B98735210103_028.pdf
- Texte
-
LLETIN
%
M-D E
/
OCIÉTÉ DES 1
©
ETUDES
DECEMBRE
Anthropologie
Histoire
—
des
—
11)2»
Ethnologie
Institutions
et
—
Philologie.
Antiquités
populations maories.
Littérature et Folklore.
Astronomie
—
Océanographie
—
Sciences naturelles
Tourisme.
IMPRIMERIE
A
DU
GOUVERNEMENT
PAPEETE
Société des
(TAHITI)
Études
Océaniennes
Société des
Études
Océan ïenites
jttwaL&œsraw
DE
LA
OCÉANIENNES
SOCIÉTÉ D'ÉTUDES
(POLYNESIE
ORIENTALE)
—•—i-^r-î—•—
TOME III
N° 2B.
—
(No 6)
DECEMBRE 1028.
S O HVC 3VC .A. X IRIE
F
AGES
Histoire.
Journal de Maximo Rodriguez (traduction de M.
Pugeault)
Ch.
145
Folk-lore.
Chant de Pai pour sa
par
lance Rufautumu, communiqué
170
M. K. Emory
Sciences naturelles.
Conférence par
leDr N. C. Andersen du " Dana".
Société des
Études
Océaniennes
...
172
Société des
Études
Océaniennes
JOURNAL. DE MAXIMO RODRIGUEZ
Premier
Européen ayant habité Tahiti (Tautira).
Traduction par M. Charles
S. E.
PUGEAULT, Membre
O., Agent spécial à Huahine.
de la
INTRODUCTION
Le Messager de Tahiti
(Bibliothèque S. E. O. N° 44) a publié
dans ses nos 51 et 52 en 1866
"Voyages des Espagnols à Tahiti''
Cette expédition espagnole ou tentative de
et
d'évangélisation, donna lieu
Premier
La relation
voyage
nous en
(19
conquête pacifique
à trois voyages :
nov. au 30
déc. 1772).
est parvenue par :
Le
journal de Don DOMINGO BŒNECHEA, Commandant
Frégate Aguila.
20 Le
journal de Don RAIMUNDO BONACORSI, Officier de
Y Aguila.
30 Celui du Padre JOSE AMICH, envoyé spécial, avec mission
de faire un rapport sur la possibilité
d'implanter la foi catholique
i°
de la
à Tahiti.
Deuxième
(27 nov. 1774 au 28 janv. 1775).
était convoyée par le bateau-magasin Jupi¬
la fondation de la première Mission et Colonie
voyage
Cette fois Y Aguila
ter, nécessité par
à Tautira. L'histoire
i°
au
Le
nous en
est relatée par :
journal de Don THOMAS GAYANGOS. ayant succédé
Commandant BŒNECHEA
20
Le
dant et
mort et enterré à
Tautira.
journal de Don JOSE de ANDIA Y VARELA, Comman¬
propriétaire du Jupiter.
Troisième
(du 3 au 12 nov. 1775).
Don CAJETANO de LANGARA.
Il a pour but de ravitailler ou de
rapatrier, selon le cas, l'éta¬
blissement espagnol. Il fut rapatrié ; mais ceux
qui étaient restés
un an dans
l'île, avaient, par ordre supérieur, fait une relation,
voyage
Y!Aguila est commandée
par
Société des
Études
Océaniennes
146
—
au
ce qui
le retrouvons dans
leur arrivait et de
jour le jour, de
nous
—
ce
qu'ils voyaient, et
:
Le
journal des Padres NARC1SO GONZALES et GERONIMO
CLOTA), tous deux espagnols et de l'ordre de Sf
François.
20 Le journal de MAXIMO RODRIGUEZ.
Le Messager de Tahiti a relaté, en décembre 1866, le Ier voyage
d'après le journal de Padre JOSE AMICH et en février et mars
1867, le 2md voyage y est aussi publié, mais en abrégé. Enfin le
Messager publia en 1874, N0s 14-15-25-26 le journal des Padres,
et toujours en résumé, selon EL VIAGERO UNIVERSAL, revue
imprimée à Madrid de 1796 à 1801.
