B98735210103_035.pdf
- Texte
-
1930
MARS
Anthropologie
Histoire
—
des
—
Ethnologie
—
Philologie.
Institutions et Antiquités
populations maories.
Littérature et Folklore.
Astronomie
—
Océa.\pg^phie\y^ciences naturelles
Tourisme.
IMFRIMK1UB
DU
OOUVBRHRMBKT
ft PAPEETE
(TAHITI)
*
été des
Études Océaniennes
publiés dans le Bulletin, exceptés ceux dont l'au¬
réservé ses droits, peuvent être traduits et reproduits
condition expresse, que l'origine et l'auteur en seront men¬
Les articles
teur y a
à la
tionnés.
Toutes communications
la Société.
•
doivent être
relatives
adressées
au
au
Bulletin au Musée ou à
Président. Boite 110,
•
Papeete, Tahiti.
envoyé gratuitement à tous ses Membres.
6 fr 50.
Le Bulletin est
Prix de
ce
numéro
Prix de
chaque N° déjà paru: 12 fr. ou
2/-d.
ou 50
cents.
30
francs.
Cotisation annuelle des Membres résidents
Cotisation
annuelle des Membres
résidents
pays français
Cotisation annuelle des
étrangers.
SOUSCRIPTION
trente
résidant à
40 fra ncs.
dollars ou 8 shillings.
UNIQUE.
Membre à vie résidant en France ou
Membre à vie
2
en
dans
ses
colonies. 500 fr.
l'Etranger, six livres sterling ou
dollars.
Avantages de se faire recevoir Membre à vie pou* cette som¬
versée une fois pour toutes. (Article 24 du Règlement Inté¬
rieur, Bulletins N° 17 et N° 2g).
me
i°
Le Bulletin continuera à lui être adressé,
quand bien même
il cesserait d'être Membre résidant à Tahiti.
20
ne
C'est la seule manière de recevoir le Bulletin pour ceux
résident pas
qui
dans la Colonie, puisqu'on ne reçoit pas d'abon¬
nements.
L'intérêt de cette modique somme assure à#la Société un
supérieur à la cotisation annuelle de 30 fr.
4" Le Membre à vie n'a plus à se préoccuper de l'envoi ou du
paiement de sa cotisation annuelle, c'est une dépense et un souci
30
revenu
de moins.
En
conséquence: Dans leur intérêt et celui de la Société,
à devenir Membre à vie:
sont invités
TOUS CEUX
qui, résidant hors Tahiti, désirent îecevoir le
Bulletin.
TOUS LES jeunes Membres de la
TOUS CEUX
Société.
•
qui, quittant Tahiti s'y intéressent quand même.
de
SOCIÉTÉ
da
D'ÉTUDES
OCÉANIENNES
(POLYNÉSIE ORIENTALE)
TOME IV
IV- 35.
(N* I)
MVRS 193».
—
s o nvc
a. x s, s
t ages
Assomhl^c
(jén/'rale.
Compte-rendu de l'Assemblée Générale du 25 jan¬
vier
4
1930
Voyages,
Voyage de Roggewein à travers les Tuamotu en 1722.
Rftfitififtations
14
24
LinnnistHfue.
Numération
polynésienne,
par
le R, P. Hervé Audran.
23
Poésie.
la
Tahiti! par E.
dejonquières
Réponse, par Delport (fragments).
Réplique de E. de Jonquières à Delport
orana
27
30
32
Avi
»
146 75
celui du 31
7.804 50
Cotisations 1929
»
il 805 95
Ecots, Dons divers
»
Bibliothèque
Divers (Société)
»
4.387 99
»
13.779 95
Musée
»
2 108 20
»
2.900 06
Solde
en
Caisse
au
31 décembre 1929
...
Compte Membre à Vie. (Dépôt
Solde
en
Caisse
au
23.323 55
23.323 55
Totaux
6%) ■ .
»
))
.
31 décembre 1929...
6.784 85
))
Papeete, le 31 décembre
1929.
Le Trésorier,
M. MAUNEY.
Biidj/et do lOîîO soumis à votre
approbation :
Reliquat de 1929
2.900
Allocation du Gouvernement
Musée
6.000
12.000
8.700
Allocation pour Econome
Cotisations des Membres.
Vente du Bulletin
66
(Bibliothèque et
i.
_
Divers
500
200
Total
30.300
66
Nos dépenses étant normales, tout irait bien s'il n'y avait pas
menacequ'elles soient anormales. En effet, votre Bureau qui rend
ce jour- ses pouvoirs entre vos mains, et vous rend compte de
ses activités, a, durant 1929 émis le vœu d'une statue à Pierre
Société des
Études
Océaniennes
Loti ; non pas que le Bureau
en
a
et si nous
ait pris la responsabilité, mais il
en
l'idée
pour la discuter dans cette assemblée générale
sommes tous d'accord elle
pourrait bien devenir une
conçu
réalité.
Notre rôle
de
vous
a
donc consisté à
rechercher les
en
les soumettre. Les voici
possibilités, afin
:
De la correspondance avec le
sculpteur, (une célébrité) M. Phi¬
lippe Besnard. il résulte qu'il accepterait de faire:
La statue pour
40.000
Y
10.000
ajouter le bronze
Transport et imprévu
frs,
20.000
Total
70.000
Ceci pourrait se réduire, si la Marine faisait présent
de quel¬
vieux canons, si les Messageries se chargeaient du trans¬
ques
port à titre gracieux, si les Travaux Publics érigeaient le piédestal.
Mais où trouver ces 70.000 frs. ou plus, car il faut prévoir le
pire?.
Je demande la permission de faire un essai de programme
nous reprendrons
pour discussion, après les élections :
S. E. O. par
loterie, jeux ou fêtes
son Bulletin, et surtout
que
35.000 frs.
Souscriptions dans
dans des Revues Maritimes
25.000
La statue étant
exposée à Paris, (section de
tourisme) vente des ouvrages de Loti....
Don du Gouvernement local
5.000
10.000
Total
75.000
Au besoin la S. E. O. s'endetterait d'un maximum de
frs. Ceci serait la manifestation de 1930
de ce rapport.
dont je parlais
au
10.000
début
Je dois ajouter avant de terminer que'la Société a obtenu de son
la promesse ferme d'un film en cou¬
exprès pour l'Exposition de 1931, et
qui sera intitulé : Pêche à Tahiti de monstres marins.
Membre à vie, Zane Grey,
leurs qu'il va venir tourner
Nous voici arrivés à la fin de
nos
activités mais il
me
reste à
communiquer une chose très importante, dont votre Bureau
a cru devoir
s'occuper, je veux parler de 1'élection de son Bureau.
Et d'abord, je dois vous informer, et cela me donnera plus de
liberté pour vous exposer ensuite ce que j'ai à vous dire, que je"
vous
Société des
Études
Océaniennes
ne
de
suis plus candidat au poste que vous
me confier ces 4 dernières années, et
m'aviez fait l'honneur
cela pour raison d'ab¬
prolongée de la Colonie.
je vous prie de me suivre très attentivement.
11 nous a paru que notre Société venait de grandir. De même
qu'un adolescent n'est plus un enfant, elle a d'autres besoins et
les règlements qui régissent sa vie intérieure et extérieure, doi¬
vent être adaptés à son état de développement.
Creée, non par des citoyens de Tahiti, mais par Arrêté du Gou¬
verneur, il y 14 ans, elle n'est pas Société indépendante, d'ail¬
leurs ses règlements le disent formellement, le Gouverneur est
Tuteur de la Société, mais qui ;onque est en tutelle n'est pas indé¬
pendant.
Le but pour lequel elle a été créée est scientifique : Société
d'Etudes et d'études principalement dans notre partie de la Poly¬
sence
Ceci dit,
nésie.
Pour cela le Gouvernement nous loge dans ses bâtiments,
imprime nos Bulletins, il nous fait une allocation, et nous con¬
fie, j'appuie sur ce mot, la Bibliothèque et le Musee, dont il vient
de nommer un Curateur et à qui il sert une allocation, de même
qu'il entretient un gardien ou planton.
il
Conclusion
:
La Société d'Etudes Océaniennes est de création
son existence, sa subsistance et j'ajoute, son
succès, dépendent du Gouvernement, du moins pour le moment.
Les choses étant ainsi, il semblerait logique, n'est-ce pas, que
son Bureau fut nommé (comme d'ailleurs le fut son premier Bu¬
gouvernementale,
reau) par le Gouverneur, mais non, par une inconséquance inex¬
plicable, le Bureau est élu par les Membres de la Société!
Mais s'il est leur élu, il tient d'eux un mandat, il a pris envers
eux des responsabilités, il leur doit des comptes?.
Or, il n'en est rien, c'est d'abord à son Patron et Tuteur qu'il
doit tout cela; et, non seulement c'est juste, mais c'est même
indispensable à la vie de la Société; le contraire serait, ou le sui¬
cide par inanition, ou la lutte du pot de terre contre le pot de fer.
