouilla
en
rade de
(Maui).
là, «lie
se
à « Hono-Rourou » (Honolulu), île
royale, et le centre de toutes les opérations
rendit
devenue la résidence
commerciales.
Des cérémonies
qui durèrent plus de quinze jours eurent lieu
célébrer les funérailles du Roi (et de la Reine) que
assurer la réception des chefs et celle du « captain Byron^.
tant pour
pour
(à suivre)
Cdt J. COTTEZ.
Société des
Études
Océaniennes
813
—
—
DIVERS
OBSERVATIONS SCIENTIFIQUES FAITES A TAHITI
à l'occasion de l'Année
Géophysique Internationale 1957-58
le but des observations scientifiques
Géophysique Internationale ( en
abrégé A,G.L ) est d'obtenir des renseignements sur certains
phénomènes physiques à l'échelle planétaire, par une concen¬
tration des observations dans le temps et dans certaines ré¬
gions privilégiées.
Rappelons d'abord
que
fai tes à l'occasion de l'Année
Une
quarantaine de pays se sont mis d'accord sur le pro¬
des observations à effectuer et il a été décidé de les
commencer
en
juillet 1957 et de les poursuivre jusqu'à fin
janvier 1959.
gramme
On multiplie les observations au maximum dans les régions
polaires et dans une « ceinture équatoriale » ainsi que le long
de trois méridiens choisis parce
de terres émergées.
TAHITI
ture
a
été choisi
équatoriale
Le programme
MAGNETISME
»,
au
en
qu'ils contiennent le maximum
raison de
sa
situation dans la
des observations que l'on
1
«
cein¬
milieu d'une vaste immensité d'eau.
y
fait est le suivant
:
Enregistrement continu des variations du
champ magnétique terrestre.
Les
appareils sont installés dans un abri et un petit « fare
situés dans la partie Est de MOTU TAHIRI, qui est,
rappelons-le, le nom de l'ilôt sur lequel se trouve l'hydrobase.
niau»
2
Enregistrement à grande vitesse des pulsa¬
tions magnétiques pendant une heure toutes
les six heures.
Les appareils seront installés sur le terrain du R.G.R. à
FAAA, au-dessus de la pointe HOTUAREA. Ils ne sont pas
encore au complet à la date actuelle.
Société des
Études
Océaniennes
—
SISMOLOGIE
814
—
Enregistrement continu
pour
des périodes voi¬
sines de 10 secondes.
Une
été installée dans un local de l'ancien
n'y a actuellement que deux sismo¬
graphes horizontaux. Le 3ème sismographe vertical doit par¬
cave
sismique
a
fort de TARAVAO.
Il
venir ultérieurement.
On
peut noter que les fortes vibrations apportées au sol
TAHITI, par la houle, empêchent d'utiliser les instruments
de
au
maximum de leur sensibilité.
RADIOASTRONOMIE
Enregistrement continu
du
soleil
sur
169
des émissions
Me.
Un réflecteur
parabolique de 5 mètres de diamètre est ins¬
sur le
terrain du R.G.R. Les appareils
enregistreurs sont logés dans une baraque métallique voisine.
tallé
HOTUAREA
à
Cet appareil travaille en liaison avec un appareil
de l'Observatoire de MEUDON en FRANGE.
METEOROLOGIE
identique
Radiosondages biquotidiens, lors des jour¬
nées mondiales.
Le Service local de la Météo
a
été doté de
reils de
nouveaux
appa¬
radiosondages qui lui permettent d'obtenir des
seignements sur la composition de l'atmosphère jusqu'à
ren¬
une
trentaine de kilomètres. Les indications sont envoyées par ra¬
dio par les ballons sondes qui sont
de l'hydrobase à MOTU TAHIRI.
SONDAGES
IONOSPHERIQUES
lancés et suivis à partir
Recherche de remplacement
des couches ionisées de l'io¬
nosphère tous les ljé d'heu¬
res.
Etude des
Etude de
Seule
la
ionosphériques »
l'absorption des ondes.
de
vents
première partie de ce programme est réalisée.
plus importante. Des retards apportés aux
matériel de FRANCE ont empêché d'achever les
C'est d'ailleurs la
envois
«
autres installations.