Or. le Bulletin va donner ici le journal de MAXIMO RODRI¬
GUEZ, non plus en raccourci, mais en entier. Il est traduit de l'es¬
pagnol en anglais, " QUEST & OCCUPATION OF TAHITI ' Tome
III par le DrGlanville CORNEY, publié en 1914 par l'HAKLUYT
SOCIETY de Londres. Le Dr CORNEY a épuisé en trois gros vo¬
lumes. tout.ee qui pouvait être dit sur cette question. Il a par¬
couru l'Espagne et le Pérou, Londres et Tahiti, pour arriver aux
i°
CLOT (ou
sources
mêmes de
sa
documentation et il
a
réussi à trouver et à
publier l'original de
ces divers journaux.
Il serait aussi extrêmement intéressant de traduire,
plus tard,
journal de ANDIA Y VARELA, grand observateur et compi¬
lateur des us et coutumes des tahitiens ; comme aussi de publier
le premier dictionnaire tahitien tel que le firent les premiers
étrangers qui habitèrent cette île.
L'étude du Dr CORNEY restera toujours la mine précieuse,
parce que unique, de l'ethnologie et du folklore de Tahiti lors de
sa découverte (1).
le
Cl; Tableau des bateaux visiteurs de Tahiti après sa découverte par Wallis.
Dates du
Noms
H. M. S.
Dolphin ( WALLIS) Découverte
i Frégate Boudeuse (BOUGAINVILLE)
I Flute Etoile (G1RAUDAIS)
II. M. S. Endeavour (COOK)
Frégate A^ti/aXBOENECHEA)
II. M. S. Resolution
(COOK)
Frégate Aguila (BOENECIIEA)
'/ Brigantiue Jupiter (ANDIA)
Frégate Aguila (LANGARA)
Séjour des Padres et de MAXIMO
i.
Société des
Études
séjour
21 juin-27 juillet -1767
6 avril-io avril 1768
—
—
13 avril-13 juillet 1768
19 nov.-20 déc. 1772
17 août-ler sept. 1773
27 nov.-26 janv. 1774-75
—
Durée
36 jours
9 jours
—
—
90
30
15
60
jours
jours
jours
jours
—
3 nov.-12 nov. 1775
9 jours
27 nov.-12nov. 1774-75 350 jours
Océaniennes
Ëile constitue l'histoire la plus ancienne et la plus véridiquë
ce qu'était Tahiti de 1772 à 1777. Aussi la Société remercie-tclleM. PUGEAULTqui, par sa traduction, permet aux Sociétaires
de se faire une idée de ce qu'était Tahiti il y a 157 ans.
De tous les journaux relatant cet essai espagnol, celui de MA¬
XIMO RODRIGUEZ est de beaucoup le plus intéressant. En effet,
de
divers commandants n'ont pas plus de valeur que
ou de BOUGAINVILLE. Ils jugent en passant et,
ceux
de
ceux
de COOK
ces
ignorant la langue indigène, ils doivent nécessairement procéder
souvent par suppositions, tandis que Maximo a apprit le tahitien
de 1772 à 1777 inclus, d'abord sur le navire avec 4 tahitiens em¬
barqués. puis chez eux et avec eux. une année entière. Son jour¬
nal est même de beaucoup plus intéressant que celui des Padres
qui notèrent les incidents de tous les jours, mais ne sortirent
jamais de Tautira et ne surent jamais bien le tahitien.
Maximo lui, alla partout dans l'île, prit part à toutes les fêtes et
cérémonies, de telle sorte qu'il devint très populaire et l'ami in¬
time des principaux Chefs.
Maximo était jeune, robuste, intrépide et officier dans la ma¬
rine espagnole. On 11e pouvait pas faire un meilleur choix pour
laisser aux Padres un homme qui pourrait leur être utile et pour
gagner le cœur des tahitiens à la cause espagnole.
La Rédaction.
JOURNAL
à
tenu
par
l'interprète .Maximo Rodi-ipez
l'ile d'Auiat alias "OTAH1TI " 1 774-i
775,
frégate de Sa Majesté, \'"Aguila" anciennement appelée,
Magdalena" et le convoyeur " Jupiter" (ancien San
Miguel) firent voile du port de Callao pour l'ile d'Otahiti le 20
septembre 1774.
L'expédition avait pour chef Don Domingo Boenechea, qui dans
la marine royale avait le grade de capitaine de frégate. Nous arri¬
vâmes à Otahiti le 17 novembre de la même année.