Mais alors pourquoi des élections? C'est précisément la question
que s'est posée votre Bureau, et la réponse a été qu'elles sont
tout au moins irrationnelles et pourraient être très nuisibles à
à notre Société, et voici comment :
Considérez, chers Collègues, que nous sommes plus de 300
Membres Résidents, et que 37 à peine ont répondu à la convo-
Société des
Études
Océaniennès
cation pour Elections à cette Assemblée
Générale, le Bureau va
donc être élu par un nombre infime de
voix données à ceux-ci ou
à. ceux-là. pour des raisons souvent autres
que le plus grand
bien de la Société.
Le Bureau élu pourra être
plus ou moins novice ou apte à ses
fonctions, et le Président que vous aurez élu, n'aurait
nouvelles
peut-être pas été leur élu à
D'où pas d'union, pas de force!
nôtre, une des principales causes
de succès, c'est de faire ŒUVRE DE
CONTINUITÉ et pour cela
une communion d'idées et
d'efforts est nécessaire a son Bureau.
Or. des élections ne garantiront
jamais cette continuité ni cette
communion. Donc il faut trouver autre chose.
Dans
Société
une
C'est à la suite de
coniser
une
suivante
eux.
comme la
ces
considérations que nous
avons cru
pré¬
composition du Bureau, par exemple de la manière
:
Le Gouverneur fait appeler un
Membre de la Société (le Prési¬
dent sortant, ou tout
autre) et il lui confie le soin de former un
Bureau. S il accepte, il s'entourera naturellement
des éléments
les plus qualifiés pour chacune des fonctions des
organes
vitaux
de la Société et il les soumettra au Gouverneur
(de même que vos
élus de ce soir seront soumis à son
S il
ne
réussit pas,
le Gouverneur
qu'au succès.
Seraient Membre de
approbation).
en tera appeler un autre jus¬
Outre les Membres à Vie, le Secré¬
la République et le Chef des Do¬
maines Eléments précieux pour
garantir la continuité de l'œuvre.
A ce Bureau, la haute direction et administration de la
Société;
toujours en étroite collaboration avec le Gouvernement qui con¬
tinuerait à mettre à sa disposition, non seulement
l'indispensable
à son développement, mais encore l'utiie et
taire
droit:
Général, le Procureur de
de personnel salarié et de monuments
la Colonie.
l'agréable, sous forme
dignes de la Société et de
Voilà, Chers Collègues, ce que votre Bureau avait
conçu pour
développement de la Société d'Etudes et il le
soumet aujourd'hui à votre
discussion, sous la direction bien¬
la continuité et le
veillante de M. le Gouverneur.
M. le
Gouverneur, Mesdames, Messieurs, je vous remercie de
avez bien voulu m'accorder.
l'aimable attention que vous
Emmanuel ROUGIER.
Société des
Études
Océaniennes
10
—
Lecture faite de ce
demande la parole.
—
Rapport. M. Ahnne, Secrétaire de Rédaction,
11 tient à
préciser que, quoique Membre du Bureau de la S. E. 0.;,
partage pas la manière de voir de ses collègues au sujet de
la modification des Statuts
proposée par le Président. 11 n'assis¬
tait pas à la Séance où cette motion fut discutée et
adoptée, sinon
il
ne
il l'eût combattue
comme
il croit de
son
devoir de la combattre
aujourd'hui, car il estime que la mesure proposée ne peut être
que préjudiciable à la bonne marche de la Société.
M. Rougier, dit-il, constate
que la Société agrandi, qu'elle s'est
développée, que l'enfant est devenu un adolescent qui a d'autres
besoins et d'autres apirations. Et il demande que cet adolescent
soit remis en lisières? Que ses
pouvoirs soient diminués, sa
liberté d'action limitée?.
•
.
Mais c'est
précisément le contraire qui devrait avoir lieu : l'en¬
fant devenu homme n'a plus besoin de tutelle, il faut
élargir ses
pouvoirs, développer son champ d'action, lui laisser une plus
grande initiative. Cependant M. Ahnne ne songe nullement à
demander l'émancipation de la Société; il estime que le
règle¬
ment actuellement en
vigueur qui fut élaboré par M. le Gouver¬
neur Julien, fondateur de la Société, a très
sagement défini et très
justement précisé les rapports qui doivent exister entre l'Admi¬
nistration et la Société des Etudes Océaniennes.
Le Gouverneur, dit l'art. M du Règlement intérieur est et de¬
meure tuteur moral de la Société
; aucune modification aux Sta¬
tuts, aucun acte de dissolution
probation
donnée à
;
il
son
pourra être fait sans son ap¬
soit par délégation
Secrétaire Général, d'assister à toutes les séances et
aura
droit, soit
ne
en
personne,
réunions.
Il ne saurait être question de s'affranchir de cette tutelle
qui a
toujours été très bienveillante et qui ne s'est affirmée que par des
marques d'intérêt comme celle que M.
vient encore de donner à la Société par la
neau comme
Il
n'y
comme
a pas
Bibliothécaire
et
le Gouverneur Bouge
nomination de M. Bru-
Conservateur du Musée.
de pot de terre et de pot de fer, il n'y
semble le craindre M.
a pas
de lutte
Rougier.
Mais M. Ahnne estime qu'on commettrait une
grave erreur en
direction de la Société aux mains de l'Admi¬
nistration ; ce serait détruire toute initiative,
toutes
remettant toute la
décourager
les
bonnes volontés, détourner la Société de son véritable but en en
faisant un simple rouage administratif où le rôle des Membres
Société des
Études
Océaniennes
i l
(s'il en reste âprès'cefte
tion annuelle.
M. Ahhne conclut
en
mesure)
_
se
réduirait à payer une cotisa¬
faisant observer que la Société est tou¬
jours régie par l'Arrêté constitutif du
Ier janvier 1917 révisé par
l'Assemblée Générale du 20 janvier 1927. L'art. XI.
prévoit que
■le Bureau sera obligatoirement soumis tous les deux ans à l'élec¬
tion. Ce renouvellement
tin
secret
et
à
la
(Art. IX) fera l'objet d'élections
majorité des suffrages exprimés,
Membres residents seuls.
En
au scru¬
par
les
conséquence, il demande qu'il soit procédé de suite à cette
élection.
L'Assemblée partageant cette manière de voir et M. le Gouver¬
faisant nulle opposition, on passe au vote et M. Ahnne
est nommé Président par 30 voix sur 36 votants.
neur ne
M. Ahnne remercie l'Assemblée de l'honneur
qu'elle lui fait et
de la marque de confiance
qu'elle lui donne en l'appelant à la
présidence. Il fera son possible pour que la Société ne périclite
point sous sa direction, mais il ne croirait pas pouvoir accepter
'cette charge et ses
multiples occupations sans l'aide précieuse
qu'il trouvera certainement en M. Bruneau. Et en son propre
nom aussi bien
qu'au nom de la Société, il tient à exprimer en¬
core à M. le Gouverneur toute sa reconnaissance
pour la nomi¬
nation de ce précieux collaborateur.
M. Ahnne rend encore hommage à son prédécesseur M. Rougier : "J'ai pu, dit-il. ne pas toujours partager sa manièrede voir
sur certaines questions, mais
je dois reconnaître et je suis heu¬
reux de'Ie dire ici
que, par ses qualités d'ordre, de méthode et dé
■sage administration, M. Rougier pendant les quatre années qu'ii
a
occupé la présidence a grandement contribué à la bonne marche
et au développement de la Société, en même
temps que par un
travail personnel souvent considérable il assurait la
publication
régulière du Bulletin et entretenait ou créait des relations avec de
nombreuses Sociétés correspondantes. Je le remercie très sincè¬
rement de tout ce
qu'il a fait, ainsi que les autres Membres du
Bureau, et particulièrement Mesdames Laguesse et F. Braultqui,
pour le Musee comme pour la Bibliothèque, n'ont épargné ni leur
temps ni leur peine : j'espère qu'elles voudront bien me continuer
leur précieuse collaboration.
•M. Rougier. dans son Rapport, a dit fort
justement qu'une
communion d'idées et d'efforts est indispensable à notre Société
pour faire œuvre de continuité.
Société des
Études
Océaniennes
—
12
~~
Cette communion d'idées et de goûts, tous les Membres de la
Société la trouveront dans l'amour qu'ils portent «à ce petit pays
où la destinée de leur libre choix les a appelés à vivre et qui n'est
qu'un prolongement de notie grande Patrie. En dehors de toute
politique ou religieuse, nous pouvons communier
dans le culte et l'étude du passé: que ce soit le glorieux passé de
la France ou le mystérieux et troublant passé de nos lies de
l'Océanie. Je sais bien que les jeunes ne comprennent pas tou¬
jours cet amour du passé; pour eux il n'y a souvent que le pré¬
sent ou l'avenir qui importe, mais ils verront que lorsqu'on
avance en âge on éprouve bientôt le besoin de se retourner
pour
voir la route parcourue, et que cette étude du passé est
singu¬
conviction
lièrement attachante et souvent féconde
le présent.
11 est ensuite
en
enseignements
pour
procédé à l'élection des autres Membres du Bu¬
reau.
M.
Mauney, Trésorier, déclare que ses occupations ne lui per¬
plus de remplir cette charge ; Mraes Laguesse et F. Brault
pensent que la nomination de M. Bruneau rend inutiles leurs
mettent
fonctions de Conservateur et de Bibliothécaire.