—
La station est bâtie
en
815
—
bordure de l'Anse TEHI PATOI à
appareils radio d'émission et de ré¬
ception, les pylonnes et les antennes sont installés au-dessus du
plan d'eau, ce qui assure de remarquables propagations des
ondes. L'absence de parasites électriques, cette excellente pro¬
pagation radioélectrique font de cette station une des meilleures
stations de sondages ionosphériques françaises, et il est pro¬
TARAVAO. Le local des
bable
qu'elle
sera
maintenue après la fin de l'Année Géophy¬
sique.
OCEANOGRAPHIE
Etude des variations du niveau moyen de
l'Océan.
Enregistrement permanent des houles à longues
pé¬
riodes.
Les
instruments
sont
abrités
dans
une
cabane située
au
proximité du tom¬
beau POMARE. Cette cabane est affreuse et gâche certainement
le paysage, mais il était difficile de trouver un meilleur em¬
placement dans des conditions aussi favorables et la certitude
que cette construction sera démolie à l'issue de l'A.G.I. a fait
que l'on ne s'est pas trop arrêté sur le problème de la pro¬
bord du récif dans la Baie de MATAVAI, à
tection du site.
Cette station
très
fortes
a
parfaitement enregistré les phénomènes de
journées du 15 janvier et suivantes.
houles des
dépouillement des enregistrements des autres stations étran¬
gères analogues ne nous est pas encore parvenu. Mais l'on se
trouve certainement devant un phénomène relativement rare
de 2 « vieilles houles » de périodes longues et voisines, dues,
l'une à un cyclone dans la zone des MARSHALL, l'autre à
une dépression
très creuse du Pacifique Nord. Ces 2 houles
se sont combinées à la hauteur de notre région principalement
et ont occasionné des dégâts sur les Côtes exposées du N-E
au N-W en passant par le Nord.
Le
En plus de la station de la Baie de MATAVAI, on peut noter
l'existence de 2 autres stations, situées respectivement à TAKAROA et à RURUTL) où sont étudiés les mêmes phénomènes.
Elles sont financées par
cord du Gouvernement
l'Université de Californie avec l'ac¬
Français.
—
816
—
Le
personnel responsable des travaux se compose de 7 per¬
venues
spécialement h TAHITI, sous la direction du
Capitaine de Frégate NAY, détaché par la Marine Nationale,
à l'occasion de l'A.G.I. De plus certains travaux sont exécutés
par le personnel de cerïains services locaux, en particulier
sonnes
ceux
Un
de la Météo et de la Marine Nationale.
budget strictement métropolitain couvre toutes les dé¬
tant celles d'installation que celles d'entretien et de
penses,
fonctionnement. Ces
sion,
se monteront
sommes laissées à TAHITI, à cette
à environ 4 millions de fcs CFP.
occa¬
Il est trop
de
tôt pour faire le bilan scientifique de la station
TAHITI, mais des résultats intéressants ont déjà été re¬
cueillis ; certains d'entre eux sont tout à fait curieux
inattendus, spécialement en sondages ionosphériques.
et
Papeete, le 20 Mars 1958.
Capitaine de Frégate NAY,
Chef de la Station de TAHITI
de l'Année
Société des
Études
Géophysique Internationale
Océaniennes
Le Bulletin
accepte l'impression de tous les
dans
le
qui paraissent
Bulletin mais cela n'implique pas
qu'il épouse les théories qui y sont exposées, ou qu'il fait sien
les commentaires et les assertions des divers auteurs qui, seuls,
en
prennent toute la responsabilité.
Le
Bureau
de la Société
articles
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Le Bulletin
ne
fait pas
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La Rédaction.
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l'auteur a réservé ses droits, peuvent être traduits et reproduits,
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Les
articles
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somme
l'Etranger, 15 livres sterling
Le
versée
se
une
faire recevoir Membre à vie
fois pour toutes.
Intérieur. Bulletins N° 17
ment
1°
à
40 dollars.
Bulletin
continuera
à
lui
et
pour cette
(Article 24 du Règle¬
N° 29).
être
adressé, quand bien
même il cesserait d'être Membre résidant à Tahiti.
2°
du
Le Membre à vie n'a
paiement de
sa
plus à se préoccuper de l'envoi
cotisation annuelle, c'est une dépense et
ou
un
souci de moins.
En conséquence : Dans leur intérêt et celui de la Socié¬
té, sont invités à devenir Membre à vie :
TOUS CEUX
qui, résidant hors de Tahiti, désirent recevoir
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TOUS LES Jeunes Membres de la Société.
TOUS
même.
CEUX
qui,
quittant Tahiti, s'y intéressent quand
Fait partie de Bulletin de la Société des Études Océaniennes numéro 123