Le même jour une embarcation du bord sous la conduite du
lieutenant de vaisseau Don Raymundo Bonacorsi et du lieutenant
d'infanterie de marine Don Diego Machao, alla reconnaître le
La
"Santa Maria
meilleur havre pour ancrer
Société des
les navires. Je reçur l'ojdrc de les sui
Études
Océaniennes
vrè
indien natif d'Otahiti,
indigènes appelaient Pautu.
avec un
et les
que nous
appelions Thomas
Nous prenons la passe de "Santa Maria
Magdalena " alias Guay
(i). C'est dans cette baie qu'en 1772, l'Aguila, avec le
même commandant et
également au mois de novembre avait
urua
jeté l'ancre. Quelques piroques s'approchent de nous et ceux qui
les montent réclament Thomas Pautu
(2) Manuel Tetuanui, Fran¬
co Oheyao et
Tipitipia. (Ces deux derniers étaient décédés, l'un
au port de
Valparaiso et l'autre à Lima ); les indigènes avaient en
effet appris par les marins du
Jupiter, arrivé 7 jours avant nous,
que leurs camarades d'Otahiti arrivaient par la
frégate.
Dans une des
piroges Pautu reconnait son beau-frère nommé
Temaeha et l'interpelle. Aussitôt Temaeha saute dans
notre ba¬
teau, enlace Pautu de ses bras et l'embrasse
tempes, comme c'est leur coutume.
Pendant
ce
temps les indigènes qui
nous
sur
les
joues et les
en pi¬
rivage.
après en
accompagnent
rogue ont crié les nouvelles à ceux qui se trouvent sur le
Et voici qu'un oncle de Pautu arrive
quelques instants
pirogue et les
yeux
baignés de larmes
nous
invite à venir chez
lui.
Comme c'est notre
case,
devant laquelle
direction,
nous
allons accoster
se trouve rassemblée
une
en face de sa
foule énorme de
femmes et d'hommes, les uns manifestant
bruyamment leur joie
tandis que les autres pleurent et
gémissent des tristes nouvelles
reçues des deux décédés.
Nous entrons dans la case où se trouvent la mère et
les deux
sœurs de Pautu. Elles font un tel vacarne
qu'il est impossible de
s'entendre causer.
Elles nous enlacent de leurs bras, nous embrassent
en nous
disant que nous sommes de bons et fidèles amis.
Sur ces entrefaites il se mita
pleuvoir ce qui nous obligea re¬
tarder notre depart.
Nous demandons où
se trouve
à
sont
les parents de Tetuanui dont la
quelque distance de celle où
nous sommes
des
case
et aussitôt
indigènes courent les chercher.
Dans l'intervalle d'autres
indigènes me conduisent à la maison
du père du défunt
Tipitipia. Je le trouve assis sur le sol, entouré
(1) Vaiurua, Tautira.
(2) Ces quatre indigènes avaient été emmenés
VAguila, à sa première expédition de 1772.
Société des
Études
en
Amérique du Sud
Océaniennes
par
-t 49
__
—
Jo
quelques amis. Il paraît profondément accablé de la triste
son fils. J'essaie de le consoler, lui disant
que tout au monde avait été fait pour rendre la santé à son enfant,
mais que tous nos soins avaient été inutiles. Il me fit asseoir vers
lui et m'embrassa. Puis la conversation roula sur le
séjour que
j'allais faire dans l'île, ce dont ils parurent tous très heureux.
On m'appelle ensuite pour parler aux parents
du jeune Tetuanui et comme tout anxieux et tout en larmes, ils me questionnent
à son sujet, je leur explique que Tetuanui avait souffert à bord
d'une petite plaie à l'épaule occasionnée
par une éruption qu'il
avait eut pendant la traversée et que ce mal non encore
guéri
l'avait empêché de descendre à terre. Et cette explication les
nouvelle de.la mort de
consola.
Le
grain étant maintenant passé, notre officier nous donna
d'embarquer, ce qui ne se fit pas sans difficulté a cause de
la cohue et du va-et-vient des indigènes.