Après avoir pris l'avis de M. le Gouverneur, le Président pro¬
de réduire à cinq Membres la composition du Bureau, y
compris M. Bruneau qui est Membre de droit. 11 n'y aurait donc
qu'à elire : le Vice-Président, le Secrétaire-Archiviste et le Tré¬
pose
sorier.
L'Assemblée adopte cette nouvelle formation du Bureau et,
après plusieurs tours de scrutin, le Bureau est constitué ainsi :
M. C.
Bérard, Vice-Président,
Malardé, Secrétaire-Archiviste,
M. Yves
Mme
Augé-Daullé, Trésorière,
Le Président consulte ensuite l'Assemblée au sujet
du projet
mis à l'étude par M. Rougier : l'érection d'une statue à Pierre Loti.
Sans doute, il y aurait intérêt à faire revivre et à perpétuer
le cadre tahitien le souvenir de celui qui a tant aimé notre
dans
petit
pays, qui l'a si bien compris et dépeint, mais cette idée trouverat-elle les appuis nécessaires parmi notre public tahitien? Avec les
restreints dont dispose notre Société il ne faudrait pas
s'exposer a un échec.
Plusieurs Membres expriment des doutes touchant la réussite
de ce projet. M. le Dr. Cassiau, Maire de la Ville, pense que si on
moyens
Société des
Études Océaniennes
—
13
—
ne peut faire une
statue, on pourrait se contenter d'un buste
qui
s'harmoniserait peut-être mieux avec le cadre un
peu restreint
de notre ville.
La
un
question est mise
aux
voix et la
buste.
majorité
se prononce pour
Il est entendu
cependant que cette solution n'est pas définitive
si cela est possible, tous les Membres de la Société seront
consultés à ce sujet.
M. Massaïnoff demande la
parole.
En quelques phrases vivantes et
imagées, il dit le charme de
nos Iles du
Pacifique si riches en souvenirs du passé, où la légende
semble vous envelopper et dont on devra autant
que possible,
grouper au Musée tous les vestiges qui tendent de
plus en plus
à disparaître.
Il affirme que le Bulletin de la Société est
beaucoup lu et très
apprécié même à l'étranger; souvent des revues scientifiques lui
consacrent quelques-unes de leurs colonnes. Il
importe donc de
continuer a apporter beaucoup de soin à sa
composition et de le
faire paraître régulièrement.
Le Président répond qu'il
partage entièrement l'avis de M. Mas¬
saïnoff et qu'il compte tout
particulièrement sur sa collaboration
et que,
celle de tous les Sociétaires.
L'ordre du jour étant épuisé et personne ne demandant
plus la
parole, la Séance est levée à 19 heures.
comme sur
Société des
Études
Océaniennes
—
14
—
Yoyage de Roggewein a travers les Tuamotu
en
Communiqué
par
1722.
M. Kenneth Emory, à qui nous devons également
accompagnant cet-intéressant récit.
-
les notes
La relation suivante du voyage du fameux navigateur hollanT
l'archipel Tuamotu en 1722, et le récit de la perte
d'un de ses vaisseaux, est extraite entièrement de l'Histoire de
^expédition de trois vaisseaux aux Terres Australes en 1721, par
Behrens, deux volumes, La Haye, 1739 (vol. 1. pages 139-164;,
;
dais à travers
I
Découverte des Mauvaises-Eaux et de
cinq nou¬
II.—Description de ces îles. III.— Nau¬
frage et perte du vaisseau la " Galère d'Afrique".
I.
—
velles Iles.
partant de l'Ile de Pâques, nous avançâmes avec beaucoup
en sorte que nous fûmes en peu de temps à la hauteur
des Mauvaises-Eaux (1) de Schouten. Cette partie de la mer du'
Sud fut découverte par ce voyageur en 1615. Nous crûmes pou¬
voir, à cette hauteur, découvrir une partie des Terres Australes.
Mais, en changeant la route d'Ouest-Nord-Ouest en Sud-Ouest/
nous nous en détournâmes tous les jours. Comme nous nous
En
de
rapidité,
imaginions cependant être dans la-bonne et véritable, nous pas-*sâmes toujours par les Mauvaises-Eaux jusqu'à trois-cents lieues,
soit cent cinquante lieues de plus que n'a fait Schouten.
Ce Voyageur dit dans sa Relation sur ce sujet, qu'il avait vu un
jour une espèce de nacelle ou de canot qui, pour se sauver et lui
échapper, s'était enfui en prenant sa route vers le Sud ; de cela,
il conclut qu'il doit y avoir des pays habités de ce côté. Dans la
Carte que j'ai dressée des Terres-Australes, il y a une traite de
deux mille lieues. Pour y aborder, la route la plus sûre est celle
du Sud-Sud-Ouest, puisqu'on va droit au pays, ainsiqu'on fût
avec le cours de Nord-Est ou Nord-Nord-Est lorsqu'on veut abor¬
der sur les côtes de l'Amérique.
Nous avions déjà fait huit cents lieues depuis l'Ile de Pâques,
sans voir aucune terre, et tout le changement que nous avions
fait dans notre route était inutile, lorsqu'enfin, à la hauteur de
quinze degrés et demi de latitude méridionale, nous découvrîmes
une lie, (2) dont la situation était très basse, et les côtes remplies
Société des
Études
Océaniennes
—
15
—
de sable
jaunâtre. Comme on aperçut au milieu d'elle une espèce
Chefs présumèrent que c'était l'Ile des Chiens, (3) dé¬
couverte par Schouten, qui doit avoir cette particularité ; et c'est
pour cette raison qu'ils ne trouvèrent pas à propos d'y aborder.
Pour moi, je suis d'un sentiment différent et crois que Schouten
n'a jamais vu cette Ile. On trouvera que mon opinion à cet égard
est fondée, si l'on fait attention à ce que Schouten dit de l'Ile des
Chiens, de même qu'à sa longitude et à sa latitude; aussi j'ai
donné à l'Ile en question le nom de Carlshof, c'est-à-dire, Cour
de Charles, (p. 143). Sa situation est de 15 degrés 45 minutes de
latitude et de 280° de longitude; et son circuit est environ de
trois lieues. Nous nous éloignâmes donc de cette Ile sans l'exa¬
miner de près. Le vent alizé commença à changer et se rangea
au Sud-Ouest, ce qui est signe
de quelque terre voisine. Ce chan¬
gement poussa nos vaisseaux, la nuit suivante, entre plusieurs
Iles, sans que nous pussions nous imaginer que, dans cet endroit,
il duty en avoir. Notre vaisseau, la " Galère d'Afrique", étant
l'avant-voilier parce qu'il prenait le moins d'eau, s'engagea entre
quelques rochers, dont il ne put se détacher. Dans ce danger, ij
donna le signal coup sur coup. Le " Tienhoven", qui était le plus
éloigné, se mit d'abord en devoir de lui donner du secours et le
Vaisseau-Amiral, s'étant tourné pour le même but, (p. 144) se
trouva si près d'une côte que nous en eûmes une extrême frayeur.
On fit aussitôt jeter la sonde et, heureusement pour nous, on n'y
trouva pas de fond. Notre chaloupe se mit d'abord en mer pour
tâcher de sauver nos amis, On fit tout au monde pour dégager,
le vaisseau, mais inutilement;, la force du vent l'ayant poussé,
trop avant et serré entre deux rochers, dont on ne put le dégager.
Comme nous voyions l'impossibilité d'en venir à bout, nous ta,
de
lac,
nos
réussîmes assez.
de l'équipage avaient cependant été blessés par
qu'ils reçurent des rochers ; et tout le malheur
tomba sur un pauvre matelot du vaisseau le " Tienhoven
qui
voulant aider ses amis qui avaient fait naufrage, se noya. Les in-'
sulaires, au bruit qu'on fit de dégager le vaisseau, après avoir;
allumé (p. 145) des feux en plusieurs endroits, accoururent en
foule sur le rivage. Comme nous craignions qu'ils n'eussent
quelque mauvais dessein, nous fîmes feu sur eux pour les faire,
reculer. Le lendemain matin, nous vîmes clairement dans quel,
danger tous les trois vaisseaux avaient été la veille. Nous nous,
trouvâmes environnés de quatre Iles escarpées- de rochersj en
chaînes seulement de sauver le monde. Nous y
Plusieurs gens
les contusions
Société des
Études
Océaniennes
—
16
—
sorte que nous ne pûmes pas savoir par quelle route nous y étions
entrés. Nous eûmes donc de fortes raisons de remercier le bon
Dieu de
qu'il lui avait plu de nous préserver d'un danger si im¬
cependant pas tout-à-fait quittes, puis¬
qu'il se passa encore cinq heures, avant que nous pussions, al¬
lant tantôt à la bouline et tantôt par divers détours, gagner le
large. Pendant ce temps, ceux qui étaient restés dans le VaisseauAmiral, ne purent être informés du sort de la " Galère $ Afrique"
et de son Equipage. Enfin, la chaloupe du u Tienboven",
après
avoir fait le tour de ces lies, vint leur apprendre que le monde
était sauvé, hormis un seul matelot, et que les Insulaires, après
avoir essuyé notre feu s'étaient retirés.
Aussitôt que nous nous trouvâmes en sûreté, l'Amiral envoya
un détachement à l'Ile où le
naufrage était arrivé, pour y prendre
les gens de l'Equipage. La chaloupe les ayant reçus, on vit qu'il
manquait cinq hommes, savoir: un Quartier-Maître et quatre
matelots. Comme, pendant le temps qu'ils furent dans cette Ile,
ils s'etaient mutinés contre les officiers, et qu'ensuite ils avaient
pris querelle entre eux-mêmes jusqu'à se battre à coups de cou¬
teau. dont quelques-uns furent blessés, ils s'étaient cachés pour
éviter le châtiment ; d'autant que le Capitaine Rosenthael les avait
menacés de les faire tous pendre aussitôt qu'ils seraient à bord
du Vaisseau-Amiral. On trouva à propos de m'envoyer vers eux
avec un autre détachement pour les prendre; mais, à notre ar¬
ce
minent. Nous n'en étions
rivée. s'étant cachés dans les broussailles, ils firent feu
en
sorte que nous
n'osâmes
entrâmes dans l'Ile
étions
droit de le
sans
sur nous,
pas mettre pied à terre. Enfin
pourtant tirer sur eux, comme
faire;
nous
nous
les appelâmes en les priant de
retourner avec nous, avec assurance qu'on ne leur ferait aucun
mal ; que l'amiral lui même en avait donné sa parole. Mais ils ne
se fièrent pas à nous et ne crurent rien de tout ce que nous
pû¬
mes leur dire. Voyant doncque tout était inutile pour les
pouvoir
ramener, nous les laissâmes; et nous allâmes chercher des her¬
bes. des fruits et plantes maritimes qui se trouvèrent dans cette
Ile en abondance (p. 148).
Toutes ces Iles sont situées entre les quinzième et seizième
degrés de latitude méridionale, à douze lieues vers l'ouest de
Carlshof; chacune peut avoir quatre ou cinq lieues de circuit.
Celle contre laquelle le vaisseau la " Galère d'Afrique" avait
échoué, nous l'apelâmes l'Ile pernicieuse ; (4) deux autres, les
Deux Frères, (5) et la quatrième la Sœur. Elles étaient toutes
en
Société des
nous
Études
Océaniennes
quatre tapissées d'une verdure charmante, etgarnies de beaux
arbres, entre lesquels il y avait beaucoup de cocotiers, dont je
parlerai amplement dans le Chapitre suivant. A l'égard des
herbes, elles étaient fort salutaires et servirent de grand soula¬
gement a nos malades. Nous y trouvâmes aussi beaucoup de
moules, de nacres de mère-perle et d'huîtres perlières; de sorte
qu'il y a beaucoup d'apparence, qu'on pourrait y établir une pê¬
cherie de perles (p. 149) très avantageuse ; d'autant que nous
trouvâmes aussi des perles dans quelques huîtres, que les habi¬
tants avaient arrachées des rochers. Ces lies sont extrêmement
basses, en sorte que quelques endroits en étaient inondés alors;
et d'autres
aussi dans quel¬
mais les habitants y naviguaient avecdebons canots,
navires pourvus de câbles et de voiles. 11 y avait
endroits du rivage des cordes, dont le fil ressemblait plutôt
qu'au lin. Les habitants de l'Ile, où nous perdîmes
notre vaisseau, sont plus grands que ceux de l'Ile de Pâques ; et
nous n'en avons pas trouvé depuis de plus grands. Quelques-uns
de nos gens ont assuré qu'ils avaient vu des vestiges de pieds de
ces Insulaires, longs de vingt pouces. Ils avaient tous le corps
peint de toutes sortes de couleurs. Leurs cheveux sont fort longs,
de couleur noire et brune, (p. 150) tirant un peu sur le roux. Ils
portaient des piques de la longueur de dix-huit jusqu'à vingt
pieds. Leur physionomie ne présage pas un naturel doux et hu¬
main ; ils l'ont tous fort cruelle et méchante. Ils marchaient par
troupes de cent ou cinquante, nous faisant continuellement signe
d'aller à eux, et se retirant toujours à l'autre côté de l'Ile, appa¬
remment dans l'intention de nous attirer dans quelque bois ou
embuscade pour nous charger avec avantage et se venger ainsi
de ce que nous avions tiré sur eux. Comme il n'y avait plus rien
ques
au
chanvre
nous, et que, d'ailleurs,
de bon ancrage, i! fut résolu de
à faire ici pour
tait pas
avec toute la précaution possible, pour
découvrir quelque pays, dont, on pût
nous n'avions fait par le passé.
le fond de ces,côtes ri écontinuer notre chemin,
voir si nous ne pouvions
tirer plus d'avantage que
Il
1.
—
On découvre
II.
—
plusieurs Iles, an nombre
Description de ces Iles.
déjà le dixième mois que nous courions les
d'ailleurs, nous étions ma! nourris, faute de rafraî-
Comme c'était
mers,
et que,
de neuf.
Société des
Études
Océaniennes
—
-38
—
chissements le scorbut et .d'autres maladies nous emportèrent
du monde chaque jour. L'unique(p., 1.51) remèdeà ces maux, ce
furent les herbes salutaires: nos malades ne souhaitèrent autre
chose. Le lendemain de notre départ des lies pernicieuses, nous
vîmes à huit lieues de là, vers l'Ouest, une lie que nous
appelâmes
l'Aurore, (6) parce que nous la découvrîmes à la pointe du jour.
Nous eussions perdu ici notre vaisseau le " Tienhoven", si le jour
avait retardé d'une demi-heure. 11 n'était
pées
que de
si imminent
la portée d'un
nous
saisit de
éloigné des côtes escar¬
de canon. La vue d'un danger
frayeur. On donna aussitôt le signal
coup
de faire tourner le Vaisseau. La
manœuvre
fut difficile et
on
eut
toutes les
.
peines du monde à le sauver. Ce péril causa un tumulteparmi les matelots : déjà trop mécontents d'une si longue et pé¬
nible navigation, ils voulurent, pour ainsi dire, forcer l'Amiral à
retourner ou, du moins, à leur donner une assurance du p'aiement de leur solde, quand même il arriverait qu'on perdît encore
un
.
vaisseau. Cette demande des matelots était bien fondée et
juste. Leurs travaux étaient des plus rudes dans ces mers incon¬
nues, et ils devaient à tout moment s'attendre à en perdre tout
le fruit, la coutume voulant que ceux qui reviennent en Hollande
sans vaisseau, soient privés.de leurs gages. L'Amiral eut la bonté
de s'engager par serment que, quelque malheur qu'il pût arriver,
tout leur serait payé. 11 tint aussi parole; et quoique nous eus¬
sions perdu le vaisseau la '' Galère d'Afrique" et que les deux"
autres dussent être saisis ensuite à Batavia, tous les gens de
l'Equipage furent exactement payés, lors de notre retourà Amsterdam. (p. 153).
L'Ile de l'Aurore, dont j'ai parlé ci-dessus, a environ quatre
lieues de circuit ; est chargée de broussailles et d'arbres, et tapis
sée d'une très belle verdure. Comme nous n'y trouvâmes aucun
endroit propre à mouiller, nous la quittâmes aussitôt. Vers le
soir du même jour, nous arrivâmes en vue d'une autre,
que
nous appelâmes,, pour cette raison, le Vêpre, (7).
Son circuit est
environ de douze lieues; elle est fort basse, au reste très- belle et
garnie d'arbres. Nous continuâmes notre cours toujours à l'Ouest
jusqu'à quinze ou seize degrés. Le lendemain, nous découvrîmes
tout à coup un .autre pays ; et comme on voyait, par-ci, par-là,
de la fumée, nous jugeâmes qu'il devait être habité. Nous
y finies
voile avec toute la diligence possible, et nous aperçûmes plu¬
sieurs dés habitants se promenant dans des canots, le long de la
côte. En approchant de plus prèsgnons vîmes que tout ce-,pays
,
.
Société des
Études
Océaniennes
—.
était
:I9
—
amas de
plusieurs Iles situées les unes tout près des
Nous y entrâmes insensiblement si avant, que nous com¬
mentâmes à .craindre de ne pouvoir nous
dégager. On fît d'abord
un
autres.
monter au haut du mât
des
pilotes
qu'il avertît de l'encalme qui régna alors
fut notre bonheur: la moindre tempête
aurait fait échouer nos
•vaisseaux contre les rochers, sans qu'on y
eût pu apporter le
,droit par où
moindre
on
un
pût sortir. Un temps
secours.
pour
assez
Nous sortîmes donc
cheux. Ces Iles étaient
au
sans aucun accident fâ¬
nombre de six, toutes fort riantes et,
prises ensemble, elles pouvaient avoir une étendue de trente
vingt-cinq lieues à l'Ouest des Iles
Pernicieuses. Nous leur donnâmes le nom de Labyrinthe, (8)
parce que, pour en sortir, nous fûmes obligés de faire plusieurs
détours. Comme il y avait trop de danger à y mouiller, et que
d'ailleurs aucun des habitants ne venait sur les rivages, nous ré¬
solûmes de ne pas nous y arrêter. Nous continuâmes notre route,
jiaviguanttoujoursà l'Ouest, et.au boutdequelques jours, nous
nous trouvâmes à la vue d'une Ile,
(9) qui paraissait belle et éle¬
vée (p. 156). .Nous ne pûmes pas trouver de fond d'ancrage, et
nous n'osâmes pas en approcher
de trop près. C'est pourquoi on
mit les deux chaloupes en mer, chacune avec vingt-cinq hommes
pour aller à terre. Les habitants ne s'aperçurent pas sitôt de notre
dessein, qu'ils vinrent en foule se.porter sur la côte pour s'op¬
poser à notre descente. Ils portaient de longues piques, et nous
lieues. Elles sont situées à
montraient comment ils savaient les manier. Ces
chaloupes
ne
pouvant assez approcher de l'Ile à cause des rochers, nous prîmes
la résolution de nous jeter à l'eau, chacun portant ses armes
.avec du plomb, de la poudre et quelques brimborions sur la tête.