Enfin nous embarquons et continuons notre route à l'inférieur
des récifs dans la direction de la baie de " La Santissima Cruz",
autrement appelée " Ohatutira" (Tautira). Là, nous dit-on, il
y a
un port bien abrité, avec bons fonds
; en outre, les deux princi¬
paux Arii, Otu et Vehiatua et leurs familles y sont réunis, en
grandes fêtes, pour commémorer leur réconciliation après divers
l'ordre
conflits armés
Nous
survenus
entre
eux.
voguions depuis quelques temps lorsque
une
pirogue
double vint à notre rencontre. Elle
l'Arii Vehiatua et
sa
transportait le beau-père de
mère nommée Opo. Ayant accosté, tous deux
montent dans notre bateau et
nous
souhaitent affectueusement
la bienvenue.
Je demande au beau-père Titorea (car tel est son. nom) où se
son gendre et du doigt il
me montre une pirogue venant
trouve
à toute allure à notre rencontre. L'Arii Vehiatea accoste, saute
dans notre bateau et nous embrasse.
Nous remarquons
alors l'attitude très respectueuse de Pautu
chef. Il enleva son chapeau et se mit à se
déshabiller pour offrir ses vêtements à son Arii. Nous l'en empê¬
chons mais il voulut absolument lui donner sa ceinture à laquelle
était suspendue une petite sacoche de filet. Nous n'y mîmes pas
opposition car il nous dit qu'il était indispensable qu'il offrit un
présent à son chef.
Nous remarquons, également que l'arii Vehiatua avait phy.squement fort décliné depuis que nous l'avions vu à notre première
en
présence de
son
Société des
Études
Océaniennes
—
150
—
expédition et nous apprenons que la raison de ce déclin provient
l'absorption d'un breuvage avec lequel les chefs ont coutume
de s'enivrer. Ce breuvage qu'ils nomment " ava " leur occasionne
des plaies squameuses par tout le corps.
de
•
A l'entrée de la baie de " Ohatitura"
quelques pirogues vinrent
transportait l'arii Otu. Nous l'invitons à
venir vers nous et aussitôt il quitte ses parents et ses sœurs et
monte dans notre bateau avec son frère
Hinoy, un grand et beau
garçon d'environ iôans.
Otu me témoigna une telle amitié, qu'au bout d'un moment
il m'adopta pour frère et me dit que désormais il me considérait
comme fils de ses propres
père et mère et de ses autres proches.
En outre il échangea son nom pour le mien ce qui à Otahiti est
la plus insigne des faveurs. <
Pendant que ces deux chefs nous prodiguaient leurs attentions
les sondages continuaient. Le havre de Ohatitura tut trouvé excel¬
lent pour un ancrage ; en outre le terrain du
rivage semblait très
appropiié pour y construire la maison des Pères.
Nous apprenons par les indigènes que récemment deux vais¬
seaux ont quitté Otahiti et nous eûmes la certitude
que ces ba¬
teaux étaient anglais car les indigènes reconnurent le
pavillon de
cette nation quand nous le leur montrâmes. Ils
ajoutèrent que
ces vaisseaux avaient d'abord ancré à Ohatitura puis ensuite a
Matabay (Matavai). Ce dernier port se trouve dans le domaine
d'Otu. Ce dernier pour bien nous persuader de ce qu'ils avan¬
çaient nous fit cadeau d'une petite gibecière faite en fibre de"tipa"
ou de feuilles de
palmes tressées, ornée de petits boutons de
verroteries blancs et noirs, ajoutant qu'ils s'était procuré cet objet
à
nous.
L'une d'elles
.
à bord des dits bateaux et il
nous
donna les
noms
des
comman¬
dants
quiétaient"Otute" etOpono" (Cook et Feurnaux).
Nos travaux de sondage étant terminés pour ce port, nous
allons à terre pour nous procurer de l'eau, du bois et du feu.
En peu de temps nous eûmes tout cela, mais quelle difficulté,
et quelle gêne pour retourner à notre embarcation dans la cohue
d'indigènes qui nous retardait ! Il fallut qu'Otu envoie ses servi¬
teurs armés de bâtons pour nous livrer
passage. Les indigènes
étaient tellement distraits par ce qu'ils voyaient qu'ils n'enten¬
daient pas les ordres donnés et que ce n'est qu'à
coups de bâton
qu'ils s'écartaient un peu.