Quelques-uns cependant
y restèrent pour faire continuellement
les habitants, afin de nettoyer le rivage et faciliter ainsi la
descente. Cet expédient nous réussit à souhait, et nous tou¬
châmes terre sans trouver de résistance de la part des Insu¬
feu
sur
laires
qui, effrayés du feu de la mousqueterie, s'étaient retirés
(p. 157). Aussitôtque nousfûmes à une distaneequi leur permît
'de nous voir, nous leur montrâmes de petits miroirs, du corail,
etc. Ils approchèrent alors de nous sans hésiter, et sans faire pa¬
raître la moindre crainte. Après qu'ils eurent reçu ces présents,
nous allâmes avec eux voir l'intérieur du pays et y chercher des
des herbes pour spulager nos malades. Nous en trouvâmes à
à souhait et en si grande quantité, que nous en remplîmes en
peu de temps douze grands sacs, six pour le Vaisseau-Amiral,
Société des
Études
Océaniennes
et six pour
dèrent à
en
le " Tietihoven". Les habitants eux-mêmes nous
cueillir. Nous y vîmes aussi quantité de fleurs
ai¬
de
jasmin. Ainsi nous fûmes fort contents de cette petite expédition
et eûmes lieu de l'être aussi de ces Insulaires. Nous apportâmes
les herbes à nos malades qui en eurent plus de joie que si nous
leur eussions apporté de l'or ou de l'argent.
Le lendemain, nous retournâmes dans l'Ile en plus grand
nombre que le jour précédent, non seulement pour y cueillir des
herbes, mais aussi pour tâcher d'y faire quelque autre découverte
avantageuse. La première chose que nous fîmes en y arrivant, fut
de donner au Roi ou Chef de cette lie des miroirs, du corail et
quelques quincailleries. 11 les accepta, mais avec une espèce
d'indifférence et de dédain qui ne présageait rien de bon.
11 est vrai qu'en échange il fit d'abord chercher des noix de cocos,
accommodées de deux différentes façons, une partie en servant
manger. Ce Chef était distingué des au¬
à boire et l'autre
tres Insulaires par quelques ornements consistant en nacres
de perles qu'il portait autour du corps et des bras, de l'a valeur
d'environ six cents florins de Hollande. Les femmes admirèrent
beaucoup notre teint blanc, nous regardant et nous touchant de¬
puis les pieds jusqu'à la tête et nous faisant mille caresses. Mais
elles étaient des traîtresses ; elles ne nous cajolèrent tant que pour
nous endormir et nous tromper plus sûrement ; de sorte que, si
ces Insulaires eussent pris autant de précaution en exécutant
leurs mauvais desseins, nous eussions tous perdu la vie. Voici
ce qui arriva. Aussitôt que nous eûmes rempli d'herbes une ving¬
taine de sacs, nous avançâmes plus avant dans le pays en mon¬
tant sur des rochers escarpés et qui bordaient une vallée pro¬
fonde. Les Insulaires nous précédèrent et nous les suivîmes sans
avoir de soupçons. Mais, lorsqu'ils virent que nous avions donné
ils nous quittèrent brusquement. Nous en vîmes
même temps quelques milliers qui sortaient des creux
dans le panneau,
alors
en
comprîmes qu'ils avaient don¬
tînmes cependant bonne
contenance, et eussions bien souhaité d'en venir aux mains dans
une plaine, où il nous eût été facile de leur tenir tête. Leur Chef,
jugeant qu'il était temps de nous attaquer, nous fit signe avec
son bâton de ne p3S avancer ; mais, au lieu d'y déférer, nouscontinuâmes toujours notre chemin. Là-dessus, il donna le si¬
gnal et unegrêlede pierres vint fondre sur nous, sans cependant
faire grand mal. Nous leur répondîmes de notre mousqueterie,
des montagnes : de sorte que nous
né l'alarme pour nous accabler. Nous
Société des
Études
Océaniennes
—
21
—
qui leur tua beaucoup de monde et, dès la première décharge,
nous vîmes tomber leur Chef. Ils ne
prirent pas pour cela la fuite,
mais continuèrent avec plus de.fureur à nous
jeter des pierres;
de sorte que nous fûmes presque tous blessés, et hors d'état de
nous défendre plus
longtemps. Nous nous retirâmes donc, pour
nous mettre à couvert des pierres,
derrière un rocher, d'où nous
ti:âmes sur eux avec tant de succès, qu'un grand nombre mordit
la poussière. L'opiniâtreté de ces
sauvages était cependant si
grande qu'il ne nous fut pas possible de les faire reculer ; de sorte
que nous fûmes obligés de nous retirer, sans avoir pu éviter une
nouvelle grêle de pierres, qu'ils tirent pleuvoir sur nous. Nous
eûmes dans cette action quelques morts; et les blessures que
plusieurs de nos gens reçurent, quoique peu considérables d'a¬
bord, devinrent dans la suite mortelles par le scorbut qui s'y
mit, de sorte que peu d'entre eux en échappèrent (10).
Après que nous nous fûmes dégagés de ce mauvais pas, nous
prîmes nos sacs remplis d'herbes, et rejoignîmes nos vaisseaux.
Le récit que nous fîmes de ce malheur à ceux qui y étaient de¬
meurés en garde, fit une telle impression sur eux que, dans la
suite, toutes les fois qu'il s'agissait d'entrer dans quelque Ile,
personne ne voulait le hasarder.
Nous appelâmes cette Ile l'Ile de Recréation à cause des herbes
salutaires que nous y trouvâmes. Elle est située à la hauteur de
seize degrés de latitude et de deux cent quatre-vingt-cinq degrés
de longitude, et son circuit est environ de douze lieues. Le terroir
en est très fertile : il
y avait une grande quantité d'arbres, princi¬
palement des palmiers, des cocos, et du bois de fer. Il est fort
vraisemblable, que cette Ile cache dans son sein des métaux et
d'autres choses précieuses ; mais, comme on ne l'a pas examinée,
on n'en saurait rien dire de positif
(p. 163) Ces Insulaires étaient
fort adroits, d'une taille médiocre, forts et robustes, vifs et bien
faits ; leurs cheveux étaient longs, noirs et luisants, graissés
d'huile de coco, ainsi que c'est la coutume de plusieurs nations
Indiennes. Ils avaient tous le corps peint comme ceux de l'Ile de
Pâques. Les hommes se couvraient le milieu du corps d'un rets
qui leur passait entre les cuisses ; mais les femmes étaient entiè¬
rement couvertes d'une étoffe, aussi douce au toucher que la soie.
Elles portaient aussi, en marque d'ornement, des nacres dé perle,
autour du corps et des bras. Comme il n'y avait pas ici beaucoup
de sûreté pour nos vaisseaux, à cause du fond qui était de mau¬
vais ancrage, et que d'ailleurs il n'y avait pas moyen, vu la hau-
Société des
Études
Océaniennes
—
teur des
vâmes
m
—
rochers, de reconnaître l'intérieur de cette Ile,
à propos
d'en partir
au
nous
trou¬
plus tôt.
(!) Mauvaises-Eaux:, les Tuamotu.
(3) Pukapuka.
(2) 11 est possible que ce soit Taiaro.
(4-3) G. B. Corne-y. dans une note au bas de la page 234 du premier vo¬
occupation of Tahiti, dit que Twee Gebroeders (Les Deux
Frères) cl Schadelijk (Pernicieuse; de Roggewein sont Takaroa et Takapoto.
Cette identification est probablement fondée sur Moerenhout, qui dit (vol. 1,
p. 204) : "les Indiens me parlèrent de canon. Je ne savais pas d'abord ce
qu'ils voulaient dire, et je croyais qu'ils s'informaient s'il y en avait à bord
mais je compris enfin qu'ils parlaient de pièces de canon qu'ils avaient à terre:
Curieux de les voir, je m'y fis conduire de suite ; mais je les trouvai en tel
état qu'on ne pouvait rien distinguer. Les naturels me dirent
qu'ils prove¬
naient d'un bâtiment qui s'était perdu sur leurs côtes, il
y avail bien long¬
temps ; et, songeant, depuis, que Byron, qui, en 1763, avait visité ce groupe,
qu'il nomma King Georges, avait trouvé à Taapouta plusieurs débris de nau¬
frage, et que Cook avait, plus tard, trouvé, je crois, une pièce du gouvernail,
d'un canot portant le nom du bâtiment de Roggewein, j'ai imaginé que ce
groupe pourrait bien être les Pernicieuses de ce dernier navigateur, et que
c'est sur Taapouta que sa galère se perdit; ce qui expliquerait un peu l'obs¬
curité de ce voyage, jusqu'à ce moment demeuré inexplicable; et ferait re¬
trouvé, à peu près, ces îles, qu'on a, jusqu'ici, vainement cherchées ".
Bvron (17.65), de sa visite à Takaroa dit (Hawkesworth, Relation des
Voyages, etc. Paris, 1774, t. 1, p. 134) : "Nos gens, en visitant les cabanes
des Indiens, trouvèrent la manivelle d'un gouvernail ; celte pièce, déjà rongée
des vers, avait visiblement appartenu à une
chaloupe hollandaise ; ils trou¬
vèrent- aussi un morceau de fer battu, un aulre de cuivre et
quelques petits
outils de fer, qu'autrefois les habitants de cette contrée avaient eus, sans doute
des Hollandais à qui était la chaloupe.
l'emportai avec moi le fer battu, le cuivre et les outils de fer; nous
leur en laissâmes un, exactement de la forme d'une hache de
charpentier, et
dont la lame était une coquille d'huître
perlière. il est possible qu'il ail été
fait à l'imitation d'une hache ayant
appartenu au charpentier du vaisseau hol¬
landais ; car, parmi les outils que j'ai pris dans cet endroit, il
y en avait un
qui paraissait être le reste de cet instrument, quoiqu'il fût presqu'entièrement
lume de Ouest and
.
usé
11 est,
toutefois, impossible de reconnaître Takaroa et Takapoto dans les Iles
décrit et situe Roggewein Aratika et Kauehi répondraient bien mieux à
ce que dit le navigateur hollandais : du moins doivent-elles être dans le voisi¬
nage des Iles Pernicieuses. Comme Aratika était une des terres de l'ancien.
i[iie
Société des
Études
Océaniennes
—
23
—
clan très
puissant de Vahitu, qui avait son siège à Takaroa, il serait tout à
qu'une partie du butin provenant du vaisseau naufragé eût été trou¬
vée à Takaroa, cl un canon pouvait aisément avoir été
transporté à Takapolo.
Nous savons tous que l'ancre de
Bougainville, prise aux indigènes de Hitïaa
(Tahiti) par ceux de Raiatea, fut transportée jusqu'à Porapora.
(0) Il est possible que l'Ile de l'Aurore soit Apataki, ou quelqu'aulre île
plus à l'est.
l'ait naturel
:
(7) L'Ile du Soir est sans doute Arutua, à moins que ce ne soit une autre
plus orientale.
•:
(8) Le Labyrinthe doit être soit le groupe Palliser (Teau, Kaukura, A[iutaki, Arutua), soit Raiora.
:
(9) C'est Makatea, découverte par Jacob Roggewein le 22 juin il22.
(10) Les Tahitiens dirent aux Espagnols, quand ceux-ci tentèrent de s'ins¬
taller à Tahiti (1772-1775), qu'un grand vaisseau
européen était venu jadis de
Makatea après y être resté deux jours, et que, là, dans un
engagement, trois,
indigènes avaient été tués. (Corney : Quest and occupation of Tahiti, vol. ip. 354).
île
Société des
Études
Océaniennes
RECTIFICATIONS
Dans le Bulletin
34 des Etudes Océaniennes (page 384),
Pugeault fait un grief à Miss Teuira Henry d'avoir
rapporté dans son livre ANCIENT TAHITI, l'histoire des quatre
matelots espagnols fusilles par Bœnechea, sans dire que le Dr
Corney ne cite ce fait que pour le réfuter quelques pages plus
n8
M. Charles
loin.
C'est
de croire que
Miss Teuira donne cette anecl'ouvrage de Corney dont elle n'a jamais eu
connaissance; elle ne fait ici que répéter le récit de Forster et de
docte
une erreur
comme
tirée de
Wilson.
En effet, si on lit les notes placées au bas delà
page 19 de AN¬
CIENT TAHITI, on remarque que ces notes sont signées
Ed.,
c'est-à-dire Editeur, et précédées de l'abréviation Cf.
(confer) qui
invite précisément le lecteur à se reporter aux
pages 28 et 32 de
de
l'ouvrage du Dr Corney.
Les éditeurs de ANCIENT TAIHTI, c'est-à-dire le
Bishop Mu¬
pouvaient faire davantage, s'étant engagés à publier
l'ouvrage de Miss Henry sans y appoi ter aucune modification.
seum
ne
Kenneth P. EMORY.
Dans le même article, M. Charles Pugeault dit encore qu'il est
impossible comme le voudrait ANCIENT TAHITI que ce soit
aussitôt après le départ des Espagnols que les Indigènes violèrent
la tombe du Commandant pour en prendre la couverture rouge
qui servait de suaire.
Mais voici exactement ce que dit Teuira: "Peu après que les
Espagnols se furent retirés, les Indigènes qui convoitaient la cou¬
verture enlevèrent la terre, prirent la couverture et remplirent la
fosse comme auparavant".
Il n'y a donc rien d'étonnant à ce que Cook, deux ans après, en
1777, nous dise qu'il a trouvé la tombe de Bœnechea en bon état.
Teuira ajoute encore un détail assez intéressant pour les ento¬
mologistes et qui nous a d'ailleurs été confirmé plusieurs fois par
les anciens du pays, c'est que de cette époque date l'introduction
des puces à Tahiti : car, de la couverture volée, s'échappèrent une
quantité de puces qui se répandirent dans toute l'île.
B.
Société des
AHNNE,
Études Océaniennes
fuiguisttqiu rompimitiuf
Numération
par
Paurnotu
polynésienne.
le Père Hervé AUDRAN.
Ilao
Reao
M a ra gai*
Nombres
(en général)
(en
Napuka
Mangarcva
Tahiti
Marquises
Ka rari
E tahi
A la hi
Hoc
E ite
Ka ite
E
A ùa
E toru
Ka
E toru
E fa
Ka ope
E rima
E rima
Aea
E bene
E hilo
Kihoke
E hito
8
E bava
E Ilava
E
9
E
A tain
E rari
E talii
E ite
E
E ite
3
E
Kuoni
E
4
E ope'
Taoui
E ha
5
E miha
Lia
6
E bene
7
1
0 rari
2
(1)
geti
Fiji
mea
geti
(ope)
(2)
Tahi
E dua
Piti (rua)
Rua
E
A loù
Toru
Toru
E tohu
E ha
A lia
Maha
(lia)
AVha
E
Ka mihe
E rima
A ima
Pae
(rima)
Rima
E lima
E ope
Ka bene
E
A
Ono (fenc)
Ono
E
E bitu
Ka tika
E bitu
A bitu
Ili tu
AVlii tu
E vitu
E
Ka bava
A vaù
Yaù
AVaru
E
Iwa
E ciwa
geti
rua
ono
ono
(talii)
rua
va
ono
i
(Keka)
N"e Zélande
particulier)
10
nipa
Fakaraki
(bori-
varu
(hawa)
Ponapoua
E
Tukenobi
Hakaraki
nipa
varu
*
E
varu
E iva
0 ohuru
E iva
A iva
Iva
E
Ivapaha reka
Rogouru
Onohuù
Ahuru
gaburu
hori)
ru)
(1) 11 existe aussi
La voici
en
son
aux
Tuamotu
abrégé
e
façon de compter par paire, c'esl-à-dire par deux.
geliope (3 et 4), miehone (o et (5), tuepeka (7 et 8;, horihou (9 et 10)
kite
e geti
e ope — e miha-hene — c hilo e hava — e nipa e fakaraki.
une
ta ik ai te (i et 2('
:
rari
(2) Dans les îles de l'Est,
on
e
(varu)
,
—
dit de préférence : a ite, ageli, etc.,
connue
Société des
aussi à Napuka.
Études
Océaniennes
(boe aliu-
Tckau
(Ngaburu,
v
alu
E tini
Société des Etudes Océaniennes
-,
27
POLÉMIQUE
—
EN
VERS
De tout temps, Tahiti a eu ses admirateurs
non moins convaincus.
passionnés et
ses
détracteurs
Il nous a paru intéressant, à 50 ans de distance, de rééditer les
strophes d'une si belle envolee poétique que M. de Jonquières
Officier de marine, a dédiées à notre petit pays.
Un fonctionnaire du Secrétariat Général, M. Delport, qui
semble n'avoir pas eu à se louer de son séjour à Tahiti lui répondit
par une parodie qui ne manque pas d'allure, mais que son réa¬
lisme ne nous permet pas de citer en entier.
Dans une réponse très belle et très courtoise, M. de Jonquières
invite le poète à s elever au-dessus des réalités et des laideurs de
la vie.
Rédaction,
EXTRAIT de " Poésies d'un Marin " par E. de
(Calmann Lévy, Editeur).
Jonquières.
1 A ORA NA, TAHITI!
(SALUT, TAHITI)
Septembre 1880.
Salut, Perle des mers, à tes joyeux rivages
Où l'été règne en maître et jamais ne finit.
A tes pics dont les flancs arrêtent les orages.
Et dont la tête porte au-dessus des nuages
Ton diadème de
granit !