Otu
nous
fit cadeau d'un énorme thon
Société des
Études
qui fit notre souper.
Océaniennes
—
Nous
4SI
passâmes la nuit dans
—
notre bateau ancré
au
large du
rivage.
Sur notre demande le
le lendemain matin
aux
provisions fraîches
pour
beau-père de Vehiatua promit de porter
vaisseaux de l'herbe pour le bétail et des-
le bord.
(16 novembre).
A la
pointe du jour nous partons pour le port de la " Virgin',
alias Anuhi (Pueu) pour y faire les sondages. C'est là que
1 arii
Pahairiro commande. Les deux Arii, Otu,
Vehiatua, leurs frères
aussi le beau-frère de Pautu vinrent avec nous.
cours de route m'étant mis la
poitrine à l'air Otu aperçut le
chapelet que je portais autour du cou. 11 me demanda ce que
c'était.
et
En
Je lui répondis que c'était un talisman que portaient les chré¬
tiens pour se préserver du démon ou Tupapahau,
comme ils
disent. Cela parut beaucoup l'intriguer. Ensuite Pautu lui, dit
que lui aussi était chrétien et il lui raconta toutes les cérémonies
du baptême que l'on reçoit lorsqu'on est suffisamment instruit
des
mystères de notre sainte foi. Sur ce Otu demanda si lui aussi
pourrait pas être instruit et recevoir une croix comme la mienneet je lui dis que plus tard il recevrait tout cela.
Au port d'Anuhi nous faisons les sondages de la passe
puis
nous allons à terre où nous rencontrons une
grande foule d'in¬
diens. Nous approchons de l'endroit où F Arii se tient avec son
épouse, entouré de tous les gens de son district. Pahairiro nous
embrasse et nous offre quelques mesures d'étoffe indigène dont
ils font leurs vêtements. Sa joie fut grande en voyant Pautu.
Notre officier lui fit cadeau d'une hache et de deux petits couteaux.
En retour Pahairiro nous fit apporter un cochon que nous
n'accep¬
tâmes pas. Ce chef est un vieill ard de 70 ans environ, puissant
et bien charpenté et avec une chevelure grisonnante.
Nous prenons congé de Pahairiro et partons explorer le port de
Hitiaa ou Saint Nicolas. C'est là que l'arii Oreti exerce le pouvoir.
Les arii nous quittent à cet endroit et nous partons à la rame en
dehors des récifs. Nous voyons des indigènes en train de pêcher
'•e
et
nous
leur demandons où
se
trouve leur chef Oreti. Ce dernier
prévenu vient à
nous, monte dans notre bateau et nous presse
vivement de venir chez lui. Nous lui répondons que nous sommes
uniquement
il
se
venus pour
faire les sondages de la baie et aussitôt
met à nous montrer où sont les fonds de sable ou les fonds
Société des
Études
Océaniennes
de rochers et la sonde
nous
montre
qu'il
ne se
trompe
pas.
\\
montre
également l'endroit où un vaisseau perdit ses ancres
et nous avons beaucoup déraison de croire
que ce vaisseau était
français, car c'est celui qui emmena Outuru, comme on le verra
nous
par la
Les
suite de
ce
récit.
sondages nous montrèrent clairement que l'ancrage n'était
bon à cet endroit tant en raison de la houle que du manque
pas
d'abri contre les vents dominants.
Nous allons à terre faire de l'eau et du bois et
après nous être
procuré tout cela nous éloignons notre bateau du rivage et jetons
le grappin. Mais voici que des
pirogues viennent autour de nous
et en si grand nombre qu'il nous est
impossible de préparer notre
repas.
Les indigènes font un tel bruit et sont si
leurs
menus
objets
que ne sachant
plus
empressés d'échanger
faire pour nous en
que
débarrasser, nous leur demandons d'aller nous chercher des rats,
l'on trouve en grande quantité dans toute l'île et à
chaque
pas, leur disant que nous ferons des échanges avec ces rats.
Nous sommes un peu débarrassés
par cet artifice, sinon de tous
au moins d'une bonne
partie des curieux. Mais pas pour long¬
temps. Au bout d'un moment les indigènes reviennent, qui en
pirogues, qui à la nage et rapportent les rats demandés. Au fur
et à mesure qu'ils se
présentent nous les leur faisons jeter a l'eau
et ils s'aperçoivent
que nous les avons joués et se mettent à rire
que
de notre bon tour.