Tu sortis
Vénus, des vagues écumeuses
vierge et nue, et sur tes reins brûlants
Telle
chevelure
Jadis,
comme
une
aux
boucles onduleuses
Ruisselaient à tes
pieds les cascades fumeuses
reflets sanglants ;
O Fille des volcans, à la haute stature !
Le sauvage Océan, de ses bras amoureux.
T'enserre; le collier de ta riche parure
Est tait de son corail, l'argent de ta ceinture,
De l'ecume de ses flots bleus;
De la lave
aux
Société des
Études
Océaniennes
28"—
Le soleil, ton amant, dans tes gorges profondes
Verse l'ardent tribut de ses rayons dorés;
Par lui tes cocotiers et tes bananes blondes
•
Jaillissent de tes champs aux entrailles fécondes
Que nulle main n'a labourés;
Couronnant de vapeurs ta tête souveraine,
L'Alizé frémissant caresse tes sommets
humide haleine
pieds arroser dans la plaine
grands arbres de tes forêts.
Ht tes ruisseaux, enfants de son
Descendent à tes
Les
j'aime tes belles nuits, leur amoureux silence,
Et du vent qui s'endort le murmure pensif ;
j'aime à laisser bercer mon âme à la cadence
rythme monotone, où sans fin se balance
Du
La voix lointaine du
récif;
au soleil couchant voir les lueurs féeriques
Et les fauves reflets dont Moorea se teint,
j'aime
Quand, aux lianes embrasés de ses pics fantastiques
Semblent se rallumer les colères antiques
De son vaste cratère éteint.
Terre des Maoris ! tes flottes étaient belles
jadis, quand sur les mers s'élançaient tes guerriers;
regards pleins d'orgueil suivaient sur leurs nacelles.
Jusqu'au large horizon des cimes maternelles,
Tes
Tes fils bravant les flots altiers ;
Tes filles
rayonnaient dans leur beauté sauvage,
d'Europe ignorant les atours,
Et. des femmes
soleil la splendeur sans nuage
d'airain, dont jamais un corsage
N'avait défloré les contours.
Laissaient luire
au
De leurs torses
Alors tes vieux amis, les Cook, les
Bougainville,
pionniers des horizons nouveaux,
plaisaient a venir sur ta plage tranquille
Ces hardis
Se
Goûter de tes enfants l'existence facile
Dans l'oubli de leurs
longs travaux.
Société des
Études
Océaniennes
Depuis lors, notre Europe
a
greffé
Sur ton robuste tronc, mais le
suc
bouture
étranger
sa
N'a pu
des rejetons transformer la nature,
Car ils-puisent toujours à ta racine dure
Ta sève qui ne peut changer ;
Tes femmes, acceptant nos
préjugés vulgaires,
sous leurs larges peignoirs
Mais le feu qui brûlait dans le cœur de leurs mèrçs,
Passant comme un éclair sous leurs brunes paupières,
Illumine encor leurs yeux noirs;
Ont caché leurs beaux seins
Dans
une
longue paix ta race valeureuse
perdu la fureur de ses anciens combats,
Mais, au jour du danger, si la voix belliqueuse
De la France ébranlait ta terre généreuse,
A
Il
en
1
sortirait des soldats.
Sur tes bords à
jamais bénis, la Providence
ses dons précieux ;
Elle a tout disposé pour que leur existence
S'écoulât sans travail, sans peine e! sans souffrance,
Dans un repos délicieux.
A comble tes enfants de
Jamais tes nobles fils
Du froid et de la
De
nos
ne
sentiront l'étreinte
faim, ni le joug odieux
ambitions à la rude contrainte
Ils n'ont pas
;
de besoins, ils n'ont aucune crainte,
Ce sont des rois! Ce sont des dieux!
leur tête haute et hère
au riche dédaigneux,
Ils ne sentiront pas la hideuse misère
Faire germer en eux cette sourde colère
Qui gronde au cœur des malheureux.
Ils
ne
courberont pas
Pour mendier l'aumône
Ils n'iront pas
moisir dans la mine profonde,
de ses sombres cachots,
qu'il faut aux puissants de ce monde
pousser a travers les continents et l'onde
Leurs express et leurs paquebots;
Ni chercher, dans l'horreur
Cette houille
Pour
Société des
Études
Océaniennes
—
SO¬
US n'iront pas, au fond des malsaines usines,
Humer d'un air impur les flots empoisonnés,
Ni perdre au bruit strident des hurlantes machines
L'instinctive harmonie aux nuances divines
De leurs antiques himénés.
Redites-les souvent ces chants de vos poètes,
Laissez-vous enivrer de leur molle langueur,
Maoris '
Ces
ne songez qu'à tresser pour vos fêtes
guirlandes de fleurs qui couronnent vos têtes
De leur odorante fraîcheur ;
Dédaignez, fiers oisifs, la douceur mensongère
Du bien-être trompeur par l'Europe importe ;
Mangez votre fei. que l'île votre mère
Donne sans exiger ni travail ni salaire :
C'est le pain de la liberté !
1A ORA NA, TAHITI!
Réponse à
belle pièce de Vers de M. de JONQUIÈRES,
DELPORT, Juge au Tribunal de Papeete.
une
oar
(fragments)
Adieu, " Perle des mers", car si j'en crois Jonquières
C'est ainsi qu'on te nomme 1 Adieu! moi, je m'en vais.
Et j'en ai plein le dos de tes cimes altières,
De tes pics tourmentés et de tes vieux cratères,
Qu'ils me fichent donc tous la paix!
Je n'ai rien admiré sur ton joyeux rivage
Rôti par le soleil que reflétait le flot ;
Et pourtant j'habitais sur le bord de la plage,
Où pour me récréer j'avais pour tout potage
La
vue
d'un méchant îlot.
Je hais ton cocotier, tête de loup immense,
Ridicule plumeau qui se balance en l'air
Menaçant des passants la tranquille existence,
Collant sur le chapeau d'un monsieur qui s'avance
Ses
cocos
durs
Société des
comme
Études
le fer.
Océaniennes
Et
je hais tes " féis" et ta banane immonde
Et tes horribles mets, tes sauvages repas ;
Je donnerais, crois-moi, tous les" popoi" du monde
Pour avoir seulement
un
Une miche et
bock de bière blonde,
cervelas.
un
Je hais tes belles nuits, source de sciatiques,
Où j'étouffe d'abord pour mieux attraper froid,
Où dans l'ombre j'entends susurrer les moustiques
Etudiant entre eux des effets acoustiques
Qui me font frissonner d'effroi.
Phœbus
sur
Moorea, quand, au soir, il se couche,
hasard un pauvre reflet d'or,
Je n'en disconviens pas. Ce qui me paraît louche,
C'est le nuage noir, menaçant et farouche
Qui le teint plus souvent encor.
A lancé par
Tu
possédas jadis une bien belle flotte,
pirogues, dit-on, régnèrent sur les flots ?
Mais je m'en fiche autant que d'une vieille botte
Quand je vois aujourd'hui tes canaks en ribote
Pagayer leurs mauvais canots.
Tes
Tes filles ! Ah! Grand Dieu! Parlons donc d'autre chose !
11 se peut que. jadis,
Des dames de Paris,
ignorant les atours
leurs corsets et leurs poses.
Elles vécussent bien
sans essence
Et
Mais
de
rose
qu'elles eussent des contours.
ce
temps est passé,
bien chanter les chants de ton poète,
ami. Fais-en des orphéons,
Mais pour l'amour de Dieu, sauf aux grande jours de
Ah ! Tu peux
Maori,
mon
Ne
fais pas mourir, ni me casse la
Du bruit de tes accordéons.
me
tête
Avril 1881.
Société des
Études
Océamennes
fête,
I)e
Jonquièrfcs à Dclpoi't (Réplique)
Ami, nous savons tous que dès votre naissance
La Muse, à tire d'aile accourut près de vous
Et d'un œil plein d'amour, caressant votre enfance,
Sur vos lèvres posa son baiser le plus doux :
Depuis lors, à
vos
pieds, esclave obéissante,
Elle veille, attentive, et sa lyre vibrante.
Echo de votre cœur, à chaque battement.
Frémit
Au
le bois
comme
piano, c'est
sous
le souffle du vent.
voix énergique et profonde
Qui chante sous vos doigts dans vos brillants concerts,
C'est sa main qui conduit votre plume féconde
Et sur votre papier court en semant des vers.
sa
Vous couvant du
regard, sa prunelle amoureuse,
fureurs, sourit à vos plaisirs ;
Sa malice nourrit votre verve railleuse,
Et quand vous le voudrez, docile à vos désirs,
Son vol vous portera par delà les nuages
Vers ces lieux que jamais n'atteignent les
oragesS'allume à
vos
Où s'étend dans
L'espace
sans
son
calme et
sa
sérénité
limite, inondé de clarté.
Oh! n'arrachez jamais les ailes de cet ange,
Pour le faire ramper dans nos sentiers boueux,
Ne le condamnez pas à tourner vers la
fange
Son œil fait pour sonder l'immensité des deux;
Laissez planer son vol bien loin de nos misères,
Dans l'azur, au-dessus des monts et des forêts
;
Ne l'initiez pas à nos honteux mystères
Ne le conduisez pas au fond des
dispensaires,
Ni dans le bruit abject des hideux cabarets.