Nous donnons quelques menus
objets aux filles d'Oreti. Ce
chef est un homme de haute taille au teint
très foncé. 11 porte
sur le front une
large et profonde cicatrice: c'est un homme
d'une bravoure éprouvée et d'une
Nous retournons
au
intelligence très vive.
Virgin" pour prendre
port de "La
notre
repas. Nous arrivons au coucher du soleil et jetons
le grappin.
Je vais à terre avec Pautu et nous demandons à Pahairiro de
l'eau, du bois et du feu. Tout ceci nous fut donné. Nous causons
pendant un petit moment : Pahairiro parut aussi surpris
que satis¬
fait d'apprendre que
j'allais dans l'île avec les Pères. Nous retour¬
nons ensuite au bateau et la nuit se
passe sans incident.
(17 novembre).
Nous levons l'ancre à la
pointe du jour, ce voyant, Pahairiro
vient en pirogue et nous fait cadeau de
cocos et de vêtements
d'étoffe indigène. Après
cela nous faisons route pour Ohatitura
Société des
Études
Océaniennes
où à notre arrivée
nous
sommes
salués par
de nombreux indi¬
gènes
en pirogues.
L'une d'elle avec
cabine, transportait les sœurs de l'arii
(i) me fit venir dans sa pirogue et nous accompagna
jusqu'au port de Guayurua où se trouvait son frère Vehiatia. En
cours de route elle me fit cadeau de vêtements d'étoffe
indigène
et d'une natte mais elle refusa
d'accepter la hache que je lui offris,
qui est cependant un cadeau très apprécié à Otahiti.
Nous allons ensuite à la maison de Pautu qui est placée dansune région que l'on nomme Apua. Nous faisons
provisions d'eau
et de bois à brûler. Pautu hésita beaucoup à remonter dans le
bateau quand nous l'avons appelé, en voyant ses sœurs tout'en
une
Otu. Elle
larmes.
Nous partons enfin et un peu plus loin nous remarquons une
grande foule d'indigènes sur le rivage et parmi eux les deux arii.
Ces derniers vinrent au bateau nous saluer et ayant appris que
nous allions au port de Oyautea (Vaiaotea) Otu retourna a terre.
Seuls Vehiatua et un de ses hommes de confiance, nommé:
Taruri, nous accompagnent. Comme nous allons à la voile nous
prenons leur pirogue en remorque. Un peu après midi, sur la
demande de Vehiatua, nous lâchons l'amarre et ses gens vont
chercher à terre quelques provisions.
Vers trois heures nous arrivons à Oyautea et le bateau est ancré
à une petite distance du rivage. Don
Diego Machao, Vehiatua,
Pautu, Taruri et moi descendons à terre pour visiter l'endroit.
Nous entrons d'abord dans une maison de grandes dimensions
uans
laquelle se trouvent deux superbes pirogues d'au moins 30
varas (2) de long avec deux cabines. Il y en a d'autres aussi de
mêmes dimensions mais avec une petite plateforme à l'avant
qu'ils appellent " paepae", où il y a place pour huit hommes.
Nous demandons quelle est l'utilité de cette plate forme et ils
nous répondent que c'est pour y placer des combattants dans les
batailles navales, lorsqu':'s font la guerre à Moorea, l'île voisine.
Nous visitons ensuite
une
autre maison où se trouvent d'autres
pirogues mais d'un modèle différent, qu'ils appellent "pahi" ils
utilisent ces dernières pour les longs voyages dans les îles voi¬
sines
(1) Le récit passe du pluriel au singulier, ou 11e sait
Omore
de pua
pleure
pointe mince est cassée,
Maraetapu, le héros de Ataaroa est tinitaua (5).
:
:
couronne
vent de l'est.
lance.
(3) Teva i tai, Teva i uta, Parionuu : divisions de Tahiti.
(4) Tuarere : dos volant, vole par le dos.
(5) Tinitaua : chanté par des milliers, dont la renommée est
liers de personnes.
Société des
Études
Océaniennes
connu
de mil¬
Oî^ïfO^S
CONFÉRENCE
ET
par
Fait partie de Bulletin de la Société des Études Océaniennes numéro 28