Unissez-vous tous deux pour goûter les
merveilles,
Qu'à flot Dieu répandit dans tout ce qu'il créa
Laissez les grandes voix vibrer à vos oreilles,
Et
vos
fronts
se
dorer à
ces
lueurs vermeilles
Que le soleil couchant allume à Moorea.
Chantez les pics boisés, les cascades bruyantes,
Chantez des nuits d'amour la douce
Société des
Études
volupté,
Océaniennes
—
Les Vahinc
Et,
33
—
seins, durs, aux prunelles
ardentes,
lire, passez les pages écœurantes
sans
aux
Dans le livre brutal de la réalité.
Finale
:
Sur cette terre, il est
beaucoup de noir fumier
respirez que le parfum des roses,
ne remuez
pas lorsqu'elles sont écloses,
sol putréfié
qui fermente à leur pied.
Mais,
Et
Le
vous, ne
E.
12
de
mai 1881.
\ O U Y E A FT
JONQJJ1ÈRES.
É
L'Imprimerie du Gouvernement, à Papeete, vient d'éditer
élégante brochure de 137 pages (laquelle est en vente
Siège de la S. E. O., au prix de 10 francs) le JOURNAL
une
en
au
de
MAXIMO RODRIGUEZ qui a
paru dans notre Bulletin (Nus 28 à
34), et dont le traducteur est M. Charles
PUGEAULT, Membre
de la S. E, O.,
Agent spécial à Huahine.
Le tirage restreint de cet
ouvrage le fera certainement recher¬
cher des bibliophiles
qu'intéresse l'histoire de Tahiti.
Etat de la Société Tahiticnne à
l'arrivée des
DE
par
Une brochure dcôb
pages,
Européens,
1ÎOVIS,
Papeete," Imprimerie du Gouverne¬
ment, 1909.
Réimpression de la
très intéressante étude parue en
1835 dans
la Revue Maritime et Coloniale.
11
ne nous
reste
plus
que
quelques exemplaires. Prix
OUVRAGES ET
De Paris
:
PÉRIODIQUES REÇUS
Les Annales
Le Monde
Société des
:
Coloniales, Nov. 1929.
Colonial, déc. 1929.
Études
Océaniennes
10
frs.
—
Bulletin
34
de
—
la Sté
Zoologique de France,
déc. 1929.
nov.-
Bulletin de la Sté des Amis du Museum etc.
mai 1929.
Bulletin
de
la Sté
Centrale
d'Agriculture,
etc., octobre-décembre 1929.
De London
Man, décembre 1929, janvier 1930.
:
United
The
De Wien
Empire, décembre 1929.
Geographical Journal, décembre 1929.
Anthropos, septembre-décembre, 1929.
:
De Firenze
Archivio per
v. 57-1927-
:
De Neuchâtel
:
De New-York
l'Antropologia
e
la etnologia,
Bulletin de la Société Neuchâteloise de Géo¬
graphie, 1929.
History, novembre-décembre, 1929,
Natural
American Museum Novitates, N,JS
3S6-395.
Geographical Review, Janvier 1930.
De
Washing¬
ton
Smithsonian Institution, Bulletin, 147.
:
The National
Geographic Magazine, Janvier
1930.
De Woods Hole
Biological Bulletin of the Marine Biol. Lab.
septembre-octobre, 1929.
University of California : The Valley Nisenan.
University of California : The Bear River Dia¬
:
Berkeley
Manila
:
:
Honolulu
:
lect of Athapascan.
University of California : A Grammar of the
Wappe Language.
The Philippine Journal of Science, décembre
1929, janvier 1930.
Journal of the Pan-Pacific Research, Inst, jan¬
vier-mars, 1930.
Bulletin of the Pan-Pacific Union, janvier 1930.
décembre 1929.
The Volcano Letter, nos 255 et 257.
Société des Etudes Océaniennes
—
35
—
Bernice P.
waiian
of the
Suva
Na Mata
:
Bishop Museum : Bulletin 66, Ha¬
atyidae Mem. XI, n° i, Descendants
Mutineers of the Bounty.
: octobre, novembre, décembre
1929.
New-Plymouth : The Journal of the Polynésian Society, n°
152,
décembre 1929.
Wellington
Sydney
Fishing Methods and Devices of the Maori.
by Elsdon Best.
:
Memoir V. Fishes from
:
Australia, by A. R.
Mc. Culloch
Records of the Australian Museum, n08 6 et
8, 1929.
Weltevreden
Calcutta
:
:
Oudheidkundig Verslag, (1928-1929).
Journal and Proceedings ofthe Asiatic Society
of Bengal, (déc. 1929: n° 3, 1928; sept.
1929 : n° 4, 1928).
Bulletin du Comité d'Etudes
Historiques et
Scientifiques de l'Afrique Occidentale Fran¬
çaise, n° 4, (Tome XI,i octobre déc. 1928.
E.Rougier: Delessert, voyage aux deux océans.
Zane Grey :
Tales of swordfish and Tuna.
id'
Tales of fresh water fishing.
Dr Rollin :
Les Iles Marquises.
M.
BIBLIOTHÈQUE DE
A
LA
SOCIÉTÉ
ÉCHANGER
La Société d'Etudes Océaniennes désire
échanger contre des ou¬
trait à la Polynésie (Anthropologie. Ethnologie. Phi¬
lologie, Folklore. Histoire. Littérature) les publications ou livres
suivants quelle possède en double:
vrages ayant
Quest and occupation of Tahiti, vol. 2.
Le Messager de Tahiti (Te Vea no Tahiti), 1862, 1868, 1884.
Notes sur les mammifères des hauts plateaux de l'Amérique
du Sud, par Neveu, Lemaire et Grandidier.
Société des
Études
Océaniennes
—
36
—
Recherches
sur les lémuriens disparus et en particulier sur
qui vivaient à Madagascar, par G. Grandidier.
Lois codifiées de l'Archipel des Iles-Sous-le-Vent.
De la religion des Malgaches, par A. et G. Grandidier.
Cérémonies malgaches, par A. et G. Grandidier.
Les tortues de mer à Madagascar, par G. Grandidier.
La mort et les funérailles à Madagascar, par G. Grandidier.
The maori polynesian comparative dictionary,
by Edw.
Fregear.
Annuaires de Tahiti ; 1887-1893-1902.
Océanie (Nlle Calédonie, Iles des Pins, Loyalty et Tahiti), par
Jules Garnier.
Notes ptéridologiques, par le Prince Bonaparte, fasc. 1-2-3-4.
Bulletin de l'Académie Malgache, tome 9, (1926).
Océanie, par D. de Rienzi, tome 1 et 3.
A missionary voyage to the Southern Pacific Ocean in the
ship
Duff (London. 1799).
A narrative of missionary enterprises in the South Sea islands
by j. Williams.
Notre domaine colonial : L'Océanie Française, par Regelsperger,
Pelleray et Froment Guieysse.
Le Myre de Vilers, Duchesne, Galliéni, (40 années de l'histoire
de Madagascar) par G. Grandidier.
Etat de la Société Tahitiene à l'arrivée des Européens, par de
Bovis. Ouvrage rare, restent quelques exemplaires (échange ou
10
francs).
ceux
Quatre années
des Sociétés
en
Océanie. Histoire naturelle de l'homme
qu'il organise,
par
Plusieurs occasional papers,
Bishop Museum, Honolulu.
L'Ile Christmas, par E. Rougier.
Papeetk
—
Imprimerie
Société des
et
A. E. Foléy, 2 volumes.
Bulletins et Memoirs du B. P.
du
Études
Gouvernement.
Océaniennes
.
-
.
.
Société des
Études
Océaniennes
BUREAU DE LA SOCIÉTÉ
Président
M. E. Ahnne.
Vice-Président
M. C. Bérard.
Trésoriers
Mme AUGÉ-DaULLÉ.
Secrétaire-Archiviste
M. Y. Malardé
Pour être reçu Membre de la Société
membre titulaire.
se
faire
un
présenter par
BIBLIOTHÈQUE.
Le Bureau de la Société informe ses
Membres que dé¬
sormais ils peuvent
emporter à domicile certains livres de
la Bibliothèque en
où ils
fixée.
cas
ne
signant une#reconnaissance de dette au
rendraient pas le livre emprunté à la date
Le Bibliothécaire
présentera la formule a signer. Il est
la disposition des Membres toute la
journée, excepté
de 11 heures à midi.
à
LE BULLETIN
Le Bureau de la Société
accepte l'impression de-tous les articles
qui paraissent dans le Bulletin mais cela n'implique pas qu'il
epouse les théories qui y sont exposeés, ou qu'il fait sien les
commentaires et les assertions des divers auteurs
qui, seuls, en
prennent toute la responsabilité.
Aux lecteurs de former leur
appréciation.
La Rédaction.
Pour tout achat de Bulletins,
échanges ou donation de livres
au Président de la Société, ou au
Bibliothécaire du
s'adresser
Musée, Boîte
no,
Papeete.
AVIS
Le
Bureau
l'honneur
Bulletin
de la
AUX
SOCIÉTAIRES
Société des Etudes
^l'informer
ses
Membres,
paraîtra tous les trois
mois.
Océaniennes,
que
a
dorénavant le
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Fait partie de Bulletin de la Société des Études Océaniennes numéro 35